Commission des affaires économiques

Réunion du 21 mai 2014 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • cuivre
  • télécommunication

La réunion

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La réunion est ouverte à 10 h 30.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Monsieur le Directeur général, nous poursuivons notre cycle d'auditions sur le secteur des télécommunications et ses perspectives économiques à court et moyen terme.

L'actualité de ces jours derniers est particulièrement riche dans le secteur des télécoms, avec des annonces de rapprochement laissant supposer que le nombre d'opérateurs nationaux pourrait passer de quatre à trois. Au préalable, nous aimerions vous entendre sur votre bilan d'activité, tant en termes de résultats et de profitabilité que d'emplois, vous qui, dernier entrant dans le secteur, en avez profondément bouleversé le modèle économique. Sa relative fragilité n'est pas propre à la France ; elle se constate également chez nos voisins. La situation des opérateurs européens semble ainsi globalement moins favorable en comparaison de celle des opérateurs américains ou japonais, d'où la faiblesse de leurs investissements. Quelle est votre opinion sur ce point ?

Dans ce contexte, nous sommes très désireux de vous entendre sur les perspectives de rapprochement entre Bouygues Telecom et Orange, alors même que, voici quelques semaines encore, on parlait d'un rapprochement entre Bouygues Telecom et votre société. Où en sommes-nous de ces « grandes manoeuvres » ? Dans l'éventualité d'une recomposition du paysage autour d'un pôle SFR-Numericable et d'un pôle Orange-Bouygues Telecom, quel serait votre positionnement ?

Après votre propos liminaire, je donnerai la parole au vice-président du groupe d'études « communications électroniques et poste », qui est invité à notre réunion, puis aux autres collègues qui souhaiteront vous interroger.

Debut de section - Permalien
Maxime Lombardini, directeur général d'Illiad

Je structurerai mon propos en cinq points qui, je l'espère, répondront aux différentes problématiques que vous avez évoquées, Monsieur le Président.

Premièrement, quelles sont les grandes tendances du marché des télécommunications et de l'internet ? Tout d'abord, l'intégration entre le fixe et le mobile, débutée en 2008, s'est confirmée et continue de générer des rapprochements entre opérateurs. Cette tendance légitime également la demande de licence mobile, à l'instar de la démarche de notre société dès 2007. Ce rapprochement obéit à l'impératif technique d'assurer, via des réseaux communs, les communications, qu'elles soient fixes ou mobiles. L'exigence d'une telle convergence transparaît dans les dernières opérations industrielles, comme l'acquisition par Vodafone du plus important opérateur de câble Outre-Rhin et de l'unique cablo-opérateur en Espagne.

Le poids grandissant des grandes plateformes américaines doit également être noté parmi les tendances fortes du marché. Proposant des produits de qualité, souvent gratuits pour l'utilisateur, elles captent une part importante de la valeur et acquièrent, en continu, des données. Bénéficiant du soutien tacite du gouvernement américain, ces plateformes s'intègrent progressivement dans notre paysage numérique, à l'instar de Netflix qui prévoit d'arriver en fin d'année. N'oublions pas que Google représente, à lui tout seul, quelque 96 % des recherches sur le réseau internet et entraîne un usage croissant de la bande passante. Cette société est aujourd'hui la première régie publicitaire en France, devant TF1. Netflix est quant à lui appelé à concurrencer fortement les chaînes de télévision dont Canal+, avec toutes les conséquences que l'on peut entrevoir en matière de financement du cinéma français. Les succès de ces deux grands groupes ne sont d'ailleurs pas les seuls : Amazon, par exemple, a réussi à apporter un très bon service, notamment en matière de livraison, prenant de vitesse les acteurs locaux. De telles réussites s'opèrent en suscitant le désir chez les consommateurs et en s'appuyant sur un vide réglementaire !

Le marché des télécommunications est assez largement concentré en Europe : près de 70 % du chiffre d'affaires du secteur sont assurés par quatre grands opérateurs. L'absence d'opérateurs paneuropéens est sans doute due à la carence de réglementation communautaire dans ce secteur. Chaque État attribue ses fréquences et calibre sa réglementation. Le modèle américain nous paraît cependant contre-productif : avec trois opérateurs nationaux, mais une myriade de petits opérateurs dont certains ne dépassent pas l'échelle d'un État, le réseau proposé aux utilisateurs s'avère de qualité très médiocre et les tarifs sont extrêmement élevés. Les deux opérateurs Verizon et AT&T arrivent à maintenir ces prix parce qu'ils ont capté quasiment l'ensemble des fréquences. Je ne pense pas que ce soit le modèle que nous souhaitons en France.

J'en viens, en deuxième lieu, à la position de Free sur le marché des télécoms. Les grandes lignes de la stratégie de notre société n'ont guère évolué ces quinze dernières années : il s'agit de proposer aux consommateurs des offres simples, telles que dans le mobile avec seulement deux forfaits mensuels (2 ou 20 euros). Deux ans après notre arrivée dans ce secteur, nous disposons au total de près de neuf millions d'abonnés. Notre groupe, qui a dégagé un chiffre d'affaires proche de 4 milliards d'euros, est celui qui investit le plus en valeur relative. Jusqu'à la moitié du chiffre d'affaires a pu être consacrée à l'investissement ces dernières années. Le taux d'investissement est aujourd'hui de l'ordre de 25 %, bien au-dessus de la moyenne du secteur.

Dans quels secteurs notre société investit-elle ? Tout d'abord, dans le déploiement de ses réseaux, notamment le réseau mobile qui couvre pour le moment 65 % de la population et qui en desservira 75 % en janvier 2015. Notre investissement dans les réseaux est le moyen pour nous d'être leader en matière d'innovation et d'être rentable. C'est d'ailleurs ce qu'il s'est passé sur le marché de l'Adsl ou seuls les trois opérateurs qui ont investi dans les réseaux sont présents aujourd'hui.

Troisièmement, nous nous inscrivons en faux contre ceux, comme récemment encore le rapport de l'Institut de l'audiovisuel et des télécommunications en Europe (IDATE), qui dressent un paysage noir du secteur des télécoms en France. Au contraire, de nombreux éléments plaident en faveur de l'avance française dans le secteur numérique : la bonne culture des ménages français dans ce domaine, avec près de 80 % de taux d'équipement en triple play, soit un niveau supérieur aux Allemands, aux Espagnols et aux Italiens et identique aux Anglais ; d'excellents réseaux fixes et mobile, un démarrage très rapide de la 4G sans doute dû à notre présence comme quatrième opérateur. Rappelez-vous combien de temps il a fallu pour lancer la 3G du temps de l'oligopole...

Les opérateurs historiques, contrairement à ce qu'ils indiquent souvent, dégagent les cash-flow nécessaires au financement de leurs investissements : SFR parvient même à atteindre un milliard d'euros de bénéfices et Bouygues Telecom, qui doit désormais investir massivement dans le fixe, dispose d'une trésorerie couvrant l'ensemble de ses investissements.

L'approche française en matière de réseau de fibre optique jusqu'au domicile (FTTH) nous paraît singulière : l'objectif ambitieux, annoncé par le précédent président de la République et confirmé par son successeur, de couvrir l'essentiel du territoire d'ici à 2022, nous paraît irréaliste. Il nous semble, en revanche, préférable d'adopter un timing plus raisonnable et de jouer de la complémentarité des technologies. Il faut bien sûr déployer le FTTH, mais aussi moderniser le réseau cuivre existant en complémentarité avec celui de la fibre optique.

S'agissant de la consolidation, qui constituera mon quatrième point, le rapprochement en cours entre Numericable et SFR devrait avoir un impact sur le plan du très haut débit et entraîner la concentration des efforts d'investissement de tous les acteurs sur la zone dense là où le câble est déjà déployé.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

C'est une tentation en effet partagée par le président d'Orange, que nous avons auditionné hier.

Debut de section - Permalien
Maxime Lombardini, directeur général d'Illiad

C'est une réalité objective.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Vous savez, Monsieur le Directeur général, que le Sénat assure la représentation des territoires, et plus particulièrement du milieu rural.

Debut de section - Permalien
Maxime Lombardini, directeur général d'Illiad

Cela ne m'avait pas échappé... L'évolution du marché national est très rapide. Si le projet de rapprochement entre Orange et Bouygues Telecom aboutissait, malgré les nombreux obstacles qui s'y opposent, il y aurait probablement des remèdes que j'imagine favorables à notre groupe, dernier entré sur le marché mobile, lui permettant de renforcer sa capacité concurrentielle.

Mais la consolidation n'est pas une nécessité absolue. Sur le cuivre, nous sommes tous sur le même réseau, sur le FTTH, la mutualisation autour d'un réseau unique est la règle dès que nous sortons de la zone très dense et en matière de réseaux mobiles, la mutualisation de réseau convenue entre SFR et Bouygues Telecom va aboutir à un unique réseau sur 90 % du territoire.

En guise de cinquième et dernier point, j'en viens à l'actualité législative. D'une part, la proposition de loi présentée par Mme la députée Laurence Abeille et relative à la sobriété, la transparence et la concertation en matière d'exposition aux ondes électromagnétiques nous inquiète. En effet, alors que le déploiement des antennes s'inscrit d'ores et déjà dans des délais longs - jusqu'à 600 jours -, ce texte entraîne de nombreuses incertitudes en conférant de fait aux maires une capacité de blocage des déploiements, la phase de concertation n'étant pas limitée dans le temps. Les pouvoirs publics doivent proposer un cadre juridique clair : s'agit-il d'arrêter le déploiement des réseaux ou de favoriser l'investissement et d'assurer les conditions de la concurrence grâce au déploiement de nouvelles infrastructures dans le secteur des télécommunications ? À cet égard, la charte de la ville de Paris, qui limite les motifs de rejets des implantations d'antennes et prévoit un calendrier de décision précis, constitue certes un élément nouveau de complexité, mais permet de concilier l'information des populations et la rapidité de déploiement plus efficacement qu'une loi.

Un autre texte nous préoccupe également. Il s'agit du projet de loi création numérique, dont quelques bribes ont filtré et laissé entrevoir un rôle de régulation plus important, dans le domaine des télécommunications, qui pourrait être assuré par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Une telle démarche nous semble totalement archaïque, à l'heure où Netflix s'apprête à conquérir la France depuis le Luxembourg. Il nous paraît important que les réseaux de télécommunications soient régulés par des instances qui connaissent cette industrie, comme l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) ou l'Autorité de la concurrence. En outre, les opérateurs de réseau doivent garder la maîtrise de leurs réseaux et des relations commerciales avec les éditeurs de services, qui sont d'ailleurs de bonne qualité.

En matière de taxation, il nous faut reconnaître que notre secteur n'a pas été soumis ces deux dernières années à de nouvelles contributions spécifiques, ce qui est positif. La surfiscalité propre aux télécoms est déjà considérable.

Enfin, la question de la neutralité de l'internet est d'actualité : la décision prise par la Federal Communications Commission (FCC) américaine, nous paraît la bonne. Nous sommes très attachés à la net-neutralité mais il faut en tempérer le principe quand il s'agit des relations asymétriques avec des grandes plateformes de services qui génèrent un très important trafic.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

S'agissant de ce dernier sujet, cette décision de la FCC s'inscrira-t-elle dans la durée ? Elle s'est jouée d'ailleurs à une voix !

En ce qui concerne la proposition de loi présentée par notre collègue députée Laurence Abeille, nous venons de débuter les auditions nécessaires à son examen, mais nous sommes preneurs de vos éventuelles remarques sur son dispositif.

Enfin, nous n'avons pas de visibilité quant à la transmission au Parlement du projet de loi sur le numérique, mais nous avons, de longue date, un débat avec la commission des affaires culturelles sur le maintien de la dualité ARCEP et CSA, ce dernier ne s'intéressant à l'heure actuelle qu'à la diffusion hertzienne et au contenu des chaînes nationales. Je suis cependant - de manière sans doute un peu isolée au sein de ma famille politique - partisan d'une fusion de ces deux autorités, afin de répondre aux défis que pose la diffusion par le réseau internet de la télévision.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

J'aurai quatre questions. La première concerne les conséquences de la concentration des opérateurs sur le réseau, les fréquences ou encore la base de clients. Cette démarche entraînerait la récupération d'un réseau et la répartition de nouvelles fréquences. D'ailleurs, qu'en est-il de la bande des 700 MHz et de sa cession, annoncée par le président de la République ? Free serait-il candidat ?

La deuxième concerne l'éventualité d'une concentration plus verticale entre les opérateurs, à l'instar de ce qui s'est produit entre AT&T et Direct TV aux États-Unis. Un tel rapprochement est-il envisageable en France ? Il ne faut pas oublier non plus le contexte américain : à partir de 20 h 00, la moitié des bandes passantes au niveau national est occupée par les usagers de YouTube et de Netflix !

Mon troisième point concerne le plan France très haut débit. Suite aux auditions des responsables des principaux opérateurs nationaux, et compte tenu de l'évolution récente du secteur, je demande solennellement au Gouvernement français que soit réexaminé ce plan qui est, de facto, caduque. D'ailleurs, je m'étonne de l'absence de réactions gouvernementales suite aux modifications de notre marché des télécoms !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Mon cher collègue, vous anticipez la réalisation du rapprochement entre Numericable et SFR : encore faudrait-il qu'elle soit effective ! Mieux vaut attendre quelque temps avant de réviser le contenu du plan...

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

J'en viens à mon quatrième point. Deux conceptions de la net-neutralité se font jour : une première, d'origine nord-américaine, que la FCC a récemment rappelée dans sa décision que nous venons d'évoquer, et une seconde, exprimée par les pays du sud de l'Europe, qui se veut plus vertueuse et moins pragmatique. Je suis personnellement en défaveur de l'inscription de la net-neutralité dans un texte législatif. Cependant, bien que souverainiste, je demeure persuadé que l'échelon pertinent de régulation de ce domaine ne peut être qu'européen.

S'agissant de l'évolution des autorités de régulation, leur fusion est déjà intervenue aux États-Unis. Mais il s'agit d'un autre modèle et je note que les américains ne connaissent pas l'exception culturelle !

Je constate également que le secteur des télécommunications n'a pas été frappé, ces deux dernières années, par une fiscalisation accrue.

Il convient selon nous d'être ferme face à l'éventualité d'une extension des prérogatives du CSA, dont j'ai pu entendre le président, M. Olivier Schramek, lors de son audition devant la commission des affaires culturelles. Il n'est pas possible de réguler le numérique à partir de l'audiovisuel ; nous devrons demeurer vigilants lors de l'examen de ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Je vous admets bien volontiers dans le club des minoritaires de nos familles politiques respectives !

Debut de section - Permalien
Maxime Lombardini, directeur général d'Illiad

J'adhère totalement à vos propos sur le CSA, tant est illusoire l'idée de réguler l'internet à partir de l'audiovisuel. Nous sommes en faveur d'une véritable régulation européenne, allant au-delà de directives qui laissent aux États-membres une trop grande latitude pour atteindre les objectifs fixés. Évitons ainsi de déstabiliser l'ARCEP et reconnaissons que l'ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications est une réussite en France.

Nous soutenons la démarche consistant à réviser le plan France très haut débit, qui doit reposer sur une conception réaliste du marché.

La fusion entre AT&T et Direct-TV renvoie, je pense, à une réalité propre aux États-Unis, celle de l'intégration verticale. S'agissant de l'allocation de la bande des 700 MHz, il suffit que l'un des opérateurs soit intéressé pour que s'amorce une véritable concurrence. Le calendrier de cette opération est important, en ce qui concerne son attribution mais aussi ses modalités de paiement. Il faut prévoir un paiement étalé dans le temps, sur cinq ans au moins.

Si nous sommes d'accord avec le principe de la net-neutralité, celle-ci ne nous paraît pas devoir faire l'objet d'une définition par le législateur, tant cette notion génère nombre d'incompréhensions, comme l'ont montré les divergences d'approche entre la Commission Européenne et le Parlement européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Comme maire d'une commune dotée d'un pylône accueillant les antennes-relais des trois opérateurs et dont l'un des riverains présente les symptômes avérés d'une hypersensibilité aux ondes électromagnétiques, je souhaiterais revenir sur le dispositif proposé par la proposition de loi de notre collègue députée Laurence Abeille. Son titre exprime l'ambition de modérer l'exposition aux ondes et surtout de privilégier la concertation, en toute transparence, du maire avec les opérateurs et la population dont il a la charge. Certes, bénéficier d'une couverture numérique relève d'un service public, mais pas au détriment de la santé des riverains ! Il faudrait d'ailleurs évoquer cette nécessaire concertation avec l'Association des maires de France (AMF), dans le cadre de l'examen de ce texte !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

La notion de modération implique celle d'une diminution ; une telle démarche me paraît incompatible avec la réalisation de l'objectif de couverture des zones blanches, où les réseaux ne passent pas encore.

D'ailleurs, j'avais préconisé, dès 2003, que soit signée une charte entre les communes et les opérateurs en soulignant l'importance du rôle du maire comme modérateur. Il s'agissait d'éviter que les opérateurs agissent tels des « hussards sur le toit » et positionnent, à l'insu des habitants, des antennes-relais ! Avec le recul dont nous disposons désormais, d'autres questions se sont posées, comme les conséquences sanitaires de l'exposition aux ondes électromagnétiques, ou encore l'utilisation des portables.

Nous avons bel et bien sollicité l'AMF sur la question que vous soulevez, mon cher collègue, mais nous n'avons pu, pour l'instant, accorder nos calendriers respectifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Notre assemblée représente les territoires et les collectivités territoriales. Free n'est pas présent dans mon département, la Haute-Marne. Heureusement que d'autres opérateurs existent ! D'ailleurs, l'installation locale de réseaux d'initiative publique (RIP) permet de répondre à la demande ; sans le soutien d'Orange, une telle démarche serait impossible. Pour prévenir une telle situation, j'avais déposé, dès 2002, une proposition de loi sur l'itinérance locale et préconisé une concurrence entre les opérateurs de télécommunication fondée sur les services et non sur les réseaux. Quand votre société s'intéressera-t-elle aux territoires ruraux comme le mien ?

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Dilain

Pourquoi la concentration des opérateurs demeure-t-elle purement hexagonale ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Leroy

Il me semble en effet essentiel de revoir le plan France très haut débit, quelles que soient les restructurations à venir dans ce secteur. La question de la bascule du cuivre vers la fibre reste posée ; votre société, comme elle l'a dernièrement prouvé devant les tribunaux, n'hésite pas à recourir à d'importants moyens pour maintenir les droits que vous avez acquis sur le cuivre, par exemple à Palaiseau. Serez-vous un rentier du cuivre ?

Je partage le souhait d'une régulation européenne puisque la France, seule et isolée, n'est pas en mesure de réguler internet. À ce titre, je souhaiterais que notre commission échangeât davantage avec la mission commune d'information (MCI) sur la gouvernance mondiale de l'internet, qui conduit actuellement ses travaux afin d'enrichir notre propre réflexion sur le numérique en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

D'après nos informations, le projet de loi sur le numérique devrait être transmis au Parlement en fin de l'année ou au début de l'année prochaine. Mon cher collègue, vous souhaitez, il me semble, que l'Europe se dote d'un organisme à l'image de la FCC américaine ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Leroy

Je souhaite en effet que nous entamions une réflexion en ce sens avant le dépôt du projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Je m'interroge également sur la définition juridique de la notion de modération mentionnée par la proposition de loi relative à la sobriété, la transparence et la concertation en matière d'exposition aux ondes électromagnétiques. Je m'inquiète lorsque j'entends dire qu'il ne serait pas nécessaire d'étendre le réseau de fibre optique sur l'ensemble du territoire. Une telle perspective, alors que la consommation de bande passante est vouée à continuer d'augmenter, me paraît dangereuse. Elle rappelle d'autres débats antérieurs, comme celui de l'électrification ou des chemins de fer !

Les schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique (SDTAN) permettront-ils que le FTTH soit installé sur tout le territoire ? Les zones urbaines sont privilégiées, tandis que les territoires plus ruraux devront attendre bien plus longtemps ! La puissance publique devrait ainsi, à travers le fonds d'aménagement numérique du territoire (FANT), assurer l'intermédiation avec les collectivités et contribuer à l'égalité des territoires devant le numérique. Une contribution - très minime - sur les communications téléphoniques, pour abonder le FANT, pourrait aider utilement à ce rééquilibrage territorial.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

La meilleure solution ne serait-elle pas de développer la 4G pour résoudre la couverture des zones blanches et l'accès au haut débit ?

Debut de section - Permalien
Maxime Lombardini, directeur général d'Illiad

La proposition de loi Abeille nous semble incohérente avec les déclarations réitérées de certains qui critiquent la lenteur du déploiement des réseaux mobiles : les dispositions qu'elle contient en l'état vont en effet entraîner de nouvelles entraves, au niveau local, pour les opérateurs. En matière de concertation, Free a déjà signé près de 130 chartes avec les municipalités.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Le maire a pour mission de prendre en compte les besoins de sa population. La fourniture de l'ensemble des services, y compris le suivi des installations, lui incombe également.

Debut de section - Permalien
Maxime Lombardini, directeur général d'Illiad

Pour répondre à la question sur les RIP, il n'est pas aisé pour un fournisseur d'accès à internet national de proposer ses services sur une multitude de réseaux hétérogènes. Par contre, si ces infrastructures locales ou régionales sont standardisées en termes techniques, contractuels et économiques, alors un groupe comme le nôtre sera vraisemblablement client.

Pourquoi investir chacun dans des réseaux, plutôt que tous distribuer l'offre d'un opérateur unique ? Tout simplement parce que c'est le seul moyen d'innover et de se différencier, au bénéfice du consommateur.

Le caractère hexagonal des concentrations répond à l'objectif de renouer avec une rentabilité plus élevée dans un marché concurrentiel. Le marché français, dont l'attractivité auprès d'éventuels opérateurs étrangers est contrainte par les spécificités règlementaires et administratives nationales, ne devrait pas connaître l'arrivée de nouveaux opérateurs.

S'il existe un rentier du cuivre, celui-ci ne peut être que l'opérateur historique ! Mais, arrêter le cuivre qui délivre un excellent service de manière efficace pour contraindre les consommateurs à adopter la fibre nous paraît une absurdité tant au niveau industriel qu'économique ! Privilégier la mixité des technologies, cuivre et fibre, à court et moyen termes est plus sensé, tout en se ménageant la perspective, plus lointaine, d'un réseau FTTH à l'échelle nationale.

S'agissant de l'abondement du FANT, il n'y a pas eu de fiscalité spécifique nouvelle sur le secteur des télécommunications ces deux dernières années, et nous nous en félicitons. Il faut tout de même noter la multiplication par six du prix des fréquences 1 800 MHz lorsqu'un opérateur demande le refarming, c'est-à-dire la réutilisation de la bande de fréquence 2G pour émettre en 4G : Bouygues Telecom est le seul à l'avoir fait pour l'instant, mais les autres opérateurs seront conduits à faire de même. Il me semble qu'il est prévu d'utiliser une grande part de cet argent pour financer le déploiement du très haut débit. Il n'est donc pas nécessaire de penser déjà à une autre taxe.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

La proposition de loi Abeille va au-delà des différentes chartes en posant le principe de la concertation préalable placée sous la responsabilité des maires. En ce sens, elle constitue une avancée.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Nous en discuterons prochainement. Monsieur le Directeur général, je vous remercie de votre venue.

La réunion s'achève à 11 h 53.