La commission a procédé à l'audition de M. Philippe Delleur, directeur de l'agence centrale des achats au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, de MM. Eric Lucas, secrétaire général adjoint pour l'administration du ministère de la défense, et Bernard Foissier, directeur général de l'économat des armées, sur la réforme des achats.
a précisé que la présente réunion débutait un cycle d'auditions visant, d'une part, à suivre les résultats des audits de modernisation mis en place par M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, et, d'autre part, à dresser un bilan des premières étapes de la réforme de l'Etat. Il a indiqué que la commission souhaitait se concentrer sur les aspects les plus concrets de la modernisation en cours, et qu'elle s'était, en conséquence, intéressée à la modernisation des achats de l'administration, engagée depuis plusieurs mois, sous l'égide de M. Alain Lambert, alors ministre délégué au budget, et dont des économies substantielles pouvaient être attendues.
a rappelé que l'achat public était une fonction difficile, enserrée dans des contraintes juridiques fortes amenant parfois les acheteurs à se concentrer sur le respect formel des règles plus que sur l'efficacité économique de l'achat. Il a observé que les budgets consacrés aux achats étaient considérables, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie y consacrant, en 2004, 1,9 milliard d'euros sur 14,9 milliards d'euros de budget de fonctionnement.
Il s'est demandé si la création de l'agence centrale des achats du ministère des finances, recommandée par un audit réalisé en 2003-2004, avait permis de réaliser les économies annoncées et pouvait constituer un exemple à suivre pour les autres ministères. Il a indiqué que cet audit avait évalué les économies potentielles à environ 185 millions d'euros en trois ans, sous réserve d'une réforme profonde de l'organisation des achats du ministère.
a précisé que la réforme visait à réaliser des économies en jouant sur l'effet de masse des commandes et en créant un pilotage centralisé des politiques d'achats afin de normaliser les consommations. Il a ajouté que la professionnalisation de la fonction achats devait permettre de mieux identifier les besoins, de standardiser les produits, de réduire le nombre de références, et de globaliser les commandes, en recourant notamment à l'Union des groupements d'achats publics (UGAP). Il a toutefois estimé que la modernisation des procédures d'achat de l'Etat devait prendre en compte le tissu économique national, et veiller à ce que la commande publique ait un effet d'entraînement pour les petites et moyennes entreprises (PME).
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Philippe Delleur a rappelé que la réforme de la fonction achats du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie avait été lancée dès 2002, sous l'impulsion de M. Alain Lambert, alors ministre délégué au budget. Il a indiqué que des comparaisons internationales, notamment avec les systèmes italien et britannique, avaient permis d'orienter les réflexions relatives à la modernisation des achats, menées par l'inspection générale des finances.
Il a ajouté qu'une expertise extérieure de la fonction achats avait ensuite été demandée à un cabinet d'audit privé. Il a observé que chaque direction du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie effectuait alors elle-même ses achats de fournitures et de prestations de service, pour un total de dépenses d'1,9 milliard d'euros, dont près de 500 millions d'euros de matériels informatique et télécom, 462 millions d'euros d'immobilier, 383 millions d'euros de prestations générales et 230 millions d'euros de fournitures générales.
a précisé que l'audit avait montré de fortes disparités de prix d'achat entre les directions du ministère pour les mêmes produits, ce qui pouvait s'expliquer à la fois par la différence de taille des directions et leurs volumes respectifs d'achats. Il a considéré que des économies pouvaient être réalisées afin d'amener le rendement global du ministère à un niveau au moins égal à celui de la direction la plus performante pour chaque référence. De même, il a estimé que les différences de consommation d'un même produit par agent et par direction devaient être normalisées.
Il a noté que le coût de traitement des commandes était élevé au regard du taux important de commandes à faible prix. Le coût unitaire moyen de traitement d'une commande, en temps de travail d'un fonctionnaire, était de 100 euros, alors que la moitié des commandes du ministère avait une valeur inférieure ou égale à 100 euros. Il a rappelé qu'avant l'entrée en vigueur de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), les coûts complets incluant les dépenses de personnel n'étaient pas pris en compte.
a estimé que la réforme visait à mettre en oeuvre trois leviers : un effet de globalisation des commandes, la maîtrise des consommations et la simplification des procédures. Il a souligné que la distinction entre deux grandes fonctions, l'achat et l'analyse de l'offre d'une part, l'approvisionnement, d'autre part, devait permettre de dégager d'importantes économies.
Il a précisé que l'agence centrale des achats avait été créée par l'arrêté du 26 novembre 2004, sous la forme d'un service à compétence nationale (SCN), rattaché au secrétaire général du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, ce qui le plaçait dans une position adéquate par rapport aux directions du ministère. Il a ajouté qu'il était, en effet, indispensable d'assurer l'indépendance de l'agence centrale à l'égard des directions centrales, à qui elle fournissait de nouvelles prestations. Il a observé que le SCN constituait une formule souple, entre l'administration centrale et les services déconcentrés, employant une vingtaine de personnes sur l'ensemble du territoire.
a rappelé que l'agence centrale des achats s'était vu fixé un objectif d'économie de 150 millions d'euros sur trois ans, qui semblait à la fois important et réaliste. Il a indiqué qu'une démarche pragmatique de conduite de la réforme avait incité, d'une part, à associer au sein d'un comité de pilotage toutes les directions du ministère, et, d'autre part, à définir un périmètre d'action large, afin que l'effet de levier puisse être aussi efficient que possible. Il a noté que les deux tiers des achats du ministère de l'économie et des finances avaient ainsi été globalisés.
Il a rappelé qu'un important travail d'harmonisation des logiciels avait été nécessaire, en amont, pour permettre la mise en oeuvre de la réforme. Il a observé que la globalisation des achats pouvait se faire à l'échelon régional et non national, notamment pour le nettoyage des 7.000 sites du ministère. Il a ajouté que, dans la région Nord-Pas-de-Calais, un lot de marché public avait été réservé, par clause spéciale, aux ateliers favorisant l'emploi des personnes handicapées. Il a noté que la globalisation des achats n'empêchait pas l'accès des petites et moyennes entreprises (PME) à la commande publique et devait donc favoriser le développement durable.
a indiqué que les nouvelles technologies et la dématérialisation des procédures avait permis de simplifier l'achat public. Il a relevé que l'agence centrale des achats ne gérait aucun crédit directement, afin de ne pas déresponsabiliser les gestionnaires des services acheteurs du ministère. Il a précisé que l'agence centrale mettait à la disposition de ces services des marchés de fournitures immédiatement utilisables, grâce à une plateforme de commande en ligne, les « acheteurs » n'ayant plus à rechercher eux-mêmes des fournisseurs. Il a annoncé que les livraisons étaient effectuées en 72 heures.
Il a noté, en revanche, que le système de paiement restait encore relativement complexe, mais que l'adoption de la carte d'achat devrait permettre de le rationaliser. Il a expliqué que le paiement était effectué par une banque, qui centralisait les factures, payait les fournisseurs sur présentation des factures et était remboursée par l'administration une fois par mois.
a indiqué qu'un rapport d'activité permettait d'évaluer les actions menées en 2005. Il a cité en exemple le marché d'achat d'ordinateurs. Il a précisé que la forme juridique retenue était un marché public en multiattribution permettant de remettre trois fournisseurs en concurrence tous les 6 mois : l'économie réalisée sur deux années était évaluée à 40 % du prix total.
Il a relevé que la fourniture des consommables informatiques était assurée par l'UGAP, sous la tutelle de l'agence centrale des achats, afin de bénéficier d'un important effet de levier, l'UGAP fournissant l'ensemble des acheteurs publics.
a noté que la structure et le nombre des acheteurs publics faisaient de la France une exception en Europe, la moitié des annonces publiées au Journal officiel des communautés européennes étant françaises. Il a estimé que, dans cette perspective, l'UGAP constituait un instrument de gestion essentiel, notamment pour les petits acheteurs publics qu'étaient les collectivités territoriales. Il a observé que l'UGAP permettait, notamment, d'éviter les phases de rupture des marchés, permettait de mutualiser les coûts, sans risque de création d'un monopole et avec une compétitivité satisfaisante.
a demandé quelle était la performance de l'agence centrale des achats : il a, notamment, souhaité savoir si celle-ci avait tenu l'objectif qui lui avait été fixé pour 2005 de réaliser 50 millions d'euros d'économie.
a indiqué que les économies réalisées en 2005 s'élevaient à 48 millions d'euros. Il a ajouté que les prochains objectifs seraient sans doute plus difficiles à atteindre en 2006 et 2007, les réformes les plus faciles à réaliser ayant été menées en priorité.
a remercié M. Philippe Delleur pour la qualité de son exposé.
Abordant ensuite la réforme de la fonction achats du ministère de la défense, il a précisé que l'économat des armées était un établissement public industriel et commercial, dont le « chiffre d'affaires » s'élevait à 250 millions d'euros. Il a rappelé que l'économat, héritier des coopératives d'achat nées durant la première guerre mondiale, avait été créé par une loi du 22 juillet 1959 afin de garantir la fourniture de denrées alimentaires et produits divers aux militaires et à leur famille, implantés en dehors de la métropole. Il a noté qu'il était également chargé d'une mission générale d'approvisionnement des forces en opérations extérieures (OPEX). Il a précisé que l'approvisionnement en vivres des armées était assuré par plusieurs organismes, selon des modalités différentes d'une armée à l'autre, les achats de vivres et de certains services et matériels étant effectués par les services des commissariats des différentes armées.
a observé que la réforme, lancée en 2003, avait transformé l'économat des armées en une centrale d'achats ayant la capacité d'approvisionner l'ensemble des forces armées. Il a indiqué que la gestion unifiée des marchés de vivres par l'économat devait conduire à une économie de l'ordre de 12 millions d'euros par an, soit 4 à 5 % du budget total consacré à l'achat des marchandises.
a rappelé que la réforme de l'économat des armées s'inscrivait dans une politique plus large de globalisation des achats du ministère de la défense, par pôles d'achats. Il a observé que le commissariat général des armées mettait en oeuvre la globalisation des marchés de transport. Il a également évoqué le développement de « l'interarméisation », qui avait conduit au regroupement des services d'infrastructure des armées au sein d'un service unique géré par le secrétariat général pour l'administration.
Il a indiqué que le ministère de la défense développait la dématérialisation des marchés, favorisait le paiement par carte pour les services gestionnaires de crédits, et mettait en oeuvre d'importants projets d'externalisation impliquant une plus grande responsabilité des fournisseurs, notamment financière.
S'agissant de l'économat des armées, M. Eric Lucas a expliqué que la réforme devait viser l'accroissement de la rentabilité de la fonction achats, tout en garantissant la stabilité de l'approvisionnement des armées, en tous lieux et à tous moments.
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Bernard Foissier a déclaré que la réforme de la fonction « approvisionnement en vivres » des armées était l'aboutissement d'une réflexion engagée en juillet 1999, par le cabinet du ministre de la défense, dans le cadre plus général de l'adaptation du dispositif de soutien des forces, rendue nécessaire par la professionnalisation des armées.
Il a souligné que le choix avait été d'utiliser, en le faisant évoluer, le cadre juridique offert par l'économat, en lui confiant la charge des « approvisionnements en vivres » jusqu'alors assurée par chaque armée pour son propre compte. Il a ajouté qu'avant cette réforme, l'économat de l'armée intervenait en complément des services de soutien pour le ravitaillement en vivres et marchandises diverses des forces à l'étranger, notamment en Allemagne, en Afrique et sur les théâtres d'opérations extérieures, mais que le territoire national, à l'exception notoire des collectivités territoriales d'outre-mer, lui était interdit.
a précisé que la réforme poursuivait trois objectifs :
- améliorer l'efficacité économique et rationaliser le dispositif d'approvisionnement des forces par le recours à un opérateur unique, l'économat, afin de bénéficier d'un effet de levier sur des achats plus massifs, et de réaliser ainsi des économies sur les prix, sur les structures et sur le fonctionnement ;
- doter le ministère d'un pôle de compétence dans le domaine de l'achat public pour la fourniture de biens et de services, en France comme à l'étranger ;
- préserver la capacité d'action de soutien de l'établissement public en faveur des forces en opérations extérieures.
a observé que la transformation du statut de l'établissement public avait fait l'objet d'une disposition spécifique de la loi de finances rectificative pour 2002. Il a indiqué que le principe de spécialité de l'économat des armées, relatif au soutien des forces, avait été réaffirmé, que le périmètre géographique d'intervention de l'établissement avait été élargi au territoire national et que son champ d'activité fonctionnelle incluait, désormais, la prestation de services.
Il a relevé que le décret du 11 mars 2004 portant organisation et fonctionnement de l'économat des armées avait redéfini les règles de l'établissement public et lui avait conféré la qualité de centrale d'achat public au sens des articles 9 et 32 du code des marchés publics.
a noté que cette réforme avait conduit à distinguer trois grands domaines d'activité : le soutien des forces à l'étranger, et plus particulièrement, en opérations extérieures, le développement de la prestation de services, dans le cadre de la démarche d'externalisation entreprise par le ministère de la défense et la mise en oeuvre du soutien des forces sur le territoire national.
Il a souligné que, pour assurer ses nouvelles missions, l'économat des armées avait dû se réorganiser, revoir ses procédures et son mode de fonctionnement afin de réformer l'approvisionnement en vivres des armées dans un délai de 18 mois, tout en assurant le soutien des forces sur les théâtres extérieurs, mission soumise à une obligation de résultat immédiatement évaluée sur le terrain.
a indiqué qu'une équipe de projet, mise en place au début de l'année 2003, avait été chargée du pilotage de cette réforme. Il a souligné qu'elle avait bénéficié d'une assistance à maîtrise d'ouvrage pour la préparation et la mise en oeuvre des marchés logistique et informatique, éléments pivots de la modernisation de l'économat.
Il a considéré que la création d'une direction des achats, initialement chargée des marchés en métropole, dont la compétence s'étendait désormais à l'ensemble des achats réalisés par l'économat, garantissait la régularité des contrats d'achat de vivres, malgré les aléas inhérents à l'achat public.
a ajouté qu'un guide interne des procédures, destiné aux acheteurs, avait été élaboré et qu'un observatoire des marchés avait été créé, pour permettre l'exercice éclairé du pouvoir adjudicateur du directeur général de l'économat. Il a également précisé qu'une commission d'appels d'offres avait été mise en place, alors que cette procédure ne s'imposait pas pour un établissement public à caractère industriel et commercial.
Il a précisé que, pour ouvrir au maximum la concurrence, l'économat des armées complétait l'obligation qui lui était faite de publicité européenne par une publication nationale au bulletin officiel des annonces des marchés publics et dans des journaux spécialisés.
a déclaré que quelques personnels hautement qualifiés avaient été recrutés afin de mener à bien la réforme engagée, mais que l'établissement s'était efforcé de redéployer le personnel en place sur des postes correspondant aux besoins nouveaux.
Il a noté que la qualification juridique de centrale d'achat, au sens de l'article 9 du code des marchés publics, permettait aux forces militaires de s'adresser à l'économat pour les achats de vivres, de fournitures diverses et de services, sans publicité ni mise en concurrence, dès lors que l'établissement public appliquait lui-même, pour la totalité de ses achats, soit le code des marchés publics soit l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics. Il a précisé que l'établissement avait retenu l'ordonnance du 6 juin 2005 et le décret du 30 décembre 2005 comme textes de référence, et identifiait deux grandes typologies d'achats : les achats effectués en France pour une utilisation en France ou à l'étranger, pour lesquels les dispositions de l'ordonnance précitée du 6 juin 2005 s'appliquaient, et les achats effectués à l'étranger pour un usage à l'étranger, n'entrant pas dans le périmètre de l'ordonnance, mais soumis à un contrôle rigoureux.
a déclaré que l'économat avait ainsi passé six appels d'offres pour l'achat des vivres et avait mis en oeuvre, début 2004, une consultation sous forme de dialogue compétitif pour le marché logistique. Il a signalé, qu'à ce jour, ces marchés n'avaient donné lieu à aucune action contentieuse. Enfin, il a ajouté que l'économat participait aux travaux « Achat public » conduits au sein du ministère de la défense par le contrôle général des armées.
a ensuite présenté la fonction de soutien des forces à l'étranger, constituant l'axe historique d'intervention de l'économat renforcé depuis 1995. Il a indiqué que l'accomplissement de cette fonction illustrait la capacité de l'établissement public à s'adapter aux conditions d'engagement des forces et à prendre en charge des missions non programmables.
Il a précisé que l'économat était engagé sur l'ensemble des théâtres d'opérations et des pays où étaient déployées des forces françaises, les Balkans, l'Afghanistan, la Côte d'Ivoire, le Tchad, ou encore Haïti et le Congo, et que son action portait sur l'approvisionnement en vivres, la fourniture d'articles de première nécessité ou de consommation courante, la fourniture de services téléphoniques et Internet privés, ou encore la gestion d'organismes de détente et de loisirs. Il a observé que, depuis 2002, sur mandat de l'armée de terre, l'économat était chargé de la restauration des forces armées au Kosovo, soit 2,3 millions de repas en 2005.
Pour remplir ces missions, M. Bernard Foissier a déclaré que l'établissement mettait en oeuvre une logistique souple adaptée aux conditions géographiques, aux contraintes des forces et aux conditions opérationnelles, les vecteurs utilisés associant les transports maritime, routier et aérien, qu'il s'agisse de moyens militaires ou affrétés par les armées, ou armés directement par l'économat.
a indiqué que le développement de la prestation de services s'inscrivait dans le cadre de la politique d'externalisation de certaines fonctions, engagée par le ministère de la défense et visant à recentrer les armées sur des tâches relevant de leur coeur de métier. Il a précisé que cette activité, encadrée par des conventions passées avec les états-majors, s'exerçait principalement au profit de forces en opérations extérieures et concernait, plus particulièrement, les domaines de la restauration, des acheminements, de la gestion de « bases vie » et des services à la personne. Il a ajouté que l'économat intervenait, soit en qualité de maître d'oeuvre, c'est-à-dire qu'il assumait la responsabilité de coordonner au profit des armées l'action de plusieurs intervenants tels que des entreprises privées ou des groupements solidaires, soit comme prestataire de premier niveau, dans le domaine de la restauration par exemple.
Il a indiqué que le ministre de la défense avait désigné l'économat pour assurer l'organisation du soutien non régalien de la réunion informelle des ministres de la défense de l'OTAN, à Nice, en février 2005, et que les états-majors l'avait sollicité pour des exercices majeurs nationaux ou internationaux.
a également annoncé, qu'à partir de l'été 2006, l'économat des armées serait chargé de la gestion du camp multinational de Warehouse à Kaboul, et, qu'en 2007, il assurerait, en liaison avec l'état-major des armées, une expérimentation d'externalisation globale de la fonction de soutien aux forces dans les Balkans et au Tchad, dans le cadre du projet CAPESFRANCE, acronyme signifiant « capacité additionnelle par l'externalisation du soutien des forces françaises ».
Concernant la prise en charge du ravitaillement des forces sur le territoire national, M. Bernard Foissier a précisé que cette nouvelle mission faisait de l'économat un acteur important de la modernisation de la chaîne de soutien des armées. Il a indiqué que cette réforme, lancée en 1999, avait abouti en 2002, après un audit complet des systèmes d'approvisionnement des armées. Il a précisé qu'il s'agissait d'une part, de créer une centrale d'achats unique, l'économat des armées se substituant à la vingtaine de personnes responsables des marchés publics (PRM) en charge de la passation des marchés de denrées, et, d'autre part, de supprimer le compte spécial des subsistances militaires (CSSM) et le service central d'approvisionnement des ordinaires de la marine.
Il a souligné que le périmètre de mise en oeuvre de la réforme incluait les formations des trois armées, les hôpitaux militaires et trois écoles de la gendarmerie, soit 337 points de livraison, représentant annuellement 48 millions de repas et 55.000 tonnes de marchandises.
a ensuite précisé qu'avant la modernisation de cette fonction, les marchés passés par les différentes armées reposaient sur un prix de produit livré, incluant de manière globale un « coût denrée », un « coût logistique » et la marge du fournisseur. Il a noté que le nouveau modèle, retenu sur les recommandations d'un cabinet d'audit privé, se caractérisait par une dissociation des « marchés vivres », passés à prix dit « départ fournisseur » et d'un marché logistique spécifique, confiant la distribution de ces vivres à un prestataire privé, ce qui permettait de mesurer le coût respectif de chacune des composantes de la prestation et de rechercher des améliorations ciblées.
Il a ajouté que la réforme de l'économat des armées avait été organisée autour de quatre chantiers majeurs conduits de manière synchronisée, sur une période de 18 mois. Le premier chantier concernait les « marchés vivres » dont le montant financier, en année pleine, devrait osciller entre 100 et 130 millions d'euros ; le deuxième chantier, relatif au marché logistique, avait permis d'élaborer, avec les professionnels, une consultation au terme de laquelle un groupement d'intérêt économique constitué par les sociétés STEF-TFE et GEODIS, avait été choisi pour mener à bien un contrat de 81 millions d'euros sur 6 ans.
Il a souligné que le prestataire logistique était chargé de la gestion des commandes des unités, de leur allotissement, de leur livraison et, ce qui était nouveau, de la facturation des vivres au nom de l'économat, devenant ainsi le point de passage obligé entre les formations et les fournisseurs par l'intermédiaire d'un portail informatique, partie visible d'un système d'information qui constituait le troisième grand chantier de l'économat.
a indiqué que le système d'information reliait les formations militaires au prestataire logistique par un portail informatique, qui permettait le traitement dématérialisé des commandes, et constituait l'outil de gestion central de l'économat. Il a ajouté que la société UNILOG avait été retenue pour ce contrat, après un appel d'offres restreint.
Enfin, il a présenté le quatrième et dernier chantier de l'économat des armées, consistant à accompagner le changement par une stratégie d'information et de formation, qui avait concerné toute la chaîne de commandement et tous les services du ministère de la défense.
a observé que le déploiement du dispositif avait débuté le 21 novembre 2005 et se terminerait fin mars 2006. Il a rappelé que deux grandes phases s'étaient succédé : d'une part, une phase de rodage autour de Rennes et de Brest, pour 24 unités clientes, étendue début décembre à tout le grand ouest, puis mi-décembre aux 34 formations autour de la plate-forme sud de Salon de Provence, et, d'autre part, une phase de déploiement opérationnel progressif en métropole, effectué plate-forme par plate-forme, durant douze semaines entre janvier et fin mars 2006. Il a constaté, qu'à la date du 20 mars 2006, 96 % de l'approvisionnement du territoire national était assuré par l'économat des armées.
En conclusion, M. Bernard Foissier a indiqué que l'économat des armées était aujourd'hui engagé dans une transformation profonde, qui s'inscrivait dans un contexte plus large de réforme de la fonction achat du ministère de la défense.
Il a rappelé que l'économat des armées était un partenaire apprécié des forces auxquelles il offrait des garanties de sécurité juridiques, de souplesse, de réactivité et de continuité dans la chaîne logistique, ainsi que des solutions d'externalisation pertinentes.
Un large débat s'est alors ouvert.
a remercié les intervenants pour la qualité et l'extrême précision de leurs exposés. Il s'est félicité de la rapidité de mise en oeuvre des réformes. Il a souhaité savoir si l'économat des armées pouvait préciser les caractéristiques de ses fournisseurs, et s'est notamment inquiété du risque d'éviction des PME des marchés globalisés au niveau national par l'économat. Il s'est, en effet, déclaré favorable, à titre personnel, à ce qu'une part significative de ces marchés publics puisse leur être réservée, selon des modalités restant à définir.
a indiqué que 85 fournisseurs avaient été retenus à l'issue des appels d'offre et que 64 % des denrées acquises étaient originaires de France. Il a précisé que la dissociation des marchés permettait à l'économat des armées de conclure des marchés d'approvisionnement avec des PME compétitives dans leur secteur.
a souhaité savoir si les forces militaires devaient désormais procéder à l'achat de vivres par le biais exclusif de l'économat des armées.
a précisé que le décret définissant les attributions de l'économat des armées n'en faisait pas l'intermédiaire exclusif et obligatoire des forces armées, mais il a indiqué que les états-majors des armées avaient passé des conventions en ce sens, espérant redéployer les personnels, ainsi dégagés des fonctions achats.
a souligné que ce type de redéploiement de personnels ne se traduisait pas toujours par des économies nettes en termes de dépenses de personnel.
a précisé que les conventions établies entre l'économat des armées et les états-majors définissaient des seuils d'achat minimum et maximum de denrées, et que si les minima n'étaient pas respectés, des pénalités financières étaient prévues.
a indiqué que les seuils minima s'élevaient à 45 millions d'euros de commande annuelle de vivres, et 50.000 tonnes de transport et de logistique.
a rappelé que le ministre de la défense était intervenu pour que les états-majors des armées incitent leurs unités à recourir aux services de l'économat des armées, à l'exception de nécessaires « respirations » permettant de gérer avec souplesse la fourniture de produits frais.
a noté que certaines tensions semblaient exister et que les forces militaires paraissaient souhaiter quelques adaptations.
a estimé que les résistances aux changements pouvaient être considérées comme normales. Il a indiqué que la réforme avait permis de rationaliser les rapports entre les fournisseurs et les unités militaires.
a ajouté que les gains macroéconomiques étaient supérieurs aux tensions rencontrées.
a souhaité savoir si l'économat des armées disposait d'outils lui permettant de mesurer l'efficacité de son action. Il s'est demandé quel était le pourcentage des achats du ministère de la défense réalisés par l'économat des armées.
a indiqué que l'économat des armées réalisait 65 % des achats de vivres de l'armée à ce jour, l'objectif étant d'atteindre 95 %. Il a estimé qu'une économie réelle existait sur les prestations logistiques, et que la globalisation des marchés d'achat de vivres permettait de faire jouer un effet de levier favorable. Il a rappelé que la suppression du CSSM avait conduit à réduire les effectifs du ministère de la défense de 100 personnes.
a observé que les lois de finances initiales pour les années 2005 et 2006 avaient prévu une réduction d'effectif de 300 personnes corrélative à la réforme de l'économat des armées, auquel s'ajoutait la suppression des personnels du CSSM et du service central d'approvisionnement des ordinaires de la marine.
a précisé qu'une évaluation des performances de l'économat des armées aurait lieu à la fin de l'année 2006.
a souhaité obtenir des précisions sur les statuts et les modalités de recrutement et de formation des personnels de l'économat des armées.
a indiqué, qu'à l'exception de quelques militaires en détachement, le personnel de l'établissement public à caractère industriel et commercial était constitué d'agents de droit privé. Il a souligné que le recrutement s'était effectué sur la base de compétences spécifiques en droit, en achat, en logistique, en gestion des systèmes d'information et en contrôle de gestion. Il a rappelé que l'économat des armées avait ainsi recruté 25 personnes.
a estimé que la réforme de l'économat des armées mettait en cause de vieilles traditions, propres à chacune des armées. Il a souhaité savoir si la globalisation des fonctions d'achat et d'approvisionnement rencontrait des problèmes techniques qui ne seraient pas encore maîtrisés. Il a considéré que, de façon générale, une réforme était d'autant mieux acceptée que les protagonistes y étaient associés et qu'ils pouvaient en retirer un bénéfice aussi immédiat et concret que possible. Il s'est demandé si tel avait été le cas pour la réforme en cause.
a indiqué que des problèmes techniques avaient été résolus, notamment en termes de capacité de stockage de certains entrepôts. Il a déclaré que la marine avait conservé des centres de stockages spécifiques à Brest et à Toulon afin d'assurer un conditionnement particulier des vivres, nécessaire aux missions en mer, qu'elle ne souhaitait pas déléguer à un prestataire privé.
Il a observé que la mise en place du nouveau système d'information avait rencontré des limites inhérentes à la difficulté d'accéder à l'Internet à haut débit dans certaines parties du territoire français. Il a précisé que des adaptations pratiques avaient été trouvées pour chaque cas.
a rappelé qu'un effort particulier avait été fait pour former tous les utilisateurs du nouveau portail informatique. Il a indiqué que la qualité des prestations fournies par l'économat des armées, notamment en termes de traçabilité des denrées, permettait de favoriser l'acceptation de la réforme.
a souhaité savoir si l'économat des armées envisageait d'étendre la réforme à d'autres domaines que les vivres, tels que la fourniture des uniformes.
a précisé qu'un appel d'offres avait été lancé pour permettre la location de véhicules non militaires par le ministère de la défense.
a souhaité savoir s'il s'agissait d'un « financement innovant » faisant intervenir un groupement bancaire. Il s'est demandé comment cette externalisation était inscrite au budget de l'Etat.
a indiqué que les crédits figuraient au titre 3 du budget du ministère de la défense, comme une dépense de subvention de fonctionnement.
a rappelé que les Britanniques procédaient à de nombreuses externalisations de leurs dépenses militaires avec un certain succès.
s'est demandé s'il s'agissait de réelles économies. Il a estimé que la substitution de dépenses de fonctionnement à des dépenses d'investissement n'était pas neutre pour le budget de l'Etat.
a observé que les dépenses correspondant à l'externalisation de la gamme des véhicules civils du ministère de la défense restaient effectivement inscrites au budget de l'Etat.
a souhaité savoir si les règles de financement de la fonction achats au sein des unités militaires avaient été modifiées ou si des fonctions d'« acheteur » étaient maintenues.
a indiqué que les dispositions régissant les modalités d'achat et de gestion des denrées alimentaires n'avaient pas été modifiées à ce jour, et devraient faire l'objet d'une adaptation législative. Il a ajouté que la question de l'harmonisation des soldes était à l'étude dans ce cadre, estimant que les disparités entre les armées, en termes d'indemnité d'alimentation ou de fourniture des uniformes, avaient vocation à disparaître.
a souhaité savoir quel était l'effectif de la centrale de gestion des achats du ministère des finances et de l'économie.
a indiqué que son service comptait 18 personnes.
s'est demandé si un indicateur permettait de mesurer le coût relatif des dépenses de la centrale de gestion par rapport au prix d'un achat.
a rappelé que le seul indicateur existant actuellement consistait à réaliser 150 millions d'euros d'économie dans les trois prochaines années. Il a ajouté que la construction d'un indicateur de performance interne à la centrale de gestion faisait l'objet d'une réflexion, afin qu'il soit possible de mesurer si les économies apparentes n'étaient pas liées à une évolution conjoncturelle des marchés.
a souhaité savoir si le gouvernement était attentif aux incidences de la modernisation de la fonction achats pour les PME. Il a observé que la commande publique américaine bénéficiait pour 25 % aux PME et a souhaité qu'un pareil dispositif puisse être étendu à la France, le tout selon des modalités restant à définir.
a estimé qu'il n'y avait pas de contradiction entre la rationalisation des achats publics et l'accès des PME à la commande publique. Il a remarqué que les acheteurs publics n'avaient aucun intérêt à ne négocier qu'avec des entreprises en situation de monopole ou d'oligopole. Ils devaient, en conséquence, veiller à segmenter leur demande pour pouvoir traiter avec des PME. Il a considéré que, dans cette perspective, la globalisation des achats de tous les ministères ne semblait pas souhaitable.
Il a indiqué que le soutien des PME par des structures telles que Oséo-ANVAR (Agence nationale pour la valorisation de la recherche) lui semblait plus efficace que l'édiction de normes contraignantes leur réservant une part de la commande publique.
s'est demandé si la centrale de gestion des achats du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie était attentive aux phénomènes « d'outsourcing ». Il a souhaité savoir si les acheteurs publics avaient les moyens de vérifier si les entreprises qui remportaient les marchés publics ne sous-traitaient pas leur production à des entreprises délocalisées.
a indiqué que les acheteurs publics veillaient à écarter les offres d'entreprises sous-traitant leur production dans des pays à bas coût de main-d'oeuvre. Il a rappelé que des spécifications environnementales ou sociales pouvaient être incluses dans les cahiers des charges des marchés publics. Il a notamment cité le cas du marché de fourniture de papier, qui prévoyait une clause de gestion durable des forêts exploitées.
a rappelé que l'achat à bas prix pouvait avoir des répercussions macroéconomiques dommageables pour le tissu économique national et européen. Il a souligné que la recherche de l'efficience de la commande publique devait s'accompagner d'une grande vigilance sur l'origine des sources d'approvisionnement. Il a enfin remercié l'ensemble des intervenants pour la qualité de l'échange qui s'était ainsi noué et témoignait de la volonté de la commission de suivre, au plus près « du terrain », les efforts actuellement engagés afin de contribuer à la nécessaire modernisation de l'Etat.