Mes chers collègues, monsieur le ministre, je vous adresse tous mes voeux à l'aube de cette nouvelle année.
Merci, monsieur le ministre, d'avoir répondu à notre invitation, qui sera l'occasion de revenir sur le Conseil européen qui s'est tenu les 17 et 18 décembre. Les sujets à l'ordre du jour des chefs d'État et de gouvernement demeurent d'une très grande actualité. C'est pourquoi, au-delà des conclusions du Conseil européen, nous souhaitons connaître votre analyse sur l'évolution des différents dossiers dans les semaines qui viennent.
En premier lieu, la lutte contre le terrorisme occupe tous les esprits. Nous avons élaboré en avril 2015 une résolution européenne appelant l'Union à une véritable mobilisation contre ce fléau, notamment avec un PNR européen. Sous la présidence du Président Larcher, la réunion interparlementaire du 30 mars s'est conclue par une déclaration commune appelant à une mobilisation européenne. Les tragiques attentats du 13 novembre et leurs ramifications démontrent que la dimension européenne du combat contre le terrorisme djihadiste demeure essentielle. Nous en avons encore débattu en décembre avec nos collègues allemands du Bundesrat. Quelles ont été les conclusions du Conseil européen sur cette question cruciale ?
La crise migratoire est un autre défi majeur pour l'Europe. Si elle doit respecter sa tradition d'accueil des personnes persécutées et ses engagements internationaux, elle ne peut accepter de voir venir sur son sol, de façon anarchique, tous ceux qui souhaitent la rejoindre pour des motifs économiques. Schengen, grand acquis de l'Union, c'est la libre circulation mais aussi le contrôle des frontières extérieures, le renforcement de la coopération pour lutter contre les trafics en tous genres et la criminalité transfrontière. Nous avons également débattu de ces questions avec nos collègues allemands. La Commission européenne a présenté des propositions le 15 décembre. Sur quelque 50 000 kilomètres de frontières européennes extérieures, plus de 40 000 sont maritimes : un corps européen de garde-frontières et de garde-côtes doit donc être créé, création demandée de longue date par le Sénat. De même, il a été question d'instituer des documents de voyage aux fins de retour. Nos collègues Jean-Yves Leconte et André Reichardt examineront ces propositions. Quelles ont été les orientations du Conseil européen ? Quelles sont les perspectives ?
Enfin, la question sensible des relations entre le Royaume-Uni et l'Union, que notre collègue Fabienne Keller suit depuis plusieurs mois déjà. Le Conseil européen de février devrait l'examiner à nouveau. Quelles sont, à ce stade, les pistes envisageables pour répondre aux demandes de David Cameron sans remettre en cause les acquis de la construction européenne ? Alors que les nuages s'amoncellent au-dessus de l'Union, il ne faudrait pas que la Grande-Bretagne la quitte : ce serait dramatique pour elle mais aussi pour l'Union. Les 18 et 19 janvier, Fabienne Keller et moi-même serons à Londres pour rencontrer nos voisins d'Outre-manche.
Je vous adresse également mes meilleurs voeux : que cette année de tous les périls pour l'Europe permette de la renforcer.
Demain matin, les priorités européennes de la France seront présentées par le Premier ministre en Conseil des ministres.
Les travaux du Conseil européen des 17 et 18 décembre ont porté sur les grandes crises auxquelles l'Europe est confrontée - réfugiés, terrorisme - mais aussi sur plusieurs chantiers structurants pour l'avenir de l'Union : approfondissement de l'union économique et monétaire, renforcement du marché intérieur, Union de l'énergie, référendum britannique.
Concernant les réfugiés, priorité a été donnée, sous l'impulsion du Président de la République, à la mise en oeuvre concrète des décisions déjà prises, dans le cadre du Conseil Justice et affaires intérieures (JAI), concernant les hot spots, la répartition solidaire des réfugiés, le retour des migrants illégaux et le contrôle des frontières extérieures. Si l'un de ces maillons se révélait faible, le dispositif tout entier serait fragilisé et décrédibilisé. La réponse de l'Europe à cette crise doit être conforme à nos valeurs mais ferme à l'égard de ceux qui ne relèvent pas de la protection européenne.
Les hot spots dans les pays de premier accueil - Grèce et Italie - ont pour but d'enregistrer les réfugiés, d'effectuer les contrôles de sécurité, de distinguer ceux qui relèvent de la protection internationale des autres. Or, leur mise en place est trop lente : sur les six hot spots prévus en Italie, deux n'ont toujours pas d'officiers Frontex et trois sont dépourvus d'agents du Bureau européen d'appui en matière d'asile (BEAA). Sur les cinq hot spots grecs, trois seulement fonctionnent, dont deux sans agents du BEAA. Leur capacité d'accueil ne dépasse pas 1 850 réfugiés, alors que les arrivées journalières se chiffrent en milliers, notamment en Grèce, et que les naufrages se poursuivent en Méditerranée centrale, ce qui démontre que le trafic en partance de Libye n'a pas cessé.
Le bilan actuel des relocalisations n'est pas plus satisfaisant : alors qu'en deux ans, 160 000 réfugiés devaient être répartis dans toute l'Europe, ils ne sont aujourd'hui que 272 à l'être, dont 190 depuis l'Italie et 82 depuis la Grèce. Certains pays n'ont pas encore nommé d'officiers de liaison avec les pays de premier accueil et d'autres n'ont pas répondu aux sollicitations du BEAA.
La politique de retour a fait l'objet d'un plan d'action adopté par le Conseil JAI du 15 octobre. Depuis septembre, 683 personnes non admises à bénéficier du statut de réfugié en Europe ont été ramenées dans leur pays d'origine. Frontex devra avoir les moyens de financer ces retours qui ne peuvent dépendre uniquement de l'Italie ou de la Grèce.
L'aide humanitaire doit être à même de maintenir les réfugiés dans les pays frontaliers de la Syrie comme la Turquie, le Liban et la Jordanie. La France a tenu ses engagements en faveur du Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et du programme alimentaire mondial (PAM). Le rôle central de la Turquie dans la résolution de la crise migratoire a été rappelé lors d'une réunion informelle avec le chancelier autrichien, la chancelière allemande, le président de la Commission européenne, le vice-président Timmermans, le Premier ministre turc et moi-même. M. Ahmet Davutoðlu a présenté l'avancement du plan d'action négocié avec la Commission européenne : création de passeports biométriques, amélioration de l'accès au travail des Syriens, renforcement des contrôles des ressortissants de pays tiers non européens qui transitent par la Turquie pour venir en Europe. Nous avons également évoqué la coopération avec la Bulgarie et la Grèce, la lutte contre les filières de trafiquants, la coopération avec Europol. Le 7 janvier, M. Timmermans a néanmoins rappelé que le flux de migrants partant de la Turquie vers la Grèce restait trop important.
Le Conseil européen a soutenu le « paquet frontières » adopté par la Commission européenne le 15 décembre. Celui-ci inclut une révision ciblée du code frontières de Schengen, pour permettre des contrôles systématiques aux frontières extérieures, y compris de citoyens européens qui reviennent dans l'Union ; il comporte aussi une révision du mandat de Frontex, afin que cette agence puisse procéder à des opérations qui relevaient jusqu'à présent de la souveraineté des États membres, grâce à la création d'un corps de garde-frontières européens. Ainsi, l'Union pourrait intervenir rapidement à ses frontières extérieures, sans en référer à un État membre, ce qui permettrait d'éviter les situations que nous avons connues en Hongrie, puis en Grèce. En outre, grâce à ces garde-frontières européens, le gouvernement d'union nationale libyen pourra demander à l'Union européenne d'opérer dans les eaux territoriales pour lutter contre les départs de bateaux.
Hier, j'ai rencontré à La Haye le ministre des affaires étrangères néerlandais, qui va assurer la présidence du Conseil des ministres pendant ce semestre. Durant sa présidence, le « paquet frontières » devra avoir été adopté.
Le deuxième grand sujet concerne la lutte contre le terrorisme. Pour la première fois, l'article 42-7 du traité de l'Union européenne - à savoir la clause d'assistance mutuelle - a été évoqué : la France a sollicité l'appui de l'Europe, pour ses opérations militaires contre Daech en Syrie et en Irak, ainsi que pour ses opérations au Sahel ou en République centrafricaine. La réponse a été unanime et la majorité des États membres a déjà fait connaître la teneur de sa contribution militaire. Ainsi, le Bundesrat, qui doit se prononcer avant toute opération militaire, a donné son accord à une très large majorité. La construction de l'Europe de la défense est donc en marche.
En matière de lutte contre le terrorisme, la priorité est à la mise en oeuvre du plan d'action décidé lors du Conseil européen du 12 février. En décembre, tirant les premières leçons des attentats du 13 novembre, les chefs d'État et de Gouvernement ont insisté sur l'importance des échanges via les systèmes d'information Schengen et Europol. Tout agent contrôlant les entrées dans l'espace Schengen doit connaître les signalements émis par tout État de l'Union, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
L'accord intervenu sur le PNR européen, outil indispensable, constitue une étape importante : le Parlement européen doit maintenant confirmer en plénière l'engagement qu'il a pris dans le cadre du trilogue.
Trois autres sujets ont été abordés lors du Conseil. D'abord, l'approfondissement de l'union économique et monétaire, à la suite du rapport des cinq présidents. Le Conseil européen a insisté sur la gouvernance de la zone euro et la nécessaire mise en oeuvre de l'union bancaire. Après que le deuxième pilier est entré pleinement en fonction - le mécanisme de résolution unique étant opérationnel depuis le 1er janvier -, la construction du troisième pilier doit être achevée, afin de garantir les dépôts. Nous allons donc poursuivre notre débat avec l'Allemagne.
Deuxième sujet : des propositions législatives devront être présentées pour approfondir le marché intérieur, notamment le marché unique du numérique. Nous serons très vigilants sur la régulation des plateformes, les droits d'auteur et la diversité culturelle. L'union des marchés de capitaux devrait améliorer le financement des PME.
L'Union de l'énergie, troisième sujet abordé par le Conseil, concerne des dossiers précis comme celui du gazoduc Nord Stream. Le « paquet énergie-climat » et le projet de l'Union de l'énergie qui ont été confirmés par la COP 21, doivent être transcrits dans les textes législatifs pour assurer la sécurité énergétique de l'Europe tout en respectant les objectifs de transition énergétique.
Enfin, un point de l'ordre du jour du Conseil européen a été consacré au référendum britannique. David Cameron a présenté ses demandes. Avant le Conseil, il a été décidé que cette négociation serait conclue en février. Le président de la Commission européenne et le président du Conseil européen vont donc consulter l'ensemble des États membres sur les quatre points soulevés par le Gouvernement britannique. S'il faut tenir compte de ses demandes, cela ne peut se faire au détriment des acquis de l'Union. Tout ce qui peut rassurer les Britanniques et améliorer le fonctionnement de l'Union doit être retenu, mais sans bouleverser les relations entre les pays de la zone euro et les autres. Rien ne doit freiner l'intégration de la zone euro. De même, tout ce qui touche à la liberté de circulation et à la citoyenneté européenne ne saurait être remis en cause. En revanche, la Cour de justice a rendu des arrêts qui permettent de lutter contre les abus sociaux : nous devons en tenir compte.
Entre le Conseil européen de février et le référendum britannique, qui interviendra six à huit mois après, tous les dossiers risquent d'être suspendus dans l'attente du résultat, de crainte qu'une décision ne soit utilisée par les partisans du non. Ce ne serait pas acceptable. En outre, l'accord auquel nous parviendrons aura-t-il une réelle influence sur le vote des Britanniques ? Il est permis d'en douter, car depuis des lustres, des partis et des médias expliquent aux Anglais que l'Union est une abomination. À nous de convaincre ce peuple de rester avec nous alors qu'une crise de civilisation nous menace.
Le Conseil européen a également échangé sur la crise syrienne et sur la situation en Libye. Nous devons avoir une position cohérente pour que les autres grandes puissances travaillent, avec nous, à une issue politique. Dans l'affaire libyenne, tous les pays voisins et tous ceux qui comptent dans la région, comme la Turquie, les Émirats et le Qatar, doivent privilégier la formation d'un gouvernement d'union nationale. Les Libyens qui refuseraient cette voie devront être privés de soutiens internationaux.
2016 est l'année de tous les dangers pour l'Europe : soit l'Union se disloquera, car chacun cherchera des solutions nationales, soit elle se renforcera. J'ai ainsi été à Varsovie après les élections polonaises pour rappeler les valeurs de l'Union mais aussi pour dire que la Pologne doit rester au coeur de l'Union.
Face à la crise migratoire, quelles sont les relations de l'Union européenne et de l'ONU avec l'Égypte et la Libye ? Les frontières de ce pays sont en effet particulièrement poreuses.
Certains pays ne poussent-ils pas la Grande-Bretagne à sortir de l'Union ?
Comme l'a signalé le président Bizet, nous irons bientôt à Londres. Les négociations devraient se conclure lors du Conseil de février. Comme je vous l'avais demandé en décembre dans l'hémicycle, monsieur le ministre, comment notre Gouvernement entend-il négocier avec la Grande-Bretagne ? Aborderons-nous la discussion avec les Britanniques de façon bilatérale, par petits groupes ou au niveau européen ? Les Allemands ne semblent pas défavorables à une restriction de l'accès aux droits sociaux des immigrants européens en Grande-Bretagne, alors qu'une telle mesure contreviendrait aux principes de libre circulation et d'égalité des droits des citoyens européens. D'après les Allemands, un récent arrêt de la Cour de justice permettrait d'instaurer un délai de latence.
Le discours de la Chancelière est moins frontal à l'égard des Britanniques. Une décision du tribunal fédéral des affaires sociales à l'égard de ressortissants roumains a en effet retenu l'attention de certains dirigeants allemands.
Évitons un Brexit !
Le Conseil de décembre n'a pas pris de grandes décisions et a passé sous silence de graves questions. Quel partenariat voulons-nous avec la Turquie ? Sa réaction au dramatique attentat de ce matin à Istanbul démontre la volonté du gouvernement turc d'étouffer l'information.
Rien non plus sur l'Allemagne qui fait cavalier seul en ce qui concerne le Nord Stream II alors qu'il en va de l'indépendance énergétique de l'Europe.
Toujours rien sur les toutes prochaines négociations entre l'Union européenne et la Chine, qui veut voir évoluer son statut au sein de l'OMC. Face aux études alarmistes nord-américaines, la Commission européenne minimise les risques. Heureusement, les industriels européens se mobilisent face à ce Tafta (grand marché transatlantique ou Transatlantic free trade area) à la puissance dix.
Face à tous ces problèmes, la Commission européenne se montre de plus en plus autonome et gère les dossiers selon son propre rythme.
Je partage l'inquiétude de mon collègue sur la demande de la Chine d'être classée comme une économie de marché. Les effets d'une telle décision seraient extrêmement importants.
J'ai représenté Laurent Fabius, pendant la COP 21, lors d'une réunion sur la Libye qui s'est tenue à Rome sous la co-présidence des États-Unis et de l'Italie. L'Italie veut jouer un rôle premier dans ce dossier et souhaite la constitution d'un gouvernement d'union nationale. Même si le représentant spécial du secrétaire général des Nations-Unies a changé, Martin Kobler ayant pris le relais de Bernardino León, l'objectif reste le même : aboutir à un gouvernement et un parlement libyens uniques. Le Conseil présidentiel, présidé par M. Fayez al-Sarraj, doit être la préfiguration du futur gouvernement libyen. Les deux parlements devront s'engager à soutenir le gouvernement qui s'installera à Tripoli et qui reprendra en main diverses institutions, dont la banque centrale qui finance depuis des mois des milices. L'Égypte, la Tunisie, le Niger et l'Algérie soutiennent ce processus pour éviter que Daech et d'autres groupes terroristes ne s'emparent de ce pays. Bien sûr, la France souhaite que cette solution l'emporte car la situation actuelle entraîne de graves conséquences sur la sécurité, les flux migratoires et la stabilité de la région.
Des pays encouragent-ils la Grande-Bretagne à sortir de l'Union ? Je ne le crois pas. Les États-Unis n'y ont pas intérêt car ils préfèrent que la Grande-Bretagne y exerce son influence. Si ce pays sortait de l'Union, elle ne serait plus liée que par des accords commerciaux, comme la Norvège ou la Suisse : son poids politique au sein de l'Union serait réduit à néant. Tous les pays qui aiment la Grande-Bretagne lui diront donc qu'elle doit rester dans l'Union.
À la suite de la tournée de David Cameron dans les capitales européennes, il a été dit qu'un accord bilatéral avec l'Allemagne avait été conclu, mais Mme Merkel a démenti cette information : en tout état de cause, l'accord devra être conclu à 28. Nous devons aider la Grande-Bretagne à préparer son référendum, sans pour autant démanteler l'Union européenne. Les demandes britanniques portent sur divers points, dont la gouvernance économique et le lien avec la zone euro. Tout ce qui permettra une simplification du marché intérieur emportera l'adhésion des 28, mais pas à n'importe quel prix. Pour ce qui est de la souveraineté, tout ne peut être accepté. Certes, les parlements nationaux doivent pouvoir se prononcer sur la législation européenne, mais sans aller jusqu'au droit de véto.
L'immigration est le point le plus sensible : les arrêts Dano et Alimanovic de la Cour de justice ont eu un grand retentissement. L'Allemagne avait refusé d'accorder des prestations sociales à des Roumains qui étaient venus dans ce pays dans le but de les percevoir assez rapidement. Cette jurisprudence permet de lutter contre les détournements de la liberté de circulation. En revanche, on ne peut interdire pendant quatre ans l'accès à des droits liés au travail en raison de la nationalité des demandeurs. Nous verrons bien si la Grande-Bretagne modifie son système de prestations sociales ou transige sur la durée. Nous aiderons le Premier ministre à faire campagne pour le maintien de son pays dans l'Union.
Notre partenariat avec la Turquie est important et j'affirme ma solidarité avec ce pays qui a connu ce matin un terrible attentat qui visait des touristes. Notre coopération en matière de sécurité est essentielle. En outre, ce pays est un grand partenaire économique et stratégique. En revanche, il n'a pas su jusqu'à présent réguler les flux migratoires. S'ils ont ralenti, ils restent considérables, passant de près de 10 000 personnes par jour à 3 000. Mais cette décrue n'est-elle pas simplement liée à la saison hivernale ? Les passages continuent donc et l'efficacité de notre partenariat avec ce pays laisse à désirer.
Personnellement, je ne crois pas que l'Europe puisse sous-traiter le contrôle de ses frontières à un pays tiers, quel que soit le niveau de partenariat qu'elle entretient avec lui. Nous approfondissons notre partenariat avec la Turquie, dans le contexte que vous savez au Proche-Orient, en Syrie tout particulièrement ; une enveloppe de trois milliards d'euros est prévue dans les prochaines années, des aménagements peuvent être apportés en matière de visas par exemple, après un examen approfondi - mais tout cela ne signifie pas que l'Europe délègue le contrôle de ses frontières, ce sont bien les règles de Schengen qui s'appliquent avec l'ensemble de nos partenaires extérieurs à cet espace et nous ne pouvons faire comme si, parmi les populations qui fuient la guerre et les tourments de l'Histoire, il n'y avait personne qui puisse menacer notre sécurité.
Le statut d'économie de marché pour la Chine résulte de son accord d'adhésion à l'OMC signé en 2001 : cet accord prévoit qu'au terme d'une période de quinze ans, soit fin 2016, ce statut sera accordé à la Chine si elle respecte un certain nombre de règles et de procédures.
Non, la Commission européenne va évaluer, par des critères objectifs, si la Chine respecte les règles et procédures visées, en particulier sur le chapitre des aides d'État aux entreprises - la décision d'accorder le statut en résultera. Sur ce point, c'est bien la Commission européenne qui a la main et notre position est celle de la majorité des autres États membres, en particulier pour la sauvegarde de nos outils de lutte antidumping.
Le partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP), enfin, va connaître un nouveau cycle de négociation. L'Union européenne a fait des propositions et nous savons que les Américains freinent sur deux dossiers importants : les marchés publics, en particulier sub-fédéraux, sur lesquels l'État fédéral indique qu'il n'a pas la main, c'est un enjeu important parce que l'échelon des États fédérés représente la majeure partie des marchés publics ; les indications géographiques, ensuite, parmi d'autres dossiers agricoles auxquels nous sommes très attachés. Il faut continuer à négocier pour avancer, sans perdre de vue qu'un accord n'a de sens que s'il est équilibré. Car quel que soit l'intérêt de parvenir à un accord dans l'échéancier prévu, la substance l'emporte sur le calendrier ; or, comme le montre une étude qui circule, les termes actuels ne sont pas équilibrés, au détriment de l'Europe.
Merci pour ces réponses claires et précises. L'Europe doit avoir une prospective plus ambitieuse, alors qu'elle s'en est encore trop tenu à de la coordination intergouvernementale, et nous devons aller de l'avant sur des dossiers très importants, en particulier en matière économique et sociale. Car nos concitoyens savent combien les réponses aux problèmes d'aujourd'hui sont d'essence communautaire. Nous ne manquerons pas de vous alerter, monsieur le ministre, des problèmes dont nous serons saisis.
La réunion est levée à 19h10.