Nous nous réunissons aujourd'hui pour examiner une proposition de résolution européenne que je vous présente avec notre collègue Simon Sutour.
Cette proposition de résolution européenne s'inscrit dans le prolongement de l'audition, la semaine dernière, de Mme Sandrine Gaudin, secrétaire générale des affaires européennes. Elle avait réaffirmé devant nous les priorités défendues par le Gouvernement français en matière de dépenses, mais avait tenu un discours très prudent en matière de ressources.
Dans la perspective d'un sommet européen extraordinaire d'ici à la fin du premier trimestre afin de clarifier les positions, il nous a semblé souhaitable d'affirmer le point de vue d'ensemble du Sénat sur le contenu du prochain cadre financier pluriannuel.
La proposition de résolution européenne que nous vous présentons reprend ainsi certaines positions déjà approuvées par le Sénat, en les réactualisant le cas échéant en fonction de l'évolution des négociations. Elle prend par ailleurs position sur des points importants du cadre financier pluriannuel qui n'ont pas fait l'objet de résolutions du Sénat au cours de la période récente, comme l'instrument budgétaire de la zone euro, les ressources propres et l'équilibre d'ensemble du cadre financier pluriannuel. Elle aborde aussi l'éventuelle mise en oeuvre de conditionnalités pour bénéficier de l'accès aux fonds européens, un sujet qui a fait l'objet de débats entre nous.
Nos échanges récents avec le Premier ministre croate à Zagreb ne nous ont pas beaucoup rassurés, alors que la présidence finlandaise souhaite réduire le budget pluriannuel à 1,07 % du revenu national brut des États membres. Le Fonds européen de la défense serait ainsi amputé de 5,5 milliards d'euros et les fonds dévolus à l'Europe spatiale seraient également réduits.
Nous allons donner la position du Sénat et nous allons suivre les négociations, mais, à la fin, ce sera un bras de fer entre le Conseil et le Parlement européen. J'estime que notre rôle est de pousser, avec ce dernier, vers un budget s'élevant à 1,3 % du revenu national brut des États membres.
La Commission européenne a présenté le 2 mai 2018 ses propositions pour le cadre financier pluriannuel 2021-2027 de l'Union européenne, lançant ainsi le cycle de négociations pour le budget à long terme de l'Europe. Elle proposait notamment de conduire de nouvelles politiques permettant de répondre aux défis auxquels l'Union est confrontée : technologie, innovation, numérique, jeunesse, climat et environnement, migrations et frontières, sécurité et défense, action extérieure.
S'agissant du système des ressources propres de l'Union européenne, la Commission européenne formulait des propositions pour simplifier la ressource TVA et abaisser le taux des frais d'assiette et de perception des droits de douane prélevés par les États membres. Elle proposait en outre d'inclure un nouveau panier de ressources propres, à savoir 20 % des recettes du marché d'échanges de quotas d'émission carbone, une contribution de 3 % sur l'assiette commune consolidée de l'impôt sur les sociétés à compter de 2023, et une contribution calculée sur la quantité d'emballages plastiques non recyclés dans les États membres. La Commission européenne proposait enfin de réduire progressivement les rabais dont bénéficient cinq États membres - Allemagne, Autriche, Danemark, Pays-Bas et Suède -, en vue de les supprimer totalement en 2026.
La proposition de cadre financier pluriannuel de la Commission se traduisait par un plafond de dépenses arrêté à 1,11 % du revenu national brut des États membres en crédits d'engagement, soit 1 134 milliards d'euros en prix 2018. Le Parlement européen, qui doit approuver le cadre financier pluriannuel, a adopté plusieurs résolutions et exige, en particulier, un montant de dépenses arrêté à 1,3 % du revenu national brut en crédits d'engagement. La présidence finlandaise du Conseil a présenté, le 5 décembre 2019, une « boîte de négociation » proposant un montant de crédits d'engagement arrêté à 1,07 % du revenu national brut, soit environ 47 milliards de moins que la proposition initiale de la Commission européenne en euros constants 2018.
La secrétaire générale des affaires européennes a indiqué la semaine dernière que le centre de gravité des négociations se déplaçait vers le bas. Il se situerait, selon elle, plutôt autour de la proposition présentée par la présidence finlandaise du Conseil, voire en deçà, et en tout état de cause très en deçà de la proposition défendue par le Parlement européen, qui, du fait de sa nouvelle composition, sera amené à faire des arbitrages.
Dans ce contexte, la proposition de résolution européenne que nous vous soumettons affirme, dans un premier chapitre général, que le financement de nouvelles priorités ne doit pas se faire au détriment des politiques plus anciennes, comme la politique agricole commune (PAC) ou la politique de cohésion. Je l'ai rappelé avec force lundi dernier auprès du Premier ministre croate, mais je ne sais pas si sa présidence sera très volontariste.
La proposition de résolution approuve les efforts tendant à simplifier et à rendre plus lisible le cadre financier pluriannuel, et préconise que la notion de « valeur ajoutée européenne » soit définie de manière plus précise. Nous suivons en cela les recommandations de la Cour des comptes européenne.
Nous abordons également dans ce chapitre le sujet sensible des conditionnalités.
Dans un considérant, la proposition rappelle que l'Union européenne est fondée sur les valeurs telles que le respect de la dignité humaine, la liberté, la démocratie, l'égalité, l'État de droit, ainsi que le respect des droits de l'Homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. Elle évoque également le socle européen des droits sociaux proclamé en novembre 2017.
Nous prenons acte de la proposition de la Commission européenne relative à la protection du budget de l'Union en cas de défaillance généralisée de l'État de droit dans un État membre. Nous formulons des mises en garde quant à la manière de mettre en place une telle réforme, en évoquant la nécessité de critères objectifs et d'une méthode d'appréciation transparente, et en affirmant qu'elle ne doit pas pénaliser les bénéficiaires ou destinataires finals des États membres visés. C'est un point difficile à mettre en oeuvre, mais il est pareillement évoqué dans la résolution du Parlement européen et dans les conclusions de la commission des affaires européennes de l'Assemblée nationale.
Nous invitons enfin à élargir la réflexion aux modalités de prise en compte de politiques non coopératives, notamment sur le plan social.
Notre proposition de résolution réaffirme ensuite les positions du Sénat en matière de politique agricole commune en saluant l'effort réalisé par la présidence finlandaise du Conseil pour relever de 10 milliards d'euros les crédits proposés par la Commission européenne pour le second pilier de la PAC, tout en regrettant que le premier pilier n'ait fait l'objet d'aucune réévaluation. Elle appelle à conforter la réserve pluriannuelle proposée par la Commission, le filet de sécurité offert par la PAC étant apparu insuffisant pour permettre aux agriculteurs de faire face à la volatilité des prix agricoles et aux différents aléas auxquels ils sont confrontés. Elle réaffirme notre opposition à une renationalisation rampante et à une dilution progressive de la PAC, qui résulterait notamment de la méthode utilisée par la Commission européenne, qui nous apparaît fondée sur une conception abusive et détournée du principe de subsidiarité. Elle rappelle enfin qu'aucune réforme de la PAC ne serait satisfaisante sans la préservation d'un budget stable en euros constants sur la période 2021-2027 par rapport aux années 2014-2020.
Ces différents éléments figuraient très largement dans la dernière résolution du Sénat sur la PAC adoptée en mai 2019 et dans le texte issu de la conférence de consensus organisée fin 2019 avec nos collègues députés et députés européens.
La proposition de résolution réaffirme également les positions adoptées par le Sénat en faveur de la politique de cohésion, dont elle souligne le rôle stratégique. Elle demande que cette politique de cohésion concerne toutes les régions de l'Union européenne et dispose d'une enveloppe d'un montant suffisant pour faire face aux inégalités territoriales et sous-régionales.
Elle souligne les enjeux liés à la correcte articulation entre la politique de cohésion, le fonds InvestEU, mais aussi le futur fonds pour une transition juste, qui ne doit pas conduire à amputer les fonds de cohésion. C'est évidemment un point important que la secrétaire générale des affaires européennes avait souligné la semaine dernière. La Commission européenne vient d'indiquer que le fonds pour la transition juste serait doté de 7,5 milliards d'euros « nouveaux », mais l'équation budgétaire globale reste inchangée et il convient donc d'être prudent.
La proposition de résolution salue également l'ambition du pacte vert pour l'Europe présenté en décembre dernier par la Commission européenne. Elle souligne toutefois l'ampleur des enjeux en termes de financement et d'accompagnement de certains territoires et filières économiques. Elle appelle également à la mise en oeuvre efficace et rapide d'un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, qui permettra d'assurer une équité dans les relations commerciales internationales. Il faut concilier lutte contre les dérèglements climatiques, développement durable, développement économique et inclusion sociale.
Nous avons également souhaité apporter un soutien clair aux outre-mer. Nous appelons ainsi à une prise en compte, adaptée à la hauteur de leurs spécificités et enjeux propres, des régions ultrapériphériques et des pays et territoires d'outre-mer dans la mise en oeuvre et le financement des politiques européennes.
La lutte contre le dérèglement climatique nous concerne tous - peut-être pourrions-nous le rappeler dans la proposition.
Nous faisons une place aux positions adoptées par le Sénat à la suite des conclusions de la commission d'enquête sur Schengen : Mme Valérie Hayer, députée européenne, rapporteur sur les ressources propres en demandant que la gestion des migrations et la gestion des frontières extérieures de l'Union européenne demeurent des priorités ; et en confirmant la position du Sénat pour un mécanisme d'incitation au bénéfice des États tiers coopératifs sur le retour de leurs ressortissants.
Concernant le Fonds européen de la défense et le programme spatial européen, nous regrettons les coupes proposées par la présidence finlandaise du Conseil et appelons à revenir aux propositions initiales de la Commission européenne.
Les montants figurant dans la proposition de résolution sont exprimés en prix 2018, comme c'est le cas dans la boîte de négociation de la présidence finlandaise du Conseil, et non en euros courants.
La proposition de résolution souligne ensuite les enjeux liés à la recherche et à la stimulation des investissements pour que l'Union reste en pointe dans la compétition mondiale.
Nous réitérons notre soutien aux programmes Horizon Europe et InvestEU. Le texte souligne toutefois que le regroupement de quatorze instruments financiers au sein du programme InvestEU ne doit pas entraîner de baisse globale des financements destinés à soutenir l'investissement.
S'agissant de la zone euro, la proposition salue la mise en place d'un instrument budgétaire de convergence et de compétitivité, mais demande une réévaluation à la hausse des propositions de la présidence finlandaise du Conseil, qui abaissent d'environ 14 % le volume des crédits que la Commission européenne proposait de dédier à cet instrument.
Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2020, notre collègue Patrice Joly, rapporteur spécial des crédits de la participation de la France au budget de l'Union européenne, avait souligné la faiblesse du montant envisagé pour l'instrument budgétaire de convergence et de compétitivité. Il avait également relevé l'écart entre cet instrument et les ambitions initiales de la déclaration franco-allemande de Meseberg.
Le texte observe par ailleurs qu'il n'existe pas de consensus sur la fonction de stabilisation macroéconomique.
Nous pourrions inclure une mention spécifique sur la nécessité d'investir dans le domaine de l'intelligence artificielle, dans le prolongement de la proposition de résolution européenne que nous avons adoptée en mars 2019. La compétition s'accélère entre la Chine et l'Union européenne, mais les échelles ne sont pas les mêmes : l'Union va consacrer 20 milliards d'euros à l'intelligence artificielle dans les sept années du cadre financier pluriannuel, soit le montant que les États-Unis et la Chine y consacrent annuellement...
Concernant le montant global du cadre financier pluriannuel 2021-2027, nous constatons qu'il sera très difficile de satisfaire l'ensemble des positions exprimées par le Sénat sans atteindre, au minimum, un montant de crédits d'engagement correspondant à 1,1 % du revenu national brut des États membres, tel que le propose la Commission européenne. Nous n'avons pas souhaité « passer au tamis » les priorités exprimées par le Sénat pour les faire entrer dans une enveloppe plus basse.
Nous appelons à approfondir les réflexions pour constituer un panier satisfaisant de nouvelles ressources propres. Sans cela, il sera difficile d'élaborer un budget européen ambitieux et équilibré. Nous relevons que le rendement de la nouvelle contribution envisagée sur les quantités d'emballages plastiques non recyclés dans les États membres a vocation à se réduire, compte tenu des ambitions affichées par l'Union européenne en matière d'économie circulaire et des efforts déployés par les États membres.
Conformément à la position adoptée par le Sénat sur le cadre financier pluriannuel 2014-2020, le texte soutient la proposition de la Commission européenne visant à abaisser le taux des frais d'assiette et de recouvrement des droits de douane prélevés par les États membres.
À l'occasion du retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, nous appelons à remettre en cause, dès le début du nouveau cadre financier pluriannuel, les rabais et systèmes de correction, dont la France est le premier financeur.
Enfin, nous souhaitons assurer une transition correcte entre l'actuel cadre financier pluriannuel et le prochain. Compte tenu du calendrier serré de négociation du cadre financier pluriannuel, nous demandons donc d'étudier les mesures nécessaires pour proroger l'actuel cadre financier, en appliquant l'article 312 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui dispose que « lorsque le règlement du Conseil fixant un nouveau cadre financier n'a pas été adopté à l'échéance du cadre financier précédent, les plafonds et autres dispositions correspondant à la dernière année de celui-ci sont prorogés jusqu'à l'adoption de cet acte ». Nous rejoignons ici la position exprimée par le Parlement européen dans sa dernière résolution. Plutôt que suivre la Commission, nous devrions appuyer le Parlement européen, qui, représentant directement les peuples, est, par nature, plus ambitieux que les États.
C'est un message de soutien qu'on adresserait au Parlement européen, en espérant que nos collègues députés européens prennent mieux en compte, par réciprocité, les Parlements nationaux...
Le cadre pluriannuel va obliger à raboter le Fonds européen de la défense et les crédits européens dédiés au spatial, alors que les pays en pointe dans ces domaines ont espéré une forme sinon de relais, du moins de dynamique à l'échelon du continent. Cela fait peser un risque sur les objectifs que nous nous sommes fixés, en particulier sur le spatial et sur notre autonomie : tout ce que ne va pas faire l'Union européenne, nous devrons le faire avec vos propres moyens, en particulier au sein de l'Agence spatiale européenne (ESA). Ces restrictions interviennent alors que la simple augmentation du budget spatial américain correspond au budget européen de l'ESA, c'est dire les proportions... Nous serons vigilants sur les perspectives budgétaires.
Le cadre financier pluriannuel a été créé dans les années 1980 avec les « paquets Delors » pour donner de la perspective, pour consolider des dynamiques européennes, mais il devient un carcan lorsqu'il conduit à figer les évolutions, en expliquant que, pour les sept années à venir, on ne pourra pas consacrer davantage de ressources aux politiques européennes, quels que soient les projets et quand bien même notre croissance est plus faible que celle de nos concurrents. Au regard du différentiel de croissance économique, ce n'est pas 1 % mais 2,5 ou 3 % du PIB qui devraient être consacrés aux politiques européennes. Ensuite, si tous les pays membres demandent un retour positif, c'est-à-dire à recevoir de l'Union plus qu'ils ne contribuent, on perd l'essence du projet européen, le collectif. Un des pays les plus contributeurs quitte l'Union européenne, ce qui manifeste le risque d'une perte de sens de la dynamique européenne. Notre malthusianisme européen est néfaste, même si l'on peut comprendre que, pour la France, passer de 21 milliards d'euros à 26 milliards d'euros de contribution à l'Union européenne ne va pas aller de soi. D'où l'importance du sujet des rabais sur le rabais !
Sur le point 56, concernant le fonds pour une transition juste, nous devons répéter que la PAC ne doit pas être affaiblie pour abonder la politique de cohésion.
Sur le point 76, j'aimerais citer, dans le panier des nouvelles ressources, les recettes du marché d'échange des quotas d'émission carbone et les ressources du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières : ce sera plus clair, quitte à être redondant.
Au paragraphe 31, je propose de nous en tenir à citer le droit des personnes, plutôt que risquer une référence au communautarisme à travers le droit des minorités.
Au paragraphe 60, je crois qu'il faut être très clair sur la défense du budget de l'agence Frontex : elle doit avoir les moyens de ses missions.
Enfin, je souhaiterais que, en conclusion, nous écrivions clairement que les parlements nationaux, qui disposent dans chaque État membre de la compétence budgétaire, doivent être des acteurs essentiels de la prochaine conférence sur l'avenir de l'Europe, pour trouver une issue à cette procédure d'élaboration des budgets européens, qui montre aujourd'hui ses limites. Les parlements nationaux pourraient permettre d'aller plus loin.
Je remercie les rapporteurs pour la clarté de leurs propositions, auxquelles j'adhère. Quel pourcentage du budget les ressources propres vont-elles représenter ?
Notre initiative ne pourrait-elle pas être relayée par d'autres parlements nationaux afin de gagner en poids ?
L'approche budgétaire actuelle suscite ma colère froide ! C'est un malthusianisme pingre, rabougri, mortifère, suicidaire pour notre continent ! Je m'interroge : qui les instigateurs des propositions budgétaires servent-ils ? L'Europe ou les États-Unis ? Ou la Chine ? Soyons lucides : quand on réduit les crédits de la recherche, de la politique spatiale ou de l'intelligence artificielle, on marche sur la tête !
Les politiques de cohésion et la PAC n'ont pas pour objet de maintenir des privilèges ou des avantages acquis. Il s'agit de soutenir des secteurs stratégiques pour lesquels la solidarité et la péréquation doivent jouer. Nous devons les défendre absolument.
Nos concitoyens sont sensibles aux enjeux environnementaux. Et l'Europe peut peser dans la stratégie mondiale de lutte contre le réchauffement climatique.
En matière de lutte contre l'immigration, ayons l'audace de mettre en place un plan de soutien massif aux pays d'origine.
Je suis également favorable aux plans de développement au bénéfice des pays d'origine, mais nous devons aussi contrôler l'usage des fonds.
Je suis très inquiète des évolutions qui se profilent pour la PAC : comment feront nos agriculteurs demain ? Une évocation de la concurrence déloyale ne pourrait-elle pas être ajoutée au paragraphe 46 ? La nouvelle PAC risque de favoriser le développement d'une concurrence déloyale au sein même de l'Europe, alors que nous devrions être soudés et solidaires pour être plus forts à l'extérieur. Nous avons bien vu comment, avec Südzucker en Allemagne, la filière betteravière a été perdue, notamment autour d'Eppeville et de Cagny.
Je tiens à remercier nos rapporteurs. N'oublions pas que les régions ultrapériphériques et les pays et territoires d'outre-mer (PTOM) n'ont pas le même statut juridique : les premières font partie intégrante de l'Union, contrairement aux seconds, qui dépendent d'un pays appartenant à l'Union. Avec le Brexit, qu'adviendra-t-il des treize pays qui dépendaient du Royaume-Uni et étaient éligibles à des financements européens ? Il faudrait plus de différenciation dans l'octroi des fonds. Je me rendrai demain à Bruxelles, avec notre collègue Michel Magras, président de la Délégation sénatoriale aux outre-mer, afin d'étudier l'octroi des crédits aux régions ultrapériphériques. Soyons vigilants !
Notre commission a formulé la nécessité de créer un Fonds européen de la défense. Or, la Finlande propose de réduire ses crédits de moitié ! C'est un véritable coup d'arrêt ; tout un vecteur d'innovation et de développement qui est tué dans l'oeuf. Comment pourrions-nous renforcer notre propos pour dépasser les simples regrets ?
Je tiens moi aussi à saluer le travail de nos rapporteurs, qui ont réalisé à la fois une synthèse des positions de notre commission et un compromis largement partagé dans notre commission. Cela nous donnera du poids face à l'exécutif.
Je regrette la faible ambition de la Commission européenne, de la présidence finlandaise et des États membres. Je regrette que la France, qui avait annoncé au début des négociations qu'elle pourrait accroître sa contribution budgétaire, soit revenue sur cet engagement et accompagne le défaitisme général ambiant. L'exécutif français ne fait pas le travail pour porter une ambition plus forte. Il y a un décalage entre les discours et les actes.
Je regrette aussi la faiblesse des ressources propres. Nous avions fait des propositions, très proches de celles de l'ancien Parlement européen. Il y a des avancées, mais elles sont extrêmement faibles. Nous aurions pu aller plus loin, notamment par la mise en oeuvre d'une taxe sur les transactions financières ou d'une taxe carbone aux frontières.
Je regrette aussi le manque de clarté et d'ambition en matière de politique migratoire, alors que nous avons une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes !
Je regrette enfin que, parmi les objectifs de l'Union européenne, ne figure pas une politique intégrée de la zone euro, avec, notamment, un Parlement de la zone euro.
Notre proposition de résolution va dans le bon sens et a le mérite de soutenir la position du Parlement européen, qui ne doit pas être négligée dans les négociations. À cet égard, il serait intéressant que nous rencontrions des députés européens français.
La force de nos résolutions est affaiblie par nos difficultés à tenir nos propres engagements budgétaires européens : cela nuance grandement l'impact de nos démarches et je le regrette. N'oublions pas notre propre travail d'amélioration de l'exécution de nos budgets.
S'agissant des moyens supplémentaires que nous souhaitons au niveau européen, peut-être pourrions-nous changer de méthode et nous inspirer du travail des commissions locales d'évaluation des charges transférées (CLECT) au niveau intercommunal ? Il s'agirait d'examiner ce que les États dépensent sur telle ou telle politique et d'envisager le partage des compétences et des financements au niveau européen si cela s'avérait plus efficace. Nous raisonnerions alors à niveau de dépenses constant, et non plus dans une logique toujours plus inflationniste.
Le mauvais sort réservé au Fonds européen de la défense et à la politique spatiale prouve que l'Union européenne pense que nous vivons toujours dans un monde de Bisounours, qu'elle se satisfait de n'être qu'un marché commun ouvert à tous les vents et qu'un nain politique protégé par les États-Unis. Je crains que, à terme, son manque d'ambition dans des domaines aussi stratégiques n'entraîne sa dislocation. Si chaque pays est obligé de mettre en oeuvre sa propre politique de défense et sa propre politique spatiale, trois ou quatre pays finiront par s'entendre entre eux, en dehors de l'Union européenne.
Nous allons intégrer toutes vos propositions, à l'exception de celle de Jean-Yves Leconte au paragraphe 31, ce considérant reprenant in extenso l'article 2 du traité sur l'Union européenne.
Peut-être pourrions-nous reprendre la proposition de Didier Marie et prévoir une formule de soutien plus explicite aux propositions du Parlement européen. Les questions budgétaires semblent simples, mais les conséquences sont dramatiques. Dans un monde concurrentiel, il nous faut un budget ambitieux. Nous ne devons pas renoncer à nous battre dès maintenant. Il nous faut nous appuyer sur le Parlement européen. On ne peut pas se contenter de dire à Mme Gaudin que ce qu'elle nous apprend est bien triste ni de constater que le budget sera inférieur à ce que proposait la présidence finlandaise, sinon nous ne servons à rien.
Je suis d'accord avec Simon Sutour s'agissant de la proposition de Jean-Yves Leconte. Nous en restons à formulation consacrée.
Nous prenons en compte les autres propositions dont je vous remercie notamment, sur le budget de Frontex et le rôle des parlements nationaux.
En réponse aux remarques de Jean-François Rapin et René Danesi, j'indique que les questions ayant trait à l'intelligence artificielle ou à la politique spatiale ne peuvent être traitées qu'au niveau communautaire. Si nous voulons des politiques ambitieuses dans ces domaines, il faut une plus grande participation des États.
Je propose que nous complétions les points 56 et 76 comme cela a été évoqué.
Je précise à Benoît Huré que les ressources propres représentent 16 % du total des recettes de l'Union européenne. À cet égard, je dois dire que les conclusions tirées du rapport Monti ont laissé un goût assez amer, alors que ce rapport s'annonçait prometteur.
Nous pourrons naturellement envoyer un avis politique à la Commission européenne et informer le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et la présidente de la commission des affaires économiques. J'ai averti hier Christian Cambon du risque budgétaire encouru par le Fonds européen de la défense.
Le président Cambon a déclaré ce matin en commission qu'il ferait part ce soir à la ministre de sa stupéfaction et de son mécontentement, lors de la cérémonie des voeux. Il a en outre confié la mission de dénoncer la situation aux émissaires de la commission des affaires étrangères à la future conférence dans le même format que celle d'Helsinki.
Je propose qu'on « déplore vivement » les propositions de la présidence finlandaise, au moment où les politiques financées par le fonds européen de la défense étaient en plein essor et où on est en train de perdre notre principal partenaire militaire, le Royaume-Uni.
Nous pourrons également envoyer cette proposition de résolution au Parlement européen. J'ai eu un entretien téléphonique assez long avec Mme Valérie Hayer, députée européenne, rapporteur sur les ressources propres. Nous aurons en outre l'occasion tout début avril de rencontrer les parlementaires européens à Strasbourg.
Benoît Huré et Pascale Gruny ont soulevé la question des pays pourvoyeurs de migrants. Il a été convenu à La Valette une coopération entre ces pays et l'Union européenne, assortie d'une aide financière mais le défi n'est pas durablement résolu.
Pascale Gruny a souhaité que l'on souligne au point 46 qu'il existe un risque de concurrence déloyale interne à l'Union européenne : j'y souscris.
En réponse à la remarque de Didier Marie, il est vrai que l'on peut se désoler de la frilosité financière de la France, mais les sommes finissent par être importantes. J'ai le sentiment, à la suite de ma rencontre à Zagreb avec les différents présidents des commissions des affaires européennes, que les cinq pays concernés par les rabais sur le rabais, notamment l'Allemagne, ne sont pas prêts de céder ! Je suis donc plutôt inquiet. Sans doute faudrait-il s'appuyer sur les nombreux États membres qui ne bénéficient d'aucun rabais ?
La réponse à la question de Philippe Bonnecarrère pourrait résider dans les coopérations renforcées ou le recours à une coopération structurée permanente, comme en matière de défense. J'ai toujours regretté que nous n'utilisions pas plus souvent les coopérations renforcées. Il faut au moins neuf États pour y parvenir, mais ces politiques permettent souplesse et réactivité.
Les coopérations renforcées sont extrêmement lourdes. Leur mise en oeuvre doit recevoir l'aval de tous les États membres, y compris de ceux qui ne souhaitent pas y participer. Les projets importants d'intérêt européen commun (PIIEC), à l'instar de ce qui se fait pour les batteries de l'avenir, sont plus intéressants, car ils permettent d'associer trois ou quatre pays.
Je reviens sur la question des rabais. Dès lors que le Royaume-Uni se retire, il n'y a plus de rabais. Ne pourrait-on pas démontrer dans la négociation initiale que la disparition de ce rabais entraîne celle des autres en résultant ?
La réunion est close à 14 h 50.