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Interventions sur "prison" d'Alima Boumediene-Thiery


53 interventions trouvées.

...la peine, nécessite que l’auteur des faits ait pris conscience des motifs justifiant sa condamnation, ce qui est impossible dans le cas des personnes atteintes de troubles mentaux lourds. S’agissant, enfin, de la prévention de nouvelles infractions et de la lutte contre la récidive, le but semble plus difficile à atteindre quand la personne est malade et que ses pathologies risquent d’empirer en prison, le milieu carcéral n’étant pas un lieu de soins. Si l’on ne peut que saluer les progrès de la prise en charge médicale en prison, des études ont néanmoins montré que la détention carcérale pouvait aggraver les pathologies, voire en susciter. Au-delà de ces trois raisons, liées à un régime d’exécution de la peine inadapté aux personnes souffrant de troubles psychiatriques, il est important de so...

...lité profondément hostiles à ce projet de loi, notamment aux dispositions relatives aux aménagements de peine. L’une de ces associations dénonçait au mois d’août dernier la mise en conformité de la France avec les règles pénitentiaires européennes, qu’elle a qualifiées – tenez-vous bien, mes chers collègues ! – d’« absurdes », les considérant comme autant de « menaces » pour la « sécurité de nos prisons ». Cette même association, qui tenait voilà quelques mois une conférence au Local, haut lieu de la jeunesse d’extrême droite à Paris, a organisé un colloque à l’Assemblée nationale, à la veille de la séance publique consacrée à l’examen du projet de loi pénitentiaire, colloque pour lequel elle a même obtenu le parrainage de plusieurs personnalités de la majorité. Si le volet relatif aux aménage...

Comme nous l’avons déjà indiqué – nous ne cesserons d’ailleurs de le répéter –, la mise en œuvre d’un véritable contrat de travail au sein des prisons soulève des difficultés que nous ne pouvons pas ignorer. Nous ne devons pas en oublier l’essentiel : le travail en prison contribue non seulement à l’insertion du détenu ou à la réalisation de son projet de sortie, mais également à l’enrichissement des entreprises qui peuvent ainsi employer des personnes, en dehors des règles du droit du travail, en leur offrant une rémunération équivalente à 4...

... doit bénéficier du droit de la sécurité sociale, au même titre que n’importe quel salarié. Cette exigence découle de la règle pénitentiaire européenne 26.14 : « Des dispositions doivent être prises pour indemniser les détenus victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles dans des conditions non moins favorables que celles prévues par le droit interne pour les travailleurs hors-prison. » Tel est l’objet de cet amendement.

La présentation de cet amendement me permet de mettre l’accent sur le problème de l’égal accès de tous les détenus à une activité professionnelle. Mes chers collègues, ceux d’entre nous qui se sont rendus dans des prisons ont constaté que l’administration pénitentiaire doit faire face à une pénurie d’offres d’emploi. C’est la raison pour laquelle seulement un détenu sur trois travaille. Ainsi, il y a ceux qui exercent une activité et qui, de ce fait, disposent de revenus leur permettant d’améliorer leurs conditions de détention, et ceux qui n’ont pas accès au travail, en raison non pas de leur manque de compéten...

.... On pourra toujours observer que le déclassement d’emploi pourra faire l’objet d’un recours devant le tribunal administratif. Mais combien de temps faudra-t-il à celui-ci pour examiner le dossier et remettre sa décision ? Le détenu devra-t-il attendre trois ans pour savoir s’il a accès ou non au travail ? C’est complètement irréaliste, d’autant plus que l’on sait – tous ceux qui connaissent les prisons le savent – que ces décisions sont souvent prises en fonction du comportement du détenu. Enfin, en matière de droits sociaux, je rappelle que, s’il existe des droits sociaux généraux, par exemple en cas de maladies, il existe aussi des droits sociaux spécifiques, notamment en cas d’accident du travail.

...ement satisfaisante. Je pense, à cet égard, à l’inscription dans le texte de la commission du principe de parloir hebdomadaire. Je souhaiterais revenir sur un point qui n’est pas abordé par le projet de loi pénitentiaire, celui du tourisme carcéral. Il arrive que l’administration utilise le transfèrement des détenus, non pas uniquement pour assurer une meilleure répartition des détenus dans les prisons ou pour des raisons de sécurité ou de maintien de l’ordre, mais plutôt à titre coercitif, comme un moyen détourné de sanction. Le transfert se fait alors sans motif. Ainsi, je me rappelle avoir été un jour interpellée par un détenu qui avait été transféré dix-huit fois en douze mois. C’est énorme ! Cette réalité a des conséquences désastreuses sur le droit au maintien des liens familiaux avec ...

...rge des relations personnelles. Si le troisième alinéa de l’article 15 fait référence à « d’autres personnes que les membres de la famille », c’est pour leur réserver un régime spécifique : celles-ci pourront se voir opposer que leurs visites « font obstacle à la réinsertion du condamné ». Voilà un motif assez flou, qui empêchera certains détenus de voir des proches, à l’exception du visiteur de prison. Il me semble donc important d’aligner le régime des visites de certains proches sur celui des membres de la famille, plutôt que de les considérer comme des personnes qui n’en sont pas.

...a trait aux unités de vie familiale, les UVF, et aux parloirs familiaux, alors que l’amendement n° 26 rectifié ne concerne que les UVF. Il est important de préciser dans la loi que les visites familiales s’exercent dans le respect par l’administration pénitentiaire de l’intimité du détenu. Je vous renvoie, mes chers collègues, aux excellentes études produites par l’Observatoire international des prisons, l’OIP. On y apprend que la France a beaucoup de progrès à faire sur cette question, en comparaison d’autres pays. Par exemple, la Suède, l’Espagne ou le Canada ont mis en place des espaces où les détenus peuvent se soustraire à toute surveillance durant quelques heures pour recevoir leur famille. D’autres pays, comme la Lituanie ou la République tchèque prévoient même une durée de plusieurs jo...

...tégrité physique. La Cour européenne a développé, dans le cadre de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, l’obligation pour les États de mener une enquête effective, indépendante et diligente en cas d’atteinte à l’intégrité physique d’une personne entre les mains de l’État. Cette obligation positive vise à casser le corporatisme et la loi du silence, qui sévit souvent en prison et qui empêche les détenus comme les agents de parler librement des faits dont ils peuvent avoir connaissance. Il s’agit de garantir qu’une enquête indépendante sera menée. Une enquête conduite par l’administration pénitentiaire sur l’un de ses agents peut-elle être considérée comme indépendante ? J’en doute… C’est pourquoi nous vous proposons, au travers de cet amendement, d’inscrire dans la l...

...té de l’essentiel. En effet, ce principe est le moteur de toute politique pénitentiaire qui se prétend respectueuse des droits des détenus, car il en est la source fondamentale. Tous les droits des détenus découlent de ce principe. Je ne répéterai pas ce que j’ai déjà dit à son sujet depuis le début de l’examen de ce texte. Je vous invite à faire preuve de courage : le courage d’accepter que nos prisons ne soient plus les mouroirs de la République, le courage de mettre un terme aux traitements inhumains et dégradants dont sont victimes les détenus, le courage de ne pas attendre encore cinq ans avant que le principe d’encellulement individuel entre vigueur et que la dignité des détenus soit enfin respectée.

Madame la ministre, vous avez la fâcheuse manie de m’opposer à l’administration pénitentiaire. Or ce n’est pas le cas, vous le savez bien. Je me rends souvent en prison et j’ai de très bonnes relations avec les agents. Je vous prie donc de ne pas caricaturer ainsi ma position. J’y insiste, la notion de responsabilité sans faute est une véritable révolution juridique, que nous devons à notre commission. Vous nous dites que les prisons ne sont pas des mouroirs. Mais, s’il y a de moins en moins de décès en prison, c’est tout simplement parce que les détenus agoni...

...donne. C’est pourquoi il me semble important qu’il puisse en prendre également connaissance plus tard. En vertu de la règle pénitentiaire européenne 30.1, « lors de son admission et ensuite aussi souvent que nécessaire, chaque détenu doit être informé par écrit et oralement – dans une langue qu’il comprend – de la réglementation relative à la discipline, ainsi que de ses droits et obligations en prison ». Je le rappelle, 20 % des détenus sont étrangers ; ils ne maîtrisent donc pas la langue française et ne savent parfois même pas lire. J’espère que les livrets qu’a évoqués tout à l'heure Mme le garde des sceaux seront rédigés en différentes langues ; le détenu aura ainsi une chance de comprendre l’une d’entre elles. Par ailleurs, je souhaite interroger Mme le garde des sceaux sur les modalité...

...dans la loi les principes les plus importants. Ainsi la commission des lois a-t-elle accepté de faire figurer dans son texte le respect de l’intégrité physique et l’encadrement du recours à la force. Mais on ne retrouve aucune trace de l’interdiction de la discrimination au sein des établissements pénitentiaires, et je le regrette. Il s’agit en effet d’une pratique extrêmement répandue dans les prisons : en dehors de toute sanction, certains détenus font l’objet de discrimination. Je sais d’ailleurs de quoi je parle, de même que Mme la ministre, puisque nous en avons déjà discuté : il s’agit de discriminations qui ne sont pas justifiées sur le terrain de la sécurité ou de la santé du détenu. Elles sont simplement l’expression de comportements isolés de la part d’agents abusant de leur position...

...e procédure pénale. L’article D. 433 dispose que le service religieux est assuré, pour les différents cultes, par des aumôniers désignés par le ministre de la justice, sur proposition du directeur régional, qui consulte à cet effet l’autorité religieuse compétente, et après avis du préfet. Il existe donc un cadre précis qui permet aux aumôniers des différents cultes d’accomplir leur ministère en prison. Cependant, il convient de préciser que la procédure d’agrément est fondamentale : elle permet à l’autorité compétente de s’assurer de la représentativité d’un culte, voire du caractère cultuel de certains courants de pensée. Ainsi, la possibilité accordée aux Témoins de Jéhovah d’entrer dans les prisons a donné lieu à une jurisprudence très importante du Conseil d’État, dans la perspective d’u...

... une telle disposition ? Pourquoi lui ôter la possibilité de se prévaloir d’une atteinte à sa dignité ? La Cour européenne a pourtant largement développé sa jurisprudence dans le domaine de l’atteinte à la dignité des détenus : elle n’hésite pas à juger contraires à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme des conditions de détention objectivement inadaptées au bien-être des prisonniers, en prenant en compte, notamment, l’aménagement des cellules, l’aération, la luminosité, la température, la séparation des sanitaires ou l’absence de matériel de couchage. Il s’agit non pas de science-fiction juridique mais d’une réalité, la France étant régulièrement condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme sur ce fondement. On comprend mieux la raison de l’absence de la not...

Cette obligation positive, qui ne découle pas d’une construction prétorienne, doit trouver son application en prison.

...ier de la qualité d’ayant droit et donc percevoir le RMI à la place du détenu. Mais, au-delà de quatre mois de détention, le détenu est rayé du dispositif du RMI et perd alors tous ses droits. Il ne pourra en bénéficier que le premier jour qui suivra le mois de sa libération. Le RMI étant l’outil d’insertion par excellence, son versement doit pouvoir être pérennisé, sous une autre forme, dans la prison : la réinsertion ne commence pas à la porte de la prison, mais bien dans la prison. La continuité de ce versement pourrait en outre assurer au détenu des conditions de détention décentes. Il existe une allocation d’insertion en faveur des détenus libérés après au moins deux mois de détention, mais les conditions d’éligibilité sont très strictes : elle est conditionnée par des critères de ressou...

...adame la ministre, reprenant les propos que vous avez vous-même tenus tout à l’heure, je dirai que tout le monde n’a pas la possibilité de travailler ! Certaines personnes, même si elles souhaitent avoir une activité, ne sont pas aptes au travail. Elles ont donc besoin de l’aide que nous proposons d’instaurer. Par ailleurs, je répète que cela constituerait pour eux une préparation à la sortie de prison, c'est-à-dire un premier pas vers l’insertion. La sortie, en effet, ne se prépare pas le jour de la libération, mais bien en amont, pendant la détention.

...n ou de perfectionnement » adaptées à l’évolution de leur mission. Je rappelle en effet que ces agents seront exclusivement des « volontaires retraités, issus des corps de l’administration pénitentiaire ». Ces volontaires pourront « demander à rejoindre la réserve civile pénitentiaire dans la limite de cinq ans à compter de la fin de leur lien avec le service. » Nous savons qu’en cinq années la prison bouge – du moins j’espère qu’elle sera amenée à le faire grâce à la présente loi ! – et que les réservistes devront prendre connaissance des changements intervenus. Cela doit se faire dans le cadre de formations adaptées, que ce soit dans des organismes privés ou – ce qui serait encore mieux – auprès de l’École nationale d’administration pénitentiaire.