Commission d'enquête Combattre la radicalisation islamiste

Réunion du 26 février 2020 à 16h30

Résumé de la réunion

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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Delattre

Mes chers collègues, nous recevons maintenant Madame et Messieurs les Recteurs de Versailles, Créteil et Paris.

Mme Charline Avenel, rectrice de l'académie de Versailles ; M. Daniel Auverlot, recteur de l'académie de Créteil, vous êtes accompagné, M. le Recteur, de votre directeur de cabinet M. Yohan Blondel ; M. Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris, vous êtes accompagné, M. le Recteur, de votre directeur de cabinet M. Gaspard Azéma.

Nous avons souhaité vous entendre dans le cadre de nos travaux pour que vous puissiez nous faire part de la manière dont vous appréhendez le phénomène de « séparatisme religieux » dont a parlé le Président de la République dans la réalité quotidienne des établissements scolaires, les moyens dont vous disposez et ceux dont vous auriez éventuellement besoin. Nous vous avons fait parvenir un questionnaire à cette fin. Il peut servir de base à nos échanges.

Je vous indique que cette audition fera l'objet d'un compte rendu publié.

Enfin, je rappelle qu'un faux témoignage devant notre commission d'enquête serait passible des peines prévues aux articles 434-13, 434-14 et 434-15 du Code pénal. Je vous invite à prêter serment de dire toute la vérité, rien que la vérité.

Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, Mme Charline Avenel, M. Daniel Auverlot et M. Gilles Pecout prêtent serment.

M. Pecout, je vous propose de commencer.

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Je me contenterai de quelques éléments liminaires, avant que nous abordions les spécificités de nos académies.

Dans une académie, service public déconcentré de l'éducation, la lutte contre la radicalisation islamiste relève tout naturellement de la prévention, de la détection, du signalement, parfois de la négociation, du rappel au règlement et à la loi et de la répression ainsi que de la sanction. De ce fait, les politiques et les répertoires sont communs aux académies et renvoient aux grands principes du code de l'Éducation, réaffirmés par la loi du 28 juillet dernier, notamment tout ce qui concerne le renforcement du contrôle de l'éducation dans les familles.

Nous savons aussi que notre région académique d'Ile-de-France présente plusieurs traits communs, que nous pouvons résumer de façon très générique. Il s'agit d'abord d'un cumul de contextes considérés comme des contextes à risques en termes de séparatisme religieux ou communautaire, en raison de l'absence de mixité sociale, de mixité confessionnelle ou de mixité d'origine et de phénomènes décrits par les sociologues comme des phénomènes de ghettoïsation. Ces phénomènes se rencontrent dans les trois académies et aussi dans un certain nombre d'aires parisiennes.

Le deuxième élément est celui de la surexposition médiatique. Certes, les médias ne fabriquent pas les situations, mais ils les amplifient. Une chaîne de médiatisation ajoute parfois au péril et à la nécessité de détecter les signes faibles de radicalisation.

A Paris, il faut aussi évoquer la proximité avec les lieux diplomatiques et consulaires. Avec les écoles dites « d'ambassade », comme l'école « d'ambassade d'Algérie ».

Nos académies offrent également la plus grande palette de situations scolaires que l'on puisse trouver, avec une scolarisation hors contrat, qui, en proportion, est loin d'être négligeable. À Paris, ces établissements hors contrat représentent 5 %, ce qui est considérable, même si ce chiffre est en diminution par rapport aux années précédentes.

Enfin, toute la chaîne scolaire et universitaire est représentée, ce qui est très important. Je suis le recteur de la seule académie comptant une proportion post-bac plus importante qu'une population scolaire pré-bac. Or nous nous apercevons que le hors-contrat est en croissance en situation de post-bac, dans les deux ou trois ans qui suivent le bac. Nous constatons donc une forte présence d'étudiants et de « centres de recherche » (qui n'en sont pas toujours), qui peut nourrir une chaîne de radicalisation.

À cette situation spécifique correspond une palette de méthodes renvoyant à un arsenal bien connu. J'en donnerai trois approches. Nous pouvons citer un fort travail interministériel. Je pense notamment au travail de la cellule de prévention Radicalisation et Accompagnement des familles, qui fonctionne en lien avec la Préfecture de Police.

Une autre spécificité renvoyant au niveau interministériel est le lien très étroit avec le parquet et la justice. Le bureau du Proviseur Vie scolaire de l'académie de Paris est en effet situé au Palais de Justice, ce qui facilite la communication en termes de prévention, de suivi et de formation.

Enfin, le procureur s'adresse régulièrement aux proviseurs et aux chefs d'établissement de l'académie. Mon prédécesseur avait instauré cet usage et le procureur Rémy Heitz le poursuit.

Outre ce travail interministériel, notre approche académique est globale. Elle est notamment liée au travail de la Cellule Laïcité - Faits religieux, mise en place avec les consignes du ministre Blanquer. Cette Cellule se déploie à travers la formation et la prévention, en lien avec les écoles du professorat et le travail des inspecteurs, ainsi qu'à travers l'accompagnement des établissements. De plus en plus, dans le sillage de la volonté du ministre, nous accompagnons les politiques d'établissement en matière de lutte contre la prévention et d'accompagnement des politiques de valeur et de laïcité.

Après l'approche interministérielle, nous pouvons citer l'approche académique globale. Il s'agit en l'occurrence du suivi des situations du hors contrat, sur lequel nous pourrons revenir dans le détail. Le hors contrat n'est pas en progression, mais il atteint une valeur significative en région parisienne. L'éducation dans les familles augmente également et nous souhaitons suivre très précisément cette augmentation, via des inspecteurs, qui ont cette mission.

Debut de section - Permalien
Daniel Auverlot, recteur de l'académie de Créteil

Je me reconnais totalement dans les propos du recteur. Nous comptons 1 million d'élèves, pour un peu moins de 10 000 élèves dans le privé hors contrat. Sur ces 10 000 élèves, 2 500 suivent un enseignement hors contrat dans le privé musulman.

Nous avons assisté cette année à une augmentation du nombre d'élèves, mais cette augmentation demeure limitée. Dans les écoles musulmanes, nous observons une augmentation du nombre d'élèves, alors que le nombre d'établissements hors contrat augmente lui aussi. Cette dernière augmentation est liée à un effet d'aubaine et correspond à de pseudos établissements Montessori ou Freinet et bilangue, avec parfois des prix de scolarisation extrêmement élevés.

Suite à la loi Gatel, nous nous sommes mis en ordre de marche pour nous pencher sur le hors contrat. Nous nous sommes ainsi dotés de 57 inspecteurs formés à cette mission. L'année dernière, nous avons procédé à 37 inspections, dans des écoles hors contrat qui ouvraient ou nous étaient signalées par les services des préfets. Même si nous avons parfois constaté des dysfonctionnements, nous n'avons pas pu fermer d'écoles. Nous pourrons revenir sur ce point ultérieurement.

Dans la perspective de la présente commission, nous avons envoyé ce matin une équipe d'enquêteurs dans une école privée hors contrat de Saint-Denis, sur laquelle pèsent nos soupçons. Les inspecteurs nous ont rapporté que cette inspection a donné lieu à un moment de théâtralisation préparé. Cette école ignorait que les inspecteurs venaient aujourd'hui, mais lorsqu'il leur a été demandé de chanter une chanson, les enfants ont spontanément chanté la Marseillaise et nous n'avons rien trouvé.

Il faut ajouter que l'académie de Créteil a été à l'initiative d'une procédure intéressante : nos inspections se déroulent souvent en interministériel, avec des inspecteurs de l'Éducation nationale, des services vétérinaires, de l'URSSAF et du GIR, pour les contrôles financiers. Cependant, la loi ne nous autorise pas à réaliser de rapport commun et nous devons donc rédiger des rapports séparés, ce qui nous handicape.

Nous pourrons ensuite revenir sur les raisons qui nous empêchent de fermer des établissements, malgré nos découvertes d'éléments problématiques.

Debut de section - Permalien
Charline Avenel, rectrice de l'académie de Versailles

L'académie de Versailles représente 10 % des élèves de France, soit 1,2 million d'élèves, mais 20 % du hors contrat de France, ce qui est majeur. Comme pour Créteil, c'est l'enseignement Montessori qui fleurit, mais 13 écoles sont des écoles musulmanes. Certaines ne présentent aucune difficulté et d'autres des points de sensibilité. Nous faisons notre maximum dans le cadre de la loi Gatel, mais ce n'est pas suffisant en termes de droit. Nous butons notamment sur la possibilité de nous intéresser aux éléments financiers de ces structures.

Vous nous avez également posé des questions sur l'enseignement dans les familles. Dans des zones sensibles, comme Trappes, les Mureaux et Chanteloup-les-Vignes, l'instruction dans les familles a été multipliée par six à la précédente rentrée scolaire. Derrière ce sujet se pose une question de contrôle. Nous faisons le travail qui nous est demandé, mais, comme Monsieur Auverlot, je constate plusieurs limites concernant les refus de contrôle d'une part et la suite donnée à ces contrôles d'autre part. Je souligne cependant l'effort très important réalisé au contrepoint de cette augmentation très forte de l'enseignement dans les familles.

Vous nous avez de plus interrogés sur le nombre de personnes radicalisées dans nos services. Dans notre académie, très peu sont signalées. Nous avons procédé à une exclusion et à deux signalements cette année, ce qui peut poser des questions.

Vous nous avez posé des questions sur des atteintes à la laïcité. Sur ce point également, les chiffres ne sont pas très élevés. Nous constatons cependant que le travail fourni par nos équipes Valeurs de la République permet de résoudre des situations difficiles.

Enfin, deux éléments pourraient être ajoutés à ce questionnaire, en lien avec l'actualité, à commencer par la transformation des enseignements de langue et culture d'origine (ELCO) en enseignements internationaux de langues étrangères (EILE). Sur ce sujet, les chiffres sont substantiels et appellent des moyens de contrôle importants. Les annonces du Président de la République devraient ainsi nous permettre de mettre nos moyens d'inspection à niveau. Les académies de Créteil et de Versailles sont enfin terres d'accueil d'élèves de retours de zones. Mon académie scolarise ainsi une cinquantaine d'élèves chaque année dans ce cadre. Ces dispositifs sont bien montés en puissance à l'échelon interministériel. Ils sont faciles à mettre en place sur le premier degré, mais plus difficilement du point de vue pédagogique et de l'accompagnement de l'enfant dans le second degré.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Delattre

Vous évoquiez tout à l'heure les dysfonctionnements que vous aviez constatés et de l'impossibilité de prononcer la fermeture des établissements. S'agit-il d'empêchements législatifs ? Trouvez-vous des moyens pour contourner ces difficultés ?

Aujourd'hui, certains nous disent que les professeurs de langue arabe sont peu nombreux. Soit il faut faire appel à des cours particuliers pour apprendre l'arabe, soit il faut inscrire ses enfants dans une école coranique. Or nous savons ce qui se passe dans certaines écoles coraniques, qui exposent les enfants à la radicalisation. Pouvez-vous détailler ce qui est prévu à ce titre

Par ailleurs, dans les établissements scolaires, les infirmières sont-elles tenues au secret médical ? Ont-elles un protocole d'alerte ?

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Pour répondre à votre première question et reprendre un élément évoqué par le recteur de l'académie de Créteil, la limite à laquelle nous nous heurtons, c'est que nos inspecteurs ne rencontrent pas lors de leurs contrôles d'éléments de dérive communautariste avérés. Nous pourrions nous en féliciter, mais, comme l'a indiqué le recteur de Créteil, nous constatons souvent des éléments qui relèvent de la mise en scène, de la dissimulation.

Les publicités, notamment les publicités électroniques, doivent être étudiées avec attention. A Paris, il n'existe qu'une école confessionnelle musulmane, située dans le 19ème arrondissement. Nous la suivons de près et la présente audition n'a pas modifié nos procédures de suivi. Le site de cette école commence par une déclaration vertueuse relative aux valeurs de la République et la laïcité. C'est ensuite le contrôle des contenus d'enseignement qui pose problème. Cela est également le cas s'agissant de l'enseignement à domicile. A ce titre, les inspecteurs considèrent qu'il faudrait aller encore plus loin dans le contrôle des matériaux documentaires. Nous n'avons ainsi pas connaissance de l'ensemble de la documentation pédagogique. Nous contrôlons les propos tenus par les professeurs, les livres et une partie du matériel pédagogique, mais ces inspections inopinées ne peuvent être exhaustives. La plupart du temps, nous ne constatons donc pas d'entrave à la loi.

Debut de section - Permalien
Charline Avenel, rectrice de l'académie de Versailles

Nos contrôles sur site sont conduits au maximum de nos possibilités. Lors de ces contrôles, nous demandons aux élèves d'ouvrir leurs cahiers. La charte des valeurs de la République est affichée et nous demandons immédiatement aux élèves s'ils savent ce que cela signifie. Nous leur demandons s'ils ont des cours d'enseignement physique et sportive, etc. Parfois, tout se passe bien, mais, parfois, un faisceau d'indices nous amène à penser que le contenu des enseignements n'est pas tout à fait satisfaisant, voire relève du communautarisme.

Si nous nous plaçons dans le cadre d'une demande de passage sous contrat, l'Éducation nationale est tenue de vérifier si ce qu'elle constate est conforme au socle commun. Avec des contrôles poussés au maximum, si nous constatons que les élèves ne suivent pas de cours d'éducation physique et sportive ni ne comprennent le sens des valeurs de la République, nous pouvons en déduire que l'établissement présente un problème quant à la qualité de son enseignement. Nous manquons néanmoins de vision quant à la progression de ces élèves. La loi Gatel et le travail avec les préfectures permettent de rechercher d'autres critères, mais le seul critère pédagogique est limité, bien que nous allions très loin dans les contrôles. En cas de fort soupçon, nous utilisons souvent le motif des conditions d'hygiène et de sécurité, qui sont à la main des préfets, pour fermer l'établissement. L'ensemble de cet édifice est donc fragile. Je travaille en ce moment sur un contentieux avec une école du Val-d'Oise, mais j'ignore si nous allons gagner. Nos moyens de droit ne sont pas immenses et nous les croisons au maximum avec ceux dont disposent les préfets.

Enfin, si nous pouvions nous pencher sur les financements des établissements hors contrat, nous serions sans doute plus efficaces.

Debut de section - Permalien
Daniel Auverlot, recteur de l'académie de Créteil

Au cours des 37 inspections que nous avons menées l'année dernière, jamais un rapport n'a justifié une fermeture liée à des questions d'éducation nationale. Nous avons ainsi utilisé des motifs tels que la conservation d'aliments non filmés dans un réfrigérateur pour fermer des établissements. Sur ce sujet, le recteur ne dispose que d'un pouvoir indirect, puisque ce sont le préfet et le procureur qui ont ce pouvoir.

L'année dernière, avec le précédent préfet de la Seine-Saint-Denis, nous avions envisagé de fermer une école, mais les motifs étaient trop ténus pour ce faire. Nous avons craint in fine de perdre au tribunal administratif et de renforcer cet établissement. Nous ne sommes donc pas allés jusqu'au bout.

Nous ne pouvons pas non plus contrôler les identités des personnes qui se trouvent dans l'école lors de nos inspections.

Debut de section - Permalien
Daniel Auverlot, recteur de l'académie de Créteil

Oui. Ils ne sont jamais annoncés et nous envoyons de quatre à six inspecteurs de façon simultanée dans l'école.

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Ceci marque une différence avec les contrôles effectués dans les familles. Dans ce cadre, nous disposons de plus d'éléments pour ordonner des rescolarisations. Il arrive que des familles refusent les contrôles. Il est beaucoup plus simple de faire appliquer la loi avec des éléments précis, dans le contrôle des familles plutôt que du hors contrat. Nous avons par exemple ordonné quatre à cinq rescolarisations dans ce cadre l'an dernier.

Debut de section - Permalien
Daniel Auverlot, recteur de l'académie de Créteil

La loi Gatel a permis de passer l'instruction à trois mois et de contrôler les diplômes des directeurs d'établissement.

Debut de section - Permalien
Charline Avenel, rectrice de l'académie de Versailles

Nous avons procédé à 100 contrôles en 2019. 58 inspecteurs étaient mobilisés en 2015, contre 215 en 2019. Nous faisons donc le maximum.

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

La loi Gatel constitue un seuil d'amélioration très clair. L'un des éléments les plus factuels constitue par exemple l'obligation de délivrer la liste des élèves lors du contrôle.

Debut de section - Permalien
Charline Avenel, rectrice de l'académie de Versailles

Cette loi nous a également amenés à créer un guichet unique avec les différents services en charge de l'autorisation de l'ouverture des écoles.

Dans l'académie de Versailles, nous avons expérimenté un dispositif qui pourrait être généralisé. Nous avons ainsi créé une plateforme numérique interservices, qui permet de gérer tous les flux d'échanges avec les territoires et la préfecture et nous concentrer sur nos premiers enjeux.

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Outre la loi Gatel, celle qui a été promulguée en juillet dernier nous apporte également de nombreux instruments, notamment en ce qui concerne la distinction entre les fratries. Cette loi nous demande de considérer, lorsqu'un domicile concentre plusieurs fratries, que nous sommes éloignés de l'instruction familiale à domicile. Cette norme est donc précise, mais nous rencontrons des difficultés avec les écoles liées à une étiquette associative. Souvent, nous pouvons considérer que nous touchons là la transmission de contenus proches de la radicalisation. Pour ces situations, nous aurions donc besoin d'éléments supplémentaires pour intervenir.

Les infirmiers et les personnels sanitaires et sociaux sont soumis aux mêmes obligations en milieu scolaire et extrascolaire.

Debut de section - Permalien
Daniel Auverlot, recteur de l'académie de Créteil

Nos infirmières ne nous signalent rien. Elles s'estiment tenues par le secret professionnel et nous n'avons aucune remontée d'information par ce canal.

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Nous associons dorénavant les infirmières et les médecins aux réunions avec le procureur. Nous l'avons fait pour la première fois cette année, avec les chefs d'établissement. Ces personnels ne considèrent pas cependant que le fait de travailler dans un établissement scolaire les dédouane de leurs obligations professionnelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Je souhaitais vous interroger sur deux points. Dans le Val-d'Oise, la forte augmentation de l'instruction à domicile en deux ans est particulièrement inquiétante. Nous constatons une forte progression de cet item entre la rentrée 2017 et la rentrée 2019. Je sais que les contrôles à domicile ne sont pas simples. Nous savons très bien que de nombreuses familles partent en vacances au début du mois de juin et reviennent le 1er octobre. C'est le cas aussi d'enfants scolarisés dans l'école de la République. Il s'agit d'un sujet très important.

S'agissant des contrôles, vous nous avez parlé de la Marseillaise. Ce point est connu. Tous ces enfants en dehors du système scolaire apprennent la Marseillaise par coeur, parce qu'ils sont préparés à ces contrôles.

Quel est le pourcentage de familles qui ne sont jamais contrôlées dans une année ? Ces familles reprennent-elles l'année scolaire suivante sans que rien ne soit changé ? Des sanctions sont-elles prévues lorsque le niveau scolaire des enfants n'a pas été validé ? N'estimez-vous pas qu'il serait intéressant de contrôler ces enfants en début d'année, puis de comparer avec le niveau relevé à la fin de l'année ? Comment contrôler si l'on ignore quel est le niveau des enfants au mois de septembre ? Je demeure inquiète concernant l'enseignement à domicile, avec ces enfants qui sortent de la République.

Je voulais aussi poser une question de fond sur l'évaluation des problèmes que les enseignants peuvent rencontrer, relatifs à des impossibilités de réaliser des sorties scolaires, des parents qui s'immiscent dans des projets pédagogiques, qui refusent que leurs enfants se rendent à des expositions, etc. Ces entraves à l'éducation sont-elles mesurées ? Il s'agit en l'occurrence d'un sujet très important. Que pouvez-vous nous dire plus particulièrement des entraves à la laïcité ? Le ministre évoque ce point régulièrement : quels éléments les enseignants vous font-ils remonter ? Comment agissez-vous dans ces situations ? Ces phénomènes s'accentuent-ils ?

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Je voudrais reprendre deux éléments de vos observations, à commencer par l'entrave à l'ouverture culturelle. Dans l'ensemble des trois académies comme ailleurs, nous connaissons ces cas selon lesquels les familles réagissent aux sorties, mais aussi parfois aux contenus pédagogiques du socle. Sachons évaluer très précisément le rôle joué en milieu scolaire et périscolaire par l'offre disponible. Je prends l'exemple précis du Mémorial de la Shoah à Paris ou du Camp des Milles dans les Bouches-du-Rhône. Ces associations mémorielles ne se demandent pas quelles sont les confessions des élèves et elles agissent partout. Les résultats de leurs travaux sont importants. Les jeunes sont souvent victimes de préjugés, véhiculés souvent par leurs familles, mais j'insiste sur l'importance du travail partenarial, des professeurs et des associations.

Certes, les oppositions que vous évoquez sont notables, mais il existe de plus en plus d'éléments qui nous montrent que le partenariat entre associations mémorielles et culturelles joue son rôle. Nous tenons des éléments à votre disposition, prouvant ces réalités qui ne sont pas anecdotiques.

Nous menons en outre des actions de lutte contre la précarité, notamment le grand programme des cités éducatives dans chacune des régions et académies. Il s'agit ainsi d'identifier des territoires en difficulté. Souvent, les difficultés apparaissent à travers la radicalisation et le communautarisme. Dans ces situations, il faut prévoit des actions ciblées et partenariales, pour travailler avec des populations séparatistes. Il convient donc de nuancer et de tenir compte de ces actions partenariales, pédagogiques et associatives, qui nous permettent de progresser.

Debut de section - Permalien
Daniel Auverlot, recteur de l'académie de Créteil

Pour contrôler les élèves à domicile, il faut qu'ils nous soient signalés. Or nous ne sommes pas du tout certains que les maires aient tous les outils nécessaires pour nous signaler la totalité des élèves qui ne vont pas à l'école. Il peut s'agir d'un manque d'outils, de volonté, etc.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Delattre

Les familles sont pourtant obligées de déclarer ces situations à la mairie.

J'avais proposé au ministre que les enfants soient dotés d'un numéro INE depuis tout petit, mais j'ignore où cette situation en est. Cela nous permettrait de croiser des fichiers.

Debut de section - Permalien
Daniel Auverlot, recteur de l'académie de Créteil

Il s'agit d'un sujet très sensible. Dans de nombreux endroits en France, l'instruction à domicile est contrôlée au rectorat ou dans les inspections académiques. J'ai souhaité pour ma part que les inspecteurs se rendent directement dans les cages d'escalier, ce qui a occasionné des réticences. Maintenant, nos inspecteurs sont suffisamment expérimentés pour constater le niveau de l'enfant. Si le contrôle n'est pas satisfaisant, nous le signalons et un deuxième contrôle est effectué. Au final, 1 % des situations sont signalées au procureur, mais j'ignore la suite donnée à ces signalements.

Les atteintes à la laïcité sont de plusieurs ordres. Certains établissements peuvent laisser passer des situations, tout en restant de bonne foi, ce qui pose parfois la question de la formation initiale et continue. Depuis le début de l'année, nous avons enregistré 109 cas d'atteinte à la laïcité dans notre académie. Ces 109 cas correspondent à une dizaine de ports de signes ou de tenues religieux, des contestations d'enseignement, des suspicions de prosélytisme et autres.

Dans certaines disciplines, nous observons des renoncements de la part de nos enseignants. Je sais qu'il est difficile d'enseigner Voltaire dans certaines classes. Certains professeurs y renoncent donc. Pour certains professeurs femmes de SVT il peut être difficile d'aborder l'éducation à la sexualité, qui est pourtant obligatoire, et elles renoncent parfois.

Nous sommes en train de travailler avec l'équipe des Valeurs de la République, non seulement sur les atteintes à la laïcité, mais aussi sur l'accompagnement des enseignants par rapport aux programmes.

Debut de section - Permalien
Charline Avenel, rectrice de l'académie de Versailles

Dans le Val-d'Oise, 325 élèves étaient en instruction à domicile l'année dernière, contre 589 cette année. Ces élèves sont passés de 9 à 65 à Cergy, de 44 à 60 à Argenteuil, de 10 à 26 à Garges-Lès-Gonesse, de 2 à 26 à Montigny-lès-Cormeilles, de 10 à 24 à Goussainville et sont demeurés 18 à Sarcelles.

Les moyens de contrôle ont été mobilisés, puisque nous sommes passés de 199 contrôles à 233 sur l'année. Notre plan de charge est lourd et nous contrôlons près de la totalité de ces élèves dans les quatre départements de l'académie. Le travail s'est considérablement renforcé avec la ville et la CAF. En effet, il s'effectue en marge de notre périmètre, car le croisement des bases de données n'est pas à la main des services de l'État, mais des villes, qui sont plus ou moins disposées à le faire. Dans les Yvelines, nous nous rencontrons deux fois par mois pour évoquer ces questions et croiser les fichiers.

Il serait en outre intéressant de réfléchir à la création d'une base de données des élèves hors contrat. Ce sujet est à l'étude au ministère.

Nous sommes au rendez-vous en ce qui concerne le contrôle, mais nous pouvons progresser pour croiser nos bases de données. Ces questions sont d'ailleurs particulièrement sensibles.

Debut de section - Permalien
Daniel Auverlot, recteur de l'académie de Créteil

L'augmentation mécanique de l'instruction à domicile fait suite à la conséquence de l'obligation scolaire à compter de trois ans. Cette augmentation porte ainsi surtout sur l'école maternelle.

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

A Paris, 25 % des familles échappent à ce contrôle, du fait d'une déclaration tardive ou de l'absence des familles au domicile. Ces familles refusent ainsi d'être contrôlées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Il arrive également que des familles partent à l'étranger, tout en continuant de percevoir les allocations familiales en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Merci pour toutes les informations que vous venez de délivrer, qui suscitent des questions et de multiples propositions. Tenez-vous une comptabilité par type d'écoles ? Comment ces contrôles sont-ils effectués dans les écoles juives et autres écoles hors contrat ?

Il semble que la période de cinq ans pour passer sous contrat soit parfois un peu longue. Quelle est votre position sur ce sujet ?

Ma troisième observation concerne les financements. Tracfin se penche sur ces sujets, mais je comprends votre position.

Le rapporteur du budget de l'Éducation nationale au Sénat est Gérard Longuet, à qui j'ai posé la question des contrôles. Avez-vous un correspondant au ministère de l'Éducation nationale, vers lequel convergent vos observations ? Quelles sont vos relations avec vos collègues de régions ?

Debut de section - Permalien
Daniel Auverlot, recteur de l'académie de Créteil

Nous tenons une comptabilité très précise de toutes les écoles que nous contrôlons, en les classant par spécificités. Dans l'académie de Créteil, une école catholique intégriste nous intéresse par exemple beaucoup. Le rapport a mis en évidence que, lorsque les garçons y suivent des cours d'EPS, les filles suivent des cours de couture. Nous maintenons donc une comptabilité très précise, par type d'appartenances.

Nous bénéficions également d'un dispositif de mise en demeure, lorsque nous constatons des dysfonctionnements pédagogiques.

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Le haut fonctionnaire chargé de la défense et de la sécurité est l'interlocuteur national des recteurs, qui font également remonter tous les incidents à la CMVA. Cette dernière ne spécifie pas les faits de radicalisation et il revient aux recteurs de signaler ce qui relève de ce sujet.

Debut de section - Permalien
Charline Avenel, rectrice de l'académie de Versailles

L'éducation nationale est très structurée sur ces sujets et c'est la direction des Affaires financières du ministère qui gère les sujets de hors contrat.

Vous posiez aussi la question de la durée du passage sous contrat, notamment du passage sous contrat de cinq ans à un an.

Le débat qui se fait jour concerne les écoles qui voudraient se créer par opportunisme, notamment suite au Brexit. Des entreprises pourraient ainsi vouloir financer des écoles internationales, alors qu'elles doivent respecter la durée des cinq ans. Cette durée est donc toujours considérée comme trop longue par ces acteurs. Elle l'est sans doute d'ailleurs et cela pose la question de réfléchir à la mise en place de labels pour ces écoles.

Debut de section - PermalienPhoto de Rachid Temal

Vos interventions me laissent perplexe. Vous essayez de composer avec vos moyens, mais je n'ai pas le sentiment qu'il existe de réelles solutions dès lors que le socle est respecté. Est-il possible d'apporter de réelles évolutions, au-delà de que vous évoquez ?

Vous évoquez en outre, Monsieur Auverlot, l'absence de rapport commun. Je ne comprends pas pourquoi il vous est impossible de rédiger un rapport en commun.

La formation des enseignants et de l'équipe administrative des établissements est-elle prévue sur ces questions ?

Madame Avenel, vous évoquez le retour de zone. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur ce sujet ?

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Ces retours de zone sont liés à la situation des aéroports. Or aucun aéroport n'est situé à Paris intra-muros. Mes collègues seront donc sans doute plus à même que moi d'évoquer ce sujet.

En ce qui concerne la formation, cela constitue effectivement un problème et une question lancinante.

Debut de section - PermalienPhoto de Rachid Temal

Je faisais référence à la nécessaire formation de l'ensemble de la communauté éducative, notamment les surveillants.

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Vous avez raison. Des signalements nous sont d'ailleurs parvenus concernant des AVS. Notre attention porte actuellement sur la formation des cadres et des chefs d'établissement, ainsi que des agents gestionnaires. Ces derniers sont également formés à la gestion de crise.

Cependant, pour être à même d'exprimer ce qu'est la laïcité comme dispositif juridique et système de valeur et de neutralité à une équipe pédagogique ou à des élèves, un travail en profondeur est nécessaire. Ce travail a été réellement entrepris.

Debut de section - Permalien
Daniel Auverlot, recteur de l'académie de Créteil

Lorsqu'un chef d'établissement constate un problème de laïcité, il nous saisit et nous envoyons une équipe chargée de former tous les personnels de cet établissement, jusqu'aux cuisiniers et concierges. Il convient ainsi de veiller à ce que tous les adultes de l'établissement partagent les mêmes valeurs.

Les retours de zone constituent par ailleurs un sujet complexe. Les chefs d'établissement ne sont pas tenus au courant de la présence de ces élèves, mais les directeurs de cabinet de préfets savent qui ils sont. Lorsque nous avons connaissance d'incidents dans un établissement, nous vérifions si l'élève en cause fait partie de cette liste de retours de zone. Nous sommes très attentifs à respecter le secret le plus absolu sur ces questions.

Debut de section - Permalien
Charline Avenel, rectrice de l'académie de Versailles

Deux évolutions me semblent devoir être apportées sur le contrôle du hors contrat, à commencer par la mesure de la progression de l'élève plutôt que de l'adéquation au socle. Il s'agirait d'un premier pas qui nous permettrait d'aller plus loin du point de vue pédagogique. En outre, le volet du financement doit être contrôlé pour le hors-contrat. Cette arme devrait en effet s'avérer très productive.

Dans mon académie, nous dénombrons par ailleurs 45 retours de zone. Un travail pluriservices très consommateur de temps est mis en oeuvre et nos moyens sont limités. J'ai fait état d'une différence entre les enfants du premier et du second degré, en lien avec leur état psychologique, leurs capacités d'apprentissage, etc.

Pour revenir sur la formation, notre travail sur la radicalisation peut sans doute être encore amélioré. Sur la formation relative à la laïcité, j'ai participé à Clamart à une aventure très médiatisée, notamment car plusieurs mamans étaient voilées au sein de l'établissement, pour superviser les élèves. La directrice de l'école expliquait que, si ces mères avaient refusé de venir, aucune autre mère ne serait venue. J'ai fait remarquer à cette directrice que cette situation devait nous interroger, puis le sujet a été instrumentalisé par des médias communautaristes. Il faut cependant savoir se mettre à la place de cette directrice, dont la communauté scolaire est ce qu'elle est. Il ne faut pas que nos communautés pédagogiques soient mises en situation de faire de la casuistique. La formation apparaît comme la réponse à privilégier dans ces situations. Suite à cet épisode, nous avons lancé un plan de reformation, particulièrement dans le premier degré. Je me suis alors rendue compte que les formations étaient insuffisantes et nous repartons maintenant sur de nouvelles bases. Il faut en effet former l'ensemble de la communauté pédagogique, notamment à des postures relationnelles qui ne sont pas faciles. Il n'est en effet pas facile de demander à une mère de sortir de l'école.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Je suis frappé de la différence entre la conception exigeante de la laïcité que nous exprimons en France et une législation très libéral en matière d'exigences scolaires, par rapport à ce que nous constatons dans de nombreux autres pays européens. Je rejoins la remarque de mon collègue Rachid Temal sur la conception d'une école publique, avec un cursus plus précis de chaque école.

Pour contrôler l'exigence de scolarisation, faudrait-il exiger un enregistrement domiciliaire de chaque personne auprès d'une commune ? Faudrait-il privilégier le croisement de fichiers ? J'habite en Pologne et, chaque année, je reçois des courriers me demandant où mes enfants sont scolarisés. Je dois ainsi produire des certificats de scolarité. Cette situation est-elle envisageable en France ?

L'accompagnement scolaire hors des cours constitue-t-il par ailleurs un problème ? Que faire dans ce domaine ?

Le Président de la République a fait des annonces la semaine dernière sur la fin des ELCO, mais il me semble difficile de s'intégrer si on est en conflit entre son pays d'accueil et son pays d'origine. Les ELCO avaient vocation à répondre à cette situation. Pensez-vous que la décision du Président de la République réponde à ce problème ou en posera d'autres ?

Enfin, votre discours est clair concernant les exigences qu'il faut poser en matière de normes et de moyens de contrôle. En tant que sénateur des Français de l'étranger, je constate qu'avec le plan de développement de l'enseignement du français à l'étranger, l'éducation nationale va homologuer des écoles à l'étranger, alors qu'elles ne le seraient certainement pas en France. Comment vivez-vous ces contradictions ?

Debut de section - Permalien
Daniel Auverlot, recteur de l'académie de Créteil

Certains de ces sujets échappent au ressort de nos académies et je me garderai donc d'y répondre.

En ce qui concerne l'accompagnement scolaire, il me semble très intéressant que, dans le cadre de la réorganisation de l'État, la partie jeunesse et sports rejoigne l'éducation nationale. Le recteur disposera ainsi d'une vision plus fine des associations et de leur financement.

75 % des ELCO de l'académie de Créteil ont en outre déjà été transformés en EILE depuis plusieurs années. Je préfère que cet enseignement ait lieu sur le temps scolaire, dans des locaux scolaires, sous l'oeil du directeur d'école.

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Sur ce sujet des ELCO, effectivement, ce processus a déjà largement été amorcé. Je rappelle que le cadre scolaire est le cadre de référence préféré pour ce type d'enseignement. Dans le cadre de certaines sections internationales, les professeurs viennent parfois de pays étrangers et ne sont pas recrutés par l'éducation nationale. Ils n'en sont pas moins encadrés et contrôlés. Nous ne parlerons pas ici de la parole présidentielle, mais nous confirmons que cette décision va dans le sens de ce que nous souhaitons et de l'encadrement des pratiques et des contenus.

Une question demeure importante, relative à l'inadéquation entre nos principes de laïcité très vigoureux et nos programmes. Je connais mal la situation polonaise, mais je connais mieux les systèmes italien, allemand et belge. Notre système est beaucoup plus coercitif que dans ces pays, parce que nos programmes sont nationaux. En France, l'autonomie est pédagogique. Cependant, il ne s'agit pas d'une autonomie d'orientation, mais de contenu. Nous sommes les seuls à affirmer nos principes et entendons laisser une marge de liberté pédagogique.

L'enseignement à l'étranger dépend de deux grands opérateurs : l'AEFE et la Mission laïque française. Ces deux opérateurs, quel que soit le cadre local, doivent être conformes à nos principes d'enseignement. Les autres opérateurs sont très peu nombreux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Ce ne sont pas ces deux opérateurs qui posent problème et le plan de développement prévoit de s'appuyer sur d'autres opérateurs.

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Ce sont des valeurs dont nous sommes porteurs qui attireront les gens vers le système français. J'ignore comment cela fonctionnera, mais nous devrons effectivement veiller à ce que ces opérateurs fassent le même travail que les deux opérateurs cardinaux que sont l'AEFE et la Mission laïque française.

Debut de section - Permalien
Charline Avenel, rectrice de l'académie de Versailles

Pour revenir sur les chiffres, 1 037 élèves de notre académie suivent des cours d'arabe, ainsi que 562 en lycée, pour 28 professeurs titulaires et 4 contractuels. 7 093 élèves sont en ELCO et en EILE dans l'académie, soit 440 groupes. Nous ne parvenons donc pas à satisfaire la demande relative à l'arabe et nous pouvons imaginer que ces dispositifs ELCO et EILE répondent à cette demande insatisfaite. Des ELCO sont en voie de transformation en EILE, ce qui permet d'avoir un meilleur contrôle. Ces annonces présidentielles vont dans le bon sens, mais elles représentent aussi un défi à relever quant aux moyens de contrôle et les formations des enseignants.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Goy-Chavent

Dans le pays de Gex, une commune m'a alertée. Dans le cadre de l'ELCO, de nombreux parents demandaient des cours d'arabe à l'école. Une mairie a mis ses locaux à disposition et certains ont alerté cette dernière au sujet de l'intervenant, qui enseignait l'arabe chanté du coran. Il s'agissait en effet d'un imam, proche de la mouvance salafiste.

Quel arabe enseigne-t-on aux enfants ? Leur enseigne-t-on l'arabe littéraire ? L'arabe du Maghreb ? Comment les enseignants sont-ils sélectionnés ?

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Il s'agit d'une question technique, mais fondamentale. C'est d'ailleurs pour cela que le Président de la République est intervenu. Cette question se pose cependant moins pour l'arabe que pour le turc, en termes de contenus. Il me semble que le Maroc et la Tunisie ont signé un texte établissant clairement le niveau de langue de l'arabe d'Afrique du Nord. Néanmoins, je ne suis pas spécialiste de ces questions.

Debut de section - Permalien
Daniel Auverlot, recteur de l'académie de Créteil

Je souhaitais aborder le sujet des fonctionnaires radicalisés de l'Éducation nationale. Nous constatons un vide juridique sur ce point, puisque, lorsqu'un fonctionnaire fiché S est excellent maître d'école, nous n'avons pas la possibilité de le faire passer en conseil de discipline et de le faire sortir du système. Il s'agit d'un sujet très préoccupant.

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Le législateur est intervenu pour définir des administrations sensibles dont les fonctionnaires pouvaient être exclus par circulaire. Or l'éducation nationale n'en fait pas partie.

Debut de section - PermalienPhoto de Rachid Temal

Nous touchons là les limites de la définition de la liberté et du système de judiciaire.

Debut de section - Permalien
Gilles Pecout, recteur de la région académique Île-de-France, recteur de l'académie de Paris

Pour d'autres administrations, ces décisions sont déjà prises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

En effet. Les maires sont par exemple interpellés sur la présence de fichés S dans les centres de loisirs.

Le sujet que vous avez abordé en fin d'audition me semble très important. Cette audition a été un peu longue, mais l'éducation est une priorité. Je compte sur vous pour nous transmettre vos questionnaires, car nous devons remettre notre rapport à la mi-mai.

Merci.

La réunion est close à 18 h 20.