Avant que la commission n'aborde son ordre du jour, M. Alain Gournac a souhaité effectuer une mise au point sur le communiqué de presse, émis le 26 septembre dernier par la commission des affaires sociales, relatif au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2007, communiqué sur lequel un journaliste l'a interrogé lors des récentes journées parlementaires du groupe de l'union pour un mouvement populaire (UMP) et dont il n'avait alors pas connaissance. Sans vouloir engager de polémique sur le fond, il a vivement regretté que ce texte cite à plusieurs reprises la commission des affaires sociales alors que ni son bureau ni ses commissaires n'avaient été préalablement informés de son contenu, ni même de son existence. Il a souhaité que la commission puisse être associée à la rédaction de ces communiqués à l'avenir.
s'est étonné que le groupe UMP s'émeuve du communiqué de presse qu'il a cosigné avec M. Alain Vasselle, dont le contenu ne fait que reprendre les positions constantes et maintes fois répétées de la commission des affaires sociales sur les problèmes de financement du budget social et de son articulation avec celui de l'Etat, notamment pour ce qui concerne l'utilisation des droits sur le tabac. Il a estimé que la diffusion de ce communiqué entre strictement dans le champ de ses compétences de président de commission et de celles de M. Alain Vasselle, en sa double qualité de président de la Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) et de membre de la commission des comptes de la sécurité sociale. De plus, le texte du communiqué indique clairement qu'ils en sont les auteurs, et non la commission tout entière, ce qui ne serait à l'évidence pas concevable dès lors qu'elle ne s'est pas prononcée. Il a souligné que lui-même et M. Alain Vasselle sont intervenus dans ce cadre pour rappeler les positions développées par la Mecss dans son rapport relatif à la dette sociale, rapport approuvé par la commission, et, plus largement, pour défendre l'indépendance financière de la sécurité sociale et ce, en accord avec le ministre de la santé et des solidarités.
a considéré que le débat qui s'est engagé sur le communiqué de presse incriminé porte davantage sur sa forme que sur son contenu. Si sa reprise par les médias a pu donner l'impression que la commission des affaires sociales est directement à l'origine de ce document, tel n'est évidemment pas le cas, les auteurs du communiqué étant intervenus nommément, en leurs qualités respectives de président de la commission et de président de la Mecss.
a fait distribuer aux commissaires le communiqué de presse contesté et observé que ce texte ne mentionne la commission des affaires sociales que sur deux points précis : en rappelant qu'elle considère que « les finances sociales ne peuvent constituer la variable d'ajustement du budget de l'Etat » et en annonçant qu'elle « ne manquera pas de développer ses analyses et de faire des propositions à l'occasion de l'examen du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale ». Ces deux points ne lui semblent pouvoir être contestés par quiconque au sein de la commission.
a demandé que les commissaires soient systématiquement destinataires des communiqués de presse émis par la commission.
a rappelé que tous les communiqués de presse sont immédiatement disponibles sur le site Internet du Sénat et qu'ils sont aussitôt distribués auprès des groupes politiques. Il s'est toutefois engagé à transmettre aux commissaires, par courrier électronique, tous les communiqués de presse émanant de la commission ou de l'un ou l'autre de ses membres.
La commission a procédé à l'examen du rapport sur la proposition de loi n° 390 (2005-2006), adoptée par l'Assemblée nationale, portant création d'un ordre national des infirmiers, dont Mme Sylvie Desmarescaux est le rapporteur.
a indiqué, à titre liminaire, que l'objet de la proposition de loi est de créer un ordre professionnel pour les 450.000 infirmiers exerçant en France, soit un effectif infiniment supérieur à celui des médecins, pharmaciens, sages-femmes, masseurs-kinésithérapeutes et pédicures-podologues en exercice qui disposent déjà d'une structure ordinale pour leur représentation, la fixation des règles déontologiques et le règlement des contentieux disciplinaires. Cette anomalie est d'autant plus étonnante que le rôle des infirmiers dans le système de santé ne cesse de se renforcer.
a insisté sur le besoin de reconnaissance de la profession d'infirmier et sur la nécessité d'un cadre déontologique mieux adapté aux nouveaux enjeux de qualité et de permanence des soins. De fait, le respect des règles éthiques et des bonnes pratiques professionnelles est loin d'être assuré, les principes déontologiques fixés par les décrets de 1993 n'ayant pas été accompagnés par la création d'une instance de contrôle et de sanction.
La mise en place d'un ordre professionnel constitue une revendication forte des infirmiers libéraux confrontés, plus que leurs confrères exerçant en établissements de santé, aux carences de la profession en matière de discipline interne et de représentativité. Cette revendication s'est traduite, dans le passé, par plusieurs initiatives parlementaires dont aucune n'a abouti à ce jour en raison des réticences d'une partie de la profession : celle-ci comprend une proportion largement majoritaire d'agents publics travaillant dans les hôpitaux et de salariés des établissements de santé privés qui, soutenue par les syndicats, a longtemps considéré comme inutile et coûteuse la création d'une telle instance, dans la mesure où ils disposent déjà d'un cadre disciplinaire défini par leurs statuts. Ces positions de principe ont toutefois évolué, un consensus s'étant progressivement dégagé sur le caractère insuffisant du système institutionnel actuel, les carences présentées par la procédure disciplinaire et la nécessité de mieux reconnaître l'identité et la compétence professionnelle des infirmiers. La proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale le 13 juin 2006 constitue la traduction législative de ce nouveau consensus.
a indiqué que le texte crée un ordre national des infirmiers, chargé des traditionnelles missions ordinales de contrôle de la déontologie et de défense des intérêts de la profession, mais aussi du suivi de la démographie et de l'évaluation des pratiques professionnelles, en coordination avec la Haute Autorité de santé. Il rassemblera, de manière obligatoire, l'ensemble des infirmiers à l'exclusion des infirmiers militaires. Il assurera ses missions par le biais de trois échelons territoriaux - départemental, régional et national - et sera financé par la cotisation de ses membres, dont le montant sera unique quelle que soit leur catégorie professionnelle :
- le conseil départemental sera plus particulièrement chargé de représenter et de défendre la profession dans le département, d'inscrire les professionnels au tableau de l'ordre, de diffuser et d'évaluer les bonnes pratiques, d'organiser des oeuvres d'entraide, de participer au suivi démographique de la profession et d'exercer une mission de conciliation entre les patients et les infirmiers, ainsi qu'entre professionnels ;
- le conseil régional sera placé sous le contrôle du conseil national et exercera sur son territoire les missions générales dévolues à l'ordre. A celles-ci s'ajouteront plusieurs tâches spécifiques, notamment la coordination des différents conseils départementaux situés dans la région, l'étude des projets et des demandes d'avis soumis par l'agence régionale de l'hospitalisation (ARH) et la suspension temporaire du droit d'exercer en cas d'infirmité. Ses décisions pourront faire l'objet d'un recours devant le conseil national de l'ordre. Il comprendra en son sein une chambre disciplinaire de première instance compétente pour les infirmiers libéraux et les fonctionnaires qui y seront déférés par le ministre de la santé, le préfet, le procureur de la République ou le directeur de l'ARH. Pour les salariés du privé, l'employeur sera seulement tenu de prévenir le président du conseil national de toute sanction disciplinaire prononcée en raison d'une faute professionnelle ;
- le conseil national, composé sur un mode identique, sera plus particulièrement chargé d'élaborer le code de déontologie, de veiller à son respect et d'étudier les projets et questions qui lui sont soumis par le ministre de la santé. Il exercera en outre les droits réservés à la partie civile pour les faits portant préjudice à la profession, fixera le montant de la cotisation et en répartira le produit entre les conseils en fonction de leurs besoins. Il sera enfin chargé de gérer les biens de l'ordre et de contrôler la gestion des conseils départementaux et régionaux. Il disposera également d'une chambre disciplinaire nationale d'appel pour les infirmiers exerçant à titre libéral et les agents publics déférés devant les instances ordinales.
En première lecture, l'Assemblée nationale a supprimé la mention explicite de conseils interrégionaux, tout en maintenant la référence à de telles instances pour les infirmiers, ce qui constituera une possibilité utile pour les départements d'outre-mer ; elle a précisé que le président de chaque conseil doit obligatoirement être infirmier ; elle a souhaité qu'aucune catégorie professionnelle ne puisse détenir la majorité des sièges, pour éviter une surreprésentation des fonctionnaires dans les instances ordinales.
s'est déclarée favorable à ces modifications. Revenant sur la disposition de la proposition de loi qui exclut les infirmiers du conseil des professions paramédicales, elle a par ailleurs rappelé que ce conseil n'a jamais vu le jour, même s'il a été créé par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, faute de décrets. Dans la mesure où la quasi-totalité des professions qui devaient y être représentées disposent désormais d'une instance ordinale, elle a proposé la suppression de ce conseil qui n'a plus d'objet.
En conclusion et à la lumière des auditions organisées par la commission, elle s'est déclarée convaincue de l'utilité de créer une instance ordinale, même si des améliorations peuvent être apportées au dispositif, notamment en matière disciplinaire. Ainsi, l'exclusion des salariés du secteur privé du champ de compétence disciplinaire de l'ordre contredit l'objectif de disposer d'une instance compétente pour l'ensemble de la profession. C'est pourquoi, elle a proposé qu'ils y soient au contraire intégrés. Elle a, en outre, souhaité que l'ordre soit informé des sanctions les plus lourdes prises à l'encontre des agents publics.
a indiqué avoir reçu de nombreux courriers d'infirmiers, s'inquiétant ou, au contraire, se félicitant de la création d'un ordre. Il a estimé que cette mesure ne doit pas se justifier en fonction du seul nombre élevé d'infirmiers en exercice. Il s'est interrogé sur la possibilité de rassembler, dans une structure unique, les infirmiers libéraux et les hospitaliers qui n'ont pas les mêmes responsabilités et évoluent dans un environnement médical sensiblement différent. Il a demandé pourquoi la proposition de loi érige le préfet de région, et non le directeur de l'ARH, en arbitre des différends du conseil régional.
s'est déclaré défavorable à la création d'un ordre national des infirmiers, lui préférant la solution retenue par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, qui a créé un conseil des professions paramédicales. Il a rappelé que le Sénat avait, à l'époque, suggéré la création d'un ordre interprofessionnel et a regretté que le conseil n'ait jamais été mis en place depuis lors. Il s'est interrogé sur la nécessité de créer une instance disciplinaire pour une profession dont 85 % de l'effectif sont constitués de fonctionnaires et de salariés déjà soumis à une organisation hiérarchique. Il a estimé anormal d'obliger les professionnels à payer une cotisation pour pouvoir travailler. Il a également considéré que l'échelon départemental de l'ordre est inutile dans la mesure où les dernières lois de décentralisation ont désigné la région comme le niveau territorial compétent en matière de santé. Il a enfin regretté que la proposition de loi favorise la représentation des infirmiers libéraux au sein des instances ordinales.
s'est également interrogée sur la pertinence d'un échelon départemental de l'ordre. Faisant part de son expérience d'administrateur d'un hôpital public, elle a reconnu que la représentation des infirmiers est actuellement trop fragmentée pour être efficace.
a considéré que la proposition de loi répond à une attente forte et légitime des infirmiers d'une meilleure reconnaissance de leur profession. Il a estimé essentiel que les trois groupes professionnels soient représentés équitablement à chaque échelon de l'ordre afin de défendre l'ensemble de la profession au-delà des clivages catégoriels. Il a enfin rappelé l'importance du contrôle des règles déontologiques pour ce type de métier.
a constaté que la proposition de loi traduit la volonté de création d'un ordre portée par la minorité d'infirmiers libéraux depuis plusieurs décennies. Il a reconnu que la profession d'infirmier évolue rapidement et doit faire face à de nouveaux défis : l'explosion de la précarité, l'allongement de la durée de vie et la dépendance croissante qui en résulte, la mise à mal du système de protection sociale et la diminution des effectifs médicaux et paramédicaux. Il a considéré que ces difficultés expliquent que la durée moyenne de la carrière des infirmiers ne soit actuellement que de quinze ans.
Il a estimé que, plus qu'un ordre, le conseil des professions paramédicales et le renforcement du rôle des directions départementales de l'action sanitaire et sociale (Ddass) et des directions régionales de l'action sanitaire et sociale (Drass) auraient pu constituer une réponse au malaise des infirmiers. Il s'est inquiété enfin de l'accélération des transferts de tâches entre médecins et infirmiers, mais également entre infirmiers et aides soignants, en particulier dans les établissements pour personnes âgées dépendantes (Epad).
a émis des réserves sur le dispositif proposé en matière disciplinaire, notamment sur l'interdiction, pour un professionnel, d'exercer en France si une décision identique a été prise à son encontre à l'étranger pour des motifs qui ne seraient pas répréhensibles dans notre pays et sur la suspension du droit de travailler en cas d'infirmité.
a estimé que les infirmiers ont droit, tout autant que les autres professions médicales et paramédicales, à une structure ordinale, au côté des associations et des syndicats existants. Il a considéré, qu'en matière disciplinaire, il est mieux d'être jugé par ses pairs que par les instances judiciaires classiques.
a fait valoir que la création d'un ordre rassurera de nombreux patients, qui pourront saisir l'ordre plus facilement qu'un tribunal de grande instance en cas de difficulté.
En réponse aux intervenants, Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a indiqué qu'un consensus s'est progressivement dégagé chez l'ensemble des infirmiers pour qu'un ordre professionnel voie le jour. Cette instance permettra aux infirmiers français d'être mieux représentés au niveau international : elle a rappelé, à cet égard, que la France n'occupe que la 37e place sur 112 pays à la conférence internationale des infirmiers alors qu'elle compte le plus grand nombre de professionnels.
Elle a indiqué que le préfet de région n'intervient qu'en cas d'impossibilité de fonctionnement du conseil régional et après avis du conseil national de l'ordre.
Elle a fait valoir que le conseil des professions paramédicales n'a jamais été mis en place et que même les orthophonistes et les orthoptistes, qui n'ont pas d'ordre professionnel, ne souhaitent pas appartenir à ce conseil. Elle a considéré, concernant le paiement de la cotisation, que cette obligation, qui pèse également sur les sages-femmes, profession majoritairement salariée, constitue le seul moyen de financer l'ordre.
Elle a indiqué que les trois échelons territoriaux ont chacun leur justification : le conseil départemental gère l'inscription au tableau et les relations interprofessionnelles et avec les patients au plus près du terrain, le conseil régional constitue l'interlocuteur de l'ARH et des instances chargées de la formation professionnelle et le conseil national se positionne comme le lien entre les professionnels et le ministère de la santé.
Elle a rappelé que le taux de syndiqués atteint 4 % chez les infirmiers tandis que 8 % d'entre eux appartiennent à une association professionnelle. Elle a enfin précisé que le préfet peut vérifier le dossier d'un professionnel interdit d'exercice à l'étranger et que la suspension du droit d'exercer s'applique en cas de danger pour les patients.
La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements présentés par le rapporteur.
A l'article premier (création et définition des modalités de fonctionnement de l'ordre national des infirmiers), outre onze amendements rédactionnels, la commission a adopté un amendement visant à supprimer les références au conseil national des professions paramédicales et un amendement ayant pour objet de rendre applicables à l'ordre des infirmiers les dispositions du code de la santé publique relatives aux membres suppléants des conseils départementaux. Elle a également adopté un amendement rattachant les salariés du privé à la compétence disciplinaire de l'ordre et un amendement visant à ce que l'ordre soit informé des sanctions lourdes prises à l'encontre des fonctionnaires.
A l'article 2 (conditions d'exercice de la profession d'infirmier), elle a adopté un amendement visant à supprimer les références relatives au conseil national des professions paramédicales.
Elle a adopté l'article 3 (dispositions de coordination concernant les conditions d'inscription au tableau de l'ordre des infirmiers) sans modification.
A l'article 4 (exclusion des infirmiers du champ de compétences du conseil réunissant certains professionnels paramédicaux libéraux), elle a adopté un amendement ayant pour objet de supprimer le conseil national des professions paramédicales.
La commission a adopté l'article 5 (dispositions de coordination concernant la suspension du droit d'exercer et les conventions passées entre les entreprises et les infirmiers) sans modification.
A l'article 6 (dispositions de coordination concernant le contentieux du contrôle technique de la sécurité sociale), elle a adopté un amendement visant d'une part, à prendre en compte, dans les dispositions du code de la sécurité sociale relatives au contentieux technique des professions paramédicales, la création d'un ordre national des infirmiers et la suppression du conseil national des professions paramédicales, d'autre part, à permettre à un magistrat de l'ordre administratif qui ne serait plus en activité de présider la section des assurances sociales de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes et des infirmiers.
La commission a ensuite adopté la proposition de loi ainsi amendée.
Puis la commission a désigné Mme Isabelle Debré rapporteur sur le projet de loi n° 3175 (AN - XIIe législature) pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié.