Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Réunion du 10 octobre 2007 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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  • mondiale
  • épargne
  • épargne des migrants

La réunion

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Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Xavier Musca, directeur général du Trésor et de la politique économique, sur le projet de loi de finances pour 2008.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Accueillant M. Xavier Musca, M. Jacques Blanc, président, a rappelé que la commission avait souhaité l'entendre pour une présentation globale du programme 110 « Aide économique et financière au développement » du projet de loi de finances pour 2008. De manière plus particulière, il a souhaité un éclairage sur la place du ministère de l'économie et des finances dans le dispositif français d'Aide publique au développement (APD), sur l'évolution du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale aujourd'hui très concurrencés par d'autres acteurs, sur le bilan qualitatif du recours aux aides budgétaires globales, ainsi que sur les perspectives du traitement de la dette des pays en développement.

Debut de section - Permalien
Xavier Musca

a tout d'abord replacé les crédits du programme 110 dans la perspective plus générale de l'aide publique française au développement. Il a souligné que l'année 2008 serait marquée par une hausse significative, de 459 à 574 millions d'euros, du volume des prêts de l'Agence française de développement (AFD), ce qui témoignait du renforcement de son rôle d'opérateur de l'aide française. Le montant des annulations de dette devrait également progresser, d' 1,3 milliard à 2 milliards d'euros en 2008, mais il constitue la principale incertitude quant au volume global de l'aide en 2008.

a ainsi rappelé qu'après avoir atteint 0,45 % du PIB en 2006, l'aide française n'avait représenté que 0,42 % en 2007 en raison du report à 2008 des opérations d'annulation de dettes concernant la Côte d'Ivoire et la République démocratique du Congo. Il a précisé que les opérations d'annulations de dette étaient comptabilisées en fonction des anticipations du FMI et de la Banque mondiale et qu'elles étaient fonction de la capacité des pays récipiendaires à franchir les différentes étapes de l'initiative Pays pauvres très endettés (PPTE).

Il a indiqué qu'avec une dotation de 988 millions d'euros, le projet de loi de finances reconduisait les moyens budgétaires du programme 110, à l'exception d'un transfert de 3 millions d'euros au profit du ministère de l'immigration.

La mobilisation, à hauteur de 100 millions d'euros, du résultat de l'AFD, permettra d'abonder les bonifications de prêts. Les aides budgétaires globales sont dotées de 41 millions d'euros. Poursuivant un objectif global de réduction de la pauvreté, ces dernières représentent une incitation forte à poursuivre des politiques rigoureuses. Il a pris l'exemple du Burkina Faso, pour lequel l'aide est scindée en une tranche fixe et une tranche additionnelle liée aux résultats des politiques sectorielles.

a souligné que les autorisations d'engagement enregistraient une forte augmentation en raison du provisionnement des prochaines reconstitutions de l'Association internationale de développement (AID) et du Fonds africain de développement (FAD), qui permettent d'apporter des financements de la Banque mondiale et de la Banque africaine de développement aux pays les plus pauvres. Une augmentation de 6,5 % de la participation française est cohérente avec les engagements pris de maintenir l'effort, en euros constants, en faveur du guichet concessionnel de la Banque mondiale.

Considérant que les débats sur l'aide au développement s'étaient longtemps focalisés sur des objectifs chiffrés, M. Xavier Musca a souhaité privilégier une réflexion plus qualitative, et notamment une amélioration de la culture du résultat et de l'efficacité de l'aide, le choix de secteurs prioritaires d'intervention comme l'environnement, les sorties de crise ou encore une concentration géographique accrue au profit de l'Afrique.

Appelant à un regard différent sur les autres acteurs du développement, en dehors des Etats et des grandes agences, il a souligné la multiplication des autres vecteurs du financement du développement. Ainsi l'argent des migrants, qui représente quelque 9 milliards d'euros, nécessite une réflexion sur le coût des transferts, qui peut atteindre jusqu'à 20 % actuellement, ainsi que sur une meilleure orientation vers des projets d'investissement. Le ministère des finances, en lien avec d'autres ministères et avec l'Agence française de développement, a pris une série d'initiatives dans ce sens tendant notamment à une meilleure connaissance des flux en provenance de France, à la création d'un site internet de comparaison des offres des différentes banques en matière de transferts, au développement de produits d'épargne spécifiques ou encore à la création d'un fonds fiduciaire pour soutenir l'effort des diasporas. La mise en place de financements innovants, comme la taxe sur les billets d'avion, a permis de financer une centrale d'achat de médicaments, Unitaid, ainsi que la première tranche de la Facilité internationale pour la vaccination (IFFIM), qui permet de lever des fonds au bénéfice de la santé. Ces deux axes illustrent la place du ministère de l'économie et des finances dans le dispositif français d'aide pour la mobilisation des marchés pour le financement du développement.

Evoquant la Banque mondiale, M. Xavier Musca a souligné que l'objectif, pour la France, de la prochaine reconstitution de l'AID était une mobilisation accrue en faveur de l'Afrique. De même, au sein du FMI, la France plaide pour le maintien des financements destinés aux pays les plus pauvres qui ne seraient pas assurés de trouver des financements alternatifs sur les marchés.

Il a enfin exprimé sa préoccupation devant la problématique du réendettement des pays bénéficiaires d'annulation de dettes. Alors que le G8 de Gleneagles, en juillet 2005, a décidé de l'annulation des dettes à l'égard des institutions multilatérales, de nouveaux prêteurs offrent des financements très importants en contrepartie d'un accès aux matières premières. Il importe que les conditions de ces financements soient conformes à celles auxquelles se soumet la communauté des bailleurs. La Banque mondiale doit être en mesure de proposer des financements attractifs et les bailleurs bilatéraux, de développer des produits nouveaux. L'AFD réfléchit ainsi à l'élaboration de prêts plus « contra-cycliques » permettant de mieux accompagner la fluctuation des recettes d'exportation.

Un débat s'est instauré à l'issue de l'exposé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

s'est interrogé sur l'inscription de 20 millions de crédits de paiement au profit de la Facilité internationale pour la vaccination (IFFIM), alors que cette facilité, financée par le produit de la taxe sur les billets d'avions, n'aurait pas dû, au moins dans un premier temps, mobiliser des moyens budgétaires. Il a par ailleurs souhaité savoir quelles étaient les anticipations possibles de l'effet-change sur l'exécution du programme et les conséquences, pour les Etats de la Zone franc, de l'appréciation de l'euro. Il a enfin considéré que la rapidité d'exécution des projets d'investissement chinois devait conduire à reconsidérer nos propres procédures.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Hue

a souhaité connaître les éléments d'appréciation des situations ivoirienne et congolaise permettant d'anticiper pour 2008 la réalisation des opérations d'annulation de dettes différées jusqu'alors. Il a estimé que l'orientation de l'épargne des migrants vers des projets d'investissement appelait un débat politique, dans la mesure où il s'agit de fonds privés.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

relevant l'importance des fonds destinés aux différentes banques multilatérales, a souligné le contraste avec la faiblesse des contributions volontaires de la France aux différents programmes de développement du système des Nations unies.

Debut de section - Permalien
Xavier Musca

a apporté les éléments de réponses suivants :

Il a rappelé que la France s'en remettait aux appréciations de la Banque mondiale et du FMI quant à la capacité des différents pays de remplir les conditions du Club de Paris pour bénéficier d'une annulation de dette. En dépit du fait que ce critère comporte une part de convention, il reflète le consensus des bailleurs aujourd'hui. Il n'y a cependant aucune certitude quant à l'évolution de la situation en Côte d'Ivoire et en République démocratique du Congo en 2008.

Pour ce qui concerne l'épargne des migrants, il s'agit de mettre en place des mécanismes incitatifs et non d'imaginer des dispositifs contraignants. Si une part importante des revenus transférés est destinée à la survie des familles, certains projets d'investissement pourraient être mieux accompagnés. Suite à la création d'un compte-épargne co-développement, en cours de mise en place, un livret d'épargne co-développement sur le modèle du plan épargne logement est en discussion au Parlement dans le cadre de la loi sur l'immigration. Ce produit serait mis en oeuvre en partenariat avec les banques locales.

L'impact de l'appréciation de l'euro sur la compétitivité de l'économie de la Zone franc est difficile à apprécier en raison de l'hétérogénéité des Etats qui la composent, producteurs d'hydrocarbures ou Etats du Sahel dépourvus de matières premières. Par rapport à ses voisins, la Zone franc a connu ces dernières années une croissance moyenne d'environ 5 %, avec une inflation moindre et une situation budgétaire plutôt plus favorable. La forte appréciation de l'euro sur la période récente ne doit pas conduire à remettre en cause l'ensemble d'un système dont la solidité et les avantages ont depuis longtemps fait leurs preuves. Par ailleurs, il revient aux Etats africains de décider d'une évolution, ce qu'aucun pays n'a semblé souhaiter jusqu'à présent. Des discussions ont lieu sur la meilleure façon de préserver la compétitivité des Etats de la Zone franc, par exemple en renforçant l'efficacité du secteur privé ou en promouvant la diversification des économies.

Devant le développement des investissements chinois, il faut effectivement être plus rapide mais surtout proposer des produits différents et plus attractifs sur les taux et les conditions de remboursement tout en mettant en garde les Etats qui n'ont pas encore bénéficié d'annulation de dettes. En tant qu'acteur important de l'économie mondiale, il importe que la Chine participe à l'ensemble des instances financières et en respecte les règles.

Le ministère des finances ne gère pas les crédits destinés au système des Nations unies qui dépendent du ministère des Affaires étrangères. L'AID est le principal bailleur de l'Afrique sub-saharienne et la France doit mettre à profit les négociations actuelles sur la prochaine reconstitution pour faire valoir ses priorités : le soutien à l'Afrique, la problématique des Etats fragiles et la promotion de l'intégration régionale.

Les reconstitutions de l'AID et du FAD sont négociées en droits de tirage spéciaux (DTS), panier de monnaies du FMI dont les fluctuations sont à mi-chemin entre l'euro et le dollar. L'effet-change sur l'exécution est difficile à quantifier à ce stade : il devra être mesuré entre le moment où la contribution française sera arrêtée et celui où elle sera versée.

La Facilité internationale pour la vaccination lèvera au total quatre milliards d'euros. Une première tranche d'un milliard a été émise par l'IFFIM. La France a engagé sa quote-part et payé, via l'AFD sur le produit de la taxe sur les billets d'avions, sa part de la première tranche. La seconde tranche et les tranches à venir seront payées sur crédits budgétaires, ce qui explique l'inscription de 20 millions d'euros à ce titre au projet de loi de finances pour 2008.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

a souhaité savoir quelle était l'articulation entre le ministère des finances et celui chargé du co-développement. Elle a souligné que la part du revenu des migrants disponible pour l'investissement était minime, et loin d'être à la hauteur des enjeux du développement. Elle s'est interrogée sur les dispositifs de mesure de la performance de l'aide.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

évoquant les modes de fonctionnement spécifiques de la Banque islamique, a souhaité que la Banque mondiale ne se désengage pas des pays les plus pauvres. Elle a souhaité savoir si les mécanismes de micro-crédits avaient fait l'objet d'évaluation.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

a souligné que les pays émergents, tels que la Chine, n'apportaient pas seulement des financements, mais encore des solutions concrètes, qui paraissaient souvent mieux adaptées aux besoins des pays en développement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

s'est interrogé sur la coordination de l'aide européenne avec celle des bailleurs bilatéraux.

Debut de section - Permalien
Xavier Musca

a apporté les réponses suivantes :

- il est positif que la Chine investisse en Afrique, mais les conditions de ses investissements doivent respecter les règles auxquelles se soumettent les autres bailleurs, relatives, notamment, à la prévention d'un nouveau surendettement. Il ne faudrait pas que les contribuables français supportent in fine, via le Club de Paris, auquel la Chine n'a pas souhaité se joindre, le coût d'un nouveau surendettement. Par ailleurs, il serait souhaitable que la Chine, qui est un nouvel acteur du développement, contribue à l'AID.

- la contribution de la France au Fonds européen de développement (FED) reste supérieure à la quote-part française au budget européen, ce qui conduit à plaider pour la réintégration du FED au sein du budget communautaire. La re-bilatéralisation de ces crédits est un choix politique ;

- l'efficacité de l'aide est un sujet difficile. Mesurée dans un premier temps à l'aune de l'efficacité des projets, elle appelle un second niveau de réflexion quant à la stratégie de développement à adopter pour un volume de crédits donné. Ce débat indispensable est complexe, car il traite des déterminants du développement ;

- la problématique des micro-crédits rejoint celle de la mobilisation de l'épargne des migrants. Les petits projets ne sont pas dépourvus d'intérêt pour la croissance économique. L'AFD a mis en place une initiative de soutien à la micro-finance ;

- s'interroger sur la place du ministère des finances dans le dispositif français d'aide revient à s'interroger sur la meilleure façon d'organiser l'aide. Les dispositifs varient considérablement en fonction des pays. En représentant la France au FMI et à la Banque mondiale, le ministère des Finances apporte une cohérence et une synergie avec les questions de développement dans les positions défendues dans ces enceintes. En outre, les problématiques économiques et financières sont de plus en plus présentes dans l'aide au développement. La fusion entre le Trésor et la direction des relations économiques extérieures a permis de mieux prendre en considération les relations entre l'aide et le commerce. A l'avenir, les mécanismes du développement devraient être moins budgétaires et de plus en plus financiers. La prise en compte de la problématique des migrations ou encore des questions environnementales atteste de la dimension interministérielle croissante des questions de développement. S'agissant des transferts des migrants, pour prendre un exemple concret, le ministère des finances peut apporter une réflexion et un soutien technique dans la négociation avec les banques.

La commission a ensuite procédé sur le rapport de M. André Trillard, en remplacement de M. Jacques Peyrat, à l'examen des amendements au projet de loi n° 205 (2005-2006) relatif à la violation des embargos et autres mesures restrictives.

Sur l'amendement n° 2, présenté par Mme Nathalie Goulet, tendant à insérer un article additionnel avant l'article 1er, afin de préciser que le Gouvernement sollicite l'autorisation du Parlement avant d'adopter une mesure d'embargo, la commission a donné un avis défavorable.

A l'article 1, elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 3, présenté par Mme Nathalie Goulet, visant à exclure du champ d'application de l'incrimination de violation des embargos les actions de formation, de conseil ou d'assistance technique à caractère humanitaire, médical, social, culturel.

Sur le bénéfice des précisions du rapporteur, Mme Nathalie Goulet a exprimé son intention de retirer ces amendements avant la discussion en séance publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Puis M. Jacques Blanc, président, a rendu compte de sa participation à la réunion des présidents des commissions des affaires étrangères des pays membres de l'Union européenne, tenue à Lisbonne les 1er et 2 octobre 2007.

Il a souligné la prise en compte répétée des propositions françaises au cours de l'intervention du président de la Commission européenne, M. José Manuel Barroso.

Evoquant la proposition française de constitution d'une Union de la Méditerranée, il a indiqué que ce projet suscitait de l'intérêt, mais que son contenu devait encore être précisé. Il est attendu avec intérêt, mais aussi avec inquiétude, certains Etats membres souhaitant préserver le processus de Barcelone, dont les acquis n'ont pas été à la hauteur des ambitions initiales, mais qui n'est pas pour autant un échec patent.

a estimé que la confiance prévalait quant à la ratification du traité simplifié et à son approbation lors du sommet informel des chefs d'Etat et de Gouvernement de Lisbonne, prévu les 18 et 19 octobre 2007.

Il a enfin souligné l'importance donnée au continent africain par la présidence portugaise qui souhaite que le sommet Union européenne-Afrique, prévu en décembre 2007, soit l'occasion d'organiser des rapports nouveaux entre l'Europe et l'Afrique.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

évoquant sa participation à la commission du Livre blanc, s'est étonné de ce que cette commission travaille sur des sujets pour lesquels les décisions semblaient déjà avoir été prises, notamment dans le domaine des relations entre la France et l'OTAN et la politique étrangère de sécurité et de défense. Admettant qu'une mission d'information pouvait difficilement mener des travaux parallèles à cette commission, il a souhaité que le Sénat puisse en débattre en séance publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

tout en considérant une mission d'information comme inopportune, a souhaité que la commission interroge le ministre, la presse faisant état d'une décision déjà prise quant à la réintégration par la France des structures intégrées de l'OTAN.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

a rappelé que dans la continuité du rapport d'information de MM. Jean François-Poncet, André Rouvière et Jean-Guy Branger, la commission avait décidé de rester saisie du dossier des relations entre la France et l'OTAN et de mener à ce titre une série d'auditions qui devraient logiquement constituer la préparation d'un débat en séance publique.