Déposé le 12 janvier 2022 par : MM. Durain, Marie, Mmes Préville, de La Gontrie, M. Bourgi, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche, Leconte, Sueur, les membres du groupe Socialiste, Écologiste, Républicain.
I. – Alinéas 2 à 4
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. 6. – I. – Un lanceur d’alerte est une personne physique ou morale à but non lucratif qui signale ou divulgue, sans contrepartie financière directe et de bonne foi, des informations portant sur un crime, un délit, une menace ou un préjudice pour l’intérêt général, une violation ou une tentative de dissimulation d’une violation d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement, du droit de l’Union européenne, de la loi ou du règlement. Lorsque les informations n’ont pas été obtenues dans le cadre des activités professionnelles mentionnées au I de l’article 8, le lanceur d’alerte doit en avoir eu personnellement connaissance.
II. – Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
, sous réserve des dérogations prévues par la loi
III. – Alinéa 6
Remplacer le mot :
précitée
par les mots :
sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union
La modification adoptée en commission des lois procède à une suppression des notions de « menace » et de « préjudice pour l'intérêt général », remplacées par violation des règles de droit, introduction d'un critère de gravité suffisante de la violation d'une règle de droit. Ce faisant, l’amendement revient non seulement sur la version adoptée par l’Assemblée, qui prévoyait une protection de l’ensemble des citoyens dénonçant des faits susceptibles de constituer une menace ou un préjudice pour l’intérêt général, mais également sur la loi « Sapin 2 » qui, depuis 2016, constitue l’une des définitions les plus avancées au monde en matière de lancement d’alerte. Il s’agit d’une régression sans précédent depuis 2016. Elle permet d’ancrer le droit d’alerte dans la défense de l’intérêt général et d’en faire un mécanisme pleinement démocratique, à rebours de certaines législations qui réduisent le mécanisme à une forme de vigilantisme exacerbé.
Or, comme l’a souligné l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe en 2014, l’alerte doit permettre de couvrir l’ensemble des atteintes à l’intérêt général, de sorte que doit être qualifiée de lanceur d’alerte « Toute personne qui fait des signalements ou révèle des informations concernant des menaces ou un préjudice pour l’intérêt général, dans le contexte de sa relation de travail, qu’elle soit dans le secteur public ou dans le secteur privé ».
La suppression de la référence à la menace ou au préjudice pour l’intérêt général aura deux impacts négatifs majeurs sur l’efficacité du dispositif de protection des lanceurs d’alerte.
Premièrement, il impactera durablement la lisibilité du droit et, partant, produira un effet dissuasif sur les personnes susceptibles de lancer l’alerte sur des violations de l’intérêt général.
Deuxièmement, il fera obstacle à la protection des lanceurs d’alerte qui, comme Antoine Deltour ou Irène Frachon alertent sur des faits qui ne constituent pas des violations de la loi, soit parce que le législateur n’est pas encore intervenu dans la matière concernée ou que la légalité d’une pratique fait débat, soit lorsqu’il s’agit de risques sanitaires ou environnementaux qui, par nature, sont toujours sujets à controverse et débat et n’entrent aucunement dans le cadre restreint des « violations de la loi ».
Par ailleurs, les personnes morales, en particulier les associations loi 1901, jouent un rôle clef dans le processus d'alerte en relayant les alertes de lanceurs d'alerte. Parfois, certaines associations agissent elles-mêmes en qualité de “lanceurs d'alerte”.
Pourtant, en dépit de ce rôle, les personnes morales lanceuses d''alerte ne bénéficient d'aucune des protections instituées par le statut de lanceur d'alerte. Or, les représailles dont ces dernières peuvent faire l'objet sont nombreuses. En particulier, ces dernières sont, depuis la réforme du code pénal de 1994, responsables pénalement des actes de leurs représentants en vertu de l'article 121-2 du Code Pénal.
Afin de redonner toute sa substance au texte présenté, le GSER estime qu'il est nécessaire de revoir la définition retenue par la Commission des lois, qui va contre l’esprit même de l’alerte, et propose ainsi de rétablir la rédaction initiale de l'article 1er et d'étendre le statut de lanceur d'alerte aux personnes morales à but non lucratif/en permettant aux facilitateurs de diffuser une alerte.
NB: La mention « Tombé » signifie qu'il n'y avait pas lieu de soumettre l'amendement au vote du Sénat dans la mesure où soit l'objectif poursuivi par l'amendement a été atteint par l'adoption d'un autre amendement (ex. : amendement de rédaction globale incluant la modification proposée), soit, au contraire, l'amendement était incompatible avec un amendement précédemment adopté (ex. : l'adoption d'un amendement de suppression fait tomber tous les autres).
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