Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du 14 décembre 2011 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • RTE
  • électricité
  • électrique

La réunion

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Debut de section - Permalien
Dominique Maillard, président du directoire de RTE

Mon intervention portera à titre principal sur le passage de la période hivernale pour l'approvisionnement en électricité de la France, mais je voudrais au préalable rappeler que RTE a désormais une dizaine d'années d'existence, dont six ans en tant que personne morale distincte d'EDF.

L'existence de RTE résulte en effet de l'ouverture progressive des marchés et de la législation européenne, qui a exigé que les réseaux de transport d'électricité soient mis à la disposition de l'ensemble des opérateurs. Un débat, vous vous en souvenez, a eu lieu sur l'éventuelle séparation patrimoniale entre l'opérateur historique et le gestionnaire du réseau. La France a obtenu la possibilité de conserver ce qu'on appelle un « opérateur de transport indépendant », sans séparation patrimoniale. Par exemple, le programme d'investissement est fixé par le régulateur, le président est nommé par le Gouvernement et un déontologue rapporte directement au régulateur.

RTE a la charge du réseau à haute et très haute tension, qui comprend 100 000 kilomètres de lignes qui se répartissent ainsi : un quart à 400 000 volts, un quart à 225 000 volts et la moitié à 90 000 et 63 000 volts.

RTE a également la responsabilité de l'exploitation du système et du pilotage entre l'offre et la demande. Il dispose pour cela d'un centre national d'exploitation à Saint-Denis et de sept centres régionaux. L'équilibre est également exercé au niveau international grâce aux interconnexions avec les autres pays européens, ainsi qu'avec l'Afrique du Nord et, depuis peu, la Turquie.

Les investissements sont de l'ordre de 1,2 milliard d'euros par an : un tiers pour le renouvellement du réseau, un tiers pour le développement et les interconnexions, un tiers pour le renforcement du réseau.

RTE concourt également à la réflexion prévisionnelle. La programmation prévisionnelle des investissements (PPI) permet au Gouvernement de lancer, avec RTE, des appels d'offres pour combler le déséquilibre entre l'offre et la demande. À plus court terme, RTE réalise, deux fois par an, une analyse prévisionnelle de l'équilibre électrique.

S'agissant de l'approvisionnement en électricité cet hiver, on constate tout d'abord que, malgré un climat récessif, la consommation d'électricité, notamment en pointe, croît encore de 1 % par rapport à l'année dernière. Cette hausse est surtout due à la consommation des ménages, la grande industrie ayant tendance pour sa part à réduire sa demande. La pointe cette année devrait donc dépasser de 1 000 MW le niveau de celle de l'année passée. Ainsi, on estime que pour l'hiver 2011-2012, une baisse de la température de 1 degré pourrait entraîner une hausse de la consommation d'électricité de 2 300 MW à la pointe de consommation du soir.

Concernant la disponibilité prévisionnelle du parc de production français, l'hiver 2011-2012 peut se diviser en deux périodes. Jusqu'à fin décembre, la puissance disponible est inférieure à l'année 2010. La fin d'année devrait toutefois se passer sans difficulté et des marges supplémentaires seront de plus disponibles de janvier à mars. Ces éléments proviennent d'une analyse de l'ensemble des scénarios possibles ainsi que d'hypothèses sur la disponibilité des centrales. Les modèles prévisionnels ont montré que la France avait 99 % de chance d'avoir un besoin d'importation d'électricité inférieur à 3 500 MW lors de la pointe de consommation du soir de la première semaine de décembre ; a posteriori, on constate que la météorologie plutôt clémente a même permis à la France d'être exportatrice. Elle le sera également au mois de janvier.

Au-delà de ces valeurs moyennes, il faut vérifier que le réseau résiste à des chocs plus temporaires de température. Des tests ont montré par exemple que, début décembre, la France pouvait dans certaines circonstances devoir importer jusqu'à 7 000 MW. Il faut donc vérifier d'une part que les réseaux permettent d'acheminer cette puissance à travers les frontières, d'autre part que les capacités de production existent dans les pays voisins.

S'agissant du dimensionnement des réseaux, les équipements d'interconnexion existants permettent d'importer la quantité d'électricité nécessaire, même si les infrastructures de transport allemandes, tournées vers la consommation intérieure, seront moins disponibles pour acheminer de l'électricité vers les autres pays européens.

S'agissant des capacités de production, l'Allemagne, qui a arrêté huit réacteurs nucléaires, pourrait être importatrice cette année alors qu'elle exporte habituellement vers la France lorsque notre pays en a besoin. Certains pays proches de la France ont toutefois de bonnes capacités de production : les Pays-Bas, la Suisse, l'Italie, l'Espagne. Nous estimons donc que, en cas de période de froid, les capacités de production nécessaires seront disponibles.

Il faut toutefois considérer, outre l'équilibre global entre l'offre et la demande, les difficultés liées à la configuration du réseau de transport en France.

Deux régions sont particulièrement fragiles : la Bretagne et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA). Des actions ont été décidées : la mise en place d'un réseau, souterrain pour l'essentiel, à 225 000 volts dans ces deux régions garantira une solution de secours en cas de rupture de la ligne principale existante. Un nouveau moyen de production sera également installé dans la zone de Brest et des programmes de maîtrise de la demande complèteront le dispositif

En Allemagne, l'arrêt de huit tranches nucléaires, dont six sont situées dans la zone sud du pays fortement consommatrices, modifie les flux de transport d'électricité. Au même moment, la production éolienne introduit une capacité de production importante, mais intermittente et située plutôt dans le nord du pays. Les conséquences s'en font sentir sur les réseaux limitrophes, dont celui de l'est de la France qui deviendra tantôt exportateur vers les zones de consommation allemandes, tantôt importateur de la production éolienne de ce pays. Il est nécessaire de prendre en compte des situations plus complexes et variables que celles que nous connaissions précédemment.

Nous n'avons pas pu anticiper tous nos investissements en raison du caractère soudain de la décision allemande. Plus que les menaces portant sur l'équilibre entre l'offre et la demande, nous redoutons à court terme les effets en cascade ou les chutes de tension.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Pouvez-vous nous indiquer quel est le niveau des pertes en ligne ?

Debut de section - Permalien
Dominique Maillard, président du directoire de RTE

Les pertes en ligne sont de 7,5 % environ, dont 2 % pour le réseau de transport et le reste pour le réseau de distribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Risque-t-on, comme en Allemagne, de devoir déconnecter des éoliennes en raison d'un dimensionnement insuffisant des réseaux de transport ? La loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, dite loi NOME, a prévu une participation du gestionnaire du réseau public de transport au financement de la mise en souterrain des lignes, lorsque la collectivité territoriale en fait la demande ; quel sera l'impact de cette disposition pour RTE et dans quelles conditions se déroulent, actuellement, les travaux d'enfouissement des lignes en milieu urbain ? Enfin, outre la création de nouvelles capacités de production, l'effacement est aussi une réponse essentielle pour le franchissement de la pointe de consommation électrique : à quels mécanismes RTE participe-t-il en attendant la mise en oeuvre, vers 2015-2016, d'un marché de capacité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

S'agissant du second point, on constate sur le terrain que l'enfouissement lui-même pose parfois des difficultés en termes d'acceptabilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Quel est le taux de disponibilité des centrales nucléaires françaises ? On parle de 80 %, alors que d'autres pays atteignent 95 % environ. À quels prix la France exporte-t-elle ou importe-t-elle de l'électricité ? Enfin, pourquoi avoir choisi, en Bretagne, un site aussi excentré que Brest par rapport aux réseaux de transport pour installer un nouveau moyen de production d'électricité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Avez-vous anticipé l'évolution possible des échanges sur les deux ou trois ans qui viennent ? Quelle part en volume, dans vos échanges, de contrats en long terme ou de contrats à court terme ? Où en est le projet de liaison électrique entre la France et l'Espagne ? Quel est le coût du raccordement des énergies renouvelables par rapport à vos investissements et quelles sont les perspectives de stockage de l'électricité provenant de ce type d'énergies ? Enfin, où achetez-vous de l'électricité pour compenser les pertes en ligne, et à quel coût?

Debut de section - Permalien
Dominique Maillard, président du directoire de RTE

Une forte production d'électricité d'origine éolienne, en Allemagne mais aussi en Espagne, peut mener à des mesures imposant une réduction de la production : il s'agit d'éviter la saturation des réseaux, mais aussi de limiter la variabilité à très court terme de la puissance d'électricité injectée afin que les moyens de production traditionnels aient le temps de prendre le relais lorsque le vent s'apaise. Les opérateurs d'éoliennes savent que cela risque de devenir nécessaire également en France.

Le stockage d'énergie serait une réponse au problème. Le stockage dans des bassins d'eau dénivelés apporte une première solution dans certaines régions. Le stockage adiabatique, par compression de l'air, recourrait à des réservoirs souterrains, mais ils pourraient entrer en concurrence avec les projets de stockage de CO2 qui utiliseraient les mêmes emplacements. On envisage aussi d'utiliser les batteries des véhicules électriques immobilisés dans les garages la plus grande partie du temps, comme moyen de stockage décentralisé.

Toutefois, c'est aussi et en premier lieu par le renforcement des réseaux à l'échelle européenne que passe la gestion de l'intermittence, afin d'acheminer l'électricité vers les régions où elle peut être consommée. La croissance des énergies renouvelables suppose le développement des réseaux : c'est ainsi que le Bundestag, en votant la sortie du nucléaire, a également adopté une loi déclarant d'utilité publique des projets de construction de 3 500 kilomètres de lignes.

S'agissant de l'enfouissement, un arrêté doit fixer le barème de participation de RTE aux travaux de mise en souterrain des lignes existantes. Nous disposons déjà d'un recensement des sites sur lesquels une demande a été formulée. Si l'ouvrage est ancien, la participation de RTE sera naturellement plus importante puisque des travaux de remplacement ont vocation à survenir de toute manière.

J'ai remis au Gouvernement un rapport sur la mise en place du marché de capacités. Je rappelle que chaque fournisseur doit déjà mettre sur le réseau une quantité d'énergie, et non de puissance, équivalente à celle que consomment ses clients ; un mécanisme d'ajustement conduit RTE, en fonction des écarts constatés entre les prévisions et les réalisations, à mobiliser des moyens pour rémunérer les fournisseurs qui produisent plus que leur part, tout en imputant les coûts sur les fournisseurs qui n'atteignent pas leurs objectifs. C'est un mécanisme proche de celui-là qui devrait être mis en place pour la puissance électrique sur le marché de capacités, qui devra garantir que le réseau dispose d'une puissance suffisante pour franchir les pics de consommation ; fourniture de capacité et effacement de consommation, qui concourent tous deux à l'équilibre entre l'offre et la demande, seront traités à égalité en période de pointe, comme l'a demandé le rapport de MM. Serge Poignant et Bruno Sido sur la maîtrise de la pointe électrique. Pour amorcer le dispositif, des appels d'offres seront organisés ; certains contrats de cogénération qui arrivent à échéance pourront y accéder en attendant la mise en place du marché de capacités.

Le taux de disponibilité des centrales a diminué jusqu'à 70 % il y a deux ans, mais des efforts d'investissement et de meilleur échelonnement des opérations de maintenance ont permis de le redresser par la suite, au point que l'ensemble des centrales ont pu fonctionner simultanément en janvier 2011 ! L'accent est également mis sur l'amélioration de la disponibilité des centrales thermiques, essentielle en période hivernale. Il est toutefois de plus en plus difficile de planifier les maintenances sur des périodes de temps réduites en demi-saison.

Les importations d'électricité sur notre territoire, Jean-Claude Lenoir, ne sont pas nécessairement le fait de RTE. Des industriels négocient des contrats sur le marché, en achetant au moins cher. Les variations du prix de l'électricité, du reste, sont particulièrement fortes : le kilowattheure peut atteindre 3 000 euros, quand il est rare, et redescendre jusque des valeurs négatives, quand l'électricité est surabondante et que le producteur doit alors payer pour produire. Cependant, grâce au couplage des marchés avec nos voisins - effectif avec l'Allemagne et le Benelux -, nous parvenons à nous approcher, hors extrême tension, à un prix très proche de celui du marché, d'environ 60 euros le kilowattheure.

S'agissant de l'arbitrage entre l'installation d'une nouvelle centrale ou d'une nouvelle ligne, la loi nous oblige à choisir celle des deux solutions qui est la plus efficace sur le plan économique. Nous nous efforçons de choisir la meilleure localisation, sans bien sûr maîtriser l'ensemble du processus : nous avions par exemple opté pour une centrale à Ploufragan, en Bretagne, mais l'opérateur n'a pas obtenu les autorisations nécessaires, d'où l'autre choix possible, celui de Brest, avec certaines conséquences, vous l'avez dit.

La financiarisation ne me paraît pas, jusqu'à présent, nuire au marché de l'électricité : on y trouve bien tous les types de contrats, pour couvrir tous types de risques, mais ce marché reste peu spéculatif, car, pour l'essentiel, il est animé par des opérateurs d'électricité. Nous y sommes présents, pour couvrir nos risques à moyen terme ; nous avons ainsi acheté 90 % des pertes estimées pour l'an prochain, et déjà la moitié des pertes estimées pour 2013.

Quelle part les énergies renouvelables représentent-elles de nos investissements ? Sachant que le raccordement est à la charge de l'investisseur, nous prévoyons, pour l'éolien terrestre, d'investir 1 milliard d'euros en dix ans, soit 8 % de nos investissements, ceci pour une production de 19 000 mégawattheures. Nous comptons investir autant dans l'éolien off shore, mais pour une production trois fois moindre, de 6 000 mégawattheures.

Enfin, sur la liaison France-Espagne, nous avons obtenu que les études d'impact environnemental ne retardent pas le commencement des travaux. Le tracé choisi pour cette liaison souterraine à courant continu suit celui de la ligne ferroviaire à grande vitesse et les travaux débuteront l'an prochain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Merceron

Dans quelle mesure les réseaux intelligents vont-ils soulager les réseaux actuels pendant les pics de consommation ? Quelle incidence l'éolien off shore aura-t-il sur l'approvisionnement de la Bretagne et des Pays de la Loire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

L'Europe a-t-elle indiqué des limites dans la production d'électricité par éolienne, compte tenu des variations de production propres à cette technique, ainsi que de sa fragilité ?

Avez-vous une idée, ensuite, du coût global que représentent les mesures liées à la directive européenne prônant une concurrence « libre et non faussée » ? Ne constate-t-on pas des coûts supplémentaires, par rapport à la situation antérieure ?

Enfin, ne craignez-vous pas à terme des conséquences négatives sur la production d'électricité de la financiarisation des marchés de l'électricité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Dès lors que l'électricité ne se stocke pas et que nos réseaux sont interconnectés, nous ne pouvons faire l'économie d'une vision européenne de l'approvisionnement. Dans ces conditions, comment RTE travaille-t-il avec ses homologues européens ? La concertation est-elle suffisante ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Je me demandais, à propos de la semaine 48, pourquoi « la bonne surprise » climatique s'était traduite, pour nos voisins, par un besoin supplémentaire d'importer notre électricité, comme s'ils n'avaient pas bénéficié eux aussi du « redoux » : vous m'avez apporté une partie de la réponse, en rappelant que désormais l'électricité s'achète sur le marché au meilleur prix.

Dans quelle mesure anticipez-vous, dans les équipements de réseau, la progression certaine des énergies alternatives, dont la géographie sera différente de celle des circuits de production traditionnels ?

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Il ne faut pas perdre de vue que le tout nucléaire, choisi au nom de l'indépendance nationale, a grandement facilité le tout électrique, que vous reconnaissez comme étant la source principale de nos besoins actuels d'importation, ce qui contrarie notre stratégie d'indépendance nationale...

Dès lors que les énergies renouvelables peuvent être produites à petite échelle, ce que nous constatons dans bien des localités, comment anticipez-vous les adaptations nécessaires du réseau, pour que cette production électrique prenne la place qui doit lui revenir ? Quel impact sur le coût de l'électricité auront les investissements à moyen terme envisagés sur les réseaux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

Que représente la part du chauffage électrique ? Je constate, ensuite, que nos centrales sont sous-utilisées : dans quelle mesure peut-on s'inspirer de la formule bien connue d'une marque de piles, qui ne s'usent que lorsque l'on s'en sert afin de stocker l'énergie ? Enfin, du producteur au consommateur, comment se coordonne l'ensemble du système et peut-on imaginer des unités de production de proximité afin d'éviter la multiplication des réseaux de transport à travers nos campagnes ?

Debut de section - Permalien
Dominique Maillard, président du directoire de RTE

Les réseaux intelligents - que je préfère nommer réseaux « plus intelligents », car ceux d'aujourd'hui ne sont pas dénués d'intelligence... - auront des conséquences positives, en particulier pour écrêter les pics de consommation.

L'éolien off shore est nécessairement plus coûteux en terme d'installation, puisque nous devons créer le raccordement de toutes pièces, alors que l'éolien terrestre bénéficie du maillage existant. La différence est importante : le coût de raccordement est triple. Ensuite, nous devons tenir compte de nouvelles contraintes, y compris environnementales, et apprendre à travailler avec de nouveaux interlocuteurs, comme les pécheurs, par exemple, qui craignent pour leur ressource halieutique.

Evelyne Didier, l'Europe n'a prévu aucune limite à la production d'électricité par l'éolien, elle lui donne même plutôt la priorité, comme aux autres énergies renouvelables. Cependant, ce principe de priorité s'applique pour autant que la sécurité du système est assurée : c'est grâce à cette incise que nous mettons en avant l'impératif de préservation du réseau, seul garant de la sécurité de l'approvisionnement.

Il m'est difficile de répondre à votre question sur le coût de l'ouverture du marché à la concurrence : effectivement, la création de plusieurs entités entraîne des dépenses nouvelles, par rapport à la situation de monopole, mais la concurrence s'accompagne d'une certaine émulation, qui fait baisser les coûts et améliore le service. Faut-il craindre la financiarisation ? Je ne le crois pas pour le moment, même si nous sommes très vigilants, et il ne faut pas exclure non plus des procédés malhonnêtes comme on l'a vu avec les « carrousels à TVA ».

La coordination avec les autres opérateurs européens, ensuite, est satisfaisante. Elle est ancienne, puisque la première organisation européenne liée à l'électricité date de 1951, avant la communauté européenne du charbon et de l'acier. Il y a encore des progrès à faire puisque certaines autorités refusent parfois de communiquer des informations, mais c'est, dans certains cas, parce qu'elles n'en disposent pas.

Jean-Jacques Mirassou, nous anticipons l'évolution des besoins et, dans la sélection des sites de production, qui relève d'un ensemble de critères, nous portons une grande attention aux facilités de raccordement.

Laurence Rossignol, je relève avec vous que le tout électrique, en nourrissant notre besoin d'importer, contredit notre choix d'indépendance énergétique, mais je sais aussi que les pays qui ont fait d'autres choix stratégiques que le nucléaire rencontrent d'autres problèmes : ainsi l'Allemagne et sa dépendance au gaz naturel russe. De fait, la France compte pour la moitié des besoins supplémentaires européens d'électricité en cas de pic : un degré de moins entraîne un besoin supplémentaire de 5 000 mégawatts sur le continent, dont 2 300 en France.

Le coût du transport représente 10 % du coût de l'électricité. Les tarifs, ensuite, devraient augmenter de 4 % par an dans la prochaine quadriennale, soit environ deux points de plus que l'inflation.

La part du chauffage électrique, Charles Revet, compte surtout en cas de pic de la consommation : on l'estime alors à un tiers. Le stockage est théoriquement possible sur des batteries, mais cela pose des problèmes techniques, aussi bien que d'acheminement. Enfin, je vous confirme que la coordination existe entre les différents opérateurs, nous y participons aussi bien en amont, qu'en aval.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Comment évolue la consommation électrique de la période d'été, en particulier avec le recours de plus en plus fréquente à la climatisation ?

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Dans quelle mesure les compteurs intelligents permettent-ils de participer à l'effacement ? Pensez-vous que nous ayons pris du retard technologique pour le transport de l'électricité produite par des techniques alternatives ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bailly

Croyez-vous, comme on l'entend parfois, que la consommation d'électricité va diminuer dans les années à venir ? Ensuite, comment expliquez-vous que la production électrique dans les fermes d'élevage rencontre aussi peu de succès : est-ce parce que les investissements nécessaires sont trop importants, ou bien parce que l'électricité est rachetée à trop bas prix ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Filleul

Il est bien connu que le tarif de l'électricité est plus faible en France que chez nos voisins : où en sommes-nous et comment expliquez-vous ce phénomène, alors que le marché est unifié ? Ensuite, peut-on imaginer qu'une collectivité locale, une commune en particulier, puisse produire elle-même l'électricité dont elle a besoin ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

L'excellent rapport de l'Office parlementaire des choix scientifiques et techniques sur « Les effets sur la santé et l'environnement des champs électromagnétiques produits par les lignes à haute et très haute tension » ayant recommandé de ne plus construire d'école ni d'hôpitaux sous de telles lignes électriques, ne pensez-vous pas qu'il est prioritaire d'enfouir les lignes existantes qui passent au-dessus de tels équipements publics ? Je connais bien un cas particulier, d'une ligne à haute tension ancienne de plus de 50 ans qui passe au-dessus d'une école, qu'il faudrait enfouir mais RTE refuse de s'engager à plus du quart de la dépense. La santé publique, à tout le moins le principe de précaution, n'exigent-ils pas que votre établissement public s'engage davantage ?

Debut de section - Permalien
Dominique Maillard, président du directoire de RTE

La consommation électrique augmente effectivement l'été, Alain Fouché, mais le pic y est bien moindre que dans des pays comme l'Espagne ou le Japon : un degré supplémentaire représente environ 500 mégawatts et le pic d'été atteint 60 000 mégawatts, contre 97 000 l'hiver. Le pic estival pose cependant des problèmes au réseau, du fait que la géographie en est différente aussi bien pour la consommation que pour la production.

Ronan Dantec, la réponse à votre question sur le lien entre les compteurs dits intelligents et l'effacement est entre les mains d'ERDF et, je n'ai guère d'éléments pour y répondre. En revanche, nous suivons de près et nous encourageons les agrégateurs d'effacement, qui exercent un nouveau métier, fort utile. Avons-nous, ensuite, pris un retard irrattrapable sur le transport des énergies alternatives ? Je ne le crois pas, car nous sommes présents sur le secteur depuis longtemps et nous intégrons à nos projets les techniques les plus contemporaines. En région Paca, par exemple, nous enfouissons sur 100 kilomètres une liaison de 220 000 volts, c'est un record. Cependant, il est vrai que nous ne sommes pas présents sur l'ultra-haute tension, au-delà de 800 000 volts, comme le sont le Canada, l'Inde ou la Chine, mais nous coopérons avec ces pays dans le cadre de leurs projets sur ce segment bien particulier.

Je ne crois pas, Gérard Bailly, que la consommation électrique diminuera dans les années à venir, mais plutôt que sa progression va ralentir, alors qu'elle a été au moins du double de celle du PIB depuis vingt ans. Je pense aussi que les pics de consommation vont devenir moins élevés. Les engagements du Grenelle, du reste, visent à diminuer les rejets de gaz à effet de serre, pas notre consommation d'électricité. Je n'ai guère d'éléments à vous apporter sur le faible succès des biogaz, les réponses sont plutôt à rechercher du côté des producteurs d'électricité.

Si les comparaisons de prix sont difficiles à établir en raison des différences de réglementations, Jean-Jacques Filleul, il est vrai que le tarif de l'électricité est plus avantageux en France pour les ménages, que chez nos voisins. Cependant, cet écart devrait se réduire dans les prochaines années, par une augmentation des tarifs pratiqués chez nous. Le coût du transport n'est pas le facteur principal : il est estimé à 8,5 euros par kilowattheure, c'est moins que la contribution au service public de l'électricité (CSPE).

Ensuite, rien n'empêche une collectivité de produire son électricité. Certaines s'y sont lancées et ne le regrettent pas. Cependant, il faut que le système retenu soit viable économiquement et qu'il respecte toutes les normes environnementales.

Philippe Kaltenbach, nous suivons de très près toutes les études relatives à l'incidence des champs électromagnétiques sur la santé humaine : RTE s'est engagé de longue date à mettre à disposition toutes les informations qu'il détient, nous avons une convention avec l'association des maires de France pour effectuer les mesures que les communes demandent et nous considérons l'information de nos concitoyens comme étant de notre devoir. Cependant, les mesures effectuées démontrent que les champs électromagnétiques demeurent plus faibles à proximité des lignes à haute tension, en extérieur, qu'à l'intérieur même des habitations. Ensuite, la nocivité des installations électriques pour la santé humaine n'a pas été démontrée : il y a bien une corrélation entre certaines maladies infantiles et la proximité d'une ligne à haute tension, mais l'explication causale n'a pas été trouvée de l'effet des champs électromagnétiques sur le métabolisme humain. Pour les installations existantes, il n'y a pas d'autres règles particulières que celles de l'article 8 de la loi NOME, avec son barème pour la participation financière de RTE, à hauteur de ce que vous indiquez : nous appliquons la loi. Enfin, l'enfouissement des lignes ne diminue pas l'intensité du champ électromagnétique et répond plutôt à des considérations esthétiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Ce que les élus et les populations demandent, ce n'est certainement pas d'enfouir les lignes à haute tension sous les écoles ou les hôpitaux, mais de les en détourner : il n'est pas question ici d'esthétique, mais bien de santé humaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Les chercheurs ont démontré une corrélation entre la leucémie chez l'enfant et la présence de lignes à haute tension, mais l'explication causale manque effectivement : c'est que cette pathologie est causée par un ensemble de facteurs, et pas seulement par un seul. Ensuite, la méthode retenue pour l'enfouissement des câbles électriques a une incidence sur l'intensité du champ électromagnétique.

Quoiqu'il en soit, je vous remercie, Monsieur le Président, pour toutes les informations que vous nous avez apportées.

- Présidence commune de M. Daniel Raoul, président et M. Simon Sutour, président de la commission des affaires européennes -

Enfin, la commission procède, lors d'une réunion conjointe avec la commission des affaires européennes, à l'audition de M. Jean Leonetti, ministre auprès du ministre d'État, ministre des Affaires étrangères et européennes, chargé des Affaires européennes, sur les résultats du Conseil européen du 9 décembre 2011.

Le compte rendu de cette réunion sera publié ultérieurement.