Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Réunion du 6 janvier 2009 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis, sur le projet de loi n° 145 (2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision et le projet de loi organique n° 144 (2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Joseph Kergueris

a rappelé en préambule que les deux projets de loi contiennent des dispositions visant à prolonger la réforme de l'audiovisuel extérieur, lancée à l'initiative du Président de la République.

Compte tenu de l'importance de l'audiovisuel extérieur pour la place et l'influence de la France et du français à l'échelle internationale, la commission a souhaité se saisir pour avis de ces deux textes, la commission des affaires culturelles étant saisie au fond.

a indiqué que son avis porterait sur les seules dispositions qui concernent directement l'audiovisuel extérieur. Ainsi, il a rappelé que l'aspect le plus emblématique de la réforme de l'audiovisuel public, la suppression progressive de la publicité sur les chaînes du service public, s'appliquait uniquement sur le territoire national et ne concernait donc pas l'audiovisuel extérieur.

Il n'a donc pas souhaité évoquer cet aspect dans son avis, tout en jugeant toutefois nécessaire d'aborder la question du financement de l'audiovisuel extérieur.

a tout d'abord rappelé les grands axes de la récente réforme de l'audiovisuel extérieur.

Il a indiqué qu'à la différence de nos partenaires européens, qui disposent souvent d'un opérateur unique, comme la BBC pour le Royaume-Uni ou la Deutsche Welle pour l'Allemagne, l'audiovisuel extérieur français était caractérisé par la dispersion de ses opérateurs, avec deux chaînes de télévision - TV5 Monde et France 24 - deux radios - Radio France Internationale (RFI) et RMC Moyen-Orient - et un organisme de coopération - Canal France International - qui offre des programmes en français à des radios ou à des télévisions des pays francophones.

De nombreux rapports ont mis en évidence par le passé la fragmentation, la mauvaise organisation et le manque d'efficacité de l'audiovisuel extérieur français, malgré un budget équivalent à celui qu'y consacrent nos partenaires.

A l'initiative du Président de la République, un comité de pilotage, composé de fonctionnaires issus de différents ministères, réunis sous la direction de M. Jean-David Levitte, conseiller diplomatique, et de M. Georges-Marc Benhamou, ancien conseiller pour l'audiovisuel, a été chargé d'une réflexion sur la réforme de l'audiovisuel extérieur et a remis ses conclusions en décembre 2007.

Ce rapport fixe deux missions à l'audiovisuel extérieur : une mission d'influence, la France devant pouvoir rivaliser avec les grands médias internationaux, comme CNN ou Al Jazeera, et une mission culturelle, consistant à promouvoir nos valeurs : la francophonie, la démocratie, les droits de l'Homme, la laïcité.

Ce rapport n'est pas resté lettre morte, puisque sa principale recommandation, la création d'une société holding regroupant l'ensemble des participations de l'Etat dans les différents opérateurs, a été suivie d'effets. Cette société holding, dénommée « Audiovisuel Extérieur de la France » (AEF) a été créée en avril 2008, avec pour mission de définir les priorités stratégiques et d'encourager les synergies entre les différents opérateurs, dans le respect de l'identité de chacun.

TV5 Monde occupe une place particulière, en raison de la crainte des autres partenaires francophones de la chaîne (la Belgique, la Suisse, le Canada, le Québec) de se voir marginaliser dans ce nouvel ensemble. Ils ont ainsi obtenu que la holding AEF ne détienne que 49 % du capital de TV5 Monde, alors qu'elle devrait à terme détenir 100 % du capital de RFI et de France 24.

Estimant que tout jugement sur cette réforme serait prématuré à ce stade, M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis, a considéré qu'il fallait donner leur chance aux dirigeants de la holding pour réussir là où l'Etat n'avait manifestement pas réussi. Il a souhaité qu'un bilan soit établi l'année prochaine, par exemple à l'occasion de l'examen de la loi de finances pour 2010.

La réforme de l'audiovisuel extérieur est pleinement en cohérence avec la réforme de l'audiovisuel public telle qu'elle figure dans les deux projets de loi.

Outre la suppression progressive de la publicité, qui ne s'applique pas à l'audiovisuel extérieur, ces textes contiennent en effet des dispositions visant à consolider la réforme de l'audiovisuel extérieur.

La société holding deviendrait ainsi une société nationale de programme, à l'image de France Télévisions et de Radio France, qui définirait ou contribuerait à définir les orientations stratégiques des différentes sociétés et elle pourrait également concevoir et programmer elle-même des services de communication audiovisuelle (article 2). Son capital serait entièrement détenu par l'Etat (article 4) à l'instar des autres sociétés nationales de programme.

Un cahier des charges définirait notamment les obligations de service public auxquelles elle est soumise (article 15), ce cahier des charges devant être complété par un contrat d'objectifs et de moyens conclu entre l'Etat et la holding (article 18).

La composition du conseil d'administration de la holding (article 7) serait très largement inspirée de celui de France Télévisions et de Radio France et son président serait nommé et révoqué dans les mêmes conditions que les présidents de ces deux sociétés (articles 8 et 9 du projet de loi et article unique du projet de loi organique).

Les règles relatives à la holding seraient donc très proches de celles de France Télévisions et de Radio France.

a d'ailleurs estimé qu'à terme un rapprochement entre l'audiovisuel national et l'audiovisuel extérieur mériterait d'être étudié, la frontière entre les deux s'effaçant progressivement sous l'effet des nouvelles technologies, comme la télévision par Internet ou sur téléphone mobile.

a ensuite rappelé que les financements consacrés à l'audiovisuel extérieur s'élèvent en 2009 à 233 millions d'euros, auxquels s'ajoutent 65,3 millions d'euros au titre de la redevance audiovisuelle, ce qui représente au total 298,3 millions d'euros.

A titre de comparaison, le financement de l'audiovisuel public national représente près de 3 milliards d'euros dont 2 milliards d'euros au titre de la redevance audiovisuelle et la dotation d'Arte, chaîne franco-allemande, s'élève, à elle seule, à 300 millions d'euros, soit l'équivalent de l'ensemble des crédits des opérateurs de l'audiovisuel extérieur, pour une couverture mondiale.

Or, les besoins estimés par les opérateurs s'élèvent à 322 millions d'euros, dont 117 millions d'euros pour France 24 conformément à sa convention de partenariat avec l'Etat, 72 millions d'euros pour TV5 Monde et 133 millions d'euros pour RFI.

En outre, selon le document de programmation budgétaire triennale, la subvention destinée à la holding devrait même diminuer sur les trois prochaines années, puisqu'elle redescendrait de 233 millions d'euros, en 2009, à 218 millions d'euros en 2010, puis à 203 millions d'euros en 2011.

Certes, le développement des mutualisations entre les opérateurs devrait favoriser les économies d'échelle, mais il semble que, dans un contexte très concurrentiel, marqué par le développement de nouvelles technologies, la réforme de l'audiovisuel extérieur risquerait d'être compromise si ses moyens venaient à diminuer fortement dans les prochaines années, a estimé M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis.

Certes, encore une fois, les deux projets de loi ne remettent pas en cause le financement de l'audiovisuel extérieur étant donné que celui-ci n'est pas concerné par la suppression de la publicité.

Toutefois, afin de trouver des ressources supplémentaires pour compenser la perte des recettes publicitaires, dont le coût à été évalué à 450 millions d'euros par an pour la première étape et à 650 millions d'euros au-delà, la tentation existe de transférer la part de la redevance audiovisuelle versée actuellement à l'audiovisuel extérieur, soit 65 millions d'euros, pour les affecter à France Télévisions.

Or, cette mesure serait de nature à fragiliser le financement de l'audiovisuel extérieur puisque, d'une part, rien ne garantit que cette réduction serait compensée par une augmentation équivalente de la subvention versée à l'audiovisuel extérieur et que, d'autre part, à la différence des subventions publiques, la redevance audiovisuelle est une recette dynamique, qui n'est pas soumise à l'aléa budgétaire.

a donc déclaré qu'il évoquerait la question du financement pérenne de l'audiovisuel extérieur à l'occasion du débat en séance publique sur les deux projets de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

a rendu hommage à la qualité du travail effectué par le rapporteur pour avis tout en indiquant que le groupe socialiste s'opposerait à l'adoption des deux projets de loi pour deux raisons. La première raison tient à la conception d'ensemble de la réforme de l'audiovisuel public illustrée par le fait que la nouvelle procédure de nomination des présidents des sociétés France Télévisions, Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France, vise en réalité à confier au seul Président de la République le soin de désigner les présidents des différentes sociétés de l'audiovisuel public. La deuxième raison tient plus particulièrement aux aspects relatifs à l'audiovisuel extérieur.

a indiqué qu'elle n'était pas opposée à l'idée d'un regroupement de l'audiovisuel extérieur mais elle s'est déclarée très inquiète des conditions dans lesquelles s'effectuait ce regroupement en confiant à un seul homme la responsabilité de piloter l'ensemble des sociétés de l'audiovisuel extérieur, sans tenir compte des spécificités de chacune de ces sociétés.

Pour ces deux raisons, elle a indiqué que le groupe socialiste voterait contre l'adoption de ces deux projets de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

a regretté que Canal France International n'ait pas été intégré au sein du nouvel ensemble de l'audiovisuel extérieur de la France, puisque, même si cet organisme n'est pas un média, il joue un rôle important en matière de coopération audiovisuelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Chevènement

a fait part de ses inquiétudes au sujet du financement de l'audiovisuel extérieur.

La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements proposés par le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Joseph Kergueris

A l'article 2 (régime juridique de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France), la commission a d'abord adopté, à l'initiative de M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis, un amendement visant à remplacer, dans la définition des missions assignées à la société holding, l'expression « fourniture d'informations », par les mots la « programmation et la diffusion d'émissions de télévision et de radio ou de services de communication en ligne », la première pouvant paraître réductrice. Elle a également adopté un amendement tendant à mettre au pluriel l'expression « en langue étrangère » afin d'éviter toute ambiguïté.

Enfin, afin de tenir compte du statut particulier de TV5 Monde, la commission a adopté un amendement visant à insérer les termes « définit ou contribue à définir », non seulement dans la définition des missions assignées à la holding, mais aussi dans les obligations de service public.

A l'article 4 (détention du capital des sociétés nationales de programme), M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis, a rappelé que le texte initial du projet de loi établissait une distinction entre les sociétés de l'audiovisuel public national, dont le capital était entièrement détenu par l'État, et l'audiovisuel extérieur dont il était prévu que l'Etat ne détienne que la majorité du capital.

L'Assemblée nationale a toutefois adopté un amendement visant à aligner les règles sur celles de France Télévisions et de Radio France.

En conséquence, il est désormais prévu que l'État détienne la totalité du capital de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France.

Compte tenu de l'expérience malheureuse de la reprise par l'Etat de la participation de TF1 dans le capital de France 24, M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis, a estimé qu'il paraît plus raisonnable d'éviter à l'avenir la participation de sociétés privées, même minoritaires, dans le capital.

A l'article 7 (composition du conseil d'administration de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France), M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il était personnellement plutôt réservé, au début, sur la présence de parlementaires au sein du conseil d'administration de sociétés publiques, ce système comportant à ses yeux le risque de faire de ces représentants des juges et parties, mais que finalement, il s'était rallié à la présence de parlementaires sous réserve qu'elle soit limitée.

Estimant surprenant que, contrairement au conseil d'administration de France Télévisions ou de Radio France, qui comprennent respectivement quinze et treize membres, y compris le président, le nombre total de membres du conseil d'administration de la holding, soit un nombre pair (quatorze), ce qui pourrait créer des difficultés en cas de partage des voix, il a proposé un amendement visant à augmenter le nombre de membres du conseil d'administration de la holding, qui passerait de quatorze à quinze, soit le même nombre que celui de France Télévisions, ce qui a été accepté par la commission, le Groupe socialiste s'abstenant.

La commission a en conséquence adopté un amendement, le Groupe socialiste s'abstenant, proposé par le rapporteur pour avis, tendant à augmenter le nombre de personnalités indépendantes, désignées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, en raison de leur compétence, qui passerait de quatre à cinq en précisant que l'une au moins de ces personnalités devrait disposer d'une expérience reconnue dans le domaine de la francophonie, afin de garantir la prise en compte de la francophonie dans les objectifs stratégiques de l'audiovisuel extérieur.

Enfin, toujours à l'initiative du rapporteur pour avis, la commission a adopté un amendement de coordination avec l'article 4, tendant à prévoir que les administrateurs nommés par l'assemblée générale des actionnaires soient tous des représentants de l'Etat, puisque la totalité du capital de la holding est détenue désormais par l'Etat.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

a souligné l'incongruité qui résulte selon lui du dernier alinéa de l'article 7 du projet de loi qui fait du président de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France à la fois le président, le président-directeur général, le directeur général ou le président du directoire de chacune des filiales de cette société, ce qui semble être un cas unique au sein des sociétés holding.

Debut de section - PermalienPhoto de Joseph Kergueris

a indiqué que cette mesure était conforme à la logique de la réforme de l'audiovisuel extérieur qui vise à renforcer la cohérence et les synergies entre les différentes sociétés, Radio France Internationale, TV5 Monde et France 24, dans le respect de l'identité de chacune.

A l'article 8 du projet de loi ordinaire et à l'article unique du projet de loi organique (procédure de nomination des présidents de France Télévisions, Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur), M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis, a indiqué que la procédure prévue pour la désignation des présidents des sociétés nationales de programme, dont la société en charge de l'audiovisuel extérieur, offrait des garanties d'impartialités et d'indépendances justifiées par la spécificité de l'audiovisuel public. A l'avenir, ces présidents seront nommés pour cinq ans par décret du Président de la République, après avis conforme du Conseil supérieur de l'audiovisuel et avis des commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat, qui disposeront d'un véritable droit de veto puisque le Président de la République ne pourra procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représentera au moins trois cinquième des suffrages exprimés au sein des deux commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

a indiqué que le groupe socialiste était fortement opposé à la procédure prévue pour la nomination des présidents de France Télévisions, Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur, qui revenait à confier au seul Président de la République le choix de désigner les présidents des sociétés concernées, compte tenu de la composition du Conseil supérieur de l'audiovisuel et de la difficulté à recueillir une majorité des trois cinquièmes au sein des commissions des assemblées.

Debut de section - PermalienPhoto de Joseph Kergueris

A l'article 9 (procédure de révocation des présidents des sociétés nationales de programme), M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis, a indiqué que, par parallélisme des formes, il était prévu que le mandat des présidents des sociétés France Télévisions, Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France, pouvait leur être retiré par décret motivé, après avis conforme, également motivé, du Conseil supérieur de l'audiovisuel et avis des commissions parlementaires compétentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

ayant fait observer que le projet de loi organique ne faisait référence qu'au seul pouvoir de nomination, s'est interrogé sur la manière dont les commissions parlementaires seraient appelées à se prononcer sur la révocation du mandat des présidents des sociétés audiovisuelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Joseph Kergueris

a indiqué que le projet de loi prévoyait que l'avis des commissions parlementaires se ferait dans les mêmes conditions que celles prévues par la loi organique pour la nomination, c'est-à-dire qu'une révocation ne pourrait avoir lieu si les votes négatifs représentent les trois cinquièmes des suffrages exprimés dans les deux commissions.

A l'article 15 (cahier des charges des sociétés nationales de programme), la commission a adopté à l'unanimité, sur proposition de son rapporteur pour avis, deux amendements tendant à prévoir la transmission de tout nouveau cahier des charges de la société chargée de l'audiovisuel de la France également aux commissions chargées des affaires étrangères de l'Assemblée nationale et du Sénat, de même que la transmission du rapport annuel sur l'exécution de ce cahier des charges.

A l'article 18 (contrat d'objectifs et de moyens), la commission a adopté, à l'initiative de M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis, également à l'unanimité, trois amendements visant à associer les commissions des affaires étrangères des deux assemblées au contrôle parlementaire sur la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France.

Puis la commission a émis un avis favorable, le groupe socialiste et le groupe communiste républicain et citoyen et des sénateurs du parti de gauche votant contre, à l'adoption des deux projets de loi.