Commission des affaires européennes

Réunion du 6 juin 2013 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Nous devons nommer deux rapporteurs sur des textes retenus non au titre de la subsidiarité mais pour examen au fond : d'une part, sur deux propositions de règlement européen (COM 262 et 267) concernant la reproduction et la protection des végétaux ; d'autre part sur deux propositions de règlement européen (COM 260 et 265) concernant la santé animale. Je vous propose de nommer MM. Richard Yung et Jean Bizet sur le premier de ces sujets, Mme Bernadette Bourzai sur le second - elle pourra mettre à profit son expérience acquise à la présidence de la mission commune d'information sur la filière viande en France et en Europe.

Il en est ainsi décidé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Merci de m'avoir nommé co-rapporteur sur les questions végétales. Je m'y étais intéressé déjà lors l'examen de la directive 98/44 relative à la propriété intellectuelle et à la brevetabilité du vivant. C'est un sujet sur lequel la France, premier semencier européen devant les Pays-Bas, est pionnière depuis la convention internationale de 1961 pour la protection des obtentions végétales (UPOV). A l'époque, nous avions renforcé la sécurité du dispositif. Mais les choses ont dérivé, et les semenciers nous interpellent. C'est pourquoi je défends les certificats d'obtention végétale, afin d'empêcher les multinationales - rarement françaises, le plus souvent américaines - de déposer des brevets couvrant toute la chaîne du vivant. Le Sénat se doit d'être très attentif à ces questions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Les relations franco-allemandes ont été au coeur de la construction européenne. Il est donc indispensable de réfléchir à leurs perspectives. On doit le faire à partir d'un constat simple : l'Europe ne peut bien fonctionner que grâce à l'entente entre nos deux pays. Relancer l'ambition européenne exige de ranimer la flamme franco-allemande. Or l'Europe est confrontée à de véritables urgences sur le plan économique, social et financier. Au-delà, c'est le sens même du projet européen qui s'est effiloché depuis la fin du conflit Est-Ouest, et plus encore depuis la crise. Les discussions sur le cadre financier pluriannuel ont révélé la prédominance des intérêts nationaux sur l'intérêt collectif.

Dès les années vingt, Aristide Briand et Gustav Stresemann furent des acteurs majeurs de la Société des nations ; après la déclaration Schumann et la création de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA) en 1951, De Gaulle et Adenauer signèrent le traité de l'Élysée le 22 janvier 1963. C'est au couple Giscard-Schmidt que nous devons la création du Conseil européen en 1974 et celle du système monétaire européen en 1979, et au couple Mitterrand-Kohl celle de la chaîne Arte en 1990, de l'Eurocorps en 1992 ainsi que le traité de Maastricht sous l'impulsion de Jacques Delors.

La force de l'axe franco-allemand et son rôle d'entraînement vis-à-vis des autres partenaires européens ont été illustrés plus récemment par la création de conseils conjoints des ministres franco-allemands, décidée à l'occasion de l'anniversaire du traité de l'Élysée en 2003, ou par les initiatives franco-allemandes, au sein de la Convention européenne, à la Conférence intergouvernementale de 2004 sur le projet de traité constitutionnel, puis sur le traité de Lisbonne. En 2010, la déclaration franco-allemande de 2010 sur la réforme de la gouvernance économique européenne a établi des priorités communes, et l'adoption d'un régime matrimonial franco-allemand a ébauché un possible régime européen. Enfin, lors du 50ème anniversaire du traité de l'Élysée, il y a quelques semaines, nos deux pays ont souhaité présenter une position commune sur le parquet européen.

Reste que le moteur franco-allemand a besoin d'être relancé. Les conflits Est-Ouest se sont estompés, et l'Allemagne, plus autonome, plus solide économiquement et forte de 18 millions d'habitants de plus que la France, regagne en Europe une position centrale. Elle a surmonté avec succès trois chocs majeurs : la réunification, l'abandon du Deutsche Mark pour l'euro, et la mondialisation. Elle a su restaurer sa compétitivité tandis que celle de la France déclinait. Cela s'observe même dans le domaine agricole, où l'Allemagne a déjà dépassé la France sur la filière lait comme sur les viandes blanches et les légumes. Cette situation est inquiétante car les divergences de performances s'accentuent : le commerce extérieur de l'Allemagne dépend de moins en moins de la zone euro - qui représente aujourd'hui 36 % seulement des échanges allemands.

Les deux pays doivent coopérer bien davantage. Je ne dis pas qu'il faut transposer le modèle allemand mais au moins s'en inspirer ; et agir pour réduire le différentiel de compétitivité. Comme l'a dit le président de la République François Hollande à Leipzig lors du 150ème anniversaire du SPD : « le progrès, c'est aussi faire des réformes courageuses pour préserver l'emploi et anticiper les mutations sociales et culturelles comme l'a montré Gerhard Schröder. On ne construit rien de solide en ignorant le réel. »

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Vous êtes d'accord avec François Hollande, alors ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

De telles réformes ne sont pas faciles à accomplir - le chancelier Schröder en a d'ailleurs payé le prix. Elles le sont encore moins dans notre pays où les syndicats ont une autre culture. Le contexte européen rend cependant cette convergence incontournable. Comme le soulignait Louis Gallois dans un récent colloque, il ne peut y avoir d'euro sans convergence économique. La renationalisation des politiques économiques ne pourrait mener qu'à une impasse. Les traités, en dernier lieu le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance en Europe (TSCG), rendent inéluctable une coopération très étroite. Les politiques économiques et budgétaires doivent impérativement être coordonnées.

La France et l'Allemagne se sont certes opposées sur la construction européenne, la première privilégiant le Conseil européen, la seconde le Parlement européen, dans une approche plus fédérale. Rappelons aussi que l'Allemagne doit à chaque avancée de la construction européenne obtenir l'aval de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe ; et la Chancelière, l'assentiment du Bundestag. Reste que les propositions d'approfondissement de nos relations n'ont pas abouti : ni le projet de « noyau dur » de Wolfgang Schäuble et Karl Lamers en 1993, ni l'idée d'une « union renforcée », esquissée au début des années 2000 par Pascal Lamy et Dominique Strauss-Kahn, n'ont eu de suites.

Nous ne devons pas craindre un débat approfondi sur les questions qui peuvent diviser. Mais un préalable doit toujours être respecté : la discussion doit se dérouler dans un climat de confiance et d'ouverture réciproques. Veillons à rester prudents dans l'expression publique, afin de ne pas blesser nos amis allemands. Ne leur faisons pas de faux procès : l'Allemagne a admis les interventions hétérodoxes de la BCE, elle a accepté des délais plus longs pour permettre aux États membres concernés de rétablir leur situation budgétaire ; et les récentes négociations sociales en Allemagne ont abouti à une augmentation des salaires qui donnera un peu d'air à la croissance en Europe. Une meilleure convergence des salaires pourrait donc s'engager, même si l'Espagne reste très en-deçà du niveau français et même allemand.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Il semble que le chômage diminue. Mais nous sommes quant à nous coincés entre la compétitivité-prix des pays du Sud et la compétitivité-qualité des pays du Nord.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Nous sommes à la jonction des deux mondes, nous devrions avoir les deux !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Si l'on peut souhaiter que l'Allemagne soit plus volontaire sur l'Union bancaire, la France n'en doit pas moins conduire les réformes structurelles indispensables, restaurer sa compétitivité, assainir ses finances. Urgentes depuis plus de dix ans déjà, ces réformes auraient pu être conduites durant le second mandat de Jacques Chirac : il y avait une fenêtre de tir. Mais on ne refait pas l'histoire...

Le moteur franco-allemand doit repartir. Lors de sa conférence de presse du 16 mai, le Président de la République a indiqué que l'Europe ne pouvait avancer sans le couple franco-allemand. J'y vois l'ouverture d'une nouvelle ère après une année de relations parfois difficiles. La rencontre du 30 mai entre le Président de la République et la Chancelière a abouti à un document commun dans la perspective du Conseil européen de juin. C'est un signe supplémentaire de réchauffement des relations bilatérales.

Les voies tracées par le Président de la République dans sa conférence de presse sont les suivantes : un gouvernement économique de la zone euro, un plan d'insertion des jeunes, une stratégie d'investissements notamment pour les nouvelles industries et pour les nouveaux systèmes de communication, une communauté européenne de l'énergie destinée à coordonner les efforts sur les énergies renouvelables et à assurer la transition énergétique. La politique européenne de l'énergie est loin d'être un succès : harmoniser les infrastructures de transport c'est bien, mais l'exemple des États-Unis, où l'énergie est aujourd'hui bien moins chère qu'en Europe, nous commande d'être plus ambitieux.

Paris et Berlin ont annoncé un plan commun pour l'emploi des jeunes. Les deux ministres de l'énergie, Peter Altmaier et Delphine Batho, ont récemment cosigné une tribune dans laquelle ils indiquent vouloir « faire de la transition énergétique le nouveau moteur du couple franco-allemand pour les énergies renouvelables ». Ils annoncent la création d'un office franco-allemand pour les énergies renouvelables. J'observe que nous avons une expertise dans d'autres domaines énergétiques : veillons à ne pas limiter notre coopération aux énergies renouvelables.

En matière de gouvernance, le Président de la République a proposé d'instaurer un gouvernement économique de la zone euro, qui se réunirait tous les mois autour d'un véritable président nommé pour une durée longue et affecté à cette seule tâche. L'Eurogroupe, consacré par le traité de Lisbonne, se réunit déjà tous les mois, mais son président est élu pour un mandat limité à deux ans et demi et il assume aussi des fonctions nationales. Un mandat plus long et exclusif serait un gage d'efficacité supplémentaire. Le 30 mai, le Président de la République et la Chancelière ont retenu le principe de sommets plus réguliers de la zone euro et d'un président de l'Eurogroupe à temps plein, disposant de moyens renforcés. Ils ont également invité le Parlement européen à se doter de structures dédiées pour la zone euro. Le contrôle démocratique exercé au niveau national comme au niveau européen serait en outre renforcé. Les niveaux national et européen sont toutefois si imbriqués que je préférerais à cette césure l'idée d'un « fédéralisme coopératif ».

N'éludons pas les questions plus profondes : jusqu'où faut-il renforcer la gouvernance de la zone euro ? Comment s'articulera-t-elle avec l'ensemble institutionnel de l'Union européenne ? Nous ne pourrons progresser sans un noyau dur aux commandes de la zone euro. C'est là que le moteur franco-allemand prend tout son sens.

La convergence économique et sociale au sein de l'Europe doit aussi être un sujet franco-allemand. Le Président de la République a indiqué que le gouvernement économique de la zone euro « harmoniserait la fiscalité, commencerait à faire acte de convergence sur le plan social par le haut et engagerait un plan de lutte contre la fraude fiscale ». Tout cela constitue à mon avis un préalable à une capacité européenne à lever l'emprunt. Le Président de la République et la Chancelière souhaitent développer une politique économique de la zone euro axée sur la compétitivité, la croissance et l'emploi. Parmi les domaines d'action, ils mentionnent expressément la convergence des systèmes fiscaux et la dimension sociale, au moyen de salaires minimaux nationaux, définis par les législateurs ou par des conventions collectives. Les contrats de compétitivité et de croissance et les modalités d'un fonds de la zone euro seront définis au second semestre.

En réalité, il ne pourra pas y avoir mutualisation des dettes sans un véritable partage de la souveraineté. La notion d'union politique est à nouveau invoquée, mais le concept est encore flou et personne, de part et d'autre du Rhin, ne semble pressé de relancer le débat institutionnel dans un contexte économique particulièrement difficile.

Reste que la coopération franco-allemande pourrait jouer un rôle d'impulsion dans deux autres domaines : d'une part, l'espace de liberté, de sécurité et de justice ; d'autre part, la politique étrangère et de défense.

Bref, la relation franco-allemande demeure incontournable, c'est bien pourquoi des incidents comme ceux des dernières semaines sont regrettables. Elle ne pourra fonctionner de manière équilibrée que si la France retrouve sa compétitivité et assainit ses finances publiques. Gardons-nous des mauvais procès : c'est le laxisme budgétaire qui a conduit de nombreux pays européens à connaître aujourd'hui crise et sous-emploi, même si le renflouement du secteur financier en 2008-2009 a lourdement aggravé le problème. Comme le soulignait Mario Monti au colloque de Sciences-Po sur l'avenir de l'Europe, la dette a paralysé la capacité des politiques économiques. Il n'y a pas une crise de l'euro - son cours est aujourd'hui supérieur à ce qu'il était lors de son introduction -, mais une crise des finances publiques.

Des finances publiques bien gérées sont un facteur de croissance et d'emploi. Il est donc injuste de taxer l'Allemagne d'égoïsme quand elle promeut la discipline. Une véritable mutualisation au sein de la zone euro exige de la confiance entre États membres, donc le respect des critères qui résultent des traités. L'Union européenne est désormais prête à plus de flexibilité vis-à-vis des États qui se sont engagés sur la voie de l'assainissement.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je félicite le rapporteur pour ce travail, qui arrive fort à-propos, alors que certains événements faisaient douter de l'avenir de la relation franco-allemande. J'apprécie en outre la tonalité apaisante de son propos - en espérant qu'elle ne témoigne pas d'un excès d'optimisme. La prudence dans l'expression publique, j'en conviens, est particulièrement souhaitable.

La France et l'Allemagne doivent certes converger, mais il restera toujours de fortes différences entre les deux pays. Les réactions à la décision de la Commission européenne de taxer l'importation de panneaux solaires chinois est une nouvelle illustration de la divergence de certains de nos intérêts... Réduisons les différences qui peuvent l'être et acceptons les autres.

Les dernières propositions de François Hollande et d'Angela Merkel donnent la marche à suivre. Il conviendrait toutefois d'insister davantage sur la réhabilitation des objectifs sociaux de l'Union, de plus en plus marginalisés. Le social fait partie du pacte européen originel, ne l'oublions pas. Vous avez parlé du niveau de salaire horaire : ce n'est pas le seul critère à prendre en compte, car le marché du travail allemand est déstructuré par le recours aux emplois précaires et au temps partiel, ce qui fait exploser la pauvreté dans certaines catégories sociales. Réfléchissons à un salaire minimum européen - au moins applicable, dans un premier temps, à un noyau dur d'États membres.

Que peut faire notre commission pour entretenir le dialogue entre nos deux pays ? Sous la présidence d'Hubert Haenel, nous avions effectué une visite de travail avec nos collègues du Bundesrat au Mont-Saint-Michel... où nous avions été accueillis par M. Bizet. Un déplacement à Berlin est-il envisageable, sans visée technique, simplement pour entretenir le dialogue ?

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Les déplacements de notre commission sont limités par ses crédits, qui ont diminué. Notez que le président du Sénat a choisi Berlin pour son premier déplacement officiel il y a un an - je participais au voyage. Et que les membres du bureau de notre commission ainsi que le groupe d'amitié France-Allemagne étaient à Berlin pour l'anniversaire du traité de l'Élysée. Nos contacts plus poussés sont avec le Bundesrat. Il est toutefois difficile de travailler avec les membres d'une assemblée qui se réunit douze jours par an, et dont la présidence est tournante, confiée chaque année à un Land différent. Nous aurions aussi bien vocation à nouer des contacts au Bundestag, mais ses membres ont naturellement noué déjà des relations privilégiées avec les députés français.

Je retiens le principe d'un déplacement en Allemagne mais il faudrait éviter de nous y rendre durant la période électorale, à l'automne prochain.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je souhaiterais que cette communication débouche sur un rapport.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Je félicite à mon tour le rapporteur : son travail arrive à point nommé. Nous avons besoin d'un bilan historique pour éclairer l'avenir. Je soutiens moi aussi la publication du rapport.

Continuons à travailler à tous les niveaux. Dans nos territoires, entretenons la flamme de l'amitié franco-allemande. Ne laissons pas se banaliser l'anti-germanisme, ni même se développer une indifférence à l'égard de notre voisin. La politique de jumelage, par exemple, nourrit la connaissance et l'appréciation mutuelles. L'Office franco-allemand pour la jeunesse fête ses cinquante ans : soutenons les rencontres de la jeunesse. Privilégions l'apprentissage de la langue allemande, qui décline comme celui du français en Allemagne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Humbert

Je félicite également le rapporteur. Ce sujet est essentiel pour l'avenir de notre pays, et pour celui de l'Europe. Peut-être le rapport écrit pourrait-il être étoffé ? Je souhaiterais par exemple que le voile soit levé sur certains aspects, comme l'attitude allemande à l'égard de la Grèce. Une mise au point serait bienvenue pour ne pas laisser accréditer des informations inexactes.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Bertrand

À mon avis, en étant trop policé, j'allais dire trop gentil, on trahit l'amitié franco-allemande. Par peur de mettre à mal son acquis le plus important, la paix, nous n'osons rien dire. La vérité, c'est que l'Allemagne ne joue pas le jeu en matière de croissance, d'emploi, de salaire minimum, ni en matière sociale.

Ma ville est jumelée avec Wunsiedel en Allemagne. Mes discours sont souvent traduits en direct par mon directeur de cabinet, qui est franco-allemand. Cela ne m'empêche pas de dire la vérité ! Lors d'une réunion récente, un ancien ministre des affaires européennes expliquait au groupe RDSE qu'il fallait mettre des gants pour traiter avec les Allemands et contourner les sujets de désaccord : à mon avis, c'est le meilleur moyen de donner l'impression aux Français qu'on ne fait rien, et aux Allemands qu'on est d'accord avec eux sur tout ! Et doit-on glisser vers un rapport de vassalité parce que l'un est moins bon que l'autre ? Au bistrot, à la chasse ou aux champignons, les Français en parlent, ils perçoivent tout cela. Alors cessons de nous excuser à tout propos, et en préambule à tout débat, de notre gestion publique, et ayons le courage de la franchise. La fraternité et l'affection qui nous unissent aux Allemands l'exigent.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Ces sujets sont très complexes. Je comprends le point de vue d'Alain Bertrand. Nous avons souvent le sentiment d'être les élèves du professeur allemand, mais au dîner donné à l'invitation du Bade-Wurtenberg, à l'occasion du 50ème anniversaire du traité de l'Élysée, j'ai été frappé au contraire par l'humilité des élus allemands, et par les nombreuses attentes qu'ils formulaient à notre égard. Entre Européens, il ne faut pas jouer aux donneurs de leçons. À Chypre, lors de la réunion des présidents des commissions des affaires européennes de juillet 2012, j'ai défendu l'idée qu'il n'y avait pas d'États vertueux par nature. À accuser la Roumanie, nous en oublions nos propres turpitudes, celles de douaniers à Roissy ou celles du Président allemand contraint l'an dernier à la démission. Le respect des engagements est un combat permanent.

Cela vaut tout autant en matière économique, comme l'a rappelé Mme Tasca : la médaille allemande comporte naturellement un revers. C'est pourquoi je m'étais réjoui que le Président de la République cherche à coopérer davantage avec l'Italie pour défendre une vision européenne plus tournée vers la croissance.

Mon expérience des instances de coordination européenne me laisse toutefois penser que le plus souvent, on ne peut compter que sur la France et l'Allemagne pour faire avancer l'Europe. À Nicosie en avril dernier, où je représentais le président du Sénat à la réunion des présidents de Parlements de l'Union, la discussion sur la mise en oeuvre de l'article 13 du TSCG sur le contrôle parlementaire partait dans tous les sens : c'en était effrayant ! Heureusement, le représentant du Bundestag, celui du Bundesrat et le président du Parlement européen, Martin Schulz, ont recadré la discussion.

Les Allemands attendent beaucoup de nous. Ils ont parfois l'impression que nous les ignorons. Trouvons un nouvel équilibre, des poids et des contrepoids.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Oui. En outre, alternance ou non, il faut se retenir de prononcer certaines phrases. À Athènes, j'ai entendu des choses inacceptables, des références à la seconde guerre mondiale : les Allemands d'aujourd'hui ne sont tout de même pas responsables de ce qu'ont fait les nazis ! De même, évitons la caricature des cigales du nord de l'Europe et des fourmis du sud.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Nous sommes à la jonction de l'Europe du Nord et de celle du Sud : nous réalisons une synthèse.

Je vous propose que la communication donne lieu à la publication d'un rapport d'information, sous réserve que notre collègue étoffe son texte, notamment par des chiffres, et qu'il soumette le texte aux membres de la commission.

Il en est ainsi décidé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Nous vivons une époque où la moindre déclaration publique peut avoir des conséquences disproportionnées. Le populisme et la démagogie sont à nos portes. Maîtrisons notre expression publique.

Nos deux pays sont différents et complémentaires. Ils constituent le moteur de l'Union. Disons-nous la vérité. On n'arrivera à rien en envisageant de contourner l'Allemagne. Tous les présidents de la République, en début de mandat, ont cherché de nouveaux partenaires, avant de revenir aux fondamentaux, c'est-à-dire à la relation franco-allemande. Nicolas Sarkozy s'est rapproché du Royaume-Uni avant de se rendre compte que ce pays regardait toujours vers le large. François Hollande peut toujours chercher l'appui de Mario Monti, reste que le mécanisme européen de stabilité (MES) est financé à hauteur de 27 % par l'Allemagne et à 20 % par la France. Comme l'on dit dans nos campagnes, finalement, qui paye commande !

Le social n'est pas mon penchant premier, vous le savez. Mais je reconnais qu'on ne peut rien construire sans le social, aujourd'hui moins que jamais.

Je serais heureux de faire un rapport d'information à partir de ma communication. Il serait alors nécessaire de compléter certains points et d'approfondir certains autres, comme la perte de notre leadership agricole.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Oui, car la construction européenne était implicitement fondée sur une Allemagne industrielle et une France agricole.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Concernant les relations avec la Grande-Bretagne, j'ai perçu pour ma part le discours de David Cameron du 24 janvier de façon plutôt positive. Certes, il fait souffler un vent très libéral sur l'Europe. Mais il faut comprendre ces propos au second degré, c'est un Anglais qui parle. L'Europe ne peut se passer de l'importance, du savoir-faire et de l'ingénierie financière britannique. L'Europe et la France ne peuvent non plus se passer des partenariats noués avec le Royaume-Uni en matière d'armement et de défense. Là également, il faut se dire les choses, entretenir le dialogue.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Quand le projet de rapport sera finalisé, il sera transmis aux membres la commission et s'ils n'ont pas de remarques sur ce que M. Bizet y aura ajouté, nous le publierons.