La commission a procédé, conjointement avec la commission des lois, à l'audition de M. Philippe Bas, président du groupe de travail du Conseil d'Etat, sur la révision des lois de bioéthique.
a rappelé les contributions déjà apportées en 1988 et 1999 par le Conseil d'Etat, à la demande du Premier ministre, à la réflexion du législateur sur les questions de bioéthique, poursuivie depuis la loi du 20 décembre 1988 sur les essais thérapeutiques et marquée par les trois lois fondatrices de 1994 relatives, respectivement, au traitement des données nominatives ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé, au respect du corps humain, au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain, à l'assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal.
Le législateur avait prévu que les lois de bioéthique feraient l'objet d'un réexamen périodique, qui a été effectué une première fois par la loi du 8 août 2004, et il lui appartient, cinq ans plus tard, de se prononcer à nouveau sur ces questions.
Outre celle du Conseil d'Etat, de nombreuses contributions ont déjà été versées au prochain débat sur la révision des lois de bioéthique : celle de l'agence de la biomédecine, celle des Etats généraux de la bioéthique et celles du Parlement, parmi lesquelles le récent rapport de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) sur « la loi bioéthique de demain », les rapports d'information publiés par la commission des affaires sociales et la commission des lois du Sénat, ou encore les études du service de législation comparée sur les questions de bioéthique.
Enfin, depuis 2004, plusieurs textes législatifs ont répondu à des questions de nature bioéthique ou enrichi les réflexions sur le sujet.
La révision des lois de bioéthique sera pour le législateur l'occasion de se pencher une nouvelle fois sur l'état des recherches, notamment biomédicales ; le diagnostic prénatal ou pré-implantatoire ; les conditions de l'assistance médicale à la procréation ; l'examen et l'utilisation des caractéristiques génétiques des individus ; le don, le prélèvement et l'utilisation du corps humain ; l'accompagnement de la fin de vie.
Indiquant que la commission des affaires sociales prépare déjà activement la révision des lois de bioéthique, notamment grâce à l'implication de Mme Marie-Thérèse Hermange dans les travaux des Etats généraux de la bioéthique, M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales, a fait part, à titre liminaire, de deux réflexions. En premier lieu, tout ce qui est moral et éthique n'est pas bioéthique et il faut se défier des effets de mode intellectuelle tendant à inclure dans la bioéthique, et tout spécialement dans la loi de bioéthique, des sujets plus vastes et plus vagues qui la priveraient de son sens : la bioéthique traite de la personne humaine en tant qu'elle est incarnée et permet de déterminer ce que l'on peut accepter, et à quelles conditions, comme interventions sur le corps humain, sujets suffisamment importants pour devoir être clairement identifiés et traités par le législateur. En second lieu, il est important que le débat sur la bioéthique s'organise à tous les niveaux de la société, mais il ne faut pas que la révision périodique des lois de bioéthique donne le sentiment que la loi, et surtout les principes qu'elle définit, seraient en quelque sorte à la remorque des avancées de la science. La loi pose des principes, au premier rang desquels figurent l'indisponibilité du corps humain et la nécessité du consentement éclairé. Ces principes sont consubstantiels à notre vision de l'homme et n'ont pas à évoluer pour s'adapter à un quelconque « progrès » scientifique ou social. Les principes vieillissent moins vite qu'on ne veut bien le dire et il est de la responsabilité du législateur de déterminer un socle sur lequel fonder la bioéthique, puis de le maintenir. M. Nicolas About, président, a conclu son propos en souhaitant avoir le sentiment de M. Philipe Bas sur le périmètre de la bioéthique et sur les principes qui doivent la fonder.
a souligné à titre liminaire le caractère relativement imprécis de la notion de bioéthique et noté qu'il faudrait plutôt parler de l'éthique biomédicale, de l'éthique de l'usage des progrès scientifiques qui peuvent concerner la vie humaine.
Saisi par le Gouvernement d'une mission d'évaluation de la mise en oeuvre de la loi de 2004, le Conseil d'Etat a constitué -comme il l'avait déjà fait en 1988 et en 1999- un groupe de travail d'une vingtaine de personnes, dans lequel les membres du Conseil d'Etat étaient minoritaires, réunissant des personnalités ayant une expertise dans tous les domaines sur lesquels portait la saisine, mais n'ayant pas pris de positions publiques sur ces sujets : l'idée était en effet de favoriser une réflexion commune de personnes très ouvertes sur toutes les questions qu'il convenait de soulever.
Le groupe de travail a très vite constaté que peu de questions nouvelles se sont posées depuis 2004 car, en 1994 et en 2004, le législateur a déjà débattu de l'ensemble des sujets et leur a apporté des réponses.
Il a poursuivi ses travaux pendant près d'un an, procédé à soixante auditions et élaboré un rapport qui a été amendé puis approuvé par l'assemblée générale du Conseil d'Etat.
Ce rapport ne constitue qu'une contribution parmi d'autres à la réflexion du législateur, avec celles du comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé, de l'académie de médecine, du conseil de l'agence française de biomédecine, et le groupe de travail lui-même a pris en compte les travaux du Sénat évoqués par le président Jean-Jacques Hyest.
Les membres du groupe de travail ont partagé la conviction exprimée par le président Nicolas About que les principes dégagés par le législateur en 1994 et 2004 ne sont pas des principes contingents, subordonnés à l'état des connaissances ou des moeurs, mais des principes faits pour durer.
C'est pourquoi le rapport préconise que le législateur veuille bien considérer que l'on est entré, en quelque sorte, dans un « régime de croisière », que les lois doivent s'affirmer comme permanentes et non plus temporaires, et qu'il n'est plus nécessaire, par conséquent, de remettre tous les cinq ans l'ouvrage sur le métier. Il est important, en effet, que le législateur dise qu'il ne faut pas revenir sur des principes qui sont des principes fondamentaux et non contingents.
a également évoqué les enseignements tirés par le groupe de travail des analyses de droit comparé auxquelles il a procédé : la France est le seul grand pays qui se soit doté d'une législation d'ensemble fondée sur l'affirmation de principes. L'idée de s'inspirer des exemples étrangers sur telle ou telle question comporterait le risque d'un alignement sur le « moins-disant éthique ».
Il faut certes prendre en compte les expériences des autres pays mais ce n'est pas parce qu'une chose est autorisée dans un pays voisin qu'il faut l'autoriser en France.
Cela ne veut pas dire que la coopération européenne et internationale n'est pas nécessaire. Mais il faut placer la barre très haut car, s'il existe de profondes divergences avec d'autres pays, y compris parmi ceux qui partagent les valeurs françaises, ce n'est pas une raison pour renoncer aux principes affirmés par la législation, qui ont une valeur universelle, et ne pas maintenir les règles qui en découlent.
Exposant l'approche du groupe de travail, M. Philippe Bas a rappelé les principes sur lesquels peut se fonder la loi de bioéthique.
Il faut d'abord prendre en compte le respect de la liberté, au sens de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, c'est-à-dire un droit naturel, qui existe en dehors de toute reconnaissance, qui est « imprescriptible, inaliénable, inviolable et sacré ». Le législateur ne peut intervenir que pour poser des limites à des libertés privées, lorsque leur usage est susceptible de nuire à autrui, lorsqu'il doit prendre en compte les principes d'organisation collective de la société ou lorsqu'il peut porter atteinte à d'autres droits relatifs à l'organisation collective de la société, à la dignité humaine, au respect de la vie.
Ainsi, une personne qui veut bénéficier des possibilités de la procréation médicale assistée (PMA) exerce en quelque sorte un « droit de tirage » sur la collectivité, qui concerne le système médical, l'hôpital et la sécurité sociale.
Le droit à la liberté doit aussi respecter la dignité de la personne humaine, qui a valeur constitutionnelle, mais dont tous n'ont pas la même définition, même si tous s'accordent sur sa prééminence.
Il doit de même être concilié avec le principe du respect de la personne humaine dès le commencement de la vie, reconnu par la loi sur l'interruption volontaire de grossesse, et le principe de non-patrimonialité du corps humain, qui ne peut être vendu, loué, ni prêté.
Le législateur doit donc intervenir quand il y a lieu de définir un équilibre entre le respect de la liberté et celui d'autres droits ou principes et quand il faut empêcher que l'exercice de la liberté porte atteinte aux droits du plus faible.
En recherchant, sur chaque sujet, les principes à appliquer et les solutions qui doivent en résulter, le groupe de travail du Conseil d'Etat a constaté que la loi est plutôt bien faite et répond aux principales questions que l'on peut se poser. Le législateur a affirmé des principes et défini les règles qui en découlent.
A la demande de M. Jean-Jacques Hyest, président, M. Philippe Bas a ensuite exposé les grandes lignes des préconisations du groupe de travail sur les différents thèmes étudiés.
En ce qui concerne, en premier lieu, la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires, il faut rappeler que la loi de 2004 permet, pour cinq ans, de faire exception au principe d'interdiction des recherches sur l'embryon humain, sur autorisation délivrée après avis du conseil de l'agence de la biomédecine.
Les autorisations ont été données dans des conditions très strictes : il était interdit de concevoir des embryons pour la recherche, celle-ci ne pouvant être menée que sur des embryons surnuméraires ; il fallait que la recherche ne puisse être entreprise sur d'autres cellules ; cette recherche devait enfin être susceptible d'avoir un intérêt thérapeutique majeur.
Depuis 2004, deux constatations ont pu être faites : d'une part, 90 % des projets de recherche ont été autorisés ; d'autre part, à l'étranger -au Japon, au Royaume-Uni, aux Etats-Unis-, beaucoup d'équipes de recherche ont renoncé à utiliser des cellules embryonnaires, d'autres types de cellules souches pouvant être utilisés, en particulier dans le cadre des recherches portant sur les thérapies cellulaires.
Pour autant, la recherche sur les cellules embryonnaires peut demeurer utile dans certains domaines, et en particulier permettre de faire progresser la procréation médicale assistée. Le groupe de travail a donc estimé nécessaire qu'elle reste possible. Il a opté pour une solution qui lui a paru honnête et claire en recommandant qu'aucune recherche ne puisse être menée sans avoir été autorisée et qu'aucune autorisation ne puisse être donnée à un projet ne répondant pas à des conditions strictes.
Certes, cette solution consiste à se demander si la règle de l'interdiction ne devient pas l'exception lorsque 90 % des projets de recherche sont autorisés. Mais il peut être soutenu que ce taux d'autorisation tient à un filtrage important en amont des projets faisant l'objet d'une demande d'autorisation.
Par ailleurs, les embryons pouvant être utilisés pour la recherche sont des embryons « surnuméraires » qui ne sont pas destinés à être conservés et à déboucher sur la vie, sauf dans le cas très exceptionnel d'application de la procédure de transfert d'embryon.
Toutes ces raisons militent donc en faveur de la possibilité d'autoriser les projets de recherche sur des cellules embryonnaires, s'ils peuvent conduire à des progrès importants pour la santé humaine.
Le groupe de travail a abordé deux autres questions relatives au domaine de la recherche :
en ce qui concerne les techniques de PMA, il a estimé impossible d'élaborer de nouvelles techniques d'assistance médicale à la procréation si elles exigent des recherches nécessitant la création et le transfert d'un embryon : comme l'avait dit Jean-François Mattei devant l'Assemblée nationale, on ne peut pas « faire des essais d'enfant ». En revanche, peuvent être envisagés une évaluation et un encadrement des techniques existantes, notamment l'injection intra-cytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI), et le renforcement du suivi des enfants nés grâce à ces techniques ;
en ce qui concerne la recherche dans les pays en voie de développement, le groupe de travail a relevé que les instances éthiques chargées de l'évaluation des projets de recherche thérapeutique ne disposent pas toujours de l'indépendance nécessaire pour assurer cette évaluation. Il serait donc souhaitable qu'un mécanisme supplémentaire permette l'examen éthique des protocoles de recherche menés dans des pays étrangers par des personnes de droit français.
Le groupe de travail s'est également préoccupé des questions liées à l'aide à la procréation et aux sujets connexes.
Il a reconnu la légitimité du diagnostic préimplantatoire, qui permet aux couples déjà parents d'un enfant porteur d'une maladie génétique de recourir à l'assistance médicale à la procréation (AMP) pour sélectionner, en vue de son implantation pour une nouvelle grossesse, un embryon non porteur du gène de la maladie. Il s'est toutefois déclaré opposé à son utilisation pour opérer un criblage qui consisterait, en outre, à sélectionner les embryons sur la base d'autres critères : en aucun cas l'AMP ne devrait être utilisée pour répondre au fantasme de l'enfant parfait.
En outre, M. Philippe Bas a estimé que la technique du « bébé médicament », qui vise à favoriser la naissance d'un enfant dont on pourrait utiliser les cellules souches du cordon ombilical pour soigner un aîné malade, exige un examen circonspect. Cette possibilité, ouverte en 2004, a d'ailleurs été très peu utilisée et son intérêt thérapeutique n'est pas avéré. Le groupe de travail, attaché au principe de la conception d'un enfant avant tout pour lui-même, a donc proposé de maintenir l'autorisation de recourir à cette technique mais de prévoir, par exception, le réexamen de cette disposition dans cinq ans.
Sur la question de l'information de la parentèle en cas de détection d'une maladie génétique, M. Philippe Bas a estimé que l'information indirecte, sous l'égide de l'agence de la biomédecine, n'avait pu fonctionner parce qu'elle était sans doute trop complexe. Pour cette raison, le groupe de travail a proposé une autre procédure reposant sur un meilleur accompagnement du patient par l'équipe médicale, celle-ci se chargeant de faire parvenir aux membres de la famille une lettre leur indiquant qu'une information de nature génétique est susceptible de leur être fournie, sans qu'il soit fait référence à la personne diagnostiquée.
Le groupe de travail propose aussi de modifier les règles applicables en matière de tests génétiques pratiqués post mortem, pour prévoir qu'ils peuvent être autorisés par le juge, sauf opposition du défunt exprimée de son vivant. Il serait ainsi tenu compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme consacrant le droit de chacun à accéder à ses origines.
Ce faisant, la législation en vigueur en matière d'AMP repose sur des principes raisonnables et le groupe de travail, qui a entendu les demandes tendant à ce que l'accès à l'AMP soit ouvert aux femmes célibataires ou à autoriser l'insémination ou le transfert d'embryon post mortem, n'a pas appelé à modifier en ce sens la loi dans la mesure où, même s'il arrive que les hasards de la vie fassent qu'un enfant naisse sans père, il n'est pas souhaitable que la loi permette d'infliger une telle souffrance à un enfant.
Sur la question de l'anonymat du don de gamètes, le groupe de travail, soucieux d'éviter, autant que possible, de créer des désordres juridiques dans la filiation, mais désireux aussi de prendre suffisamment en compte, à la fois, l'exigence européenne tendant à reconnaître à chacun le droit d'accéder à ses origines et l'importance qu'une telle information peut avoir pour un enfant, propose de permettre à l'enfant issu d'un don de gamètes de recevoir, à sa demande, certaines informations non identifiantes sur le donneur, voire son identité, si ce dernier y consent. Il faut savoir que les parents ayant eu recours à une AMP avec donneur sont favorables à la levée partielle ou totale de l'anonymat et que l'expérience montre que, lorsqu'une telle mesure a été adoptée à l'étranger, elle n'a pas eu d'effets négatifs à long terme sur le nombre de dons.
Puis, M. Philippe Bas a souligné l'opposition du groupe de travail à la gestation pour autrui (GPA) au motif notamment que le corps de la femme n'est ni à vendre ni à louer ni même à prêter et qu'il n'existe pas de procédure, aussi précise soit-elle, qui prémunisse contre le risque d'une exploitation de la femme gestatrice. Il est nécessaire de prendre en compte à la fois l'intérêt du conjoint ou des enfants de la mère porteuse, qui pourraient être affectés par son geste, et l'intérêt propre de l'enfant à naître qui pourrait souffrir de l'abandon qu'il aurait vécu. Il a déclaré se défier de l'argument consistant à penser que la légalisation de la GPA éviterait que les couples partent à l'étranger pour y procéder, dans la mesure où l'on constate que certains couples pourtant autorisés à recourir à une GPA dans leur pays d'origine, choisissent, pour des raisons financières, de se rendre par exemple en Inde pour y trouver une mère porteuse. Cela étant, le groupe de travail a souhaité prendre en considération la situation juridique incertaine dans laquelle sont placés les enfants nés d'une gestation pour autrui légalement pratiquée à l'étranger. Sans remettre en cause l'interdiction de la GPA, il a donc proposé que la filiation paternelle soit établie sur une base biologique tandis que la mère d'intention, qui ne peut, en l'état actuel du droit civil, voir sa filiation établie sur la même base, recevrait une délégation-partage d'autorité parentale.
Enfin, sur la question de la fin de vie, le groupe de travail a considéré que l'équilibre retenu par la loi Leonetti permet de répondre à la plupart des difficultés qui se posent, en arrêtant les traitements ou en recourant aux soins palliatifs. Dans les rares cas où la souffrance des malades ne pourrait recevoir de solution médicale, il a estimé nécessaire de s'en remettre à la responsabilité des médecins qui, le cas échéant, prendraient leur décision sous le contrôle du juge.
a rappelé qu'il reviendra au législateur de se prononcer sur l'ensemble des questions évoquées.
a estimé que le rapport présenté soulève autant d'interrogations qu'il fournit de réponses. Il s'est déclaré ainsi très sensible à la question du droit de chacun à accéder à ses origines, qu'il a autrefois défendu au sein du Conseil de l'Europe. Il a considéré que les arguments avancés pour s'opposer à la GPA devaient conduire à interdire le don d'organe prélevé sur donneur vivant, qui présente des risques médicaux indéniables pour le donneur, à court ou long terme, l'expose également aux pressions familiales et soulève désormais des problèmes juridiques lorsqu'il prétend vouloir récupérer ultérieurement l'organe cédé. Il a jugé nécessaire d'examiner aussi la question des tests de tolérance sur les nouveaux médicaments qui sont, dans les faits, pratiqués sur des malades en fin de vie. Il a par ailleurs relevé que, préalablement à la poursuite de l'expérimentation des « bébés médicaments », il serait judicieux de mener à son terme celle de l'évaluation de l'intérêt thérapeutique de l'utilisation des cellules de sang de cordon ombilical. Se prononçant sur la solution proposée par le Conseil d'Etat pour apporter une réponse à la situation juridique incertaine des enfants français nés d'une GPA, il a considéré qu'elle crée une inégalité injustifiée entre les hommes et les femmes dans l'établissement de leur filiation biologique puisque la recherche d'ADN serait acceptée pour le père mais refusée pour la mère.
Faisant valoir qu'un bébé n'était pas un organe et que la GPA n'engage pas un élément du corps de la femme mais la femme elle-même, M. Philippe Bas a contesté la comparaison établie entre cette pratique et le don d'organe. Il a par ailleurs estimé que l'inégalité de traitement entre l'homme et la femme pour l'établissement de la filiation biologique résulte de la différence de nature qui existe entre eux puisque la filiation maternelle se prouve par la naissance. Il s'est inquiété de l'incertitude que pourrait créer une remise en cause de ces principes.
a estimé qu'en matière d'éthique biomédicale, la question est celle des principes à retenir et des exceptions à y apporter. Elle s'est, à cet égard, interrogée sur l'opportunité que la loi entraîne des secrets dans la filiation. Elle a souhaité connaître l'avis du groupe de travail sur les finalités médicales, thérapeutiques ou scientifiques de la recherche sur l'embryon et savoir si, dans ce cadre, l'embryon doit être considéré comme une chose (recherche « avec » l'embryon) ou comme une personne (recherche « sur » l'embryon). Elle s'est enquise de l'analyse du Conseil d'Etat sur l'existence de fait de deux droits de la filiation, selon qu'elle est naturelle ou artificielle et s'est par ailleurs émue d'un possible laxisme en matière de recherche sur les embryons d'animaux. Enfin, elle a noté avec satisfaction que le rapport ne s'oppose pas à la mise en place de banques privées organisant la conservation à des fins autologues du sang de cordon ombilical.
Soulignant qu'en l'état actuel des connaissances scientifiques, les seules cellules souches totipotentes disponibles sont les cellules souches embryonnaires, M. Alain Milon s'est félicité que le groupe de travail préconise de maintenir l'autorisation des recherches menées dans ce domaine et il a émis le voeu que le législateur aille plus loin dans cette voie. Il a, en revanche, déploré que le rapport propose de reconnaître partiellement la situation juridique des enfants nés d'une GPA à l'étranger, sans légaliser cette pratique, ce qui risque, selon lui, de favoriser le commerce en la matière.
a fait valoir que les avis rendus ne sauraient constituer des injonctions au législateur. Elle a souhaité que des propos philosophiques personnels ne se mêlent pas aux recommandations adoptées. Elle a marqué son désaccord avec la proposition tendant à abandonner la révision périodique des lois bioéthiques, jugeant au contraire nécessaire d'examiner régulièrement l'adaptation de la législation à l'évolution des sciences et des techniques.
s'est inquiétée du chiffre élevé des interruptions médicales de grossesse pratiquées après détection d'une trisomie 21 et elle a souhaité connaître la marge d'erreur des tests pratiqués.
s'est interrogée sur les raisons pour lesquelles le groupe de travail n'a pas souhaité prévoir la levée partielle d'anonymat, qu'il recommande, au bénéfice des parents de l'enfant, alors que ceux-ci auraient ainsi la possibilité de porter les informations à sa connaissance avant sa majorité pour qu'il s'approprie son histoire.
Constatant que, dans 10 % des cas, les projets de recherche sur l'embryon se voient opposer un refus par l'agence de la biomédecine, M. Claude Jeannerot a souhaité connaître la motivation de tels refus. Il a par ailleurs considéré que l'impossibilité pour les couples de femmes ou les femmes célibataires d'accéder à l'AMP renvoie à des présupposés d'ordre moraux, selon lesquels un enfant doit disposer à la fois d'un père et d'une mère, préjugés qui ne sont pas unanimement partagés.
s'est étonnée de ne pas entendre évoquer la Convention internationale des droits de l'enfant avec laquelle il appartiendra à la France de se mettre en conformité.
a considéré qu'il est important, s'agissant de la levée partielle ou totale de l'anonymat du donneur de gamètes, de s'interroger sur les conséquences d'une telle révélation pour son conjoint ou ses enfants.
En réponse à ces différentes interventions, M. Philippe Bas a fait valoir que, sur la question de la levée de l'anonymat, la proposition du groupe de travail pourrait sans doute être améliorée, mais qu'il convient, en tout état de cause, d'une part, de prendre en considération le droit de chacun à accéder à ses origines, d'autre part, de ne modifier la législation que pour l'avenir, pour ne pas remettre en cause rétroactivement la situation des donneurs. Par ailleurs, il lui a semblé souhaitable de réserver à l'enfant majeur le bénéfice de la levée partielle ou totale de l'anonymat du donneur dont il est issu, afin qu'il puisse mûrir sa demande et que ses parents ne puissent décider à sa place.
S'agissant de la recherche sur les embryons, M. Philippe Bas a souligné la nécessité de modifier les termes de la loi pour qu'elle soit plus adaptée aux caractéristiques de la recherche fondamentale. Le groupe de travail n'a pas jugé nécessaire de trancher la question du statut de l'embryon et il s'est limité à le définir comme une personne humaine potentielle, ce qui suffit à justifier la protection que la loi doit lui apporter.
Evoquant la question des banques privées de sang de cordon ombilical, il a mis en avant le nécessaire primat de la solidarité sur toute utilisation à des fins privées.
Sur la suppression de la révision périodique des lois bioéthiques, il a expliqué que celle-ci ne lui paraît plus justifiée, ce qui n'interdit aucunement au législateur de se saisir, à tout moment, d'un problème d'éthique biomédicale.
Pour l'accès des couples homosexuels à l'AMP, M. Philippe Bas a rappelé que le Conseil d'Etat a estimé que cette question renvoie à un débat beaucoup plus large qu'il appartient au seul législateur de trancher. A titre personnel, il a considéré qu'il serait nécessaire que la réflexion prenne en compte, non seulement le couple élevant l'enfant, mais aussi, le cas échéant, le ou les parents biologiques de celui-ci.
En réponse à Mme Colette Giudicelli qui a jugé nécessaire de recueillir les conclusions des études portant sur le développement des enfants élevés au sein des nouveaux types de familles, M. Philippe Bas a déclaré ne pas avoir connaissance d'études incontestables sur le sujet. Il appartiendra en tout état de cause au législateur de prendre des décisions qui, faute de certitudes scientifiques, tiendront compte de l'intérêt supérieur de l'enfant.
Enfin, en réponse à Mme Marie-Thérèse Hermange qui s'est inquiétée de ce que la prévalence donnée au désir d'enfant puisse aboutir à modifier la finalité uniquement thérapeutique de l'AMP, M. Philippe Bas a estimé que, si tel était bien son objet initial, elle offre aujourd'hui le moyen de répondre à d'autres demandes dont il convient, comme le Conseil d'Etat a tenté de le faire, d'examiner la justification.