Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

Réunion du 5 octobre 2022 à 16h30

Résumé de la réunion

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La réunion

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Photo de Jean-François Longeot

Nous devons désigner nos rapporteurs pour avis sur le projet de loi de finances pour 2023.

Le Bureau de la commission qui s'est réuni le 21 septembre dernier, a reconduit, d'une part, la répartition des avis budgétaires entre les groupes de la majorité sénatoriale et les deux groupes d'opposition numériquement les plus nombreux et, d'autre part, le périmètre d'examen de nos avis, sur la base de neuf avis budgétaires, qui seront à nouveau regroupés en quatre tomes thématiques.

La discussion budgétaire devrait débuter au Sénat le 17 novembre prochain pour la première partie et, sous toutes réserves, à partir du 24 novembre pour les crédits inscrits en seconde partie.

En conséquence, je vous propose que la commission se saisisse pour avis sur la première partie du projet de loi de finances pour 2023 pour les dispositions thématiques qui entrent dans son champ de compétences, ainsi que sur les crédits des missions « Cohésion des territoires », « Direction de l'action du Gouvernement », « Écologie, développement et mobilité durables », « Économie », « Plan de relance », « Recherche et enseignement supérieur » et « Relations avec les collectivités territoriales » et, le cas échéant, sur les articles non rattachés de la seconde partie dans la mesure où seraient concernés des sujets sur lesquels la commission serait compétente.

Si vous en êtes d'accord, seraient donc désignés rapporteurs pour avis pour l'examen du projet de loi de finances pour 2023 sur les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » : un trio de rapporteurs thématiques sur les transports, M. Philippe Tabarot, pour analyser les crédits des transports ferroviaires, fluviaux et maritimes, Mme Évelyne Perrot, pour nous livrer son analyse sur les crédits alloués aux transports aériens, et M. Olivier Jacquin, pour les transports routiers ; sur la thématique de la prévention des risques, M. Pascal Martin ; sur la thématique de la biodiversité, M. Guillaume Chevrollier, pour l'analyse des crédits alloués au paysage, à l'eau et la biodiversité et à l'expertise en matière de développement durable et à la météorologie ; et sur le thème de l'efficacité énergétique, M. François Calvet, pour la transition énergétique et le climat.

Seraient en outre désignés rapporteurs pour avis : sur les crédits de la mission « Cohésion des territoires », M. Louis-Jean de Nicolaÿ, pour ce qui concerne les politiques des territoires ; sur les crédits de la mission « Économie », M. Jean-Michel Houllegatte, pour ce qui concerne l'aménagement numérique du territoire ; et sur les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », M. Frédéric Marchand, pour ce qui concerne la recherche dans le domaine de l'énergie, du développement et de la mobilité durables.

Par ailleurs, je vous indique que les crédits de la mission « Plan de relance », de même que les articles de la première partie et de la seconde partie (articles non rattachés) du projet de loi de finances pour 2023 feront l'objet, comme ce fut le cas l'année dernière, d'un examen thématique traité par chacun des rapporteurs.

Enfin, je vous propose - en tant que de besoin, si les débats à l'Assemblée nationale le rendaient nécessaire - de nous réserver la possibilité d'une saisine pour avis complémentaire de toute mission sur laquelle il serait indispensable que notre commission porte une appréciation, dès lors que certains crédits entrent dans notre champ d'analyse et d'expertise.

Il en est ainsi décidé.

La réunion est close à 12 h 55.

La réunion est ouverte à 16 h 30.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Longeot

Nous avons le plaisir de recevoir pour la première fois le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, pour échanger sur les priorités du nouveau Gouvernement en matière de transport, à l'aube de ce quinquennat.

Nous avons appris la semaine dernière le départ - certains ont parlé de « débarquement » - de Luc Lallemand de ses fonctions de président-directeur général de SNCF Réseau. Si le communiqué de presse du ministère de l'économie préfère plus sobrement évoquer « une nouvelle étape dans la feuille de route de SNCF Réseau », cette situation ne fait que renforcer nos inquiétudes quant aux insuffisances du contrat de performance entre SNCF Réseau et l'État qui, dans sa version actuelle, ne permettra tout simplement pas de concrétiser nos objectifs de développement du ferroviaire. Pourriez-vous nous préciser, monsieur le ministre, si cette nouvelle feuille de route sera adossée à des moyens supplémentaires pour le gestionnaire d'infrastructure ?

Au-delà du seul transport ferroviaire, quelles sont les priorités de votre ministère en ce début de quinquennat ? Les investissements nécessaires en matière d'infrastructures sont colossaux, le Conseil d'orientation des infrastructures (COI) évoquant d'ailleurs un « mur d'investissements » de 200 milliards d'euros pour les dix prochaines années. Dans ce contexte, seriez-vous favorable, soit à réviser la trajectoire de la loi d'orientation des mobilités (LOM) - nous arrivons bientôt au terme de la première tranche de dépenses (2019-2023) - soit, comme l'a évoqué Jean-Pierre Farandou devant notre commission en réponse à une question de notre collègue Olivier Jacquin, à travailler à l'élaboration d'une loi de programmation des infrastructures ?

Le transport aérien, qui a connu d'importantes difficultés cet été, est confronté au défi de sa transition écologique. L'Agence de la transition écologique (Ademe) a publié la semaine dernière un rapport présentant trois scénarios décarbonation. Parmi les cinq leviers identifiés, le recours aux carburants durables est une piste privilégiée. Pourriez-vous nous dire où en est le projet de développement d'une filière française de production et comment surmonter la concurrence des usages de ces carburants ?

Si nous saluons l'augmentation des moyens affectés au programme consacré aux infrastructures et services de transport dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2023, nous souhaiterions obtenir des précisions quant à leur affectation. Pourriez-vous nous éclairer sur ce point et nous indiquer les principales orientations de ce budget pour les différents modes de transport ?

Par ailleurs, pourriez-vous nous en dire plus sur les modalités précises du nouveau dispositif de « leasing social », dont l'objectif est de rendre accessible la location de véhicules électriques. Notre table ronde de ce matin a révélé que des obstacles demeuraient à un déploiement à grande échelle de ces véhicules. Quelles sont vos pistes de réflexion en la matière ?

Enfin, où en sont les travaux de la task force relative à la transition énergétique du transport routier de marchandises, dont nous attendions initialement les résultats à l'été 2021 ?

Debut de section - Permalien
Clément Beaune , ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports

La question des mobilités est une préoccupation importante du prochain budget, au carrefour de nombreux débats actuels : pouvoir d'achat, sobriété, économie d'énergie et, sur le long terme, transition énergétique, les transports représentant 30 % des émissions de gaz à effet de serre de notre pays et à peu près autant en termes de consommation d'énergie. Il s'agit d'un défi, mais aussi d'une chance, puisque ce secteur est un des vecteurs de nos efforts de sobriété aujourd'hui, mais surtout de nos transformations en matière de transition écologique demain.

Sur l'orientation générale des politiques publiques en matière de transport, je porterai trois grandes priorités dont le projet de loi de finances est un premier reflet. La première est la modernisation et de la régénération de notre réseau ferré. Le transport ferroviaire est la colonne vertébrale de la mobilité verte et son socle est le réseau. Nous avons parfois tendance à ne pas voir les difficultés ou, à l'inverse, à sous-estimer nos investissements collectifs. Si nous n'avons pas à rougir en la matière, par rapport à nos voisins européens, nous avons une difficulté spécifique : l'âge de notre réseau. Un réinvestissement important a eu lieu ces dernières années, de moins de 2,5 milliards d'euros par an, nous sommes passés à un contrat de performance de 2,9 milliards d'euros par an sur les dix prochaines années. Il s'agit d'un changement majeur, quand on sait qu'il y a quinze ans, nous n'investissions que 1 milliard d'euros par an dans notre réseau ferré. Nous sommes donc en train de rattraper notre retard, même si, sans doute, nous devons aller encore plus loin et plus vite. Cette évolution est en partie retracée dans le budget de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), qui sera voté en fin d'année.

S'agissant de SNCF Réseau, ce qui compte, au-delà de la question des personnes, est celle des moyens et de leur mobilisation. Cela étant, il était important d'ouvrir un nouveau chapitre. M. Luc Lallemand a mené un effort de rétablissement financier très important. Au moment où nous devons réinvestir encore davantage, déployer le contrat de performance et mettre en place une nouvelle programmation, il était souhaitable, dans la relation avec les régions notamment, de donner une nouvelle impulsion à la tête de SNCF Réseau. M. Chabanel, qui sera sans doute bientôt désigné formellement président, est un des meilleurs connaisseurs de notre réseau ferré.

Notre deuxième axe porte sur les transports du quotidien, qui recouvrent des réalités territoriales diverses et qui ne sont pas réservés aux grandes agglomérations et aux grandes villes. Il faut assumer, en revanche, que nos priorités devront varier selon la nature du territoire et les besoins de mobilité. Dans les grandes agglomérations, les transports publics, ferrés en particulier, sont évidemment prioritaires. Un certain nombre de lignes - en particulier les lignes d'équilibre du territoire comme Paris-Clermont-Ferrand ou Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (Polt) - sont aussi, d'une certaine façon, des transports du quotidien. Elles représentent des liaisons économiquement vitales que nous devons rénover.

Dans les zones plus rurales et enclavées où une offre de transports publics similaire à celle des grandes agglomérations n'est pas envisageable, nous devons aussi assumer que la voiture fasse partie des solutions. En France, 85 % des déplacements se font par la route, pour les loisirs comme pour le travail. Cette réalité ne disparaîtra pas d'un coup de baguette magique. Nous ne devons pas cibler la voiture en tant que telle, mais la voiture individuelle et polluante, ce qui implique le passage au véhicule électrique.

À cet égard, le dispositif de leasing social, dont les premiers crédits sont bien prévus dans le PLF, et les dispositifs existants qu'il complète - prime à la conversion, bonus-malus - sont essentiels pour favoriser la démocratisation du véhicule électrique, notamment dans les zones rurales. J'aimerais que l'on change cette perception selon laquelle le véhicule électrique serait une solution réservée aux privilégiés et aux centres-villes. Il doit être à l'avenir une solution essentielle pour les ménages modestes et dans les zones rurales qui ne disposent pas de transports publics suffisamment denses.

J'insiste par ailleurs sur la priorité transversale de la décarbonation. Cette préoccupation doit « irriguer » tous nos modes de transport. Elle implique certes des changements d'usage et le report modal, notamment de la voiture individuelle et polluante vers des modes de transport plus propres chaque fois que possible, mais il y a aussi, au sein de ces modes - l'automobile ou l'aviation par exemple -, un potentiel de décarbonation.

Décarboner, ce n'est pas éliminer des modes de transport, c'est aussi verdir des modes de transport qui, aujourd'hui, contribuent à nos émissions de gaz à effet de serre. Nous n'allons à l'évidence supprimer ni la voiture ni l'avion - j'y tiens, en tant que membre d'un Gouvernement qui porte une politique industrielle -, mais nous devons changer nos usages, verdir notre industrie et nos appareils et établir des règles internationales et européennes qui poussent à la décarbonation. J'insiste : tous les modes de transport contribuent à la décarbonation, même si le report vers le ferroviaire est une des solutions clés à notre nécessité de transition écologique.

J'en viens aux chiffrages. Vous le savez, il n'est pas facile de restituer l'effort budgétaire global en matière de transport, s'agissant d'une compétence partagée. L'effort de l'État lui-même n'est pas retracé dans le seul programme budgétaire 203 consacré aux transports. Cet effort d'ensemble est évalué à 12 milliards d'euros dans le PLF pour 2023. Il s'agit d'une augmentation importante de 15 % par rapport à 2022. Sur ces 12 milliards d'euros, plus de la moitié sont alloués aux transports ferroviaires et collectifs. De plus, dans le programme 203, les trois quarts des crédits sont consacrés au ferroviaire, notamment au financement des ressources du réseau. Pour être complet, il faut ajouter à ces 4,1 milliards d'euros du programme 203 les 3,8 milliards d'euros prévus dans le budget de l'Afitf. Par rapport à la trajectoire prévue par la loi d'orientation des mobilités, la Première ministre a bien voulu accorder dans ce PLF une augmentation de 150 millions d'euros en crédits de paiement, dont la première action sera un complément de financement pour la modernisation du réseau ferroviaire, au-delà du contrat de performance.

Il faut encore ajouter à cet effort près de 1 milliard d'euros alloués à la Société du Grand Paris pour des infrastructures de transport en Île-de-France, 250 millions d'euros consacrés, au-delà des ressources budgétaires, à Voies navigables de France, un budget de l'aviation civile qui atteint 800 millions d'euros, principalement pour le contrôle et la sécurité aériens, et un effort de 500 millions d'euros qui se poursuit, notamment à travers le Conseil pour la recherche aéronautique civile (Corac), pour financer la recherche et l'innovation. Citons également les 400 millions d'euros d'avances consenties au projet Charles-de-Gaulle Express.

Il faut ajouter enfin 1,3 milliard d'euros pour les moyens consacrés au verdissement du parc automobile, qui regroupent le bonus-malus, la prime à la conversion et les premiers crédits qui seront déployés en 2023 au titre du dispositif de leasing social, dont les paramètres ne sont pas encore arrêtés.

Vous m'interrogez ensuite sur l'horizon de déploiement d'une filière de production de carburants propres dans le domaine de l'aviation. Pour avoir une filière, il faut un signal clair montrant la réalité du besoin et de la demande. Nous savons aujourd'hui que le faible développement des carburants durables d'aviation (CAD ou SAF en anglais) s'explique par une production insuffisante en amont. En réalité, nos avionneurs sont capables d'atteindre des taux d'incorporation très élevés et les compagnies aériennes n'y sont pas opposées, même si les coûts sont plus importants, parce qu'elles en voient bien la nécessité.

À l'échelle européenne, nous discutons d'un texte intitulé Refuel EU Aviation, qui fixera pour 2025, 2030 et au-delà, des cibles d'incorporation communes à tous les États européens et à tous les aéroports. Nous devrons sans doute revoir à la hausse les cibles qui seront fixées - probablement 6 % pour 2030 - afin de donner aux producteurs un signal sans lequel ils ne se lanceront pas dans un effort industriel et massif de production. En tout état de cause, le reste de la filière est prêt, qu'il s'agisse des avionneurs comme des aéroports, qui sont disposés à déployer les infrastructures nécessaires à ces carburants.

S'agissant enfin de l'actualisation de la programmation, le Conseil d'orientation des infrastructures (COI), dont font partie madame et messieurs les sénateurs Herzog, Tabarot et Dagbert, rendra un rapport, probablement avant le début du mois de décembre, qui servira de base à la définition d'une nouvelle programmation pluriannuelle. Nous aurons besoin à l'évidence d'une actualisation de la programmation. Le Gouvernement n'a pas encore arrêté sa position quant à la forme - nouvelle loi d'orientation ou pas - qu'elle pourrait prendre.

Le rapport du COI enclenchera aussi le travail très attendu sur le volet mobilité de la nouvelle génération de contrats de plan État-Région (CPER). Nous devons sans tarder ouvrir les négociations qui déboucheront, je l'espère, sur une signature au plus tard à la fin du premier semestre 2023. En attendant, il n'y aura pas d'année « blanche ». Les projets engagés seront maintenus et les financements des CPER en 2023 ne seront jamais inférieurs au niveau qui a été programmé et exécuté en 2022. Nous avons en effet besoin de donner une visibilité satisfaisante à nos partenaires, en particulier aux régions.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Tabarot

Nous sommes nombreux à demander des moyens supplémentaires pour nos infrastructures, notamment ferroviaires, face au sous-investissement chronique qui va encore s'accroître, si vous ne revoyez pas le contrat de performance signé avec SNCF Réseau au moment de l'élection présidentielle. Dans le même temps, l'Italie annonce 120 milliards d'euros d'investissements et l'Allemagne 86 milliards en dix ans. Vous aurez beau changer de président de SNCF Réseau chaque année, si vous ne lui donnez pas les moyens supplémentaires pour régénérer et moderniser notre réseau, rien ne changera.

Je reconnais que l'exercice est difficile, mais nous aimerions comprendre les montants supplémentaires que vous parvenez à dégager dans le projet de loi de finances en faveur des infrastructures ferroviaires. S'il vous plaît, ne nous répondez pas seulement, comme à l'Assemblée nationale, que vous attendez les travaux du Conseil d'orientation des infrastructures pour livrer votre analyse. Vous connaissez très bien les priorités de SNCF Réseau. Vous savez très bien qu'il faut des investissements pour éviter la fermeture des 9 000 kilomètres de petites lignes sur notre territoire, pour remédier aux ralentissements sur près de 5 000 kilomètres ou encore pour mettre en place le système européen de gestion du trafic ferroviaire (ERTMS), de préférence avant la Lituanie afin d'éviter de porter le bonnet d'âne européen. Le mur d'investissement est effectivement devant nous et si nous tergiversons, nous allons le prendre de plein fouet.

Enfin, sur la question du financement des transports, je souhaite savoir quel Clément Beaune s'adresse à nous. Est-ce celui qui a dit aux régions de France, à Vichy, qu'il allait partager avec elles le versement mobilité (VM) ou celui qui, à Lyon devant le Groupement des autorités responsables de transport (GART), a affirmé aux autorités organisatrices de mobilité que le VM était sanctuarisé à leur profit ?

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jacquin

Je souscris aux propos de Philippe Tabarot sur le contrat de performance.

Sur France information, le 23 septembre dernier, vous disiez refuser la hausse des tarifs des péages au niveau de l'inflation proposée par les autoroutiers, sur la base des contrats de concession, préférant une option à seulement 5 %. Pouvez-vous nous dire où en sont les négociations et quels sont les termes précis du débat ? Cette moindre hausse se fera-t-elle en échange d'un allongement de la durée des concessions, qui est une ligne rouge absolue exprimée par notre commission d'enquête sénatoriale ? Plus généralement, où en sont les réflexions gouvernementales sur l'avenir des concessions, une fois que les contrats seront arrivés à leur terme ?

Par ailleurs, les régions avaient jusqu'au 30 septembre 2022 pour notifier leur volonté de transfert de routes, dans les conditions prévues par la loi dite « 3DS ». La région Grand Est a délibéré en ce sens le 23 septembre dernier, mais a souligné le manque d'éléments, notamment financiers, dont elle dispose pour valider définitivement cette démarche. Nous sommes en effet toujours en attente de la publication de l'ordonnance relative à l'écotaxe prévue dans la loi « Climat et résilience ». Où en est sa rédaction et quelles sont les modalités qui ont été retenues ?

Quatrième question : est-il envisageable d'allonger les durées d'expérimentation des transferts afin que les régions bénéficient de cette ressource pour stabiliser financièrement l'opération ?

Je n'évoquerai pas la thématique du leasing social car, malheureusement, vos réponses ne permettent pas de préciser les modalités essentielles des dispositifs prévus. Je peux le comprendre, mais j'y tenais beaucoup, car cette idée géniale a été portée par une autre candidate pendant la campagne présidentielle et opportunément reprise par Emmanuel Macron.

Sur le ferroviaire, j'aurai trois questions. Tout d'abord, j'ai bien noté que vous souhaitez attendre le rapport du COI pour décider de l'opportunité d'une nouvelle loi de programmation. Pourriez-vous être plus précis, notamment sur le sous-investissement chronique chez SNCF Réseau et dans le réseau ? Indépendamment d'une loi de programmation, un effort substantiel est nécessaire.

Ensuite, le Sénat avait voté, lors de l'examen de la loi Climat et contre l'avis du Gouvernement, la baisse du taux de TVA sur les billets de train à 5,5 %. Avez-vous changé de position ?

Une question plus locale, enfin, sur ce volet ferroviaire. Le TGV direct Nancy-Lyon via Dijon a été supprimé en 2018. Une alternative via Marne-la-Vallée a été créée, mais a subi le même sort du fait de la crise covid et la ligne n'a jamais été rétablie. Le Gouvernement a publié il y a quinze mois un rapport sur les trains d'équilibre du territoire, qui a démontré la nécessité de rétablir une liaison directe de jour et de nuit entre Nancy et Lyon via Dijon : pouvez-vous nous faire un point d'étape des suites données à ce rapport et particulièrement sur la desserte sud de Nancy, le nouveau pacte ferroviaire de 2018 n'obligeant plus la SNCF à reprendre ce service sous la forme TGV selon les indications transmises par Jean-Pierre Farandou ?

Mon dernier thème porte sur le versement mobilité (VM). Êtes-vous favorable à l'instauration d'un versement mobilité à taux réduit dans les espaces peu denses qui en sont dépourvus, afin de leur permettre de se doter d'une ingénierie et de développer des solutions de transport, comme le préconise mon rapport d'information de janvier 2021 sur les mobilités dans les espaces peu denses en 2040 fait au nom de la délégation sénatoriale à la prospective et comme le Sénat l'avait voté unanimement dans la LOM ?

Enfin, alors que vous comptez supprimer à nouveau 8 milliards d'euros d'impôts dans le PLF sans contrepartie, ne serait-il pas opportun de faire contribuer, en petite compensation de cette suppression, l'ensemble des entreprises au versement mobilité, en abaissant, voire en supprimant le seuil d'assujettissement ? Cela permettrait d'augmenter l'enveloppe et de distribuer du VM aux régions sans pénaliser les intercommunalités, tout en développant l'offre de mobilité là où elle existe déjà.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Perrot

J'aimerais connaître votre positionnement vis-à-vis du secteur aérien, qui est tenaillé entre des tendances contradictoires. Pendant la crise sanitaire, j'avais évoqué plusieurs fois le désir sous-jacent de « voyage de revanche » et c'est exactement ce qu'on a pu constater cet été. Or, en Europe et aux États-Unis, les opérateurs avaient réduit la voilure pour survivre financièrement et ils ont connu ensuite de sérieuses difficultés de recrutement. En tout cas, cette pression de la demande a été le principal facteur de la hausse du prix des billets d'avion, qui s'explique également par la montée du prix du kérosène.

En sens contraire, on perçoit un frein sociétal et environnemental, ainsi que des décisions européennes dont la complexité se résume à une augmentation de la taxation du carbone. Les filières biocarburants sont trop balbutiantes dans notre pays. Où en sommes-nous par rapport à nos voisins européens et aux États-Unis ? Je rappelle que l'Allemagne développe le captage de CO2 pour en faire du carburant et que les avions aux États-Unis fonctionnent de plus en plus à l'huile usagée.

Par ailleurs, dans nos territoires, la sensibilité de nos concitoyens aux nuisances sonores aériennes s'est accrue. Estimez-vous que la réglementation française est d'ores et déjà assez sévère ou êtes-vous favorable à l'idée de légiférer pour accroître les pouvoirs de l'autorité indépendante de contrôle des nuisances aéroportuaires et améliorer la vélocité des procédures ? Certains se demandent si le silence des voitures électriques permettra de réconcilier l'automobile avec les « autophobes », mais pour l'aviation, l'électrification n'est envisageable que pour les tout petits appareils.

Je souhaitais aussi aborder la question médiatique des jets privés. On en compte, d'après les chiffres dont je dispose, moins de 200 immatriculés en France, mais je rappelle que, juridiquement, cette notion est floue, voire inexistante, mais qu'on retrouve la césure entre les partisans de l'interdiction-taxation et ceux du verdissement.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

Mon intervention concerne deux alertes. La première est le report, depuis les autoroutes vers les réseaux secondaires, des poids lourds en transit, qui trouvent ainsi un moyen de ne pas payer les autoroutes et de profiter d'un réseau secondaire non adapté à leur gabarit mais gratuit et parfois plus court. C'est le cas par exemple en Charente, mais également dans de nombreux autres départements. J'ai évoqué la question à plusieurs reprises avec votre prédécesseur. Notre commission a fait plusieurs propositions opérationnelles et nous avons déposé une proposition de loi prévoyant la mise en oeuvre d'une cartographie nationale des « itinéraires de fuite », la consultation des acteurs concernés sous l'égide du préfet pour trouver sur le terrain les leviers de réduction des nuisances, le renforcement du pouvoir des élus, avec la création de dispositifs nouveaux de réduction des zones de réduction des nuisances sur le modèle des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m), l'interdiction des poids lourds sur les routes nationales ou départementales lorsqu'il y a à proximité une autoroute, le retour de l'écotaxe, etc. À ce jour, rien de sérieux n'a été partagé ni proposé. Je vous demande donc solennellement, monsieur le ministre, d'entendre le Sénat et d'accepter de mener une expérimentation, par exemple sur la route nationale 10 (RN10), pour tenir compte de la réalité et surtout apporter les bonnes réponses.

Ma deuxième alerte concerne le transport scolaire. Pouvez-vous nous confirmer la position du Gouvernement sur la règle du transport assis des élèves dans les transports en commun ? Face à la pénurie de conducteurs, certains souhaitent revenir sur cette règle en mettant les enfants dans des bus plutôt que dans des cars, ce qui permettrait de diminuer les besoins en personnels de conduite. Au moment où des enfants ont été grièvement blessés dans un accident dans la périphérie de Laval parce qu'ils étaient illégalement debout dans un bus, revenir sur la règle du transport assis serait un retour en arrière très dommageable. Par ailleurs, nous attendons la circulaire conjointe de la direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM) et de la délégation à la sécurité routière (DSR) pour rappeler le texte applicable et l'esprit de la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Marta de Cidrac

Les récents incidents sur les RER B et D, en pleine canicule, suscitent une profonde inquiétude sur la capacité de la France à accueillir des millions de spectateurs à l'occasion de la coupe du monde de rugby de 2023 et des Jeux Olympiques de 2024, en plus des usagers quotidiens.

L'État se doit d'être aux côtés d'Île-de-France Mobilités et d'animer le dialogue interrégional en matière de transport, d'autant plus que les besoins financiers sont importants. Je pense en particulier à l'articulation entre les régions Normandie et Île-de-France. Cette dernière subit la suppression de trains directs, opérés par la région Normandie, entre Mantes-la-Jolie et Paris Saint-Lazare. Le volet transport du nouveau contrat de plan État-Région, absent du CPER initial, comprendra-t-il un engagement financier ambitieux du Gouvernement et le Gouvernement compte-t-il s'engager dans le dialogue interrégional des transports aux côtés des régions volontaires ?

Par ailleurs, la LOM a prévu une révision des normes sur les nuisances sonores liées au transport ferroviaire qui tienne compte de la fréquence des passages, de même que l'établissement de normes en matière de pollution vibratoire. Les transports du quotidien comme les grandes lignes sont concernés et nous avons tous, dans nos circonscriptions, des exemples en la matière. Comptez-vous bâtir une véritable politique publique assortie de moyens dédiés ? Où en sont les mesures d'application prévues aux articles 90 et 91 de la LOM et vont-elles voir le jour ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Fernique

Les objectifs de doublement de la part modale du ferroviaire nécessitent, selon M. Farandou, un effort de 100 milliards d'euros sur quinze ans. De notre capacité à moderniser et à digitaliser notre réseau dépend notre insertion dans l'Europe ferroviaire de demain. Il faut pour cela faire bien plus que le simple maintien en l'état du réseau. Or on le sait, le contrat de performance, même s'il remonte le curseur, ne permettrait même pas d'atteindre le strict minimum.

Vous avez approuvé l'objectif global sur les quinze ans à venir. C'est un chemin exigeant sur lequel nous devons nous engager dès cette année et qui doit être planifié sur la base d'une loi de programmation. Comment comptez-vous nous mettre sur le chemin d'un nouvel essor ferroviaire, qui laisse enfin derrière lui ce sous-investissement chronique ?

Par ailleurs, je m'interroge sur la viabilité et la pertinence du projet de liaison ferroviaire Lyon-Turin. Ses impacts sur la ressource en eau pourraient être - les premiers percements le laissent craindre - d'une gravité difficilement tolérable. Ne faudrait-il pas, dans ces conditions, s'assurer de la conformité du projet à la loi sur l'eau ? Ensuite, vous avez évoqué des coûts sous-estimés, au moment où vous semblez pencher vers le scénario d'accès le plus cher et alors que le financement européen sur lequel vous comptez tant ne semble pas garanti.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Lahellec

Je vous remercie d'avoir rappelé que le ferroviaire était la colonne vertébrale de la mobilité verte. Nous partageons majoritairement cette opinion. Je ne reviendrai pas longuement sur le départ inattendu de M. Lallemand : peut-être a-t-il été difficile pour lui de promouvoir le contrat de performance, mais comme le dit votre communiqué, on retiendra de lui ce qu'il a fait de bien...

Il faut maintenant se tourner vers l'avenir. Nous avons besoin d'une grande ambition budgétaire. Permettez-moi de vous dire que dans ce contexte compliqué, vous avez, monsieur le ministre, une chance inouïe : vous disposez d'une majorité politique pour faire plus et pour faire mieux. Je me réfère là aux rapports qui ont été publiés par le Sénat, à ceux qui ont été produits au moment de la préparation de la loi « Climat et résilience », et à bien d'autres encore. Il y a donc une majorité politique qui soutient une ambition publique pour le développement du ferroviaire. À cela s'ajoute le fait que l'ancien Premier ministre est aujourd'hui président de l'Afitf. C'est tout de même un atout pour le développement des transports et leur financement. De plus, je me suis laissé dire que vous aviez l'oreille attentive du Président de la République...

Par conséquent, au regard de toutes les propositions qui ont été formulées, il ne dépend plus que de vous de mettre en oeuvre cette ambition publique autour de laquelle un consensus politique a été exprimé dans notre pays. Êtes-vous prêt à vous saisir de ce consensus dynamique pour faire en sorte que le ferroviaire affiche une ambition nouvelle de développement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Denise Saint-Pé

Si nous sommes conscients depuis longtemps, au Sénat, de l'impératif de la transition écologique, cette dernière est devenue encore plus pressante avec les manifestations extrêmes du changement climatique que nous avons tous constatées cet été. Pour cela, il nous faut entre autres décarboner les transports, secteur responsable d'environ un tiers des émissions de CO2 en France.

Si des investissements massifs dans le ferroviaire sont nécessaires, l'État fait cependant face, en la matière, à deux injonctions très lourdes : il faut rénover les lignes existantes pour favoriser les trains du quotidien, sans renoncer pour autant à l'ambition de développer les lignes à grande vitesse. Le risque, évidemment, est qu'à vouloir poursuivre ces deux objectifs, on n'en atteigne aucun. Le Gouvernement pense-t-il être en mesure de concrétiser ce « en même temps » ? Si oui, comment ? En ce qui concerne plus particulièrement mon territoire, pouvez-vous m'en dire plus sur l'avancement du Grand Projet du Sud-Ouest (GPSO) ?

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Blanc

Nous sommes un peu surpris que vous n'ayez pas spontanément abordé la question du financement du Lyon-Turin. Ce dossier est pourtant absolument essentiel, d'abord parce que l'Europe vient de prendre un acte d'exécution, en se plaignant un peu du retard pris par la France, ensuite parce que nous manquons à nos engagements internationaux, notamment vis-à-vis de l'Italie, qui prend de l'avance sur nous. Les collectivités territoriales ont fait, sur l'initiative du préfet de région, un choix très clair sur les tracés, sur les tunnels et sur les modalités de réalisation de cette liaison. Nous aimerions donc vous entendre sur les engagements du Gouvernement, le montant des financements et surtout sur les délais.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune , ministre délégué chargé des transports

Monsieur Tabarot, je vous rassure, il est toujours bon d'avoir quelques idées avant même de recevoir, aussi éclairant soit-il, le rapport du COI. Je réaffirme les priorités données en premier lieu aux réseaux puis aux transports du quotidien. Les projets ERTMS et de commande centralisée du réseau (CCR) nécessitent des investissements massifs, pour lesquels nous solliciterons des financements européens et j'ajoute que ces innovations génèrent des économies de dépenses.

Pour sa part, le contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau ne mérite pas tant d'indignité. Il comporte un investissement inédit depuis quatre décennies de 2,9 milliards d'euros par an sur dix ans. On peut toujours dire qu'il faut aller plus loin, mais il s'agit d'un effort sans précédent qui permettra au moins, si on le fournit pendant dix ans, de stabiliser l'âge du réseau. En cela, il représente une rupture avec la tendance de dégradation préoccupante à l'oeuvre depuis de longues années.

À cet égard, j'insiste à nouveau : nous ne sommes pas un pays de sous-investissement ferroviaire. Nous devons être collectivement fiers de consacrer au transport ferroviaire un investissement tout à fait comparable et même supérieur à celui de beaucoup de pays européens. Les comparaisons fiables ou récentes sont assez rares, mais en matière d'infrastructures publiques, la France est encore très au-dessus aujourd'hui de ses voisins allemands, espagnols ou italiens. Il est vrai que l'âge de notre réseau est très supérieur à celui de nos voisins et je souligne qu'il faut cibler les investissements les plus massifs sur ce réseau vieillissant.

Au-delà des montants, la véritable question réside dans la façon dont nous mobilisons ces moyens, collectivement et dans la durée. Par nature, le secteur ferroviaire est celui du temps long et des projets de grande dimension. Or nous éprouvons de grandes difficultés à assurer un pilotage et des financements garantis sur le long terme.

Globalement, tous modes confondus, il me semble que c'est dans les domaines où l'on a réussi à créer une garantie de financement sur le temps long qu'on obtient les meilleurs résultats. Nous pouvons débattre des concessions autoroutières, mais force est de constater que, indépendamment des questions sur la répartition de la valeur entre le concédant et le concessionnaire, le réseau autoroutier est bien entretenu alors que le réseau routier national a souffert de coups d'accordéon budgétaires dus à l'absence de garanties de financement pluriannuel. On le constate également dans le secteur de l'aéroportuaire : si nous avons des infrastructures aéroportuaires d'assez bonne qualité, c'est parce que nous avons aussi des régulations pluriannuelles qui permettent les investissements.

S'agissant des petites lignes ferroviaires, l'ancien Premier ministre Jean Castex a pris des engagements : huit protocoles ont été signés entre l'État et les régions et chacun doit y prendre sa part. Les régions qui ne l'ont pas encore fait, comme la région Auvergne-Rhône-Alpes, peuvent changer d'avis et je le souhaite. Ces huit protocoles représentent un engagement important à hauteur de 5,7 milliards d'euros, qui porte sur 6 300 kilomètres de lignes sur un total de petites lignes identifiées de 9 000 kilomètres. Il s'agit donc d'un vrai réaménagement et certaines d'entre elles s'inscrivent dans les transports du quotidien, en ce qu'elles peuvent faciliter des liaisons qui aujourd'hui ne se font pas.

Pour mobiliser des financements dans la durée, les sociétés de projet, si elles ne sont pas la panacée, restent néanmoins une piste à creuser, qui, de plus, est cohérente avec les orientations de la LOM. Elles représentent non pas un démembrement, mais une garantie de financement à long terme. Ainsi, en dépit des difficultés, nous n'aurions pas autant avancé en Île-de-France dans la construction de quatre nouvelles lignes de métro, si nous n'avions pas créé une société dédiée, la Société du Grand Paris, qui dispose d'une ressource affectée et garantie dans la durée.

De même, pour certaines lignes à grande vitesse - Grand Projet du Sud-Ouest (GPSO), ligne nouvelle Provence-Alpes-Côte d'Azur (LN PCA), ligne nouvelle Montpellier-Perpignan (LNMP) - des sociétés de projet se mettent en place, qui auront une ressource locale affectée. C'est une bonne idée, qui garantit des financements. Dans la mesure où la présence d'une ligne à grande vitesse crée de la valeur pour les entreprises, il n'est pas anormal qu'il existe une contribution locale, qui de plus est ciblée.

La grande vertu du rapport du COI sera de mettre sur la table de manière objective et « oecuménique » une liste de priorités. Sur la base de ce rapport, une nouvelle programmation sera établie. Il reviendra à la Première ministre d'arbitrer dans les prochaines semaines si cette programmation prendra une forme législative ou non.

Monsieur Tabarot, j'ai noté votre remarque amicale à propos du versement mobilité. Je n'ai pas l'habitude de tenir un double discours et s'il y a eu malentendu, je le regrette. J'ai dit à vingt-quatre heures d'intervalle au Groupement des autorités responsables de transport (GART) et à Régions de France, premièrement qu'il fallait sécuriser le versement mobilité - ce n'est pas possible et pas le moment de le réduire ou d'imaginer un autre dispositif -, deuxièmement que je n'excluais pas un débat, d'ici à la prochaine loi de finances, sur le versement mobilité dans son ensemble. Un tel débat porterait sur la fixation des seuils - même si personnellement, je ne suis pas favorable à ce qu'on les abaisse - ou encore sur sa répartition, en fonction par exemple des efforts de transition écologique fournis par les collectivités. Je n'ai pas de réponse définitive aujourd'hui ; le débat parlementaire viendra en temps voulu, mais je suis ouvert à ce qu'on mène ce chantier de réflexion.

Pour être très clair, je n'ai pas annoncé de changement, au bénéfice des régions, de la répartition du versement mobilité. Vous aurez d'ailleurs remarqué que le PLF ne contient pas de réforme du versement mobilité. À titre personnel, je suis un grand défenseur de sa sécurisation.

Monsieur Jacquin, sur les autoroutes, je n'ai pas tout à fait dit qu'il ne fallait pas respecter la formule prévue par les contrats, mais que, en fonction du niveau de l'inflation qui sera connue au début de mois de novembre, nous saurions ce que donne le résultat du calcul. Compte tenu du niveau de l'inflation atteint cet été, nous aurions pu aboutir à des hausses très élevées de 7 à 8 % qui me paraissent insoutenables. Si les hausses devaient être plus modérées, nous discuterions avec les sociétés d'autoroute, mais je n'ai pas annoncé de nouveau cadre contractuel ni cité de chiffre cible pour les augmentations de tarifs.

En revanche, je mène une discussion avec les sociétés d'autoroutes pour examiner tous les leviers que nous avons pour éviter des hausses trop brutales. N'oublions pas que nous sommes dans un contexte de forte inflation et de « vérité des prix ». Même avec des mesures très puissantes - nous mettons en oeuvre les plus puissantes d'Europe -, nous aurons des augmentations des prix énergétiques de 15 % à la rentrée, là où nos voisins ont déjà subi en 2022 des hausses de 75 % ou plus de 100 % parfois dans certains pays. Il faut donc trouver un équilibre entre la prise de conscience du contexte inflationniste et des mesures de protection, qui ont toujours un coût in fine.

Sur la loi « 3DS », j'ai échangé avec le président Rottner et je vous rassure : la région Grand Est n'est pas la seule collectivité à avoir émis un certain nombre d'interrogations et de réserves. Dans sa grande sagesse, le législateur a prévu une période de trois mois de discussion entre les services de l'État et les collectivités concernées pour apporter des éléments techniques sur les coûts d'infrastructure lorsque des travaux importants sont engagés. Aux termes de la loi, c'est au ministre des transports qu'il appartient de dire ce qui est transféré ou pas, avec ensuite une phase de mise en place d'une durée de deux ans.

Je ne reviendrai pas en détail sur la problématique de SNCF Réseau, pas plus que je ne vous ferai d'annonces sur une trajectoire que nous définirons d'ici au début de l'année prochaine. Pour 2023, en revanche, nous donnons un petit coup de pouce ou plutôt un signal : il y a le contrat de performance mais aussi les 150 millions d'euros ajoutés au budget de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFIT), dont une partie importante sera allouée, je l'espère, à notre réseau ferroviaire. Ce sont des montants modestes, mais complémentaires aux 2,9 milliards d'euros précités et qui donnent, je le souhaite, la direction pour la suite de la programmation.

Sur la TVA à 5,5 %, ma réponse sera plus diplomatique. Ma conviction est que nos moyens financiers doivent être avant tout consacrés à l'offre - réseau de qualité, rames rénovées, trains nombreux et disponibles - plutôt qu'à la demande. Cela ne veut pas dire, notamment à court terme, dans une période d'inflation et d'enjeux de pouvoir d'achat, qu'on ne doive pas réfléchir à des mesures pouvant encourager l'usage des transports publics. Nos amis allemands ont mis en place le fameux billet à 9 euros. Je ne pense pas que ce soit la meilleure mesure coût-efficacité en termes de report modal. Il s'agit d'une mesure essentiellement sociale - c'est important -, mais dans un pays où le transport public en général est beaucoup moins subventionné qu'en France et où il s'est effondré pendant la covid. J'ajoute d'ailleurs que cette mesure est provisoire : comme me l'a indiqué mon homologue d'outre-Rhin, l'Allemagne réfléchit à un dispositif de soutien aux transports publics qui serait d'une ampleur bien inférieure à celle du billet à 9 euros, qui coûte tout de même 1 milliard d'euros par mois au contribuable allemand.

L'expérience espagnole, que nous observons avec attention, me paraît plus intéressante. Pendant quatre mois, l'Espagne expérimente une très forte réduction, voire la gratuité des abonnements. Pour ma part, je ne suis pas fermé à des mesures sur la demande. Elles sont toutefois coûteuses - il faut donc se montrer raisonnable et responsable - et, d'une manière plus structurelle, nous devons vraiment concentrer nos efforts sur l'offre de transport.

Quelques mots à présent sur la desserte. Je ne m'étendrai pas sur l'historique que vous connaissez bien : il y a eu des « compensations », avec des offres TER et TGV qui ne sont pas satisfaisantes. Sans vous faire de fausses promesses, je suis ouvert à la discussion pour que nous trouvions des solutions.

Sur le versement mobilité, je crois avoir donné ma philosophie : la question des taux et de leur différenciation peut faire partie de la discussion générale qui est envisagée.

Madame Perrot, il y a eu en effet cet été une très forte volonté de voyage - « revenge travel » comme disent les spécialistes - et une reprise importante du trafic aérien ou ferroviaire qui sont effectivement à l'origine de la forte hausse des prix. Cela a occasionné des perturbations et j'ai demandé à la direction générale de l'aviation civile d'établir un plan d'action très concret, en lien avec les compagnies aériennes et les infrastructures aéroportuaires, en termes d'indemnisation ou encore d'information des voyageurs pour éviter les incidents qui ont pu être observés. Je le signale tout de même, car c'est la mobilisation de notre secteur qui l'a permis : les aéroports français ont connu des perturbations bien moindres que les aéroports d'Amsterdam ou de Londres, où les annulations de vols se sont comptées par milliers.

Quels sont aujourd'hui nos leviers pour décarboner l'aviation ? Je crois d'abord à l'innovation et à l'investissement. En la matière, les choses ont déjà bien avancé et je veux le souligner. J'inaugurais l'autre jour le centre de recherche chez Safran : nous avons des moteurs qui, d'une génération à l'autre, peuvent réduire leur consommation de carburant de 20 % par décennie.

Pour alimenter ces motorisations plus économes, les carburants propres sont également une solution majeure. Plus globalement, les solutions propres pour l'aviation sont intéressantes, même si, vous le savez mieux que moi, les degrés de maturité sont très différents sur l'hydrogène ou sur l'électrique, qui concerne peut-être les petits, mais sans doute pas les gros avions à court terme.

Dès lors, le développement de carburants bio ou de synthèse, et la réduction de la consommation des moteurs peuvent constituer des priorités pour baisser l'empreinte carbone. C'est l'objet du texte européen que j'évoquais et qui pourrait faire de l'Europe le premier espace au monde à se doter de ces règles sur l'incorporation des SAF (« Sustainable Alternative Fuel »). La France a d'ailleurs montré l'exemple, puisque nous sommes les pionniers dans ce domaine - avec un niveau d'incorporation certes plus limité.

S'agissant des nuisances sonores liées au trafic aérien, des pistes complémentaires existent, comme les descentes continues, mais elles soulèvent d'autres questions sur la répartition de ces nuisances. Le principe est très simple : la consommation est moindre car les moteurs sont moins sollicités et les nuisances affectent moins de personnes, mais elles sont plus concentrées pendant l'approche finale. Il faut donc traiter ces effets de répartition au cas par cas, pour tous les aéroports.

Par ailleurs, comme vous l'avez indiqué, les jets privés ne forment pas, il est vrai, une catégorie juridique précise. On sait définir en revanche ce qui relève de l'aviation privée, qui elle-même se compose d'une aviation privée commerciale et d'une aviation privée non commerciale. C'est dans le domaine de l'aviation privée non commerciale qu'il est possible de faire le plus d'efforts de modération, voire d'alignement de notre fiscalité. Ce type d'aviation bénéficie en effet aujourd'hui d'un avantage fiscal assez difficile à comprendre, le jet privé comme on l'entend dans le débat public étant moins taxé que l'aviation de loisirs. Quant à l'aviation privée commerciale, n'oublions pas qu'elle peut servir au transfert sanitaire ou permettre des recours ponctuels d'une entreprise à un moyen d'aviation qui peut être justifié : d'où l'importance de bien cibler les mesures. Notre objectif est de parvenir à un usage modéré - je n'ai jamais parlé d'interdiction - avec une taxation équitable, en particulier de l'aviation privée non commerciale.

Madame Bonnefoy, comme vous le savez, des études ont été engagées sur les difficultés de circulation sur la RN 10 par mes prédécesseurs. Il en ressort que, si nous voulions introduire des restrictions sur l'usage de la route nationale, d'une part l'effet de report sur l'autoroute serait limité et, d'autre part, nous nous exposerions à des risques juridiques. En effet, pour mettre en place une interdiction, il faut justifier de raisons environnementales extrêmement documentées, car il s'agirait d'une restriction à la liberté de circulation. Je m'engage néanmoins à vous communiquer en toute transparence le détail de ces études et à poursuivre ce travail avec vous.

Concernant les transports scolaires et l'obligation de place assise, je partage votre avis et je l'ai publiquement souligné : je ne suis pas favorable à ce qu'on revienne sur cette règle. Le GART affirme, de son côté, que des conditions de transport debout sécurisées peuvent être réunies. Je lui ai répondu que j'étais prêt à examiner une nouvelle étude scientifique sur l'accidentologie et les risques associés, mais mon sentiment très net est qu'il ne faut pas revenir sur le principe de base du passager assis. Le dernier débat parlementaire sur cette question s'est tenu - me semble-t-il - au moment de la LOM et le Gouvernement, alors par la voix d'Élisabeth Borne, avait été très clair ; je le suis tout autant.

Madame de Cidrac, les Jeux Olympiques représentent en effet un défi majeur. Il s'agira de la plus grande opération de transport en Île-de-France en temps de paix, durant laquelle 800 000 personnes seront transportées ou susceptibles de l'être quotidiennement. Cela demande un effort massif et un travail énorme de coordination. À partir du 12 octobre prochain, je réunirai un comité des mobilités qui se tiendra toutes les six semaines et qui mettra tous les acteurs autour de la table : État, opérateurs - RATP, SNCF -, Aéroports de Paris (ADP), élus et notamment la direction d'Île-de-France Mobilités (IDFM), le délégué interministériel aux Jeux Olympiques ou encore le comité d'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques d'été de 2024 (Cojop). Un point très concret sera fait régulièrement sur le plan de transport, les voies réservées, les accès vélo, le parcours client ou usager en aéroport et dans nos transports publics, les infrastructures dédiées aux JO, etc.

Je suis prêt par ailleurs à accompagner le dialogue interrégional que vous appelez de vos voeux, notamment avec la Normandie.

Vous m'avez enfin interrogé sur les questions de nuisances sonores du ferroviaire. Je vous confirme qu'un arrêté sera pris dans les prochaines semaines pour mettre en place des expérimentations de 6 mois sur un panel de lignes existantes et de 2,5 ans sur tous les projets de construction ou de modification significatives d'infrastructure ferroviaire. L'idéal en la matière est de réaliser une analyse scientifique partagée des pics de bruit et de vibrations. Cet arrêté en définira les cadres. Enfin, sur les bruits solidiens (qui résultent de la transmission des vibrations de la voie ferrée), les travaux ont démarré et devraient aboutir courant 2023.

Monsieur Fernique, je me suis exprimé longuement hier à l'Assemblée nationale sur la question de l'eau dans le cadre du projet Lyon-Turin. C'est un fait : l'infrastructure, sur la section transfrontalière en construction, se situe dans des périmètres d'arrêtés sur l'organisation des captages. Nous serons tout à fait transparents en la matière, mais nous n'avons pas, à ce jour, identifié avec les autorités sanitaires de risque sur les captages. Je suis bien entendu favorable à des mesures de suivi régulier mais j'insiste sur le fait que toutes les procédures, y compris au titre de la loi sur l'eau, ont été scrupuleusement respectées au moment du lancement de ce projet.

Plus généralement, je le répète : je ne reprends pas à mon compte, bien au contraire, l'idée d'un sous-investissement ferroviaire.

Pour en revenir à la liaison Lyon-Turin, une deuxième étape très importante est celle des scénarios d'accès. J'ai tenu à Lyon, le 15 septembre dernier, une réunion avec les élus, les collectivités et les financeurs. Pour l'heure, l'État n'a pas choisi d'option préférentielle. Des consultations ont été menées par le préfet de région jusqu'en décembre 2021. Elles n'ont pas pu aboutir à un consensus - la Savoie ayant exprimé une opinion un peu divergente - mais l'immense majorité des collectivités ont exprimé une préférence pour le scénario dit « grand gabarit ». Trois scénarios sont donc toujours sur la table. Ce que j'ai dit le 15 septembre dernier, c'est que si telle était l'option préférentielle exprimée par une majorité de collectivités, l'État n'avait pas vocation à en choisir un autre. C'est à lui en revanche qu'il incombe de demander à l'ensemble des acteurs s'ils sont bien disposés à contribuer au financement.

En effet, il faut qu'en face de l'ambition ferroviaire, nous ayons une capacité de financement budgétaire. On se prononce souvent en faveur de projets ambitieux, jusqu'au moment où on en vient au tour de table financier. J'ai donc demandé au préfet de mener une concertation spécifique sur ce point. Ce n'est qu'une fois que cet éclairage sur les contributions sera donné que l'État prendra la décision sur le scénario des accès, de manière concertée et transparente.

Une petite musique s'est par ailleurs installée selon laquelle nous n'aurions pas les financements européens essentiels au bouclage du projet. C'est inexact. Ces derniers tardent certes à venir et je m'en suis expliqué avec la commissaire européenne, mais quel que soit le scénario retenu et quelle que soit la date, le projet bénéficiera d'un financement européen.

L'urgence n'est pas tant de respecter la date administrative de tel ou tel financement européen, que de clarifier notre choix de scénario. En tout état de cause, nous commencerons par mener des études et je rappelle que ces études pourront être financées jusqu'à 50 % par la Commission européenne, même après le 30 octobre ou le 30 novembre prochains - ces modalités de date ne sont donc pas essentielles pour dicter nos choix et notre démarche.

Monsieur Lahellec, je vous remercie de votre invitation à une ambition nouvelle de développement. Je le répète : cette ambition doit trouver son pendant budgétaire et j'ai donné quelques pistes sur les modes de financement envisageables.

Madame Saint-Pé, vous avez évoqué le « en même temps » : petites lignes d'un côté, grandes lignes et lignes à grande vitesse (LGV) de l'autre. Nous devons établir des priorités, même si c'est toujours douloureux. J'assume pour ma part ces deux priorités que sont le réseau et les transports du quotidien. Elles sont relativement larges et ne signifient pas la fin des LGV. Elles signifient en effet que, dans un pays où nous avons déjà beaucoup développé la grande vitesse, cette dernière doit sans doute être financée différemment. À cet égard, la piste des sociétés de projet me semble pertinente. Les ressources collectives payées par le contribuable doivent être plutôt affectées aux domaines qui nécessitent un effort national renforcé, notamment la modernisation du réseau. Pour le reste, je vous renvoie aux travaux du COI. Pour les petites lignes, les protocoles sont engagés et les crédits sont mobilisés au sein de l'Afitf. Je n'ai pas évoqué le fret ni les trains de nuit, sur lesquels, là encore, des engagements ont été pris et seront tenus.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Marchand

Notre pays accueillera la Coupe du monde de rugby l'an prochain et les Jeux Olympiques et Paralympiques en 2024. Or les incidents survenus lors de la finale de la Ligue des champions de football au printemps dernier ont mis en évidence la difficulté pour les opérateurs de transports de gérer les mouvements de grève déclenchés par le biais d'un préavis illimité dormant ou par la technique dite de la grève perlée. Les textes relatifs à ces pratiques sont susceptibles d'interprétations différentes. Ne conviendrait-il pas d'éclaircir la situation rapidement sur ces sujets ?

Les opérateurs souhaitent aussi allonger le délai de déclaration de 48 heures à 72 heures, et porter le délai relatif au changement de date de 24 heures à 48 heures, de manière à pouvoir informer les usagers le plus en amont possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Angèle Préville

Hier, j'ai pris l'avion à Aurillac pour venir à Paris. Après une heure de vol, alors que nous approchions d'Orly, on nous a informés subitement qu'il était impossible d'atterrir à cause du brouillard. L'avion a alors dû faire demi-tour et revenir à Aurillac... J'ai été fort surprise et je m'interroge sur ces pratiques, car le bilan carbone qui en résulte n'est pas neutre !

Vous avez mis l'accent sur les mobilités du quotidien. Je souligne que le vélo a un potentiel de développement important lorsque l'on sait que 60 % des trajets entre le domicile et le travail ont une distance inférieure à 5 kilomètres. Le vélo à assistance électrique connaît un grand succès car il permet également de faire des trajets de plusieurs kilomètres, même dans mon département, qui est très vallonné. La demande de vélos augmente et les magasins sont en rupture de stock.

Vous avez lancé un plan Vélo, mais dans le détail, il s'agit surtout d'appels à candidature des collectivités pour cofinancer des études, des expérimentations ou des campagnes de communication, etc.

L'essentiel est de développer des pistes cyclables dignes de ce nom pour permettre aux gens de se déplacer en toute sécurité. Envisagez-vous un grand plan de développement de véloroutes, c'est-à-dire de routes réservées aux vélos, comme il en existe en Hollande, ou alors de voies de circulation nettement séparées des autres, comme en Allemagne ? Dans le Lot, beaucoup de personnes ont acquis des vélos électriques, incitées par les aides du département, mais elles hésitent à les utiliser, car elles estiment que c'est trop dangereux.

Les appels à candidature que vous lancez sont limités à l'échelle d'un territoire. Pour créer un vrai choc d'offre en faveur du vélo, il conviendrait d'agir à grande échelle, de façon à permettre des déplacements d'un territoire à un autre. Ce serait un signal fort en faveur d'une transformation positive.

Par ailleurs, je signale que le nombre de dessertes ferroviaires du Lot diminue. Les trains de la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse s'arrêtent souvent à Brive et ne descendent pas plus bas. Je ne reviendrai pas non plus sur l'importance des trains du quotidien et des petites lignes, à l'image de la ligne Brive-Aurillac.

Enfin, dans le Lot, des citoyens ont créé une société coopérative, Railcoop, qui réunit 13 000 sociétaires - des citoyens, des particuliers et des collectivités -, avec pour objectif de développer des services ferroviaires de fret comme de voyageurs, dans le cadre de services librement organisés, et en complémentarité avec les services existants. Il s'agit tout simplement de fournir des services que n'offre plus la SNCF. Cette coopérative a déjà fait rouler des trains de fret en Occitanie et envisage de lancer une première ligne de voyageurs entre Bordeaux et Lyon, sous réserve de la finalisation de son tour de table financier. Quel regard portez-vous sur cette initiative citoyenne ?

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gillé

On a l'impression de devoir résoudre la quadrature du cercle. Il faudrait trouver 100 milliards d'euros pour mener à bien tous les chantiers ferroviaires : rénovation du réseau, développement des transports du quotidien, des petites lignes, des lignes moyennes, renouvellement du matériel, etc. Nous en sommes loin, d'où la nécessité d'établir des priorités. Mais j'ai entendu dans vos propos une inflexion intéressante.

On peut s'interroger sur le caractère prioritaire du Grand projet ferroviaire du Sud-Ouest. Les incertitudes financières sont nombreuses. Son coût s'élève à 14 milliards d'euros ; l'État s'était engagé à le financer à hauteur de 40 %, mais il semble prêt à ne vouloir mettre que 4 milliards sur la table. Le ministre Djebbari avait précisé que cela ne concernait que la ligne entre Bordeaux et Toulouse, mais qu'en est-il de la ligne Bordeaux-Dax ? Comptez-vous verser la somme de 1,6 milliard d'euros qui permettrait d'atteindre les fameux 40 % ? L'impossibilité de franchir l'Espagne semble faire barrage à l'obtention d'un financement européen alors que celui-ci est attendu à hauteur de 20 % du coût du projet. L'État compensera-t-il cette part si la Commission européenne estime que ce dossier n'est pas prioritaire ? Auquel cas, mettrez-vous la priorité sur la ligne Bordeaux-Toulouse, au détriment de la ligne Bordeaux-Dax ?

Enfin, allez-vous respecter l'engagement pris par votre prédécesseur de rendre public l'avis du Conseil d'État sur l'ordonnance créant la société de projet pour le financement de GPSO ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Gold

Vous connaissez les dysfonctionnements de la ligne Paris-Clermont-Ferrand et je vous remercie d'ailleurs pour votre déplacement à Clermont-Ferrand. La nécessité de recueillir l'avis de l'autorité environnementale ne devrait pas permettre d'accélérer le calendrier des travaux prévus pour améliorer les conditions de voyage. Les problèmes que je viens de citer étant communs à de nombreux territoires, nous avons besoin d'une démarche beaucoup plus ambitieuse et prospective, articulée autour d'une loi de programmation pluriannuelle du ferroviaire.

S'agissant des transports du quotidien, je souligne que les innovations fleurissent dans le champ des transports collectifs : trains-trams, trains légers, trains-bus, ou encore les trains mixtes qui transportent en même temps des voyageurs et du fret. Les territoires, en particulier les moins peuplés, recherchent des solutions pour réduire la place de la voiture individuelle et sont prêts à investir dans des dispositifs innovants, à condition d'être accompagnés et soutenus par l'État. Quelle place accordez-vous à l'innovation et à l'expérimentation pour mieux adapter le ferroviaire aux besoins de nos territoires ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Chevrollier

Ma question portera d'abord sur l'électrification du parc automobile, qui améliorera, entre autres, la qualité de l'air dans les agglomérations. J'ai compris qu'il faudrait attendre un peu pour connaître modalités du leasing social. Les délais prévus d'entrée en vigueur des ZFE-m seront-ils tenus ?

Vous avez plus généralement évoqué la nécessité de décarboner le secteur des transports et je voudrais évoquer l'impact de la flambée du prix du gaz sur le bioGNV (Gaz Naturel pour Véhicules), dont le prix à la pompe a doublé en un an, dépassant désormais de 30 % le prix du gazole. Cette situation pénalise fortement les entreprises et les collectivités locales qui se sont engagées dans la conversion de leur flotte de véhicules vers le bioGNV. Quels mécanismes envisagez-vous afin de faire en sorte que le bioGNV conserve un prix compétitif, ce qui est extrêmement important pour soutenir la filière dans nos territoires ruraux qui sont engagés dans la transition énergétique et qui soutiennent les projets de méthanisation, comme en Mayenne par exemple ?

Enfin, les transporteurs routiers attendent des évolutions relatives à l'autorisation des doubles remorques sur certaines voies routières : cela permettrait de limiter le nombre de camions.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

Je voulais vous interroger sur le report modal entre le fleuve et la route ainsi qu'entre le fluvial et le rail. Si les discours sont toujours positifs et volontaristes, les traductions dans les faits sont plus limitées. Je ne prendrai comme exemple que le canal Seine-Nord, un projet à l'étude depuis des décennies. Le projet initial comportait quatre plateformes trimodales, mais seulement deux d'entre elles seront réalisées, pour des raisons financières. C'est dommage. Quelle est votre vision du report modal et quels moyens mettrez-vous en oeuvre pour le développer ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert-Luc Devinaz

Je voudrais revenir sur la ligne Lyon-Turin, dont l'appellation est trompeuse puisqu'il s'agit justement du tronçon de la ligne qui manque et qui permettrait au Portugal d'être relié au reste de l'Europe. Les dernières évolutions dans le sens d'un rééquilibrage en faveur du rail et du fret dans l'agglomération lyonnaise me semblent intéressantes. Si nous tardons à réaliser les accès au tunnel du côté français, on prend le risque de ne pas bénéficier du cofinancement de l'Europe, à hauteur de 50 %.

Quel est l'état d'avancement du projet de contournement ferroviaire de l'agglomération lyonnaise (CFAL) ? Ce projet devrait être greffé sur la liaison entre les Alpes et la vallée du Rhône, avec un passage par la rive droite du Rhône. La SNCF indique que ces réseaux sont déjà saturés. Pourquoi n'envisage-t-on pas un prolongement de la ligne à grande vitesse (LGV) à partir de l'aéroport de Lyon-Saint-Exupéry ?

Par ailleurs, pour parvenir à l'objectif de « zéro émission nette » dans l'aérien en 2050, il faudra développer de nouveaux carburants. Seront-ils disponibles à cette date et en quantité suffisante ? C'est un pari technologique important. Cela passera aussi par un renouvellement de la flotte : le secteur aérien aura-t-il les moyens d'en supporter les coûts ? Quelles seront les conséquences sur le trafic ou sur le prix des billets ?

Puisque l'heure est à la sobriété, je ne peux pas ne pas évoquer le déplacement en avion du Paris-Saint-Germain (PSG). Lors de l'examen du projet de loi « Climat et résilience », j'avais déposé un amendement visant à soumettre les vols d'affaires aux mêmes restrictions que celles pesant sur le transport aérien de passagers. La ministre m'avait alors objecté que cela remettrait en cause la liberté d'aller et de venir ; selon elle, c'était comme si on interdisait la voiture individuelle quand une alternative en transport en commun est possible ; mais c'est un petit peu ce que nous mettons en place avec les ZFE-m... On doit encourager fortement les gens à privilégier les transports en commun et cela justifie certaines restrictions. Que comptez-vous faire pour réglementer les vols privés et faire en sorte que tous les Français participent à l'effort de réduction des émissions et aux économies d'énergie ? Il ne faudrait pas que les uns portent des cols roulés pendant que les autres font voler leur jet privé !

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Genet

Je vous remercie pour votre leçon d'anatomie des transports et permettez-moi de prolonger cette métaphore. Un mot d'abord sur les « poumons » puisque les transports sont une source de pollution atmosphérique majeure. Une modification des directives européennes sur la qualité de l'air devrait être annoncée et l'Organisation mondiale de la santé (OMS) préconise de réduire considérablement les taux de concentration des différents polluants. Quelle est la position de la France en la matière ?

Vous avez également présenté la modernisation du réseau ferroviaire comme la « colonne vertébrale » des mobilités. Je ne reviendrai pas sur la « sciatique » que connaît la ligne Clermont-Ferrand-Lyon et me bornerai à déplorer que le potentiel de la ligne TER entre Paray-le-Monial et Lyon soit sous-exploité, en raison d'aménagements insuffisants : l'absence de zones d'évitement et de permanences aux postes d'aiguillage limite en effet la circulation à seulement quatre allers-retours quotidiens avec la métropole lyonnaise, ce qui pénalise les usagers des transports en commun. J'espère donc, monsieur le ministre, que, sur ce sujet, nous n'en resterons pas à l'os !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Houllegatte

Comme nous le savons, le ferroutage constitue une réponse efficace à l'exigence de décarbonation du transport routier ; pourtant il reste marginal. Des initiatives ont certes été prises, notamment sur les axes qui relient Calais à l'Italie, et Calais à l'Espagne. L'armateur Brittany Ferries développe aussi un projet entre le port de Cherbourg et la gare de Mouguerre, près de Bayonne ; de plus un accord-cadre a été signé avec la SNCF. Néanmoins je doute un peu de la capacité de la SNCF à réaliser les aménagements ferroviaires en temps et en heure. Le Gouvernement prévoit-il de lancer de nouveaux appels d'offres pour développer de nouveaux services d'autoroutes ferroviaires ? De quels moyens de contrôle peut-on se doter pour apprécier si les engagements pris par les différents partenaires sont respectés ?

Enfin, quid de la ligne nouvelle Paris-Normandie ? Voilà vingt ans que l'on en parle et que la première enquête publique a été menée ! Il faut trois heures et quart, voire trois heures quarante-cinq, pour aller de Cherbourg à Paris. Le Sénat a publié des rapports volumineux sur le sujet. Néanmoins la qualité du service laisse encore à désirer. Doit-on attendre des avancées, au-delà prolongement de la ligne RER Eole et du saut-de-mouton de Bezons qui permet de déconnecter le trafic de banlieue parisien du trafic des grandes lignes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Anglars

Une question ponctuelle : le Gouvernement compte-t-il soutenir le projet de la mise en 2x2 voies de la RN 88 entre Rodez et Sévérac-le-Château ? Des discussions avaient eu lieu avec votre prédécesseur et le Premier ministre sur ce sujet. J'espère que l'on pourra enfin réaliser ce chantier.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Gueret

Lors de son audition devant notre commission le 14 septembre dernier, le président de la SNCF, Jean-Pierre Farandou, a confirmé que l'hydrogène vert représente une opportunité pour le train, à condition que nous soyons en mesure d'en produire massivement à un coût raisonnable et de le distribuer partout sur le territoire...

Il s'est dit confiant et envisage une possible utilisation de cette source d'énergie verte d'ici une quinzaine d'années. Dans cette hypothèse, comment synchroniser les investissements engagés pour développer l'hydrogène vert avec ceux déjà engagés dans le cadre des contrats de plan en faveur de lignes fonctionnant au diesel ? En particulier, quels seront les choix opérés en Eure-et-Loir pour les liaisons Chartres-Courtalain et Tours-Châteaudun-Paris ?

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

Vous avez été déjà interrogé sur l'état de la ligne Paris-Nevers-Clermont-Ferrand lors des questions d'actualités. Je voudrais à présent vous interroger sur la ligne Polt. De gros travaux sont prévus pour moderniser cette ligne et on espérait, avec votre arrivée, une accélération de ce chantier. Malheureusement, vous avez annoncé un retard de livraison des 16 nouvelles rames Intercités prévues. Châteauroux accueillera les épreuves de tir lors des jeux Olympiques de 2024. Il serait donc opportun que l'on puisse obtenir les nouvelles rames avant cette date pour pouvoir accueillir les sportifs venus du monde entier et les spectateurs. La région Nouvelle-Aquitaine ne semble pas favorable pour des questions de financement. Des négociations sont en cours : où en sont-elles ?

D'autre part, la ligne Bourges-Montluçon est une ligne d'équilibre pour nos territoires ruraux, mais ne relève plus de la région Centre-Val de Loire. Des travaux sont prévus depuis longtemps, mais ils n'ont pas commencé... Peut-on également espérer la réalisation de la ligne à grande vitesse Paris-Orléans-Clermont-Lyon (POCL) ? Celle-ci résoudrait bien des problèmes et une tierce expertise doit être réalisée.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune , ministre délégué chargé des transports

Monsieur Marchand, nous aurons une discussion sur le dialogue social avec les opérateurs de transport, sans doute à la fin de l'année. On ne peut pas imaginer qu'un événement comme les Jeux Olympiques ne donne pas lieu à une mobilisation générale, dans une démarche de responsabilité. Je ne suis pas sûr pour autant qu'il faille modifier notre dispositif législatif, comme le préconise l'Union des transports publics et ferroviaires. Nous en discuterons, notamment avec la RATP.

Madame Préville, je suis confus pour la mauvaise expérience aérienne que vous avez vécue. Il s'agit cependant d'un incident exceptionnel.

S'agissant du vélo, vous mettez l'accent à juste titre sur le développement des infrastructures et sur la sécurité. Pouvoir circuler sur des sites protégés et disposer de sites de stationnement sécurisés pour laisser son vélo, en gare ou chez soi, sont deux facteurs déterminants qui incitent les gens à prendre le vélo. C'est sur ces aspects que nous comptons mettre l'accent dans le cadre du nouveau plan Vélo annoncé par la Première ministre. Dans ce cadre, le Fonds mobilités actives sera doté de 250 millions d'euros en 2023, avec 200 millions pour les infrastructures et 50 millions pour le stationnement : nous sommes en train d'en définir les paramètres. Un comité interministériel du vélo a été mis en place et se réunira pour la première fois sous la présidence de la Première ministre d'ici à la fin de l'année et tous les 6 mois ensuite. Il lui appartiendra de définir les paramètres de cette nouvelle contractualisation avec les collectivités, avec l'idée d'aider celles qui ont moins d'avance ou moins de ressources pour développer des d'infrastructures sécurisées. Certaines grandes villes ont parfois pris de l'avance, parce qu'elles ont plus de moyens. Pour les plus petites collectivités des zones rurales, c'est plus coûteux. On recense aujourd'hui plus de 55 000 kilomètres de pistes cyclables et de voies vertes, contre 40 000 kilomètres en 2017, soit une hausse de 40 %. On compte aussi 19 000 kilomètres de véloroutes. Nous voulons poursuivre l'effort, en lien avec les collectivités, pour faire de la France en 2030 la première nation pour le cyclotourisme.

S'agissant de la desserte du Lot, je vous propose d'y revenir de manière spécifique ultérieurement.

Par ailleurs, Railcoop représente un modèle innovant et coopératif d'opérateur ferroviaire alternatif à la SNCF mais l'équilibre économique et financier de ses opérations est difficile à trouver, en raison de l'ampleur des besoins d'investissements. C'est pourquoi la Caisse des dépôts aide cette entreprise à boucler son financement. Railcoop a déjà manifesté son intérêt pour des lignes ouvertes à la concurrence : nous verrons si son offre est solide et crédible. Cet acteur peut devenir un opérateur complémentaire, au même titre que d'autres opérateurs étrangers. Une concurrence bien encadrée, avec des cahiers des charges définis par l'État ou les régions selon les cas, peut constituer en effet, selon moi, un facteur de développement de l'offre ferroviaire.

Monsieur Gillé, pour être honnête, je n'ai pas connaissance de l'engagement de mon prédécesseur au sujet de l'avis du Conseil d'État portant sur la société de projet pour le financement le Grand Projet du Sud-Ouest (GPSO). Après vérification, nous mettrons en oeuvre l'engagement pris au titre de la nécessaire continuité de l'État.

Sur les financements européens et plus spécifiquement sur le GPSO, il est évident qu'il est plus facile d'obtenir des allocations dès lors que le projet présente une dimension transfrontalière. Il ne faudrait pas néanmoins que le mieux soit l'ennemi du bien. Voilà un projet en cours de déploiement, financé au moyen d'une société de projet, qui va bénéficier de ses premières ressources affectées, si le Parlement en décide ainsi, dès 2023. Le projet est concret et plus mûr sur la portion Bordeaux-Toulouse. La partie d'aménagement dans l'agglomération bordelaise servira de toute façon à l'ensemble des deux branches du projet. Pour l'heure, nous n'avons pas encore de réponse européenne définitive, y compris sur la première branche. Il est évident que plus nous donnerons de garanties sur la portion Bordeaux-Dax, plus nous aurons de chances d'obtenir un financement européen élevé.

En résumé, je suis optimiste sur la mobilisation de financements européens pour le GPSO. Si les financements ne sont pas à la hauteur ou plus tardifs qu'escompté, nous rediscuterons des clés de financement, mais l'État n'a pas vocation à prendre en charge systématiquement l'intégralité du risque. Il faudrait donc que l'effort financier soit partagé, comme c'est le cas depuis le départ.

En réponse au sénateur Gold, je ne reviendrai pas sur le Paris-Clermont mais, s'agissant des transports innovants, plusieurs financements ont été mobilisés, notamment dans le cadre de France 2030 à hauteur de 200 millions d'euros. Je tiens au développement de solutions de transport terrestre innovantes, notamment en matière de transport autonome. Je citerai comme exemple une solution financée par l'Ademe dans l'Indre, qui est un cas unique de transport autonome en zone rurale et qui peut être un facteur de désenclavement.

Sur la question du leasing, nous travaillons avec Agnès Pannier-Runacher à sa mise en place d'ici à la fin de l'année. Je vous le dis franchement : la mise en oeuvre sera forcément progressive, dans l'attente d'une véritable offre industrielle française ou européenne. Ma conviction est que nous devons mettre l'accent sur les zones rurales pour ce dispositif complémentaire aux financements existants pour favoriser le passage à l'électrique.

En ce qui concerne les bioGNV, nous devons d'abord nous assurer de leur disponibilité pour les semaines et mois à venir, car nous avons quelques inquiétudes. Le bouclier énergétique qui a été annoncé par la Première ministre fera partie des solutions envisageables. Je rappelle aussi que nous avons autorisé cet été les transporteurs à répercuter le prix des énergies alternatives, y compris le bioGNV, dans le coût facturé au chargeur, pour que le rapport de force économique puisse être en partie rééquilibré.

Concernant les doubles remorques du transport routier, je dois encore me faire une opinion. Cela pourrait constituer une solution en partie écologique, à la condition de respecter les exigences de sécurité et de ne pas aggraver les risques.

Madame Filleul, je ne reviens pas sur le canal Seine-Nord que vous avez évoqué. Sur la question des plateformes trimodales, je vous apporterai des précisions, mais le Gouvernement réaffirme sa volonté de renforcement du fret fluvial, y compris grâce aux crédits budgétaires, qui ont été accentués dans le cadre du plan de relance.

J'intègre d'ailleurs dans cette réflexion toute une continuité d'ensemble incluant ports, axes fluviaux et, potentiellement, derniers kilomètres en transport routier ou autres. Une mission a d'ailleurs été confiée au préfet de région Mailhos, pour réfléchir aux connexions port maritime, fluvial, ferroviaire et routier. Un rapport sera remis d'ici à la fin de l'année sur l'axe rhodanien principalement, mais qui pourra servir de modèle réussi à généraliser. Ces interconnexions doivent être aussi renforcées dans les contrats de plan État-Régions. L'électrification des quais dans les ports fluviaux et l'aménagement de l'infrastructure fluviale pour les zones urbaines denses sont des exemples de ce que le plan de relance peut financer. Le volet fluvial du plan de relance finance aussi 175 millions d'euros d'investissements complémentaires sur la régénération des infrastructures fluviales d'ici à 2024.

J'en viens à l'intervention de M. Devinaz sur le financement européen du Lyon-Turin. Soyons clairs : en phase d'études, par principe, le droit commun européen prévoit jusqu'à 50 % de financement. La Commission européenne a dit - et cela a pu être interprété comme la fixation d'une date limite - que si nous choisissions rapidement le scénario d'accès, nous pourrions être éligibles, pour le prochain appel à projets, à 50 % de financement. Le point que la Commission européenne n'avait pas examiné de près est que, quel que soit le scénario retenu, nous ne demanderions pour les prochaines années que des financements portant sur des études. Cette majoration du taux est en quelque sorte inopérante, puisque de toute façon nous serons dans le droit commun des cofinancements à hauteur de 50 %.

Il n'y a donc pas d'urgence majeure, au regard des financements européens, à prendre notre décision sur le meilleur scénario. De toute façon, ce que nous demanderions à l'Europe, ce sont des financements d'études et les financements d'études sont éligibles aux aides à 50 %. Ce n'est donc pas tant pour l'Europe que pour nous-mêmes que nous devons prendre une décision rapide sur la question des accès. Le scénario grand gabarit, à un peu plus de 10 milliards d'euros, prend aussi en compte le financement du Contournement Ferroviaire de l'Agglomération Lyonnaise (Cfal) nord, ce qui explique d'ailleurs son montant élevé.

Monsieur Genet, je rappelle que la directive européenne sur la qualité de l'air vise à rapprocher, au fur et à mesure de ses générations, les normes de concentration vers les normes OMS. Essayons déjà de mobiliser tous les outils pour respecter les normes européennes actuelles. Quand les normes OMS se perfectionneront, le droit européen évoluera et nous ferons tout pour nous y conformer, comme nous avons essayé de le faire, notamment par la politique des ZFE-m.

Par ailleurs, j'insisterai beaucoup sur la ligne Paris-Clermont - les événements des 19 et 20 juillet derniers, avec un retard exceptionnel de près de 20 heures, étaient heureusement exceptionnels - car je crois qu'elle est très emblématique, comme d'autres, des efforts financiers qui sont engagés par l'État. Ces derniers constituent la meilleure réponse pour moderniser des lignes en difficulté, sur lesquelles on n'avait pas investi depuis quarante ans. En tout état de cause, je ferai tout pour limiter les retards industriels auxquels nous faisons face.

Sur le ferroutage, la ligne Sète-Calais devrait être déployée dans quelques mois, la ligne Sète-Valenton, début 2023 et la ligne Cherbourg-Mouguerre, fin 2024, conformément à la stratégie nationale pour le développement du fret ferroviaire. Nous devons aussi faciliter, via les CPER, la possibilité de transporter des conteneurs sur des trains afin de désengorger nos ports, comme Dunkerque ou Marseille-Fos par exemple.

En ce qui concerne la ligne Paris-Normandie, les études préalables à l'enquête publique sont en cours. Dans le séquencement, nous continuons à donner la priorité au noeud de Paris-Saint-Lazare. Il faut aussi sécuriser les financements de nombreuses infrastructures, comme la nouvelle gare de Rouen. Sur la base des travaux du conseil d'orientation des infrastructures, nous prévoirons dans la nouvelle génération de CPER des financements d'études ou de projets concrets sur la période qui commencera l'an prochain. Je sais que ce processus peut paraître un peu long, mais il convient de franchir un certain nombre d'étapes obligatoires.

J'en viens à la ligne Paris-Lyon : la première opération de rénovation de 2017 a représenté près de 45 millions d'euros, répartis entre les CPER signés avec les régions Bourgogne-Franche-Comté et Auvergne-Rhône-Alpes. La nouvelle opération de rénovation est prévue en 2025 et les études préparatoires sont en cours de financement. Le CPER constituera une étape très importante. Nous souhaitons également nous inscrire dans le cadre du protocole d'accord sur les petites lignes ferroviaires, ce qui implique que la région Auvergne-Rhône-Alpes définisse le montant de sa participation. On estime les besoins de financement des travaux, d'après les études, à 17 millions d'euros. L'État est prêt à prendre sa part, comme il l'a fait en 2017, mais le montant de sa participation n'a pas encore été défini dans la mesure où nous attendons la signature de ce protocole par la région... S'agissant des études préparatoires, l'État a octroyé un financement de 400 000 euros sur un total d'1,5 million.

En ce qui concerne la ligne Chartres-Courtalain, le besoin de financement identifié s'élève à 17 millions d'euros, dont 1,4 million à la charge de SNCF Réseau, tandis que la contribution de l'État via le CPER s'élèverait à près de 5 millions.

La RN 88 fait partie des projets que nous suivons avec attention. Une négociation va s'engager avec la région, également dans le cadre du CPER. Le département de l'Aveyron sera sans doute aussi associé au financement. En tout cas, j'ai notifié ce projet à la préfecture dans le cadre du recensement des projets du prochain volet contractuel sur la mobilité.

J'en viens aux difficultés que connaît la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (POLT) : ici encore, les rames et le réseau sont anciens. L'État va investir avec SNCF Réseau 1,9 milliard d'euros. J'étais à Châteauroux le 22 août dernier et je ne dispose pas d'estimation précise du retard potentiel dans la livraison des nouvelles rames. Toutefois, comme pour la ligne POCL, je ferai en sorte que les retards des premières livraisons soient les plus réduits possible par rapport à la première échéance prévue en 2024. Il ne m'apparaît pas impossible que toutes les rames puissent avoir été livrées en 2026, conformément aux engagements pris. En tout cas, le retard devrait se limiter à quelques mois, et non se chiffrer en années, même si toutes les rames n'auront pas été livrées avant les Jeux Olympiques. Je veillerai à répartir équitablement les nouvelles rames entre les lignes POLT et POCL (Paris Orléans Clermont-Ferrand Lyon) pour qu'il n'y ait pas de disparités. Je vous donnerai des précisions complémentaires sur le calendrier de livraison précis d'ici à la fin de l'année après avoir communiqué avec les fournisseurs.

J'aurai aussi des échanges avec Châteauroux-Métropole pour permettre le développement d'une offre globale de transports de bonne qualité, notamment en vue des J.O., et assurer une bonne desserte de la ville.

La rénovation de la ligne Paris Orléans Clermont-Ferrand Lyon (POCL) constitue un projet de long terme, dont l'horizon s'inscrit au-delà de la prochaine décennie. Je suis prêt à ce que l'on revoie le calendrier des études, mais, quoi qu'il en soit, les échéances ne relèvent pas du court terme.

En ce qui concerne la ligne Bourges-Montluçon, dossier emblématique de la réalité de la revitalisation des petites lignes, un protocole d'accord a été signé entre l'État et la région Centre-Val de Loire, qui définit une stratégie, assortie d'un financement sur 10 ans. L'État financera les investissements de régénération de la ligne à hauteur de 90 % et les travaux commenceront en 2023. Dans la partie située dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, les travaux coûteront 29 millions d'euros, l'État en finançant la moitié.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune , ministre délégué chargé des transports

Je n'ai pas le chiffre exact en tête ; je vous le transmettrai ultérieurement quand j'aurai les données précises.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Gueret

Vous m'avez apporté une précision sur le contrat de plan et sur la ligne Chartres-Courtalain, mais ma préoccupation porte sur les lignes diesel qui font aujourd'hui l'objet de contrats de plan : il ne faudrait pas que, dans quelques années, elles soient menacées de fermeture, parce qu'elles sont diesel et que la SNCF aura décidé de passer au tout hydrogène.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune , ministre délégué chargé des transports

Il n'est pas question de faire subir une forme de double peine à certains territoires : absence de soutien pour passer à de nouvelles technologies, d'un côté, et fermetures au motif que nous ne serions pas passés à de nouvelles technologies, d'un autre côté. Je suis prêt, là aussi, à étudier les modalités de financement d'une solution de type hydrogène.

Sur la question des changements de carburant dans l'aérien, trois axes permettront de rendre les modes de vol les plus propres possible. Les gros-porteurs ne sont pas concernés dans l'immédiat par l'hydrogène ou l'électrique. Nous devons donc mettre l'accent sur les carburants de synthèse et sur les biocarburants. Je redis que nous sommes le premier pays à avoir défini des normes en la matière - 1 % pour l'année prochaine. Nous sommes en train de définir des normes au niveau européen, qui devraient vraisemblablement s'établir à 6 % en 2030.

Le sujet central est que nous avons besoin de cette référence pour encourager l'émergence de l'offre. Sur les biocarburants tout particulièrement, nous aurons également besoin d'établir, dans les feuilles de route, secteur par secteur, des priorités d'usage, en priorisant les secteurs - probablement l'aviation - dans lesquels nous n'aurons pas d'alternative.

Sur les mesures envisagées à l'égard des vols d'aviation privée, des amendements ont été déposés à l'Assemblée nationale. Ils portent sur la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) en vue d'un rééquilibrage. En effet, la TICPE est aujourd'hui plus élevée pour l'aviation privée non commerciale et l'aviation de loisirs que pour l'aviation privée commerciale, ce qui est difficile à expliquer.

Deux textes sont en discussion au plan européen. Le premier - je l'ai évoqué -, sur les carburants et les fameux SAF, laissera vraisemblablement la possibilité aux États membres d'élargir le socle de règles européennes - les 6 % d'incorporation à horizon 2030 par exemple - à des petits aéroports et notamment aux aéroports d'affaires.

Le deuxième texte européen sur l'aviation, plus général, est une directive sur la taxation de l'énergie. Il prévoit la fin de l'exemption kérosène : vous savez qu'aux termes d'une convention internationale ancienne, le kérosène est exempté de taxes dans l'aviation et qu'il n'y a pas de dérogation possible, sauf pour les vols intérieurs. Si nous voulons instituer une exemption qui ait du sens et soit efficace, il vaut donc mieux la faire sur l'espace européen dans son ensemble. Ce texte, proposé par la Commission européenne, est soutenu par le Gouvernement français.

Enfin, une discussion est en cours sur le système d'échange de quotas d'émissions, dit ETS. Il pourrait donner lieu à une différenciation entre certains segments de l'aviation privée et l'aviation commerciale plus classique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Longeot

Je vous remercie pour ce temps d'échange approfondi et les informations fournies que vous avez pu apporter devant notre commission.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 18 h 55.