Commission des affaires sociales

Réunion du 19 février 2014 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Avant d'entamer nos travaux, je souhaite évoquer la mémoire de René Teulade. Nous avons tous été extrêmement surpris et attristés en apprenant son décès brutal jeudi dernier, suite à un accident cérébral, alors même qu'il siégeait avec nous, la veille, pour l'examen du projet de loi sur la formation professionnelle. Il a été enterré hier à Argentat, en Corrèze, ville dont il était le maire : certains d'entre vous, qui ont assisté aux obsèques, ont pu constater combien les hommages rendus à notre collègue y ont été nombreux - je n'ai pas pu, pour ma part, l'accompagner à sa dernière demeure.

René Teulade était une figure de notre commission à laquelle il appartenait depuis son élection au Sénat en 2008. Il avait exercé des responsabilités éminentes dans le domaine social, comme dirigeant de la Mutualité française et comme ministre des affaires sociales. Mais ce qui a certainement le plus marqué chacune et chacun d'entre nous, c'est la force et la sincérité de son engagement, l'engagement de toute une vie, forgé par les valeurs d'humanisme et de solidarité que nous percevions dans chacune de ses interventions.

René Teulade était très assidu à nos travaux. Nous avons pu apprécier son implication dans les questions sociales, tout comme sa courtoisie et sa gentillesse. Elles lui valaient la sympathie et l'estime de tous.

En votre nom, je souhaite associer la commission à la peine éprouvée par sa famille et par ses proches. (Mesdames et Messieurs les sénateurs se lèvent et observent une minute de silence).

La commission procède à l'examen, en nouvelle lecture, de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, visant à reconquérir l'économie réelle, dont Mme Anne Emery-Dumas est rapporteure.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne Émery-Dumas

La commission mixte paritaire n'étant pas parvenue, le 5 février, à un accord, l'Assemblée nationale, en nouvelle lecture, est repartie de sa propre rédaction ; sa commission des affaires économiques, mercredi dernier, a adopté vingt-neuf amendements présentés par sa rapporteure Clotilde Valter.

La plupart de ces amendements reprennent ceux que nous avions adoptés au Sénat, soit en commission, soit en séance publique. Je commencerai par vous présenter les principaux d'entre eux.

A l'article 1er, les députés ont clarifié l'insertion dans le code de commerce des dispositions relatives à la procédure prévue devant le tribunal de commerce. Cette modification avait été proposée par Félix Desplan, rapporteur pour avis de la commission des lois du Sénat.

Les députés ont ensuite prévu que le tribunal statuerait en chambre du conseil, et que le remboursement des aides publiques octroyées les deux années précédant le jugement du tribunal de commerce ne pouvait être demandé que par les personnes publiques concernées, dans un délai d'un an à compter de ce jugement.

A l'article 4 bis, ils ont atténué les conséquences de la caducité d'une offre publique d'acquisition pour les actionnaires qui se trouvaient initialement en dessous du seuil de 30 % du capital ou des droits de vote, et ils ont pris en compte la situation particulière des personnes qui bénéficient de la « clause de grand-père » instaurée par la loi du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière, reprenant ainsi deux amendements que nous avions adoptés sur proposition de Jean-Marc Todeschini, rapporteur pour avis de la commission des finances.

A l'article 4 ter, ils ont simplifié et sécurisé juridiquement la clause transitoire relative à « l'excès de vitesse », dans le sens que nous souhaitions.

A l'article 6, les députés ont écarté « les offres techniques » de la nouvelle procédure d'information et de consultation du comité de l'entreprise qui est la cible d'une offre publique d'achat (OPA). Ils ont également indiqué que l'expert-comptable désigné par le comité d'entreprise a uniquement accès aux documents nécessaires à l'élaboration du rapport prévu au nouvel article L. 2323-22-1 du code du travail.

A l'article 8, ils ont précisé la portée du principe de neutralité pour les décisions des organes de gouvernance d'une société cotée adoptées antérieurement au dépôt d'une OPA mais dont la mise en oeuvre pourrait la faire échouer. Le texte autorise ainsi les statuts d'une société cotée à conditionner leur mise en oeuvre à une approbation ou confirmation par l'assemblée générale, soit pour toutes les offres, soit uniquement pour celles émanant des sociétés soumises elles-mêmes au principe de neutralité. Nous avions adopté un amendement similaire sur proposition de notre collège Jean-Marc Todeschini.

Conformément à nos souhaits, les députés ont prévu que les articles 4 ter, 5 et 8 entreront en vigueur le premier jour du quatrième mois suivant la promulgation de la loi.

Enfin, ils ont supprimé l'article 9, qui posait des règles d'urbanisme très rigides en matière de sites et d'installations industriels, et qui avait fait l'objet de nombreuses critiques notamment de la part des rapporteurs pour avis de la commission des lois et de la commission des affaires économiques.

La commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale a par ailleurs adopté trois nouveaux amendements.

Le premier prévoit que les dispositions de l'article 1er s'appliqueront pour les procédures de licenciement collectif engagées dès le 1er avril prochain, alors que nous avions prévu le 1er juillet.

Le deuxième indique, à l'article 5, qu'une clause des statuts d'une société cotée ne peut faire échec à l'automaticité des droits de vote double que si elle est adoptée postérieurement à la promulgation de la présente loi, et elle a inscrit cette règle directement dans le code de commerce.

Le troisième amendement, également à l'article 5, concerne le cas particulier des sociétés anonymes qui n'appartiennent pas au secteur public mais dans lesquelles l'Etat a l'obligation légale de détenir une participation. Il prévoit notamment que cette obligation légale doit s'entendre soit en termes de capital, soit de droits de vote.

Les députés ont adopté ce texte en séance publique lundi 17 février, avec 15 amendements - 11 ont été présentés par la rapporteure, 2 par le Gouvernement et 2 par le groupe écologiste.

A l'article 5, l'Assemblée nationale a ainsi supprimé la disposition selon laquelle tout transfert direct ou indirect des actions faisait tomber les droits de vote double.

Elle a ensuite précisé les règles applicables à l'Etat actionnaire, en prévoyant que sa participation pouvait être temporairement inférieure au seuil légal à condition qu'elle atteigne le seuil de détention du capital ou des droits de vote requis dans un délai de deux ans.

Elle a également prévu que tout actionnaire qui se trouve initialement au-dessus du seuil de 30 % et qui vend des actions en prévision de l'entrée en vigueur de ses droits de vote double automatique, n'est pas obligé de déposer une OPA s'il dépasse à nouveau ce seuil dans un délai de deux ans.

A l'article 6, l'Assemblée nationale, sur proposition du Gouvernement, a précisé que le juge du tribunal de grande instance se prononce en dernier ressort et que le juge ne peut pas prolonger le délai d'un mois accordé au comité d'entreprise pour rendre son avis si les difficultés particulières d'accès aux informations résultent d'une volonté manifeste des organes de gouvernance de la société cible. A l'invitation de sa rapporteure, elle a par ailleurs autorisé le comité de l'entreprise cible à rendre son avis sur une OPA amicale dès son annonce, avant même son dépôt officiel. Toutefois, toute la procédure d'information et de consultation devra être reprise à zéro si l'offre officiellement déposée diffère significativement de celle qui a été annoncée. L'Assemblée nationale a également clarifié les notions d'engagements et de déclaration d'intention de l'auteur de l'offre lors de son audition devant le comité de l'entreprise cible.

A l'article 7, deux amendements du groupe écologiste ont autorisé les PME non cotées à distribuer gratuitement jusqu'à 30 % de leur capital à l'ensemble de leurs salariés et ont indiqué que, dans ces entreprises comme dans les sociétés cotées, l'écart entre le nombre d'actions distribuées gratuitement à chaque salarié ne pouvait pas être supérieur à un rapport de 1 à 5, reprenant ainsi une proposition de notre collègue Jean Desessard.

J'en viens maintenant aux principales modifications que nous avions adoptées au Sénat mais qui n'ont pas été reprises par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.

A l'article 1er, les députés n'ont pas réintroduit le seuil de 50 salariés que nous avions prévu pour les établissements menacés de fermeture, ils n'ont pas repris notre référence au plan de sauvegarde de l'emploi et ils n'ont pas exclu du dispositif de recherche de repreneur les entreprises soumises à une procédure de conciliation ou de sauvegarde.

Surtout, ils ont conservé la définition restrictive des cas de refus légitime de l'employeur d'une offre sérieuse de reprise. Le texte adopté par les députés en première et nouvelle lecture prévoit un seul cas de refus légitime, à savoir la mise en péril de l'activité de l'entreprise. Nous avions estimé que cette disposition pouvait comporter de sérieux risques d'insécurité juridique, et notre commission avait élargi les motifs légitimes de refus, en prévoyant notamment la mise en péril d'une partie seulement de l'activité de l'entreprise, ou une offre présentée à un prix manifestement sous-évalué.

Notre commission avait également souhaité mieux définir la notion d'offre sérieuse, en reprenant le critère du paiement du prix de cession et des créanciers qu'avait proposé notre collègue Hervé Marseille, et encourager indirectement les offres de reprise présentées par des salariés, en inscrivant dans le texte la notion d'« ancrage territorial » suggérée par notre collègue Marc Daunis. Les députés n'ont pas suivi votre commission sur ces deux points.

Ils n'ont pas non plus repris les dispositions présentées par notre commission des lois pour sécuriser la procédure suivie devant le tribunal de commerce, comme la distinction entre la procédure de vérification et celle de sanction, la possibilité pour le tribunal de recourir à l'assistance d'un juge commissaire et à un administrateur judiciaire, ou encore la faculté pour le ministère public de saisir le tribunal pour sanctionner l'entreprise.

Les députés ont par ailleurs maintenu le délai de quatorze jours imposé au tribunal de commerce pour statuer et l'obligation pour la Direccte de suspendre sa décision d'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi tant que le tribunal n'avait pas rendu son jugement. Nous avions supprimé cette dernière obligation, considérant que la décision d'homologation et le jugement du tribunal de commerce étaient en droit deux procédures distinctes, et fixé un délai d'un mois afin que les juges puissent remplir sereinement leur office.

L'Assemblée nationale n'a pas repris l'amendement de notre collègue Marc Daunis, que nous avions adopté en séance publique, et qui tendait à ajouter la notion d'« ancrage territorial » parmi les critères que devait utiliser le tribunal de commerce lorsqu'il examine des offres de reprise d'une entreprise en redressement ou liquidation judiciaire.

A l'article 5, les députés n'ont pas retenu la clause de rendez-vous que je vous avais proposée pour que l'assemblée générale examine au moins tous les deux ans la question des droits de vote double si elle a refusé de les mettre en place.

A l'article 6, les aménagements importants que nous avions prévus à la procédure menée devant le tribunal de grande instance n'ont pas tous été repris : la saisine devait suspendre automatiquement le délai d'un mois fixé au comité d'entreprise pour rendre son avis ; ce délai pouvait être prolongé jusqu'à l'expiration de cinq jours calendaires à compter de la communication des informations indûment retenues par l'auteur de l'offre ; le juge devait demander des conclusions écrites à l'Autorité des marchés financiers avant de statuer.

Enfin, les députés n'ont pas modifié le contenu du rapport demandé au Gouvernement sur l'utilisation depuis dix ans des actions spécifiques, ou golden shares, de l'Etat, et sur ses droits de vote multiple, alors que nous souhaitions le restreindre aux actions et dispositifs décidés en assemblée générale afin de ne pas porter préjudice aux pactes d'actionnaires auxquels l'Etat est lié.

chers collègues, vous constatez comme moi que notre commission se trouve dans une situation pour le moins atypique.

D'un côté, un très grand nombre des amendements adoptés par le Sénat ont été repris en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale. D'un autre côté, certaines modifications majeures que nous avions apportées au texte n'ont pas trouvé grâce aux yeux des députés.

Dès lors, que faire ?

Il me semblerait difficile de proposer à votre commission un vote conforme, sans donner le sentiment de renier un grand nombre de nos amendements. Inversement, il ne serait pas souhaitable de redéposer l'ensemble des amendements qui n'ont pas été retenus, car une telle attitude apparaîtrait comme un acte de défiance injustifiée à l'égard de nos collègues députés.

C'est pourquoi je vous proposerai d'adopter seulement trois amendements auxquels notre commission attache une attention particulière, soit pour des raisons de sécurisation juridique, soit pour des motifs d'opportunité politique.

Dans la première catégorie, je range les amendements qui portent sur l'élargissement du motif légitime de refus d'une offre et la suppression de l'obligation pour la Direccte de suspendre sa décision d'homologation en attendant le jugement du tribunal de commerce.

Dans la seconde, je vise l'amendement relatif à « l'ancrage territorial ».

Les députés, qui auront de toutes manières le dernier mot à l'issue de la nouvelle lecture au Sénat, pourront peut-être, je l'espère, modifier leur texte pour tenir compte de nos travaux aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Je me retrouve dans votre circonspection, madame la rapporteure. J'avais également cru que les députés avaient eu la sagesse de nous suivre - sur un texte de circonstance que l'UMP rejette, parce qu'il ajoute des contraintes aux entreprises, ce qui est toujours un très mauvais signal. Mais, comme vous le dites, les députés feront, une fois encore, comme bon leur semblera, y compris pour rendre leur texte d'application immédiate comme si les décrets allaient être prêts pour le 1er avril et toute l'information diffusée à temps... Ces dispositions portent pour la plupart sur les OPA - ce qui justifiait la saisine d'une autre commission que la nôtre. Enfin, les députés n'ont pas voulu de l'amendement qui comptait le plus, celui du critère de « l'ancrage territorial » : ils démontrent là qu'ils n'ont pas notre vision des interactions fortes entre les entreprises et les territoires.

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera contre ce texte, sans cependant prendre part au vote sur les amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Effectivement, le Sénat avait voté des amendements « phares » qui amélioraient nettement ce texte. Les députés n'en n'ont pas voulu : il est toujours pénible pour un sénateur d'être traité de la sorte, comme si nous n'étions qu'une succursale de l'Assemblée nationale, mais la cause est à rechercher du côté de la majorité - c'est parce que ses représentants à l'Assemblée méprisent leurs collègues du Sénat que nous en sommes arrivés là !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Les changements apportés à l'Assemblée nationale ne modifient pas le fond, celui d'un texte qui ne changera pas la donne, faute d'ambition. Des précisions vont certes dans le bon sens, par exemple la suppression du seuil de 50 salariés, mais nous déplorons le maintien de la procédure devant le tribunal de commerce : une procédure devant le conseil des prud'hommes aurait été plus adaptée. De même, nous aurions préféré que le remboursement des aides publiques soit confié au juge plutôt qu'aux personnes publiques. Enfin, chacun sait que le seuil de 1 000 salariés pourra facilement être contourné, par exemple en créant des filiales.

Ce texte est donc très loin des ambitions initiales, nous voterons contre - et les trois amendements de notre rapporteure ne nous enthousiasment guère...

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Nous nous abstiendrons sur les amendements et voterons contre le texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Labazée

Je me permets de rappeler que l'Assemblée nationale a le dernier mot en vertu de la Constitution. C'est la règle du jeu depuis fort longtemps, pourquoi s'en étonner ? On devine donc quel sort sera réservé à notre texte - mais cela ne nous empêche pas de défendre nos convictions ! Nous voterons donc les amendements de notre rapporteure et le texte ainsi modifié.

Article 1er

Debut de section - PermalienPhoto de Anne Émery-Dumas

Avec l'amendement n° 1, je vous propose de reprendre les critères du prix de cession et du paiement des créanciers, tels que souhaités par le groupe UDI-UC en première lecture, ainsi que le critère de l'ancrage territorial, qui nous vient de Marc Daunis.

L'amendement n° 1 est adopté.

Avec l'amendement n° 2, je précise, comme nous l'avions fait en première lecture, que l'employeur peut arguer la mise en péril de la poursuite d'une partie de l'activité, ou encore un prix manifestement sous-évalué, pour refuser une offre de reprise.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Cette rédaction est ambiguë et trop vague, nous votons contre, comme sur le précédent amendement.

L'amendement n° 2 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne Émery-Dumas

Avec l'amendement n° 3, je vous propose que le tribunal statue dans un délai d'un mois, et non quatorze jours, après sa saisine. Cet amendement supprime également l'obligation pour la Direccte de suspendre la décision d'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) tant que le tribunal de commerce n'a pas rendu son avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Nous le voterons.

L'amendement n° 3 est adopté.

La proposition de loi, telle que modifiée par les travaux de la commission, n'est pas adoptée.

EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR

La commission poursuit ensuite l'examen des amendements sur le projet de loi n° 349 (2013-2014), adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale.

EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR

EXAMEN DES AUTRES AMENDEMENTS DE SÉANCE