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Interventions sur "académique" d'André Gattolin


22 interventions trouvées.

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, quatre mois après l’adoption du rapport de la mission d’information sur les influences étatiques extra-européennes dans le monde universitaire et académique français, je suis heureux que les conclusions de nos travaux fassent, ce soir, l’objet d’un débat public avec le Gouvernement. Avant d’en venir aux constats et aux principales recommandations de la mission, je tiens tout d’abord à remercier mon groupe, le Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, qui a accepté de consacrer son droit de tirage à ce sujet. Je tiens aussi à reme...

...es ». Quand le politique réécrit l’histoire ou choisit des moments d’histoire plutôt que d’autres, c’est toujours un problème. En matière universitaire, le choix des contenus ne relève pas, me semble-t-il, de la discussion politique mais du corps de la recherche universitaire, dans son pluralisme. Il est vrai que l’intitulé du débat met en scène une notion que je connais bien, celle des libertés académiques. Il sera sans doute question de ce concept ce soir, lors du débat organisé à la demande de la mission d’information sur les influences étatiques extra-européennes dans le monde universitaire et académique français et leurs incidences. Il a également été développé dans la proposition de résolution européenne sur un nécessaire soutien à la liberté académique en Europe que nous avons adoptée, en dé...

Le champ scientifique est un lieu structuré de production, de validation et de circulation des savoirs, dans le respect du pluralisme. Il peut – et il doit – exister des controverses dans le monde académique. Elles s’expriment selon les règles précises du débat contradictoire et argumenté. Dans tous les domaines de la science, y compris naturellement dans le domaine des sciences humaines et sociales, la liberté académique est consubstantielle à la liberté de recherche. Elle est aussi consubstantielle à la liberté d’enseigner, pour peu que cet enseignement respecte les règles de l’art, c’est-à-dire ...

...devenir dépendants d'eux dans ce domaine : sous couvert d'un prétendu multilatéralisme, la Chine n'est plus seulement la fabrique du monde et investit de façon anticipée sur les domaines dont elle sait qu'ils intéresseront les Européens. Comme vous le savez, j'avais proposé que le Sénat engage une mission d'information sur les influences étatiques extra-européennes dans le monde universitaire et académique français. J'en ai été nommé rapporteur en juin. Nos travaux, adoptés fin septembre à l'unanimité, ont été très bien reçus dans le monde académique et auprès des services de l'État, économiques mais aussi de renseignement, chargés de ces questions. Dans le temps limité qui nous était imparti, nous n'avons malheureusement pas pu nous intéresser autant que nous l'aurions souhaité à la situation de ...

À la suite des nombreuses auditions que nous avons organisées, nous nous sommes rendu compte que la référence à la liberté académique, scientifique, et à l'autonomie universitaire figurait bien dans des textes européens, mais de manière très fragmentaire. Nous avons beau avoir cherché l'exhaustivité, il manque quelque chose de générique. En effet, l'Union européenne, qui s'est fondé sur la liberté et le droit du marché, fait encore preuve d'une très grande faiblesse dès lors qu'elle doit aborder les droits fondamentaux ou des q...

La réponse existe partiellement au travers de la déclaration de Bonn de fin 2020. L'Allemagne est très rigoureuse à cet égard, plus que le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la République tchèque ou la France. Nos voisins outre-Rhin parlent de la liberté de la recherche scientifique, car les libertés académiques pour l'enseignement supérieur sont déjà en partie incluses dans le processus de Bologne. Ces deux véhicules forment un ensemble déclaratif. Il faut leur donner une valeur juridique, ce qui suppose un débat avec les universitaires, les États membres et des juristes pour cadrer le dispositif, mais aussi les pays tiers. Nous aurions voulu aller plus loin dans la PPRE, mais nous risquions de nous he...

...ique, l'ouverture d'un établissement primaire ou secondaire fait l'objet d'un contrôle et d'une autorisation. Ce n'est pas le cas d'un établissement d'un enseignement supérieur. Une université chinoise pourrait s'implanter chez nous, même si ses diplômes ne sont pas reconnus. Et personne aujourd'hui ne surveille le discours véhiculé dans les instituts Confucius. Le cadrage de la notion de liberté académique est la seule solution à notre disposition pour éviter des dérives, islamiques ou autres, dans notre pays.

... sur le devant de la scène politique et médiatique mondiale. Mes collègues et moi avons ainsi été frappés par la convergence d'analyses des chercheurs spécialisés, des universités, des administrations, mais également des autres grandes démocraties, concernant les nouvelles menaces qui pèsent sur l'enseignement supérieur et notre recherche. C'est un fait auquel nous devons nous habituer : le monde académique n'échappe plus à ce que certains appellent la « brutalisation » des relations internationales, il en est même partie prenante. Dans ce paysage, nous avons retenu un mot, souvent prononcé par nos interlocuteurs : « vigilance ». Je le crois significatif d'une attitude réaliste sur l'état de notre monde. Mais il traduit également une forme de naïveté - longtemps entretenue - du monde de la recherc...

Vous avez rappelé les quatre secteurs qui sont privilégiés, car ils sont indispensables pour notre souveraineté. Vous avez cité aussi la PPST et les ZRR, qui visent plus particulièrement le monde des sciences et technologies. Dans le cadre de notre mission, nous nous intéressons aux formes d'influences agressives qui résultent de la volonté politique d'infléchir la liberté académique, voire l'intégrité scientifique de certains travaux. J'en veux pour preuve l'annulation, par certaines universités, de la visite du dalaï-lama ou de certains colloques sur la population ouïghoure. Sont concernés plusieurs États comme Taïwan, Hong Kong ou la Turquie. J'ai moi-même fait les frais de ces pratiques voilà quelques années lors d'un colloque Europe-Chine. Outre le vol de données, certai...

... est de plus en plus conscient du changement de paradigme qui s'opère dans les relations internationales et qui répond à des logiques à peine dissimulées d'intérêts strictement nationaux. Dans ce contexte, la question de l'enseignement supérieur et de la recherche ne doit pas être négligée, aussi bien au regard de la protection de notre recherche et de nos découvertes que de celle de nos libertés académiques, de notre intégrité scientifique et de notre esprit d'ouverture sur le monde. Il nous a donc semblé essentiel d'entendre les présidents d'université, qui occupent une place centrale dans ce dispositif.

... pas la publication. Il ne s'agit pas de censurer, mais de savoir si un travail de recherche a fait l'objet d'une influence, ce qui pourrait d'ailleurs inciter les pouvoirs publics à consacrer davantage de moyens publics à la recherche plutôt que de contraindre les chercheurs à passer des arrangements, parfois nécessaires, avec d'autres pays. Une telle mesure, sans être attentatoire aux libertés académiques d'investigation, permettrait de relativiser la production.

C'est un plaisir de vous recevoir, et je tiens à souligner l'investissement des établissements d'enseignement supérieur dans les travaux de notre mission d'information. Vos établissements ont tissé un partenariat avec un institut Confucius, signe d'ouverture internationale, marqueur de notre tradition académique. Toutefois, vous savez sans doute que les instituts Confucius ont récemment suscité des controverses. Sont mises en cause leurs relations avec le gouvernement chinois et leur possible influence sur le monde académique. En 2020, les États-Unis d'Amérique ont décidé de restreindre l'implantation de ces instituts en les classant comme des missions diplomatiques. La même année, la Suède a fermé l'ens...

...i pour vos analyses éclairantes et précieuses. Il a beaucoup été question de la Chine, car ce pays déploie une stratégie délibérée avec une large panoplie de moyens, mais il est évident que nous devons nous intéresser à tous les pays qui mettent en oeuvre ces pratiques. Les lois australiennes ne visent pas que la Chine. Il ne s'agit pas de faire des lois d'exception, mais de protéger nos libertés académiques, fondement de la démocratie libérale. Vous avez proposé la création d'une norme relative aux libertés académiques, sur le modèle de celle visant à promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes ; on peut aussi mentionner le combat de Reporters sans frontières pour élaborer une certification des bonnes pratiques journalistiques, afin de garantir la fiabilité des informations et lutter cont...

...soient encadrés, et reposent sur la transparence, le contrôle et la réciprocité pour que nos techniques ne servent pas à mener des recherches à visées militaires ni à pratiquer des prélèvements forcés d'organes, par exemple. Il faut prévoir des garde-fous au niveau européen dans le cadre de la mise en oeuvre d'une politique européenne de la santé. On retrouve la même tension que pour les libertés académiques : on ne peut interdire l'expression de positions radicales, mais on doit aussi se prémunir contre la propagande et la désinformation. Comment concilier l'exigence d'une coopération médicale, ne serait-ce qu'à des fins humanitaires, et l'encadrement de ses usages ?

Je vous remercie de votre confiance et de votre participation à cette mission créée à la demande de mon groupe. La question de l'influence d'États étrangers dans le monde universitaire français est encore peu perçue et étudiée. Ce n'est qu'assez récemment en France que des incidences sur l'intégrité scientifique comme sur les libertés académiques ont pu être observées. La frontière entre le soft power et des pratiques plus offensives, voire agressives, d'ingérences semble avoir été franchie par plusieurs pays, notamment la Chine comme le relate la presse. Mais ce n'est pas le seul pays concerné. Du point de vue des démocraties occidentales, et surtout vu de France, les politiques publiques d'influence à l'étranger prennent la forme d'ins...

...es d'entre elles seront à huis clos, telle l'audition des services de renseignement. De même, certains intervenants universitaires voudront peut-être témoigner à huis clos. La Conférence des présidents d'université s'est réjouie de la création de cette mission d'information. Nous pourrons adresser un questionnaire précis à tous les présidents d'université. Nos concepts de base sont les libertés académiques et l'intégrité scientifique et ils font l'objet de définitions. Concernant le guide de bonnes pratiques, une littérature étrangère assez fournie existe déjà. Nous auditionnerons Mme Gillian Bird, ambassadrice d'Australie en France. L'Australie est aujourd'hui l'un des pays les plus actifs sur ce sujet. Depuis 2018, ce pays a adopté un certain nombre de textes en la matière pour créer un systèm...

Dans le monde académique public traditionnel - universités et grandes écoles -, les choses sont assez cadrées. Certaines écoles de commerce privées sont rachetées par des étrangers, et il est beaucoup plus difficile d'investiguer ce monde beaucoup plus hétérogène. Dans certaines universités et plus encore dans certaines écoles privées, les chargés d'enseignement sont susceptibles d'aller chercher des soutiens pour être r...

Nous sommes dans un monde ouvert. Dans un article consacré à la fermeture des quarante-sept instituts Conficius aux États-Unis, une chercheuse a fait remarquer que l'on ne trouve plus dès lors dans ces villes d'enseignement du chinois à un haut niveau, ce qui est problématique. Nous cherchons ici à établir un cadre et des bonnes pratiques. La liberté académique, c'est un fait. Lorsqu'une personne écrit un article qui est soutenu par une revue importante ou une université, elle devrait déclarer les éventuels financements tiers pour éviter tout soupçon de conflit d'intérêts. Il ne s'agit pas d'interdire les échanges universitaires, mais il faut que les choses soient claires et cadrées.

...es éléments d'information. Nous consulterons les travaux menés par les autres parlements en la matière. Dès qu'il s'agit de faire du libéralisme régulier, les pays anglo-saxons sont un peu plus en avance sur nous. Ils attirent beaucoup les étudiants étrangers, mais ils organisent le système dans le respect des valeurs et des principes de leur pays. Nos collègues qui connaissent très bien le monde académique et le monde universitaire pourront aussi nous apporter leurs témoignages.

À titre indicatif nous auditionnerons dès cette semaine Mme Béatrice Khaiat, directrice générale de Campus France, l'organisme chargé d'attirer et d'accueillir des étudiants étrangers, puis prochainement M. Pierre Buhler, ancien ambassadeur et auteur d'une tribune remarquée dans Le Monde du 10 juin consacrée à « l'offensive de Pékin contre les libertés académiques » ; puis M. Nicolas Lerner, directeur général de la sécurité intérieure, à huis clos, et notamment Mme Gillian Bird, ambassadrice d'Australie en France. La réunion est close à 15 h 50.