Nous examinons le rapport de notre collègue Pascal Allizard sur la proposition de résolution européenne (PPRE) visant à prendre des mesures appropriées contre les atteintes aux droits fondamentaux commises en Iran.
La répression par les autorités iraniennes du mouvement de contestation de l'automne 2022, à la suite de la mort de Mahsa Amini, a été d'autant plus brutale et révoltante qu'elle s'est abattue sur une population qui s'est soulevée contre les violences policières et pour la défense des droits des femmes. Je rappelle que cette étudiante de 22 ans a été arrêtée par la police des moeurs iranienne au seul motif d'avoir mal mis son voile.
De la fin septembre à la mi-décembre 2022, le mouvement de contestation populaire s'est étendu à tout le territoire iranien. Alors que les slogans et protestations étaient initialement centrés sur la défense des droits des femmes, ceux-ci se sont élargis à une remise en cause du port du voile, des méthodes policières, du clergé chiite et du Guide, l'ayatollah Khamenei, lui-même.
La réaction des autorités a été brutale. Le bilan de cette répression est, selon les organisations non gouvernementales (ONG) de 527 morts, avec près de 20 000 personnes arrêtées. Plus de vingt personnes ont été condamnées à mort et cinq d'entre elles ont été exécutées en décembre 2022 et janvier 2023. Il convient de dénoncer ici une stratégie policière de la terreur faite de tabassages au hasard dans les rues, de rafles aléatoires de groupes d'étudiants, de contrôle des réseaux sociaux et d'arrestations arbitraires. Elle se double d'une stratégie judiciaire de dissuasion qui fonctionne par l'incertitude de l'issue des procédures judiciaires, une simple arrestation pouvant conduire à des peines de prison disproportionnées, voire à la peine de mort.
En raison de ce climat de terreur, on peut comprendre que les manifestations aient presque totalement cessé en Iran. Nous n'en mesurons que mieux le courage de ces manifestantes qui ont ôté leur voile. On nous rapporte que la fracture est profonde entre les Iraniens et les autorités et que la contestation perdure dans la désobéissance civile, sur fond de crise économique, de coupures de gaz massives en plein hiver et de pénurie de produits de première nécessité.
En janvier dernier, notre commission a dénoncé, par un communiqué de presse, cette violence d'État et appelé à cesser les exécutions de condamnés à mort. Nous avons, ici même, entendu notre ambassadeur de France à Téhéran, Nicolas Roche, nous décrire le niveau de tension rarement atteint depuis la fondation de la République islamique en 1979. La lecture des considérants de la PPRE est édifiante quant au panel des violences perpétrées - tirs à balles réelles, détentions arbitraires, etc. - ou des menaces proférées - le ministre de l'éducation avait annoncé de possibles internements en centres de rééducation.
Compte tenu de cette situation, il est bien dans notre rôle de dénoncer les violations des droits de l'Homme en Iran et de soutenir le peuple iranien dans ses aspirations légitimes. Et au-delà des condamnations de principe, il est aussi légitime que nous nous interrogions sur les actes et les mesures à prendre pour conduire les autorités iraniennes à cesser ces violences sur sa propre population.
Cette PPRE visant à prendre des mesures appropriées contre les atteintes aux droits fondamentaux commises en Iran a pour objet d'appeler le Gouvernement et l'Union européenne à renforcer les sanctions contre l'Iran au titre des violations des droits de l'Homme. Elle relève donc du champ de compétence des affaires étrangères ; c'est donc à ce titre que notre commission s'en saisit.
Je commencerai par un bref point de procédure. C'est notre collègue Nathalie Goulet qui a été à l'initiative de cette proposition de résolution européenne déposée le 4 janvier dernier. J'en ai été nommé le rapporteur par la commission des affaires européennes qui l'a adoptée le 2 février dernier, à l'unanimité, au bénéfice de modifications et de reformulations que je qualifierais de substantielles, précisément dans le but de réunir le consensus le plus large autour d'un texte qui aurait vocation à porter la voix du Sénat dans la condamnation et l'appel à des sanctions vis-à-vis des autorités iraniennes.
En effet, la PPRE initiale de Mme Goulet franchissait plusieurs lignes rouges, les principales étant la cessation de l'accord de Vienne de 2015 sur le nucléaire iranien (JCPoA), le recensement des étudiants iraniens et leur expulsion en cas de lien familial avec des responsables iraniens frappés de sanctions pour violations des droits de l'Homme, enfin l'inscription du corps des Gardiens de la révolution islamique sur la liste des organisations terroristes. Je reviendrai plus en détail sur ces points.
Enfin, je n'oublie pas que notre collègue François Patriat et les membres de son groupe ont déposé le 1er décembre 2022 une proposition de résolution (PPR) en soutien au mouvement pour la liberté du peuple iranien. Ce texte relève d'une autre procédure qui ne donne pas lieu à un examen par une commission permanente. Déposée alors que des manifestations avaient encore lieu, et avant que le régime iranien ne procède à l'exécution de condamnés à mort, cette proposition de résolution, similaire à celle qui a été adoptée en novembre 2022 par l'Assemblée nationale, comporte notamment un important volet visant à condamner l'usage brutal et disproportionné de la force, les discriminations à l'encontre des femmes et des groupes minoritaires, l'usage de la torture et des mauvais traitements en détention. En revanche, elle ne prévoit pas d'appel à sanctions.
Même si elles ne relèvent pas des mêmes procédures d'examen, j'ai constaté que la PPRE de Mme Goulet et la PPR de M. Patriat étaient complémentaires, ce qui a forgé la méthode avec laquelle j'ai préparé le texte adopté par la commission des affaires européennes et qui vous est proposé ce matin.
Ainsi, les condamnations des pratiques des autorités iraniennes et le soutien au peuple iranien dans son aspiration à la démocratie et au respect de ses droits et libertés fondamentales ont été ajoutés dans le texte de la commission des affaires européennes, reprenant l'esprit de la PPR de M. Patriat. À l'inverse, le volet relatif aux sanctions contenu dans la PPRE de Mme Goulet devait impérativement être révisé à l'aune d'une lecture en phase avec les engagements internationaux de la France, notamment le JCPoA, ce qui suppose de ne pas rompre unilatéralement le dialogue avec l'Iran - ou ce qu'il en reste -, car tel n'est ni l'intérêt ni la volonté de la France. Conserver un canal de discussion s'avère indispensable, ne serait-ce que pour observer et condamner les manquements de l'Iran en matière nucléaire, mais aussi pour maintenir le contact avec nos ressortissants détenus arbitrairement en Iran, que nous désignons dorénavant sous les termes d'« otages d'État » depuis la diffusion par l'Iran en octobre dernier d'aveux forcés.
Au final, la proposition de résolution européenne modifiée et adoptée par la commission des affaires européennes que je vous propose d'adopter répond aux principes de méthode suivants : une convergence entre les deux textes ; la suppression de certaines lignes rouges, comme la sortie du JCPoA, d'une part, et le recensement et l'expulsion d'étudiants iraniens, d'autre part. Je trouvais choquant qu'on applique des sanctions à de jeunes hommes et femmes qui n'auraient a priori rien commis et dont la seule faute serait que les parents aient, eux, commis d'autres fautes. Cela me fait un peu penser au Sippenhaft allemand... Nous ne pouvons proposer, dans un tel texte, des sanctions ou des méthodes qui seraient contraires à nos propres valeurs. C'est pour cette raison que j'ai supprimé ce point.
Sur le nucléaire, laissons les négociations suivre leur cours.
Le texte prévoit de réécrire les appels à sanction selon une approche progressive. Nous prévoyons trois graduations dans l'évolution des sanctions demandées.
Premièrement, il s'agit d'élargir la liste des personnes et des entités qui font l'objet de mesures restrictives au titre du régime des droits de l'Homme. Il existe deux régimes de sanctions : un régime au titre des droits de l'Homme, qui est évoqué ici ; et un autre régime d'ordre plus judiciaire sur lequel nous reviendrons.
Quatre trains de sanctions ont d'ores et déjà été décidés par le Conseil de l'Union européenne les 17 octobre, 14 novembre, 12 décembre et 23 janvier dernier. Un cinquième paquet de sanctions serait en préparation pour la prochaine réunion du Conseil le 20 février prochain.
Deuxièmement, en cas de poursuite des atteintes aux droits fondamentaux et de maintien en détention des otages d'État, il est demandé d'élargir le panel et de renforcer les sanctions à d'autres mesures pouvant inclure des restrictions d'accès aux marchés de capitaux et à l'espace aérien de l'Union. Sur l'espace aérien, notre reformulation tient compte du besoin de maintenir un minimum de flux pour permettre à ceux qui veulent quitter l'Iran de le faire.
Nous nous réjouissons de la libération de Fariba Adelkhah, et exprimons notre soulagement. Pour autant, il faut se souvenir qu'elle a déjà été libérée, puis réincarcérée par le passé. Aussi, la priorité reste avant tout que son statut soit clarifié et qu'elle recouvre l'ensemble de ses libertés, y compris celle de revenir en France et de retourner librement en Iran - nos diplomates y travaillent activement. Par ailleurs, le sort de nos six autres ressortissants n'a pas évolué, raison pour laquelle notre communication doit être maîtrisée sur ce sujet.
Troisièmement, la possibilité d'inscrire des groupes et entités tels que le corps des Gardiens de la révolution islamique sur la liste des organisations terroristes de l'Union a fait l'objet d'une rédaction - elle-même objet d'un amendement - qui tient compte de la temporalité politique et des conditions juridiques d'une telle mesure, à savoir « le moment venu » - les ministres des affaires étrangères du Conseil de l'Union européenne sont appelés à se réunir le 20 février prochain, et ultérieurement, pour se prononcer sur un nouveau paquet de sanctions - et « sur la base de décisions de justice » - ce n'est pas qu'une formule de style puisque le prononcé par une autorité judiciaire d'une condamnation dans une activité criminelle est une condition en cours d'examen par le service juridique du Conseil. Attendons cette réponse.
Je pourrais rentrer plus dans le détail s'agissant de la dénonciation du soutien militaire apporté par l'Iran à la Russie, le manque de coopération de l'Iran dans la mise en oeuvre du JCPoA ou encore de la fermeture de l'Institut français de recherche en Iran (Ifri).
Telles sont les principales caractéristiques de cette proposition de résolution européenne, et je vous proposerai deux amendements de précision rédactionnelle.
Pour conclure, je voudrais que nous ne perdions pas de vue que notre but premier est de soutenir le peuple iranien en nous gardant de l'instrumentalisation que peuvent en faire les autorités iraniennes. L'exercice des sanctions est toujours difficile à appréhender dans la mesure où ce régime tient l'étranger pour responsable des manifestations de l'automne 2022 et prend explicitement la France pour cible.
Nous ne devons transiger ni sur nos valeurs ni sur le message de fermeté à adresser aux autorités iraniennes, sans leur fournir de prétexte à une rupture ou une réaction irrémédiable. En ce sens, et sous réserve de notre débat, je forme le voeu que nous puissions exprimer des messages forts de soutien aux droits des femmes iraniennes, de condamnation et de sanction à l'encontre des autorités iraniennes, dans l'esprit de responsabilité qui nous anime.
Merci pour ce travail exhaustif. Mieux vaudrait que cette proposition de résolution sur un sujet très sensible rassemble le plus grand nombre de soutiens pour être efficace.
Je remercie le rapporteur pour ces propos et pour son travail approfondi. Avec Nicole Duranton et André Gattolin, nous saluons la nouvelle rédaction amendée en commission des affaires européennes. Cette nouvelle version est plus responsable et plus équilibrée. La précédente rédaction mentionnait une cessation de l'accord de Vienne et l'inscription des Gardiens de la révolution à la liste des personnes impliquées dans des actes de terrorisme et faisant l'objet de mesures restrictives. N'oublions pas que près de sept otages sont encore retenus en Iran. Comment ferions-nous pour les libérer si l'on ne peut négocier avec les Gardiens de la révolution ?
Cette version procède à une actualisation bienvenue des dérives du régime iranien qu'elle nomme sans ambages, et dénonce à juste titre l'usage de la torture dans la répression des manifestations et l'accentuation des moyens de propagande à la télévision iranienne, qui diffuse notamment des aveux forcés des détenus.
Nous déplorons vivement la fermeture de l'Ifri, signe du durcissement aveugle et irresponsable du régime. Nous voterons sans réserve cette PPRE et retirons notre PPR.
Je remercie le rapporteur pour son travail. Il a fait évoluer le texte dans le bon sens. La situation en Iran est terrible depuis la mort de Mahsa Amini, avec, chaque jour, des arrestations arbitraires, des déportations, des condamnations à mort, des pendaisons en public, parfois pour crime de guerre contre Dieu. La répression s'abat, aveugle, violente, sanglante. Malgré tous les séides, elle n'arrive pas à écarter le mouvement populaire, où les femmes sont en première ligne. Souvenons-nous des propos glaçants entendus ici : le régime peut faire pire... Pour l'instant, c'est toujours la police des moeurs qui agit. Si c'est l'armée, nous risquons un bain de sang.
Les déclarations solennelles et autres langages diplomatiques n'effraient pas beaucoup le régime des mollahs. C'est pourquoi notre groupe est favorable à de nouvelles sanctions, prises à l'échelle européenne.
Certes, le Conseil européen ne cesse de rallonger la liste des personnes et des organismes faisant l'objet de mesures restrictives : gel des avoirs, interdiction de pénétrer sur le territoire européen ou interdiction d'export vers l'Iran des équipements sensibles. Il a également élargi la liste, d'abord à ceux qui ont porté atteinte à la vie de cette jeune femme, puis aux chefs de la police locale, à l'ensemble des militaires plus hauts gradés, au ministre de l'information et à celui de l'intérieur. Le régime iranien prétend que des personnalités européennes encourageraient la violence en Iran ! Le groupe SER pense qu'il est temps d'aller plus loin.
Le texte a été amélioré et nous convient globalement, avec des précisions sur la nécessité d'adopter des sanctions renforcées et la suppression du considérant appelant à la cessation définitive de l'accord sur le nucléaire iranien ; nous devons maintenir une capacité de dialogue. L'accord semblait à portée de main, mais les relations se sont retendues. Les négociations doivent continuer. Il nous faut conserver une capacité de dialogue pour libérer nos otages.
Je salue également la suppression du considérant, qui m'avait profondément choquée, relatif aux sanctions contre les étudiants iraniens sur le territoire européen, alors qu'ils n'ont rien fait, au motif que leurs parents auraient participé à des actes de violence.
Même si je ne l'approuvais pas de prime abord, je suis d'accord pour garder sous le coude, en quelque sorte, pour des sanctions futures, l'accès au marché des capitaux et l'accès à l'espace aérien. Vos arguments, notamment pour protéger nos six otages, m'ont convaincue.
Toutefois, nous souhaitons clairement l'inscription des Gardiens de la révolution sur la liste européenne des organisations terroristes, comme le Parlement européen l'a proposé le 3 janvier dernier. La version allégée du considérant 44 n'est pas assez ferme. Il faut augmenter la pression sur le régime iranien, montrer maintenant une certaine détermination et donner de l'espoir à la population. Nous proposons un amendement pour supprimer deux termes : d'abord « le moment venu », car le moment est venu d'agir. Votre argument sur la temporalité ne pèse pas. Ensuite, il faut supprimer « sur la base de décisions de justice », expression utilisée par Josep Borrell pour la première fois ; elle n'a jamais été utilisée dans d'autres cas d'inscription sur la liste. Pourquoi l'adopter ? Je n'ai pas très bien compris quelle était la temporalité. Marquons le coup contre les Gardiens de la révolution, et votez notre amendement. Le groupe SER votera ce texte.
On pourrait considérer qu'il y a une forme de contradiction à recevoir l'ambassadeur de France en Iran à huis clos et d'ouvrir un débat public sur le sujet pour voter une PPRE...
Je rappelle que la proposition de résolution fait l'objet d'un débat qui peut d'ailleurs se prolonger en séance publique.
C'est un sujet extrêmement délicat. Je ne remets pas en cause la PPRE. Nous avons encore des otages en Iran. Soyons prudents.
L'accord de Vienne du 14 juillet 2015 était de bonne nature et a permis d'ouvrir un vrai dialogue avec l'Iran. En mai 2018, une décision unilatérale de Donald Trump a mis fin à cet accord. Désormais, l'Iran ne souhaite plus dialoguer. Quoi qu'on dise ou qu'on fasse, cela ne les impactera pas.
Les modifications à la PPRE sont de bonne nature, eu égard à cette précaution. C'était une erreur d'inclure les retours vers l'Iran d'étudiants iraniens en France, car le peuple doit être bien traité. J'espère que par ce biais nous retrouverons le dialogue, même si je ne vois pas beaucoup de possibilités de dialogue avec le régime actuel, en raison des frustrations laissées par l'accord de Vienne.
Nous approuvons l'ensemble des propositions du rapporteur et le remercions pour cette excellente présentation que nous partageons en totalité.
La condamnation des Gardiens de la révolution doit être beaucoup plus ferme.
Sur le nucléaire, je comprends qu'on veuille éviter d'en parler au motif qu'il y aurait des négociations en cours. Est-ce précisé dans le texte ? Sinon rappelons les exigences de l'accord sur le nucléaire.
J'ai une pensée pour les jeunes gens et les jeunes femmes se battant pour leur liberté et le mouvement « Femme, vie, liberté ». Je remercie Nathalie Goulet et François Patriat dont le travail fonde ces résolutions. J'ai échangé avec Nathalie Goulet sur les points de blocage de la rédaction.
Le GEST salue les modifications bienvenues. Le dialogue ne doit pas cesser, et les sanctions doivent être graduées. La suppression des sanctions sur les étudiants nous satisfait, de même que la volonté de ne pas couper toute discussion sur le nucléaire.
Je soutiens l'amendement du groupe SER sur les Gardiens de la révolution : il faut les ajouter immédiatement à la liste des organisations terroristes. Le GEST votera cette proposition de résolution.
Je salue le travail du rapporteur. J'insiste sur un point de forme exemplaire : nous sommes partis d'une proposition de résolution qui ne représentait pas l'ensemble des sensibilités du Parlement. Or en travaillant ensemble, on peut arriver à de bons résultats et nous aboutissons à une position singulière pour la France. Que ce soit un exemple pour d'autres sujets. Le texte final sera assez équilibré avec une condamnation sans réserve et la recherche du maintien des conditions d'un dialogue. Nous ne sommes pas des jusqu'au-boutistes ni des va-t-en-guerre.
Notre commission a un rôle particulier. Chacun a apporté une véritable contribution à la position de la France, pour qu'elle reste ferme sur ses valeurs, et ouverte pour conserver le peu d'espoir dont nous avons besoin pour traiter les conflits internationaux. C'est un bon travail qui rassemble tous les groupes politiques, je le répète, même si on peut encore débattre de certains points comme le considérant concernant les Gardiens de la révolution.
C'est en effet un travail de tous les groupes pour aboutir à un texte commun.
Je salue également le travail du rapporteur. Nous appuierons la résolution proposée. Nous aurons probablement un vote unanime sur ce texte qui propose une condamnation ferme, avec des moyens appropriés.
Le CRCE s'abstiendra sur l'amendement du groupe SER, même si nous condamnons totalement l'action des Gardiens de la révolution. Mais un jour, il faudra débattre de la nature de la liste des organisations terroristes et sur la façon dont elle est utilisée politiquement. Elle a été mise en place dans les conditions qu'on connaît, utilisée parfois à des fins discutables... Nous nous interrogeons davantage sur la liste que sur la proposition, car nous partageons la volonté d'une dure condamnation des Gardiens de la révolution.
EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE
Article unique
L'amendement COM-2 précise le libellé de la proposition de M Hadrien Ghomi qui, à la suite de son adoption le 28 novembre 2022, est devenue la résolution n° 35 de l'Assemblée nationale.
L'amendement COM-2 est adopté.
L'amendement COM-3 précise les dates des décisions du Conseil de l'Union européenne ayant conduit, les 17 octobre, 4 novembre et 12 décembre 2022 ainsi que le 23 janvier 2023, à l'adoption de quatre paquets de sanctions à l'encontre des autorités iraniennes au titre du régime de violation des droits de l'Homme.
L'amendement COM-3 est adopté
L'amendement COM-1 supprime les mentions « le moment venu » et « et sur la base de décisions de justice ». Certains veulent retirer le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) de cette liste, mais ce n'est pas l'objet de cette résolution. Donnons un signal fort à la population qui se bat.
Avis défavorable. En premier lieu, le corps des Gardiens de la révolution islamique, comme entité, est déjà sanctionné à plusieurs titres, en vertu du régime de sanction des armes de destruction massive depuis 2011 et au titre de la Syrie pour ce qui concerne sa branche extérieure, Al-Qods. Plusieurs de ses branches régionales font également l'objet de sanctions au titre du régime des droits de l'Homme. Ces sanctions appellent un gel des avoirs et des actifs des entités et personnes visées, ainsi qu'une interdiction de pénétrer sur le territoire de l'Union européenne.
L'inscription du corps des Gardiens de la révolution islamique sur la liste des organisations terroristes de l'Union est soumise à une double condition : d'abord politique, puisqu'après le vote du Parlement européen en ce sens, il est prévu que les ministres des affaires étrangères du Conseil de l'Union européenne se réunissent à nouveau le 20 février prochain ; ensuite juridique, car une telle inscription nécessite qu'une condamnation dans une activité criminelle ait été prononcée par une autorité judiciaire - et probablement d'un État membre. Nous ne savons pas encore si l'on peut se référer aux condamnations des autorités judiciaires du Royaume-Uni ou des États-Unis, ou s'il faut que ce soit une condamnation d'une juridiction d'un État membre. Ce critère est actuellement à l'étude par le service juridique du Conseil.
Je comprends l'interrogation du groupe SER. Mon avis défavorable n'est pas une réponse binaire. Nous nous sommes interrogés sur la possibilité de ne pas en parler du tout - cela n'aurait pas été très courageux - ou d'exiger immédiatement cette inscription. Nous sommes parvenus à une rédaction diplomatique. Cette rédaction pose le principe de la sanction, mais prend en compte un facteur temps et les vérifications juridiques nécessaires.
Soyons conscients que c'est probablement l'une des plus grosses lignes rouges que nous pouvons fixer au régime iranien actuel. C'est peut-être un fusil à un coup... Écrivons que cela peut arriver et que si c'est nécessaire, nous le ferons, mais conservons une réserve rédactionnelle.
Certes, des mesures ont déjà été prises contre les Gardiens de la résolution, mais la résolution prouve qu'on peut trouver des sanctions supplémentaires. Appliquons-les immédiatement et non « le moment venu ».
Soit nous nous exprimons avant l'Union européenne et nous portons des valeurs, un enjeu et un combat, soit nous nous exprimons après pour dresser un constat. On ne peut à la fois parler avant, tout en attendant ce qui se passera ensuite. Ce serait contradictoire.
Sur l'argument juridique, je n'ai pas souvenir d'un État qui ait condamné la Corée du Nord... Nous prenons des décisions toute l'année sur de multiples sujets, et là, vous voulez que dorénavant, il faille attendre une décision de justice. M. Joyandet expliquait à juste titre que notre commission avait un rôle particulier. Si désormais, nous ne voulons pas prendre position avant qu'il y ait une décision de justice d'un État membre de l'Union européenne, cela change totalement notre approche. Fait-on du droit, de la diplomatie ou de la politique ? Faisons de tout !
Certes, il y a des otages d'État. Mais dans ce cas, ne prenons aucune décision et laissons faire les diplomates. Or ce n'est pas la voie que nous choisissons. Soit ne faisons rien, soit nous nous prononçons vraiment. Le rôle historique de la France, c'est de porter des valeurs fortes. Nous sommes en train de voter une proposition de résolution !
C'est ce pilier du régime qui massacre, tue, emprisonne et violente le peuple iranien : il faut viser les Gardiens de la révolution et les condamner, directement, sans attendre demain.
Soit on décale le vote de la proposition de résolution de quinze jours, soit on la vote aujourd'hui, mais en gardant la sanction contre les Gardiens de la révolution. Sinon, ce sera un pétard mouillé.
Il n'y a pas de « si » dans le texte, même si nous précisons « le moment venu ». Les faits sont établis. Mais quand le moment politique sera venu, il faudra le faire. Cela peut être la semaine prochaine comme dans six mois. Ce n'est pas nous qui allons décider de ce moment. Conserver une notion de temporalité me semble important.
Sur l'aspect juridique, la position doit être présentée au Conseil la semaine prochaine. Notre proposition n'enlève rien à la situation de fond. Nous ne refusons pas de prendre position, mais nous demandons l'inscription le moment venu sous réserve des vérifications juridiques. Je ne vois pas en quoi cela pose problème. Nous avons essayé de trouver un texte équilibré sans exclure la possibilité de l'inscription sur cette liste, mais en respectant une certaine forme.
Une résolution a une portée politique, mais n'entraîne pas d'effet juridique dans l'immédiat. Le texte du rapporteur a fait consensus parmi les différents groupes, préservons ce consensus.
L'amendement COM-1 n'est pas adopté.
L'article unique constituant l'ensemble de la proposition de résolution européenne est adopté à l'unanimité.
Je remercie le rapporteur et les groupes qui ont travaillé sur ce sujet gravissime, ce qui permet à la commission d'adopter un avis très clair.
Cette audition n'a pas fait l'objet d'un compte rendu.
La réunion est close à 12h50.