Déposé le 14 juin 2018 par : MM. Bargeton, Amiel, Cazeau, de Belenet, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi, Navarro, Patient, Patriat, Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung, les membres du groupe La République En Marche.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le deuxième alinéa de l'article L. 5221-5 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette autorisation est accordée de droit aux mineurs isolés étrangers pris en charge par l'aide sociale à l'enfance, sous réserve de la présentation d'un contrat d'apprentissage ou de professionnalisation. »
L'amendement adopté en commission des lois supprimant l'article 26 ter précisait qu'une autorisation de travail est accordée de droit aux mineurs non accompagnés pris en charge par l'aide sociale à l'enfance sous réserve de la présentation d'un contrat d'apprentissage ou de professionnalisation.
Pourtant, il n'en est rien. Les textes ne permettent de répondre à cette exigence que lorsqu'ils peuvent être interprétés au sens de l'ordonnance en référé du Conseil d'État du 15 février 2017.
Si bien que la traduction législative apportée par l'article 26 ter n'était pas superfétatoire pour garantir une bonne interprétation de la loi.
Par ailleurs, beaucoup de mineurs isolés étrangers (MIE) âgés de 16 à 18 ans se dirigent vers des formations qualifiantes courtes, visant l'acquisition rapide de compétences professionnelles. Parmi ces formations, les certificats d'aptitude professionnelle (CAP) représentent une voie d'intégration privilégiée, en particulier les CAP en apprentissage. Ces cursus disposent en effet de plusieurs atouts pour des jeunes qui, au terme de leur prise en charge à l'Aide sociale à l'enfance (ASE), devront à la fois être autonomes financièrement et entamer des démarches de régularisation. Dans le cas d'un CAP en apprentissage, une autorisation provisoire de travail (APT) doit être sollicitée auprès de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE).
La circulaire du 25 janvier 2016, qui fixe les modalités de délivrance de cette APT, distingue, en s'appuyant de l'art. R. 5221-22 du Code du travail, les MIE, selon qu'ils ont été pris en charge par l'ASE avant ou après 16 ans. Pour les premiers, la délivrance de cette ATP ne pose pas de problèmes particuliers. Pour les seconds en revanche, un refus peut leur être opposé au motif qu'ils ne bénéficient pas de titre de séjour. Comme le soulignait le Défenseur des droits dans un avis du 7 février 2007, une telle décision est lourde de conséquence pour ces jeunes, puisque non seulement elle les empêche d'intégrer un CFA, mais elle met également en péril leur accès à un contrat jeune majeur et à un titre de séjour à leur majorité.
Or, dans une ordonnance du 15 février 2017, publiée au recueil Lebon, le Juge des référés du Conseil d'État a invalidé cette approche. En l'espèce, un jeune garçon avait été admis dans un CFA et avait conclu un contrat d'apprentissage validé temporairement dans l'attente d'une APT. Sollicitée en urgence, cette APT lui avait été refusée au motif qu'il ne disposait pas de titre de séjour. Dans son ordonnance, le Conseil d'Etat a estimé que la combinaison des art. L. 5221-5 du Code du travail et L. 313-15 du CESEDA impliquait la délivrance de plein droit d'une autorisation de travail au mineur isolé étranger qui a été confié à l'ASE après l'âge de seize ans et qui, de ce fait, devait être regardé comme étant autorisé à séjourner en France avant l'âge de dix-huit ans, sous réserve de la présentation d'un contrat d'apprentissage ou d'un contrat de professionnalisation à durée indéterminée. Pour le Conseil d'État, outre qu'elle était manifestement illégale, la décision de la DIRECCTE portait également une atteinte grave à une « liberté fondamentale », au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en méconnaissant l'intérêt supérieur de l'enfant et « l'exigence constitutionnelle de l'égal accès à l'instruction ».
Cet amendement vise donc à rétablir l'amendement adopté par l'Assemblée nationale qui visait à clarifier notre droit au regard de la jurisprudence récente du Conseil d'Etat en inscrivant dans le Code du travail l'obligation de délivrance d'une autorisation provisoire de travail aux mineurs isolés étrangers confiés à l'ASE après 16 ans, sous réserve de la présentation d'un contrat d'apprentissage ou d'un contrat de professionnalisation à durée indéterminée. Il reprend en outre l'une des préconisations formulées par Delphine Bagarry dans son rapport pour avis, rédigée dans le cadre du PLF pour 2018, sur la question des mineurs isolés : « la délivrance d'une autorisation de travail à un mineur pris en charge par l'Aide sociale à l'enfance devrait devenir automatique du moment où celui-ci poursuit une formation d'autant plus si c'est une formation en apprentissage […] ».
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