Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Réunion du 16 novembre 2016 à 15h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je souhaite la bienvenue à Mme Marie-Christine Saragosse, présidente de France Médias Monde (FMM). Nous attendions avec impatience la présentation du contrat d'objectifs et de moyens (COM) de FMM pour la période 2016-2020. Elle sera l'occasion d'aborder le rôle très particulier de l'audiovisuel extérieur, du fait de la spécificité des missions de services public qui lui sont attachées.

Debut de section - Permalien
Marie-Christine Saragosse

Avant de dresser le portrait de ce futur COM, je souhaite rappeler le contexte qui l'a vu émerger. Ces quatre dernières années ont, en effet, été marquées par l'accroissement du risque terroriste, la montée du populisme, la crise des migrants ou, plus récemment, la crainte sur l'avenir de l'Union européenne après le Brexit. Cette multiplication des périls ne nous décourage pas car, plus que jamais, des médias porteurs de sens sont nécessaires pour rappeler le message singulier de la France sur la scène internationale.

Dans ce contexte, trois scénarii ont été proposés en mai 2015 et c'est sur la base du plus favorable que le COM a été construit. Un effort de 23,1 millions d'euros va être fourni d'ici 2020. Cet effort important traduit, dans le contexte difficile que connaissent les finances publiques, la conscience qu'ont les pouvoirs publics de ces enjeux majeurs.

Nous ne disposons cependant pas des moyens de la British Brodcasting Corporation world (BBC world), a fortiori devant l'effort financier important dont elle bénéficie actuellement. Cet effort budgétaire - le plus important connu par le groupe depuis 1940 - va lui permettre de lancer des programmes dans plus de 11 nouvelles langues étrangères alors qu'elle disposait déjà d'un budget deux fois supérieur au nôtre. Si notre budget est sans commune mesure avec celui de BBC world, l'effort public est multiplié par deux par rapport à la période couverte par le précédent COM. Il prévoyait, en effet, une croissance annuelle d'environ 0,85 % des recettes publiques, contre 1,9 % pour le nouveau COM.

Le précédent COM a été le premier connu par notre groupe et a constitué un socle pour celui que je vous présente aujourd'hui. C'est au cours de l'exécution de ce premier COM que s'est construit un véritable groupe. La situation initiale était complexe. Un blocage existait sur le déménagement des locaux, il n'existait plus d'organigramme lisible, l'ensemble des instances étaient passibles de délit d'entrave et les procédures normales et propres à une entreprise n'existaient plus. Les accords d'entreprise précédents étaient devenus caducs après la fusion. Nous avons, depuis, répondu point par point à l'ensemble de ces difficultés. Un accord d'entreprise a été signé le 31 décembre 2015, comme le précédent COM le prévoyait. Ce changement global s'est traduit par l'adoption du nom France Médias Monde en juin 2013.

Comme l'État nous le demandait, nous avons construit un groupe dont les rédactions restent distinctes. Il en résulte des différences de culture d'entreprise en son sein. Des passerelles fortes existent néanmoins entre toutes ses entités, notamment en matière de formation et de sécurité, où sont mises en place des opérations communes. Hier, Radio France Internationale (RFI) et France 24 ont pu, par exemple, avec TV5 Monde, interviewer le Président de la République à Marrakech.

Ce précédent COM, au même titre que le projet présenté, axait sa stratégie sur la qualité des contenus proposés au public. Car à quoi bon vouloir rayonner à l'échelle internationale si l'on n'a aucun message spécifique à faire passer ? Nous n'avons pas les mêmes messages à délivrer que d'autres chaînes comme la BBC ou Al Jazeera. Cette différence est portée par la spécificité de nos grilles de programmes, qu'il s'agisse de celles de RFI, de France 24, ou de Monte Carlo Doualiya (MCD). Nous avons, en ce sens, lancé de nouvelles émissions, accru les directs, atténué le parallélisme strict des antennes de France 24 pour mieux contextualiser et hiérarchiser nos contenus. Nous nous sommes également beaucoup délocalisés à la rencontre de nos publics et avons mis l'accent sur la culture qui reste un signe distinctif de la France dans le paysage mondial.

Les douloureuses années 2015 et 2016 ont aussi vu notre groupe affirmer des valeurs. Les principes de liberté, l'égalité, l'universalité, la laïcité et le respect de l'autre ont raisonné dans les quinze langues de nos programmes et ont structuré nos antennes. Nous étions probablement les seuls dans le monde arabe, voire dans le monde anglophone, à montrer le tirage du Charlie Hebdo des survivants pour porter haut le principe de la liberté d'expression.

Nous nous sommes engagés dans l'éducation aux médias et avons conclu une convention avec l'éducation nationale. Nous sommes également très actifs dans le cadre de la semaine de la presse à l'école pour essayer de lutter contre les manipulations par le biais d'internet, qui reste un outil de propagande malheureusement performant.

La promotion de la langue française était également une priorité. Nous avons, en ce sens, mis en oeuvre des méthodes d'apprentissage du français, en particulier dans des langues africaines. L'avenir de la francophonie est en Afrique et il faut que le français y soit appris car il y est rarement la langue maternelle.

Nous nous sommes beaucoup mobilisés sur la parité, la mixité et la diversité au sens large. L'accès de nos programmes aux handicapés, dont les sourds et malentendants, a aussi été un objectif.

La place des langues étrangères a été revue avec succès puisqu'elles représentent 40 % de la consultation de nos contenus numériques. Nous comptons également sur des radios-filiales, comme RFI Romania ou RFI au Cambodge, qui y sont reconnues comme référentes. Nous avons aussi lancé une radio en mandingue, langue du Sahel très pratiquée.

Une forte offensive ciblée sur la mobilité et les réseaux sociaux a été mise en oeuvre dans le cadre de notre politique du numérique où nous avons refondu toutes nos offres. Des résultats très encourageants en ont été la conséquence puisque les audiences de France 24 ont pu croître de 22 % en trois ans pour atteindre 51 millions de téléspectateurs par semaine et ce dans seulement un tiers des pays où elle est distribuée. Sur la même période, RFI a connu une augmentation de 16 % du nombre de ses auditeurs, pour atteindre 40 millions par semaine dans seulement 37 pays ayant fait l'objet d'une étude, soit à peu près un tiers des pays couverts. MCD a atteint 7,3 millions d'auditeurs, soit une augmentation de 9 %. Il faut ici tenir compte de la situation géographique difficile là où émet cette radio. Certains de ses émetteurs sont d'ailleurs actuellement aux mains de Daesh. Les audiences sont, en ce sens, particulièrement difficiles à obtenir et a fortiori à mesurer dans ce contexte.

Nous fêtons aujourd'hui les 50 millions d'abonnés sur les réseaux sociaux pour notre groupe. RFI et France 24 ont respectivement connu une croissance de 94 % et 51 % de la fréquentation de leurs environnements numériques.

Cette croissance a été rendue possible par une forte augmentation de notre distribution. Elle a été de 50 % pour France 24 qui était présente dans 315 millions de foyers à la fin du précédent COM, 321 millions à l'heure actuelle. RFI et MCD ont, elles, acquis sept nouvelles fréquences d'émission pendant cette période.

Tous ces objectifs ont été atteints en maintenant nos équilibres financiers, en développant nos ressources propres et en obtenant de très forts gains de productivité.

C'est sur ce bilan que se construit le futur COM 2016-2020 pour lequel nous sollicitons l'avis de votre commission. Il s'articule autour de trois grands axes : des contenus toujours plus référents, un accroissement de notre présence mondiale et une gestion rigoureuse puisque nos ressources sont majoritairement issues de deniers publics.

Pour ce qui est des contenus, le prochains COM vise à capitaliser et à pérenniser le développement de notre offre éditoriale mais également à développer de nouveaux contenus. Je pense qu'il est ici important de saluer le lancement de France 24 en espagnol en septembre prochain. Le coût de cette diffusion sera, en année pleine, de 7,3 millions d'euros et une enveloppe de 2,9 millions d'euros sera allouée à son lancement en 2017. La rédaction sera basée à Bogota où cette chaîne sera adossée à RFI qui possède déjà une rédaction en espagnol. Des émissions conjointes sont d'ailleurs prévues. Cette rédaction comptera des journalistes en provenance de tout le continent latino-américain.

Notre participation à la chaîne Franceinfo est au nombre de nos nouveaux projets. Elle a débuté en 2016 et nous place comme le plus gros pourvoyeur de contenus avec ceux diffusés la nuit, mais également trois journaux par jour ainsi qu'un certain nombre d'autres émissions. Nous essayons maintenant de développer notre présence sur sa plateforme numérique.

Le numérique est, en effet, le deuxième axe par lequel nous souhaitons améliorer nos contenus. Il s'agit ici d'industrialiser le numérique, de renforcer l'animation et la modération et de développer les nouvelles écritures dont la vidéo mobile. Nous voulons également attacher au numérique une véritable mission de service public en touchant le jeune public entre 18 et 35 ans, notamment par l'intermédiaire de RFI savoirs ou RFI musique ou Mashable en français, la version française du pure player américain qui a sollicité notre collaboration. Je suis responsable de la ligne éditoriale de Mashable en français qui possède donc une ligne éditoriale française assise sur un savoir-faire partagé avec les Américains. Nous souhaitons également développer un internet citoyen chez la jeune génération par l'intermédiaire d'appels à candidatures sur des applications portant sur la santé ou bien l'éducation. RFI Challenge App Afrique ou Les observateurs du climat sont, en cela, des points majeurs. Un portail d'information à destination des migrants qui va être financé en intégralité par la Commission européenne va également bientôt être lancé, avec le partenariat de la Deutsche Welle.

Nous continuerons à affirmer la singularité de nos différents médias, non pour des raisons idéologiques, mais pour des raisons pratiques car cette pluralité permet de toucher un public plus large. Ces différents médias vont cependant travailler ensemble au profit de la chaîne en espagnol, déjà évoquée, mais également pour renforcer l'africanité de France 24. Ce COM porte, en effet, une volonté d'accentuer l'africanité du signal notamment porté en Amérique latine à travers un rapprochement avec RFI.

Nous souhaitons également continuer à marquer notre présence en se basant notamment sur la haute définition (HD), sur la Télévision numérique terrestre (TNT) en Afrique, mais également avec la version de France 24 en espagnol en Amérique latine. Cela passe aussi par la confirmation de la réelle percée de nos médias en Asie et spécialement en Inde, en Indonésie, au Vietnam et en Corée du Sud. Nous essayons aussi de trouver une entrée au Japon et, s'il s'agit pour le moment d'un rêve, la Chine pourrait également devenir un objectif ! Il ne reste ainsi que la France où nous n'avons pas pu développer nos radios dans le cadre du précédent COM. Nous espérons compter sur la Radio numérique terrestre (RNT) pour prochainement y remédier dans certaines zones ciblées et ainsi contribuer à la cohésion sociale de notre pays.

En lien avec cette optique de rayonnement, le COM prévoit le rattachement de Canal France international, qui est l'outil de coopération audiovisuel de la France. Il sera rattaché à FMM de la même manière que BBC action est rattachée à la BBC. Voulu par le ministère des affaires étrangères, ce rattachement fera l'objet d'un avenant distinct au COM où son principe y est déjà acté. Il s'agit d'une mesure très prometteuse en matière de synergie et de seuil critique permettant d'être visible sur la scène internationale.

Le troisième axe est l'optimisation de la gestion du groupe. La protection contre les risques en est un point central du fait de leur importante recrudescence sur tous les fronts. Ils concernent en premier lieu le terrain, mais également nos propres locaux, ou bien les cyberattaques. Puisque nous sommes situés en zone inondable, une crue de la Seine nécessiterait aussi, par exemple, que soit mis en place des plans de reprise d'activité ou de continuité d'antenne. La sécurité est donc un axe fort pour les années à venir.

L'application de l'accord d'entreprise précédemment évoqué est en cours. Nous devons continuer à réduire les disparités salariales résiduelles qui demeurent au sein de notre entreprise. Elle est, en effet, le fruit du rapprochement d'acteurs aux destins jusque-là très éloignés et aux systèmes sociaux très différents. Nous travaillons donc à la transposition de ce nouvel accord à l'aide d'outils de planification ainsi que différents accords complémentaires et continuons de lutter pour la parité, pour reconnaître le handicap dans l'entreprise. Ce sont des valeurs que nous défendons.

Le passage récent à la HD oriente maintenant notre politique d'investissement vers une forme de stabilité pour les années à venir. Nos procédures internes vont, afin d'augmenter notre productivité, traiter spécifiquement des marchés publics. Si nous possédons déjà une commission d'attribution et de nombreuses procédures, nous souhaitons maintenant créer un poste dédié pour renforcer notre expertise dans ce domaine.

Le développement de nos ressources propres aura la même place que lors de la période précédente avec une augmentation de 1 million d'euros, soit 15 % au cours de la période 2016-2020. Cette augmentation sera donc identique à celle observée lors du précédent COM.

Nous voulons également continuer à cultiver nos relations avec les autres services publics tels que France Télévisions et la chaîne Franceinfo, Radio France, TV 5 Monde ou CFI-TV. Nous travaillons également de très près avec l'Agence France-Presse (AFP) pour notre projet en espagnol et avec l'Institut national de l'audiovisuel (INA) pour notre plan de rétablissement de l'activité en cas de crue de la Seine.

Debut de section - PermalienPhoto de Claudine Lepage

Votre présentation nous fait prendre conscience de l'ampleur du travail effectué depuis 2012, point de départ du redressement du service public de l'audiovisuel extérieur. La construction de ce groupe s'est, de plus, faite dans un contexte difficile. Nous attendions donc avec fébrilité ce COM 2016-2020 !

L'année dernière, France Médias Monde avait évoqué trois scénarii pour les moyens du COM 2016-2020. Seul le troisième scénario, qui envisageait une hausse de 2,1 % des moyens par an et 25,3 millions d'euros sur la durée du COM, permettait, selon vous, de financer la nouvelle chaîne France 24 en espagnol. Je me réjouis que le scénario le plus favorable ait été retenu mais une inquiétude subsiste. Lorsqu'on regarde le COM, sans tenir compte de l'année 2015 qui n'est pas concernée, on s'aperçoit que la hausse des moyens sera en fait de 1,73 % sur la période 2016-2020, soit 21,1 millions d'euros et donne lieu à un décalage de 4,2 millions d'euros avec le scénario 3. Quelles sont les conséquences de ce décalage ? Comment allez-vous absorber ces crédits « en moins » par rapport à vos besoins identifiés ?

L'accord professionnel du 31 décembre 2015 a pour objectif de rapprocher la situation des personnels des différentes entités. Peut-on considérer aujourd'hui que cette harmonisation est accomplie ?

Les nouveaux personnels recrutés ont-ils conscience de rejoindre un groupe unique avec une culture commune à construire ou bien ont-ils vocation à faire perdurer la culture propre à RFI et France 24, y compris dans leur dimension particulière voire conflictuelle ?

Les services du ministère de la culture et de la communication m'ont indiqué que la diffusion de France 24, RFI et MCD sur le territoire national ne constituait pas une priorité compte tenu de la répartition des rôles avec l'audiovisuel public « national ». Pensez-vous néanmoins pouvoir progresser dans ce domaine compte tenu des nouveaux canaux de diffusion disponibles ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Leleux

La création de FMM visait à l'origine à rapprocher les rédactions de France 24 et de RFI. Cette fusion des rédactions a été stoppée en 2012 par le nouveau Gouvernement. Quels seraient selon vous les avantages et les inconvénients de remettre en chantier ce rapprochement dans les mois à venir ? Combien de temps faudrait-il, selon vous, pour mener à bien ce rapprochement qui est au coeur du projet de modernisation de l'audiovisuel extérieur ?

La diffusion de RFI et de France 24 sur le territoire national ne constitue pas une priorité aujourd'hui. Pourtant Radio France bénéficie de fréquences qui sont sous-utilisées mais ne peut les mettre à disposition de RFI ou MCD sans les rétrocéder avant au CSA qui devra faire des appels à candidatures. Serait-il possible, selon vous, de prévoir - quitte à modifier la loi - une possibilité pour l'audiovisuel public « intérieur » et « extérieur » de gérer en commun les fréquences dont ils bénéficient pour permettre une montée en puissance de RFI par exemple ?

Votre contribution à la chaîne Franceinfo est, comme vous l'indiquiez, assez importante en termes de mise à disposition de contenus. Quel est votre ressenti sur les premiers mois de sa mise en service ? Quelles sont les pistes d'amélioration que mérite cette initiative ?

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Duvernois

Je souhaiterais reprendre deux points déjà abordés. Le premier concerne le rapprochement, ou le regroupement de France 24 et de RFI. Le second concerne plus spécialement la diffusion de France 24 sur le territoire.

Ce COM réaffirme la mission de service public de FMM dans l'univers du numérique qui impose de s'y adapter toujours plus rapidement. Si notre commission s'est déjà montrée favorable à un regroupement des opérateurs au sein du service public de l'audiovisuel national et international, les avis demeurent globalement divergents à ce sujet. Le président de Radio France s'y est, par exemple, montré récemment défavorable. Quel est précisément votre avis sur cette question qui ne serait pas sans incidence sur l'orientation d'une gouvernance plus « mutualisée » ?

N'avez-vous pas, cependant, déjà commencé à établir des coopérations avec d'autres opérateurs du service public pour y rencontrer des succès d'audience ? Ce succès est palpable si j'en juge par les résultats qui m'ont été communiqués et ce que je perçois à l'occasion de tous mes déplacements successifs à l'étranger à l'écoute de Franceinfo dont la formule est « deux points ouvrez l'info » sur internet. Ce slogan me semble, d'ailleurs, bien adapté aux auditoires visés. Cette nouvelle offre publique d'information en direct sur le web nous semble correctement s'inscrire dans le cadre d'un projet fédérateur regroupant quatre partenaires de l'audiovisuel public que sont France Télévisions, Radio France, FMM et l'INA. Elle constitue ainsi une offre globale d'information. La participation de France 24 à Franceinfo permet également d'élargir, en France, la présence de la chaîne de l'audiovisuel extérieur.

Après les succès d'audience à l'international de France 24 en français, en anglais, en arabe, et bientôt en espagnol, comme nous le souhaitons, je voudrais connaître votre point de vue sur l'éventuelle diffusion de France 24 en langue arabe sur le territoire national afin de reproduire l'expérience fructueuse de diffusion de RFI et de MCD sur une fréquence temporaire événementielle à l'occasion de Marseille capitale européenne de la culture en 2013. Le sénateur-maire de Marseille, M. Jean-Claude Gaudin, ayant trouvé l'opération intéressante, était prêt à pousser plus loin la réflexion.

Debut de section - Permalien
Marie-Christine Saragosse

Le chiffre proposé dans notre scénario le plus favorable était 25,3 millions d'euros. Ce chiffre correspondait au delta entre le budget 2015 qui est hors COM et le budget 2020, dernier budget couvert par le COM. Il représente donc l'effort consenti sur cinq années, qui n'est donc pas de 21,1 millions d'euros, comme indiqué par Mme Lepage, mais bien de 23,1 millions d'euros, soit à peu près 2 millions de moins que notre scénario le plus favorable. Le budget de 2016 doit être inclus aux chiffres de ce COM.

Si cet effort est important, ce décalage nous a tout de même conduits à renoncer au renforcement des langues africaines alors qu'une telle action nous tenait particulièrement à coeur. Le lien entre l'Afrique et nos médias est extrêmement fort. Le lancement d'un programme en langue Mandingue. Un micro-trottoir effectué à l'occasion de la première année de cette initiative a, en ce sens, montré un réel engouement. Mais les priorités accordées à la chaîne de France 24 en espagnol et sur le numérique nous ont malheureusement poussés à faire des choix au détriment du développement des langues africaines.

Le travail d'harmonisation des statuts au sein de notre groupe a été marqué par la signature d'un accord d'entreprise, mais il ne marque pas de point final au travail à effectuer. Il a nécessité, en premier lieu, d'être transposé et que nous réfléchissions au positionnement et à l'évaluation des métiers afin de procéder au réétalonnage des salaires. Il s'agit d'un travail lourd, comme peut le confirmer le directeur général de FMM, Victor Rocaries.

Debut de section - Permalien
Victor Rocaries, directeur général de France Médias Monde

Je rappelle que nous avons modifié le temps de travail de la totalité de nos collaborateurs. Cette modification nous a conduits à modifier l'ensemble des contrats de travail qui lient ces collaborateurs. Il nous reste également à « peaufiner » la définition des métiers et leurs positionnements. Ces lourdes tâches nous occuperont tout au long de l'année à venir.

Debut de section - Permalien
Marie-Christine Saragosse

En ce qui concerne la culture d'entreprise, la fusion de l'ensemble des fonctions support concourt à la constitution d'une identité commune. En revanche, chaque rédaction possède sa propre manière de voir les choses. Les différentes langues et les différents supports utilisés par les rédactions de France 24 ou de RFI participent à cette différenciation. Le stage commun que suivent ensemble nos grands reporters, avec ceux d'autres médias, fait, en revanche naître chez eux un sentiment de confraternité assez fort.

Le fait qu'il n'existe plus de conflits entre nos rédactions fait émerger une forme de plaisir à travailler ensemble. Nous avons d'ailleurs pour slogan « puisqu'on ne fusionne plus, si on travaillait ensemble ? ». Une forte dynamique de collaboration existe. De nombreux programmes communs à France 24 et RFI en sont le fruit et il est fréquent que les uns pensent à des idées de programmes pour les autres.

La problématique de la présence en France de FMM doit être différenciée, qu'il s'agisse de la radio ou de la télévision. En ce qui concerne la radio, le précédent COM avait prévu une action ciblée au travers d'une fréquence commune RFI/MCD en langue arabe à Marseille, qui a été un vrai succès mais qui, du fait de son caractère temporaire, a dû être interrompue. Depuis rien ne semble avoir été fait pour pérenniser un tel média alors que la loi donne à l'État la possibilité de préempter des fréquences radio. Le fait que la langue arabe soit concernée n'y est peut-être pas étranger au regard du contexte actuel passionnel. Je défends personnellement l'idée d'un service public qui puisse s'appuyer sur l'utilisation de la langue arabe dans un contexte laïc, a fortiori dans un pays qui a inventé l'agrégation d'arabe. Mais il s'agit là d'un choix souverain qui me dépasse et qui explique pourquoi MCD n'est pas distribuée sur notre sol. Néanmoins, la RNT risque, en ce moment même, de faire évoluer les choses avec les appels à candidature du CSA et la préemption possible de l'État.

Comme M. Duvernois, je suis consciente de la nécessité de creuser cet axe de réflexion et compte sur l'appui des maires, proches des réalités du terrain, pour lesquels le sujet ne génère pas d'inquiétudes particulières. Fournir une information dans une langue étrangère plus accessible à certains Français présente, en outre, un double avantage. Le premier est que le coût est marginal puisque ces médias existent déjà. Le second est qu'il évite à ces Français d'aller chercher l'information ailleurs, notamment par le biais de médias extra-européens qui ne présentent pas les mêmes garanties de neutralité et de qualité.

En ce qui concerne la télévision, il ne faut pas oublier que France 24 est accessible en langue arabe sur tout le territoire par l'intermédiaire du câble, du satellite et d'internet. Elle n'est pas disponible sur la TNT, mais je ne pense pas qu'il soit dans l'air du temps de consacrer une part de cette ressource assez rare à une chaîne entièrement en langue arabe. Des partenariats pourraient, en revanche, voir le jour pour permettre des diffusions locales. Car il est aujourd'hui acquis que les médias internationaux peuvent avoir une utilité en France, sur des zones ciblées, par rapport aux problématiques de cohésion sociale qui sont les nôtres.

Concernant les structures de notre groupe, je rappelle que la logique initiale de FMM était construite autour de l'idée de fusion dans un but d'économie et de recherche d'efficacité. En ce qui concerne les économies, nos organismes de tutelle savent que nous en avons tellement effectuées que nous ne disposons plus, à l'heure actuelle, de leviers pour accroître notre productivité. Notre budget pour 2016 en est l'exemple car il est inférieur à celui de 2011, malgré l'ensemble de nos nouveaux projets.

Ces efforts de productivité ont été obtenus sans fusionner les rédactions, voire même en les renforçant, puisque France 24 n'avait pas atteint en 2012 sa taille actuelle. Lorsque j'ai pris mes fonctions, les chaînes de FMM disposaient, en moyenne, d'un personnel d'un peu moins de 150 équivalents temps plein (ETP). À titre de comparaison, BFM TV, dont la gestion ne peut pas être soupçonnée de légèreté, dispose à l'heure actuelle de 215 ETP pour assurer 18 heures d'émission par jour sur le seul territoire national. Après les efforts que nous avons produits, France 24 dispose de seulement 160 ETP pour couvrir le monde entier, 24 heures sur 24 et pas seulement 18 heures par jour ! Je pense donc sincèrement que notre groupe est particulièrement performant et ne voit pas quelles économies majeures pourraient encore être réalisées.

BBC world émet en 37 langues et va bientôt en développer 11 de plus alors que nous ne diffusons qu'en 15 langues. Il ne nous est donc pas possible de voir la réduction du nombre de langues comme une piste d'économie.

France 24, RFI et MCD doivent aller chercher des publics différents. Nous disposons de trois formats très différents avec une chaîne d'information en continu, une radio d'actualité dont certains contenus lui donnent un vrai rôle d'éducation populaire et une chaîne généraliste. Il est prioritaire que les contenus de ces trois médias ne se concurrencent pas entre eux, mais qu'ils créent des synergies du fait de leur complémentarité pour accroître l'audience globale du groupe.

Le numérique est un lieu de regroupement de ces trois médias. Le site des savoirs de RFI utilise, par exemple, des vidéos de France 24. Des informations intéressantes de RFI peuvent aussi être reprises par Mashable. Il n'y a pas de cloisonnement. Mais lorsque l'on visite la Radio-télévision belge de la Communauté française (RTBF) et la Radio-télévision suisse (RTS) qui ont connu une fusion, on se rend bien compte que, fusion ou pas, un journaliste ne peut pas faire de la télévision, de la radio et du numérique en même temps !

Nos journalistes sont polyvalents, mais ne peuvent pas tout faire à la fois, ce qui justifie la persistance d'une forme de spécialisation, d'ailleurs soutenue par la fusion de nos services support.

Nous avons inventé un modèle original qui fonctionne et qui n'a pas encore fini de donner toute sa créativité. Je suis, par exemple, persuadée que nous allons dans l'avenir nous épanouir dans le domaine des vidéos mobiles.

Je ne peux pas vous parler de la structure du service public dans son ensemble de la même manière que j'évoque notre propre système puisqu'il comporte d'autres acteurs. Je pense néanmoins que la mission doit, ici aussi, justifier les moyens qui sont mis en oeuvre pour l'accomplir, et non le contraire. Le coût du service public de l'audiovisuel s'élève à 6,7 milliards d'euros au Royaume-Uni et 9 milliards d'euros en Allemagne contre 3 milliards d'euros seulement en France. La comparaison des effectifs va dans le même sens puisque le service public de l'audiovisuel s'appuie sur 22 000 ETP en Grande-Bretagne contre seulement 18 000 en France.

Les fusions ont aussi un coût. Nous avons financé notre rapprochement par redéploiements car nous avons pu dégager une marge de manoeuvre du fait de plans de départs. Si la fusion n'a pas forcément, en elle-même, généré des économies, elle a, à l'inverse, engendré des charges, comme celles relatives à l'harmonisation sociale ou aux déménagements. Notre situation est, à ce titre, plutôt avantageuse puisque notre harmonisation sociale ne s'est pas faite exclusivement à la hausse pour les salariés, comme c'est souvent le cas, avec une diminution du temps de travail et un alignement sur les salaires les plus élevés. Nous avons au contraire, d'un côté, augmenté le temps de travail ainsi que les salaires et avons, de l'autre côté, un peu allégé le temps de travail sans baisser les salaires. Je comprends que certains pensent qu'il était possible de faire mieux mais le risque de blocages sociaux a été évité.

J'ai très agréablement été surprise, notamment sur le plan humain, que la chaîne Franceinfo ait réussi à voir le jour malgré les difficultés inhérentes à ce projet. Cette chaîne est très récente et certains progrès sont donc encore à faire dans l'environnement complexe des chaînes d'information. Le parti-pris initial vers le numérique est très marqué et, du fait de la linéarité de cette chaîne, certains ajustements vont être effectués dans une nouvelle grille de programmes à venir. FMM est prestataire mais n'est pas responsable de la ligne éditoriale et de l'édition de cette chaîne qui reviennent à France Télévisions. Si nous n'avons pas directement la responsabilité de Franceinfo, nous constatons qu'elle est un point de rencontre qui donne de la fluidité aux rapports que l'on peut entretenir au sein du service public de l'audiovisuel. Nous collaborons ainsi avec l'INA pour notre dispositif de secours en cas de crue et cela a, plus globalement, donné envie aux gens de faire des choses ensemble.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Leleux

Ces coopérations sont finalement déjà, de facto, une forme de regroupement.

Debut de section - Permalien
Marie-Christine Saragosse

Cette coopération se fait plus autour de contenus que de structures. Nous avons d'ailleurs été soulagés de voir retenu le modèle économique qui est celui que la chaîne possède actuellement. Nos journaliste sont polyvalents et prennent souvent en charge eux-mêmes le montage des reportages ou la prise de son, par exemple. C'est la condition qui nous permet de respecter nos budgets. Le choix d'un autre modèle économique aurait donc pu remettre le nôtre en question. Là est encore l'exemple que le rapprochement des structures peut créer des blocages alors que les projets communs sont à l'origine de dynamiques positives pour tous, si l'on respecte les contraintes financières.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Duvernois

Le numérique est en passe de devenir une forme de concurrence pour les chaînes traditionnelles. Comme je le rapportais, le public apprécie particulièrement l'écoute de certains médias sur internet. Cette chaîne internet ne fait-elle pas, en ce sens, concurrence à des chaînes traditionnelles existantes comme TV5 Monde ou France 24 dans sa version en français ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Les mésaventures de RFI pourraient donner lieu à une véritable bande dessinée ! Rappelons qu'elle a été logée dans les locaux de la Maison de la radio, puis expulsée, puis relogée dans de mauvaises conditions, malmenée, et que l'on a demandé à ses talents de se mettre au service de France 24. Merci d'avoir tenu bon et assuré une gestion bienveillante et exigeante du travail commun de toutes les entités de FMM, à qui vous transmettez de « bonnes ondes ».

Je vous témoigne, au nom de mes collègues, notre solidarité suite à l'appel en faveur d'Ahmed Abba dont le procès ne s'appuie sur aucune preuve sérieuse de culpabilité, alors qu'il risque la peine de mort en raison de la loi anti-terroriste votée il y a deux ans dans son pays. Vous pouvez compter sur nous pour faire valoir ses droits en tout lieu.

Nous pensons, comme Claudine Lepage, qu'il est urgent que certains médias s'expriment sur notre sol dans d'autres langues que le français. Certaines langues ne doivent pas seulement être uniquement parlées dans les lieux de culte mais doivent être entendues dans le cadre d'autres contenus et en d'autres lieux.

Je constate que vous collaborez avec l'AFP en Amérique latine mais je ne crois pas que cette agence participe au programme d'aide aux migrants auquel sont associées l'agence de presse italienne Agenzia Nazionale Stampa Associata (ANSA) et Deutsche Welle. Pourquoi l'AFP n'y participe-t-elle pas ?

Peut-on obtenir plus de détails sur la mise en oeuvre de l'éducation aux médias ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Je vous remercie d'avoir abordé les thèmes de la productivité et de l'industrialisation du numérique ou des procédures de marché public. Tous ces éléments témoignant d'une gestion rationnelle donnent, à mon sens, de la crédibilité à la notion de service public et aux grandes formules de principe qu'il nous est souvent donné d'écouter.

Vous avez émis l'idée que les trois structures qui constituent votre groupe pouvaient s'auto-alimenter réciproquement et se renforcer. Que l'on raisonne au sein de FMM ou au sein de l'information continue de France Télévisions, vous nous avez expliqué que l'important était de se retrouver sur des projets et pas forcément au sein de structures communes, reléguant ainsi l'idée de fusion. Il est, en revanche, possible de ne pas fusionner et conserver des canaux distincts de diffusion tout en les plaçant sous la protection commune d'une « marque parapluie ». Il s'agit d'une situation connue dans les modes de gestion privée.

Malgré les cultures propres aux trois médias de votre groupe, défendriez-vous l'hypothèse d'une telle « marque parapluie » qui vous donnerait une visibilité plus forte dans le paysage de la diffusion internationale ?

L'AFP est un outil à la disposition de notre pays pour assurer son influence internationale et soutenir la francophonie. C'est la raison pour laquelle l'État finance à peu près la moitié de son budget à un niveau de près de 130 millions d'euros par an. Je conçois bien que le métier de l'AFP n'est pas le même que ceux de votre groupe, il n'en est pas moins vrai que vous avez une raison d'être en commun. Elle consiste à porter l'influence de la France et de ses valeurs au-delà de nos frontières, notamment par l'utilisation de médias en langues étrangères. En quoi pensez-vous néanmoins faire des choses différentes ? En quoi pensez-vous que FMM dispose d'un bon rapport « qualité/prix » pour assurer la diffusion de l'image de la France et de ses idées ? A travers leurs missions communes, vous est-il possible d'envisager des pistes de complémentarité entre FMM et l'AFP ?

Comme vous, le président de l'AFP pense que la vidéo mobile est un élément d'avenir. L'emploi de termes communs me fait m'interroger sur une harmonisation possible entre sa structure et la vôtre.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

M. Philippe Bonnecarrère a été rapporteur de la loi de 2015 relative au statut de l'AFP.

Je souhaiterais aborder le thème de la sécurité des journalistes de FMM car je sais qu'il s'agit d'une de vos préoccupations majeures du fait de la multiplication des zones de conflits et des arrestations de journalistes à travers le monde, telle celle, récente, d'Olivier Bertrand en Turquie. Quelles sont les mesures particulières avez-vous prises pour y faire face ? Quelles difficultés particulières avez-vous rencontrées ?

Sachez que nous vous soutenons car nous comprenons les spécificités propres à un média audiovisuel extérieur. Elles sont inhérentes aux prises de risque, au courage et à la nécessité d'être tout de même sur le terrain afin d'exercer votre mission de service public. Je souhaiterais que vous partagiez cet aspect avec les membres de notre commission.

Je rappelle à M. Duvernois que la concurrence que représente l'information sur le web pour les chaînes « traditionnelles » existait avant Franceinfo. Le web est, en effet, le lieu de toutes les concurrence puisque radio, télévision, presse écrite se retrouvent sur ce marché. C'était le cas de Franceinfo, à l'époque France TV info, qui avait exactement la même offre et était regardée à l'international. FMM se différencie car nous touchons, en outre, plus largement les francophones que les français. Même les Français expatriés ont besoin d'entendre parler du pays où ils habitent et ça ne correspond pas totalement à la ligne éditoriale de Franceinfo. Nos offres sont donc complémentaires pour les Français de l'étranger.

Les francophones ne sont pas plus intéressés par Franceinfo que par France 24 alors que France 24 émet en trois langues étrangères. Du fait de la montée de l'arabe et de l'anglais sur France 24, la langue française ne concerne à peine plus que la moitié des contenus proposés. En conséquence, la moitié de notre trafic se fait en langue étrangère et c'est là notre signature.

France 24 est de surcroît déjà représentée sur la chaîne de Franceinfo. Une version du site va être dévoilée en décembre, elle devrait également permettre une montée en puissance. Ces médias appréhendent l'actualité sous un angle différent. Le caractère autocentré des Français exaspère souvent le reste du monde et France 24 tient à s'en éloigner.

Je reviens sur les problèmes de sécurité rencontrés par nos journalistes et rappelle que nous avons récemment dû en exfiltrer un de Tanzanie alors qu'il était condamné pour terrorisme. Une action similaire a également été nécessaire au Burundi. Le premier journaliste a obtenu le statut de réfugié en France du fait, notamment, des actes de torture dont il avait été victime. Je confirme qu'Ahmed Abba risque la peine de mort alors que son accusation ne s'appuie sur aucun élément tangible. Je comprends que le Cameroun soit déstabilisé par l'opposition qu'il doit mener à Boco Haram. Cette lutte ne doit cependant pas conduire à un amalgame entre journalistes et terrorisme. Les auditions de Ahmed Abba par la justice camerounaise se multiplient et nous nous efforçons d'être à ses côtés à chacune d'entre elles. Nous ne perdons pas l'espoir de le voir libéré avant la fin de l'année.

Enfin, en République Démocratique du Congo (RDC), où il ne nous est plus possible d'émettre depuis une semaine. Une mission s'y rendra à ce titre la semaine prochaine.

Ces difficultés sont paradoxalement inhérentes à notre succès. Si RFI n'avait pas gagné la crédibilité, le statut et le poids qu'elle a actuellement, elle ne serait pas perçue comme une menace par certains, même s'il s'agit d'une contrepartie dont nous nous passerions volontiers.

Je me souviens de votre témoignage de soutien lors de l'assassinat de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, dont nous avons récemment commémoré la disparition. On ne se remet jamais de ce type de situation. Personne n'a oublié Jean Hélène. Personne n'a non plus oublié Johanne Sutton dont nous avons également commémoré la semaine dernière les 15 ans de la disparition en Afghanistan. Grand reporter est un métier à risque mais nous savons que ne plus l'exercer revient à laisser leur place au non-droit, aux massacres et aux dictatures. Le silence est complice des pires abominations. Aucun reportage ne vaut une vie et ce principe ne saurait souffrir d'exceptions. Mais le « risque zéro » n'existe pas et nous devons faire l'effort de le minimiser au maximum pour assurer notre mission. Il en va de la démocratie.

Nous avons, pour cela, créé le stage que j'ai évoqué en introduction et qui est également ouvert aux non-journalistes. D'une durée d'une semaine, il traite des divers aspects du métier de journaliste comme son exercice e, zone de guerre ou lors des manifestations dangereuses, mais aussi du numérique, de la psychologie, du secourisme... La liste est longue. Il n'existe pas d'équivalent et c'est la raison pour laquelle des médias comme Europe 1 ou Canal plus y voient des collaborateurs.

J'ai également recruté un jeune colonel en retraite au poste de responsable de la sécurité. Nous avons ainsi pu conceptualiser les procédures et les ventiler en fonction des zones concernées, selon une cartographie des risques unique pour toute la société, et assurer la sécurité des personnels déployés. Il faut aussi lutter contre l'impunité des crimes commis contre des journalistes car, sur 10, 9 restent impunis à l'heure actuelle. L'année 2015 a été celle du triste record du nombre de morts de journalistes. Je tire mon chapeau aux journalistes qui vont sur le terrain. Il ne s'agit pas de baroudeurs ou d'aventuriers, mais bien de professionnels qui ont à coeur de trouver la vérité. Beaucoup d'entre eux sont des femmes.

Nous possédons, dans un autre domaine, un dispositif de lutte contre les cyberattaques puisque nous subissons en moyenne 1 million de tentatives d'intrusion chaque mois. Un plan de sécurité de nos locaux a aussi été mis en oeuvre.

Le projet d'information des migrants est un projet européen. Nous ne pensions pas, à l'origine, rencontrer un tel succès et avons dû aller chercher des partenaires d'autres pays membres pour obtenir la subvention européenne qui nous était nécessaire. C'est pourquoi nous nous sommes tournés vers Deutsche Welle qui est l'un de nos partenaires habituels et que l'Agence nouvelle des solidarités actives (ANSA) s'est spontanément jointe à nous. Un dossier franco-français, conduit avec l'AFP par exemple, n'aurait eu que peu de chances d'obtenir cette subvention. Je signale, à cette occasion, siéger au conseil d'administration de l'AFP. J'y ai été nommée pour représenter le service public.

Au même titre que Reuters et BBC world, FMM et l'AFP n'ont pas le même rôle et n'ont donc pas vocation à fusionner.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

La situation n'est pas la même puisque les ressources de l'agence Reuters ne sont pas publiques.

Debut de section - Permalien
Marie-Christine Saragosse

La nature des activités de l'AFP et de FMM peut, il est vrai, sembler se rapprocher du fait de leurs financements publics, mais elles sont en réalité fondamentalement différentes. L'État verse à l'AFP une subvention au titre de sa mission de service public, mais la part restante de ses ressources est, elle, tirée de la vente de contenus à des chaînes de télévision comme les nôtres.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Ma question portait sur la possible complémentarité de vos actions.

Debut de section - Permalien
Marie-Christine Saragosse

La collaboration entre la chaîne espagnole de France 24 à Bogota et l'AFP est liée à la possibilité d'y établir une synergie de nos équipements et de nos locaux. Je ne pense pas que ce rapprochement conduise cependant l'AFP à nous faire cadeau des images qu'elle produit en espagnol. Nous entretenons avec cette agence des rapports de client à fournisseur. L'AFP a également besoin de marquer son indépendance pour garantir sa crédibilité auprès des autres chaînes qui lui achètent des contenus, comme la BBC ou Russia today.

Je me suis cependant déjà interrogée sur la possibilité que FMM puisse vendre certains de ses contenus par l'intermédiaire de l'AFP pour en étoffer l'offre à moindre coût. Il faut, toutefois, que nous ayons la certitude d'être à 100 % producteur des reportages que nous proposerions afin de ne pas indirectement revendre des contenus que nous aurions déjà achetés en amont. L'intégration d'images achetées nous permet la diffusion du reportage qui les contient, mais pas sa commercialisation.

L'AFP et FMM possèdent des points communs, des correspondants communs, des mesures de sécurité en commun mais des activités véritablement différentes, en revanche. Un rapprochement ne va donc pas de soi. Le prochain COM pourrait être cependant l'occasion d'étudier et d'approfondir la question.

S'agissant des fréquences FM non utilisées, Radio-France, avec qui nous travaillons en bonne intelligence, nous a précisé que ces fréquences lui étaient utiles dans le cadre de sa mission de service public. Si ces fréquences devaient être libérées, comme le souligne M. Leleux, je ne pense pas que les radios privées accepteraient que les groupes publics puissent se les échanger sans passer par le CSA. Une telle démarche les évincerait de facto de toute procédure de réattribution. L'équité entre le public et le privé serait ici en jeu. Je serais, en tout état de cause, ravie si RFI pouvait récupérer ces fréquences.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je vous remercie, madame la présidente, d'avoir répondu à nos questions. Je me souviens très bien de la création de la Chaîne française d'information internationale (CF2I), ancien nom de France 24, dont on va fêter les 10 ans le 6 décembre prochain. Nous en suivons les développements COM après COM, mesurons ici tous les obstacles qu'il a fallu surmonter et souhaitons tous un excellent anniversaire à cette chaîne.

La réunion est close à 16 h 20.

Contrat d'objectifs et de moyens entre l'État et France Médias Monde (FMM) pour la période 2016-2020 - Audition de Mme Marie-Christine Saragosse, présidente de FMM

La réunion est ouverte à 15 heures.