Mes chers collègues, le rapport que vont nous présenter Antoine Lefèvre et Patricia Schillinger porte sur une question extrêmement sensible. Il révèle à la fois les difficultés de construction de certaines intercommunalités, où coexistent la volonté de se mettre ensemble et la pression des autorités préfectorales qui conduit souvent à la création de communautés considérées comme trop grandes. Dans certains cas, la volonté de regrouper un grand nombre de communes relève plutôt, comme au Pays Basque, d'un détournement de procédure...
Ces situations induisent fréquemment, comme je l'ai constaté au cours de ma longue expérience de président d'une agglomération urbaine, rurale et périurbaine, un risque de démotivation, au fil des années, des élus, voire de maires lorsque les exécutifs se sont resserrés. Je me suis efforcé d'être innovant en matière de gouvernance, avec l'adoption de chartes qui, sans être juridiquement obligatoires, imposaient moralement une conduite à tenir. Je me rappelle également avoir porté la création d'une conférence des maires, qui est devenue un élément-clé de la gouvernance, en permettant d'obtenir, sinon l'unanimité, du moins un consensus le plus large possible. Cependant, j'ai constaté que ces initiatives ne suffisaient pas, et certaines critiques m'ont fait comprendre que l'on pouvait certainement faire mieux. C'est dire si l'on attend beaucoup de vos travaux. Bien qu'innovants, ils sont inspirés par la recherche de bonnes pratiques plutôt que par l'ambition de révolutionner les textes.
Monsieur le Président, mes chers collègues, hasard du calendrier, je suis intervenu la semaine dernière en séance publique au nom de mon groupe sur la proposition de loi « tendant à renforcer les synergies entre les conseils municipaux et les conseils communautaires et entre les conseils municipaux et le conseil de la Métropole de Lyon ». Ce texte a finalement été adopté à une large majorité le 9 mai dernier - certains d'entre vous étaient d'ailleurs présents lors des débats dans l'hémicycle.
Dans mon intervention, j'ai rappelé que le bon fonctionnement des EPCI nécessitait évidemment « une parfaite coordination entre les conseils municipaux et les conseils communautaires ». J'ai relevé à cet égard les propos opportuns du rapporteur de la commission des Lois, qui notait que cette « synergie » était d'une part « une condition de légitimité de l'action communautaire » et, d'autre part, le gage d'une « bonne administration locale », tant « les compétences communales et intercommunales sont étroitement imbriquées ».
Ce constat, nous avons nous aussi eu l'occasion de le formuler à la délégation, comme vous vous en souvenez, Monsieur le Président. Car le travail que nous avons entamé avec Patricia Schillinger sur la question de la place des élus municipaux dans la gouvernance des intercommunalités s'inscrit dans la continuité du rapport sur « Les conditions d'exercice des mandats locaux », qui avait suscité plus de 17 500 contributions des élus dans les territoires.
À cette occasion - et cela avait été bien relevé par Marie-Françoise Pérol-Dumont, Mathieu Darnaud et vous-même, cher Président -, nous avions perçu un sentiment d'inquiétude de la part des élus municipaux, qui résulte de l'orientation prise par la construction intercommunale depuis les lois Maptam et NOTRe.
Et il est vrai que, sur le terrain, de plus en plus de voix s'élèvent pour nous dire que « l'esprit n'y est plus ». Les élus municipaux ont le sentiment d'être pris dans de vastes ensembles, et peuvent parfois décrocher.
Sans surprise, la question de la gouvernance des EPCI revient tel un serpent de mer. Les élus municipaux communautaires, et a fortiori les élus non communautaires, estiment qu'ils ne sont pas toujours suffisamment ou correctement bien associés aux décisions de l'intercommunalité. Cette réalité a été confirmée par les résultats de la consultation que nous avons lancée le 27 mars dernier sur « la place des élus municipaux dans la gouvernance des intercommunalités » et que certains d'entre vous ont bien voulu relayer auprès des élus dans les territoires. Je tiens ici à vous en remercier, car nous avons obtenu près de 4 000 réponses en seulement trois semaines d'enquête !
Ceci témoigne de l'intérêt du sujet pour les élus locaux, mais aussi de l'intérêt pour notre délégation de continuer à utiliser cet outil de consultation, voulu par le Président du Sénat, qui nous permet de « prendre le pouls des territoires » sur un sujet local.
Monsieur le Président, chers collègues, cela fait effectivement plusieurs mois que nous travaillons sur ce rapport. Je rappelle que nous nous sommes rendus sur le terrain, à la rencontre des élus des intercommunalités, notamment :
- à Dreux, le 6 mars dernier, où j'ai pu rencontrer Gérard Hamel, Président de la communauté d'agglomération du Pays de Dreux, ainsi que de très nombreux élus de l'EPCI ;
- à Reims, le 5 avril dernier, où Antoine Lefèvre a été reçu par Catherine Vautrin, Présidente de la communauté urbaine du Grand Reims, en présence, là encore, de nombreux conseillers communautaires.
Les propos que nous avons pu recueillir au cours de ces échanges « hors les murs » ont été largement corroborés par la consultation informatique précitée, dont les résultats sont annexés au rapport.
Vous constaterez d'abord une large participation, puisque près de 4 000 réponses ont été enregistrées, comme l'a rappelé Antoine Lefèvre. Très majoritairement, ce sont les maires qui se sont le plus mobilisés ; ils représentent 55,2% des répondants, suivis par leurs adjoints (22,3%) et les autres conseillers municipaux (17,6%).
On notera également que les élus des petites communes se sont davantage impliqués dans la consultation, ceux des communes de moins de 1 000 habitants représentant 49,5% des répondants, et ceux des communes de 1 000 à 10 000 habitants représentant 41 % des répondants, soit une écrasante majorité de 90,5 % des répondants.
Très majoritairement, ce sont les élus des communautés de communes qui forment l'essentiel des répondants (67,7%), suivis par les élus des communautés d'agglomération (24,9%).
On soulignera enfin que les répondants forment un échantillon représentatif des EPCI en termes de population : 54,5% appartiennent à un EPCI de 10 000 à 50 000 habitants ; 17,5% à un EPCI de 50 000 à 100 000 habitants ; 7,1% à un EPCI de 100 000 à 150 000 habitants ; 9,6% à un EPCI de moins de 10 000 habitants ; et 11,4% à un EPCI de plus de 150 000 habitants.
De façon générale, notre consultation fait ressortir des opinions contrastées. Les répondants ont estimé, à une très courte majorité, que les maires étaient « plutôt bien associés » (39,2%) ou « très bien associés » (13,3%) à la gouvernance de l'intercommunalité, près de la moitié des répondants ayant estimé qu'ils n'étaient « pas assez associés » (37,5%) ou « pas du tout associés » (10%) à la gouvernance de leur EPCI.
Ils sont ainsi 61,3% à déclarer n'être « jamais associés à l'ordre du jour du conseil communautaire » et 18,2% à l'être « parfois ». Seuls 20,6% des répondants déclarent être « toujours associés à l'ordre du jour du conseil communautaire ».
L'appréciation d'ensemble portée par les élus sur la gouvernance de leur intercommunalité témoigne aussi de sentiments mitigés. Ils restent minoritaires, parmi les répondants, à porter une appréciation « plutôt satisfaisante » (37,4%) ou « très satisfaisante » (8,2%) sur le fonctionnement global de leur EPCI en matière de gouvernance politique.
Majoritairement, à 54,5%, ils estiment que celui-ci est « très insatisfaisant » (18,5%) ou « assez insatisfaisant » (36 %). Majoritairement, à 59,3%, ils estiment aussi que les petites communes ne sont « pas bien représentées et associées aux décisions de l'intercommunalité ».
Dans la continuité, ils sont 62,9% à juger le poids de la ville-centre dans la gouvernance de l'intercommunalité « plutôt excessif » (34,3%) ou « tout à fait excessif » (28,6%).
La question de la ruralité est, elle aussi, clivante puisque, majoritairement là encore, ils considèrent que « l'intercommunalité marginalise les communes rurales » pour plus de 60% des répondants.
S'agissant enfin de la composition des exécutifs des EPCI, les répondants considèrent majoritairement, à 52,3%, que les règles mises en place sont « insatisfaisantes ».
Je tiens à ajouter une observation sur le sujet de la parité, auquel je suis particulièrement sensible. On notera que le pourcentage de femmes au sein des bureaux des EPCI reste particulièrement faible. Dans près de la moitié des cas (44,6%) les femmes représentent seulement entre 10% et 30% des membres du Bureau. On peut aussi regretter que, dans plus du tiers des cas (34,9%), les femmes représentent moins de 10% des membres du Bureau.
Parmi les répondants, les EPCI exemplaires en matière de parité sont donc minoritaires : seulement 20% comptent entre 30% et 50% de femmes membres du Bureau.
Sans surprise, les recommandations que nous allons vous présenter dans un instant tentent d'apporter des réponses très concrètes aux problèmes identifiés. Toutefois, je peux dès à présent vous exposer les deux grands objectifs de nos recommandations destinées à faire place aux « bonnes pratiques de gouvernance » au sein des instances communautaires :
- mieux associer l'ensemble des conseillers communautaires aux décisions des EPCI ;
- associer plus systématiquement les élus municipaux non communautaires aux décisions des EPCI.
Effectivement, l'un des moyens de répondre à la crise de l'intercommunalité, consiste à favoriser l'implication des élus municipaux dans son fonctionnement. Or le sentiment de dépossession exprimé aujourd'hui dans les territoires par les élus municipaux est fort ou très fort. Il faut ajouter à cela des règles de représentation au sein des conseils communautaires qui sont également souvent mal vécues.
Avant de vous détailler nos recommandations, je précise que nous avons pris bonne note, avec Patricia Schillinger, des initiatives de nombre de nos collègues du Sénat pour améliorer la situation sur ces deux aspects.
En premier lieu, la proposition de loi « visant à améliorer la représentativité des conseils communautaires et à mieux associer les conseillers municipaux au fonctionnement de l'intercommunalité », qui a été présentée par Jean-Pierre Sueur, Marc Daunis, Eric Kerrouche et plusieurs de nos collègues et a été adoptée par le Sénat le 24 janvier dernier. Elle prévoit notamment de rendre obligatoire, dans chaque EPCI à fiscalité propre, une instance de dialogue avec les maires réunie a minima deux fois par an (conférence des maires, bureau élargi, etc.), ce qui faisait d'ailleurs l'objet d'un amendement de notre collègue Mathieu Darnaud.
En second lieu, la proposition de loi « tendant à renforcer les synergies entre les conseils municipaux et les conseils communautaires et entre les conseils municipaux et le conseil de la métropole de Lyon » que j'évoquais en introduction, adoptée au Sénat la semaine dernière. Ce texte rend obligatoire l'institution d'une « conférence consultative des maires » dans les communautés de communes et d'agglomération, ainsi que dans les communautés urbaines, dès lors que 30% des maires des communes membres en feraient la demande.
Ces textes vont évidemment dans le bon sens, c'est la marque du Sénat en tant qu'assemblée parlementaire. Mais je rappelle qu'à la délégation, sous l'égide de notre Président Jean-Marie Bockel, nous avons choisi une approche originale et consensuelle visant à valoriser les « bonnes pratiques » qui pourront ensuite être diffusées.
C'est dans cet esprit que nous avons élaboré notre rapport et nos recommandations. Nous avons identifié les outils déployés avec succès dans les territoires pour répondre à l'objectif d'associer les élus municipaux à la vie et à la gouvernance des EPCI. C'était là une revendication très forte des acteurs de terrain que nous avons auditionnés et que nous avons rencontrés lors de nos déplacements : « Faire confiance à l'intelligence territoriale », « Faire preuve de souplesse » et « N'imposer aucun carcan législatif ».
En séance publique, à l'occasion de la discussion de la PPL « Synergie entre les conseils municipaux et communautaires », sur tous les bancs, plusieurs voix dont celle du ministre chargé des Collectivités territoriales, Sébastien Lecornu, s'élevaient pour dire : « Ne créons pas de contraintes supplémentaires ! » (Didier Marie) ; « Les dispositifs doivent être facultatifs et souples » ; « Faisons confiance aux élus locaux pour imaginer des solutions intelligentes au niveau du territoire » (Sébastien Lecornu) ; « Laissons les collectivités souffler » (Françoise Gatel), ou encore « Nos territoires ont besoin de liberté et de différenciation » (Arnaud de Belenet).
Bref, la loi ne doit pas être la réponse à tout de façon uniforme. C'est dans cet esprit que nous réfléchissons, avec Patricia Schillinger, au contenu d'une « charte de bonnes pratiques » qui pourrait être inspirée de ce rapport. Je cite le Président du Sénat, en novembre dernier lors du colloque de la commission des Lois consacré au rapport de notre collègue Mathieu Darnaud « Revitaliser l'échelon communal » : « Tout n'est pas du domaine législatif. C'est le rôle du Sénat que de mettre en lumière les bonnes pratiques ». C'est bien dans cette démarche que nous nous inscrivons.
Il n'existe en effet pas de solution unique. Les réponses, les outils, les pratiques peuvent varier d'un territoire à l'autre, d'un EPCI à l'autre. Vous le constaterez à travers les très nombreux exemples mis en lumière dans le rapport.
Reste donc l'objectif fondamental qui oriente toutes nos recommandations : replacer l'élu municipal au coeur de la démocratie intercommunale.
Il me revient la mission de présenter les 12 recommandations que nous souhaitons formuler à l'intention des EPCI :
- Recommandation 1 : Se doter d'une charte de gouvernance pour définir les rôles respectifs entre les communes et la communauté, et formaliser la coopération entre communes membres dans le respect de chaque territoire ;
- Recommandation 2 : Définir un projet de territoire en co-construction avec tous les acteurs de l'intercommunalité, dans le respect du principe de subsidiarité ;
- Recommandation 3 : Assurer une gestion de proximité par un exercice territorialisé des compétences intercommunales dans le cadre de « pôles » territoriaux ;
- Recommandation 4 : Prévoir, dans le fonctionnement de l'EPCI, une instance spécifique de dialogue des maires réunie au moins deux fois par an, et faire en sorte que ceux-ci deviennent des relais de l'action communautaire dans chaque territoire ;
- Recommandation 5 : Conforter la capacité des conseillers municipaux membres du conseil communautaire à participer pleinement aux réunions, soit en recourant à la délocalisation des réunions, soit en s'appuyant plus systématiquement sur les technologies de type visioconférence. ;
- Recommandation 6 : Encourager la parité dans la composition des instances communautaires, en particulier dans l'attribution des postes au sein de l'exécutif intercommunal ;
- Recommandation 7 : Veiller à la représentativité politique et territoriale au moyen d'une composition politique et géographique équilibrée de l'exécutif de l'établissement public de coopération intercommunale ;
- Recommandation 8 : Ouvrir les commissions thématiques aux conseillers municipaux non communautaires afin d'impliquer tous les élus municipaux qui le souhaitent ;
- Recommandation 9 : Encourager les conseils municipaux à se saisir pleinement du rapport annuel d'activité de la communauté transmis par le président de l'EPCI, et à user plus régulièrement de la faculté d'audition de ce dernier devant le conseil municipal ;
- Recommandation 10 : Consacrer, dans la charte de gouvernance de l'EPCI, un droit d'information et de participation de l'ensemble des conseillers municipaux sur les affaires intercommunales et prévoir les moyens nécessaires pour assurer sa pleine effectivité ;
- Recommandation 11 : S'appuyer sur les réunions annuelles pour faire se rencontrer l'ensemble des acteurs de l'intercommunalité : conseillers communautaires, conseillers municipaux, directeurs de services, secrétaires de mairie et parfois partenaires sociaux ;
- Recommandation 12 : Prévoir des outils de formation spécifiques à l'intercommunalité à destination des élus municipaux communautaires et non communautaires.
Vous l'aurez compris, ces 12 recommandations sont le fruit de pratiques déjà éprouvées avec succès dans plusieurs intercommunalités en France. Nous partageons, avec Antoine Lefèvre, une conviction profonde : l'EPCI doit être un espace de subsidiarité et de coopération, c'est-à-dire une intercommunalité de projet qui ne doit pas se construire au détriment des communes, mais au contraire sur la base de la proximité. Car c'est bien la commune qui reste le maillon central de la démocratie locale.
Je tiens à vous remercier pour ce travail très concret et très clair. Si votre exposé a été assez bref, c'est parce que vos recommandations, en nombre limité, sont adossées sur les bonnes pratiques sur lesquelles vous avez travaillé, qui peuvent être mises en oeuvre et généralisées. C'est l'esprit de notre approche en délégation : être utile avant tout.
Les recommandations qui nous sont faites sont à l'évidence pleines de bon sens, au point qu'on peut se demander pourquoi nos collègues ne les ont pas déjà mises en oeuvre sur le terrain.
Il reste que, si l'on peut mettre de l'huile dans les rouages pour que les élus d'une intercommunalité ne se sentent pas éloignés des décisions, le problème de base reste à mes yeux la pertinence de la taille des intercommunalités. Dans la mienne, qui ne regroupe que 14 communes et 400 000 habitants, et dont les maires sont tous membres de l'exécutif, ce sentiment de délaissement existe comme ailleurs. Je l'ai ressenti très fort lorsque la limitation du cumul des mandats m'a fait repasser de maire et membre de l'exécutif à simple conseiller du territoire : la sensation de chute est vertigineuse ! Cela tient non seulement à un manque d'information, mais à un manque de connaissance de toutes les problématiques de terrain d'un ensemble de territoires où ne prédomine pas le sentiment de vivre dans un même bassin de vie. On se sent dès lors déconnecté de la réalité.
Malgré les annonces faites par le Président de la République après son grand tour de France, et l'espoir suscité par l'idée de rouvrir le débat sur les lois NOTRe et Maptam, je ne suis pas convaincu que l'État fera machine arrière en laissant les territoires déterminer la taille pertinente des intercommunalités, quitte à ce que le préfet tranche en cas de désaccord persistant. Tant que le problème de la taille ne sera pas résolu, je doute que de quelconques recommandations puissent changer la donne.
Je vous remercie pour ce travail, qui tente de remédier à la mise à l'écart des élus qui ne participent pas au bureau de leur intercommunalité. Pour ma part, je formule le voeu que la parité au sein bureaux des conseils communautaires et des communautés d'agglomération soit respectée. J'en veux pour exemple la communauté d'agglomération d'Aurillac, où je siège, qui regroupe 60 000 habitants et dont aucun des 12 vice-présidents n'est une femme. Comme me l'ont confirmé plusieurs collègues, cette situation se reproduit dans de nombreux exécutifs. Le jour du grand conseil communautaire, nous avons l'impression d'être considérées comme de simples « pots de fleurs ». C'est très frustrant. À mon sens, si l'on ne légifère pas, il faudra cent ans pour obtenir la parité.
Merci pour ce rapport, car nous l'attendions depuis longtemps. J'ai dû moi aussi quitter mon mandat de maire et mon poste de conseillère communautaire déléguée au bureau communautaire. Lorsque je l'occupais, l'ordre du jour était établi par l'administration, qui prend des dispositions pour concilier tous les agendas, les élus n'ayant qu'à suivre. Aujourd'hui que je ne suis plus que conseillère municipale, je ne reçois plus aucune information. S'ajoute à cela le fait que la loi NOTRe a transféré la compétence habitat des communes aux agglomérations, de sorte que les communes n'ont même plus le pouvoir de gérer leurs logements. Tout devient intercommunal. Ce rapport permettra de mettre à jour la nécessité pour les gros mastodontes que l'on a créés de rester au contact des élus de terrain. Si j'avais une critique à formuler, la consultation auprès des élus me semble avoir été un peu courte, sans doute parce que j'ai manqué plusieurs réunions.
Certaines des pistes de travail proposées sont déjà un peu pratiquées dans les intercommunalités que je connais. À Perpignan, où nous sommes passés d'une communauté d'agglomération à une communauté urbaine, je constate que plus on transfère de compétences, moins l'information circule. L'adjoint aux travaux qui avait en charge la voirie s'en trouve dépossédé et ne sait plus ce qui se passe dans sa commune. Ancien premier vice-président devenu conseiller communautaire, je me suis retrouvé privé d'informations, avant d'en retrouver en devenant président du groupe majoritaire. J'ai alors réalisé que j'avais moi-même donné peu d'informations aux membres du conseil municipal que je préside depuis vingt-deux ans, sans doute car j'avais trop « la tête dans le guidon ». C'est pourquoi je fais désormais un compte rendu de 20 minutes tous les trimestres à mon conseil municipal sur ce qui a trait à la communauté urbaine. Je profite aussi de la réunion annuelle de tous les conseillers municipaux pour faire travailler ensemble les chargés de travaux de notre pôle territorial et leur présenter les projets et la programmation des travaux qui les concernent. L'échelle du pôle territorial permet de retrouver de la proximité.
Il faut dire aussi que les règles de gouvernance d'une communauté urbaine accentuent la politisation au détriment de la recherche du consensus.
Je remercie nos collègues et les administrateurs qui les ont accompagnés pour le thème qui a été retenu, ainsi que pour la qualité de leur travail et de leurs recommandations. Les missionnaires de l'intercommunalité eux-mêmes commencent à réaliser que l'enjeu du prochain mandat va porter sur la gouvernance des intercommunalités, qui doivent devenir, au-delà de leur utilité que personne ne conteste, des espaces de démocratie. On assiste en effet à la démission d'élus municipaux qui ont l'impression que leur action et leur engagement se vident de leur sens. Trop de conseils municipaux sont consacrés, comme ils le disent, à « enterrer » les compétences de la commune. Les choses se passent ailleurs, alors que les habitants continuent de demander des comptes aux élus municipaux. Le principe de subsidiarité doit prévaloir sur le principe supra-communautaire.
Le gouvernement va avoir fort à faire pour nous guérir des « irritants de la loi NOTRe », car ceux-ci tiennent à la taille même des intercommunalités, qui sont devenues d'énormes « machins » où les élus ne parviennent plus à jouer leur rôle. Comment les réduire alors que les exécutifs communautaires commencent à peine à prendre leurs marques ? L'interrogation sur la territorialisation des compétences qui figure dans le rapport est très légitime. Le problème de parité est également très réel, mais il faut souligner que la politisation croissante des intercommunalités a conduit les maires à vouloir siéger dans leur exécutif. Or nul ne peut décider que la parité sera respectée sur un territoire communautaire. La solution consiste donc à encourager les femmes à devenir maires.
Je suis favorable à l'adoption de la charte de gouvernance qui est proposée.
Enfin, je pense que les intercommunalités vivent mieux si elles se construisent sur un projet de territoire associant non seulement les élus municipaux, mais aussi les conseils de développement. Sans cela, on risque de susciter le rejet d'une institution jugée lointaine, formelle et trop lourde.
Force est de constater à la lecture de ce très bon rapport que la même typologie de problématiques se retrouve partout sur le territoire. Sur le plan méthodologique, je vous recommande de distinguer des strates de population pour les questions n° 8 à n° 12 de l'enquête, car cela ferait sans doute apparaître des enjeux différents selon l'endroit où l'on se trouve et le type d'EPCI concerné. En effet, le mécontentement est inégalement réparti sur le territoire.
Je confirme, pour l'avoir vécu, que le fait de passer du statut de vice-président et de maire à celui de simple conseiller crée un grand vide en termes d'accès à l'information. Malgré le fait que l'on peut entretenir d'excellentes relations avec nos successeurs, on n'est plus dans le coup.
Dans l'intercommunalité dont j'étais le vice-président, nous avons mis des tablettes numériques à disposition de tous les élus municipaux, quelle que soit la taille de leur commune. Leur cartable numérique contenait l'intégralité des documents afférents à l'intercommunalité, mais il s'est avéré à l'expérience, sur la base des statistiques de fréquentation, que les conseillers municipaux ne s'intéressaient qu'aux éléments qui concernaient leur commune. Ils font rarement l'effort de prendre connaissance des projets de l'intercommunalité qui ne les concernent pas directement. La disponibilité de l'information ne suffit donc pas à elle-seule : il faut aussi créer des dispositifs qui impliquent les conseillers municipaux.
Parmi les difficultés posées par la loi NOTRe, force est de constater que certaines intercommunalités dysfonctionnent parce que les préfets sont allés trop loin dans leur volonté de regroupement et que l'on a constitué des ensembles hétérogènes où se mêlent des communes rurales, des communes périurbaines et des communes urbaines. L'Assemblée des communautés de France (AdCF) a commencé à recenser et caractériser ce type de situations, mais le travail reste largement à faire.
En matière de parité, je préconise l'alternance entre les sexes aux postes de vice-président et de vice-président adjoint. Je rejoins Françoise Gatel : si l'on cherche à imposer la parité au sein des exécutifs, on va se trouver dans une situation où la géographie va affronter la population : si on remet beaucoup de femmes dans l'exécutif, ce seront avant tout les femmes adjointes des villes les mieux représentées qui risquent d'être dans l'exécutif au détriment des maires, qui sont très majoritairement des hommes. L'une des solutions, radicale il est vrai, serait d'instaurer le scrutin de liste dès zéro habitant.
Ce rapport porte sur un sujet très important, car les intercommunalités ont marqué de façon majeure notre vie démocratique, malheureusement pas toujours de manière positive. C'est d'autant plus sensible que l'échelle communale et intercommunale constitue le fondement de notre société. Les transferts de compétences prévus dans la loi NOTRe et la course à l'intégration maximale, avec le rôle de stimulant joué par le coefficient d'intégration fiscal (CIF) au point qu'il prédomine parfois sur le projet intercommunal, ont conduit à déposséder les exécutifs communaux de nombreuses missions de proximité qu'ils exerçaient particulièrement bien. De plus, les compétences transférées embolisent les services administratifs des intercommunalités avec des petits sujets du quotidien. Les fonctionnaires communautaires font l'objet de sollicitations incessantes de la part des habitants en matière de voierie, d'espaces verts et même pour obtenir le droit d'être inhumés dans leur commune. Les instances politiques sont elles aussi embolisées par de multiples délibérations annexes qui mobilisent le bureau communautaire, la conférence des maires et le conseil communautaire.
Il faut alléger le travail et la réflexion des élus pour leur permettre de se consacrer aux grands sujets. On est bien loin du mot d'ordre que nous nous étions fixés au sein de mon intercommunalité : « Agglomération d'idées, territoires de projets ». Au-delà du problème de leur taille, les intercommunalités qui dysfonctionnent se caractérisent par une hétérogénéité qui conduit à une absence de projets communs.
Je signale enfin que le retour de la parité sur le terrain suscite un vent de panique au sein des petites communes. J'ai beaucoup de retours de maires femmes qui n'arriveront pas à constituer une liste paritaire pour les prochaines élections. Il faudrait assouplir le système par des effets de cliquet.
Lors de mon déplacement à Dreux, les maires que nous avons rencontrés en présence de Gérard Hamel, président de la communauté d'agglomération, ont su exprimer leurs frustrations liées à l'exercice de leur mandat : manque de dialogue, manque de formation, manque de sens, prédominance de l'administration, absence de co-construction, impossibilité d'entrer en contact avec les services par manque de secrétaires, etc. Gérard Hamel s'est montré à l'écoute de l'essentiel de ces insatisfactions, et a reconnu qu'il fallait y porter remède en mettant de l'humain dans l'intercommunalité.
D'un point de vue pragmatique, une charte de bonnes pratiques pourrait, entre autres, inciter à mettre en oeuvre les actions suivantes :
- délocaliser régulièrement les conseils communautaires au sein des communes ;
- informer les conseils municipaux des projets de l'intercommunalité lors de chacune de leur séance ;
- rendre compte aux habitants, par exemple lors d'une « journée intercommunalité » organisée dans les écoles, des réalisations et des avantages de l'intercommunalité.
À mon avis, « mettre de l'humain » passe plutôt par ce type d'actions concrètes que par l'adoption de nouveaux textes législatifs.
Il est à signaler que lorsqu'une intercommunalité est à cheval sur deux départements et relève donc de deux préfets, il est beaucoup plus compliqué de lui faire obtenir des aides et des subventions.
Il faudra effectivement regarder les cas les plus litigieux, où même l'adoption des meilleures pratiques ne suffira pas à fluidifier le fonctionnement, sans pour autant remettre en question ce qui a été fait dans l'ensemble du pays, où les choses avancent malgré tout.
À mon sens, il faudrait préconiser dans le rapport de saisir l'opportunité donnée par le Président de la République et le Grand débat de revoir non seulement certains périmètres, mais aussi l'attribution de certaines compétences.
Vos interventions, dont je vous remercie, s'articulent autour de trois thèmes principaux : l'accès à l'information, sujet évoqué par Eric Kerrouche dans son livre « Le blues des maires » ; les compétences et la subsidiarité ; la parité.
Sur ce dernier point, la loi NOTRe a conduit à ce que désormais le féminin de « président d'intercommunalité » soit « vice-présidente », de même que le féminin de « député » a pu être « suppléante » lors de l'application de la parité au sein des assemblées parlementaires... Pour éviter cet écueil, il faut effectivement encourager les femmes à devenir maires, en veillant à ce que cela ne conduise pas à surreprésenter les communes urbaines, dans la mesure où les femmes maires de petites communes n'ont souvent pas le temps d'exercer en plus des fonctions communautaires.
Le rapport d'information « Mieux associer les élus municipaux à la gouvernance des intercommunalités : valoriser les bonnes pratiques » est adopté à l'unanimité.
Le rapport sera transmis au Gouvernement, et nous discutons avec la présidence du Sénat et les principales associations de l'adoption effective d'une charte de bonnes pratiques, qui aura vocation à être signée au sein des intercommunalités, ce qui lui conférera une grande force morale. L'audition des experts sur le rapport est programmée le 23 mai et elle est ouverte à tous.
Les membres de la délégation doivent en être les ambassadeurs auprès du président de leur intercommunalité.
Je souhaite faire un point sur le statut des élus locaux. J'ai eu une réunion avec Jacqueline Gourault le 7 mai dernier sur ce sujet, s'inscrivant dans la suite de notre rapport qui a été présenté par le Président du Sénat avant le congrès des maires. Je vous rappelle que cette question a été plusieurs fois reprise par les plus éminents représentants de l'exécutif, qu'il s'agisse du Président de la République, à plusieurs occurrences, notamment lors du Grand débat, ou du Premier ministre lors du congrès des maires. Jacqueline Gourault a été citée plusieurs fois comme devant co-construire avec nous une démarche. Après la séance de travail que j'ai eue avec elle, qui a succédé à de multiples réunions techniques préparatoires, je tiens à faire un point d'étape sur l'état de prise en considération de nos travaux, sachant que des mesures ont déjà été engagées, et étant entendu que tout ne dépend pas de la loi.
Selon Jacqueline Gourault, le Gouvernement s'oriente vers un calendrier législatif relativement desserré en ce qui concerne les collectivités territoriales, malgré des déclarations qui vont dans le sens d'une accélération. Il est question de la discussion, en janvier 2020, d'un projet de loi relatif à une nouvelle étape de la décentralisation - lequel fait un peu figure de serpent de mer -, ainsi que de textes relatifs aux irritants de la loi NOTRe, mais aucun délai n'est donné sur le statut de l'élu. Mme Gourault ayant cependant indiqué que les choix gouvernementaux devraient être précisés lors du prochain congrès des maires, j'ai fait observer que cette question avait déjà été évoquée lors de deux congrès des maires successifs, et qu'il ne serait pas compris que l'on se borne une nouvelle fois à promettre d'engager une réflexion. La ministre et ses conseillers assurent en être conscients. Il reste que les modalités pratiques de l'exercice de co-construction sont à préciser.
Si l'on passe en revue les différents chapitres de nos travaux, Jacqueline Gourault nous a tout d'abord indiqué que rien n'a été décidé sur la revalorisation du régime indemnitaire. Dans le contexte actuel, nous sommes tous prudents sur ce sujet, y compris les associations d'élus. Sa position personnelle consisterait à proposer une revalorisation financée, au moins en partie, par les économies résultant de la diminution du nombre d'élus, et notamment d'élus indemnisés. Elle compte tester cette piste dans les discussions à venir. Une autre piste suggérée par son cabinet, mais qu'elle-même juge improbable, serait de privilégier la protection sociale des élus en s'inspirant des modèles existants d'engagement civique, dont celui des sapeurs-pompiers.
Jacqueline Gourault a confirmé que plusieurs des préconisations formulées par la délégation sur le régime indemnitaire ont d'ores et déjà trouvé un début d'application. Tout d'abord, le montant de la fraction représentative des frais d'emploi (ou « allocation pour frais d'emploi »), non assujettie à l'impôt, a été relevé pour les élus des communes de moins de 3 500 habitants (suite donnée à la recommandation n° 12). Cet allègement de la fiscalité applicable aux indemnités de fonction a été introduit par la loi du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 (article 4), consécutivement au dépôt d'amendements portés par le sénateur Charles Guené et soutenus par l'Association des maires de France (AMF).
En outre, par trois arrêtés des 26 février et 11 mars 2019, le niveau des frais d'hébergement et de déplacement remboursables a été rehaussé pour les fonctionnaires de l'État et, par assimilation, pour les élus locaux, la prise en charge des frais de repas demeurant cependant inchangée (recommandations n° 8 et 9).
Un décret est également en cours d'élaboration dans le but de relever (de 658,01 à 987,02 euros selon les éléments communiqués) le plafond de remboursement des frais spécifiques de déplacement, d'accompagnement et d'aide technique des élus en situation de handicap (recommandation n° 11).
Jacqueline Gourault s'est par ailleurs déclarée favorable au maintien des indemnités des présidents de syndicat mixte fermé et de syndicat mixte ouvert restreint au-delà du 1er janvier 2020 (recommandation n° 2). C'est un point sensible, car il permet d'indemniser des personnes très investies, mais ne pouvant entrer dans le cadre très limitatif et resserré des vice-présidences.
En matière de régime social, certaines de nos propositions formulées par la délégation ont déjà pu être effectivement mises en oeuvre. Il s'agit de propositions essentiellement pratiques, destinées à faciliter les démarches des élus locaux dans ce domaine.
Ainsi, une rubrique du site de l'assurance maladie en ligne (AMELI) est désormais intégralement dédiée aux élus locaux (recommandation n° 2). Celle-ci a été mise en ligne le 13 février 2019. Les informations diffusées seront régulièrement enrichies et actualisées. Il est également possible pour les élus locaux de procéder à leur affiliation de manière dématérialisée via un formulaire spécifique, pour éviter des radiations dues à la compréhension difficile par les élus des formulaires actuellement en vigueur (recommandation n° 1).
Pour mieux informer les élus de la nécessaire mention par le médecin de l'autorisation d'exercer leur mandat durant leurs congés pour maladie, la Direction de la sécurité sociale (DSS) a établi une fiche qui sera diffusée par les associations d'élus locaux et les caisses primaires d'assurance maladie (recommandation n° 3).
Suite aux propositions de la délégation, la DSS travaille à la rédaction d'une circulaire afin de régler la question des cotisations patronales appliquées à la part versée par les collectivités au titre de l'affiliation d'un élu au régime de retraite supplémentaire (type FONPEL/CAREL). Un compromis a pu être trouvé et une instruction de la DSS précise qu'à compter du 1er mars 2019 le forfait social sera appliqué à la part versée par les collectivités territoriales, ce qui réduira de 50% les versements incombant aux collectivités (premier sujet de la recommandation n° 5).
S'agissant de la proposition d'exclure le régime de retraite obligatoire Ircantec des élus locaux des règles de cumul emploi-retraite, Jacqueline Gourault a fait état de risques de hausse des cotisations sociales des élus. Elle a évoqué ce sujet avec le haut-commissaire à la réforme des retraites (recommandations n° 5 et n° 6).
La proposition de la délégation d'augmenter le plafond trimestriel des crédits d'heures a été jugée problématique, du fait de l'absence de mécanisme d'exonération à la source. Le ministère a sollicité les associations d'élus locaux afin d'obtenir des informations sur l'existence de problèmes concrets à ce sujet (recommandation n° 10).
Lors des réunions techniques avec le ministère sur les thèmes de la formation et de la reconversion, les associations d'élus locaux ont défendu les propositions du Sénat, en particulier s'agissant :
- de l'extension à l'ensemble des communes, et plus seulement celles de plus de 3500 habitants, de l'obligation de formation des élus durant la première année de leur mandat (recommandation n° 3). Sur ce point, l'AMF a même recommandé une extension encore plus grande : aux maires et aux présidents d'EPCI. Une mesure législative serait nécessaire ;
- de la vérification par les préfets de l'obligation de délibérer sur les dépenses de formation par les collectivités territoriales (recommandation n° 2) ;
- du soutien à la création d'entreprises par les anciens élus locaux (recommandation n° 9), mais en mobilisant prioritairement les banques volontaires, et non la seule Caisse des dépôts et consignations (CDC) ;
- de la mobilisation du CNFPT pour délivrer des formations dans le cadre du DIF aux élus locaux bénéficiant de l'allocation différentielle de fin de mandat et n'ayant pas retrouvé d'emploi (recommandation n°11).
Les associations ont unanimement souligné l'importance du droit individuel à la formation (DIF) s'agissant de l'accès réel à la formation, mais aussi en matière de reconversion. Le ministère a rappelé que le dispositif allait logiquement monter en puissance à l'approche du renouvellement des assemblées locales en 2020, et a bien identifié le besoin des élus locaux d'un traitement plus rapide des demandes adressées à la CDC dans ce cadre. Il a indiqué qu'il allait attirer l'attention de la CDC sur ce point.
Le ministère n'a pas manifesté d'opposition à l'idée que les élus locaux puissent bénéficier des formations dispensées par le CNFPT, à la condition qu'ils y cotisent, ce qui impliquerait une modification législative (recommandation n° 11).
Le sujet de la validation des acquis de l'expérience professionnelle (VAE) a fait l'objet de plusieurs demandes des associations d'élus locaux. Le Sénat avait bien identifié cette question, mais avait surtout relevé dans son rapport que les dispositifs existants étaient « satisfaisants, mais méconnus des élus locaux ». Partageant l'avis du Sénat, le Gouvernement a suggéré de renforcer l'information à travers le « Guide de l'élu local » publié par l'AMF. Un travail de pédagogie sera mené, accompagné d'une réflexion de la DGCL sur les possibilités de mieux cibler certaines des filières universitaires à privilégier par les élus locaux dans l'utilisation de la VAE.
S'agissant plus spécifiquement de la reconversion, le Gouvernement se rallie à la proposition du Sénat d'évaluer le dispositif de l'allocation différentielle de fin de mandat en 2020 et 2021 avant d'envisager son extension et l'augmentation de son montant (recommandation n° 8).
En fin de compte, le volet formation-reconversion ne semble pas revêtir un caractère spécialement épineux.
Je trouve regrettable que le calendrier évoqué ne permette pas de déboucher à l'automne sur l'adoption d'un nouveau statut de l'élu local, car cela pourrait permettre d'éviter un manque de candidats pour les élections municipales qui interviendront six mois plus tard. En matière d'indemnités, quels sont les conseils municipaux qui vont délibérer six mois après les élections pour faire bénéficier les élus d'une revalorisation ? S'ils le font, la presse locale ne manquera pas de les attaquer.
Il faut reconnaître que si la ministre est au clair sur certains sujets, elle se montre plus incertaine sur d'autres.
Je confirme qu'un « texte balai » était attendu par le terrain avant l'échéance de 2020, y compris sur le sujet de la parité. Beaucoup de maires de petites communes ont écrit à Jacqueline Gourault pour le lui faire savoir.
Je suggérerai au Gouvernement l'adoption d'un « texte balai » sur le statut de l'élu.
C'est d'autant plus nécessaire que l'on a expliqué aux élus locaux tout au long du Grand débat qu'on les avait pris en considération et qu'on les aimait entre tous.
Le texte doit être adopté le plus tôt possible si l'on veut éviter qu'il soit suspecté de répondre à des préoccupations électorales, d'autant que certaines mesures, dont la revalorisation des indemnités, pourraient être mal perçues dans l'opinion publique.
J'ai rencontré de nombreux conseillers municipaux qui se plaignent de ne recevoir aucune indemnité en contrepartie du travail considérable qu'ils fournissent pour faire fonctionner leur municipalité et animer la vie locale, alors même qu'ils engagent souvent des frais de déplacement importants.
Dans le contexte actuel, personne ne proposera d'indemniser les 500 000 conseillers municipaux. Nous ne l'avons pas proposé nous-mêmes.
Je vous indique enfin que sur la question de la responsabilité pénale des élus, le Gouvernement est aligné sur la position du Sénat, c'est-à-dire la nôtre, qui consiste, comme l'a proposé Alain Richard, à lancer une étude approfondie sur la réalité de la jurisprudence, avec des statistiques exhaustives. Je vous rappelle que nos associations partenaires ont mis en exergue quelques cas particulièrement choquants d'élus ayant commis des délits involontaires. Cette question ne peut être traitée que sur le plan interministériel, à l'occasion d'une demande formulée par Jacqueline Gourault à la Garde des Sceaux. La ministre s'est engagée à le faire. J'espère que nous obtiendrons du concret lors du prochain congrès des maires de cet automne.