La commission examine l'amendement n° 1 de Mme Leila Aïchi au texte n° 263 (2011-2012), adopté par la commission pour le projet de loi n° 251 (2011-2012) fixant au 11 novembre la commémoration de tous les morts pour la France.
Cet amendement a pour vocation d'instaurer une journée commémorative des « morts pour la paix et la liberté d'informer » en s'attachant tout particulièrement aux personnels des organisations humanitaires, aux défenseurs des droits humains, et aux journalistes, à l'instar de ce qui existe pour les militaires. Il nous semble pertinent d'avoir une journée commémorative pour honorer les personnes qui exercent dans le cadre de cette activité et qui ont perdu la vie pour la défense de leurs idéaux de paix ou pour la liberté d'informer. Tel est le sens de cet amendement soutenu par le groupe écologiste.
Il s'agit d'un article additionnel après l'article 3 qui ne vient pas en contradiction avec le texte de la commission.
Nous sommes nombreux à partager votre point de vue et à reconnaître le travail des organisations humanitaires, des défenseurs des droits humains et des journalistes, notamment des correspondants de guerre, qui agissent dans des zones souvent troublées et souvent au péril de leur vie.
La question de l'instauration d'une journée commémorative des « morts pour la paix et la liberté d'informer » peut naturellement être posée. Vous parlez de « gagner la paix », ce qui est un véritable objectif.
Il faudrait d'ailleurs y inclure d'autres catégories, et notamment les militaires qui agissent dans le cadre des opérations de maintien de la paix au titre de la Charte des Nations unies et ceux qui prêtent assistance, parfois également au péril de leur vie aux organisations humanitaires ou aux journalistes à qui, ils permettent, en les protégeant ou en les récupérant, l'exercice de leur mission humanitaire ou de leur liberté d'informer.
La délimitation amène également à s'interroger sur la nature des conflits armés : ceux dans lesquels la France est partie prenante ? Tous les conflits armés ? y compris les guerres civiles ? Quid de la situation des humanitaires et des journalistes assassinés par des groupes armés, parfois mafieux, dans le cadre de leur mission alors qu'il n'y a pas de conflits armés déclarés ?
Vous le voyez, la délimitation même des personnes concernées mériterait un examen plus approfondi.
Je souhaiterais également, avant de s'engager dans une telle démarche, que nous puissions recueillir l'opinion des ONG et des organisations professionnelles de journalistes, même s'ils partagent, je le pense, votre point de vue.
J'ajoute que, jusqu'à maintenant, la création de Journées commémoratives nationales a plutôt concerné des évènements, telle notre Fête Nationale en 1880 pour commémorer la Fête de la fédération du 14 juillet 1790 ou l'abolition de l'esclavage, mais aussi le plus souvent des évènements liés à des conflits dans lesquels la France est partie prenante.
Enfin, si nous devions honorer par des Journées commémoratives le dévouement de certains de nos concitoyens, parfois jusqu'au sacrifice ultime, dans des missions détachées du contexte des conflits armés, il faudrait sérieusement examiner le cas des sapeurs-pompiers, des personnels de la sécurité civile, comme des policiers et des gendarmes, professions éprouvées, au service de nos concitoyens.
Par sa nouveauté et sa portée, la démarche me paraît relever davantage d'une proposition de loi que d'un amendement, afin que celle-ci puisse être examinée de façon complète par la commission sénatoriale compétente et que celle-ci en évalue tant les enjeux et la portée, que les contours.
J'ajoute que je souhaiterais préserver la cohérence du projet de loi qui est l'hommage rendu aux morts pour la France, alors que l'amendement instaure une journée commémorative, un peu en dehors du contexte de la loi.
C'est pourquoi, chère Collègue, tout en comprenant le sens et la générosité de votre engagement, je vous demande de retirer votre amendement.
A défaut, pour préserver la cohérence du projet de loi dans la rédaction proposée par la commission, je serai au regret de donner un avis défavorable.
L'amendement présente un intérêt, mais il ne peut pas être voté en l'état, car nous recherchons sur ce texte un accord avec l'Assemblée nationale. Il me semblerait plus judicieux qu'il soit déposé sous forme d'une proposition de loi. Je me range à l'argumentation du rapporteur. Il serait très utile de réaliser des auditions et par un travail d'approfondissement en commission de réunir le consensus le plus large au sein de la commission. C'est pourquoi, je vous demande de bien vouloir le retirer.
Je précise que nous nous sommes entretenus avec les organisations de journalistes et les organisations humanitaires. J'accepte le principe de la rédaction d'une proposition de loi et de retirer l'amendement fort de l'engagement du président de la commission.
A partir de cet amendement, je propose que vous le transformiez en proposition de loi en travaillant avec certains membres de la commission que nous désignerons.
L'amendement est retiré.
La commission procède à un échange de vues avec une délégation de parlementaires de la commission des affaires étrangères du Parlement norvégien conduite par sa présidente, Mme Ine Eriksen Søreide.
Nous avons le plaisir d'accueillir nos collègues de la commission des affaires étrangères et de la défense du Parlement norvégien. Cette commission a, comme la nôtre, compétence pour toutes les questions relatives à la politique étrangère, à la défense, à l'aide au développement, aux intérêts de la Norvège au Svalbard (Spitzberg) et dans les autres régions polaires ainsi que, plus globalement, aux traités et accords internationaux ainsi qu'aux relations avec les Etats et organisations internationales. Je me réjouis de l'initiative que vous avez prise de cette visite en France et de cette occasion de débat entre nous.
Comme vous, Madame la présidente, j'ai l'avantage de présider une commission dont les domaines de compétences sont relativement consensuels entre la majorité et l'opposition, puisque tant la défense que les affaires étrangères engagent nos intérêts nationaux. Nous avons d'ailleurs institué un principe de « binômes » majorité-opposition pour l'ensemble de nos rapports et de nos missions.
Nous avons de nombreux sujets d'intérêt en commun que je vous propose d'aborder de manière très libre. Avec votre ambassade, nous avons retenu quelques sujets qui ne sont naturellement pas exclusifs :
- la crise financière et l'impact qu'elle peut avoir sur les processus de réforme de nos forces armées, et sur la nécessaire mutualisation de nos moyens en Europe ou dans le cadre de l'OTAN. Je sais du reste que vous êtes en train d'élaborer comme nous un Livre blanc sur la défense. Nous travaillons, pour notre part, à une revue à mi-parcours de notre Livre blanc de 2008 et nous venons de publier un rapport d'information sur l'évolution du contexte stratégique. Nous mettons en place, jusqu'au mois de juin, des groupes de travail sur les autres aspects du Livre blanc qui ont retenu notre attention ;
- le Grand Nord est aussi un sujet particulièrement intéressant, y compris pour la France qui participe au Conseil arctique, et pour laquelle cette zone est d'une importance géostratégique majeure pour l'avenir ;
- la situation en Russie et les relations avec ce pays dont vous êtes frontaliers pourront également être abordées. Notre collègue Yves Pozzo di Borgo a publié un rapport d'information récemment sur cette question ;
- nous allons aussi traiter de la situation en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. Ce qu'on a appelé « le printemps arabe » est certainement l'un des événements stratégiques les plus importants de l'année passée. Un autre grand sujet de préoccupation est l'évolution de l'Iran au moment où l'Union européenne vient de prendre des sanctions inédites contre ce pays ;
- l'Afghanistan et le processus de transition est également au coeur des travaux de notre commission comme de la vôtre. Nous venons, il y a quelques instants, de rendre un hommage solennel à nos quatre soldats assassinés la semaine dernière ;
- l'OTAN et les relations transatlantiques pourront également faire l'objet d'échanges entre nous ;
- enfin, nous pourrons aborder le thème de la politique de sécurité et de défense en Europe et nous sommes prêts à répondre à toutes vos questions, en particulier sur l'accord franco-britannique, la politique de sécurité et de défense commune (PSDC), les relations UE-OTAN.
Parti Conservateur (H)). - Je vous remercie de votre accueil, et vous exprime nos condoléances pour le décès récent de quatre soldats français en Afghanistan. Je rappelle que plusieurs soldats norvégiens sont également tombés sur ce théâtre d'opérations.
Notre visite s'inscrit dans une période marquée par la crise de la dette qui touche plusieurs pays de l'Union européenne, et alors qu'une période électorale va prochainement s'ouvrir en France. Nous irons demain à Londres, et je relève que la coopération franco-britannique en matière de défense est une initiative digne d'intérêt tant dans son aspect bilatéral que par ses conséquences au sein de l'OTAN. Du côté norvégien, je vous précise que nous allons prochainement discuter d'un Livre blanc sur les forces armées, analogue à celui que la France a élaboré en 2008. Le principal investissement prévu par notre Livre blanc consiste en l'achat d'avions de combat. Parmi les points que je souhaite mentionner figurent nos rapports de bon voisinage avec la Russie, pays dont nous séparent 196 km de frontières terrestres et 1 757 km de frontières maritimes. Ces relations sont confiantes, mais nécessairement asymétriques du fait de la disparité géographique et économique entre les deux pays. Je relève que la vie politique intérieure de la Russie a été récemment marquée par l'émergence de protestations inédites contre le duo au pouvoir formé par le président Medvedev et le premier ministre Poutine. Par ailleurs, je me réjouis de la bonne coopération militaire que nos armées ont pu nouer à l'occasion de l'intervention en Libye, mais je m'interroge sur l'avenir de la notion de « responsabilité de protéger » qui a motivé cette intervention. Pourrait-elle être utilisée à propos notamment de la Syrie, ou la Libye constitue-t-elle un cas unique ?
La notion que vous évoquez a été retenue par le Président Sarkozy pour fonder l'intervention en Libye ; dans ce contexte, elle n'a pas rencontré d'opposition en France, d'autant que cette intervention s'est effectuée sous l'égide de la résolution 1973 de l'ONU. Cependant, les modalités de son application ont pu faire débat ; certes, il n'y a pas eu d'intervention de troupes au sol, conformément à la lettre de la résolution, mais l'emploi d'hélicoptères de l'armée de terre dans des zones critiques a pu être contesté.
Cette notion de responsabilité de protéger doit perdurer, mais il semble improbable qu'elle puisse être appliquée à la Syrie, dont la situation est différente car elle s'apparente plutôt à une guerre civile. Vous savez également que les efforts déployés par la France pour obtenir une décision de l'ONU sur la Syrie se heurtent à la résistance de la Russie et à la prudence de la Chine, qui déclare cependant qu'elle soutiendra les initiatives de la Ligue arabe.
Votre pays représente pour beaucoup d'entre nous un idéal de société, mais il n'est pas exempt de paradoxes. Je relève que vous consacrez plus de 1 % de votre produit intérieur brut à l'aide publique au développement, ce qui vous place dans les premiers rangs mondiaux en la matière. Par ailleurs, le fonds souverain que vous avez créé pour gérer les revenus tirés de l'exploitation de pétrole et de gaz de votre plateau continental figurent, si mes informations sont exactes, au troisième rang mondial par sa puissance financière. Dans ce contexte, je souhaiterais savoir quelle est la position de l'opinion publique norvégienne à l'égard d'une éventuelle intégration dans l'Union européenne ?
parti chrétien démocrate (KrF)) - La première responsabilité de notre gouvernement est de protéger la Norvège, notamment par une gestion responsable de nos ressources pétrolière et gazière ; c'est le fondement de la création du fonds souverain que vous avez évoqué.
Nous nous félicitons, en effet, d'être le seul pays au monde à consacrer 1 % de notre PIB à l'aide publique au développement par des canaux à la fois bilatéraux et multilatéraux.
Enfin, je voudrais souligner que nous contribuons d'ores et déjà à l'Union européenne par notre appartenance à l'espace économique européen (EEE).
Outre notre coopération avec le Royaume-Uni en matière de défense, nous nous sommes rendus la semaine dernière en Allemagne et avons établi avec nos homologues du Bundestag des points d'accord dans ce domaine.
Je tiens à rendre hommage à la Norvège pour son action en faveur de la prohibition des armes à sous-munitions. La convention d'Oslo de 2008 a constitué un élément décisif dans ce domaine, notamment grâce à l'action résolue de votre diplomatie. Je souhaiterais par ailleurs connaître vos points d'intérêt particulier sur le partenariat de défense qui lie la France au Royaume-Uni.
Je tiens à rappeler qu'un récent rapport publié dans mon pays sur les relations entre la Norvège et l'Union européenne souligne que nous avons transposé dans notre droit interne près des trois quarts de l'acquis communautaire. Il n'en demeure pas moins que la perspective d'une adhésion à l'Union européenne suscite une forte réticence au sein de la classe politique comme de l'opinion publique norvégienne. Un récent sondage montre ainsi que cette option recueille autour de 10 % d'approbation. Ce taux particulièrement faible s'explique sans doute par la situation financière problématique de la zone euro.
Lors de notre récente participation à l'intervention en Libye, au titre de l'OTAN, comme lors de notre actuelle participation à l'opération Atalante, menée sous l'égide de l'Union européenne, l'appui d'avions de surveillance Orion a été fort utile. Nous souhaiterions un rapprochement significatif des moyens militaires de ces deux entités.
parti travailliste - AP) - Lors d'un récent déplacement en Tanzanie, nous avons entendu des critiques envers l'intervention de l'OTAN en Libye, nos interlocuteurs estimant qu'une telle action aurait dû relever de l'Union africaine (UA) ou de la Ligue arabe pour la Syrie. Il faut reconnaître que le soutien occidental antérieur aux gouvernements en place, tant en Libye, en Tunisie qu'en Egypte, place les membres de l'OTAN dans une position délicate.
parti travailliste - AP) - Je tiens à souligner que notre Etat providence a été édifié bien avant la découverte de gaz et de pétrole en mer du Nord. Notre pays se distingue par un taux d'activité des femmes de 80 % et, surtout, 85 % de notre PIB découle des revenus du travail, et non des ressources issues des matières premières. Notre modèle social est financé par une fiscalité progressive.
En matière de sécurité européenne, j'estime, tout comme les responsables américains, que l'Union européenne doit assumer ses responsabilités dans ce domaine de façon beaucoup plus résolue.
Je constate que les Etats-Unis d'Amérique se préoccupent désormais plus de la zone asiatique que de l'Europe, et que la situation de l'Iran constitue leur préoccupation majeure à l'heure actuelle. Le « réveil arabe » touche une région instable dont on ne peut qu'espérer l'orientation vers la démocratie. Cependant, les problèmes sécuritaires majeurs sont actuellement situés autour du bassin méditerranéen, qu'il s'agisse de l'Iran, d'Israël ou de la Palestine, particulièrement pour l'Europe qui a, avec ces pays, sa frontière méditerranéenne.
Il est vrai que la France, comme bon nombre de pays occidentaux, a soutenu les potentats tunisien, égyptien et libyen, en y voyant un rempart contre l'islamisme. Nous tâchons maintenant d'aider ces pays dans leur difficile chemin vers la démocratie. Nous n'avons pas peur de l'Islam mais nous luttons contre le fanatisme. S'agissant de l'Iran, la crainte que le régime n'y développe des moyens nucléaires militaires a entraîné un récent renforcement des sanctions occidentales, mais nous sommes tous convaincus que le pouvoir à Téhéran ne représente pas la totalité de la société iranienne.
Je tiens à souligner la grande qualité des diplomates norvégiens que j'ai pu voir à l'oeuvre dans différentes négociations.
Il faut rappeler que l'intervention en Libye s'est faite à la demande de la Ligue arabe. La notion d'« obligation de protéger » les populations civiles en danger a remplacé, au niveau international, celle de « devoir d'ingérence », qui prêtait à critique.
La Norvège est un pays de référence en matière d'aide publique au développement, tant pour les montants affectés que pour l'efficacité avec laquelle ils sont utilisés, sous contrôle d'une procédure d'évaluation continue. Je relève que la Norvège pratique parfois l'aide budgétaire directe à certains gouvernements et souhaiterais en connaître l'efficacité.
Nous sommes en effet très soucieux de l'efficacité de notre aide, notamment pour prévenir d'éventuelles dérives liées à la corruption. Nous constatons que l'aide au développement de l'Union européenne décroît, alors que l'aide fournie par la Chine sans exigences préalables est en forte croissance. Cela constitue un grand défi.
Notre aide ne passe pas uniquement par des canaux financiers. Ainsi, nous pratiquons un transfert de compétences au profit du Ghana pour la mise en place d'un fonds analogue au nôtre pour la gestion à long terme des ressources issues du pétrole.
Il est important que des institutions indépendantes évaluent de façon continue l'efficacité ce notre aide ; ceci a conduit notre pays à se retirer de certains projets. Nous attribuons parfois ces aides sous certaines conditions comme leur affectation au secteur de l'enseignement primaire, par exemple.
L'Alliance mondiale pour les vaccins et l'immunisation (GAVI), que je préside, permet d'obtenir des résultats concrets grâce à des investissements ciblés. Nous pratiquons une coopération étroite avec la France dans ce domaine.
Je m'interroge sur la pertinence du choix qu'a fait votre armée avec l'achat de l'avion de combat américain F35, alors que ce programme a vu ses coûts multipliés par cinq depuis sa conception. Par ailleurs, je remarque que votre modèle d'armée s'oriente vers des opérations de projection qui impliquent une professionnalisation des personnels, mais que la conscription est maintenue.
L'achat d'avions de combat constitue la dépense majeure prévue par notre Livre blanc, qui devrait être publié en mars prochain. Comme toutes les décisions de ce type, elle est fondée sur des éléments à la fois techniques et politiques. Nous n'avons pour l'instant commandé que quatre avions destinés à la formation de nos pilotes, mais la décision est irrévocable. Seuls restent à définir le nombre d'appareils à acquérir et le calendrier d'acquisition.
En dehors de ce point particulier, le Livre blanc vise au maintien de l'équilibre entre les armées, et n'évoque que l'éventuelle professionnalisation de l'armée de terre.
Le retrait annoncé des forces américaines demeurant en Europe doit nous inciter à oeuvrer de façon plus active pour bâtir notre propre sécurité, en assurant un équilibre entre capacités d'intervention et préservation de la sécurité de nos territoires nationaux.
Le coût de ces avions de combat a fait débat au sein du pays. Lorsque le choix a été effectué, en 2008, il a été calculé qu'il conduirait à l'augmentation de 10 % de notre budget annuel de défense pendant dix ans.
parti conservateur - H) - Ce projet d'acquisition doit être mené à bien en respectant le calendrier initial, et en tenant compte des coûts d'exploitation à venir.
Les modalités d'affectation de l'aide publique au développement suscitent une controverse dans notre pays. Le parti conservateur auquel j'appartiens soutient la possibilité d'apport budgétaire direct uniquement en faveur de pays à régime parlementaire caractérisé par un réel fonctionnement démocratique et l'absence de corruption. Il s'agit là d'élémentaires justifications vis-à-vis de nos électeurs. Déjà, cette aide a été suspendue en Ouganda et pourrait l'être en Ethiopie du fait du non-respect des conditions évoquées.
Je terminerai par une question ponctuelle. Pourquoi le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), fondé par l'ex-président tunisien Ben Ali, appartenait-il à l'Internationale socialiste ?
Ceci s'explique par la liberté qui préside aux adhésions à l'Internationale socialiste (IS). Ainsi, le parti dirigé par Laurent Gbagbo en a été également membre. Je dois préciser que les instances de l'IS s'attachent désormais à radier rapidement les partis qui ne représentent pas, ou plus, les valeurs de l'IS.
Il faut souligner que le RCD a succédé au Néo-Destour, fondé par le Président Bourguiba, qui a lutté victorieusement pour l'indépendance de la Tunisie et y a instauré la laïcité et un statut protecteur de la femme. Des dérives sont apparues ultérieurement lors de la présidence Ben Ali.
Votre futur Livre blanc abordera-t-il la problématique de l'Arctique, que ce soit en matière de ressources fossiles ou de préoccupations géopolitiques ?
Dans un tout autre domaine, j'ai été alerté par les dégâts massifs qu'engendrent les élevages intensifs de saumon, nombreux dans votre pays, sur la qualité de l'eau de mer.
parti travailliste) - La Norvège a établi des règles strictes pour limiter l'extension des élevages de saumon. C'est ainsi que, dans mon département, le nombre d'élevages a été strictement limité. Je signale que les achats français à la Norvège sont constitués d'abord de gaz et de pétrole, suivis de ces saumons d'élevage.
Nous pratiquons des inspections communes avec la Russie dans la Mer de Barents pour surveiller le respect des quotas de pêche de cabillaud. Notre frontière maritime avec ce pays a été définie au terme de près de quarante années de discussion, qui ont abouti à un résultat proche du point de départ de la négociation.
En matière de défense, notre pays a fait évoluer sa politique en concluant un pacte avec la Finlande et la Suède, prévoyant une coopération élargie portant sur l'achat commun d'équipements et des exercices conjoints.
S'agissant de la zone arctique, il semble probable que l'évolution climatique conduise à une fonte de la banquise qui ouvrirait de nouvelles voies de passage. Concevez-vous cette perspective comme une chance ou comme un danger, particulièrement en matière de préservation de l'environnement et d'équilibre stratégique ?
Par ailleurs, on évoque parfois une connotation politique qui marquerait le choix des lauréats du Prix Nobel de la Paix par le comité norvégien compétent. Quel est votre sentiment sur ce point ?
La zone arctique sera effectivement marquée par la fonte de la banquise qui semble irréversible. L'ouverture de nouvelles voies maritimes suscitera de multiples défis dont le principal sera d'ordre environnemental. En effet, il conviendra de s'assurer que les pétroliers naviguant le long de notre littoral soient équipés de doubles coques du fait du caractère particulièrement dévastateur des fuites éventuelles d'hydrocarbures dans les mers froides. Même un trafic accru de passagers devrait faire l'objet de précautions particulières du fait des dangers spécifiques à cette zone.
S'agissant des membres du Comité Nobel, je rappelle que c'est le Parlement norvégien qui les nomme, ce qui implique nécessairement une tonalité politique dans ces désignations. Le choix par ce Comité en 2010 du dissident chinois Liu Xiaobo souligne l'indépendance de cette instance qui a dû alors faire face à une opposition des milieux économiques norvégiens. Je précise qu'aucun officiel norvégien n'a pu rencontrer de responsables chinois depuis cette attribution.
La Chine a fait pression sur les ambassadeurs en poste à Oslo pour qu'ils n'assistent pas à la cérémonie, sans beaucoup de succès. En revanche, et cela souligne l'attitude pragmatique de Pékin, nos exportations vers la Chine ont beaucoup crû ces dernières années.
J'en viens à la gestion de la zone arctique, qui a fait l'objet de plusieurs traités bilatéraux avec des pays riverains. Nous sommes très attachés à ce que cette zone reste exempte de toute tension.
La situation de la zone arctique, qui est une mer surmontée d'une banquise à laquelle s'applique donc la convention sur le droit de la mer, dont je déplore qu'il n'ait pas été ratifié par les Etats-Unis d'Amérique, ne peut être comparée avec celle de l'Antarctique qui est formée par une immense zone terrestre.
Il est à craindre que des tensions surgissent à l'avenir en Arctique ; je souhaite donc vivement que tous les pays intéressés souscrivent au traité du Spitzberg prohibant l'installation de toute base militaire dans cette région. Je tiens à souligner également l'accroissement des échanges de personnes entre la Norvège et la Russie ; ainsi, on comptait en 1989, 100 passages par la frontière terrestre, et 200 000 passages en 2011.
L'attentat commis par un de vos ressortissants à Oslo au mois d'août 2011 souligne la fragilité de nos démocraties. Avez-vous tiré des conséquences, au niveau sécuritaire, de cette action dramatique ?
Nous avons beaucoup apprécié le soutien exprimé en cette difficile circonstance par de nombreux pays amis, dont la France.
Notre rayonnement extérieur passe par notre présence accrue sur les marchés des pays émergents. Ainsi, nous pratiquons avec la Chine des échanges d'étudiants au niveau du master, et certains étudiants chinois restent travailler en Norvège une fois leur diplôme obtenu.
Je souhaiterais savoir, d'une part, quelles sont vos relations avec l'Islande, et, d'autre part, quels sentiments vous inspire la présence de votre compatriote Eva Joly sur la scène politique française ?
La discussion sur la délimitation de votre frontière maritime avec la Russie n'a-t-elle pas été difficile notamment s'agissant du plateau continental ?
Nous avons des rapports fraternels avec l'Islande avec laquelle nous partageons de nombreuses racines historiques communes. L'ensemble des pays nordiques se sont efforcés de soutenir Reykjavik lors de la forte crise économique qui l'a affectée.
Quant à Eva Joly, elle possède, à ma connaissance, la double nationalité française et norvégienne, et il est intéressant qu'elle soit candidate à la présidence de la République. Nous nous interrogeons sur sa contribution au futur succès de son parti.
J'en viens à la frontière maritime entre la Norvège et la Russie : sa délimitation est d'autant plus importante que cette zone contiendrait des gisements de gaz et de pétrole estimés à plus de 20 % des ressources mondiales.
Quelques éléments sur le statut du Spitzberg : le traité de Paris de 1920 a reconnu la souveraineté de la Norvège sur ce territoire et établi les principes de libre accès aux ressources de l'archipel et d'égalité de traitement pour tous les Etats parties au traité. Un désaccord ponctuel a surgi à l'été 2011 entre la Norvège et la Commission européenne à propos de quotas de pêche attribués par la Norvège à la Russie et à l'Islande, mais pas à l'Union européenne.
Vous savez, comme moi, que la crise économique conduit les Etats-Unis d'Amérique à réduire considérablement leur budget de défense, ce qui ne manquera pas d'inciter les industries américaines à se tourner vers les marchés européens. Il s'agit là d'une concurrence majeure pour nos fabricants nationaux. A partir de cette constatation, et alors que la construction de la défense européenne ne progresse guère, la France a conclu un accord bilatéral avec le Royaume-Uni en matière de défense, ouvert à d'autres pays volontaires. Par ailleurs, notre commission a récemment rencontré, à leur demande, nos homologues allemands au Bundestag, et nous nous sommes interrogés sur l'opportunité d'élaborer un Livre blanc de la défense européen.
Notre pays souhaiterait nouer d'autres coopérations dans ce domaine.
Nous constatons avec regret une évolution négative au sein de l'OTAN dont de nombreux membres, lorsqu'ils sont conduits à réduire leur budget de défense, délaissent au premier chef les capacités communes profitables à l'ensemble des membres. C'est le cas par exemple du Royaume-Uni.
En conclusion, je vous remercie de votre disponibilité et de la qualité de vos questions et vous invite à poursuivre cette intéressante discussion en Norvège.