La commission examine le rapport et le texte de la commission sur la proposition de loi n° 560 (2011-2012), présentée par Mme Laurence Cohen et plusieurs de ses collègues, permettant l'instauration effective d'un Pass Navigo unique au tarif des zones 1-2.
En l'absence de Raymond Vall, retenu dans son département, il me revient d'accueillir Hélène Masson-Maret, qui nous rejoint après le décès de René Vestri survenu il y a deux semaines. Bienvenue, chère collègue, dans notre commission.
Présenter un texte déposé par son groupe est toujours une tâche difficile...
Je sens que c'est vous convaincre qui sera difficile... Avec la proposition d'établir un versement transport unique pour financer le Pass Nagivo unique ainsi que des travaux indispensables, la représentation nationale est amenée à se pencher sur le cas d'une seule région - la plus riche - mais toutes sont concernées par le versement transport, et plusieurs ont demandé un versement interstitiel entre les communautés urbaines de plus de 100 000 habitants.
Le Pass Navigo est la formule d'abonnement aux transports en commun d'Île-de-France qui a remplacé la carte orange il y a quelques années. Le projet de Pass Navigo unique au tarif aujourd'hui applicable à Paris et dans ses communes limitrophes répond aux problèmes quotidiens auxquels sont confrontés les Franciliens de petite et grande couronnes. En effet, la flambée des prix interdit aux classes moyennes et aux ménages pauvres d'accéder au centre de l'agglomération - en dehors du logement social - et relègue des ménages toujours plus nombreux loin des principaux pôles d'emplois. Pour ces déplacements imposés, ces ménages subissent les mauvaises conditions de circulation dans les transports publics, conséquence d'un manque d'investissement dans les infrastructures depuis des décennies.
Nos collègues députés y ont consacré l'an passé une commission d'enquête. Leur diagnostic édifiant confirme ce que n'ont cessé de dire les associations d'usagers : les effets de retards et de congestion sont si importants qu'ils nuisent aux conditions de vie des Franciliens et à l'attractivité de la région. En l'espace de quelques années, la distance moyenne du domicile au lieu de travail, ainsi que la difficulté de se loger au centre de l'agglomération ont considérablement augmenté. C'est pour que ceux qui sont contraints d'habiter loin ne soient pas pénalisés par la tarification que la majorité régionale veut mettre en place le Pass Navigo unique pour l'ensemble de la région au tarif des zones 1 et 2, soit 65,10 euros, alors qu'aujourd'hui le Pass vaut 113 euros pour les zones 1 à 5. La revendication était d'ailleurs portée par d'autres candidats aux élections régionales, notamment Jean-François Copé.
Actuellement, la région est découpée en cinq zones concentriques autour de la capitale, et l'abonné circule autant de fois qu'il le souhaite dans les zones de son abonnement. Le zonage paraît de bon sens : l'usager paie plus cher parce qu'il circule sur des itinéraires a priori plus longs. Les choses sont en réalité plus complexes. Des itinéraires en zone 1 et 2 peuvent être plus longs qu'entre les zones 1 et 3. De plus, ce système s'accommode mal des déplacements de banlieue à banlieue, plus fréquents et dont la part ne cessera d'augmenter grâce au tramway et, demain, avec les lignes transversales du Grand Paris.
Dans ces conditions, sauf à établir une tarification au réel, en fonction des kilomètres effectivement parcourus et des segments empruntés, le plus simple revient à adopter le système utilisé dans le métro depuis des décennies : la tarification unique sur tout le réseau, que l'on voyage pour une station ou pour cent. Les trajets à l'unité s'y prêteront peut-être moins que les abonnements, car ce sont les usagers fréquents que l'on vise, ceux qui subissent l'éloignement du travail ou de l'école.
Pourquoi vouloir étendre à tout le réseau francilien cette tarification unique de l'abonnement ? Mais par simple reconnaissance de ce fait majeur : la région capitale fonctionne comme une métropole, non pas dans les paysages, puisqu'il y a encore des paysages « campagnards » en Ile-de-France, mais dans les réalités économiques et sociales. L'INSEE le constate à chaque recensement : l'aire urbaine de Paris déborde la région. Et si les habitants de Seine-et-Marne ne se vivent évidemment pas tous comme des banlieusards, ils le sont majoritairement devenus en matière d'accès au logement et à l'emploi. Dès lors, pourquoi faire payer plus cher leur transport à ceux qui doivent vivre loin du centre, loin de leur pôle d'emploi où le logement leur est inaccessible ? C'est pour ces raisons d'équité sociale et d'identité régionale que la majorité régionale a inscrit dans son programme le Pass Navigo unique au tarif des zones 1 et 2.
Cette mesure ferait perdre à la RATP et la SNCF entre 400 millions et 600 millions d'euros, retenons le chiffre médian de 500 millions. Elle ne doit pas se faire au détriment des investissements indispensables à l'amélioration de la qualité du service : c'est l'engagement de la majorité régionale. Au-delà, comment donner une chance à cette mesure de justice sociale lorsque les gestionnaires sont légitimement focalisés sur les 27 milliards d'investissements que l'Etat et la région ont jugé prioritaires, sans, bien entendu, s'engager concrètement sur leur financement ?
Pour trouver de nouvelles ressources, cette proposition de loi instaure un versement transport unique sur la région destiné à aider celle-ci à financer le Pass Navigo unique et à améliorer le service rendu aux usagers. Son article 1er étend à l'ensemble de l'Île-de-France le plafond du versement transport fixé à 2,6 % - le taux applicable lorsque la PPL a été déposée sur le bureau du Sénat, avant que la loi de finances pour 2013 ne le porte à 2,7 %. Cette harmonisation est le principal levier financier à court terme si l'on ne veut pas alourdir la facture des usagers ni celle des collectivités locales. Les niveaux du versement transport sont encore bien en deçà de ce qui serait nécessaire pour faire face à la crise des transports collectifs dans la région, bien en-deçà également du bénéfice que les entreprises trouvent dans le réseau de transports collectifs.
Le taux de versement transport payé par les entreprises franciliennes, hors Paris et les Hauts-de-Seine, est inférieur ou égal à celui que les entreprises paient dans les métropoles régionales, comme si les transports collectifs n'étaient pas plus nécessaires en Île-de-France à la vie même des entreprises, et comme si, pour l'attractivité même de la région, il ne fallait pas résoudre les problèmes criants des transports collectifs ! L'investissement en Île-de-France, en zone très dense, est plus coûteux que dans certaines métropoles régionales.
Le zonage du versement transport, instauré en 1971, n'avait presque pas changé avant la loi de finances rectificative pour 2010 : il était départemental, avec un plafond de 2,6 % pour Paris et les Hauts-de-Seine, de 1,7 % pour les deux autres départements de la petite couronne, de 1,4 % pour les trois de la grande couronne. A la suite du rapport Carrez sur le financement du Grand Paris, adopté à l'unanimité par la commission des finances de l'Assemblée nationale, le collectif budgétaire pour 2010 avait enfin modifié ce zonage pour mieux tenir compte de l'agglomération francilienne.
La zone 1, formée par Paris et les Hauts de Seine, est restée inchangée, mais la zone 2 s'est élargie à d'autres communes, en tenant compte de l'unité urbaine définie par l'Insee comme la continuité bâtie de la ville : elle regroupe les communes où les constructions ne sont pas interrompues sur plus de 200 mètres. En 2010, l'unité urbaine de Paris regroupe 10 millions d'habitants dans 412 communes sur les 1 301 communes franciliennes, soit moins d'un tiers des communes, mais 85 % de la population de l'Île-de-France.
Le gouvernement a établi une liste des communes précédemment de zone 3 du versement transport qui, parce qu'elles relèvent de l'unité urbaine de Paris, sont désormais intégrées à la zone 2, avec un plafond de 1,8 % au lieu de 1,5 %. Malgré l'urgence de la situation, cela a pris dix-huit mois : il a fallu attendre le décret du 6 avril 2012 pour apprendre que 288 communes seraient basculées en zone 2, avec un effet étalé sur trois ans. Enfin, les 900 autres communes franciliennes qui ne sont pas en continuité de bâti avec Paris et qui forment la zone 3 du versement transport continueront à bénéficier d'un plafond de 1,5 %, inférieur de 0,3 point à celui des métropoles provinciales.
Le compte n'y est pas. A force d'édulcorer les mesures de bon sens et de solidarité qui s'imposent, on se condamne à une gestion en retard d'un train ou deux...
Lors des auditions que j'ai effectuées, l'idée de relever le versement transport a provoqué une levée de boucliers, au-delà même des représentants des entreprises. Ramenons les choses à leur juste proportion : depuis quarante ans, les entreprises franciliennes participent effectivement au financement des transports collectifs. C'est bien là leur intérêt : des services de transports collectifs performants sont des éléments de la compétitivité des entreprises et de l'attractivité du territoire. Le système est à bout de souffle, il faut le réformer vigoureusement. Des programmes très importants sont enfin définis, et le STIF, la RATP et la SNCF font un travail remarquable. L'heure est à la mobilisation générale : pourquoi s'interdire d'impliquer davantage les entreprises, qui bénéficieront d'une amélioration des réseaux ?
Nous entrons là dans une querelle de chiffres, qu'il faut démêler pour y voir clair. En dix ans, la fréquentation des réseaux a progressé de 20 % - le STIF prévoyant une nouvelle augmentation de 20 % dans les dix prochaines années - et leur coût d'exploitation a augmenté de 25 %, passant de 6 à 8 milliards d'euros. Les entreprises ont beau jeu de dire qu'elles paient plus qu'avant, mais elles oublient que ce sont les collectivités publiques qui ont le plus contribué pour rénover le réseau : suivant le fil de l'eau, la part de leur propre effort dans le total diminue. En ces temps de crise, les entreprises agitent facilement le chiffon rouge de la compétitivité. Le rapport Gallois montre pourtant que celle-ci dépend moins d'une réduction des charges que d'un ensemble d'éléments dont, au premier chef, la qualité des investissements. Frédéric Lefebvre l'a lui-même reconnu, qui n'est pourtant pas un dangereux gauchiste. Les responsables de la chambre régionale de commerce et d'industrie et du Medef, s'inquiètent surtout d'un retard du plan transports du Grand Paris. Le taux de versement transport n'est pas un critère déterminant de localisation pour le centre de l'agglomération : pour preuve, les entreprises se concentrent aujourd'hui là où il est le plus élevé... Qu'on ne nous fasse pas un mauvais procès.
Ce texte présente une solution claire, consistant à appliquer le taux de 2,6 % à l'ensemble de l'Île-de-France. Je vous proposerai de l'amender pour mieux tenir compte du fonctionnement effectif de l'agglomération francilienne. Lors de mes auditions, j'ai pu confirmer un point que je connaissais comme élu de grande couronne : lorsqu'on dépasse la continuité bâtie et que les réseaux de transports perdent en densité, la relation entre le versement transport et sa contrepartie se fait plus lâche. Les entreprises comprennent alors mal qu'elles doivent payer pour des transports peu présents et que leurs salariés n'utilisent pas ou très peu : dans mon département, la Snecma a dû organiser son propre réseau de rapatriement de son personnel.
Dans ces conditions, je vous proposerai de limiter l'harmonisation du versement transport aux zones 1 et 2, en leur appliquant le même taux de 2,7 %. Pour la zone 3, je vous inviterai à porter le plafond à ce qu'il est aujourd'hui pour la zone 2, c'est-à-dire 1,8 % - Vincent Eblé en est d'accord. De la sorte, le taux urbain de 2,7 % serait appliqué à l'unité urbaine de Paris, c'est-à-dire aux 412 communes qui représentent 85 % des Franciliens, au coeur de l'agglomération, là où les réseaux de transports collectifs sont assez denses. Quant aux 900 autres communes franciliennes de la zone 3, le plafond serait porté à 1,8 %, au même niveau que dans les métropoles en région. Avec un versement transport unique à 2,7 %, le supplément atteindrait 668 millions d'euros, selon les chiffres de 2012. Avec la modulation que je vous propose, la recette supplémentaire approcherait 500 millions, ce qui est suffisant pour que l'augmentation décidée par le dernier budget aille intégralement à la modernisation des transports.
Ce sera un signe important de solidarité avec ceux qui connaissent la galère des transports et qui, de l'aveu même des gestionnaires, vont continuer à subir des conditions très tendues pendant au moins dix ans, tant notre retard est criant. Importante, la somme en jeu est à comparer aux 27 milliards que l'État et la région disent vouloir investir dans le réseau. Ces 500 millions que l'on demande aux entreprises serviront à faire patienter les usagers : c'est important pour la vie quotidienne des Franciliens !
Nous aurons à suivre de près la poursuite du financement des réseaux de transports collectifs, en examinant si le temps n'est pas venu d'élargir l'assiette du versement transport : c'est l'article 2 de cette proposition de loi, que je vous demanderai d'adopter sans modification. Ne faut-il l'asseoir que sur la masse salariale et écarter ainsi des pans entiers d'activité de la contribution aux transports ? Comme la CGT, le Medef s'est interrogé sur l'opportunité d'y assujettir les entreprises de moins de dix salariés, dont certaines réalisent d'importants profits. Asseoir une partie du versement transports sur la valeur ajoutée ou sur les actifs financiers serait une autre piste de réflexion.
Les entreprises franciliennes remboursent aujourd'hui à leurs salariés la moitié du coût du Pass Navigo. Réduire cette part du fait du Pass Navigo unique représenterait pour elles des économies évaluées entre 100 et 130 millions.
Je vous remercie de cet exposé clair et précis, nourri par un important travail.
Je tiens à féliciter le rapporteur pour la clarté de son exposé, ainsi que pour les bonnes intentions et la générosité dont il fait preuve. Toutefois, il s'agit d'un problème franciliano-francilien. Nous, élus des autres territoires, nous demandons franchement ce que nous faisons ici.
De plus, s'engager sur la voie proposée par le rapporteur aggraverait les inégalités. Il est un phénomène que tait le rapport : le mur tarifaire, pourtant bien connu des usagers des régions limitrophes, parfois haut de 1 à 3 : en Normandie, selon que vous descendez à Bueil ou à Bréval, distantes de 7 kilomètres, vous paierez 113 ou 335 euros. C'est, au-delà des problèmes franciliens, une question d'aménagement du territoire dont notre commission devrait se saisir. Certaines régions ont entrepris d'abaisser ce mur tarifaire. En 2009, le ministre des transports m'avait répondu que le sujet était purement régional, ce dont je ne suis pas convaincu.
En outre, ce n'est clairement pas le moment d'alourdir de 600 millions d'euros la fiscalité des entreprises. Je croyais que tout le monde, élus de gauche compris, avait pris conscience de nos problèmes de compétitivité... Ce n'est pas d'ajouter une charge sur le baudet qui l'aidera à courir plus vite dans la course internationale.
Malgré ce rapport très clair, nous ne serons pas favorables à la proposition de loi. Celle-ci va d'abord à l'encontre de la politique économique du gouvernement, puisqu'elle augmente la contribution des entreprises de la région Île-de-France d'environ 600 millions d'euros. Ce serait difficile à expliquer au moment où nous venons d'adopter le pacte national de croissance et de compétitivité.
En outre, elle est de nature à favoriser l'étalement urbain, alors que la logique voudrait que l'on promeuve la concentration de l'habitat autour des gares, notamment celles du Grand Paris, comme le gouvernement et la région s'y efforcent.
L'argument social est de plus discutable : dans les Yvelines ou en Seine-et-Marne, l'éloignement de certaines personnes est un choix de vie plus qu'une contrainte économique. Lier la tarification au revenu, comme la région strasbourgeoise l'a expérimenté, serait plus conforme à un principe d'équité.
S'il n'est pas irrecevable, l'argument de l'éloignement des travailleurs questionne davantage la politique d'aménagement du territoire. Celle-ci commanderait de rapprocher les entreprises des habitants, pour leur éviter des temps de transport trop importants, plutôt que d'élaborer un tarif unique pour tous, propice à l'étalement.
Enfin, la priorité doit être donnée à l'investissement, et non au fonctionnement. Vous l'avez dit : nous avons accumulé un retard considérable. Attendons de voir les arbitrages qui seront rendus dans les semaines à venir sur le Grand Paris.
Le rapporteur a prévenu de la difficulté qu'il y aurait à convaincre. Tout en saluant son travail, je confirme que sa crainte s'est réalisée.
Nous sommes les arbitres d'un débat interne à la région Île-de-France, qui porte sur une promesse de la majorité régionale d'abord portée par les écologistes, et que les communistes essaient de faire vivre à leur façon. Dans la mesure où le versement transport en subit les effets, cela relève du domaine législatif, mais nous ne sommes pas au STIF... Celui-ci avait d'ailleurs franchi une première étape avec le dézonage du Navigo le week-end et les jours fériés.
La question centrale demeure celle du retard d'investissement en Île-de-France. Combien de temps cela va-t-il encore durer ? Les usagers - dont les sénateurs qui prennent le RER B ou n'importe quelle autre ligne pour se rendre au Sénat - attendent davantage une meilleure qualité et régularité des transports que des baisses de prix. Le rapporteur a souligné que les premiers résultats ne seraient pas attendus avant dix ans : il fallait agir avant ! Baisser les prix faute de faire cesser la galère, c'est prendre le débat à l'envers.
En outre, nous devons éviter l'étalement urbain. Il est permis de penser que les gens se logent en périphérie, car tout y est moins cher. Si l'on pratique les mêmes tarifs en tout point de la région, ils iront s'installer plus loin encore dans la verdure... L'argument du coût se retourne.
Élargir l'assiette du versement transport aux entreprises de moins de dix salariés, évoquer un déplafonnement de la taxe sur les bureaux, tout cela participe d'un alourdissement de la fiscalité sur les entreprises destiné à financer les infrastructures du Grand Paris.
Ce débat postélectoral vient à contretemps. En un mot : ne prenons pas les problèmes isolément, et concentrons-nous sur la qualité du service rendu aux usagers et sur l'indispensable effort d'investissement à fournir. La proposition de loi appelle un vote négatif.
Je salue le rapporteur pour la qualité de son travail, et pour les bonnes intentions dont il fait montre. Mais l'enfer en est souvent pavé. Cette proposition me semble en effet démagogique et contre-productive. Entre 500 et 800 millions d'euros supplémentaires pour les entreprises, ce n'est pas rien. De surcroît, l'urgence est à la compétitivité, comme le rapport Gallois l'a très bien démontré.
Pour financer le tramway, le versement transport de ma ville a été augmenté. Elle est désormais parmi les plus chères de France à cet égard. Résultat : une dizaine d'entreprises, représentant 4 000 emplois, s'interrogent sur leur développement. Elles délocalisent désormais une partie de leur activité dans des pays qui pratiquent le dumping social, comme la République tchèque. Le tissu industriel de nos territoires est précieux, nous devons en prendre soin. C'est une question d'emploi et de pouvoir d'achat.
Les Franciliens veulent avant tout des trains qui arrivent à l'heure, un niveau de sécurité et de confort décents. Nous avons l'une des plus belles capitales du monde, et la plus visitée. La modernisation du réseau doit être la seule priorité.
Je remercie le rapporteur de son exposé fort clair, même si je ne partage pas ses convictions. Je souhaiterais obtenir des détails sur la contribution que les Français apportent annuellement au financement des transports franciliens, qu'ils utilisent quelquefois. Il en va de même pour les autoroutes : le produit du péage finance aussi les kilomètres en amont. Notre commission pourrait opportunément se saisir de ce phénomène de frontières, et réaliser un rapport comparatif sur l'ensemble du territoire.
Les entreprises se délocalisent pour échapper à des charges de plus en plus lourdes : c'est pour elle une question de survie. Élargir le champ du versement transport aux entreprises de moins de dix salariés provoquerait de nouvelles pertes d'emplois. Il faudrait revoir en profondeur cette proposition de loi pour que j'y sois favorable.
Le rapporteur aura au moins un soutien. Cette proposition de loi, défendue par la majorité régionale, était soutenue dès le premier tour des élections par le groupe Europe Ecologie Les Verts ; elle fait partie du contrat avec les électeurs. La situation est complexe pour les habitants d'Île-de-France, et c'est un enjeu d'égalité et de justice sociale. La région n'est en effet pas homogène, et les territoires chers ne doivent pas apparaître comme la norme : nous parlons d'une situation globalement subie. Certes, les entreprises font face à d'importantes difficultés, personne ne le nie. Mais les ménages aussi ! Cette proposition de loi est assortie d'un amendement de bon sens, que je voterai, une différence de taille sépare les zones 2 et 3.
Tout le monde entend l'argument de compétitivité des entreprises. Cependant, tourner toujours le débat de la même façon nous empêche d'agir face aux difficultés. Accélérer l'offre de mobilité, comme le présent dispositif est de nature à le faire, peut stimuler l'investissement et être profitable à nos entreprises.
Cette proposition de loi est généreuse, mais coûteuse pour nos entreprises. Elles délocaliseront leur activité, non pas sur le territoire français, mais à l'étranger. Celles qui ont moins de dix salariés sont les plus fragiles
De surcroît, la proposition aggravera les inégalités entre Paris et la province. Nous souffrons du manque d'une véritable péréquation, pourquoi taxer davantage les entreprises ?
Bien que je sois en désaccord avec lui, je salue le travail du rapporteur. Ces propositions sont un affront à la compétitivité des entreprises, à l'aménagement du territoire et à la ruralité. Concrètement, on va diminuer la fiscalité sur Paris et les Hauts-de-Seine et l'augmenter fortement partout ailleurs en Ile de France, où se trouvent de nombreuses communes rurales. Comme si nous ne peinions pas assez pour accueillir des implantations d'entreprises en territoire rural...
Charles Revet a raison : nous devons traiter les problèmes de l'ensemble du territoire français, pas uniquement ceux de Île-de-France. D'autant qu'il y a déjà un mur fiscal avec les départements voisins, dont les citoyens payent beaucoup plus cher que les Franciliens. N'aggravons pas la situation : ce n'est le moment ni d'instaurer une taxe supplémentaire sur les entreprises, ni d'alourdir la fiscalité sur la ruralité.
En réponse aux interrogations de Charles Revet et de Gérard Cornu, il me semble que le groupe de travail transports-mobilité, présidé par Louis Nègre et Roland Ries, pourrait se pencher sur le financement par les citoyens des services de transport sur les divers territoires. Si vous en êtes d'accord, je leur ferai part de cette demande.
Il en est ainsi décidé.
Hervé Maurey a ouvert le feu en posant des questions essentielles. Comme lui, je m'interroge sur le fait que la représentation nationale traite de questions qui devraient être résolues à l'échelon régional. Cependant, l'article 72 de la Constitution dispose que la loi doit fixer le plafond des taxes locales. L'Ile-de-France est la dernière région où la gestion des transports a été réellement décentralisée : auparavant, le préfet de région intervenait directement sur les choix, ce qui n'a pas été très efficace. Aussi recherchons-nous tous des solutions, mais s'attaquer aux infrastructures en milieu dense prend du temps. En Ile-de-France ou ailleurs, il faudra bien aborder cette contradiction. Et nous éviterions d'avoir à conduire un débat d'ordre régional si les collectivités territoriales disposaient vraiment de leur autonomie financière.
Le mur tarifaire est la conséquence de la régionalisation de la gestion des transports, et c'est encore un débat complexe : faut-il créer des autorités organisatrices des transports interrégionales ? Mettre en place un véritable aménagement du territoire pour éviter l'éviction des populations aux franges de l'agglomération ? La proposition de loi ne prétend pas répondre à toutes ces questions, qui nécessiteraient un cadre beaucoup plus large.
J'entends aussi ceux qui s'alarment : toute charge serait une atteinte à la compétitivité ? C'est un peu plus complexe que cela. Pour être compétitives, les entreprises doivent avoir accès à un certain nombre de services. Quand elles font le choix de s'installer en zone centrale, l'amélioration du réseau de transport constitue un facteur de leur compétitivité. Qu'elles le veuillent ou non, elles devront y contribuer : nous aurons besoin de 27 milliards en coût d'objectif. Où les trouverons-nous ? Les contribuables ? Sur l'ensemble du Grand Paris, les Franciliens sont déjà contributeurs, y compris les plus éloignés de l'offre de transport. Les collectivités territoriales ? Ce sont elles qui ont le plus augmenté leur participation aux transports franciliens, et on leur demande de réduire leur dépenses - c'est la quadrature du cercle ! Les usagers ? Leur part a également augmenté. Quant aux entreprises, leur part a crû en valeur absolue, mais diminué en pourcentage. Quel levier utiliser pour trouver ces recettes indispensables ? Charles Revet a raison de rappeler qu'en Ile-de-France ne circulent pas que des Franciliens : quand les réseaux franciliens sont saturés, les compétences sont à l'échelle du pays tout entier. Ensuite, la compétitivité ne se résume pas à la question des charges : ne cédons pas à ce dogme ! La compétitivité passe aussi par des services de qualité pour les entreprises, leurs salariés et leurs clients, ainsi que par leur image de marque. Qui plus est, vu les besoins d'investissement et de fonctionnement, nous devrons toucher au versement transport.
L'aménagement du territoire est une vaste question. Le taux élevé du versement transport à Paris et dans les Hauts-de-Seine n'est pas un frein à l'installation des entreprises. M. Cornu, mon amendement renforce la compétitivité du territoire de la grande couronne. Je propose non pas de diminuer le versement transport de la zone 1, mais que le niveau de la zone 2 atteigne celui de la zone 1. En effet, rien ne justifie un taux plus faible à l'intérieur de la zone urbaine, avec des services à peu près équivalents. C'est beaucoup moins vrai dans la partie rurbaine de l'Ile-de-France, où la désindustrialisation a fait rage - je vous invite à visiter les friches industrielles du sud de la Seine-et-Marne... Est-on capable d'y réinstaller de l'activité économique ? Je conteste l'idée que la proposition de loi et mon amendement seraient un affront à la ruralité : c'est tout le contraire.
Certains paraissent me reprocher de la générosité : mais ce n'est pas un défaut d'être généreux ! La question est plutôt celle de la justice et de l'appartenance à un bloc régional. Nous touchons là aux débats sur les métropoles. Avec le Grand Paris, les efforts sont concentrés sur la petite couronne, laissant à l'écart des pans entiers du territoire régional. Dans ces conditions, améliorer la tarification pour ceux qui habitent en grande couronne, c'est une mesure de justice sociale.
Certains paraissent penser qu'on s'installe en Seine-et-Marne pour sa qualité de vie. Mais ce n'est malheureusement plus vrai dans bien des cas ! Très souvent, on accepte de partir à 70 kilomètres de Paris parce que c'est seulement là qu'on peut acheter un bien. La qualité de vie, ce n'est pas toujours garanti dans un lotissement resserré, loin des services.
Je crains fort de ne pas obtenir de majorité sur cette proposition de loi. Mais en la rejetant, vous ne ferez que différer la décision. Les débats sur le financement du Grand Paris Express arrivent : nous aurons à trouver des moyens supplémentaires pour les transports collectifs en Ile-de-France.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
L'amendement n° COM-1 reprend les taux adoptés en loi de finances pour 2013 et propose une harmonisation des zones 1 et 2, ainsi qu'un relèvement de 0,3 point en zone 3 afin de rester dans la moyenne des autres régions. Nous prévoyons également un lissage de l'augmentation sur trois années.
Étant défavorable au texte, je voterai contre cet amendement, bien qu'il aille plutôt dans le bon sens.
Nous allons nous abstenir sur le texte. L'amendement n'est pas illogique. J'ai du mal à entendre l'argument selon lequel les entreprises continueront à s'implanter là où les taux sont élevés. Si on souhaite inciter les entreprises à s'implanter ailleurs, n'augmentons pas les taux en grande couronne !
Il est difficile de séparer l'amendement du texte. Il adoucit certes la proposition de loi pour rechercher un consensus, mais celui-ci n'existe manifestement pas. Je suis défavorable au texte et à l'amendement.
L'amendement n° COM-1 est rejeté.
L'article 1er n'est pas adopté.
Article 2
L'article 2 n'est pas adopté.
Article 3
L'article 3 n'est pas adopté.
La proposition de loi n'est pas adoptée.
Malgré ce vote négatif, je ne regrette pas les travaux réalisés sur cette question : ils serviront certainement très bientôt.
Compte-tenu de ce vote négatif, c'est le texte initial de la proposition de loi qui viendra en discussion en séance publique.
Laurence Rossignol est désignée rapporteure sur le projet de loi n° 770 (2011-2012) ratifiant l'ordonnance n° 2012-827 du 28 juin 2012 relative au système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre (période 2013-2020).
Nous procédons à présent à la nomination de rapporteurs pour les trois rapports d'information qui vont constituer la base de notre programme de contrôle pour 2013 :
- Mme Odette Herviaux et M. Jean Bizet sur divers aspects de la loi « Littoral », en lien avec le groupe d'études mer et littoral ;
- M. André Vairetto sur la mise en valeur et la protection du patrimoine naturel de la montagne, en lien avec le groupe d'études montagne ;
- Mmes Evelyne Didier et Esther Sittler sur la valorisation des déchets et les filières REP, en lien avec le groupe d'études déchets.