La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de Mme Catherine Tasca.
La séance est reprise.
La conférence des présidents a établi comme suit l’ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
Semaines réservées par priorité au Gouvernement
Jeudi 5 mars 2009
À 9 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
1°) Suite du projet de loi pénitentiaire (texte de la commission, n° 202, 2008-2009) ;
à 15 heures et le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
3°) Désignation de 36 membres de la mission commune d’information sur la situation des départements d’outre-mer, les présidents de groupes politiques et le délégué de la Réunion des Sénateurs non-inscrits siégeant ès qualités au sein de cette mission ;
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
4°) Suite de l’ordre du jour du matin.
Éventuellement, vendredi 6 mars 2009
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 9 heures 30, à 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi pénitentiaire.
Lundi 9 mars 2009
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi relatif à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés et portant diverses dispositions relatives aux transports (n° 501, 2007-2008).
Mardi 10 mars 2009
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 9 heures 30 jusqu’à 10 heures 30, à 15 heures et le soir :
- Projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer (texte de la commission, n° 233, 2008-2009) ;
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré ;
La commission des finances se réunira le jeudi 5 mars 2009 à 16 heures).
Mercredi 11 mars 2009
À 15 heures et le soir :
1°) Désignation des 36 membres de la mission commune d’information sur la politique en faveur des jeunes ;
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
2°) Suite du projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer.
Jeudi 12 mars 2009
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 9 heures 30, à 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer.
Éventuellement, vendredi 13 mars 2009
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 9 heures 30, à 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer.
Semaine sénatoriale de contrôlede l’action du Gouvernementet d’évaluation des politiques publiques
Mardi 17 mars 2009
À 9 heures 30 :
1°) Dix-huit questions orales :
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 288 de Mme Nathalie Goulet transmise à Mme la ministre de la culture et de la communication ;
- n° 383 de M. Yves Daudigny à Mme la secrétaire d’État chargée de la solidarité ;
- n° 404 de M. Roland Courteau à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville ;
- n° 411 de Mme Anne-Marie Escoffier à M. le ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire ;
- n° 427 de Mme Catherine Tasca à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice ;
- n° 433 de M. Alain Fauconnier à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche ;
- n° 437 de M. Jean Boyer à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville ;
- n° 438 de M. Jean-Jacques Lozach à M. le secrétaire d’État chargé de l’aménagement du territoire ;
- n° 447 de Mme Odette Terrade à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ;
- n° 448 de M. Claude Domeizel à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ;
- n° 449 de M. Martial Bourquin à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville ;
- n° 450 de M. Bernard Vera à Mme la ministre de la santé et des sports ;
- n° 451 de Mme Marie-France Beaufils à Mme la ministre de la santé et des sports ;
- n° 452 de M. Alain Fouché à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche ;
- n° 453 de Mme Mireille Schurch à M. le ministre chargé de la mise en œuvre du plan de relance ;
- n° 454 de M. Michel Doublet à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche ;
- n° 456 de M. Gérard Bailly à M. le secrétaire d’État chargé de l’industrie et de la consommation ;
- n° 457 de M. Jean-Claude Carle à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi ;
À 15 heures :
2°) Débat sur l’avenir de la presse §
La conférence des présidents :
À 17 heures 30 :
3°) Déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, préalable au Conseil européen des 19 et 20 mars ;
Mercredi 18 mars 2009
À 15 heures :
- Débat sur l’organisation et l’évolution des collectivités territoriales ;
La conférence des présidents :
Jeudi 19 mars 2009
À 9 heures 30 :
1°) Question orale avec débat n° 26 de M. David Assouline à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche sur l’application de la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités ;
La conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ;
à 15 heures :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
3°) Question orale avec débat n° 24 de Mme Michèle André à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, sur la politique de lutte contre les violences faites aux femmes ;
La conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ;
Semaine d’initiative sénatoriale
Mardi 24 mars 2009
À 15 heures :
- Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, de simplification et de clarification du droit et d’allégement des procédures (texte de la commission, n° 210, 2008-2009) ;
La conférence des présidents a fixé :
Mercredi 25 mars 2009
À 15 heures :
1°) Suite de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, de simplification et de clarification du droit et d’allégement des procédures ;
2°) Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission des affaires culturelles sur la proposition de résolution européenne, présentée au nom de la commission des affaires européennes en application de l’article 73 du règlement par M. Hubert Haenel, sur le respect de la diversité linguistique dans le fonctionnement des institutions européennes (n° 204, 2008-2009) ;
Jeudi 26 mars 2009
Journée mensuelle réservée aux groupes de l’opposition et aux groupes minoritaires :
À 9 heures :
1°) et 2°) La conférence des présidents délibérera lors de sa prochaine réunion sur l’inscription des deux sujets réservés au groupe socialiste et au groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche.
À 15 heures et, éventuellement, le soir :
3°) Question orale du groupe socialiste sur les problèmes rencontrés par les services publics ruraux ;
4°) Proposition de loi visant à exclure les communes de moins de 2 000 habitants du dispositif de service d’accueil des élèves d’écoles maternelles et élémentaires, présentée par M. Yvon Collin et plusieurs de ses collègues (n° 219, 2008-2009) ;
La conférence des présidents a fixé :
Semaines réservées par priorité au Gouvernement
Mardi 31 mars 2009
À 10 heures :
1°) Dix-huit questions orales :
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 379 de M. Christian Cambon à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice ;
- n° 400 de Mme Anne-Marie Escoffier à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ;
- n° 439 de M. René-Pierre Signé à M. le secrétaire d’État chargé de l’industrie et de la consommation ;
- n° 442 de Mme Bernadette Bourzai transmise à M. le secrétaire d’État chargé de l’emploi ;
- n° 445 de Mme Bernadette Dupont à M. le ministre de l’éducation nationale ;
- n° 455 de Mme Brigitte Gonthier-Maurin à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche ;
- n° 459 de M. Bernard Fournier à M. le ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire ;
- n° 460 de M. Alain Fouché à Mme la secrétaire d’État chargée de la prospective et du développement de l’économie numérique ;
- n° 461 de M. Hervé Maurey à M. le secrétaire d’État chargé des transports ;
- n° 462 de M. Jean Bizet à M. le ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire ;
- n° 463 de M. Claude Bérit-Débat à Mme la ministre de la santé et des sports ;
- n° 464 de M. Jean-Luc Fichet à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche ;
- n° 465 de Mme Raymonde Le Texier à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice ;
- n° 466 de M. Jean-Claude Frécon à M. le ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire ;
- n° 467 de M. Gérard Miquel à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ;
- n° 468 de M. Simon Sutour à M. le ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire ;
- n° 469 de M. René Teulade à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville ;
- n° 470 de M. Michel Boutant à Mme la ministre de la santé et des sports ;
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 15 heures et le soir :
2°) Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances rectificative pour 2009 (A.N., n° 1494) ;
La conférence des présidents a fixé :
Mercredi 1er avril 2009
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2009.
Jeudi 2 avril 2009
À 9 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
1°) Projet de loi relatif au transfert aux départements des parcs de l’équipement et à l’évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers (n° 14, 2008-2009) ;
La conférence des présidents a fixé :
à 15 heures et le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin.
En outre, la conférence des présidents a procédé à la répartition des quatre sujets par séance des journées mensuelles du 7 mai et du 21 juin, réservées aux groupes d’opposition et aux groupes minoritaires.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Ces propositions sont adoptées.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
Madame la présidente, je saisis l’occasion de la lecture des conclusions de la conférence des présidents pour vous demander si cette dernière a été saisie de la question de la déclaration d’urgence sur le projet de loi pénitentiaire, que nous examinons actuellement.
En effet, vous savez que M. le président de l’Assemblée nationale a souhaité que cette urgence soit abolie et que M. Jean-Pierre Bel, au nom du groupe socialiste, a formulé avec beaucoup d’instance une demande identique.
Nous sommes très nombreux à considérer que, pour la première mise en œuvre des nouvelles dispositions, il serait vraiment souhaitable que nous puissions prendre le temps nécessaire, le temps fixé par la Constitution, pour débattre au fond, au cours des différentes lectures et navettes prévues, du projet de loi pénitentiaire.
Je vous remercie, madame la présidente, des réponses que vous pourrez m’apporter.
Monsieur Sueur, la conférence des présidents a bien été saisie de cette question.
À la suite des interventions de M. Jean-Pierre Bel, président du groupe socialiste, et de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, présidente du groupe CRC-SPG, M. le président du Sénat a adressé un courrier à M. François Fillon, Premier ministre, qui lui a répondu par une lettre datée de ce jour.
M. le Premier ministre a confirmé la décision du Gouvernement de déclarer l’urgence sur le projet de loi pénitentiaire en se fondant sur une interprétation des règles de procédure parlementaire différente de celle qui a été exprimée par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et par M. Jean-Pierre Bel. Il considère que l’urgence ayant été déclarée sur le présent projet de loi avant le 1er mars, date d’entrée en vigueur des nouvelles dispositions constitutionnelles, la règle antérieure s’applique.
Au demeurant, la réponse négative à la demande de revenir sur l’urgence me semble pouvoir évoluer – Mme Nicole Borvo Cohen-Seat pourra le confirmer – en fonction de l’état du texte après son passage dans chacune des deux assemblées.
Si M. le Premier ministre maintient sa position, nous en prenons acte, mais j’ai cru comprendre, à la lecture du nouveau texte constitutionnel, que les deux conférences des présidents, dès lors qu’elles avaient la même position, pouvaient lever la procédure d’urgence ou d’accélération. Ai-je mal compris, madame la présidente ?
Je répète que, selon M. le Premier ministre, le texte sur lequel s’applique la déclaration d’urgence est celui qui a été déposé avant la mise en application de la révision constitutionnelle.
Par ailleurs, nous avons été informés du fait que la conférence des présidents de l’Assemblée nationale n’avait pas pris position. Une demande a simplement été présentée par le président de l’Assemblée nationale, demande à laquelle le Gouvernement a répondu négativement comme à la demande du président du Sénat.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Bien entendu, les explications du Gouvernement ne nous ont pas convaincus. Il est assez surprenant que deux règles constitutionnelles cohabitent pour l’examen d’un même texte, et ce d’autant plus que le mot « urgence » n’existe plus dans la Constitution révisée en juillet.
Nous avons protesté et M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement, qui siégeait à la conférence des présidents, nous a dit que l’on pourrait revoir les choses ultérieurement, en précisant que le texte ne serait peut-être pas soumis à l’Assemblée nationale avant le mois de mai, ce qui est évidemment en totale contradiction avec l’urgence.
J’ai du mal à croire que l’on pourrait appliquer dans les établissements pénitentiaires, dès le 1er juillet, les fruits du travail du Parlement…
J’éprouve un sentiment de malaise.
Nous avons exprimé notre interrogation sur l’application de la procédure d’urgence au texte dont nous débattons aujourd’hui, mais, compte tenu des éléments que vous venez de nous donner de la part de M. le Premier ministre, nous sommes maintenant perplexes devant la porte qui reste ouverte.
Cela signifie-t-il que, si le texte convient au Gouvernement, nous aurons droit à une navette, c’est-à-dire à la levée de l’urgence ? Dans ce cas, il s’agira d’une récompense. Au contraire, serons-nous punis si le texte n’est pas conforme aux souhaits du Gouvernement, auquel cas l’urgence s’appliquera ?
demande une suspension de séance de dix minutes pour que nous puissions examiner la situation extrêmement complexe dans laquelle nous nous trouvons.
Je veux bien accéder à votre demande, mais pour cinq minutes.
Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à vingt et une heures cinquante, est reprise à vingt et une heures cinquante-cinq.
Mes chers collègues, je voudrais dire avec gravité, au nom du groupe socialiste, qui vient de se réunir, qu’il est tout à fait indigne du Parlement de se trouver dans cette situation de totale confusion tant sur le fond que sur la procédure.
Sur ce sujet grave, essentiel pour notre société, sur lequel des rapports parlementaires importants ont été écrits, qui a donné lieu à un travail intense, en particulier de la part de M. le rapporteur, nous assistons à une véritable palinodie.
Nous attendons ce projet de loi depuis des années. Il a été longuement préparé, chacun peut en convenir. Et voilà qu’on nous dit tout d’un coup qu’il doit être examiné en urgence alors que les navettes parlementaires sont parfaitement justifiées, tout le monde le sait !
S’il y a urgence, comment expliquer – Mme Borvo Cohen-Seat vient de poser la question – que M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement nous annonce qu’il ne sera peut-être soumis à l’Assemblée nationale qu’au mois de mai ? Est-ce une urgence de convenance ? Dans ce cas, qu’on nous le dise ! Moi, je dis les choses clairement, madame la garde des sceaux : pourquoi le Gouvernement a-t-il cette attitude ?
Nous avons du mal à comprendre. Le sujet est urgent, certes, parce que les prisons vont mal, mais tout le monde sait bien, y compris dans le monde pénitentiaire, qu’il est parfaitement possible que nous consacrions quelques semaines ou quelques mois de plus pour que la procédure parlementaire aille à son terme. Nous sommes contre les urgences de convenance, je le dis avec force au nom du groupe socialiste.
Pour ce qui est de la procédure, on le sait, la déclaration d’urgence n’existe plus : elle a été remplacée par la « procédure accélérée » ; ainsi en a décidé la nouvelle Constitution. C’est donc bien dans ce cadre que nous nous trouvons. Or la nouvelle Constitution offre au Parlement la possibilité de refuser l’application de cette procédure s’il la juge abusive.
Précisément, en l’espèce, M. le président de l’Assemblée nationale s’est dit opposé à l’application de cette procédure d’urgence devenue procédure accélérée. La conférence des présidents de l’Assemblée nationale, s’il la réunit, le suivra.
Nous réitérons donc la demande de notre groupe, déjà formulée par Jean-Pierre Bel : la conférence des présidents du Sénat doit se réunir pour refuser, elle aussi, l’application de la procédure accélérée sur ce texte.
Ce sera un symbole fort : les deux assemblées du Parlement de la République s’opposant ensemble à une procédure accélérée pour permettre à ce débat serein, même s’il est animé, et positif, car nous avons abordé des questions de fond, d’aller normalement jusqu’à son terme.
Nous protestons contre l’état de confusion dans lequel nous nous trouvons, tant sur le fond que sur la procédure.
Nous reprenons la discussion du projet de loi pénitentiaire, déclaré d’urgence.
Dans la discussion des articles, nous avons entamé l’examen de l’article 10 bis.
Avant la suspension du dîner, nous avions débattu, sur l’initiative du groupe socialiste, de la possibilité de disposer d’interprètes de manière que, lors de leur arrivée dans un établissement pénitentiaire, les détenus étrangers puissent être informés dans une langue qu’ils comprennent et pour qu’ils puissent également se faire entendre des autorités s’ils ne parlent pas le français.
M. du Luart, qui présidait alors la séance, a lui-même bien voulu reconnaître l’importance de ce sujet. Le président Hyest et le rapporteur s’en sont également préoccupés, si bien qu’on a fait venir le président de la commission des finances, car on nous oppose, une fois de plus, l’article 40.
Nous aimerions savoir ce qu’il en est résulté et quelle procédure le président Hyest et le rapporteur souhaitent utiliser.
L’article 40 a effectivement été opposé à une proposition de modification de la commission. Cela étant, monsieur Mermaz, il n’a jamais été question d’interprètes : il s’agissait de la traduction de documents fournis aux détenus, ce qui n’est pas la même chose.
La commission des finances a confirmé que l’article 40 s’appliquait. Nous essaierons de trouver une solution d’ici à la fin des débats, car cette question est en effet importante. Mais, pour l’instant, nous ne pouvons que voter l’article tel qu’il est.
M. Louis Mermaz. Demandez donc au doyen Gélard de traduire ces documents en anglais !
Sourires
Nous n’allons pas reprendre le débat sur la valeur relative des langues en matière juridique !
Exclamations sur le banc des commissions.
Je prolongerai l’intervention, justifiée, de mon collègue Mermaz.
L’utilisation de l’article 40 me semble excessive, en particulier sur le texte que nous examinons aujourd’hui. Mais, indépendamment de cela, si nous voulons avoir une chance de voir le Conseil constitutionnel s’interroger sur les conditions d’utilisation de l’article 40 à l’occasion de l’examen d’un texte, il faut que, en séance, ces conditions soient contestées par les uns ou par les autres.
Mon cher collègue, je vous rappelle que c’est le Conseil constitutionnel lui-même qui nous a contraints à appliquer l’article 40 comme nous le faisons aujourd'hui, alors que nous procédions auparavant tout à fait différemment.
Ne revenez pas sur un débat qui a été assez douloureux pour le Sénat !
Je reprends ce que je disais juste avant la suspension de séance : tout cela est absurde !
Tout à l’heure, j’avais cru percevoir une certaine effervescence sur les travées, d’où le bon sens semblait pouvoir surgir. Je pensais que la raison était près de l’emporter : on n’allait pas transmettre une information à quelqu’un qui n’est pas en mesure de la comprendre !
Madame le garde des sceaux, vous qui en avez le pouvoir, acceptez-vous enfin que votre article soit un article utile, c’est-à-dire un article prévoyant la transmission d’une information compréhensible par le détenu ? Si ce n’est pas le cas, à quoi sert cet article ? À rien !
Tout le monde a l’air d’accord sur le fond.
Mais, madame la ministre, vous n’avez pas répondu à la question concernant l’information des détenus lors de leur admission dans un établissement pénitentiaire. Il ne peut pas y avoir un interprète derrière chaque détenu, avez-vous dit. Nous le comprenons très bien. Mais vous n’avez pas répondu sur le problème de fond que soulève cet article.
Bien sûr, il ne s’agit pas d’imposer un principe qui ne serait pas réaliste, mais le Gouvernement peut résoudre simplement le problème en se déclarant favorable à la transmission des informations dans une langue que le détenu peut comprendre.
Sinon, il faut réserver cet article jusqu’à ce que la commission des finances réexamine la question. Malheureusement, il n’y a pas parmi nous de représentant de la commission des finances. En effet, la procédure que le Conseil constitutionnel nous impose, à savoir le fait de statuer en amont sur l’applicabilité de l’article 40, ne peut pas être arbitraire ! Il doit y avoir un recours possible contre la décision de la commission des finances.
Je me joins à la demande de Mme Borvo Cohen-Seat : je souhaite que Mme le garde des sceaux réserve cet article pour apporter une réponse positive.
Mais j’ai donné ma réponse !
Un texte a été proposé par la commission – après qu’elle eut été amenée à modifier sa proposition initiale, compte tenu des problèmes qui se posaient – et il a reçu l’assentiment du Gouvernement. Nous avons entendu de très nombreuses interventions et je pense qu’il est maintenant temps de passer à l’examen des amendements, puis de voter sur l’article.
Nous ne pouvons pas reprendre éternellement le même débat ! Si l’article 40 doit s’appliquer, il s’applique, point à la ligne ! Nous n’avons jamais discuté cette décision. Lorsque la commission des finances déclare que l’article 40 s’applique, si vous trouvez cela absurde, adressez-vous à elle !
Cela étant, peut-être devra-t-on mener une réflexion globale, comme nous l’avons demandé, sur la mise en œuvre de l’article 40.
Dans le cadre de la révision du règlement, une telle réflexion est encore nécessaire.
En tout cas, pour l’heure, madame la présidente, je pense que nous avons épuisé le sujet et qu’il nous faut poursuivre l’examen de cet article.
L'amendement n° 211 rectifié, présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, M. Alfonsi et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, est ainsi libellé :
Dans la première phrase de cet article, après les mots :
le détenu est informé
insérer les mots :
oralement et par la remise d'un document écrit
La parole est à M. Jacques Mézard.
Nous nous attendions à ce débat sur l’article 10 bis. Cet amendement vise d’ailleurs à essayer de contourner, partiellement et de manière un peu radicale, l’application de l’article 40, qui nous avait profondément choqués. Il nous a en effet été indiqué que c’était en vertu de l’article 40 qu’il fallait renoncer à la nécessité d’informer le détenu « dans la langue qu’il comprend ».
Mme le garde des sceaux nous a expliqué pourquoi l’article 40 était applicable. On peut comprendre ce point de vue, mais ne point le partager, et c’est notre cas. En effet, nous ne pouvons appréhender ce que le M. Badinter a qualifié de « grande loi » par le petit bout de la lorgnette !
Dans une loi pénitentiaire, l’information du détenu est évidemment un élément très important. Madame le garde des sceaux nous l’a indiqué, dans les maisons d’arrêt, lors de l’arrivée d’un détenu, cette information se réalise souvent de manière pragmatique, grâce à des traductions données par les codétenus ; mais celles-ci ne sont pas toujours très exactes, c’est le moins que l’on puisse dire.
Il est donc nécessaire d’essayer au moins de préciser cet article 10 bis. C’est pourquoi nous proposons d’insérer les mots « oralement et par la remise d’un document écrit ». Ainsi, le Gouvernement pourra garantir la traduction du document écrit et de toutes les informations visées dans cet article : régime de détention du détenu, ses droits et obligations, recours et requêtes qu’il peut former, règles applicables à l’établissement.
En contournant au moins partiellement l’obstacle qui a été dressé, cet amendement est aussi une forme de protestation contre l’application de l’article 40 sur un tel sujet.
Dans le contexte créé par les difficultés sur lesquelles nous avons passé quelque temps, la précision semble utile.
En conséquence, la commission a émis un avis favorable.
Le Gouvernement émet le même avis. D’ailleurs, 100 000 livrets d’accueil seront édités à cette fin. Cet amendement sera donc ainsi satisfait.
L'amendement est adopté.
Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 11 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :
Compléter la seconde phrase de cet article par les mots :
et lui sont rendues accessibles pendant la durée de sa détention.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Les parlementaires n’ont toujours pas prévu comment on allait informer le détenu de ses droits. Cela est regrettable. Heureusement, le Sénat a la possibilité d’adopter cet amendement !
Sourires
Le Comité des ministres du Conseil de l’Europe a adopté sur cette question, le 21 juin 1984, une recommandation aux termes de laquelle « les détenus étrangers devraient être informés à bref délai après leur admission dans un établissement pénitentiaire, dans une langue qu’ils comprennent, des principaux aspects du régime de l’établissement ».
Cet amendement prévoit que les règles applicables dans l’établissement sont portées à la connaissance du détenu non seulement au moment de son incarcération, mais également tout au long de sa détention.
En effet, le jour de son incarcération, le détenu vit nécessairement un moment difficile, son esprit est évidemment perturbé et il n’est pas forcément en mesure de bien saisir toutes les informations qu’on lui donne. C’est pourquoi il me semble important qu’il puisse en prendre également connaissance plus tard.
En vertu de la règle pénitentiaire européenne 30.1, « lors de son admission et ensuite aussi souvent que nécessaire, chaque détenu doit être informé par écrit et oralement – dans une langue qu’il comprend – de la réglementation relative à la discipline, ainsi que de ses droits et obligations en prison ».
Je le rappelle, 20 % des détenus sont étrangers ; ils ne maîtrisent donc pas la langue française et ne savent parfois même pas lire. J’espère que les livrets qu’a évoqués tout à l'heure Mme le garde des sceaux seront rédigés en différentes langues ; le détenu aura ainsi une chance de comprendre l’une d’entre elles.
Par ailleurs, je souhaite interroger Mme le garde des sceaux sur les modalités de communication existantes, non seulement en termes de langue, mais aussi au regard des possibilités de médiation vis-à-vis des personnels de l’administration pénitentiaire.
C’est bien tout au long de la détention que la commission entendait l’exercice du droit à l’information, mais il est peut-être opportun de le préciser expressément.
En conséquence, la commission a émis un avis favorable.
Le Gouvernement est tout à fait favorable à cet amendement.
Concernant les modalités ou les moyens d’information, les détenus disposent dès leur arrivée de documents, avec notamment ce que l’on appelle le « kit de l’arrivant », qui contient un grand nombre d’informations. Ils peuvent en outre s’adresser aux associations, aux conseillers d’insertion et de probation, aux enseignants, qui sont éventuellement en mesure de les aider à connaître leurs droits, ou encore aux délégués du Médiateur de la République, qui ont beaucoup œuvré en faveur de l’amélioration des droits des détenus. Les voies d’information sont donc nombreuses et diverses, mais le présent amendement contribuera à améliorer encore cette information.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 95, présenté par MM. Yung, Anziani et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Lors de leur admission, les détenus ressortissants d'un pays étranger sont informés sans délai de leur droit de prendre contact avec leurs représentants diplomatiques ou consulaires. Ils sont informés de la possibilité de solliciter leur transfert vers un autre pays en vue de l'exécution de leur peine.
La parole est à M. Richard Yung.
C’est avec le cœur rempli d’espoir que je défends cet amendement puisque deux amendements déposés par des membres de l’opposition viennent d’être acceptés et adoptés.
Après avoir évoqué le délicat sujet de la langue, nous abordons ici certains droits particuliers des ressortissants étrangers incarcérés.
Comme cela a été souligné, 20 % des détenus sont d’origine étrangère. Il nous semble donc utile de rappeler, suivant les règles minima des Nations unies pour le traitement des détenus, d’une part, et la convention de Vienne sur les relations consulaires, d’autre part, que les détenus étrangers peuvent avoir besoin d’une aide particulière lorsqu’ils sont incarcérés dans notre pays.
Nous considérons qu’ils doivent être informés de leur droit de prendre contact avec leurs représentants diplomatiques ou consulaires. Certes, cela semble sans doute évident à beaucoup d’entre vous, mais un certain nombre d’entre eux ne sont pas familiers des arcanes du droit international et ne le savent peut-être pas.
Dans le même esprit, il serait souhaitable de porter à leur connaissance le fait qu’ils sont susceptibles de bénéficier d’un transfert vers un autre pays en vertu de la convention sur le transfert des personnes condamnées ou en application d’accords bilatéraux. Il importe de les informer de cette possibilité, même si elle n’est pas systématique. Si elle existe, ils n’y auront peut-être pas recours, mais ils doivent être mis en mesure de l’étudier.
Je tiens tout d’abord à indiquer à mon collègue qu’il est relativement logique que la commission des lois émette peu d’avis favorables en séance publique puisqu’elle a intégré dans le texte qu’elle propose à la discussion les amendements qu’elle avait accueillis favorablement lors de l’examen préalable.
Chacun d’entre nous va devoir s’habituer à ce nouvel état de fait.
S’agissant maintenant des dispositions prévues dans l’amendement n° 95, elles me semblent être englobées dans le droit plus général à l’information des détenus visé par l’article 10 bis.
Par ailleurs, je doute de la possibilité prévue de manière générale de solliciter le transfert vers un autre pays en vue de l’exécution de la peine dans la mesure où celle-ci, qui dépend des conventions internationales signées par notre pays, n’est pas envisageable pour toutes les nationalités.
C'est la raison pour laquelle la commission vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Cet amendement vise à transposer la convention de Vienne et celle de Strasbourg.
Toutefois, ces textes sont déjà d’application directe. Mentionner cette possibilité reviendrait à alourdir le texte et n’apporterait rien de plus.
En conséquence, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Nous nageons en plein surréalisme, madame la présidente !
L’article 10 bis est une absurdité si le ressortissant étranger n’a pas la possibilité de bénéficier d’un interprète, mais l’article 40 de la Constitution nous a été opposé… D’ailleurs, en tant que président de la commission des finances, notre collègue Jean Arthuis doit suivre nos débats avec beaucoup d’intérêt.
On demande à un étranger incarcéré non seulement d’être polyglotte, mais encore d’avoir une connaissance complète de l’ensemble des conventions internationales ! À l’évidence, il doit pouvoir se renseigner pour savoir s’il a la faculté de solliciter son transfert dans un autre pays pour y purger sa peine. Il revient à l’administration de lui dire si la France a signé ou non une convention avec le pays vers lequel il souhaiterait être extradé. En ce moment même, on connaît la situation dramatique de cette jeune Française qui a subi une condamnation inique au Mexique.
Je souhaite répondre à Mme le garde des sceaux.
L’amendement n° 95 vise tout simplement à porter à la connaissance des détenus le fait qu’ils ont la possibilité de solliciter leur transfert vers un autre pays. Nous avons retenu une formulation prudente puisque nous n’indiquons pas qu’il y a obligatoirement transfert. Dans certains cas, en fonction des conventions bilatérales ou multilatérales, le transfert s’appliquera, dans d’autres, il ne sera pas possible.
Néanmoins, il est important qu’une personne étrangère incarcérée en France, qui a parfois une peine assez longue à purger, ait connaissance de cette possibilité. Il ne me semble pas exorbitant de faire cette demande, d’autant que cela existe déjà en partie aujourd'hui. Il en est de même pour l’aide consulaire qui peut lui être apportée.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 10 bis est adopté.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons l’honneur d’accueillir ce soir une délégation de la commission des finances du parlement luxembourgeois, conduite par son président, M. Laurent Mosar.
Mme la garde des sceaux, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.
C’est toujours un plaisir pour nous de recevoir nos collègues des parlements européens.
Nos collègues luxembourgeois auront, demain matin, une séance de travail conjointe avec les commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat. Je ne doute pas que ce séminaire de réflexion permettra de progresser sur les nombreux sujets d’intérêt commun qui touchent nos deux économies.
Une telle initiative doit être saluée en ces temps de crise, où la coordination des politiques menées par nos pays s’impose, plus encore qu’à l’accoutumée, comme une ardente nécessité.
Je me réjouis donc de votre venue à Paris, et je vous souhaite, chers collègues, au nom du Sénat tout entier, un utile et agréable séjour à Paris.
Applaudissements
L'amendement n° 97, présenté par M. Anziani et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Tout détenu a le droit de solliciter des conseils juridiques et les autorités pénitentiaires doivent raisonnablement l'aider à avoir accès à de tels conseils.
Les consultations et autres communications – y compris la correspondance -– sur des points de droit entre un détenu et son avocat doivent être confidentielles.
La parole est à M. Alain Anziani.
Cet amendement, qui rejoint les préoccupations exprimées voilà quelques instants, vise à permettre aux détenus d’accéder à des conseils juridiques de toute nature.
En effet, le détenu est bien souvent une personne « paumée » – le terme me paraît approprié –, se trouvant dans une situation de misère, y compris parfois intellectuelle, mais surtout d’exclusion telle qu’elle ne peut guère avoir accès aux informations susceptibles de lui être utiles. Or les multiples difficultés que chacun d’entre nous peut rencontrer dans la vie quotidienne sont aggravées par la détention, qu’il s’agisse de la gestion de problèmes familiaux, de la nécessité de rédiger un testament ou de faire un acte de droit civil. Tout cela suppose des conseils, a fortiori quand on est dans la situation que je viens de décrire.
Nous proposons donc que tout détenu ait le droit de solliciter des conseils juridiques et que l’administration pénitentiaire lui facilite l’accès à ce droit.
La commission vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable, et ce pour deux raisons.
D’une part, ces dispositions ne relèvent en aucune manière du domaine de la loi.
D’autre part, le développement des points d’accès au droit dans les prisons et la présence des délégués du Médiateur de la République ont très largement répondu à votre préoccupation.
L’article 10 du projet de loi « garantit à tout détenu le respect de ses droits ».
Par ailleurs, la confidentialité des communications entre un détenu et son avocat figure parmi les droits de la défense. C’est un droit élémentaire.
La confidentialité est, pour toute personne, un droit fondamental, à caractère constitutionnel, dont la réaffirmation par une norme législative se révèle inutile.
En conséquence, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Même si la précision concernant la confidentialité nous paraît inutile dans la mesure où celle-ci va de soi, nous soutenons cet amendement, car le texte présente une insuffisance – je l’ai déjà indiqué à M. le rapporteur – en ce qui concerne l’appui juridique dont doit pouvoir bénéficier le condamné.
Le plus souvent, le condamné n’a plus de contact avec le conseil qui l’a défendu puisque, très logiquement, la mission du conseil s’arrête après la condamnation définitive. Certes, l’avocat a le droit de conserver des liens avec le condamné, mais, dans la pratique, je me suis, pour ma part, souvent fait le reproche d’avoir, par la force des choses et eu égard à diverses difficultés, laissé un détenu seul après sa condamnation.
J’ajoute que la plupart des condamnés bénéficient de l’aide juridictionnelle ; leur avocat est donc souvent commis d’office et ne peut ensuite rester en contact direct avec le condamné, d’autant que celui-ci est le plus souvent transféré, parfois très loin.
En dépit des dispositions rappelées par M. le rapporteur et Mme le garde des sceaux et de la présence de délégués du Médiateur de la République, il subsiste un vide en la matière.
Il serait particulièrement utile que les barreaux puissent organiser des permanences auprès des maisons d’arrêt et des maisons centrales, car l’absence des avocats pose un réel problème.
L'amendement n'est pas adopté.
Les condamnés communiquent librement avec leurs avocats dans les mêmes conditions que les prévenus pour l'exercice de leur défense.
Il est prévu, à l’article 11, que les condamnés peuvent communiquer librement avec leurs avocats dans les mêmes conditions que les prévenus pour l’exercice de leur défense.
Je ne me lasserai jamais de le répéter – tous les enseignants savent que la répétition a des vertus pédagogiques –, force est de se demander comment cela se passera avec un étranger qui ne pratique pas le français !
Le dernier alinéa de l’article 716 du code de procédure pénale dispose bien que « toutes communications et toutes facilités compatibles avec les exigences de la discipline et de la sécurité de la prison sont accordées aux personnes mises en examen, prévenus et accusés pour l’exercice de leur défense ».
La liberté de communication avec l’avocat pour l’exercice de la seule défense constituerait une régression puisqu’elle limiterait ce droit au seul exercice d’une action en justice.
Puisqu’on explique depuis le début de ce débat qu’un détenu demeure un homme, un citoyen – quand il est français – qui dispose de ses droits, hormis bien sûr le fait d’être retenu, nous vous demanderons, avec un amendement que soutiendra notre collègue Alain Anziani, de supprimer, à la fin de cet article, les mots « pour l’exercice de leur défense », qui sont limitatifs.
Le conseil d’un avocat doit pouvoir être fourni au détenu pour toute autre affaire le concernant : une instance de divorce, un problème de caractère civil, etc. L’amendement qui vous sera présenté visera donc à permettre aux détenus de retrouver, comme le veut la loi, la totalité de leurs droits, afin de pouvoir ester en justice chaque fois que cela sera nécessaire.
Tout détenu a le droit, pensons-nous, de solliciter des conseils juridiques, et les autorités pénitentiaires doivent raisonnablement l’aider à avoir accès à de tels conseils, et cela, évidemment, dans une langue qu’il comprend !
Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 15 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Les personnes détenues communiquent librement avec leurs avocats.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement a pour objet de simplifier la rédaction de l’article 11, qui est relatif au droit du détenu de communiquer librement avec son avocat.
Je ne comprends pas pourquoi la rédaction de cet article est si biscornue. Pourquoi faire référence aux condamnés et aux prévenus pour dire qu’ils bénéficient des mêmes droits ? Autant dire directement que les détenus, sans faire de distinction entre prévenus et condamnés, bénéficient du droit de communiquer librement avec leurs avocats ; ce serait plus simple !
Quant à la mention de l’exercice de leur défense, il me semble qu’elle est également superflue. Pour quelle raison un détenu communiquerait-il avec son avocat si ce n’est pour l’exercice de sa défense ? Il convient donc de supprimer cette référence qui me semble restrictive.
Je propose donc de prévoir simplement que les détenus communiquent librement avec leurs avocats.
Les amendements n° 13 et 98 rectifié sont identiques.
L'amendement n° 13 est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller.
L'amendement n° 98 rectifié est présenté par M. Anziani et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
À la fin de cet article, supprimer les mots :
pour l'exercice de leur défense
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l’amendement n° 13.
Cet amendement a été partiellement défendu, mais je souhaite tout de même préciser les raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression de la référence à l’exercice de la défense du détenu.
Il nous semble que cette précision est non seulement inutile, mais également dangereuse. Malgré les garanties qui ont été apportées par le rapporteur, je reste convaincue que cette restriction du champ de communication du détenu avec son avocat n’est pas justifiée et qu’elle masque quelque chose.
Soit l’on considère que toute communication du détenu avec son avocat a un rapport avec l’exercice de la défense et, dans ce cas, l’avocat n’interviendra que lorsqu’une procédure contentieuse est engagée. Soit l’on considère que le principe de libre communication du détenu avec l’avocat est pleinement respecté et, dans ce cas, la mention « pour l’exercice de leur défense » est de trop.
En effet, en dehors de tout contentieux, qu’il soit disciplinaire ou même pénal, l’avocat peut apporter au détenu des conseils juridiques sur sa situation carcérale, mais aussi, comme l’a dit notre collègue Louis Mermaz, sur ses biens, sur sa famille ou toute autre question relevant de la gestion de ses droits personnels ou patrimoniaux. II n’y a pas, à proprement parler, de « défense » sur ces questions. Cela signifie-t-il que le détenu ne pourra pas communiquer avec son avocat à leur sujet ?
Cet article est flou et ne garantit pas la libre communication du détenu avec son avocat puisqu’il induit une restriction qui n’est pas justifiée au regard du droit européen. En effet, selon la Cour européenne des droits de l’homme, « il y va clairement de l’intérêt public qu’une personne désireuse de consulter un homme de loi puisse le faire dans les conditions propices à une pleine et libre discussion ».
L’article 11 qui nous est proposé ne permettant pas une telle discussion, nous vous proposons de supprimer la référence à l’exercice de la défense.
La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l’amendement n° 98 rectifié.
Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ?
La formulation simple, qui se comprend facilement et qui ne donne pas lieu à interprétation, est la suivante : les condamnés communiquent librement avec leurs avocats dans les mêmes conditions que les prévenus.
Pourquoi ajouter « pour l’exercice de leur défense » ? Ces mots sont forcément destinés à modifier la première partie de la phrase.
Je ne suspecte pas les auteurs du texte de mauvaise intention, mais mieux vaut être clair. Cet ajout étant inutile, autant supprimer ces mots pour permettre au détenu de communiquer avec son avocat sur tout type de questions.
L'amendement n° 12 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Lorsqu'ils ne bénéficient pas d'un avocat attitré, les détenus bénéficient de l'aide à l'accès au droit prévu par les dispositions de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement a pour objet d’inscrire dans la loi pénitentiaire la possibilité pour le détenu de bénéficier de l’aide à l’accès au droit prévue par la loi du 10 juillet 1991. Vous me répondrez que cela existe déjà pour les détenus. Mais nous ne perdrons rien à le prévoir de manière expresse dans la loi pénitentiaire.
Cela permettra d’ailleurs de nous conformer à la règle pénitentiaire européenne 23.3, selon laquelle, « lorsque la législation prévoit un système d’aide judiciaire gratuite, cette possibilité doit être portée à l’attention de tous les détenus par les autorités pénitentiaires ». C’est la raison pour laquelle je vous propose, avec cet amendement, de faire figurer cette possibilité dans la loi pénitentiaire.
La commission souhaite le retrait des amendements n° 15 rectifié, 13 et 98 rectifié ; à défaut, elle émettra avis défavorable.
En effet, le problème ici évoqué est essentiellement, pour ne pas dire exclusivement, théorique. Les auteurs de ces amendements invoquent le fait que la liberté de communication avec l’avocat ne concerne pas seulement l’exercice de la défense.
En premier lieu, il faut remarquer que les échanges avec l’avocat sont toujours couverts par le secret et que nul ne peut en contrôler le contenu. Il est donc parfaitement possible que le détenu communique avec son avocat sur un problème de divorce, de pacs, de bien lui appartenant, ou que sais-je encore ! Cette communication sera de toute façon totalement confidentielle.
En second lieu, sur le plan des principes, il faut bien se remémorer que les garanties apportées par la loi à la liberté d’échange entre les personnes détenues et leurs avocats dérogent aux règles qui s’appliquent habituellement en milieu carcéral. Mais ces garanties ont leur première justification dans les exigences de la défense de la personne condamnée. Il me paraît donc naturel que cette précision demeure dans la loi, même si cela ne change strictement rien par rapport aux préoccupations qui ont été exprimées.
Quant à l’amendement n° 12 rectifié, nous pensons qu’il est satisfait puisque l’aide juridictionnelle est déjà prévue dans notre droit. C’est un droit ! Par conséquent, il ne nous paraît pas utile de le préciser à nouveau. C’est pourquoi la commission demande également le retrait de cet amendement.
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 15 rectifié. L’article 11 reprend, pour les condamnés, le principe de libre communication avec leurs avocats prévu, pour les prévenus, par l’article 716 du code de procédure pénale. Il est donc inutile de viser ici les personnes détenues de manière à inclure les prévenus.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques n° 13 et 98 rectifié. Certes, on pourrait penser que les mots « pour l’exercice de leur défense » sont limitatifs, mais l’exercice de la défense recouvre également l’assistance et le conseil.
Enfin, il est défavorable à l’amendement n° 12 rectifié, qui est inutile, car l’accès au droit est déjà prévu par la loi de 1991.
L’explication de Mme la garde des sceaux me gêne.
Madame la ministre, ne nous dites pas que l’exercice de la défense englobe également le conseil en matière de divorce, de pension alimentaire, etc. Ce n’est pas possible !
Autant faire simple, comme l’a dit notre collègue Alain Anziani, et dire seulement que les condamnés communiquent librement avec leurs avocats. Cela permet d’englober tous les aspects de l’échange entre le condamné et son avocat.
À moins de supposer que tout directeur d’établissement public est au moins agrégé de droit, mais s’ils ont indiscutablement tous de bonnes connaissances juridiques, le fait de préciser que l’avocat est là pour l’exercice de la défense des personnes détenues entretient une confusion.
En effet, les condamnés et ceux qui sont en détention provisoire – n’oublions pas l’importance de ces détenus ! – peuvent parfaitement prendre l’initiative d’une action en justice. À ce moment-là, leurs avocats ne sont pas défendeurs, puisque ce sont eux, au contraire, qui introduisent l’action.
Par conséquent, la rédaction est ambiguë. Ce n’est plus du droit, c’est du Molière !
L'amendement n'est pas adopté.
Les amendements sont adoptés.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 11 est adopté.
Les personnes détenues ont droit à la liberté de conscience et peuvent exercer leur culte, selon les conditions adaptées à l'organisation des lieux, sans autres limites que celles imposées par la sécurité et le bon ordre de l'établissement.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 14 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Le droit à la liberté de conscience et de culte des détenus doit être respecté.
Chaque détenu peut accomplir au sein de l'établissement pénitentiaire les actes propres à son culte dans des conditions conformes aux exigences de la sécurité et du bon ordre de l'établissement.
L'administration pénitentiaire agrée le personnel d'aumônerie pour assurer des services ou des activités cultuelles.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement vise à réécrire l’article 11 bis afin d’y ajouter quelques éléments.
La conformité des conditions d’exercice du culte avec les exigences de sécurité et de bon ordre de l’établissement est maintenue. En revanche, l’amendement fait référence à l’agrément du personnel d’aumônerie.
Les règles de l’assistance spirituelle apportée aux détenus sont prévues dans les articles D. 432 à D. 439 du code de procédure pénale. L’article D. 433 dispose que le service religieux est assuré, pour les différents cultes, par des aumôniers désignés par le ministre de la justice, sur proposition du directeur régional, qui consulte à cet effet l’autorité religieuse compétente, et après avis du préfet.
Il existe donc un cadre précis qui permet aux aumôniers des différents cultes d’accomplir leur ministère en prison.
Cependant, il convient de préciser que la procédure d’agrément est fondamentale : elle permet à l’autorité compétente de s’assurer de la représentativité d’un culte, voire du caractère cultuel de certains courants de pensée.
Ainsi, la possibilité accordée aux Témoins de Jéhovah d’entrer dans les prisons a donné lieu à une jurisprudence très importante du Conseil d’État, dans la perspective d’une ouverture du champ des cultes au-delà des grandes religions.
En raison de ces spécificités, il semble nécessaire de préciser que le service du culte s’exerce sous le contrôle de l’administration pénitentiaire, par le biais d’une procédure d’agrément, reprise dans le cadre des décrets d’application.
L'amendement n° 99, présenté par M. Anziani et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Les personnes détenues ont droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ils peuvent exercer leur culte selon les conditions adaptées à l'organisation des lieux.
La parole est à M. Alain Anziani.
Cet amendement, qui vise à réécrire l’article 11 bis, présente deux différences avec le texte de la commission.
La première, fondamentale, vise à réparer ce qui est, selon moi, un oubli des auteurs de l’article 11 bis. Il s’agit de reconnaître la liberté d’opinion. On voit mal pour quelles raisons ce texte priverait le détenu de la liberté d’opinion. Qu’on affirme la liberté de conscience et de religion du détenu, c’est bien. Mais pourquoi ne pas mentionner aussi la liberté d’opinion ? Je rappelle que celle-ci est inscrite dans le préambule de la Constitution de 1946 et qu’elle fait partie des principes fondamentaux reconnus, notamment, par le Conseil constitutionnel en 1977.
Dès lors, c’est bien la moindre des choses que d’ajouter ici la mention de la liberté d’opinion.
Par ailleurs, cet amendement vise à supprimer la référence aux limites imposées par la sécurité et le bon ordre de l’établissement, qui n’apporte pas grand-chose et risque au contraire de restreindre la liberté de religion des détenus.
Je précise, madame la présidente, que je rectifie cet amendement en remplaçant les mots « de pensée » par les mots « d’opinion » et en corrigeant l’erreur grammaticale qui consistait, au début de la deuxième phrase à employer le pronom « Ils » au lieu de « Elles ».
Je suis donc saisie d’un amendement n° 99 rectifié, présenté par M. Anziani et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Les personnes détenues ont droit à la liberté d'opinion, de conscience et de religion. Elles peuvent exercer leur culte selon les conditions adaptées à l'organisation des lieux.
L'amendement n° 227, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
À la fin de cet article, supprimer les mots :
, sans autres limites que celles imposées par la sécurité et le bon ordre de l'établissement
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
L’article 11 bis reconnaît aux détenus le droit à la liberté de conscience et à l’exercice de leur culte, ce qui constitue, c’est vrai, une avancée. Celle-ci est cependant immédiatement suivie d’une restriction liée à la sécurité et au bon ordre de l’établissement.
Cet article est donc caractéristique d’une méthode : d’un côté, l’affirmation d’une liberté ; de l’autre, le rappel des impératifs de sécurité, qui en atténue bien évidemment la portée.
Telle est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer les restrictions prévues par les derniers mots de cet article.
C’est la commission qui a décidé d’intégrer dans le projet de loi cet article consacrant les libertés de conscience et de culte.
La commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 14 rectifié dans la mesure où celui-ci supprime la mention, qui nous paraît utile, des contraintes liées à l’organisation des lieux. En effet, dans la plupart des établissements pénitentiaires, un même lieu est utilisé pour toutes les religions. Cela m’apparaît d’ailleurs comme une illustration – voire un exemple à suivre – de l’esprit de compréhension et de tolérance qui doit selon moi régner entre les différentes religions. Tout se passe très bien, et les aumôniers, qu’ils soient catholiques, protestants, musulmans ou juifs, s’entendent parfaitement.
La commission est également défavorable à l’amendement n° 99 rectifiéen ce qu’il vise notamment à supprimer la référence aux notions de sécurité et de bon ordre de l’établissement. Or, ne nous le cachons pas, il s’agit ici d’un domaine, celui de la religion, où des actions de prosélytisme radical peuvent être menées et doivent légitimement être combattues. Il nous semble donc que la référence à la sécurité et au bon ordre est tout à fait indispensable.
Pour cette même raison, la commission a également émis un avis défavorable sur l’amendement n° 227.
Cela étant, l’amendement n° 99 rectifié tend également à faire mention, dans l’article 11 bis, de la liberté d’opinion, et je dois dire que, personnellement, je n’y suis pas hostile, même si, concrètement, cela ne change pas grand-chose à la vie des établissements.
C’est pourquoi je propose de sous-amender l’amendement n° 99 rectifié bis – pardonnez-moi, madame la présidente, cet exercice d’« artisanat législatif » !
Sourires
Je suis donc saisie d’un sous-amendement n° 300, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :
Compléter la seconde phrase du second alinéa de l'amendement n° 99 rectifié par les mots :
, sans autres limites que celles imposées par la sécurité et le bon ordre de l'établissement
Quel est l’avis du Gouvernement sur les trois amendements et le sous-amendement en discussion ?
En vérité, monsieur le rapporteur, le Gouvernement était défavorable à l’amendement n° 99 rectifié. Évidemment, le dépôt de votre sous-amendement est susceptible de faire évoluer notre position.
Je demande une courte suspension de séance pour me permettre de faire le point, madame la présidente.
Nous allons donc interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-trois heures.
Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 99 rectifié, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 300. Bien entendu, il est, par conséquent, défavorable aux deux autres amendements.
L'amendement n'est pas adopté.
Le sous-amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
En conséquence, l'article 11 bis est ainsi rédigé, et l'amendement n° 227 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 188, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 11 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Sous réserve des interdictions édictées par l'administration pénitentiaire liées à la sécurité et à la santé, les détenus peuvent recevoir ou acheter en cantine les produits alimentaires de leur choix.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
Cet amendement tend à mettre un terme à la diversité des pratiques en matière de cantine des détenus et de réception de colis alimentaires.
Des restrictions, comme, par exemple, l’interdiction du café, dont on ne comprend pas la raison, s’appliquent dans certains établissements. Un directeur m’a dit qu’il y avait des textes prévoyant telle ou telle interdiction, qu’il ne pouvait pas m’indiquer précisément quels étaient ces textes, mais que c’était interdit !
Je considère que ces restrictions, qui ne se justifient par aucun impératif de santé ou de sécurité, ont plutôt un caractère vexatoire et qu’il faut donc y mettre fin. C’est le sens de cet amendement.
J’ai parfois eu le même sentiment que le président Nicolas About lors de mes visites dans les établissements pénitentiaires. Les réglementations varient en effet beaucoup d’un établissement à un autre : un produit sera autorisé à la cantine dans tel établissement et interdit dans tel autre.
Malgré tout son intérêt, cet amendement ne nous paraît pas pouvoir être retenu pour la simple raison qu’il ne relève pas du domaine de la loi.
Cela étant, nous examinerons plus tard une disposition incorporée au texte par la commission et prévoyant la mise en place de règlements-types par catégorie d’établissements pénitentiaires – maisons d’arrêt, maisons centrales, centres de détention. Nous souhaitons que ces règlements-types, en harmonisant la réglementation sur l’ensemble du territoire de la République, permettent d’éviter ces incohérences comme celle qui aboutit à l’interdiction du café certains établissements, que le président Nicolas About cite dans son rapport et qu’aucune raison médicale ne justifie.
Je suis sensible aux difficultés que vous avez pu rencontrer lors de vos visites et j’ai demandé à la direction de l’administration pénitentiaire de me tenir informée de ces problèmes pratiques.
Il arrive ainsi que certains détenus achètent des produits et ne puissent pas les emporter avec eux lorsqu’ils changent d’établissement.
Nous essayons de régler ce type de problèmes mais, comme l’a indiqué M. le rapporteur, ils relèvent du règlement et non de la loi.
Nous sommes donc défavorables à cet amendement.
M. Nicolas About, rapporteur pour avis. Cette référence au domaine réglementaire m’inquiète quelque peu, car des pans entiers de ce projet de loi pourraient disparaître si le Gouvernement invoquait le caractère réglementaire de certaines mesures. J’espère qu’il s’abstiendra de le faire pour sauver le texte que nous examinons !
Sourires
Cela étant, les dispositions de l’article 49 A du projet de loi et les engagements pris par Mme la ministre me satisfont. En conséquence, je retire cet amendement.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Toute personne condamnée est tenue d'exercer au moins l'une des activités qui lui est proposée par le chef d'établissement et le directeur du service pénitentiaire d'insertion et de probation dès lors qu'elle a pour finalité la réinsertion de l'intéressé et est adaptée à son âge, à ses capacités et à sa personnalité.
Je n’abuserai pas de mon temps de parole pour présenter l’ensemble des modifications apportées par la commission, mais il me semble que l’obligation d’activité mérite quelques mots, ne serait-ce que pour informer ceux de nos collègues qui appartiennent à d’autres commissions que la commission des lois ou la commission des affaires sociales, et qui n’ont pas nécessairement suivi nos travaux avec la même attention.
L’article 11 ter du projet de loi tend à instituer une obligation d’activité pour la personne condamnée.
La réinsertion des détenus passe par l’exercice, pendant la détention, d’une activité destinée à favoriser la socialisation de la personne, qu’il s’agisse d’emploi, de formation professionnelle, de cours, d’alphabétisation, d’activité socio-culturelle ou sportive ou de participation à un groupe de parole dans le cadre de la prévention de la récidive.
Or, comme j’ai pu le constater à l’occasion de nombreuses visites dans les établissements pénitentiaires, une majorité de détenus suit très peu d’activités, voire aucune. Ainsi, le temps de la peine risque de rester un temps mort. Sans doute, dans les maisons d’arrêt surpeuplées, cette inactivité des détenus est-elle plus souvent subie que choisie. Cependant, cette oisiveté se rencontre aussi, bien que dans une moindre mesure, dans les établissements pour peine, qui ne sont pourtant pas soumis aux mêmes contraintes de démographie carcérale.
Depuis la suppression par la loi du 22 juin 1987 relative au service public pénitentiaire de l’obligation, au reste peu appliquée, de travailler, aucune disposition ne contraint le détenu à exercer une activité, quelle qu’elle soit. Lorsque vous visitez les prisons, il est relativement choquant de trouver, quelle que soit l’heure de la journée, les personnes allongées en train de regarder la télévision. Je précise au passage que, parfois, un seul détenu regarde pendant que trois « subissent »…
Sous couvert du principe libéral mis en place par la loi de 1987, comme le soulignait le rapport de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale, « la tentation peut ainsi être grande pour les surveillants, les directeurs d’établissement, les travailleurs sociaux ou les médecins d’attendre la “demande”, laissant ainsi de côté les détenus les plus fragiles ou les plus dangereux ».
À cet égard, j’observe que la situation française se singularise par rapport à celle qui est observée dans d’autres démocraties. J’ai pu constater, lors de visites d’établissements pénitentiaires au Royaume-Uni et au Canada, notamment, que la journée du détenu y était beaucoup plus occupée qu’en France. Plusieurs pays, comme le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie et les Pays-Bas, imposent d’ailleurs aux personnes condamnées à une peine privative de liberté de travailler, même s’ils ne sont pas toujours en mesure d’offrir les emplois nécessaires.
J’ajoute que, contrairement à ce que d’aucuns avaient supposé, cette disposition n’est nullement contraire aux conventions européennes, notamment à la Convention européenne des droits de l’homme.
Ce n’est pas une obligation de travail que la commission propose ; c’est une obligation d’activité. Dès lors que l’établissement pénitentiaire est en mesure de proposer plusieurs formes d’activités au détenu, il paraît très contestable de laisser à celui-ci la faculté de n’en exercer aucune. Il ne s’agit pas de rétablir l’obligation de travail et, en tout état de cause, l’obligation d’activité ne saurait être imposée qu’à quatre conditions.
Premièrement, elle ne s’appliquerait que si l’établissement est en mesure de proposer plusieurs activités.
Deuxièmement, l’activité ou les activités obligatoires devraient avoir pour finalité la réinsertion du détenu et être déterminées par le chef d’établissement et le directeur du service pénitentiaire d’insertion et de probation.
Troisièmement, elle ne vaudrait que pour les personnes condamnées et non pour les prévenus dont le statut en détention relève par priorité de l’autorité judiciaire.
Enfin, quatrièmement, cette obligation serait adaptée à l’âge, aux capacités et à la personnalité de chacun.
De manière complémentaire, la commission propose, d’une part, que les détenus puissent être consultés sur les activités qui leur seraient proposées, d’autre part, que les plus démunis puissent bénéficier, en contrepartie de cette activité, d’une aide versée partiellement ou intégralement en numéraire. Cela permettrait à un jeune de suivre une formation professionnelle et d’obtenir une aide financière pour pouvoir cantiner, ce qui le dispenserait de devoir s’adonner éventuellement à un travail non qualifiant.
L'amendement n° 19 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :
Dans cet article, remplacer les mots :
au moins l'une des activités qui lui est proposée par le chef d'établissement et le directeur du service pénitentiaire d'insertion et de probation
par les mots :
soit une activité professionnelle, soit une formation professionnelle ou générale
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
L'objet de cet amendement est de préciser les types d'activités susceptibles d’être proposés par le chef d’établissement ou le directeur du SPIP, service pénitentiaire d’insertion et de probation. L’idée est avant tout de mentionner explicitement les types d’activités disponibles pour le détenu et que l’administration pénitentiaire se doit de proposer.
Le travail et la formation doivent, en l’occurrence, figurer parmi les principales activités disponibles dans l’établissement, de manière à impulser une politique active dans le domaine de la réinsertion du détenu.
Maintenir cet article en l’état reviendrait finalement à laisser au chef d’établissement ou au SPIP le choix discrétionnaire de diriger les détenus vers un seul type d’activité, comme par exemple le sport, sans considération aucune des nécessités de formation des détenus à un travail.
Cet article porte d’ailleurs en lui les germes d’un traitement différencié entre détenus : certains seront dirigés vers des activités ne comportant aucune valeur pédagogique, tandis que d’autres pourront se former, voire travailler et gagner de l’argent.
Nous proposons donc de préciser que les activités obligatoires constituent essentiellement des activités ayant une valeur pédagogique.
Nous comprenons votre intention, madame Boumediene-Thiery. Il va de soi qu’elle devra être satisfaite le plus fréquemment possible. La commission estime néanmoins que l’obligation d’activité doit rester souple. Il s’agira sans doute principalement d’une activité professionnelle ou d’une formation mais, dans certains cas, une activité sociale, culturelle, voire sportive pourra se révéler préférable.
Lorsqu’on visite les prisons, on se rend compte du vieillissement de la population carcérale. Imaginons par exemple un détenu âgé et indigent : à quoi bon lui donner une activité professionnelle ou une formation professionnelle alors qu’il pourrait exercer des responsabilités associatives, culturelles ou sociales ?
Mieux vaut conserver une certaine souplesse dans le choix de l’activité ou des activités proposées. L’avis de la commission est donc défavorable.
La rédaction de cet amendement est extrêmement restrictive quant aux activités qu’il est prévu, dans cet article, de rendre obligatoires.
Je signale que, pour certains détenus, une activité peut constituer une thérapie, s’intégrant dans un programme de prévention de la récidive, prenant la forme d’une thérapie de groupe ou consistant en des activités artistiques. En ne visant que les activités professionnelles et les formations professionnelles ou générales, votre amendement, madame la sénatrice, exclut ces catégories d’activités.
Aussi le Gouvernement émet-il un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 61 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le chef d'établissement et le directeur du service pénitentiaire d'insertion et de probation favorisent l'égal accès de toutes les personnes condamnées aux activités mentionnées à l'alinéa précédent.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Madame la ministre, les activités ne s’opposent pas les unes aux autres : il est parfaitement possible de suivre une thérapie de groupe ou de pratiquer un sport tout en bénéficiant d’une formation professionnelle, laquelle est indispensable dans une optique de réinsertion.
L’objet du présent amendement est de préciser que le chef d’établissement et le directeur du SPIP favorisent – c’est-à-dire garantissent, dans la mesure du possible – l’égal accès de tous les détenus à une activité professionnelle ou à une formation.
Nous savons que l’accès à une activité professionnelle répond avant tout à des critères de compétence. Mais, à compétence égale, qu’est-ce qui justifie que tel détenu puisse travailler tandis que tel autre ne le peut pas ?
Nous avons pu observer que le travail était un instrument privilégié de pression sur les détenus ; quelquefois, le refus de laisser un détenu exercer une activité professionnelle est même une sanction déguisée, qui ne peut faire l’objet d’aucune contestation. À plusieurs reprises, nous avons été saisis par des détenus de cette question.
En réalité, l’égal accès des détenus à une activité professionnelle est un principe important, car ceux qui travaillent vont pouvoir cantiner, tenter de vivre un peu mieux leur détention, tandis que d’autres ne pourront pas accéder à ces améliorations de leurs conditions de vie quotidienne en raison du refus qui leur aura été opposé.
Le travail est devenu un outil de gestion de la détention par l’administration pénitentiaire. Il faut donc mettre un terme à certaines pratiques discriminantes, notamment aux refus qui ne sont pas justifiés par des raisons objectives.
La commission émet un avis défavorable parce qu’elle estime que l’égal accès de toutes les personnes condamnées aux activités va de soi et que cette disposition devrait être considérée comme étant satisfaite d’office.
Ma chère collègue, imaginez que l’on mette à la forme négative l’alinéa que vise à insérer votre amendement. Il serait ainsi rédigé : « Le chef d’établissement et le directeur du SPIP ne favorisent pas l’inégal accès de toutes les personnes condamnées aux activités mentionnées. » Ce serait presque insultant pour eux !
En outre, en prévoyant l’obligation d’activité, nous mettons en quelque sorte une épée dans les reins : elle implique une multiplication et une diversification des offres d’emploi et de formation professionnelle. Bien évidemment, plus celles-ci seront nombreuses, plus facilement il pourra être fait droit à cette exigence d’un égal accès des détenus à des activités. D’ailleurs, de nombreuses dispositions du projet de loi, issues pour certaines d’entre elles de la commission des lois, visent à favoriser le travail en prison.
Le classement d’une personne détenue est établi en fonction non seulement de sa personnalité et de son profil, mais aussi de l’offre de travail existante. À cet égard, il est toujours possible qu’il faille attendre un certain temps avant de lui proposer une activité.
Quelles sont les raisons qui peuvent justifier qu’un détenu soit déclassé ? Le déclassement peut être lié à son inaptitude à l’activité exercée ou à la disparition de l’offre. Dans ces deux cas, la décision de déclassement est motivée. Le déclassement peut aussi intervenir à titre de sanction. Là encore, la décision est motivée et elle peut faire l’objet d’un recours.
Peut-on réellement favoriser l’égal accès aux activités de toutes les personnes condamnées dans la mesure où certaines d’entre elles sont fragiles, souffrent d’inaptitudes ou d’addictions ? Il arrive que l’administration pénitentiaire refuse de classer certains détenus voulant travailler mais souffrant, par exemple, d’une addiction parce qu’elle estime qu’il est préférable pour eux de se soigner préalablement à l’exercice d’une activité. Il faut conserver cette souplesse.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 100, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le travail en prison doit être considéré comme un élément positif du régime carcéral et en aucun cas être imposé comme une punition. Les autorités pénitentiaires doivent s'efforcer de procurer un travail suffisant et utile.
La parole est à M. Claude Jeannerot.
Cet article 11 ter représente incontestablement un progrès. Nous souhaitons néanmoins en renforcer la portée en précisant que l’activité en prison, pour obligatoire qu’elle soit, doit non pas être imposée comme une punition, mais être considérée comme un élément positif du régime carcéral.
Nous nous référons à la règle pénitentiaire européenne qui souligne que l’activité accomplie par un détenu doit précisément s’insérer dans une vision positive de sa réinsertion. C’est pourquoi nous proposons de lutter contre les risques évidents d’abus dans ce domaine.
Le travail ou l’activité doivent remplir une fonction générale de développement pour les détenus. En conséquence, nous devons plutôt faire en sorte que les autorités pénitentiaires s’efforcent de procurer à tous une activité suffisante et utile.
Sur le fond, comment pourrait-on être en désaccord avec ce que propose notre collègue ? Seulement, cette précision, même si elle est issue d’une règle pénitentiaire européenne, apparaît réellement beaucoup plus déclaratoire que normative.
Quant au « travail suffisant et utile », ces mots ont fait surgir dans mon esprit l’image des Dalton cassant des cailloux dans leur pénitencier !
Sourires
Le travail en prison est considéré comme positif puisqu’on en tient compte dans l’aménagement ou la réduction des peines et dans la perspective de la réinsertion. À aucun moment l’activité en prison n’a été considérée comme une punition. D’ailleurs, un détenu sanctionné est, au contraire, déclassé.
Les activités sont proposées en fonction de l’offre qui est faite aux établissements pénitentiaires. Souvent, des détenus classés sont en attente d’une activité, parfois très longtemps, l’offre s’étant raréfiée dans certains établissements. En outre, compte tenu de la vétusté de certains d’entre eux, les activités qui pourraient y être proposées ne sont pas adaptées. En revanche, tous les nouveaux établissements pénitentiaires sont dotés d’ateliers permettant l’exercice d’activités.
Si le Gouvernement est défavorable à cet amendement, c’est donc non pour des raisons de fond, mais parce qu’il est à tous égards satisfait. Le travail est utile, car il est considéré comme un gage de réinsertion. Simplement, il dépend avant tout de l’offre d’activité qui est faite à l’établissement pénitentiaire.
Il faut veiller à ne pas assimiler progressivement activité et travail, comme si ces deux notions étaient identiques. Autrefois, le travail obligatoire, c’est ce qu’on appelait les travaux forcés ; voilà bien longtemps qu’ils ont été supprimés !
Une activité est nécessaire à condition qu’elle contribue à la reconstruction du détenu, voire à sa construction. En revanche, une activité rémunérée ne peut être proposée que si l’offre en est faite. Et cette question ne dépend pas seulement de l’administration pénitentiaire. En outre, l’activité doit être en adéquation avec les capacités du détenu auquel elle est proposée et faire l’objet d’une rémunération suffisante, de manière qu’elle ne constitue pas une façon d’utiliser le travail carcéral à un très bas coût.
Je suis favorable au travail et aux activités rémunérés, mais uniquement dans ce cadre. Or j’ai l’impression que, petit à petit, l’idée s’impose selon laquelle le travail devrait être obligatoire. Attention, ce peut être un peu dangereux !
Force est de reconnaître que M. le rapporteur a su soulever avec lucidité cette question difficile de l’activité en prison, qui est au cœur du projet de loi.
Comme l’a rappelé à l’instant Mme Borvo Cohen-Seat, les travaux forcés ont été supprimés ; par conséquent, le travail obligatoire ne saurait revenir sous la forme qu’il revêtait jadis.
Par ailleurs, lorsqu’on s’entretient avec les personnels pénitentiaires, comme j’ai eu l’occasion de le faire la semaine dernière, on entend toujours la même remarque : le travail pour les détenus, c’est très bien, mais il n’y a pas de travail !
Du reste, en cette période de forte augmentation du chômage, beaucoup de nos concitoyens estiment que le travail disponible ne doit certainement pas aller en priorité à des personnes qui sont en prison. S’ils y sont, pensent-ils, ce n’est pas sans raison ! Cette réaction-là existe, nous le savons bien.
Il est donc très important de trouver le bon équilibre. Le travail ne doit pas être une punition, mais il nous appartient de convaincre nos concitoyens que la réinsertion des personnes détenues passe nécessairement par le travail. Ce n’est pas facile à expliquer, car cela ne va pas de soi.
En tout cas, l’exercice d’une activité par une personne détenue doit impérativement avoir pour objectif sa réinsertion. Or celle-ci, qui mobilise tout l’être humain, est très difficile lorsqu’une cellule accueille, dans des conditions lamentables, trois ou quatre détenus. C’est d’ailleurs ce que nous confirment les personnels pénitentiaires, qui, tous, dénoncent la surpopulation carcérale.
Par conséquent, si l’on veut vraiment que chaque détenu puisse bénéficier d’une formation utile, exercer une activité utile, un travail rémunéré – car il doit l’être –, lui permettant de se réinsérer professionnellement, alors, il faut des moyens et de la volonté. Il nous faut surtout, madame le garde des sceaux, rompre avec une politique pénale qui tend à priver l’administration pénitentiaire des moyens nécessaires à la mise en œuvre des excellentes intentions affichées dans ce projet de loi.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 189, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Lorsque la personne condamnée ne maîtrise pas les enseignements fondamentaux, l'activité consiste obligatoirement dans l'apprentissage de la lecture, de l'écriture et du calcul. Lorsqu'elle ne maîtrise pas la langue française, l'activité consiste obligatoirement dans l'apprentissage de celle-ci. L'organisation des apprentissages est aménagée lorsqu'elle exerce une activité de travail.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
La commission des affaires sociales, qui se réjouit de la proposition figurant à l’article 11 ter, dû à l'initiative de la commission des lois, propose d’utiliser cette obligation d'activité comme un instrument de lutte contre l’illettrisme.
Dans son bilan pour l’année 2006, la Commission nationale de suivi de l’enseignement en milieu pénitentiaire évaluait à 12, 3 % la proportion de détenus illettrés, auxquels il faut ajouter les 12, 9 % connaissant de sérieuses difficultés de lecture.
Or toute personne qui sort de prison rencontre déjà de grandes difficultés de réinsertion. Si elle ne sait ni lire, ni écrire ni compter, sa réinsertion devient presque impossible.
La commission des affaires sociales souhaite donc que, pour les personnes illettrées ou qui ne parlent pas le français, l’obligation d’activité prenne la forme, au moins pour partie, d’un apprentissage des savoirs fondamentaux et de la langue française.
Afin de ne pas pénaliser les personnes illettrées qui choisissent la voie de la réinsertion par l’emploi, l’amendement prévoit en outre que l’organisation de cet apprentissage sera aménagée de façon que ces personnes puissent conserver leur travail.
C’est effectivement l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul que l’on doit favoriser pour les personnes qui en ont un urgent besoin.
La commission considère néanmoins qu’inscrire cette obligation dans le projet de loi rigidifie le dispositif, le prive de souplesse.
Dans certains cas, certes peu fréquents, je l’admets, l’obligation de l’apprentissage de la lecture, du français, peut ne pas correspondre au souhait de la personne détenue. Je pense notamment à une personne étrangère qui doit être expulsée du territoire français et renvoyée dans son pays d’origine à l’issue de son incarcération. Si elle a l’occasion d’avoir un travail rémunéré, pourquoi la forcer à suivre un apprentissage de la langue française plutôt que de la laisser faire ce travail ? De telles situations sont sans doute marginales, mais il s’agit tout de même de cas bien réels.
Certes, M. About a prévu que l’organisation des apprentissages serait aménagée de façon à permettre à une personne détenue à la fois de suivre une formation et de travailler. Toutefois, pour avoir étudié le fonctionnement de nombreux établissements pénitentiaires, je sais qu’entre le vœu et la réalité il y a un pas important qui ne peut pas toujours être franchi.
Pour toutes ces raisons, la commission souhaite le retrait de l’amendement n° 189.
Cet amendement décrit le contenu des formations proposées. Or, comme M. le rapporteur vient de le rappeler, certaines personnes détenues préfèrent travailler plutôt que suivre un apprentissage des savoirs fondamentaux et de la langue française.
Oserai-je ajouter, monsieur About, que la nature des programmes relève non pas de la loi, mais du règlement…
M. Nicolas About, rapporteur pour avis. Je constate que vous osez, mais avec le sourire, madame le garde des sceaux !
Sourires
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement pour ces deux raisons : d’une part, on ne peut pas contraindre une personne qui souhaite travailler à acquérir les savoirs fondamentaux et, d’autre part, la définition des contenus des formations est de nature réglementaire.
Monsieur le rapporteur pour avis, puis-je vous suggérer une rédaction susceptible de recueillir l’assentiment de tous ?
L’apprentissage de la lecture doit bien entendu être librement choisi et consenti. L’article 11 gagnerait donc à être enrichi. Nous pourrions par exemple préciser, dans un nouvel alinéa, que l’activité peut être un travail, une formation professionnelle, un apprentissage éducatif. Cet article deviendrait ainsi très explicite et inclurait en outre la proposition qui a été présentée tout à l’heure par l’un de nos collègues.
« Le régime d’exécution de la peine de privation de liberté concilie la protection effective de la société, la sanction du condamné et les intérêts de la victime avec la nécessité de préparer la personne détenue à sa réinsertion afin de lui permettre de mener une vie responsable et exempte d’infractions. »
Ce texte est celui de l’article 1erA, que le Sénat a voté après une longue discussion.
On ne prépare pas une personne détenue à se réinsérer, à vivre une vie responsable et exempte d’infractions si l’on n’est pas capable de lui permettre de comprendre un texte simple.
Tout à l’heure, la compréhension de leurs droits par les détenus a fait l’objet d’un long débat. Que demandons-nous ici ? Que tous les détenus soient capables de lire une affiche placardée dans le couloir de la prison, ou même de comprendre les cent mille documents qui vont être distribués par Mme le garde des sceaux !
Sourires
Pour préparer la réinsertion d’une personne détenue, lui donner la possibilité d’apprendre à lire et à comprendre un peu le français est vraiment le minimum.
Je conçois que l’on ne puisse pas imposer à un détenu qui souhaite jouer au basket de travailler à la chaîne, de mettre des parfums en flacon. Mais le minimum pour le protéger, pour lui permettre de faire valoir ses droits, est de lui permettre de lire et de mieux comprendre les informations qui lui sont transmises en langue française.
Mes chers collègues, chacun votera comme il l’entend. Je m’en remets à la sagesse du Sénat, mais vous comprendrez que je ne sois pas habilité à retirer cet amendement.
Il s’agissait d’un amendement qui était satisfait. La commission des affaires sociales m’autorise à me comporter de manière intelligente en séance publique !
Monsieur Jeannerot, on ne peut énumérer toutes les activités accessibles dans le texte de la loi.
Dans mon intervention sur l’article, j’ai dressé un certain inventaire, par hypothèse non exhaustif, des différents types d’activités : le travail, la formation professionnelle, les cours, l’alphabétisation, mais aussi les activités socioculturelles et sportives, la participation à un groupe de parole dans le cadre de la prévention de la récidive. Sur mes notes, j’avais ajouté « etc. » Mais vous conviendrez avec moi qu’il est difficile d’écrire « etc. » dans le projet de loi.
Ne pouvant être exhaustif, je préfère ne pas énumérer ces activités. Mais l’intérêt de nos débats réside aussi dans l’éclairage qu’ils peuvent apporter pour l’interprétation qui sera faite de la loi que nous allons voter.
Monsieur About, il me semble difficile de contraindre une personne détenue à suivre une activité donnée. Je ne peux donc que maintenir ma demande de retrait de l’amendement n° 189.
L'amendement est adopté.
L'article 11 ter est adopté.
Sous réserve du maintien de l'ordre et de la sécurité de l'établissement, les détenus peuvent être consultés par l'administration pénitentiaire sur les activités qui leur sont proposées.
Je suis saisie de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 101 rectifié, présenté par MM. Yung, Anziani et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Sous réserve du maintien de l'ordre et de la sécurité de l'établissement, les détenus sont autorisés à s'exprimer collectivement sur les conditions de détention et à communiquer avec l'administration pénitentiaire.
Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret.
La parole est à M. Richard Yung.
Nous nous réjouissons de l’avancée que constitue l’article 11 quater.
Nous considérons néanmoins qu’il est possible d’aller plus loin dans la logique proposée par M. le rapporteur, qui écrit dans son rapport qu’il ne faut pas « laisser les détenus dans une situation de passivité mais, au contraire, les responsabiliser dans le cadre d’un dialogue avec l’administration pénitentiaire ».
Il nous apparaît nécessaire d’offrir un cadre à la consultation qui est prévue. À défaut, on pourrait se demander quelles seront les modalités de cette consultation : les détenus seront-ils consultés séparément, par cellule, par couloir ?
Les règles européennes, je le rappelle, même si elles n’ont pas toujours l’heur de plaire, précisent que les administrations peuvent permettre aux détenus d’élire des représentants et de constituer des commissions capables d’exprimer les sentiments et les intérêts de leurs codétenus.
Plusieurs pays européens n’ont d’ailleurs pas attendu l’adoption de ces règles pour octroyer aux personnes détenues un droit d’expression collective et autoriser la création de groupes ou de comités consultatifs. C’est notamment le cas en Allemagne, en Grande-Bretagne, en Belgique, au Danemark, en Espagne, en Finlande, aux Pays-Bas et en Suède. La liste est, vous pouvez le constater, assez étoffée.
La question de l’expression collective des détenus reste, dans notre pays, un sujet difficile, délicat, parfois même tabou, et l’on peut le comprendre. Elle suscite différentes craintes, en particulier que ce droit d’expression ne soit instrumentalisé, détourné par un groupe donné à l’intérieur de la prison, et ce risque est réel. On redoute également que cette expression collective ne suscite des revendications qui iraient trop loin.
Néanmoins, les expériences étrangères ont démontré que ces comités ou ces groupes, selon la terminologie que l’on choisira, sont en fait très utiles. Contrairement à ce que l’on serait tenté croire, ils concourent au maintien de l’ordre et empêchent le développement de conduites que l’on pourrait qualifier de défiantes.
Une étude conduite en Grande-Bretagne montre que 75 % des directeurs d’établissement pénitentiaire consultent leur comité de détenus avant d’effectuer des changements dans les régimes de détention. Les réunions avec les représentants des détenus sont décrites comme ayant fourni un cadre sécurisant, dans lequel les questions controversées ont pu être discutées et contestées.
Ainsi, ce mode d’expression collective a, en réalité, un effet régulateur, « désamorçeur » de crise. Il devrait aider considérablement les chefs d’établissement et les différents responsables dans leur difficile travail.
C’est ce qui nous a amenés à déposer le présent amendement, qui encadre soigneusement les sujets susceptibles d’être abordés dans ce dialogue entre les détenus et l’administration pénitentiaire, dialogue qui constitue un progrès de la démocratie à l’intérieur de la prison. Puisqu’il faut préparer les détenus à la sortie, ne pas les couper de la réalité du monde extérieur, nous avons là une occasion de faire entrer un peu plus de démocratie dans la prison.
Enfin, nous proposons que les modalités d’application de cette disposition soient fixées par décret, ce qui garantit qu’elles seront avalisées par Mme le garde des sceaux et son administration.
L'amendement n° 228, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Au début de cet article, supprimer les mots :
Sous réserve du maintien de l'ordre et de la sécurité de l'établissement,
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Cet article 11 quater procède d’une bonne intention. Cependant, sa rédaction actuelle est insatisfaisante et, dans la logique que nous défendons depuis l’examen de l’article 10, nous proposons la suppression de la restriction portée à ce droit de consultation.
En l’espèce, l’exception est posée avant même que le principe soit énoncé, ce qui tempère ce dernier et en fait plus un symbole qu’un véritable droit reconnu aux détenus.
C’est pourquoi, en cohérence avec nos propositions sur les articles 10 et 11 bis, nous demandons la suppression de cette restriction.
Les amendements n° 17 et 102 rectifié sont identiques.
L'amendement n° 17 est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller.
L'amendement n° 102 rectifié est présenté par M. Anziani et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans cet article, remplacer les mots :
peuvent être
par le mot :
sont
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l’amendement n° 17.
Le droit des détenus à être consultés sur la nature des activités proposées ne doit pas être facultatif. Il faut que cette consultation soit obligatoire et qu’elle ne soit pas laissée à la discrétion du chef d’établissement. Or la rédaction de l’article 11 quater laisse penser que ces consultations peuvent être organisées selon le bon-vouloir de l’administration pénitentiaire et des chefs d’établissement.
Cette possibilité risque de se transformer rapidement en un vœu pieux si l’administration pénitentiaire dispose dans ce domaine d’une marge d’appréciation. Je propose donc de rendre ces consultations obligatoires.
Si le droit des détenus de s’exprimer est lié au pouvoir discrétionnaire de l’administration, ce droit ne sera jamais effectif ! Nous devons permettre aux détenus de s’exprimer librement sur les activités, et au besoin de formuler des souhaits ou des recommandations.
Dans le même esprit, il faut espérer que ces consultations seront suivies d’effet et ne finiront pas, comme beaucoup d’autres doléances, dans un tiroir.
La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l'amendement n° 102 rectifié.
L'amendement n° 103, présenté par M. Anziani et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans cet article, après le mot :
activités
insérer les mots :
et les conditions de détention
La parole est à M. Richard Yung.
L'amendement n° 16 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Ils peuvent, dans les mêmes conditions, être consultés par l'administration pénitentiaire sur leurs conditions générales de détention.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Je salue l’inscription, dans le projet de loi, d’une consultation des détenus sur les activités qui leur sont proposées. Pour autant, je regrette que cette inscription soit limitée aux seules activités. Il me semble en effet nécessaire d’élargir cette procédure de consultation à toute question touchant les conditions générales de détention.
Cet élargissement serait d’ailleurs conforme à une règle européenne selon laquelle « sous réserve des impératifs de bon ordre, de sûreté et de sécurité, les détenus doivent être autorisés à discuter de questions relatives à leurs conditions générales de détention et doivent être encouragés à communiquer avec les autorités pénitentiaires à ce sujet ».
Je me permets d’ailleurs de rappeler que la consultation des détenus sur les conditions générales de détention était prévue à l’article 23 de l’avant-projet de loi pénitentiaire. En vertu de cet article, les détenus pouvaient être « régulièrement consultés sur leurs conditions de détention, selon des modalités définies par le règlement intérieur de l’établissement ».
Je propose de rétablir cette possibilité dans sa version élargie, afin d’inclure les considérations autres que celles qui ont trait aux activités, et donc de revenir à la première version de l’avant-projet de loi pénitentiaire.
L'amendement n° 18 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Un procès-verbal de ces consultations est mis à disposition du contrôleur général des lieux de privation de liberté.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement a pour objet de donner, dans une certaine mesure, un sens aux consultations qui seront menées au sein des établissements pénitentiaires.
Il ne sert à rien de donner aux détenus la possibilité de s’exprimer si ces consultations finissent dans un tiroir, comme je l’ai dit. Dans la mesure du possible, les doléances des détenus doivent être suivies d’effet.
Lorsque ces doléances comportent des plaintes concernant le traitement dont fait l’objet l’un des détenus, les consultations ont également une valeur pour l’amélioration de la prise en charge des détenus.
Je propose donc de mettre à disposition du contrôleur général des lieux de privation de liberté le résultat de ces consultations, sous la forme d’un procès-verbal.
Ces consultations pourront, le cas échéant, inspirer au contrôleur général des remarques, voire des recommandations. Elles pourront par ailleurs permettre un ajustement des activités en fonction des remarques et sollicitations des détenus.
Ainsi pourront être exploitées d’une manière constructive toutes les remarques que les détenus seront amenés à formuler.
Par la rédaction proposée à l’article 11 quater, la commission s’est efforcée de trouver un équilibre entre l’absence totale, à ce jour, de dispositions législatives sur l’expression des détenus et un droit d’expression collective autonome.
Il paraît préférable, dans un premier temps, d’en rester au principe d’une consultation des détenus sur les activités qui leur sont proposées, ce qui n’interdit pas, si certains établissements et directeurs d’établissement le souhaitent, d’expérimenter d’autres modalités d’échange avec les détenus.
La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 101 rectifié.
L’amendement n° 228 tend à supprimer les restrictions tenant à l’ordre et à la sécurité. Proposé avec beaucoup de cohérence par nos collègues du groupe CRC-SPG, la commission lui oppose, avec autant de cohérence, un avis défavorable.
Les amendements identiques n° 17 et 102 rectifié appellent les mêmes observations que l’amendement n° 101 rectifié, et la commission émet un avis défavorable.
Nous estimons que la réforme pénitentiaire ne portera ses fruits que si elle suscite l’adhésion de l’administration pénitentiaire et de ses personnels. C’est pourquoi, en particulier dans le domaine de l’expression des détenus, il nous paraît préférable de privilégier, en tout cas dans un premier temps, une démarche incitative plutôt qu’une démarche impérative.
La commission émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 103. L’article 11 quater, relatif à la consultation des détenus, s’articule avec l’article 11 ter, qui concerne l’obligation d’activité : il en est l’une des contreparties. Sa rédaction nous paraît donc cohérente, dans le cadre de la section 1 bis « De l’obligation d’activité ». Cependant, comme je l’ai dit, aucune disposition n’interdit à l’administration pénitentiaire de consulter des détenus sur leurs conditions de détention, et il existe d’ailleurs des exemples en ce sens.
Sur l’amendement n° 16, la commission formule les mêmes observations que sur l’amendement n° 101 rectifié, et émet, de la même manière, un avis défavorable.
Enfin, l’amendement n° 18 rectifié tend à prévoir qu’un procès-verbal des consultations est mis à disposition du contrôleur général des lieux de privation de liberté.
Il nous semble, d’une part, que cette disposition n’est pas de nature législative et, d’autre part, que le contrôleur général a la possibilité de réclamer l’intégralité des documents qu’il souhaite. Je serais tenté de préconiser un peu de souplesse : laissons le contrôleur général agir et n’imposons pas ce transfert systématique. Par conséquent, la commission est défavorable à cet amendement.
L’amendement n° 101 rectifié tend à prévoir la possibilité, pour les détenus, de s’exprimer de façon collective.
La possibilité de consulter les détenus sur les activités qui leur sont proposées constitue déjà une avancée très importante. Je crois qu’il ne faut pas tout permettre tout de suite. Au demeurant, certains établissements pratiquent déjà une consultation collective des détenus.
En outre, il existe une difficulté pratique concernant l’organisation d’une expression collective, celle qui tient à la désignation des représentants des détenus. Quelles pourraient être les modalités d’une telle désignation ? Acceptons d’abord une consultation sur les activités et, à la suite de cette expérience, il sera possible de réaliser de nouvelles avancées.
Le Gouvernement est donc défavorable à l’amendement n° 101 rectifié.
L’amendement n° 228 est, comme le dirait M. le rapporteur, cohérent avec la position du groupe CRC-SPG. Comme le Gouvernement est attaché à la sécurité et au bon ordre des établissements, il émet un avis défavorable sur cet amendement.
Les amendements identiques n° 17 et 102 rectifié visent à rendre obligatoires les consultations des détenus sur les activités qui leur sont proposées. Gardons, là aussi, la souplesse d’une consultation facultative, qui demeure une avancée majeure en faveur des détenus. Sinon, des problèmes d’organisation et de fonctionnement pourraient se poser dans certains établissements. C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
S’agissant de l’amendement n° 103, qui tend à étendre la consultation des personnes détenues aux conditions de détention, le Gouvernement émet un avis défavorable.
L’amendement n° 16 rectifié vise également à permettre aux détenus de donner leur avis sur les conditions générales de détention. Inscrire cette obligation dans la loi pourrait porter atteinte à l’organisation des établissements, d’autant que, je le répète, certains d’entre eux prévoient déjà une telle consultation. Laissons les expérimentations suivre leur cours. Je le rappelle, les règles pénitentiaires européennes ont d’abord été testées.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 16 rectifié.
Enfin, l’amendement n° 18 rectifié vise à prévoir que le contrôleur général pourra disposer d’un procès-verbal des consultations. Or il peut déjà obtenir tous les documents qu’il souhaite dans le cadre de sa mission. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote sur l’amendement n° 101 rectifié.
Madame le garde des sceaux, je ne comprends pas votre argumentation.
Nous sommes pleinement conscients des difficultés que vous avez exposées. C’est précisément pour cela que la rédaction de notre amendement est extrêmement prudente et que nous renvoyons à un décret la fixation des modalités d’application de la mesure que nous proposons. Vous pourrez donc y inscrire toutes les précautions que vous voudrez. Dès lors, je ne vois pas pourquoi notre proposition vous inspire une telle méfiance.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 11 quater est adopté.
Les personnes détenues qui ne disposent pas d'un domicile personnel peuvent élire domicile auprès de l'établissement pénitentiaire pour l'exercice de leurs droits civiques.
Avant chaque scrutin, le chef d'établissement organise avec l'autorité compétente une procédure destinée à faciliter l'exercice du vote par procuration.
L’article 12 vise à permettre aux détenus d’élire domicile auprès de l’établissement pénitentiaire afin de leur faciliter l’exercice des droits civiques, dont le droit de vote. Il prévoit, en outre, que le chef d’établissement devra faciliter l’exercice du vote par procuration.
C’est évidemment une avancée importante.
Nous l’avons dit et répété depuis le début de ce débat, les détenus restent des citoyens à part entière.
Depuis l’entrée en vigueur du nouveau code pénal, une condamnation pénale n’implique plus systématiquement la déchéance des droits électoraux, contrairement à la règle qui s’appliquait auparavant. Désormais, seul le juge est habilité à prononcer une telle privation.
Cependant, force est de constater que, dans la réalité des faits, le respect du droit de vote des détenus n’ayant pas perdu leur capacité électorale est difficilement garanti, ce qui explique en particulier les taux élevés d’abstention au sein de la population carcérale.
L’article 11 du code électoral prévoit, certes, que les personnes détenues peuvent demander leur inscription sur les listes de la commune d’implantation de l’établissement pénitentiaire, mais à la condition, parfois difficile à remplir, que le détenu y réside depuis au moins six mois.
L’article 12 du projet de loi va aussi dans le sens de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, qui tend de plus en plus à reconnaître le droit des détenus à participer aux élections.
Nous nous en réjouissons et nous soutenons donc cet article.
Nous avons cependant souhaité le compléter en proposant de prévoir que, pour la mise en œuvre effective de ce droit fondamental, ses conditions d’exercice seront fixées par des dispositions réglementaires.
L'amendement n° 62 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa de cet article, remplacer le mot :
faciliter
par le mot :
assurer
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
En vertu de l’article 40 de la Constitution, il n’a pas été possible pour les parlementaires de demander la mise en place de bureaux de vote dans les établissements pénitentiaires.
À défaut d’une telle mesure, propre à garantir le droit de vote des détenus, nous proposons de modifier l’article 12 du projet de loi en prévoyant que l’administration pénitentiaire doit « assurer », et non pas seulement « faciliter », l’exercice du vote par procuration du détenu.
Cette modification rédactionnelle constituerait une avancée importante puisqu’il s’agit de créer une obligation renforcée de moyens pour garantir que les détenus pourront exercer leur droit de vote, et donc leur citoyenneté, comme n’importe quel autre citoyen.
Pour témoigner de l’importance de transformer une faculté en véritable obligation positive, je rappelle que l’article 3 du protocole additionnel de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, tel qu’amendé par le protocole n° 11, est l’un des seuls articles de cette convention à prévoir, de manière expresse, une obligation positive pour les États, celle d’organiser des élections libres à des intervalles raisonnables.
Cette obligation positive, qui ne découle pas d’une construction prétorienne, doit trouver son application en prison.
La précision apportée par cet amendement nous paraît renforcer la rédaction proposée par la commission.
Notre collègue a souligné à juste titre qu’il s’agissait d’une obligation de moyens renforcée, afin d’éviter que la substitution du terme « assurer » à celui de « faciliter » ne soit comprise comme le passage d’un vote facultatif à un vote obligatoire, ce dont il n’est évidemment pas question.
Sous le bénéfice de cette observation et dans la mesure où l’amendement vient renforcer la rédaction de la commission, cette dernière émet un avis favorable.
Je rappelle que des efforts importants ont été engagés par l’administration pénitentiaire pour une information systématique des détenus citoyens sur toutes les échéances électorales. Il en est résulté un doublement de la participation par rapport à celle qui était observée précédemment.
Sur l’amendement n° 62 rectifié, à condition que le verbe « assurer » n’impose pas une obligation à l’administration pénitentiaire, le Gouvernement émet un avis favorable.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 104, présenté par M. Anziani et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Les conditions d'exercice du droit de vote des personnes détenues sont déterminées par décret.
La parole est à M. Richard Yung.
Comme je l’ai indiqué précédemment, nous souhaitons compléter l’article 12 par un alinéa précisant simplement que les conditions d’exercice du droit de vote sont déterminées par décret.
Nous avions d’abord envisagé de déposer un amendement plus précis, prévoyant que des bureaux de vote seraient installés dans les établissements pénitentiaires. Nous y avons cependant renoncé compte tenu des nombreuses difficultés auxquelles se heurterait la mise en œuvre d’une telle disposition, en particulier dans les établissements de petite ou moyenne taille, comptant 200 à 300 détenus. En France, un bureau de vote rassemble généralement 1 000 à 1 200 électeurs inscrits, et peu d’établissements pénitentiaires comptent autant de détenus.
Aussi, afin de ne pas trop entrer dans des détails et pour éviter de subir les foudres du président de la commission des lois, qui nous aurait sûrement objecté qu’une telle disposition relevait du règlement, nous avons préféré proposer de renvoyer les conditions d’exercice du droit de vote au décret.
Nous sollicitons de notre collègue Richard Yung le retrait de cet amendement dans la mesure où il est plus que satisfait par l’article 27 de ce projet de loi, qui prévoit que les modalités d’application du chapitre III, où se trouve l’article 12, sont fixées par décret en Conseil d’État.
L'article 12 est adopté.
Les personnes détenues qui ne disposent pas d'un domicile de secours au moment de leur incarcération ou qui ne peuvent en justifier pour prétendre au bénéfice des droits mentionnés à l'article L. 121-1 du code de l'action sociale et des familles peuvent élire domicile auprès de l'établissement pénitentiaire. –
Adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 56 rectifié est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller.
L'amendement n° 105 rectifié est présenté par M. Anziani et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 12 insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les personnes détenues peuvent élire domicile auprès de l'établissement pénitentiaire afin de faciliter leurs démarches administratives.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l’amendement n° 56 rectifié.
À la demande de M. le rapporteur, mon collègue Alain Anziani et moi-même avons en quelque sorte fusionné nos deux amendements, lesquels tendent à ce que les nombreux détenus qui ne bénéficient pas de domiciliation puissent élire domicile au sein de l’établissement pénitentiaire, de manière à faciliter leurs démarches administratives. On peut penser, par exemple, à l’établissement d’un titre d’identité ou à d’autres documents administratifs.
La disposition que nous proposons d’inscrire est, par ailleurs, le corollaire logique du droit des détenus de correspondre avec le monde extérieur, que ce soit avec la famille, l’avocat ou l’ensemble des administrations.
La parole est à M. Charles Gautier, pour présenter l’amendement n° 105 rectifié.
Aux arguments qu’a avancés notre collègue Alima Boumediene-Thiery j’ajouterai que cette mesure permettra notamment aux détenus ressortissants d’un pays étranger d’élire domicile dans l’établissement pénitentiaire pour obtenir ou faire renouveler un titre de séjour.
Il est exact que le projet de loi n’envisage la domiciliation que pour faciliter l’exercice des droits civiques ou l’accès à certaines prestations d’aide sociale. Il paraît opportun de la prévoir de manière plus générale pour favoriser les démarches administratives, par exemple, pour l’établissement de la carte d’identité ou du permis de séjour, puisque le droit à domiciliation concerne aussi les détenus étrangers.
L’avis de la commission est donc favorable.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 56 rectifié et 105 rectifié.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12 bis.
Les détenus dont les ressources sont inférieures à un montant fixé par voie réglementaire reçoivent de l'État une aide en nature destinée à améliorer leurs conditions matérielles d'existence. Cette aide peut aussi être versée en numéraire dans les conditions prévues par décret.
L'amendement n° 20 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la seconde phrase de cet article :
Cette aide peut également être versée sous la forme d'un revenu minimum de préparation à l'insertion dans les conditions prévues par décret.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement tend à inscrire dans la loi pénitentiaire la possibilité pour le détenu de bénéficier, s’il le souhaite et s’il n’opte pas pour une aide en nature, d’un revenu minimum d’aide à la préparation à l’insertion.
Mes chers collègues, je ne vous décrirai pas les dispositifs existants, mais permettez-moi de vous rappeler que, à l’heure actuelle, au-delà de soixante jours de détention, le détenu perd le bénéfice de son droit au RMI, même s’il est en semi-liberté ou en placement à l’extérieur. S’il a la chance d’être marié ou de vivre en concubinage, le conjoint ou le concubin peut bénéficier de la qualité d’ayant droit et donc percevoir le RMI à la place du détenu. Mais, au-delà de quatre mois de détention, le détenu est rayé du dispositif du RMI et perd alors tous ses droits. Il ne pourra en bénéficier que le premier jour qui suivra le mois de sa libération.
Le RMI étant l’outil d’insertion par excellence, son versement doit pouvoir être pérennisé, sous une autre forme, dans la prison : la réinsertion ne commence pas à la porte de la prison, mais bien dans la prison.
La continuité de ce versement pourrait en outre assurer au détenu des conditions de détention décentes.
Il existe une allocation d’insertion en faveur des détenus libérés après au moins deux mois de détention, mais les conditions d’éligibilité sont très strictes : elle est conditionnée par des critères de ressources, son montant est très faible et sont exclues de son bénéfice les personnes condamnées à certains délits ou crimes.
Aucun dispositif n’est prévu pour les situations intermédiaires.
Pourtant, c’est au cours de la détention que le détenu prépare sa réinsertion, et c’est donc dans le cadre de cette détention qu’il doit pouvoir bénéficier d’un revenu de préparation à sa réinsertion.
L’idée n’est pas nouvelle, et d’ailleurs M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté et à la jeunesse, nous a rappelé, lors de son audition devant la commission des lois sur le projet de loi pénitentiaire, la pertinence d’un tel dispositif et l’intérêt qu’il y aurait à en faciliter la mise en œuvre.
II nous a également rappelé que l’extension aux détenus du revenu de solidarité active, le RSA, aurait eu un coût minime puisqu’elle n’aurait concerné que les détenus les plus démunis, c’est-à-dire 35 % de la population pénale.
À l’arrivée, rien de tout cela n’est apparu dans le projet de loi pénitentiaire.
C’est la raison pour laquelle nous proposons de poser le principe de la création d’un revenu d’aide à la réinsertion et de laisser le soin à un décret de fixer les conditions de sa mise en œuvre et de son articulation avec d’autres droits sociaux.
Ce revenu minimum pour les détenus est nécessaire si l’on souhaite éviter toute rupture brusque de ces droits.
Je vous rappelle que certains détenus ne peuvent pas cantiner, ne disposent d’aucune ressource, ne peuvent pas travailler. Il existe donc plusieurs types de détenus : les pauvres et les autres. Nous devons aujourd’hui prendre en compte l’extrême indigence de certains d’entre eux et leur garantir, au-delà des aides en nature, la possibilité d’une aide en numéraire calquée sur le RMI.
Je me réjouis que cet amendement n’ait pas été censuré par la commission des finances.
M. le président de la commission des lois s’exclame
Par ailleurs, dans la mesure où M. Hirsch n’y semble pas défavorable, nous nous honorerions d’une telle avancée dans le champ de l’aide à l’insertion du détenu.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Je dirai tout d’abord que Mme Alima Boumediene-Thiery a bien de la chance : j’ai déjà été fusillé au titre de l’article 40 de la Constitution pour moins que ça !
Sourires
En tout état de cause, la rédaction proposée par la commission à l’article 13, prévoyant la possibilité pour les détenus de recevoir de l’État une aide en nature qui peut aussi être versée en numéraire dans les conditions prévues par décret, nous paraît constituer une formulation réaliste et acceptable par chacun.
Elle permet de consacrer dans la loi les pratiques observées dans certains établissements pénitentiaires où l’aide aux démunis est versée en numéraire. C’est un premier jalon dans la mise en œuvre d’une allocation minimale carcérale, dispositif sur lequel il convient de poursuivre encore la réflexion, en concertation avec les départements.
Il est vrai que nous étions nombreux à avoir rêvé d’une possibilité pour les départements de s’investir dans ce qui serait une allocation minimale de réinsertion en milieu carcéral.
MM. Éric Doligé et. Charles Revet s’exclament.
Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
Pour compléter ce que vient de dire M. le rapporteur, je soulignerai que nous avons tenu à commencer par l’obligation d’activité. En ce qui me concerne, je ne suis pas vraiment favorable à ce que l’on donne une allocation à des détenus.
Les détenus indigents bénéficieront d’une aide en nature ou en numéraire, et il s’agit là d’une disposition à laquelle nous tenons absolument. Pour autant, il convient de privilégier l’activité par rapport à l’octroi d’une allocation. La première étape est donc l’obligation d’activité. Nous verrons ensuite si la création d’une allocation se révèle nécessaire.
Le fait de privilégier l’obligation d’activité est au cœur de la logique de ce projet de loi pénitentiaire : nous manifestons ainsi notre volonté de lutter contre l’oisiveté afin de favoriser la réinsertion des détenus et, par là même, de prévenir la récidive.
Madame la ministre, reprenant les propos que vous avez vous-même tenus tout à l’heure, je dirai que tout le monde n’a pas la possibilité de travailler ! Certaines personnes, même si elles souhaitent avoir une activité, ne sont pas aptes au travail. Elles ont donc besoin de l’aide que nous proposons d’instaurer.
Par ailleurs, je répète que cela constituerait pour eux une préparation à la sortie de prison, c'est-à-dire un premier pas vers l’insertion. La sortie, en effet, ne se prépare pas le jour de la libération, mais bien en amont, pendant la détention.
Je dois tout de même réagir à ce que j’ai entendu. En effet, au détour d’une phrase, M. le rapporteur a lâché benoîtement que, si le dispositif proposé était un jour mis en place, on pourrait en faire porter la charge aux départements.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ce sont des mots à ne pas prononcer !
Sourires
Monsieur le rapporteur, je vous invite à vous ôter de telles idées de l’esprit ! Il faut éviter, chaque fois qu’est évoquée la possibilité d’apporter aux gens une aide supplémentaire, de décider d’un seul coup d’en confier la responsabilité aux collectivités locales.
Les élus locaux que nous sommes sont prêts à discuter de bien des choses, mais il est impensable que des propositions telles que celle-ci germent dans certains esprits sans que nous ayons eu notre mot à dire !
Cette charge serait affectée par convention, avec un remboursement programmé !
Je mets donc vos propos, monsieur le rapporteur, sur le compte d’un égarement dû à l’heure tardive !
Quoi qu'il en soit, je souhaite vivement qu’on renonce à cet état d’esprit qui tend à se reporter sur les budgets des collectivités locales dès qu’il est question de charges nouvelles.
Monsieur le président de conseil général, permettez qu’un conseiller général de base vous donne son avis sur la question que vous venez d’évoquer.
Rassurez-vous : il n’y a pas de ma part l’ombre d’un début d’égarement ! Je me permets de vous rappeler que, lorsque nous avions travaillé avec M. Martin Hirsch sur l’hypothèse d’une allocation minimale, le montant évoqué pour celle-ci était de 50 euros.
Je vous rappelle également que les propositions du rapport Hyest de 2000 prévoyaient, à l’époque, l’instauration d’une allocation de l’ordre de 400 francs, soit une somme du même ordre.
Pour ma part, je suis tout à fait favorable à ce que la compensation soit effectuée par l’État.
Je vous signale d’ailleurs que le coût d’une telle mesure était évalué par M. Hirsch à moins de 8 millions d’euros, ce qui est relativement modique par rapport au RSA ! Il devrait donc être possible de négocier sur une telle somme.
Encore une fois, je n’ai rien contre une compensation par l’État, bien au contraire ! Je suis tout aussi intéressé que vous à la bonne santé des finances départementales, qui ont été largement sollicitées ces derniers temps.
J’insiste sur le fait qu’un dispositif prévoyant une continuité entre l’aide accordée à l’intérieur de l’établissement pénitentiaire et celle qui est allouée, après la sortie, par l’intermédiaire des services sociaux, me semble être tout à fait, presque par essence, de la compétence des départements. En effet, à mon sens, un des grands drames du monde carcéral réside dans le fait que des personnes venant d’être libérées peuvent se retrouver pendant quelque temps dans une situation – notamment financière – extrêmement difficile, avant d’être prises en main par les services sociaux des conseils généraux. Tout le monde gagnerait à ce que les anciens détenus soient aidés immédiatement.
À cette précision près, je ne retire rien, mon cher collègue, des propos que j’ai tenus précédemment !
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 13 est adopté.
L'amendement n° 108, présenté par MM. Anziani et Jeannerot, Mmes Demontès, Le Texier et Jarraud-Vergnolle, M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 14, insérer une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigés :
Section...
Du travail en détention
La parole est à M. Charles Gautier.
Ma défense de l’amendement n° 108 vaudra également pour l’amendement n° 113, qui vise à insérer une autre division additionnelle, relative, elle, à l’enseignement et à la formation.
Il s’agit de souligner notre détermination à replacer au centre du débat la question du travail et de la formation des détenus.
Conformément aux règles pénitentiaires européennes, ainsi qu’au simple bon sens, il importe en effet d’attribuer la première place à l’enseignement et à la formation lors du séjour en prison de la personne détenue.
Or le texte qui nous est proposé ne mentionne que le travail et l’insertion ; il ne revient pas sur la question fondamentale de l’enseignement et de la formation. Il s’agit pourtant de la condition première de l’insertion. Elle doit donc, dans l’ordre des facteurs, intervenir avant toute action en faveur de l’insertion puisqu’elle est la condition de la réussite de cette dernière.
À travers cet enjeu, c’est toute la finalité de la privation de liberté qui est en cause. Celle-ci constitue-t-elle une sanction, et uniquement cela, ou bien veut-on que le temps passé en détention soit utilisé pour préparer la réinsertion du détenu ?
Cette réinsertion comporte de multiples aspects. Elle doit être professionnelle, bien entendu, afin de limiter les risques de récidive. Mais il importe aussi qu’elle soit sociale – et même sociétale –, afin que l’ancien détenu puisse trouver une nouvelle place, grâce aux changements qu’il aura su opérer en lui-même et dont il pourra faire bénéficier autrui.
Dans nos sociétés, comme dans beaucoup d’autres, le travail possède un sens. Il constitue le principal facteur de socialisation des personnes et des groupes sociaux. Nous voyons d’ailleurs les dégâts considérables du chômage sur la cohésion sociale, c’est-à-dire non seulement ses aspects inégalitaires, mais aussi, tout simplement, ses conséquences sur ce qui permet le fonctionnement acceptable d’une société pour les personnes qui en sont membres.
Pour que le détenu, à sa libération, puisse bénéficier d’un travail, il est indispensable qu’il dispose des savoirs de base, que trop souvent il ignore ou qu’il maîtrise mal, et d’une formation qui lui permette de s’orienter vers un métier.
Le fondement de toute réinsertion réussie réside, d’une part, dans la modification de l’état d’esprit du détenu et de l’image qu’il projettera par son comportement, d’autre part, dans la transformation de l’opinion que l’on se forme sur lui.
Sur le plan pratique, comme sur celui des mentalités, l’élément fondamental est donc clairement l’éducation, complétée par une formation professionnelle. C’est le passage obligé pour que la personne sortant de prison soit à même de mieux comprendre la société et d’y jouer un rôle dans le futur.
Cela implique que le droit à l’enseignement et à la formation des personnes détenues soit reconnu dans la loi et décliné ensuite en propositions concrètes favorisant la mise en œuvre des différentes étapes d’une formation.
Nous souhaitons donc qu’un tel objectif soit souligné par l’insertion d’une nouvelle division dans le texte du projet de loi tel qu’il résulte des travaux de la commission.
Cet amendement, qui tend à créer une division additionnelle, ainsi que les suivants visent à apporter plusieurs précisions concernant le travail pénitentiaire, qui, certes, sont toutes intéressantes, mais relèvent du règlement.
Comme vous le voyez, nous ne réservons pas seulement ce reproche aux amendements de M. About !
Sourires
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 109, présenté par MM. Anziani et Jeannerot, Mmes Demontès, Le Texier et Jarraud-Vergnolle, M. Le Menn et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le travail des détenus doit être rémunéré de façon équitable.
La parole est à M. Alain Anziani.
Je commencerai par souligner que M. le rapporteur vient de nous donner l’impression de s’être trompé d’amendement !
En effet, l’amendement précédent visait à améliorer la structure du texte. Il ne s’agissait donc pas du tout d’un amendement de fond.
L’amendement n° 109 vise à tirer les conséquences de l’amendement n° 108. Vous allez peut-être, d’ailleurs, m’opposer de nouveau le même argument que précédemment.
Le travail des détenus doit être rémunéré de façon équitable. Il s’agit d’une évidence. Pourtant, en prison, ce n’en est pas une. Nous souhaitons donc faire rentrer cette évidence dans le monde de la prison, conformément aux règles pénitentiaires européennes.
Nous savons bien que vous risquez de nous objecter une nouvelle fois que les dispositions que nous vous soumettons ne sont pas suffisamment normatives pour figurer dans la loi. Pour ma part, je pense qu’elles permettent de fixer un horizon, ce qui est essentiel. En effet, nous savons tous qu’en prison le travail n’est pas rémunéré à sa véritable valeur.
Je répondrai d’abord à M. Anziani qu’il n’y avait pas la moindre confusion dans mon esprit. En effet, l’amendement n° 108 visait à créer une division additionnelle destinée à accueillir les dispositions prévues par les amendements n° 109 et 110, auxquels se raccroche également l’amendement n° 190 rectifié bis du président About. Cette division additionnelle concernait donc trois amendements comportant des dispositions dont nous estimons qu’elles relèvent toutes du domaine du règlement. Par hypothèse, l’amendement visant à créer cette division additionnelle en relevait donc lui aussi !
Après cette petite satisfaction accordée à mon amour-propre, j’en viens plus spécifiquement l’amendement n° 109.
Sourires
Le contenu de cet amendement figure déjà intégralement dans l’article D. 102 du code de procédure pénale, qui prévoit que les rémunérations doivent se rapprocher autant que possible de celles des activités professionnelles extérieures.
Nous estimons donc qu’une telle disposition n’a pas sa place dans la loi et émettons par conséquent un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 190 rectifié bis, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Avant l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 717-3 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La rémunération du travail des personnes détenues ne peut être inférieure à un taux horaire fixé par décret et indexé sur le salaire minimum de croissance défini à l'article L. 3231-2 du code du travail. Ce taux peut varier en fonction du régime sous lequel les personnes détenues sont employées. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
Cet amendement vise à indexer la rémunération des détenus employés en prison sur le SMIC.
Je rappelle que, hormis celles qui bénéficient d’un régime de semi-liberté ou de placement à l’extérieur et qui, pour la plupart, sont soumises au droit commun du travail, les personnes en détention peuvent avoir accès à trois types de postes : ceux qui sont proposés par les activités de service général, ceux qui sont créés par les ateliers du service de l’emploi pénitentiaire et proposés par la régie industrielle des établissements pénitentiaires et ceux qui sont offerts par les ateliers de production gérés par des entreprises privées concessionnaires de l’administration pénitentiaire.
La rémunération du travail des détenus s’appuie sur un principe général posé par l’article D. 102 du code de procédure pénale, qui stipule que « les rémunérations du travail doivent se rapprocher autant que possible de celles des activités professionnelles extérieures afin notamment de préparer les détenus aux conditions de travail libre ».
L’article D. 103 fixe, quant à lui, les conditions de rémunération des détenus qui travaillent sous le régime de la concession : « Les conditions de rémunération et d’emploi des détenus qui travaillent sous le régime de la concession ou pour le compte d’associations sont fixées par convention, en référence aux conditions d’emploi à l’extérieur, en tenant compte des spécificités de la production en milieu carcéral. » Les rémunérations ne peuvent être inférieures au seuil minimum de rémunération, le SMR, qui est corrélé à l’évolution du SMIC.
L’article D. 105 fixe les conditions de rémunération des détenus affectés au service général : « si la continuité des tâches qui leur sont confiées le justifie, ils sont rémunérés suivant un tarif préétabli par l’administration centrale et dans les conditions prévues pour les travaux en régie. »
Là, il y a lieu, certainement, d’avoir des informations complémentaires.
En réalité, les rémunérations sont deux à quatre fois inférieures à celles des travailleurs de droit commun : en 2007, selon l’administration pénitentiaire elle-même – vous trouverez toutes les informations dans la brochure « chiffres-clés », qui est publique –, le revenu moyen mensuel est de 202 euros pour les activités de service général, de 508 euros pour les ateliers de la Régie industrielle des établissements pénitentiaires et de 359 euros pour les ateliers de production gérés par les concessionnaires.
L’indexation déjà existante pour le travail en concession présente un double intérêt. D’abord, elle offre un avantage financier. Ensuite et surtout, elle prépare la réinsertion des détenus en introduisant un peu le droit commun du travail dans l’établissement pénitentiaire, ce qui contribue à donner au détenu le sentiment qu’il est, de ce point de vue, un travailleur comme un autre.
La commission des affaires sociales vous propose l’indexation sur le SMIC de la rémunération de tous les emplois occupés par les détenus, et pas seulement de ceux qui sont offerts par les concessions.
Bien sûr, et c’est pourquoi cet amendement a été rectifié, les taux d’indexation peuvent varier en fonction du régime sous lequel les personnes détenues sont employées. Il s’agit d’une indexation souple puisque l’amendement prévoit trois taux.
La commission n’a pas émis un avis favorable bien que les propos de M. About sur la situation qu’il présente soient très largement convaincants.
Nous estimons que la compétence est d’ordre réglementaire. Cependant, nous souhaitons interroger le Gouvernement sur le point de savoir s’il ne pourrait pas y avoir, éventuellement par le biais des règlements types, une indexation systématique sur le salaire minimum de référence, de façon à limiter les écarts qui sont difficilement justifiables entre les rémunérations des uns et des autres.
Pour répondre notamment à la question que vous venez de poser, monsieur le rapporteur, je souhaite préciser que chaque détenu perçoit une rémunération pour le travail qu’il effectue.
Un dispositif existe déjà – vous y avez fait référence tout à l’heure – pour les détenus qui travaillent en atelier de concession pour le compte d’un employeur. Ce dispositif répond parfaitement aux attentes de l’amendement puisqu’il fixe un taux horaire et prévoit déjà l’indexation. L’article D.102 du code de procédure pénale précise déjà que « l’organisation, les méthodes et les rémunérations du travail doivent se rapprocher autant que possible de celles des activités professionnelles extérieures ».
Pour le travail en atelier de production en régie, un seuil minimum de rémunération, dont le montant est défini par l’administration pénitentiaire chaque année par voie d’instruction, est déjà en place. Ce taux horaire minimum de rémunération est indexé en référence à l’évolution du SMIC. Pour ce type de travail, l’amendement est également d’ores et déjà satisfait.
Dans les deux cas, l’indexation existe.
De fait, mais pas dans la loi ! Dans quel article de loi est-ce écrit ?
Je vous assure que cela figure dans un décret.
Le service général est à part : la rémunération est définie sur la base d’un tarif jour parce que les détenus ne travaillent que quelques heures, notamment pour la distribution des repas ou le nettoyage des locaux. Le montant est défini annuellement par voie d’instruction. Sur ce point, je suis d’accord avec vous : il n’y a pas de règlement adapté. La rémunération de ces détenus est assurée par le budget de l’administration pénitentiaire, qui tient compte de la spécificité des emplois.
Toutefois, ce tarif journalier tient compte, en pratique, c’est vrai, de l’évolution du SMIC : il est revu chaque année. La fixation par décret d’un taux horaire n’est donc pas adaptée pour ce type d’activité.
C'est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Nous soutenons totalement l’amendement de M. About pour une raison simple : la difficulté d’un détenu est, justement, qu’il ne connaît pas les règles. Un détenu ne vit pas dans un monde de règles : il les ignore et c’est en général pour ça qu’il est en prison.
Il faut donc lui apprendre que les règles sont, pour lui, non seulement une obligation mais aussi un droit. La meilleure façon de l’en persuader est de lui montrer que sur la question du salaire, à laquelle tout un chacun est sensible, il a droit à une rémunération dont le montant est fixé d’une façon claire et légale.
Cette introduction du droit commun pour un revenu des personnes détenues est indispensable.
La proposition de M. About marque, à notre sens, une évolution notable et très favorable pour la situation des détenus.
On pourrait objecter que fixer le taux de rémunération au niveau du SMIC horaire risquerait d’introduire une clause défavorable par rapport à l’offre de travail dans les maisons d’arrêt.
Au contraire, aujourd'hui, nous nous trouvons face à une concurrence de mauvais aloi. Le fait de se rapprocher du droit commun constituerait non seulement un acquis pour les détenus, mais également une clarification par rapport aux règles de concurrence entre les entreprises elles-mêmes.
Il faut soutenir cet amendement, qui a le grand mérite d’inscrire les détenus dans le droit commun, ce qui, après tout, est un objectif que nous visons sur beaucoup d’autres plans.
Les propos des uns et des autres me paraissent aller au-delà de l’amendement n° 190 rectifié bis.
M. About propose que toutes les rémunérations connaissent une indexation par décret, avec trois taux.
L’amendement de M. About ne vise pas à accorder le SMIC au service général en prison.
Si cet amendement visait à introduire une telle disposition, l’article 40 aurait été appliqué !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Madame la sénatrice, il y a des favorisés, vous devez en faire partie, comme M. About ! Ce n’est pas du tout le cas de la commission des lois !
Sourires.
Il y a le travail pénitentiaire traditionnel. Le projet de loi permettra aux entreprises d’insertion d’intervenir.
Il faut le préciser, autrement, nous risquerions de faire croire des choses qui auraient un effet négatif. N’oublions pas que l’objectif est de permettre au maximum de détenus de travailler en prison.
Comme l’a très bien dit le président Hyest, il n’est pas question de donner le SMIC à tout le monde. Il y a trois taux de rémunération – 10 à 15 % du salaire minimum de croissance, 25 %… –, qui varient en fonction du SMIC.
Pour tout ce qui concerne les concessions, c’est prévu dans les textes. Pour ce qui a trait aux régies, ce n’est pas le cas, mais l’indexation est de fait. Dès lors, autant l’inscrire, les choses seront claires. Puisque l’indexation est déjà de fait, autant qu’elle devienne de droit.
Enfin, pour le service général, il s’agit d’un forfait jour calculé annuellement, ce qui doit être bien compliqué à verser. Quoi qu’il en soit, le forfait jour, si je ne me trompe pas, est fonction de la taille du centre et du travail effectué par la personne. Un détenu qui porte les repas ou le courrier dans un centre de 200 pensionnaires travaille moins que celui qui assure le même service dans un centre plus important. Il gagnera donc beaucoup moins. Je ne vois aucune difficulté à ramener cela à un taux horaire.
Pourquoi ne pas adopter cet amendement, en laissant le soin à l’Assemblée nationale, puis la commission mixte paritaire, d’affiner la mesure ?
Plusieurs sénateurs socialistes. Et en deuxième lecture !
Sourires.
Sourires.
Je soutiens bien sûr cet amendement car celui que nous avons déposé à l’article 14 tend à ancrer encore davantage dans la normalité les rapports des détenus avec le travail.
Il est très important d’inscrire ce principe pour les raisons que j’ai déjà évoquées tout à l’heure.
On veut tenter de donner un sens à l’activité en prison, on souhaite mettre l’accent sur le fait que le travail est une façon de se réinscrire dans une reconstruction sociale ; mais il ne faut pas être naïf, pour l’instant, le travail n’est pas une denrée abondante en prison !
Si cette volonté d’offrir plus de travail à des personnes détenues rencontre de la part de certains employeurs privés intervenant dans les prisons la volonté de faire travailler les gens pour rien, ou pour pratiquement rien, plutôt que d’employer des personnes à l’extérieur, la situation va être extrêmement difficile à justifier.
Si l’on veut favoriser l’activité professionnelle des personnes en détention, il faut inscrire leur travail dans la normalité, tout en tenant compte des spécificités propres au travail en prison et de la qualification des détenus. Il faut éviter de créer un effet d’aubaine pour des entreprises privées, qui entrent actuellement dans les prisons à toute vitesse, ce que personnellement je déplore.
Il est donc vraiment important de poser un tel principe, même si la question du taux reste ouverte.
Je souhaite simplement préciser à M. le président de la commission des lois qu’il n’y a pas de malentendu entre nous et que je partage pleinement ses propos.
Je m’en tiens strictement au texte de l’amendement de M. About : « La rémunération du travail des personnes détenues ne peut être inférieure à un taux horaire fixé par décret et indexé sur le salaire minimum de croissance ».
Cette disposition est importante pour deux raisons. Premièrement, une telle mesure introduit des règles d’équité et de transparence sur l’ensemble du territoire. Deuxièmement, elle permet de mettre fin, je le répète, à des règles de concurrence qui desservent l’intérêt des établissements pénitentiaires et des détenus.
Je n’ai pas voulu dire autre chose. Pardonnez-moi si mon expression n’a peut-être pas été suffisamment claire.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Même si l’indexation devait être prévue dans un texte, cette obligation serait de niveau réglementaire. Je prends l’engagement de demander à la direction de l’administration pénitentiaire d’étudier la façon de rédiger au mieux la disposition. Je m’engage à ce qu’un décret soit pris en ce sens.
Très bien ! sur les travées socialistes
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 14.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
J’informe le Sénat que M. le président du Sénat a été saisi de la question orale avec débat suivante :
N° 27 - Le 12 mars 2009 - M. Thierry Foucaud interroge Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi sur la situation du secteur de l’automobile en France. Entre 1997 et 2007, les deux plus grands constructeurs automobiles nationaux ont réalisé et distribué à leurs actionnaires des dizaines de milliards d’euros de bénéfices. Aujourd’hui, tous les indicateurs économiques sont négatifs et des milliers d’emplois sont détruits. Renault a annoncé 4 000 suppressions de postes pour l’année 2009 et PSA 11 000 pour l’ensemble des usines européennes du groupe. Les mesures prises en matière de chômage technique, de plans de départs dits volontaires et de gains de productivité apparaissent en contradiction avec le développement de ce secteur-clé en termes d’emploi et d’industrialisation des territoires.
Des aides publiques d’un montant de 7, 8 milliards d’euros ont déjà été distribuées ces dernières semaines aux constructeurs automobiles français et plus largement à l’ensemble du secteur, sous forme de prêts et par l’intermédiaire du Fonds stratégique d’investissement.
Il lui demande qu’un véritable plan d’aide au secteur soit enfin mis sur pieds.
Il lui demande l’arrêt des plans de licenciement et le gel des dividendes versés aux actionnaires. Il importe en effet de prendre les dispositions nécessaires pour que l’argent public ne soit pas reversé aux actionnaires sous forme de dividendes ou de rachats d’actions et que les entreprises recevant ces aides ne puissent pas licencier, ni poursuivre les délocalisations.
Il l’interroge sur le nécessaire maintien de l’intégralité du salaire aux salariés mis en chômage technique, en mettant à contribution les actionnaires.
Il lui demande que l’utilisation de l’argent public dans l’investissement soit clairement établie, par exemple pour développer des technologies nouvelles.
Il interroge par ailleurs le Gouvernement sur les moyens mis en œuvre pour promouvoir auprès des constructeurs le lancement de modèles adaptés au public le plus large et permettant ainsi une véritable relance du secteur automobile pour la consommation populaire.
Enfin, l’interroge sur l’opportunité d’une entrée de l’État dans le capital de l’industrie automobile, notamment du groupe Renault pour assurer l’avenir du secteur.
Conformément aux articles 79, 80 du règlement, cette question orale avec débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu et sur les gains en capital.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 247, distribué et renvoyé à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kenya en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 248, distribué et renvoyé à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
M. le président du Sénat a reçu de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, M. François Autain, Mmes Annie David, Gélita Hoarau, M. Guy Fischer, Mmes Isabelle Pasquet, Éliane Assassi, Marie-France Beaufils, MM. Michel Billout, Jean-Claude Danglot, Mmes Michelle Demessine, Évelyne Didier, M. Thierry Foucaud, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Robert Hue, Gérard Le Cam, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Jean-Luc Mélenchon, Jack Ralite, Ivan Renar, Mmes Mireille Schurch, Odette Terrade, MM. Bernard Vera et Jean-François Voguet une proposition de loi visant à affecter les dividendes des entreprises à la garantie de l’intégralité des salaires des salariés subissant des périodes de chômage partiel.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 249, distribuée et renvoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
M. le président du Sénat a reçu de MM. Guy Fischer, François Autain, Mmes Annie David, Isabelle Pasquet, Gélita Hoarau, Nicole Borvo Cohen-Seat, Éliane Assassi, Marie-France Beaufils, MM. Michel Billout, Jean-Claude Danglot, Mmes Michelle Demessine, Évelyne Didier, M. Thierry Foucaud, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Robert Hue, Gérard Le Cam, Mme Josiane Mathon-Poinat, M. Jean-Luc Mélenchon, MM. Jack Ralite, Ivan Renar, Mmes Mireille Schurch, Odette Terrade, MM. Bernard Vera, et Jean-François Voguet une proposition de loi visant à abroger les franchises médicales.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 250, distribuée et renvoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
M. le président du Sénat a reçu de Mme Isabelle Pasquet, MM. François Autain, Guy Fischer, Mmes Annie David, Gélita Hoarau, Nicole Borvo Cohen-Seat, Éliane Assassi, Marie-France Beaufils, MM. Michel Billout, Jean-Claude Danglot, Mmes Michelle Demessine, Évelyne Didier, M. Thierry Foucaud, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Robert Hue, Gérard Le Cam, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Jean-Luc Mélenchon, Jack Ralite, Ivan Renar, Mmes Mireille Schurch, Odette Terrade, MM. Bernard Vera et Jean-François Voguet une proposition de loi visant à étendre le bénéfice du droit à pension de réversion aux couples liés par un pacte civil de solidarité et aux concubins notoires.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 251, distribuée et renvoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Projet de décision de la Commission du […] modifiant, aux fins de son adaptation au progrès technique, l’annexe de la directive 2002/95/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les exemptions relatives aux utilisations du plomb, du cadmium et du mercure.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4314 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Projet de décision de la Commission du […] modifiant, aux fins de son adaptation au progrès technique, l’annexe de la directive 2002/95/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne l’exemption relative à une utilisation du plomb en tant qu’impureté dans les rotateurs de Faraday utilisant des grenats de terre rare fer (RIG), employés pour les systèmes de communication par fibre optique.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4315 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Nomination du président du Conseil consultatif européen pour la gouvernance statistique.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4316 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion, par la Communauté européenne, du protocole sur la loi applicable aux obligations alimentaires.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4317 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Projet d’action commune du Conseil modifiant l’action commune 2008/736/PESC concernant la mission d’observation de l’Union européenne en Géorgie, EUMM Georgia.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4318 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. Bernard Piras un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et l’Organisation internationale de police criminelle-Interpol (OPCI-Interpol) relatif au siège de l’organisation sur le territoire français (n° 193, 2008-2009).
Le rapport sera imprimé sous le n°241 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. Jacques Berthou un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Guinée sur la promotion et la protection réciproques des investissements (n° 191, 2008-2009).
Le rapport sera imprimé sous le n° 242 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. Robert Badinter un rapport d’information fait au nom de la commission des affaires européennes sur l’Union européenne et les droits de l’Homme.
Le rapport d’information sera imprimé sous le n° 246 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. Jean-Paul Virapoullé un avis présenté au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale sur le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer (Urgence déclarée) (texte de la commission : n° 233, 2008 2009).
L’avis sera imprimé sous le n° 240 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. Daniel Marsin un avis présenté au nom de la commission des affaires économiques sur le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer (Urgence déclarée) (texte de la commission : n° 233, 2008 2009).
L’avis sera imprimé sous le n° 243 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de Mme Anne-Marie Payet un avis présenté au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer (Urgence déclarée) (texte de la commission : n° 233, 2008 2009).
L’avis sera imprimé sous le n° 244 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. Bernard Angels un avis présenté au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures (texte de la commission : n° 210, 2008 2009).
L’avis sera imprimé sous le n° 245 et distribué.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 5 mars 2009 :
À neuf heures quarante-cinq :
1. Suite du projet de loi pénitentiaire (n° 495, 2007-2008).
Rapport de M. Jean-René Lecerf, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale (n° 143, 2008-2009).
Rapport supplémentaire de M. Jean-René Lecerf, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale (n° 201, 2008-2009).
Texte de la commission (n° 202, 2008-2009).
Avis de, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 222, 2008-2009).
À quinze heures et le soir :
2. Questions d’actualité au Gouvernement.
Délai limite d’inscription des auteurs de questions : Jeudi 5 mars 2009, à onze heures.
3. Désignation des membres de la mission commune d’information sur la situation des départements d’outre-mer.
4. Suite de l’ordre du jour du matin.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le jeudi 5 mars 2009, à zéro heure quarante-cinq.