Commission spéciale continuité du service public

Réunion du 4 juillet 2007 : 2ème réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • conflit
  • continuité
  • grève
  • grévistes
  • réaffectation
  • usager

La réunion

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Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, sous la présidence de M. Charles Revet, président, le groupe de travail intercommissions a procédé à une série d'auditions sur le dialogue social et la continuité du service public de transport.

Le groupe de travail a tout d'abord entendu MM. Michel Bleitrach, président de Keolis, vice-président de l'Union des transports publics et ferroviaires (UTP), Eric Asselin, directeur des ressources humaines, Jean-Michel Ferraris, directeur général adjoint région ouest, et Jean Ghedira, directeur de la communication de Keolis.

Debut de section - Permalien
Michel Bleitrach, président de Keolis, vice-président de l'UTP

s'est d'abord félicité de pouvoir présenter dans cette enceinte ses observations sur le projet de loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, en soulignant l'enjeu crucial que ce texte revêt pour les usagers.

Debut de section - Permalien
Eric Asselin, directeur des ressources humaines

a ensuite fait observer que l'article 2, qui prévoit une négociation préalable entre l'employeur et les organisations syndicales avant tout dépôt d'un préavis de grève, constitue une avancée importante pour le dialogue social mais il s'est interrogé sur la qualification de cette phase de discussion, jugeant que le terme « négociation » pourrait être remplacé par celui de « concertation », plus proche de la réalité. Puis, il a estimé que le délai de trois jours durant lequel l'employeur serait tenu de réunir les organisations syndicales représentatives, à compter de la notification par celles-ci des motifs pour lesquels elle envisage de déposer un préavis de grève, devrait faire mention du caractère « ouvrable » pour des raisons pratiques d'organisation.

Abordant ensuite le contenu de l'article 3, qui interdit la pratique des préavis glissants, M. Eric Asselin a fait remarquer que le texte issu du conseil des ministres n'empêchait plus les organisations syndicales de déposer un nouveau préavis avant l'échéance du préavis en cours à condition qu'il le soit pour des motifs différents du premier. En ce sens, la rédaction initiale de l'avant-projet de loi était meilleure car elle visait uniquement l'échéance du préavis.

A l'article 4, qui constitue la pierre angulaire du projet, il a estimé légitime que la collectivité publique impose, en tant qu'autorité organisatrice de transport, les dessertes prioritaires à partir desquelles l'entreprise élaborera son plan de transport. Concernant ensuite l'article 5, il s'est dit favorable à l'obligation faite aux salariés, dont la présence détermine directement l'offre de service, d'informer la direction de leur intention de participer à une grève quarante-huit heures avant le début de celle ci. Il a en revanche regretté que la loi ne confère à l'employeur aucun moyen de sanction disciplinaire ou financière à l'égard des salariés non grévistes qui refuseraient une réaffectation, soulignant que le principe même du service minimum exige de pouvoir contraindre ces salariés à assurer la continuité du service sur d'autres lignes et à d'autres horaires que ceux pour lesquels ils sont habituellement employés.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

A Mme Catherine Procaccia, rapporteur, qui lui demandait si l'obligation de réaffectation du personnel en temps de grève pouvait être inscrite dans le contrat de travail, M. Eric Asselin a fait valoir que cela ne serait possible que pour les nouveaux contrats de travail, à moins de renégocier les anciens. Il a réaffirmé que le véritable enjeu pour les entreprises de transport était de se voir confier par le législateur les moyens juridiques d'organisation du service minimum, au premier rang desquels le pouvoir de réaffectation des salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

s'est alors interrogé sur l'équité d'un système qui pénaliserait ou sanctionnerait le salarié non gréviste qui refuserait de remplacer un salarié qui participe à une grève.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Ferraris, directeur général adjoint région ouest

a fait remarquer que, sans un tel dispositif, le service minimum serait en pratique impossible à organiser.

Debut de section - Permalien
Michel Bleitrach, président de Keolis, vice-président de l'UTP

a ensuite indiqué qu'il était extrêmement difficile d'éviter les pressions des salariés grévistes sur les non grévistes, notamment si ces derniers devaient assurer un service sur les lignes de leurs collègues grévistes. Mme Catherine Procaccia, rapporteur, a fait valoir qu'une telle situation ne pouvait se produire que si l'ensemble des salariés d'une même ligne participait effectivement à la grève. Approuvant cette remarque, M. Michel Bleitrach a fait observer qu'il fallait néanmoins que les salariés se substituant aux grévistes acceptent de changer d'horaire de travail. Il a ajouté que le service minimum était en pratique très vulnérable à des actions du type « blocage de dépôt » car la circulation des véhicules est alors impossible.

Debut de section - Permalien
Eric Asselin, directeur des ressources humaines

a ensuite jugé le contenu de l'article 7 déséquilibré, en ce qu'il fait peser uniquement sur l'entreprise de transport la responsabilité de l'information des usagers en cas de perturbation du trafic. A cet égard, il a fait valoir que des raisons extérieures de force majeure peuvent rendre impossible la réalisation effective de l'information des usagers.

Il a par ailleurs regretté que plusieurs observations faites par le groupe Keolis, au cours de la phase de concertation sur l'avant-projet de loi, n'aient pas été prises en compte par le Gouvernement. Remarquant que le projet de loi n'apporte aucune limitation aux grèves « à la carte » ou aux grèves « perlées » qui consistent pour les salariés grévistes à s'arrêter quelques minutes et à reprendre ensuite le travail, et qui provoquent des perturbations très importantes sur les réseaux, il a préconisé des sanctions, à travers un mécanisme de retenue sur salaire, proportionnelle à la durée des arrêts de travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

A Mme Catherine Procaccia, rapporteur, qui a demandé si le délai de prévenance de quarante-huit heures prévu dans la loi pouvait faire évoluer les comportements des salariés, M. Eric Asselin a répondu que ce mécanisme aurait vraisemblablement des effets pédagogiques et responsabiliserait davantage les salariés. Il a néanmoins réaffirmé la difficulté de la réaffectation des salariés non grévistes, observant d'ailleurs que les entreprises de transport ne peuvent pas, pour des raisons de sécurité, remplacer certains personnels ayant des qualifications techniques particulières. Puis il s'est interrogé sur la pertinence du champ d'application du projet de loi, faisant observer que l'activité de ramassage scolaire ne peut pas faire l'objet d'un service minimum, à moins de définir des écoles ou des communes prioritaires dans le transport des écoliers, ce qui paraît évidemment difficile pour les conseils généraux.

a ensuite demandé pourquoi la négociation d'un accord de branche par l'UTP avait échoué. M. Eric Asselin a répondu que les organisations syndicales avaient pris comme modèle les accords-cadres signés à la RATP sans tenir compte de la différence de taille et d'effectif avec les autres entreprises de transport. Répondant enfin à M. Daniel Reiner, qui l'interrogeait sur l'intérêt pour l'entreprise Keolis de disposer d'un accord de branche, M. Eric Asselin a répondu que son groupe était très favorable à un tel accord car il imposerait le respect de clauses types, quels que soient les opérateurs, notamment pour les réseaux de province pour la plupart exploités dans le cadre de délégations de service public.

Debut de section - Permalien
Mm. Serge Nossovitch, et Gérard Perre, président de la commission sociale de la Fédération nationale des transports de voyageurs

Puis le groupe de travail a procédé à l'audition de MM. Serge Nossovitch, secrétaire général, et Gérard Perre, président de la commission sociale de la Fédération nationale des transports de voyageurs (FNTV).

Debut de section - Permalien
Serge Nossovitch, secrétaire général

Après avoir indiqué que la FNTV représentait 80 % des entreprises de transport interurbain, M. Serge Nossovitch, secrétaire général, s'est félicité de l'importance donnée par le projet de loi au dialogue social et a souligné l'extrême rareté des conflits sociaux dans le domaine des transports interurbains.

Il s'est ensuite attaché à mettre en lumière les particularités propres à ce secteur, relevant qu'à la différence du transport urbain, le transport interurbain concernait, au sein d'un même département, des dizaines d'entreprises de transport, en charge elles-mêmes de dizaines de services, sur des distances pouvant atteindre 200 km, et avec une fréquence parfois très faible. Ces caractéristiques rendent vaines toute tentative de rationalisation excessive ou de définition de règles uniformes très précises. Ainsi, il n'est pas réaliste de demander l'application d'un pourcentage minimum de service, par exemple 30 %, sur une ligne bénéficiant, en temps normal, d'un seul aller-retour par jour.

a également estimé particulièrement complexe la délimitation des contours du service minimum par les autorités organisatrices de transport, considérant que ces dernières risquaient de juger 70 % à 80 % des services comme prioritaires, si l'on y inclut les transports services scolaires et les services pendulaires domicile-travail.

A la différence des dispositions relatives au dialogue social, susceptibles d'être mises en oeuvre avantageusement par voie d'accord de branche, il a plaidé pour une négociation entreprise par entreprise en matière de service minimum. Il a toutefois reconnu que cette négociation pourrait aboutir à certaines disparités territoriales.

En réponse à Mme Catherine Procaccia, rapporteur, qui se demandait s'il était réaliste d'imposer un service minimum aux petites entreprises, par exemple celles assurant une seule desserte, M. Serge Nossovitch a estimé nécessaire de réduire le champ d'application de la loi aux entreprises de transport d'une certaine taille.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

a exprimé la crainte qu'une telle distinction entre entreprises de transport ne conduise à des traitements différents au sein d'un même territoire. Il a également estimé inenvisageable d'exclure du champ du projet de loi tout le secteur du transport interurbain.

Abordant la question de la déclaration d'intention individuelle quarante-huit heures avant la grève, M. Gérard Perre, président de la commission sociale de la FNTV, a fait valoir que les bénéfices attendus d'une telle mesure en termes de prévisibilité du trafic étaient contestables, un salarié pouvant se déclarer gréviste tout en se présentant à son travail deux jours plus tard.

En conclusion, Mme Catherine Procaccia, rapporteur, s'est interrogée sur l'opportunité de maintenir les transports scolaires dans le champ de la loi, considérant qu'ils étaient par nature tous prioritaires.

Debut de section - Permalien
Mm. Philippe Segretain, secrétaire général et directeur des ressources humaines de Transdev, président de la commission des affaires sociales de l'UTP

Puis le groupe de travail a procédé à l'audition de MM. Philippe Segretain, président-directeur général de Transdev, vice-président de l'UTP, et Jean-Pierre Gouteyron, secrétaire général et directeur des ressources humaines de Transdev, président de la commission des affaires sociales de l'UTP

Debut de section - Permalien
Philippe Segretain, président-directeur général de Transdev, vice-président de l'UTP

a tout d'abord indiqué que Transdev, groupe international présent dans plusieurs pays, était l'un des trois premiers opérateurs privés en matière de transport collectif de voyageurs en France, en assurant 20 % des délégations de service public pour le transport urbain, 10 % pour le transport interurbain et 12 % pour le transport privé en région parisienne. Il a ajouté que le groupe était leader sur le marché des tramways et recourait volontiers à la formule de la société d'économie mixte locale, qui permet un partenariat avec les collectivités territoriales. Enfin, il a observé que de nombreuses villes étaient désormais structurées autour de grands réseaux, ce qui facilitait la mobilité des usagers mais les exposait aussi à un plus grand risque de blocage en cas de conflit social.

Evoquant le projet de loi, M. Philippe Segretain l'a jugé intéressant et équilibré. Il a relevé les limites du dialogue social, quelle que soit sa qualité, et la nécessité d'une loi pour assurer la continuité du service public dans les transports, en conciliant la liberté d'aller et venir et le droit de grève. Cette conciliation lui semblant assurée par le projet de loi, il a exprimé le souhait qu'il ne soit pas trop édulcoré au cours des travaux parlementaires.

a souligné l'importance des dispositions destinées à assurer la prévisibilité du service applicable en cas de grève, en obligeant les salariés à déclarer individuellement, quarante-huit heures avant le début de la grève, leur intention d'y participer ou non. Il a expliqué que l'opérateur serait ainsi en mesure de connaître à l'avance le nombre des grévistes et de définir avec l'autorité organisatrice de transport le service pouvant être assuré. Pour assurer la confidentialité de la déclaration des salariés, il a suggéré qu'elle puisse être adressée non pas au chef d'entreprise mais à un tiers, l'important étant de connaître le nombre et la catégorie, et non l'identité des grévistes.

a également marqué l'importance des dispositions autorisant la réaffectation des agents non grévistes, en faisant valoir qu'en l'absence de base légale, cette réaffectation pouvait être actuellement dénoncée par les organisations représentatives de salariés comme une atteinte au droit de grève et pouvait se heurter au refus des agents concernés.

Enfin, il a distingué deux types de grèves : celles qui surviennent dans le cadre des négociations annuelles sur les conditions de travail et les rémunérations et celles déclenchées à la suite de l'agression d'un conducteur. Dans ce dernier cas, on ne peut reprocher aux agents de manifester leur solidarité à l'égard d'un collègue et de refuser de s'exposer, ainsi que leurs passagers, au danger. Il a toutefois observé de grandes différences de comportements selon les réseaux, la tradition de dialogue social et la bonne entente entre l'encadrement et les agents permettant, pour certains, la poursuite du service après un tel drame. Il ne lui a toutefois pas semblé possible de légiférer sur ce type de grève. Il a insisté sur les limites de l'efficacité de la loi dans cette situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

a demandé s'il était nécessaire de prévoir dans la loi une possibilité de réaffectation des agents non grévistes.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

a indiqué qu'en l'absence de base légale, la réaffectation des agents non grévistes était actuellement considérée par les organisations représentatives des salariés comme une atteinte au droit de grève, ce qui rend indispensables les dispositions du projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

a insisté sur la nécessité de permettre cette réaffectation.

Debut de section - Permalien
Philippe Segretain, président-directeur général de Transdev, vice-président de l'UTP

a ajouté que l'affectation des agents était déterminée longtemps à l'avance, dans le cadre d'accords généralement écrits entre la direction de l'entreprise et les organisations représentatives de salariés. La réaffectation des agents non grévistes pour assurer la continuité du service public constituant une entorse à ces accords, il lui a semblé nécessaire de lui donner une base légale.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

a demandé si la réaffectation des agents non grévistes resterait possible si la déclaration individuelle d'intention des salariés devenait anonyme.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

a indiqué qu'il était indispensable de connaître quarante-huit heures à l'avance le nombre des grévistes afin de déterminer le service pouvant être assuré mais qu'il était tout à fait possible, grâce aux systèmes informatiques, de réaffecter les agents une heure avant le début du service.

Debut de section - Permalien
Philippe Segretain, président-directeur général de Transdev, vice-président de l'UTP

a déclaré que Transdev veillait à assurer la polyvalence de ses agents, en imposant aux conducteurs de changer régulièrement à la fois de desserte mais aussi de mode de transport.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

a observé que toutes les entreprises de transport n'avaient pas adopté cette organisation.

Debut de section - Permalien
Philippe Segretain, président-directeur général de Transdev, vice-président de l'UTP

a mis en exergue la souplesse de l'organisation interne de Transdev et le choix d'une gestion déconcentrée par dépôt. Il a insisté sur la nécessité d'assurer la polyvalence des agents, sous peine de multiplier les points de blocage en cas de grève.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

a observé que cette polyvalence était plus difficile à pratiquer pour certains grands réseaux, sur lesquels circulent des matériels roulants d'utilisation plus complexe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

a demandé si Transdev, groupe international, envisageait de faire appel, en cas de grève, à des conducteurs étrangers pour assurer la continuité du service.

Debut de section - Permalien
Philippe Segretain, président-directeur général de Transdev, vice-président de l'UTP

lui a répondu qu'il n'en était pas question, pas plus que de faire appel à des conducteurs du nord de la France en cas de grève dans le sud.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Dans ces conditions, M. Jean Desessard s'est interrogé sur l'utilité de la loi en cas de grève très suivie sur un site.

Debut de section - Permalien
Philippe Segretain, président-directeur général de Transdev, vice-président de l'UTP

a indiqué qu'en l'état actuel de la législation, il n'était pas possible d'obliger les salariés à déclarer à l'avance leur intention de faire grève et, en conséquence, d'organiser un service minimum. Il a également souligné la nécessité de donner une base juridique aux décisions de réaffectation des agents non grévistes.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

a souligné le retard de la France sur les Pays-Bas en matière de continuité du service public de transport de voyageurs.

Debut de section - Permalien
Philippe Segretain, président-directeur général de Transdev, vice-président de l'UTP

a observé que, dans ce pays, le rôle des organisations représentatives de salariés dans la gestion des entreprises était bien plus important. Il a exposé la législation néerlandaise qui ne prévoit pas de service minimum mais un contrôle par le juge de la proportionnalité de la grève aux revendications exprimées par les salariés et à la gêne causée aux usagers.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

a souhaité savoir si la mise en oeuvre des dispositions du projet de loi ne soulèverait pas de difficulté pour les transports interurbains de voyageurs.

Debut de section - Permalien
Philippe Segretain, président-directeur général de Transdev, vice-président de l'UTP

a estimé que la distinction entre transports urbains et transports interurbains perdait souvent sa pertinence sur le terrain et ne devait pas être faite dans la loi. Il a toutefois reconnu qu'en cas de grève, il était plus difficile d'assurer un service minimum de transport de voyageurs de ville à ville, en raison de la fréquence moindre de la desserte.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Ries

a jugé légitime de vouloir assurer la prévisibilité du service public de transport, pour éviter aux usagers d'attendre inutilement un train, un bus, un métro, un tramway. Il a toutefois exprimé des doutes sur la pertinence de l'obligation faite aux salariés de déclarer individuellement quarante-huit heures avant le début de la grève leur intention d'y participer. Il a souligné qu'en cas de grève très suivie, il serait difficile d'organiser un service minimum, sauf à prévoir un droit de réquisition.

Debut de section - Permalien
Philippe Segretain, président-directeur général de Transdev, vice-président de l'UTP

a reconnu, pour l'approuver, que le projet de loi ne traitait pas les cas limites comme une grève très suivie ou une interruption immédiate du service à la suite de l'agression d'un conducteur. Il a toutefois précisé que, sauf dans ce dernier cas, il était rare qu'un mouvement de grève soit suivi à 100 %. Enfin, il a observé que le projet de loi s'écartait des solutions retenues en Italie, où la grève est limitée dans les transports publics, et au Royaume Uni, où la complexité et la lourdeur de la procédure de déclenchement des grèves les rendent rares.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

lui ayant demandé des précisons sur les pratiques suivies dans ces deux pays, M. Philippe Segretain a indiqué que l'interdiction de faire grève dans les transports publics aux heures de pointe en Italie n'était pas toujours respectée mais avait permis une évolution des comportements et la mise en place d'un véritable service minimum. Il a observé que la loi anglaise, en exigeant un vote à bulletin secret des salariés très longtemps avant la grève, rendait celle-ci particulièrement difficile à déclencher.

Debut de section - Permalien
Elisabeth Dupont-Kerlan, à l'environnement et à l'énergie, de l'ARF

Puis le groupe de travail a procédé à l'audition de Mme Elisabeth Dupont-Kerlan, déléguée aux transports, à l'environnement et à l'énergie, de l'Association des régions de France (ARF).

Après avoir souligné, à titre liminaire, qu'il n'appartenait pas aux régions de s'immiscer dans les conditions d'organisation du dialogue social au sein des entreprises de transport, Mme Elisabeth Dupont-Kerlan, déléguée aux transports, à l'environnement et à l'énergie, de l'ARF, a indiqué que de nombreuses régions avaient renouvelé, fin 2006, des conventions d'exploitation avec la SNCF, avec le souci constant de prévoir des clauses de prévisibilité du trafic et d'information des usagers, assorties le plus souvent de pénalités en cas de non-respect.

Abordant les dispositions du projet de loi, elle a souhaité une clarification de l'expression « représentants des usagers » figurant au premier paragraphe de l'article 4 relatif au plan de transport adapté. Elle a par ailleurs jugé trop contraignantes les dispositions du même article tendant à prévoir que les horaires et fréquences de chaque niveau de service à assurer soient précisés dans les plans de transport adaptés. Elle s'est ensuite interrogée sur la pérennité des conventions récemment conclues entre les régions et la SNCF au regard du dispositif législatif à venir. S'agissant enfin du remboursement aux usagers des titres de transport, envisagé à l'article 8 du projet de loi, elle a exprimé la crainte que l'entreprise de transport ne refacture ces dépenses à la région organisatrice de transport.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Ries

a mis l'accent sur l'ambiguïté de la rédaction de l'article 8 relatif à l'indemnisation des usagers.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

a considéré qu'il était étonnant de prévoir que l'autorité organisatrice de transport puisse imposer à l'entreprise de transport un remboursement en cas de grève, ce dernier devant simplement découler de l'absence de prestation, comme l'exigent les normes communautaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

a jugé souhaitable que la loi prévoie une définition horaire du service minimum, en déterminant notamment les heures de pointe pendant lesquelles le service doit être assuré.

Il s'est interrogé sur la réalité des mesures d'indemnisation de l'usager en période de grève, relevant que la SNCF se contentait d'offrir un avoir, et non un remboursement, lorsqu'un retard d'au moins une demi-heure lui est imputable.

Debut de section - Permalien
Elisabeth Dupont-Kerlan, à l'environnement et à l'énergie, de l'ARF

En réponse, Mme Elisabeth Dupont-Kerlan a fait observer que les conventions conclues entre les régions et les entreprises de transport ne régissent pas les relations entre ces dernières et les usagers.

M. Jean Desessard a suggéré que le décret prévu à l'article 8 garantisse à l'usager un remboursement de son titre de transport en proportion de la durée de la perturbation.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

a estimé que le législateur pouvait parfaitement définir lui-même un tel principe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

a appelé l'attention des commissaires sur la nécessaire distinction entre remboursement et dédommagement, ce dernier concept impliquant la réparation d'un préjudice moral ou matériel subi du fait de la grève.

Partageant l'analyse de M. Jean-Pierre Godefroy, M. Charles Revet, président, a indiqué que cette dernière hypothèse relevait d'une action juridictionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

En conclusion et en réponse à une question posée par M. Daniel Reiner, Mme Elisabeth Dupont-Kerlan a déclaré que l'ARF n'avait aucunement demandé la présentation d'un projet de loi sur le service minimum dans les transports publics.

Debut de section - Permalien
Jacques Creyssel, directeur général du Medef

Enfin, le groupe de travail a entendu M. Jacques Creyssel, directeur général du Medef, Michel Cornil, président et Bruno Gazeau, délégué général de l'UTP, et Guillaume Ressot, directeur-ajoint aux affaires publiques du Medef.

a d'abord indiqué que le Medef était concerné par le projet de loi à un double titre : d'une part, parce qu'il compte des entreprises de transport parmi ses adhérents ; d'autre part, parce que l'ensemble des chefs d'entreprise ont intérêt à ce que la continuité du service public des transports soit assurée.

Il a ensuite évoqué le champ d'application de la loi et suggéré que soit également posée, à l'avenir, la question de la continuité des transports aérien et maritime, du transport de marchandises, du service postal et de l'accueil des enfants dans les écoles.

Il a néanmoins porté une appréciation globalement favorable sur le texte et salué la concertation qui a présidé à son élaboration. Il s'est félicité que le projet de loi prévoie de généraliser les procédures de prévention des conflits mises en place à la RATP et à la SNCF et qu'il améliore la prévisibilité du trafic pour les usagers. Il a jugé le texte équilibré et souligné l'importance, pour le bon fonctionnement du dispositif, de la déclaration préalable imposée aux salariés quarante-huit heures avant le déclenchement d'un conflit.

Debut de section - Permalien
Michel Cornil, président de l'UTP

a rappelé que son organisation rassemblait les entreprises de transport, au nombre desquelles Transdev, Keolis et Veolia, ainsi que la RATP et la SNCF. Il a indiqué que l'UTP avait participé activement aux travaux de la commission Mandelkern, en 2004, et qu'elle avait ensuite engagé avec plusieurs organisations syndicales une négociation, qui n'a pas abouti, sur la question de la continuité du service public. En 2006, l'UTP a été associée à l'élaboration d'une charte et d'un guide pour la prévisibilité du service public de transport en période de perturbations, à l'initiative du ministre des transports Dominique Perben. L'UTP a enfin été consultée pour l'élaboration de ce projet de loi.

Il a estimé que le texte, dont la cohérence d'ensemble doit être soulignée, comportait de réelles avancées :

- il généralise les procédures de prévention des conflits ; sur ce point, l'UTP est disposée à reprendre la négociation d'une convention de branche, en couplant cette question avec celle de l'exercice du droit syndical dans l'entreprise ;

- lorsqu'un conflit est imminent, il prévoit la mise en oeuvre d'un plan adapté de transport, qui reprend les priorités de desserte fixées par l'autorité organisatrice, et impose aux salariés de déclarer à l'avance leur intention de faire grève ;

- pour faciliter la sortie du conflit, le texte prévoit une possibilité de consultation des salariés au bout de huit jours de grève et il clarifie les règles en vigueur en précisant que les périodes non travaillées ne sont pas payées.

a ensuite évoqué les critiques qui sont formulées au sujet de ce texte :

- en premier lieu, on reproche parfois à ce projet de loi de ne pas instaurer un véritable service minimum dans les transports : bien qu'il ait jugé cette critique fondée, M. Michel Cornil a considéré qu'il était préférable de se doter d'un mécanisme efficace qui limite les conséquences de la grève, plutôt que d'instituer un dispositif plus ambitieux qui serait, en réalité, difficile à appliquer ;

- en second lieu, le texte est parfois attaqué au motif qu'il limiterait le droit de grève, alors qu'il impose, en fait, une simple obligation de déclaration préalable ; pour éviter que le salarié ne soit victime de pressions de la part de son employeur, M. Michel Cornil s'est déclaré prêt à ouvrir une négociation afin que des garanties supplémentaires de confidentialité soient apportées, en prévoyant par exemple l'intervention d'une commission indépendante.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

a demandé des précisions sur l'articulation souhaitable entre accords d'entreprise et accord de branche en matière de prévention des conflits.

Debut de section - Permalien
Michel Cornil, président de l'UTP

a souligné que les syndicats souhaitaient qu'un accord de branche soit négocié, afin de mieux encadrer les négociations menées ensuite au niveau de chaque entreprise. Il a rappelé que le projet de loi prévoyait que l'accord de branche s'appliquerait, de plein droit, dans les entreprises qui n'auraient pas réussi à conclure un accord. Il s'est dit confiant dans la perspective d'aboutir à la signature d'un accord de branche, soulignant que la négociation était déjà très active dans le secteur des transports publics, comme l'illustrent les accords récemment signés dans les domaines de la sécurité ou de la formation professionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

a fait observer que le projet de loi n'imposait pas l'ouverture d'une négociation de branche et qu'il s'agissait d'une simple faculté laissée aux partenaires sociaux. Elle a ensuite demandé s'il était réaliste d'envisager que les négociations aboutissent dans le délai de six mois fixé par la loi.

Debut de section - Permalien
Michel Cornil, président de l'UTP

a répondu qu'il n'avait aucun doute sur le fait que la négociation de branche serait ouverte, quand bien même la loi ne l'imposerait pas. Il a précisé que rien ne s'opposait, formellement, à ce que des négociations soient menées, en parallèle, au niveau de la branche et de l'entreprise, puisque les négociateurs ne sont pas les mêmes, mais qu'il était probable que beaucoup d'entreprises attendent la conclusion de l'accord de branche avant d'ouvrir une négociation d'entreprise, afin de s'inscrire dans le cadre ainsi défini.

Debut de section - Permalien
Bruno Gazeau, délégué général de l'UTP

a ajouté que les entreprises adhérentes de l'UTP étaient favorables à la conclusion d'un accord de branche, qui présente l'avantage d'égaliser les conditions de concurrence.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

a demandé aux représentants du Medef quelle était leur position sur l'éventuelle intervention d'un médiateur en cas de conflit.

Debut de section - Permalien
Michel Cornil, président de l'UTP

a indiqué que l'intervention d'un tiers était fréquente lorsque la grève dépasse une certaine durée. Il s'est déclaré favorable à la présence d'un garant, ou d'un collège qui rassemblerait des représentants des salariés, de l'employeur et des personnalités qualifiées, pour garantir, par exemple, que le vote effectué au bout de huit jours de conflit est sincère, que le procès-verbal des négociations est rendu public ou encore que le comportement de chacune des parties au conflit est loyal.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

a souhaité connaître la position du Medef sur la possibilité d'une consultation des salariés après huit jours de conflit.

Debut de section - Permalien
Michel Cornil, président de l'UTP

a estimé que l'organisation d'une telle consultation risquait d'être perçue comme une provocation par les syndicats et qu'il serait donc plus intéressant de faire intervenir un intermédiaire neutre dans le conflit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

a demandé à M. Jacques Creyssel pourquoi il avait proposé d'étendre le projet de loi à d'autres services publics, en omettant de citer les services publics de l'énergie, des télécommunications ou des hôpitaux. Il a ensuite souhaité savoir quelle était la position de M. Michel Cornil sur l'article 9 du projet de loi, relatif au non-paiement des jours de grève, qui ne fait que confirmer le droit existant d'après les syndicats, et demandé s'il existait des statistiques sur le nombre de jours de grève qui seraient éventuellement rémunérés. Enfin, il a interrogé M. Michel Cornil sur les bénéfices escomptés de ce projet de loi, faisant valoir que les mécanismes de marché devraient, en toute logique, aboutir à la disparition des entreprises mal gérées, où la conflictualité sociale est la plus forte, et à la survie des seules entreprises qui gèrent convenablement leurs ressources humaines.

Debut de section - Permalien
Jacques Creyssel, directeur général du Medef

Sur le premier point, M. Jacques Creyssel a expliqué qu'il avait évoqué les seuls problèmes qui se posent aujourd'hui : la continuité de l'approvisionnement énergétique ou du fonctionnement des services hospitaliers est, de fait, bien assurée. En revanche, des difficultés réelles sont régulièrement constatées dans les transports maritimes, à La Poste ou dans les écoles.

Debut de section - Permalien
Michel Cornil, président de l'UTP

S'agissant de l'article 9 du projet de loi, M. Michel Cornil a indiqué que les jours de grève n'étaient, en principe, pas rémunérés, mais que des arrangements pouvaient être trouvés, en fin de conflit, pour éviter de plonger les salariés dans de graves difficultés financières. Pour justifier son jugement positif sur le projet de loi, il a souligné que le nombre de jours de travail perdus par an et par salarié était, certes, en baisse tendancielle depuis les années quatre-vingt-dix - puisqu'il est passé de 2,5 à 0,7 - mais que les usagers étaient dans le même temps devenus beaucoup plus exigeants. De surcroît, les pouvoirs publics mènent, dans de nombreuses agglomérations, une politique favorable au développement des transports publics, tant pour des raisons environnementales que de qualité de la vie, ce qui impose aux entreprises de réaliser de nouveaux progrès en matière de qualité et de continuité des transports, auxquels l'adoption de ce texte va contribuer.