Commission d'enquête Cabinets de conseil

Réunion du 19 janvier 2022 à 16h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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Photo de Arnaud Bazin

Nous accueillons aujourd'hui Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques.

Il s'agit d'une audition importante, car vous avez sous votre responsabilité deux acteurs majeurs du recours aux cabinets de conseil : la direction interministérielle de la transformation publique (DITP) et la direction interministérielle du numérique (DINUM).

L'objectif de la commission d'enquête est de cartographier le recours aux consultants dans le secteur public et de comprendre l'organisation mise en oeuvre par l'État lorsqu'il recourt à ce type de prestations.

Cette audition est ouverte au public et à la presse. Elle est retransmise en direct sur le site internet du Sénat. En raison de la situation sanitaire, nos collègues peuvent intervenir par visioconférence.

Je rappelle qu'un faux témoignage devant notre commission d'enquête est passible de sanctions pénales, qui peuvent aller, selon les circonstances, de trois à sept ans d'emprisonnement et de 45 000 à 100 000 euros d'amende.

Je vous invite, Madame la ministre, à prêter serment de dire toute la vérité, rien que la vérité. Levez la main droite et dites : « Je le jure. »

Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, Mme Amélie de Montchalin prête serment.

Avant de vous laisser la parole pour votre propos liminaire, je souhaiterais vous poser deux questions très directes, en lien avec vos interventions dans la presse, ce matin. J'apprécierais que nous nous accordions d'emblée sur les chiffres illustrant le recours aux cabinets de conseil.

Vous avez affirmé ce matin sur Europe 1 : « dans ce quinquennat, les dépenses de conseil n'ont pas augmenté. Elles sont à 140 millions d'euros ».

Pourriez-vous nous préciser votre source, car les chiffres donnés par la direction du budget nous semblent supérieurs ? Pourriez-vous nous indiquer le montant des dépenses de conseil constaté en 2017, afin que nous puissions comparer avec le début du quinquennat ?

Vous avez également déclaré que les dépenses de conseil de l'État allaient baisser de 15 % en 2022. Sur quelle base vous appuyez-vous pour avancer ce pourcentage ? Pourquoi cette baisse ne s'élèverait-elle pas à 10 ou 30 % par exemple ?

Pour éclairer nos débats et en écho à votre intervention dans la presse, je souhaiterais que vous puissiez répondre à ces questions dès à présent, avant votre propos liminaire.

Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques

Un rapport de la Cour des comptes précise que les dépenses de conseils - hors informatique - s'établissaient à environ 135 millions d'euros par an entre 2011 et 2013. À ma demande, la direction du budget a établi que, pour le même périmètre, ces dépenses s'élevaient en moyenne à 145 millions d'euros entre 2018 et 2020. Celles-ci sont donc stables, eu égard à la dynamique de dépenses publiques de notre pays.

J'ai annoncé un objectif de 15 % de réduction des dépenses en matière de recours aux cabinets de conseil. Celui-ci porte sur le périmètre de transformation et de stratégie et résulte de choix forts.

L'une des dispositions de la loi de finances pour 2022 vise à réinternaliser les compétences au sein de l'administration. La DITP bénéficiera ainsi de 10 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires, ce qui permettra de diminuer le recours aux prestations extérieures et de réaliser une économie d'un million d'euros. Je précise que la DINUM a adopté la même démarche, pour réduire notre dépendance à des cabinets extérieurs.

Par ailleurs, nous favorisons le repositionnement des inspections générales, dans le cadre de la réforme de la haute fonction publique.

Grâce au soutien de la DITP et de l'Institut national du service public (INSP), j'ai engagé une réforme visant à former en 2022 100 chefs de projets, qui seront déployés dans toutes les administrations.

Ce sont ces trois mesures qui nous permettront d'atteindre notre objectif d'au moins 15 % de réduction des dépenses en conseil de transformation et de stratégie. Nous comptons élargir cette démarche à d'autres segments confiés à des cabinets de conseil, notamment les missions relevant de l'informatique et du numérique. Le Premier ministre prendra prochainement une circulaire, sur laquelle nous travaillons depuis de longs mois.

Photo de Arnaud Bazin

Merci pour ces précisions.

Je comprends donc que la moyenne des crédits de paiement s'élevait à 140 millions d'euros entre 2018 et 2020. En 2020, 170 millions d'euros ont été dépensés, contre 107 millions d'euros en 2018 : l'augmentation s'élève donc à près de 60 % entre 2018 et 2020.

Vous avez évoqué le sujet du conseil dans le secteur informatique, qui ne comprend pas les prestations fournies dans ce domaine. Là encore, le montant est important, puisqu'il s'élevait à près de 458 millions d'euros en 2020.

Si l'on cumule les deux rubriques de conseil, nous arrivons à un total de 628 millions d'euros en 2020, ce qui est un sujet. Toutefois, j'ai bien noté que le recours aux cabinets de conseil en informatique était intéressé par les mesures d'économies envisagées.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Tout à fait. Nous oeuvrons à la réinternalisation de nombreuses compétences : plus d'une dizaine d'experts seront recrutés au sein des brigades d'intervention numérique, placées sous l'autorité de la DINUM, afin d'améliorer la gestion des projets dans les ministères et de les piloter nous-mêmes.

Par ailleurs, tous les projets numériques dont le budget est supérieur à 9 millions d'euros devront désormais recevoir un avis conforme de la DINUM. De plus, au moins 30 % des personnes déployées sur ces missions devront être des agents de l'État.

Des programmes accélérés pour le recrutement de chefs de projet numérique ont également été lancés ; nous disposons aussi des entrepreneurs d'intérêt général et des « commandos UX ».

Établir une séparation claire entre le conseil et les prestations en informatique n'est pas chose aisée : le chiffre que vous avez cité en matière de conseil intègre parfois certaines prestations.

La Cour des comptes considère que le recrutement d'au moins 400 chefs de projet numérique s'impose pour atteindre l'objectif minimum de 30 % d'agents internes à l'administration.

Nos efforts paient : avant la mise en place de ces critères sur les projets interministériels, nous avions constaté une dérive budgétaire de 36 %, contre 13 % aujourd'hui. La réinternalisation permet non seulement de faire des économies, mais contribue aussi à la réussite des projets : l'argent public est ainsi mieux utilisé.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Je vous remercie de ces précisions. Je vous laisse la parole pour votre intervention liminaire.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Vous m'auditionnez aujourd'hui sur le recours, par l'administration, aux cabinets de conseil, un sujet de première importance pour la conduite de l'action publique et l'organisation de l'État.

Cette commission d'enquête intervient à un moment particulièrement opportun, car le Gouvernement est sur le point de présenter sa nouvelle doctrine de recours aux consultants.

Trois éléments de contexte nous ont en effet conduits à engager, depuis plusieurs mois, cette réflexion.

Premièrement, nous devons tirer les enseignements de la crise sanitaire pour l'organisation de l'État.

Deuxièmement, la réforme de la haute fonction publique, que je conduis au sein du Gouvernement, nous invite à nous interroger sur les compétences dont l'État doit disposer en interne.

Troisièmement, le prochain renouvellement du premier accord-cadre interministériel de la DITP, que nous avions mis en place en 2018, arrive cette année à échéance ; nous en avons évalué les avantages et les limites afin de tracer des voies d'amélioration.

La création de cette commission d'enquête, comme son caractère transpartisan, témoigne de l'intérêt que la représentation nationale porte aux enjeux d'efficacité de l'action publique - et de l'État en particulier - et je ne peux, en tant que ministre de la transformation et de la fonction publiques, que m'en réjouir.

Le recours par l'État. Je suis convaincue que nous devons aborder ce sujet avec pragmatisme, guidés par le seul souci de l'efficacité de l'action publique au service des Français et de la bonne utilisation de l'argent public, sans parti pris idéologique.

Je le dis sans détour, l'État n'est ni omniscient ni omnipotent. Dans l'intérêt même de l'action publique, il est possible qu'il doive recourir ponctuellement à des avis extérieurs. Mais nous devons aussi reconnaître que cette pratique a peut-être parfois été trop systématique, et mérite donc d'être davantage encadrée et réfléchie.

Le Premier ministre m'a ainsi confié le soin de préparer une nouvelle doctrine de recours aux cabinets de conseil, dont je souhaite aujourd'hui vous livrer les grandes lignes.

Permettez-moi de revenir en premier lieu sur les raisons qui peuvent, dans certaines circonstances, justifier que l'État fasse appel à des consultants.

Le Gouvernement a engagé depuis 2017 un grand nombre de chantiers de transformation de l'action publique et impulsé des réformes prioritaires pour changer le quotidien des Français.

Ces chantiers ont exigé une très forte mobilisation des administrations, centrales comme déconcentrées. Cette mobilisation a été décuplée dans le contexte de la crise sanitaire avec la gestion de l'épidémie et la mise en oeuvre du plan de relance. Je souhaite profiter de cette occasion pour rendre hommage à l'ensemble des agents publics engagés dans ces transformations.

Nos administrations ont parfois dû solliciter l'appui de conseils extérieurs. Tout d'abord, un certain nombre de compétences ne sont pas disponibles à un instant donné dans les administrations. C'est le cas, par exemple, en matière de logistique ou d'optimisation des processus. Le recours à des prestataires externes permet alors un apport d'expertise de manière temporaire, dont il n'est pas pertinent de vouloir disposer de façon pérenne en interne.

Ensuite, il arrive que l'urgence d'un besoin ou que l'ampleur des tâches à accomplir dans des délais imposés par le temps politique ne puisse être affrontée avec les seules ressources disponibles en interne et nécessite une force de frappe additionnelle et ponctuelle.

Enfin, l'État a parfois besoin d'un regard extérieur pour s'inspirer de pratiques diversifiées ou innovantes, observées à l'extérieur, à l'étranger ou dans le secteur privé, pour garder la maîtrise de sa capacité d'action.

Les projets numériques illustrent ces différents cas de figure même si nous veillons systématiquement à ce qu'au moins un tiers des effectifs engagés sur un projet soit issu de l'administration.

Le recours à des cabinets de conseil permet d'absorber des pics de charge en disposant de capacités indisponibles au sein de l'État pour accélérer un projet de transformation numérique ; de se doter de compétences techniques de pointe qui ne seraient pas directement mobilisables en interne et de pouvoir disposer des meilleures pratiques d'autres grandes organisations confrontées à des projets similaires.

Dans ce contexte, nous avons fait le choix de renforcer nos capacités internes de conseil.

En tant que ministre chargée de la réforme de l'État, j'ai une conviction : l'administration ne peut se transformer que si elle est actrice de son propre changement. Les greffes artificielles non maîtrisées de solutions imaginées par d'autres et pour d'autres sont condamnées à l'échec.

Les modèles précédents n'ont pas produit les effets attendus : la révision générale des politiques publiques (RGPP) a imposé à l'administration des solutions de consultants qui n'étaient pas toujours adaptées. La modernisation de l'action publique (MAP) avait confié cette mission à des inspections générales qui, si elles peuvent apporter un éclairage indispensable aux décisions, sont elles aussi éloignées des réalités concrètes des administrations et réalisaient des missions trop courtes pour avoir une influence réelle.

Nous avons choisi une autre méthode consistant à mettre en place des équipes mixtes de consultants internes, de consultants externes et des agents publics eux-mêmes impliqués dans les évolutions afin de garantir une transformation adaptée aux réalités et aux besoins de notre État pour définir, mettre en oeuvre et suivre les projets.

Nous avons donc recruté à la DITP des consultants internes à l'administration, issus de la fonction publique ou du secteur privé, dont l'expertise est reconnue et qui ont contribué à la mise en oeuvre de réformes prioritaires du Gouvernement, avec les agents publics des administrations concernées. Au printemps de 2019, nous avons ainsi conçu en un temps très court le système d'intermédiation des pensions alimentaires ayant permis de sécuriser leur versement. Plus de 41 000 familles en bénéficient aujourd'hui. Nous avons également simplifié l'accès aux droits pour les personnes en situation de handicap avec la mise en place d'un droit à vie et la réduction des délais de traitement dans les différentes maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) de notre pays.

À chaque fois, il s'agit de missions sur mesure, qui s'appuient sur des constats de terrain recueillis auprès des usagers et des agents. L'apport d'équipes « projet », composées de ressources internes et externes, est éprouvé. Mon objectif est de poursuivre ce mouvement, de développer ces méthodes, en renforçant nos capacités internes.

De même, nous avons développé des capacités de conseil interne au sein de la DINUM, également placée sous mon autorité. La procédure dite « article 4 », qui lui permet d'apporter son appui à un ministère sur un projet numérique complexe a été utilisée près d'une dizaine de fois en 2020 et 2021. Par ailleurs, la DINUM a mis en place un cycle de formation des directeurs de projets informatiques. Enfin, un renforcement de la gouvernance des projets, par un contrôle le plus amont possible, au moment des phases de cadrage, a été mené.

Je ne condamne donc pas par principe le recours aux consultants qui, dans certains cas bien identifiés et sous certaines conditions, peuvent apporter un concours précieux à l'action publique. Pour autant, l'État ne peut faire l'économie d'une refonte de sa politique de recours aux cabinets de conseil. Cette réflexion s'inscrit d'ailleurs dans une réflexion plus large, commandée par la crise sanitaire sur notre organisation et nos modes de travail.

Le recours aux cabinets de conseil exige de la part des décideurs publics une grande vigilance compte tenu de la nature des tâches dont l'État a la charge et de l'exigence qui s'attache à la gestion des deniers publics. Il fait l'objet d'une attention légitime de la part des organes de contrôle et de la représentation nationale. Un rapport de 2014 de la Cour des comptes, commandé par votre assemblée au titre de l'article 58 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), établissait un diagnostic équilibré et formulait un certain nombre de recommandations dont nous avons tenu compte à partir de 2017.

Le Gouvernement a voulu rompre avec certaines pratiques observées par le passé.

Premièrement, je le dis avec force, nous n'avons pas de position idéologique sur le recours aux consultants. En effet, force est de constater que, depuis 2005, les audits « Copé » puis la RGPP, le recours aux consultants par l'État est devenu monnaie courante. Ce phénomène s'est renforcé lorsque le discours politique a assumé le postulat idéologique d'une défaillance de l'État : défaillance à se réformer par lui-même ; défaillance à se repenser par lui-même ; défaillance à faire lui-même. Ceux-là mêmes qui s'insurgent aujourd'hui contre le recours aux consultants sont responsables de l'importation des théories du New Public Management dans les organisations publiques, qui consistent à appliquer les recettes du secteur privé à l'action publique.

Deuxièmement, contrairement à ce qui a pu être fait par le passé, nous gardons la maîtrise de la décision, en toutes circonstances. Nous avons ainsi rompu avec les pratiques qui plaçaient les consultants dans les instances de décision. On se souvient, par exemple, de la participation de cabinets de conseil au conseil de modernisation des politiques publiques qui avait été mise au jour par un rapport d'inspection en 2012. Ce n'est plus le cas aujourd'hui.

Troisièmement, nous avons engagé un mouvement de rationalisation des commandes, par l'intermédiaire de l'accord-cadre de la DITP, ainsi qu'une stabilisation des dépenses. Dès 2017, nous avons engagé un retour d'expérience des pratiques précédentes et avons instauré le premier accord-cadre interministériel et fait de la DITP le guichet unique pour les ministères sur les sujets de transformation.

Pour la première fois, nous avons mis en place un marché centralisé pour que les ministères - à l'exception du ministère de la défense - disposent d'un seul et même support contractuel fonctionnant selon le système du « tourniquet ».

Les dépenses sont stables. La Cour des comptes, dans son rapport de 2014, a estimé les dépenses de consultants - hors informatique - à environ 130 millions d'euros en moyenne entre 2011 et 2013. Entre 2018 et 2020, l'État a dépensé environ 140 millions d'euros.

Toujours selon la Cour des comptes, la France se distingue par un recours plutôt modéré aux consultants par rapport aux autres grands pays européens. Dans son dernier rapport de référence sur le recours aux consultants dans la sphère publique réalisé au mois de novembre 2014, la Cour estimait à 13 % la part du chiffre d'affaires des cabinets de conseil réalisé dans le secteur public, contre 20 % en moyenne dans l'Union européenne, 22 % au Royaume-Uni et 17 % en Espagne.

À l'occasion des réflexions préalables au renouvellement du premier accord-cadre, qui arrive à son terme en juin 2022, et en m'appuyant sur les travaux conduits par la mission d'information de l'Assemblée nationale présidée par Véronique Louwagie et dont Cendra Motin était la rapporteure, j'ai demandé un bilan des pratiques à l'oeuvre depuis plusieurs années afin d'en tirer les conclusions.

Notre ambition est d'instaurer un suivi centralisé pour disposer d'une vision d'ensemble des marchés passés par les ministères, des missions réalisées et des montants facturés.

L'objectif est également de disposer d'un pilotage renforcé des prestations et de systématiser le partage de bonnes pratiques entre administrations.

Pour la première fois, le Gouvernement définit une nouvelle doctrine de recours aux consultants et engage un réarmement de l'État avec l'objectif de réduire le recours aux cabinets de conseil. Cette doctrine fera l'objet dans les prochains jours d'une circulaire du Premier ministre, dont je souhaite vous présenter les principaux objectifs.

Premièrement, l'administration devra faire la démonstration qu'elle ne peut pas répondre à la demande sans recourir à une prestation externe. Des mécanismes de gouvernance sont mis en place pour s'en assurer.

Seront ainsi institués dans chaque ministère des comités d'engagement des prestations intellectuelles sous la responsabilité des secrétaires généraux, en associant les directions métier et les services d'inspection, de contrôle et de conseil internes. Ils seront chargés notamment de vérifier la justification du recours à un prestataire externe, l'absence de solution alternative, mais également de l'adéquation entre les besoins et la prestation, y compris le prix.

Un pôle interministériel d'achat de prestations intellectuelles sera créé au sein de la DITP, qui deviendra la tour de contrôle pour encadrer, suivre et accompagner les ministères dans le recours aux cabinets de conseil. L'accord-cadre a vocation à rester le principal vecteur contractuel pour les prestations de conseil en stratégie et en organisation. Ce pôle aura un véritable rôle d'aiguillage pour les ministères, et aura pour mission de se prononcer sur la pertinence du recours aux cabinets de conseil pour une mission donnée. Les bons de commande supérieurs à 500 000 euros devront être approuvés par un comité d'engagement présidé par le secrétaire général du ministère concerné et associant la DITP et les inspections ou conseils généraux compétents.

Deuxièmement, nous souhaitons imposer le respect d'une charte de principes et de bonnes pratiques dès lors que le besoin de recours à un cabinet est avéré.

Le suivi du déroulé des missions sera renforcé ; les comités de pilotage seront présidés par le ministre lorsque l'importance du projet le justifie. Toute l'équipe projet devra intégrer un ou plusieurs agents du service concerné afin de garantir le transfert des compétences et la capitalisation des connaissances acquises pendant le projet. Toute prestation intellectuelle devra faire l'objet à son terme d'une évaluation, non seulement sur la qualité du service rendu par le prestataire, mais aussi sur l'atteinte des objectifs définis en amont.

Des garde-fous complémentaires seront instaurés en matière de prévention des conflits d'intérêts dans le cadre des relations avec les conseils extérieurs, comme en témoignent le renforcement des dispositions dans les chartes de déontologie et l'encadrement strict des missions dites pro bono.

Une mission d'inspection sera diligentée par le Premier ministre d'ici à la fin du deuxième semestre pour s'assurer de la bonne mise en oeuvre, dans chacun des ministères, des dispositifs permettant le respect de ces règles.

Troisièmement, nous voulons réarmer l'État afin de renforcer les compétences internes et limiter, de ce fait, le recours aux conseils extérieurs.

Ce renforcement des compétences internes s'appuie tout d'abord sur la consolidation du rôle de la DITP et de la DINUM comme « cabinets de conseil interne » au service des administrations publiques grâce aux équipes de consultants internes qu'elles ont constituées.

Les effectifs de conseil interne de la DITP seront dans un premier temps accrus de 10 ETP pour réduire les coûts de conseil externes et créer des économies, de l'ordre d'un million d'euros.

Nous poursuivrons également l'effort d'internalisation des compétences numériques, en faisant monter en puissance les initiatives comme les « commandos UX » lancés en 2020 qui sont des experts en matière d'expérience utilisateurs, ou aux « brigades d'intervention numérique » pour lesquelles douze profils ont été recrutés pour une période de six mois afin d'accompagner les projets prioritaires du Gouvernement. L'objectif est de renforcer les administrations qui n'ont pas la capacité de prendre en charge un projet dans le périmètre et le calendrier souhaités. Ce dispositif sera pérennisé grâce au recrutement, dans mon ministère, de 14 experts pour deux ans. Cette stratégie fait l'objet d'une vraie rupture de doctrine dans la loi de finances pour 2022.

Les ministères sont ensuite appelés à réfléchir à l'internalisation des compétences et des expertises correspondant à des besoins permanents ou réguliers, et aux commandes récurrentes, sur le modèle de cabinets de conseil internes ou, tout simplement, d'équipes projet. La DITP et la délégation interministérielle à l'encadrement supérieur de l'État (DIESE) ont été missionnées pour établir un référentiel de compétences internes disponibles.

Enfin, la réforme de la haute fonction publique vise à renforcer la formation initiale et continue des cadres dirigeants de l'État avec la montée en puissance de l'INSP, au service d'une fonction publique mieux formée et dont les parcours de carrière seront plus variés, plus évalués, et plus adaptés aux besoins de l'État employeur.

Je souhaite en particulier que les cadres supérieurs de l'État, futurs ou actuels, soient formés à la conduite de projets transverses, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. L'INSP devra ainsi conduire un plan de formation d'au moins 100 chefs de projet au cours de l'année 2022, en plus de ses missions de formation initiale. Nous réfléchissons à ce qu'un module dédié puisse intégrer le tronc commun à l'ensemble des hauts fonctionnaires, qu'ils soient administrateurs de l'État, directeurs d'hôpitaux, commissaires de police, administrateurs territoriaux, ou encore magistrats. C'est donc une culture de la conduite de projet que nous souhaitons développer dans notre administration pour réduire le recours à de telles compétences dans le secteur privé.

L'évolution du positionnement des inspections générales, dont le statut a été rénové via la réforme de la haute fonction publique, sera en outre mise à profit pour réinternaliser les missions de réflexion stratégique et d'organisation. Les inspections bénéficieront de possibilités de recrutement plus ouvertes encore pour attirer des profils jeunes ou expérimentés en matière de conseil et d'évaluation. La complémentarité des inspections générales avec la DITP et les administrations pourra se concrétiser dans le cadre de missions mixtes.

Notre objectif est donc de réduire en 2022 les dépenses de conseil en stratégie et en organisation de 15 % par rapport à 2021. Nous en tiendrons compte dans la préparation du prochain accord-cadre de la DITP qui sera lancé au printemps.

Mesdames et Messieurs les sénateurs, je crois que nous partageons le même objectif : construire un État plus efficace au service de nos concitoyens, un État pleinement capable de définir ses priorités stratégiques, un État en mesure de trouver les compétences nécessaires pour conduire une action publique adaptée aux réalités et aux défis du XXIe siècle.

La plupart du temps, l'État dispose de ces compétences en son sein, mais, parfois, celles-ci sont disponibles ailleurs. C'est d'ailleurs aussi le sens de « l'accélérateur d'initiative citoyenne » que j'ai lancé au mois de décembre dernier pour encourager la société civile à développer des projets d'amélioration des services publics.

Nous avons su tirer les leçons de la crise sanitaire et faire le bilan des événements survenus depuis 2018, en étant lucides sur les faiblesses existantes.

Gardons-nous en toutes circonstances à la fois d'un excès d'idéologie et de naïveté sur cette question et agissons pour continuer à transformer notre État pour un meilleur service rendu à nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Vous avez affirmé ce matin que le Gouvernement est « obsédé » par l'efficacité de l'action publique et par la bonne gestion de l'agent public. Je ne peux que souscrire à vos propos. Je ne place pas ici un curseur idéologique ou simpliste. Je suis ni simpliste ni idéologue, encore que ce ne soit pas un gros mot !

Cet après-midi, vous répondez aux questions d'une commission d'enquête dotée de pouvoirs constitutionnels. Nous souhaitons comprendre pourquoi le recours aux cabinets privés de conseil a été si important, au lieu d'utiliser les ressources de l'administration. Il ne s'agit pas ici d'opposer un quinquennat à un autre, et encore moins de se projeter vers le mandat du prochain Président de la République. Nous nous en tiendrons aux faits.

Hier, nous avons auditionné - entre autres - le cabinet McKinsey. Nous avons évoqué la commande de 496 800 euros passée en 2020 pour « éclairer les évolutions du métier d'enseignant ». Vous avez indiqué ce matin que ce contrat était une erreur. Cette somme aurait pu être utilisée pour fournir un purificateur d'air à 1 600 restaurants scolaires ou un million de masques FFP2, attendus avec impatience par les enseignants.

Dans cette affaire, quelle a été la répartition des rôles entre la DITP, qui a passé et évalué ce marché, et le ministère de l'éducation nationale ?

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Vous avez indiqué ce matin que vous souhaitiez « bloquer les contrats » de conseil. Pouvez-nous nous préciser ce que vous entendez par cette formule ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Le comité d'engagement et le secrétaire général d'une administration pourront bloquer les contrats de conseil s'il s'avère qu'ils disposent des compétences internes permettant de répondre à la mission. Notre objectif est de ne plus recourir à des consultants externes lorsque cela n'est pas justifié. Par ailleurs, les bons de commande supérieurs à 500 000 euros seront soumis à la DITP.

La mission d'évaluation du métier d'enseignant que vous avez évoquée a été commandée avant ma nomination. J'en ai eu connaissance hier, par voie de presse. Je ne peux donc pas me prononcer sur son bien-fondé, la qualité des livrables ou les suites réservées à la mission. Toutefois, la DITP m'a transmis des éléments que je souhaite porter à la connaissance de votre commission.

Le ministre de l'éducation nationale a lancé au printemps un important travail de réflexion sur l'avenir du métier d'enseignant avec une perspectiviste internationale, qui devait se conclure par un colloque organisé au mois d'avril 2020. Le ministère a sollicité l'appui de la DITP. Le travail confié au cabinet McKinsey pour un montant de 496 000 euros consistait en la préparation des documents utilisés lors du colloque et d'analyses comparatives internationales. Très vite après le démarrage de la mission, la crise sanitaire a perturbé son calendrier. Le colloque a d'abord été reporté à juillet 2020 avant d'être finalement annulé. Les travaux se sont étendus jusqu'au mois de juin 2019, sans que le budget initial soit modifié. Ces documents ont ensuite été utilisés par Yann Algan, puis pour la préparation d'un rapport rédigé à la suite d'un colloque, « Le professeur du XXIe siècle », organisé le 1er décembre 2020 au Collège de France.

Je me tiens à votre disposition sur les livrables que nous pourrons vous communiquer.

Cette mission a respecté les règles de l'accord-cadre, ainsi que celles du « tourniquet » permettant aux cabinets d'être sollicités successivement sans que l'un ou l'autre soit favorisé.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

L'application du « tourniquet » semble relativement souple : lors de la crise sanitaire, le cabinet McKinsey a ainsi bénéficié de 11 contrats pour un montant de 13,5 millions d'euros.

Hier, nous avons interrogé le cabinet sur cette bizarrerie. Il nous a été répondu qu'il existait un droit de suite : lorsqu'un cabinet commence une mission, on s'affranchit du « tourniquet » si des travaux supplémentaires sont nécessaires. On pourrait le comprendre pour une deuxième, voire une troisième mission. Mais c'est plus difficile à admettre pour 11 contrats et 13,5 millions d'euros : ce constat ne remet-il pas en cause la pertinence de la procédure du « tourniquet » ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Je vous transmettrai par écrit le fonctionnement précis de ce mécanisme.

Le « tourniquet » permet de s'assurer que les contrats ne sont pas toujours confiés aux mêmes cabinets de conseil. Si l'un d'entre eux accumule plusieurs marchés, les autres cabinets deviennent ensuite prioritaires afin de rééquilibrer le montant total des factures. Dès lors, le cabinet que vous citez a été beaucoup moins sollicité pour les missions suivantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

En l'espèce, le montant initial du contrat s'élevait à 3,2 millions d'euros pour finir à 13,5 millions d'euros. Nous souhaitons connaître les causes ayant rendu possible cette démarche !

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

En janvier 2021, vous avez lancé le baromètre de l'action publique pour évaluer les résultats des politiques prioritaires du Gouvernement, par exemple celles qui visent à doubler le nombre d'élèves dans les réseaux d'éducation prioritaire (REP), à offrir un logement aux sans-abri, à réduire la mortalité sur les routes. Vous avez, pour ce faire, recouru au cabinet Capgemini, pour un montant d'environ 3,6 millions d'euros, d'après les informations qui sont à notre disposition. Pourriez-vous nous présenter l'action de ce cabinet ?

En 2019, le cabinet BCG a travaillé sur une mission intitulée « Amélioration de l'accueil téléphonique des services publics » pour 358 200 euros. Pourriez-vous nous présenter cette prestation et son résultat ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Le baromètre de l'action publique, outil qui n'existait pas jusqu'alors, sert à faire remonter depuis un certain nombre de services, qui ne relèvent pas tous de l'État, des données, notamment sur les politiques menées par les collectivités territoriales. Il a par exemple servi à déterminer le délai de réponse moyen pour l'allocation aux adultes handicapés (AAH). Le principe est de mettre à la disposition des Français, en open data et en prévoyant une mise à jour trimestrielle, de manière publique, sur le site Internet du Gouvernement, des éléments sur l'avancée concrète et tangible de nos réformes prioritaires. Ils sont déjà disponibles en ligne, pour 43 d'entre elles, département par département, grâce au déploiement de l'outil Pilote, en janvier 2021.

Nous avons pris la décision de créer, en 2022, 8 ETP pour internaliser ces activités et pour concevoir, développer et déployer ces outils en régie, qu'il s'agisse de Pilote, du baromètre de pilotage des réformes prioritaires, ou de la plateforme d'expérience usagers Service Publics +.

Nous avons déployé le projet Pilote dans le cadre du plan de relance, afin que le ministère de l'économie et des finances puisse en suivre son déploiement, grâce à la remontée de données territorialisées. Il s'agit donc d'une infrastructure nouvelle, qui permet un reporting automatique, normé, département par département, de l'ensemble des informations pour le suivi des réformes prioritaires.

Le recours à des consultants externes peut être une réponse à un besoin ponctuel. Dès lors que l'État considère que le besoin est devenu pérenne, plutôt que de continuer d'alimenter un marché extérieur, il choisit d'internaliser des compétences.

Quant à l'amélioration de l'accueil téléphonique, elle correspond à une commande qui découle d'un comité interministériel de la transformation publique, conduit par le Premier ministre. Il constitue la base du « plan téléphone » qui doit permettre une meilleure accessibilité et une meilleure qualité des services publics. Nous avons atteint 85 % des objectifs que nous nous étions fixés, en produisant notamment un certain nombre de cadrages qui nous permettent de suivre le « taux de décroché » de chacun des numéros de service public.

Ce dispositif s'est inscrit dans le cadre de la fin de la surfacturation des numéros des plateformes téléphoniques publiques, car il nous semblait qu'il fallait garantir la qualité de ces plateformes. Il nous permet de nous assurer que les services publics continuent de bien fonctionner et restent joignables par les Français.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Duranton

En quoi la réforme de la haute fonction publique peut-elle constituer une réponse aux fragilités sous-jacentes des compétences au sein de l'État ? En quoi le recrutement d'anciens consultants et contractuels par la DITP peut-il constituer un nouveau vivier pour l'administration ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

La réforme de la haute fonction publique est multiforme. C'est une réforme du recrutement, dans la mesure où nous cherchons à attirer des profils plus diversifiés, notamment par le concours spécial « docteurs » qui a été institué pour faire venir des chercheurs au sein de l'administration. Nous souhaitons également recruter dans les universités, hors de Paris, pour diversifier notre vivier, grâce au concours « Talents ». Nous ouvrons aussi les recrutements pendant la carrière, pour lever tout frein au recrutement de personnes compétentes à des postes de direction de management, dans l'administration, même si elles sont contractuelles. La loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique le permet.

La réforme de la haute fonction publique change profondément la formation de nos hauts fonctionnaires, qu'ils soient issus de l'une des quatorze écoles de service public ou de l'un des cinq corps de sortie de l'École polytechnique. Cette réforme de la formation s'appuie sur un tronc commun organisé en cinq modules portant sur la transition écologique, la transition numérique, les valeurs de la République, les enjeux d'inégalité et de pauvreté et les enjeux de rapport à la science et à la technologie. Nous étudions la possibilité de créer un sixième bloc de compétences sur la capacité à être chef de projet. En effet, c'est en ce sens que l'administration évolue.

La réforme vise aussi à développer une véritable stratégie de formation continue interministérielle et ministérielle, pour que les compétences soient mises à jour au fil du temps.

Enfin, la réforme porte sur l'organisation même de l'administration. Elle prévoit la fin des corps qui pouvaient rigidifier les recrutements, notamment dans les inspections générales. Elle crée, à la place, un corps unique d'administrateurs de l'État pour favoriser la circulation des compétences entre ministères, telle qu'elle était déjà souhaitée dans l'ordonnance de 1945.

Le but est donc que l'État se montre beaucoup plus clair sur les besoins auxquels il doit faire face, sur les compétences qu'il souhaite attirer et sur son organisation interne, pour que les logiques administratives passées, ou bien le mimétisme, n'empêchent pas de réorganiser notre administration en la rendant capable de conduire des projets. Nous savons, en effet, que des cabinets de conseil extérieurs ont souvent été mobilisés pour gérer des projets parce que nos structures administratives ne pouvaient pas le faire, empêchées par des questions liées aux ressources humaines.

Quant à la seconde question, nous pourrions diaboliser symboliquement le recrutement d'anciens consultants dans l'administration. Je crois, au contraire, que c'est une bonne pratique porteuse d'un véritable enrichissement. Ceux qui viennent dans notre administration en acceptent le fonctionnement, en matière d'évaluation, de déontologie, de droits et de devoirs des agents publics. Leurs compétences enrichissent, dans les missions qu'ils ont à mener, notre capacité à mener des projets. Il s'agit là d'une passerelle très intéressante.

En outre, les anciens consultants qui sont recrutés par la DITP poursuivent leur carrière dans les différents ministères. Je pourrai vous fournir des éléments plus précis par écrit.

Nous avons également souhaité renforcer l'attractivité des métiers du numérique, en lançant une plateforme et en adoptant une stratégie innovante pour que l'État puisse recruter les meilleures compétences. La première mission que j'ai confiée à la direction interministérielle du numérique (DINUM) vise à rendre le recrutement attractif. Quelque 400 postes sont ouverts chaque année. Par le renouvellement des contrats, nous procédons également à des milliers de recrutements. Nous avons revu les grilles salariales. Nous avons surtout créé des programmes très innovants, notamment celui des entrepreneurs d'intérêt général, c'est-à-dire des personnes qui sont recrutées pour une mission bien spécifique par la DINUM. Une quarantaine d'entre elles sont ainsi déployées dans les ministères, chaque année. Nous en sommes à la cinquième promotion.

Alors qu'elles sont initialement recrutées pour dix mois, 64 % de ces entrepreneurs d'intérêt général finissent par rester dans l'administration et 45 % y sont encore trois ou quatre ans plus tard. Nous avons lancé la première promotion il y a trois ou quatre ans. Un peu moins de la moitié est encore dans l'administration.

Notre ambition n'est pas de remettre en question les règles de déontologie. Toutefois, si nous voulons que l'administration puisse ne pas dépendre de l'extérieur et renforcer sa capacité à piloter des projets, il faut que nous puissions recruter des personnes compétentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

J'ai écouté avec attention ce que vous avez dit. Si j'ai bien compris, jusqu'à ce qu'on mette en place les nouvelles dispositions, il n'y avait pas de vérification des compétences en interne avant de recruter les services d'un cabinet extérieur...

J'ai une question précise à vous poser : le cabinet McKinsey aurait touché 235 620 euros en 2020 pour la rédaction d'un guide du télétravail dans la fonction publique, à destination des managers et des agents publics. Pourquoi avoir eu recours à un cabinet de conseil pour rédiger ce type de guide ?

Comment coordonnez-vous votre action avec celle de France Stratégie, institution bien identifiée qui peut être aussi compétente qu'un cabinet privé ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

L'administration s'organise, bien évidemment, en interne, mais il manquait une gouvernance systématisée et formalisée pour assurer une véritable diligence, fondée sur une cartographie des compétences de l'administration. Il s'agit, par exemple, de s'assurer que les compétences que l'on recherche ne se trouvent pas dans les services déconcentrés, dans un ministère voisin ou bien dans le reste de l'administration. Pour cela, le Premier ministre demandera aux ministres d'établir une gouvernance ad hoc, qui donnera lieu à une mission d'inspection. Nous aurons ainsi la garantie, qu'en matière d'organisation et de transformation, si nous faisons appel à l'extérieur, c'est bien parce qu'il y a un besoin factuel et formalisé.

Le télétravail reste un enjeu majeur pour l'administration. J'ai été à l'initiative d'un accord de méthode, puis d'un accord unanime avec l'ensemble des employeurs publics et des organisations syndicales, le 13 juillet dernier, pour que nous déterminions, par le dialogue social, la bonne manière de le déployer dans nos organismes publics. Il y a deux ans, au début de la crise sanitaire, 90 000 agents de l'État pouvaient télétravailler ; plus de 400 000 le font aujourd'hui. La semaine dernière, plus de 75 % des agents de l'État, qui pouvaient le faire, ont télétravaillé. Au printemps dernier, nous étions plutôt à 55 % des agents.

Le guide que nous avons publié visait à accélérer notre capacité à déployer une nouvelle culture du travail. Nous avons confié à un sous-traitant la mission d'identifier les bonnes pratiques dans d'autres organisations, car nous partions de loin. Le pilote a été mené par la DITP et la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) et j'ai moi-même travaillé avec les organisations syndicales sur le sujet. Il ne s'agit donc absolument pas d'un guide écrit en chambre, qui aurait été mis en oeuvre sans aucune appropriation.

Nous souhaitions voir comment des organisations beaucoup plus matures que nous en matière de télétravail avaient traité d'enjeux comme le suivi du droit à la déconnexion, l'égalité entre les hommes et les femmes ou le maintien d'un collectif de travail dans la pratique.

Ces deux guides sont publics et sont évidemment à votre disposition. Les collectivités territoriales les consultent de manière proactive tout comme l'ensemble des employeurs publics. Ils seront actualisés par les administrations.

Il s'agissait donc de lancer un processus qui a ensuite été internalisé et qui a fait l'objet d'un certain nombre d'échanges avec les organisations, avant de devenir notre outil.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Vous avez évoqué à plusieurs reprises la doctrine que le Premier ministre devrait valider. Je vous entends parler de « nouvelle doctrine » et de « recours plus encadré » aux cabinets de conseil.

Ne faudrait-il pas plutôt parler simplement de « doctrine », car il y en avait pas auparavant, et d'« encadrement », car il était plus que léger ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Cette doctrine est nécessaire pour formaliser, systématiser, harmoniser aussi les pratiques entre les ministères. La Cour des comptes a publié un rapport, en 2014, qui comportait des préconisations qui sont restées sans effet. En 2017, quand le Gouvernement a été formé, ce sujet est apparu comme majeur. Un accord-cadre a donc été établi, au début de 2018, afin de mettre en oeuvre le système du « tourniquet » pour éviter des liens de favoritisme à l'encontre de tel ou tel cabinet de conseil. Ce marché fixait également des éléments chiffrés avec un plancher et un plafond encadrant le marché. Enfin, il qualifiait ce qu'est une mission de conseil en organisation ou en transformation. Il s'agissait donc d'établir des règles.

J'ai pris mes fonctions de ministre en juillet 2020. Sachant que cet accord-cadre arrivait à échéance en juin 2022, j'ai demandé qu'on en fasse un bilan et la mission conduite sur le sujet, à l'Assemblée nationale, par Cendra Motin, sous la présidence de Véronique Louwagie, a été très utile. Nous en avons conclu que nous garderions l'accord-cadre, en le renforçant par des ressources humaines complémentaires, par une gouvernance et, désormais, par la doctrine interministérielle du Premier ministre.

Par ailleurs, la réforme de la haute fonction publique nous permet d'agir là où nous ne le pouvions pas auparavant. Elle n'a rien de symbolique, mais elle détermine la manière dont nous organiserons les carrières, dont nous repenserons le rôle des inspections en les transformant de corps en services, dont nous ferons évoluer les carrières et dont nous organiserons la formation continue. Tout cela me permet désormais d'établir un certain nombre de règles que je sais pouvoir tenir sans nuire à l'efficacité de l'action publique.

Nous avons aussi tiré les leçons de la crise sanitaire. Nous avons bien vu, en effet, que nous avons parfois eu recours à des cabinets de conseil externes parce que nous ne savions pas où étaient les compétences en interne, parce qu'elles nous manquaient tout bonnement ou aussi parfois parce qu'elles existaient sans que nous sachions où les mobiliser. La réforme, en cartographiant les compétences et en procédant à un suivi individuel des administrateurs de l'État, nous permettra de mettre en place une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Nous préparons ainsi un État qui regarde l'avenir, qui l'anticipe et qui s'arme pour faire face aux défis.

Le risque cyber en est un, qui impose que nous renforcions nos capacités internes en concertation avec l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI). Nous veillerons d'ailleurs à ce que les profils que nous recrutons correspondent aux compétences qu'a identifiées l'ANSSI.

Si nous agissons, c'est parce que l'accord-cadre de 2018 arrive à échéance, parce que la réforme de la haute fonction publique nous permet d'organiser autrement, en interne, nos fonctions de cabinet de conseil, parce que nous tirons les leçons de la crise sanitaire et parce que le Premier ministre a la volonté politique de développer une doctrine interministérielle cadrée, claire et formalisée.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Vous avez indiqué que les cabinets de conseil ne participaient pas à la prise de décision. Néanmoins, la frontière peut être ténue. Pour preuve, l'accord-cadre de la DITP stipule, je cite, que les prestations attendues des cabinets de conseil couvrent la phase amont des projets de transformation, y compris « la phase de contribution à la prise de décision stratégique, permettant de définir le niveau d'ambition et le niveau d'effort requis pour sa réalisation ».

Dès lors, comment s'assurer que les cabinets de conseils ne participent pas à la prise de décision politique ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Je le réaffirme solennellement, la responsabilité de la décision incombe aux ministres. Le Gouvernement n'a pas à sous-traiter cette responsabilité. Oui, il a pu se produire que, parfois, des acteurs extérieurs à l'administration formulent des comparaisons et chiffrent des avantages et inconvénients pour éclairer celui qui prend la décision.

Il faut évaluer davantage la qualité des prestations : cet éclairage doit être le plus factuel possible, pour qu'il ne s'assimile pas à une prédétermination de la décision. N'alimentons pas une vision erronée des choses, les décideurs publics sont responsables devant le Parlement et se soumettent à évaluation, notamment par la Cour des comptes.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

J'ai bien compris, Madame la ministre. Mais pouvez-vous bien nous préciser que cette mention ne figurera plus dans le nouvel accord-cadre ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Il me semble difficile de dire que les cabinets de conseil ne peuvent pas éclairer la prise de décision.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Exactement, les termes de « contribution à la prise de décision stratégique » sont bien employés dans l'accord-cadre de la DITP !

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Nous allons examiner la formulation précise, pour que le prochain accord-cadre soit clair : on peut demander un appui extérieur tout en respectant les prérogatives du Gouvernement, dans le respect de la Constitution.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Je connais la Constitution, Madame la ministre. Ma question est simple : cette notion de « contribution à la prise de décision stratégique » n'apparaîtra-t-elle plus dans l'accord-cadre de 2022 ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Nous sommes en train de rédiger le contrat. Nous préciserons bien que nul acteur extérieur à l'État ne prendra de décision qui ne relève pas de ses prérogatives.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Madame la ministre, vous avez parlé des démarches dans les ministères, mais qu'en est-il des opérateurs de l'État ? Y a-t-il une procédure de contrôle ou d'assistance des ministères de tutelle ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

La circulaire du Premier ministre intégrera bien les opérateurs afin d'harmoniser les pratiques et de nous assurer que ces agences et acteurs soient strictement dans l'application de la doctrine que nous aurons définie.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Burgoa

Je reviens sur la question du recrutement à la DITP. En tant que parlementaires, nous connaissons bien la déclaration de conflits d'intérêts, dont vous nous avez parlé. En tant que ministre, avez-vous fait part, et si oui sous quelle forme, de votre volonté qu'il y ait un contrôle des conflits d'intérêts pour ce recrutement ? Quel est l'outil utilisé ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Des règles statutaires déontologiques s'appliquent aux agents de l'État, auxquelles j'accorde une attention particulière.

La DITP utilise la charte déontologique des ministères économiques et financiers, disponible sur l'intranet, et fait appel au référent déontologue de ces mêmes ministères. Ce dernier est sollicité en amont des recrutements s'il y a risque de conflit d'intérêts tel qu'il est défini par la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, c'est-à-dire « toute situation d'interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou paraître influencer l'exercice indépendant, impartial et objectif de ses fonctions ».

Ce référent déontologue assure en outre, deux fois par an, l'information de tout le personnel de la DITP, et en particulier des nouveaux arrivants. Il répond aussi, en totale discrétion, aux questions des agents et de l'administration. Ces obligations sont des déclarations de liens d'intérêts, mais aussi de déport.

De façon générale, tout agent public a une obligation de prévention des conflits d'intérêts. Un contrôle déontologique a aussi lieu en cas de cumul d'activité, de cessation temporaire ou définitive d'exercice de ses fonctions ou de départ vers le privé.

Je ne suis pas personnellement informée de toutes les situations, même si le directeur m'a fait part de situations de déport à la DITP.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Joly

Vous avez précisé que tous les ministères et opérateurs publics seraient concernés par la circulaire du Premier ministre. Cela englobe-t-il l'Union des groupements d'achats publics (UGAP) et d'autres types d'opérateurs ? Que cela représente-t-il dans l'ensemble des consultations sollicitées par le secteur public ?

Par ailleurs, créer des règles, c'est ouvrir des possibilités. Dans le recours aux consultants, nous savons qu'il y a des prismes particuliers, parfois critiqués, par exemple une approche excessivement budgétaire ou certains partis pris sur le numérique. Comment assurer une neutralité par rapport à cela pour assurer une décision proprement politique ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Parlez-vous de neutralité dans le choix des prestataires ou de qualité des travaux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Joly

Par exemple, dans un espace environnemental protégé, le fait même de définir un cadre pour les véhicules motorisés témoigne d'une forme d'autorisation. Ici, créer un cadre pour le recours à des cabinets laisse envisager cette possibilité alors qu'on pourrait recourir à des outils internes.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Tout d'abord, sur le premier point, l'UGAP est sous tutelle des ministères économiques et financiers de Bercy. Pour tout recours à une prestation de conseil dans le cadre de la procédure UGAP, la même procédure s'appliquera. Notre doctrine ne dépend pas de l'utilisation ou non d'un marché public. Dès qu'un conseil extérieur est sollicité, l'administration doit s'assurer que la compétence interne n'existe pas et que le besoin est effectif.

Sur le second point, l'ensemble des travaux que j'ai menés comme ministre avec mon administration, tout comme ceux de votre commission d'enquête, montre le besoin d'une tour de contrôle interministérielle, et donc d'une doctrine. Nous ne créons pas des besoins en créant des règles, mais cherchons plutôt à organiser une réalité déjà existante.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

La Secrétaire générale du Gouvernement, quand nous l'avons auditionnée il y a deux semaines, nous disait qu'il n'y avait pas de doctrine d'État sur le recours aux cabinets de conseil et qu'elle s'interrogeait sur son utilité...

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Ce que vous dites illustre le fait que la responsabilité de la décision incombe aux politiques et que l'administration applique ensuite nos décisions.

En effet, il n'y avait pas de doctrine au sens où, avant aujourd'hui, aucun Premier ministre n'a signé de document équivalent à celui qui est en cours de préparation. Nous sommes le premier Gouvernement à avoir signé un accord-cadre, en 2018. Nous sommes donc le premier Gouvernement à avoir pu l'évaluer, notamment au vu de la réforme de la haute fonction publique, du retour d'expérience de la crise sanitaire et d'éléments de bonne gestion publique et d'efficacité, et prenons nos responsabilités. Il me semble sain d'avoir cette doctrine. Il ne s'agit pas ici de questions purement juridiques, mais du pilotage quotidien de l'action publique.

Ce sont bien les secrétaires généraux des ministères qui animeront cette gouvernance. La Secrétaire générale du Gouvernement préside un comité les réunissant et aura un rôle de coordination de ce groupe de secrétaires généraux, en lien avec la DITP.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Je reviens sur cet accord-cadre de la DITP : pour 2021, quel pourcentage des 170 millions d'euros de marchés de conseil hors conseil informatique est passé sous les fourches caudines de cet accord-cadre ? Au cours de certaines auditions, nous avons entendu que certains ministères pouvaient passer des marchés hors accord-cadre.

Par ailleurs, maintiendrez-vous la pratique du « tourniquet », dont je disais tout à l'heure que nous pouvions douter de son efficacité, ou l'encadrerez-vous différemment dans le prochain accord-cadre ?

Enfin, pouvez-vous préciser davantage les intentions de votre ministère sur la pratique du pro bono ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Sur le « tourniquet » dans le cadre du nouvel accord-cadre, nous prévoirons, à partir d'un seuil que nous définirons, des remises en concurrences subséquentes des titulaires hors cette règle du « tourniquet ».

Sur le pourcentage des dépenses de conseil passant hors du « tourniquet » en raison du droit de saisine autonome des ministères, je vous répondrai par écrit pour vous donner un chiffre fiable et précis.

Sur les travaux pro bono, la circulaire du Premier ministre précisera qu'ils ne doivent donner lieu à aucune contrepartie, que le secrétaire général du ministère doit l'autoriser, avec enregistrement auprès de l'acheteur compétent, et qu'il n'y a aucun droit de suite, ce qui permettra de bien les encadrer. Cette transparence sera d'ailleurs fort utile pour répondre aux questions futures de la représentation nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Une position plus radicale serait l'interdiction des prestations pro bono, cela n'a pas requis votre intérêt ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Notre travail interministériel approfondi a abouti à la doctrine que je viens d'évoquer.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Pour être précise, vous n'êtes donc pas favorable à l'interdiction des pro bono ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

L'arbitrage pris est que la pratique du pro bono doit être fortement encadrée. Elle doit être portée à la connaissance du secrétaire général du ministère.

Cette doctrine sera, comme tout élément de politique publique, évaluée.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

De votre point de vue, Madame la ministre, ce recours au pro bono est-il nécessaire ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Je ne sais pas si c'est nécessaire mais il y a des cas.

Je pense personnellement que des acteurs peuvent, parfois à leur initiative, vouloir éclairer une décision publique, mais que, dans ce cas, il faut s'assurer qu'il n'y ait aucune contrepartie et que ce soit transparent. Le ministre doit en être pleinement informé de tout ce qui se passe dans son administration. Ce modèle me semble équilibré.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Je souhaite aborder un dernier sujet, celui de la donnée, qui a plusieurs aspects. Il y a d'abord celui de la souveraineté : des cabinets privés, notamment étrangers, reçoivent des données. Y aura-t-il des éléments sur la sécurité et la souveraineté sur ces données dans la doctrine du Premier ministre ?

En effet, nous avons soulevé à plusieurs reprises le paradoxe du consulting : les données fournies par les administrations ne sont pas exploitées en dehors de la mission, mais on demande aux cabinets de conseil de fournir des données de comparaison avec d'autres pays. Dans ce cadre, comment la sécurité et la souveraineté de nos données seront-elles assurées ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Le périmètre de mon ministère illustre l'aspect stratégique de ces questions. Sur les comparaisons internationales, nous avons un partenariat avec la Commission européenne et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur l'accès à des données publiques.

La doctrine fait de la donnée un axe majeur. Il s'agit d'abord de limiter la transmission de données au strict nécessaire. On trouve certes l'open data, pour laquelle la France est le premier pays en Europe. Cependant, il faut limiter les données transmises. Il faut ensuite les minimiser, par agrégation, anonymisation et pseudonymisation.

De plus, les prestataires doivent respecter les règles de confidentialité, dont le RGPD. Aucune donnée ne doit être communiquée en dehors des donneurs d'ordre administratifs, y compris des données de comparaison. Enfin, toutes les données transmises doivent être retournées au donneur d'ordre et supprimées par le prestataire une fois la mission terminée.

En matière de souveraineté, tant que les prestataires ont ces données en main, notamment dans des clouds, ceux-ci doivent respecter la doctrine du Premier ministre qui fait appliquer le critère SecNumCloud défini par l'ANSSI. Les serveurs ne le respectant pas ne peuvent pas héberger de données publiques.

Ensuite, la France est à cet égard au plus haut niveau de protection au sein de l'Union européenne, les données sur le cloud doivent faire l'objet d'une validation juridique pour que les serveurs ne soient pas accessibles, par des lois extraterritoriales, à des services de renseignement non européens.

Ainsi, dès que l'État a une donnée personnelle sur un citoyen, que ce soit quand il les gère lui-même ou qu'un prestataire y a accès, elle ne peut être placée sur un serveur ne répondant pas à des critères cyber et juridiques très stricts.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Considéreriez-vous normal que des services européens de renseignement puissent y accéder ?

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Non, il s'agit bien de tout service de renseignement et en particulier non européen. De fait, le respect des règles européennes fait que les services européens de renseignement n'accèdent pas à nos données.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre

Cela s'appelle la loi, Monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

J'ai le sentiment d'avoir entendu des éléments de décision de nature à répondre à nos inquiétudes, mais seulement après cinq ans de gouvernement... Mieux vaut tard que jamais. Toutefois, il faudra veiller à la bonne application des critères qui doivent encadrer les choses. Je ne peux pas m'empêcher de regretter que tout cela soit un peu tardif...

Nous vous remercions de votre participation et attendons vos compléments par écrit.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Mes chers collègues, Madame la rapporteure, nous poursuivons nos travaux avec l'audition en format table ronde de trois cabinets de conseil.

Nous recevons M. Laurent Benarousse, associé chez Roland Berger France ; MM. Guillaume Charlin, directeur général, et Jean-Christophe Gard, directeur associé, du Boston Consulting Group (BCG) ; M. Gilles Bonnenfant, président, et Mme Claudia Montero, directrice générale d'Eurogroup Consulting.

Depuis le début de nos travaux, nous avons entendu plusieurs cabinets de conseil et nous souhaitions aujourd'hui poursuivre avec nos intervenants.

Comme l'a rappelé notre rapporteure, nous ne sommes pas là pour instruire le procès de qui que ce soit mais pour évaluer l'ampleur et les modalités du recours aux cabinets de conseil dans le secteur public.

Madame, Messieurs, je vous remercie de votre présence et des éléments que vous allez nous apporter pour mieux comprendre vos modalités d'intervention auprès de l'État et de ses opérateurs.

Cette audition est ouverte au public et à la presse. Elle est retransmise en direct sur le site Internet du Sénat. En raison du contexte sanitaire, certains de nos collègues peuvent également intervenir par visioconférence.

Comme pour toutes les personnes auditionnées, je rappelle qu'un faux témoignage devant notre commission d'enquête est passible de sanctions pénales, qui peuvent aller, selon les circonstances, de 3 à 7 ans d'emprisonnement et de 45 000 à 100 000 euros d'amende.

Je vous invite, chacun l'un après l'autre, à prêter successivement serment de dire toute la vérité, rien que la vérité. Levez la main droite et dites « je le jure ».

Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, Mme Claudia Montero et MM. Gilles Bonnenfant, Laurent Benarousse, Guillaume Charlin et Jean-Christophe Gard prêtent successivement serment.

Debut de section - Permalien
Guillaume Charlin, directeur général du Boston Consulting Group (BCG)

Je suis ravi que vous nous donniez l'occasion de nous exprimer devant la représentation nationale.

Dans ce propos liminaire, je voudrais couvrir trois sujets : notre activité en France, notre activité pour le service public et le pro bono.

BCG est un cabinet de conseil international présent dans 60 pays dans le monde. Il s'agit d'une société privée détenue par ses associés. Nous sommes bien implantés en France où nous fêterons nos 50 ans en 2023. Sur le territoire national, la quasi-totalité de nos clients sont Français.

Le coeur de notre activité est le conseil en stratégie. Nous accompagnons les grandes entreprises et leurs dirigeants dans leurs transformations, notamment technologiques, digitales et environnementales. Nous accompagnons nos clients en amont et en aval de leurs décisions. En amont pour éclairer la prise de décision et en aval pour aider à gagner en vitesse et en impact dans la mise en oeuvre de leur stratégie.

Nous avons pour cela trois types d'expertise au sein de notre cabinet : des expertises dites sectorielle - la santé, la distribution, les télécommunications, etc. -, des expertises dites fonctionnelles - les achats, la production, le marketing, le commercial, etc. -, des expertises technologiques - la datascience, les ERP, l'ingénierie logicielle, etc.

La combinaison de ces trois expertises nous permet de répondre aux besoins de transformation de nos clients. Nous sommes l'un des rares cabinets de la place à toutes les avoir sous le même toit.

Notre modèle se base sur la confiance que nos clients veulent bien nous accorder. Cette confiance repose sur notre parfaite intégrité professionnelle, notre engagement à maintenir une totale confidentialité sur les missions menées pour nos clients et notre déontologie qui garantit l'absence de conflit d'intérêts.

Un code de conduite regroupe toutes ces obligations déontologiques. Il s'applique à l'ensemble de nos collaborateurs, quelle que soit leur fonction ou leur niveau hiérarchique, à toutes nos missions et à tous nos clients, privés ou publics.

Ce code de conduite est un pilier de notre cadre de déontologie. Il existe depuis 1990 et est actualisé en permanence. Il a valeur prescriptive et est fondé sur les obligations légales mais également sur nos valeurs et nos politiques de conformité. Il sert de référence pour toutes nos prises de décision.

Debut de section - Permalien
Jean-Christophe Gard, directeur associé du Boston Consulting Group (BCG)

Nous sommes très fiers de pouvoir servir l'État au travers des missions que vous nous confiez, même si cette activité représente une part modeste des activités de notre cabinet en France : de l'ordre de 1 % de notre chiffre d'affaires en moyenne sur les dix dernières années et une part inférieure à 1 % de notre chiffre d'affaires sur les cinq dernières années.

La totalité des projets que nous menons respecte le code de la commande publique. Nous intervenons essentiellement, et exclusivement sur les dernières années, via l'accord-cadre de la DITP, qui nous a été attribué en juin 2018.

L'ensemble de nos missions en France sont conduites par des intervenants Français. Ces missions donnent lieu à la mise en place d'équipes spécifiques à chaque projet afin d'assembler les meilleures compétences et expertises - technologiques, sectorielles et fonctionnelles - compte tenu du besoin qui est exprimé par notre donneur d'ordre.

Nos équipes respectent les règles de confidentialité, de déontologie et de protection des intérêts de nos clients. Ces règles s'appliquent systématiquement à l'ensemble des projets que nous réalisons dans le cadre du secteur public.

Debut de section - Permalien
Guillaume Charlin, directeur général du Boston Consulting Group (BCG)

S'agissant du pro bono, nous traversons une période inédite avec la crise sanitaire. Dans le cadre de notre responsabilité sociétale, nous avons voulu trouver un moyen de mettre à disposition certaines de nos expertises pour contribuer à l'effort national et aider notre pays à traverser cette période délicate.

Cette contribution correspond à une demande de nos équipes.

Nous avons réalisé deux missions dites pro bono pour le secteur public.

Nous avons aidé l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) dans la mise en place de modèles de prévision des appels au SAMU au moment des pics de la pandémie et des admissions en réanimation pendant le premier confinement. Nous avons également aidé sur des tâches d'organisation comme des tris de fichiers de volontaires ou des tableaux d'occupation de lits pour permettre à l'AP-HP de mobiliser tous ses cadres à un moment où nous en avions grandement besoin et où tout le monde avait été pris par surprise.

Deuxième mission : nous avons accompagné le ministère de l'économie et des finances dans la mise en place de mesures économiques d'urgence pour soutenir les PME en difficulté lors du premier confinement et tout particulièrement les artisans et les commerces de détail.

Ces actions s'inscrivent dans le cadre de notre responsabilité sociétale, à laquelle le BCG apporte une attention particulière depuis plusieurs décennies. Nous avons créé à Paris il y a plus de 15 ans le prix de l'entrepreneur social, qui récompense chaque année deux entreprises oeuvrant dans l'économie sociale et solidaire.

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Votre commission d'enquête sur l'influence croissante des cabinets de conseil sur les politiques publiques est un sujet d'importance pour le secteur public bien sûr mais également pour notre profession. Aussi nous vous remercions d'auditionner Eurogroup Consulting dans le cadre de cette enquête.

Je voudrais situer Eurogroup Consulting dans le vaste monde des cabinets de conseil. Nous sommes un cabinet en organisation, qui a fêté ses 40 ans vendredi dernier. Nous avons une vocation : offrir au marché un savoir-faire de conseil sur mesure.

Le consulting est né dans le monde anglo-saxon, les cabinets apportant des méthodes, des savoir-faire et des techniques. Nous nous sommes inspirés de ces méthodes et les avons adaptées, considérant que nous avions une touche « à la française » à apporter. Eurogroup a l'ambition de créer le premier cabinet de conseil en transformation Français, dans le contexte européen.

Eurogroup est un cabinet indépendant qui appartient à ses 254 actionnaires, tous salariés opérationnels et spécialistes du conseil en organisation. Notre société est une SAS de droit Français, qui paie ses impôts en France. Elle n'a pas d'extension internationale qui porterait sa marque.

Notre développement s'est fait en plusieurs étapes. Dans les années 80 nous avons démarré nos activités dans le domaine bancaire puis dans l'industrie et les services et, récemment, dans le secteur public. Ce développement est passé par un élargissement de nos offres de conseil, toujours ancrées dans la transformation des organisations, par un accompagnement des structures et des hommes et des femmes qui les composent et par une extension de notre réseau international, qui a progressivement fait de nous l'un des cabinets de référence des entreprises du CAC 40 ou du SBF 120.

Nous réalisons environ un quart de notre chiffre d'affaires à l'international. Au 31 août 2021, Eurogroup Consulting France a réalisé un chiffre d'affaires de 74 millions d'euros pour un peu plus de 300 consultants. Notre chiffre d'affaires a crû de 35 % depuis 10 ans.

Notre métier est d'accompagner nos clients, privés ou publics, dans la structuration et la conduite de leur transformation. Notre ADN est d'embarquer les équipes de nos clients dès la structuration de la transformation.

Notre exercice professionnel est guidé par une extrême attention portée sur la construction des solutions pour et avec nos clients afin que le résultat attendu puisse être conforme à la commande et pérenne. Nous effectuons dans ce cadre le transfert de savoir-faire.

Nous ne sommes pas là pour faire la stratégie à la place des dirigeants mais pour éventuellement la nourrir ou la questionner.

Notre mission est de s'assurer que la stratégie arrêtée soit comprise par les équipes et soit déclinable et déclinée au plus près du terrain et des équipes opérationnelles. Nous sommes des spécialistes de la structuration et de la gestion de projets complexes dans de nombreux domaines d'intervention. Je pourrais citer la finance, la relation client, les ressources humaines, l'innovation, les achats ou encore l'excellence opérationnelle.

Un point est évoqué sur les missions pro bono ou le rôle sociétal. Depuis une vingtaine d'années, Eurogroup Consulting France oeuvre gracieusement sous forme de mécénat de compétence auprès de petites associations, pour les aider à se transformer et pour que leurs actions soient encore plus efficaces pour le plus grand nombre. En France, nous avons été les pionniers de cette logique.

Les associations que nous accompagnons sont proposées par les collaborateurs d'Eurogroup à un jury indépendant qui effectue la sélection après un appel à projets. En aucun cas cela n'a de lien avec des clients potentiels. Nous ne faisons aucune mission pro bono.

Lors de la signature de son contrat de travail, chaque collaborateur d'Eurogroup s'engage à respecter les règles déontologiques de notre profession et est tenu au secret professionnel. Un comité d'éthique veille à la gestion des conflits d'intérêts qui pourraient survenir. Ce comité peut être saisi par chaque collaborateur ou peut s'autosaisir de tout sujet qu'il souhaiterait investiguer.

Une question semble revenir lors des auditions : les consultants ont-ils un rôle à jouer dans le secteur public ? Cela présente-t-il un intérêt pour la personne publique ? Je répondrai que notre profession a vocation à accompagner les organisations, les hommes et les femmes de tout secteur d'activité pour les rendre plus efficaces. Il n'y a pas, selon nous, à distinguer les lieux d'exercice de notre métier.

Dans tous les secteurs, les questions me semblent plutôt être : la mission est-elle justifiée ? A-t-elle livré l'impact escompté ? Le donneur d'ordre maîtrise-t-il le résultat obtenu ? En est-il satisfait ? Y a-t-il eu transfert de savoir-faire ? Aurait-on pu mobiliser en interne les mêmes expertises, dans les mêmes délais et sans déstabiliser le quotidien ?

La question centrale est donc : doit-on faire cet acte d'achat ? Le fait-on au juste prix ? En est-on satisfait ?

Debut de section - Permalien
Claudia Montero, directrice générale d'Eurogroup Consulting

Pour revenir sur notre travail dans le secteur public, nous avons décidé de nous impliquer fortement depuis une quinzaine d'années, considérant que nous devions jouer un rôle dans sa transformation, tant par notre engagement citoyen que par la légitimité de nos compétences. En tant que cabinet de conseil Français et indépendant, nous avons considéré que nous pouvions prétendre à une part de marché, comme dans le secteur privé.

De plus, les besoins de conseil dans le secteur public ont augmenté considérablement depuis une quinzaine d'années et se sont diversifiés, passant d'une dominante de l'accompagnement de grands projets informatiques à de besoins diversifiés de transformation.

Notre part de marché a crû depuis dix ans auprès des trois fonctions publiques, en cohérence avec l'accélération du recours au conseil dans le secteur public et du fait du succès que nous avons rencontré sur certains marchés.

Nous sommes titulaires de plusieurs accords-cadres. Nous pouvons considérer que le secteur public et parapublic représente environ 30 à 40 % de notre activité en fonction des années. Nous précisons que ce chiffre intègre l'ensemble des fonctions publiques - État, collectivités territoriales et hôpitaux -, le parapublic et les entreprises dans lesquelles l'État a une participation, soit le périmètre de travail de votre commission d'enquête.

Environ 150 de nos collaborateurs interviennent dans ce périmètre. Les missions que nous réalisons dans le secteur public sont des interventions d'appui à la transformation où nous pouvons accompagner les acteurs publics pour qualifier les solutions qu'ils souhaitent mettre en oeuvre, pour identifier les impacts qu'elles vont avoir sur les femmes et les hommes qui vont les utiliser, sur leurs métiers, leurs façons de faire. C'est ce que nous appelons la conduite du changement. Nous aidons également à programmer et à suivre le plan de mise en place de ces transformations. C'est ce que nous appelons l'appui au pilotage.

Je souhaiterais mentionner cinq exemples de thématiques sur lesquels nous intervenons.

Il y a, tout d'abord, l'accessibilité du service public aux usagers. Dans le cadre du projet France services, nous avons contribué à des expérimentations dans des territoires ruraux puis urbains pour définir un nouveau modèle d'opération des services publics. Nous travaillons aussi sur la simplification des relations entre l'État et ses usagers.

Il y aussi l'amélioration des conditions de production du service public, tant pour l'usager que pour les collaborateurs. Nous intervenons sur des projets qui permettent d'améliorer les temps d'attente et travaillons en immersion avec les équipes opérationnelles pour diagnostiquer ensemble les pertes de temps et trouver les solutions pour les éradiquer.

Nous travaillons également sur les démarches de consultation qui nourrissent les politiques publiques. Notre savoir-faire de mobilisation du plus grand nombre pour des démarches d'intelligence collective est ancien. Nous sommes sollicités depuis quelques années pour appuyer la construction de méthodes de consultation et leur mise en oeuvre dans le service public.

Je mentionnerais aussi l'accompagnement des évolutions professionnelles induites par les transformations. Nous examinons les impacts des transformations sur le métier des agents publics et conduisons des évaluations collectives et individuelles.

Nous intervenons enfin sur l'appui à la définition des nouvelles organisations et des nouveaux modes de fonctionnement à mettre en place, par exemple pour la création ou la fusion d'entités publiques.

À la question qui nous est posée : « votre cabinet a-t-il déjà participé directement ou indirectement à la rédaction des documents qui accompagnent les projets d'actes réglementaires ou législatifs ? », la réponse est non.

La décision est toujours celle de client, en l'occurrence le client public. Notre rôle est souvent de constituer des « entrants » à sa décision, qui lui permettent d'avoir une vision objectivée du champ des possibles.

Par exemple, dans le cadre de la convention citoyenne pour le climat, en tant qu'animateurs, nous avons synthétisé l'ensemble des séances de travail des citoyens. Toutes les propositions de mesures réglementaires ont été rédigées par un comité légistique, dont nous n'étions pas partie prenante.

Toutes nos missions sont définies et contractualisées conformément au code de la commande publique. Nous travaillons toujours avec un engagement sur les livrables à remettre. La facturation est déclenchée lorsque les prestations sont conformes au besoin et validées par nos clients.

Debut de section - Permalien
Laurent Benarousse, associé chez Roland Berger

Roland Berger est un cabinet de conseil européen, implanté en France depuis 1990. Notre bureau parisien compte 260 collaborateurs pour un chiffre d'affaires de 74 millions d'euros en 2020, au trois quarts pour le compte de clients Français.

L'expertise et l'indépendance constituent les briques fondamentales de notre offre de valeur. Nos interventions se concrétisent par des livrables précis, portent sur des périmètres délimités et sont réalisées dans des délais définis en amont avec nos clients.

Dans ce cadre, pour nos clients privés comme pour nos clients publics, nous élaborons des plans et revues stratégiques, réalisons des modélisations économiques et financières et accompagnons la conduite de grands programmes de transformation.

Roland Berger France intervient ainsi dans de nombreux secteurs d'activité, comme les services financiers, l'aéronautique et les transports, l'automobile ou le secteur public. Chacun de ces domaines d'activité a un poids comparable dans notre portefeuille. Le secteur public et parapublic au sens du périmètre de votre commission d'enquête représente environ 15 % de notre chiffre d'affaires. Ce chiffre inclut une part significative d'activités co-traitées ou sous-traitées à des partenaires externes.

Cette activité dans le secteur public génère un niveau de marge comparable à celle réalisée pour le compte de nos clients privés. Depuis 2018, nos travaux pour l'État sont majoritairement réalisés au travers de l'accord-cadre interministériel porté par la DITP.

Comme pour les autres domaines d'intervention de Roland Berger France, nos prestations auprès du secteur public sont pilotées par une équipe dédiée, mobilisant environ 15 % de nos effectifs.

Nous avons actuellement trois salariés ayant eu une expérience dans le secteur public. Ces recrutements répondent à notre recherche permanente d'expertise et de capacité à accompagner nos clients, avec la hauteur de vue nécessaire. Nous appliquons alors la plus stricte déontologie, ainsi que les règles édictées par la HATVP.

Contrairement à une perception assez étendue, notre activité ne se construit pas sur l'accès à tel ou tel décideur, que ce soit dans le secteur privé ou a fortiori dans le secteur public, soumis aux règles de la commande publique.

Pour remporter une consultation et convaincre un client, nos actifs techniques sont de trois ordres : nos expertises et nos savoir-faire, la qualité et la motivation de nos équipes et enfin notre réputation. La réputation est un mécanisme très efficace pour pousser notre secteur à la performance.

Roland Berger est extrêmement vigilant en matière de déontologie : le cabinet a élaboré un code de conduite qui s'applique à tous nos collaborateurs et à tous les niveaux de l'organisation.

Nous devons tous suivre des modules de formation portant notamment sur la conformité, la lutte contre les discriminations et la protection des données. Avant chaque prestation, La lutte contre les conflits d'intérêts fait l'objet d'une attention systématique au sein de notre cabinet.

Sur le plan quantitatif, notre cabinet accompagne le secteur public depuis plus de quinze ans. Si son poids dans notre portefeuille a pu varier d'une année à l'autre, son poids cumulé sur les dix dernières années s'élève à environ 15 %. Nous n'avons donc pas observé d'accroissement relatif du recours à nos services sur cette période, comparativement à nos autres secteurs d'intervention.

Sur le plan qualitatif, nous avons pu observer en revanche une professionnalisation des achats de conseil par l'État, tant du point de vue du choix de ses prestataires que de son pilotage. La mise en place des différentes générations d'accords-cadres a permis au client public d'accéder à un catalogue d'expertise et de prestations précis et dimensionné au meilleur coût.

Le développement d'expertise au sein même de l'État sur les bonnes pratiques de recours et de pilotage des prestataires privés a permis de mieux utiliser ces expertises externes aux côtés des clients publics. J'insiste sur le terme « aux côtés » : nos prestations sont le plus souvent réalisées en équipes conjointes avec nos clients. Cela permet d'assurer, d'une part, une intervention au plus près de besoins et, d'autre part, une appropriation des solutions proposées et un transfert de compétences efficace. Des modules de transfert de nos outils et de nos modèles sont régulièrement mis en oeuvre à la fin de nos missions.

Notre cabinet a eu l'occasion d'accompagner le secteur public au cours de la crise sanitaire liée au covid-19. Nous avons apporté un soutien à la direction générale de la santé au sein de la cellule de coordination logistique, en contribuant à la sécurisation des approvisionnements et de la distribution de masques, d'équipements de protection individuelle et de tests antigéniques.

Nous avons aussi participé à l'organisation des équipes dans le cadre du transfert progressif des activités logistiques à Santé publique France.

Durant le premier confinement au printemps 2020, dans le cadre d'une démarche citoyenne, naturelle et spontanée au regard de l'ampleur de la crise, certains de nos collaborateurs sont intervenus bénévolement et de manière très ponctuelle en appui au secteur public, à l'instar de mise en place d'outils de formation en ligne à la réanimation pour les soignants de l'AP-HP.

Sur le sujet des projets bénévoles et au-delà du soutien ponctuel lié à la crise sanitaire, je précise que nos interventions sont, sauf rares exceptions, systématiquement facturées à nos clients, privés comme publics.

Ces exceptions sont de deux ordres.

Il nous arrive de manière ponctuelle d'intervenir au titre du mécénat de compétence ou à titre gracieux auprès du secteur associatif dans le cadre de notre politique RSE.

Nous avons aussi participé bénévolement à des initiatives ou à l'organisation d'évènements visant à sensibiliser les acteurs publics comme privés à deux thématiques qui nous tiennent à coeur. La première est le soutien aux TPE et PME, car nous sommes convaincus qu'elles constituent en France un gisement important de la création d'activité et d'emplois. La deuxième est celle du développement de champions capables de rivaliser au plan international avec leurs grands concurrents et de participer sur le marché national aux enjeux de souveraineté.

Nous avons recensé trois contributions bénévoles de ce type sur les dix dernières années et aucun des travaux bénévoles que nous avons pu mener n'a donné lieu à des prestations complémentaires facturées.

Pourquoi le secteur public fait-il appel à des prestations externes privées ? De mon point de vue, il n'y a pas de réelles différences avec les raisons qui guident ce choix pour nos clients privés, même si nous sommes conscients que l'État et la puissance publique ont des objectifs et des exigences spécifiques en raison de leur mission d'intérêt général.

Nos équipes apportent de l'expertise, comme par exemple pour l'élaboration de propositions de modèles économiques adaptés à une infrastructure publique, l'élaboration d'une nouvelle organisation pour un service public ou encore la mise en place de dispositifs de conduite du changement.

Cette expertise constitue le capital intellectuel mis à la disposition de nos clients. Elle est constamment enrichie par des activités de recherche internes au groupe Roland Berger, sur des thématiques innovantes comme actuellement les enjeux de l'hydrogène, l'urgence écologique ou la robustesse des organisations face aux crises.

Nos équipes apportent également leur soutien lors de situations d'urgence qui nécessitent la production de livrables en temps contraint. Vous avez peut-être dans votre entourage des personnes qui exercent le métier de consultant et vous avez pu observer que ce métier de service nécessitait un engagement personnel très important, souvent avec des échéances courtes.

Ce qui nous guide et nous passionne, c'est justement la satisfaction du client. Tous nos processus internes sont orientés dans ce sens. Nous demandons systématiquement à nos clients de nous évaluer en fin de mission et nous disposons d'équipes internes pour nous aider à progresser dans ce service apporté. Cet engagement fiable, sans faille et sans compter de nos équipes constitue pour nos clients une raison du recours à nos services.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Je commencerais par des questions transverses, s'adressant aux trois cabinets présents.

La première : mobiliser un cabinet de conseil, c'est aussi identifier une marque, un signe de prestige. La discrétion de vos missions est-elle une condition de leur bon déroulement ?

Deuxième question : les données et connaissances que vous accumulez lors de vos différents travaux au service de la puissance publique sont-elles ensuite mobilisées pour d'autres prestations dans le cadre des benchmarks ?

Troisième question : quelle est votre doctrine de recrutement de hauts fonctionnaires ? Fait-elle partie de votre stratégie de développement et de croissance dans le secteur public ?

Dernière question : avez-vous réalisé des missions liées à la conception ou la mise en oeuvre des mesures d'urgence dans le cadre du plan de relance ?

Debut de section - Permalien
Guillaume Charlin, directeur général du Boston Consulting Group (BCG)

Si, par discrétion, on entend confidentialité absolue dans le traitement de l'information sur les sujets qui nous préoccupent, la réponse est absolument oui.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Le grand public ne vous connaît pas et ne sait pas que des ministères font appel à vous.

La discrétion est-elle une marque de fabrique de l'intervention des cabinets de conseil ?

Debut de section - Permalien
Guillaume Charlin, directeur général du Boston Consulting Group (BCG)

Comme je vous le disais, nous réalisons moins de 1 % de notre chiffre d'affaires dans le secteur public.

Le coeur de notre activité, c'est le secteur privé et plus précisément ce que nous appelons le CAC 80, le CAC 40 et les très grandes entreprises françaises. Nous avons peu de clients et nous ne nous adressons pas au grand public.

Nous sommes connus des dirigeants des grandes entreprises et sur les campus, car c'est là que nous recrutons, mais pas par le grand public. Par nature, notre notoriété est très confidentielle.

Debut de section - Permalien
Jean-Christophe Gard, directeur associé du Boston Consulting Group (BCG)

Pour répondre à votre seconde question, les règles de gestion de la donnée dans le secteur public sont les mêmes que celles que nous appliquons dans le secteur privé.

Nous sommes régulièrement soumis à des chartes de sécurité informatique imposées par nos clients pour garantir la sécurité des données qui nous sont confiées pendant le projet.

Ces informations ne sont accessibles qu'aux seuls membres de l'équipe, du moment où elles sont pertinentes pour leurs missions. Elles ne sont pas partagées avec le reste de l'équipe et sont détruites ou remises à nos clients à la fin de la mission.

Nous gardons les livrables, exclusivement pour des sujets de conformité. Ces livrables sont gardés sur un système informatique dont les serveurs sont localisés en Allemagne. Tous nos systèmes et tous nos codes de gestion de la donnée respectent scrupuleusement le RGPD.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Êtes-vous concernés par le Patriot Act et le Cloud Act ?

Debut de section - Permalien
Jean-Christophe Gard, directeur associé du Boston Consulting Group (BCG)

Non, dans la mesure où nos données ne sont pas sauvegardées sur le territoire américain.

Par ailleurs, l'ensemble des données que nous sauvegardons sur nos serveurs sont cryptées. Nous sommes les seuls détenteurs de ces clés.

Debut de section - Permalien
Guillaume Charlin, directeur général du Boston Consulting Group (BCG)

Je confirme que nous ne sommes pas soumis au Cloud Act.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Comment réalisez-vous les benchmarks proposés à vos clients ? Sur la base de vos anciens livrables ?

Debut de section - Permalien
Jean-Christophe Gard, directeur associé du Boston Consulting Group (BCG)

Quand nous construisons des benchmarks, ils s'appuient sur trois sources. Il y a des données d'ordre public, que nous pouvons exploiter. Il y a des données propriétaires, générées par nos enquêtes, typiquement des enquêtes consommateurs. Enfin, il y a des données assemblées par certains acteurs avec l'objectif spécifique de les partager entre eux.

Nous sommes un tiers de confiance qui récolte certains indicateurs auprès d'acteurs. Nous les restituons de manière anonyme afin qu'ils puissent se comparer entre eux.

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Sur la première question portant sur la discrétion, nous ne sommes pas des entreprises qui travaillent avec le grand public. Nos marques et nos métiers sont moins connus et accessibles. Nous existons depuis 40 ans et avons mis du temps pour que notre marque soit connue. Nous sommes également connus des étudiants.

Nous commençons à être un peu connus du grand public car nous réalisons des contributions, des études et du marketing sur des sujets que nous traitons.

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Ce ne sont pas des logiques de réseaux mais des logiques de communication et de marketing. Chacune des entreprises représentées ici recrute dans les grandes écoles.

Sur les données, nous avons des contrats de travail et une charte informatique qui régissent cette question. Les données échangées sont cryptées, selon les règles qui nous sont données par nos clients. Les livrables appartiennent à nos clients et nous ne les partageons pas. Les éléments de comparaison sont issus soit de données open source, soit d'enquêtes ou d'entretiens spécifiques que nous réalisons. Dans ce cas, la personne concernée a connaissance que les données peuvent être partagées.

Debut de section - Permalien
Claudia Montero, directrice générale d'Eurogroup Consulting

Une question portait sur la doctrine de recrutement des hauts fonctionnaires et son utilité pour un cabinet de conseil. Nous n'avons pas de doctrine de recrutement de hauts fonctionnaires. Nous n'avons pas et n'avons jamais eu de hauts fonctionnaires dans nos effectifs.

Nous ne sommes pas intervenus dans le cadre du plan de relance ni sur le plan d'urgence lors de la crise sanitaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

M. Jean-Christophe Gard, vous avez déclaré à Politico, concernant le recrutement d'anciens fonctionnaires : « il y a une logique d'investissement et notamment d'investissement sur des personnes qui sont aujourd'hui de hauts fonctionnaires, qui sont des personnes influentes dans la fonction publique et qui seront influentes dans le secteur privé demain. » Pouvez-vous nous préciser votre pensée ?

Debut de section - Permalien
Jean-Christophe Gard, directeur associé du Boston Consulting Group (BCG)

Je vous remercie de cette demande de clarification.

Nous avons aujourd'hui moins d'une vingtaine de nos collaborateurs qui sont issus du secteur public, sur un millier d'employés dans le marché français. Pour la plupart d'entre eux, ils ne sont pas arrivés chez nous directement, mais après une expérience dans le privé avant de nous rejoindre. Notre activité « secteur public » représentant moins de 1 % de notre chiffre d'affaires, la plupart de ces collaborateurs ne travaillent pas sur des missions en lien avec les administrations.

Ce que je souhaitais signifier, c'est que l'État recrute de grands talents. Certains d'entre eux vont dans le privé et, en tant qu'employés du secteur privé, peuvent devenir des gens intéressants à côtoyer pour nous, comme des clients ou prescripteurs potentiels. Dans une logique de construction de réseaux, il y a des talents dans l'administration qui peuvent être des contributeurs intéressants. Mon propos ne faisait pas référence à une logique de recrutement au sein du BCG.

Debut de section - Permalien
Laurent Benarousse, associé chez Roland Berger

Cela a été dit par mes confrères et je n'apporterai pas beaucoup plus d'éclairage sur la question de la marque : nous sommes une activité de « professionnels à professionnels » ; notre marque n'est pas une marque de grand public. Elle a un certain lustre et la réputation est un actif important dans notre activité. Pour moi, la force de la marque d'un cabinet de conseil est qu'elle constitue une garantie de la qualité du livrable.

La discrétion de notre intervention est à la discrétion du client. Il nous est arrivé de mener des projets éminemment publics, tout comme il nous est arrivé de devoir mener des projets en toute confidentialité. Il n'y a pas de règle particulière et le client décide de l'usage de notre accompagnement et de nos livrables.

Les données de Roland Berger France sont hébergées en France, sur des serveurs appartenant à Roland Berger. Ces serveurs sont protégés par des mécanismes de cybersécurité, que nous espérons les plus fiables possible. Les données sont la propriété de nos clients.

Nous devons parfois travailler dans des salles où la donnée est mise à notre disposition, sans qu'on puisse la copier. Dans d'autres cas, nous accédons à la donnée à titre temporaire, pour réaliser nos travaux, avant de la détruire à la fin de notre mission. Enfin, il nous est parfois demandé de garder les données et les livrables.

Ces données ne sont pas utilisées dans le cadre de benchmarks. Chez nous, le benchmark consiste à « compiler » des informations publiques, à comparer des processus et organisations. Dernier élément du benchmark : les entretiens, réalisés de manière ouverte et dont l'objectif est précisé à nos interlocuteurs dès le début de la rencontre.

Concernant le recrutement de hauts fonctionnaires, nous n'avons pas de doctrine particulière. J'ai moi-même été fonctionnaire pendant quelques années, mais enfin il y a 20 ans. Nous sommes trois dans la structure : moi-même, un salarié d'une entreprise publique et un haut fonctionnaire. C'est un peu le fruit du hasard. Il n'y a pas de projet derrière cela. Ce sont les individus qui, à un instant donné, semblent vouloir effectivement apporter leur valeur au sein du cabinet. Il n'y a pas d'objectifs quantifiés de recrutement.

Nous n'avons pas participé à la conception du plan de relance. Cependant, nous avons participé de manière bénévole à deux études qui ont donné lieu à des contrats avec la DGE, dont nous avons fait état dans le document que nous vous avons transmis. Chacune d'entre elles a été ponctuelle et a mobilisé une vingtaine de jours-hommes. Nous avons accompagné les équipes de la direction générale des entreprises (DGE) sur deux sujets : l'identification des vulnérabilités des chaînes de valeur face aux difficultés d'approvisionnement de nos industriels et un premier niveau de réflexion sur ce que pourraient être les mesures à déployer dans certaines filières industrielles pour faire face à ces vulnérabilités.

Ces mesures ont par la suite été étudiées avec chaque branche industrielle puis déployées. Mais nous ne sommes pas intervenus sur ces travaux.

Debut de section - Permalien
Laurent Benarousse, associé chez Roland Berger

Non, les deux actions étaient bénévoles auprès de la DGE.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Vous avez évoqué l'implication bénévole de vos salariés, est-ce qu'il s'agit d'une implication bénévole en dehors du temps de travail ou est-ce qu'il s'agit de prestations pro bono avec des salariés rémunérés par l'entreprise à cette occasion ?

Debut de section - Permalien
Laurent Benarousse, associé chez Roland Berger

Dans le cadre de la crise covid-19, je ne saurais dire ce que les individus ont pu faire à titre personnel. J'imagine que certains ont pu participer à des actions de soutien locales sur leur temps libre.

Ce que nous avons fait, au titre de la société, c'est l'accompagnement des équipes de l'AP-HP et les deux projets pour le compte de la DGE dont je viens de faire état.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je voudrais connaître votre appréciation concernant la règle du « tourniquet ». Les commandes semblent « tourner », mais lentement.

Deuxième question : M. Benarousse, vous avez évoqué la HATVP. Pourriez-vous nous donner plus de détails concernant vos interactions avec la HATVP ?

Ma troisième question porte sur les conflits d'intérêts. Vos salariés font-ils une déclaration en présence d'un potentiel conflit d'intérêts ? Collectez-vous ces déclarations, est-ce qu'un registre est tenu et, si tel n'est pas le cas, pensez-vous qu'un tel registre pourrait être utile ?

Debut de section - Permalien
Jean-Christophe Gard, directeur associé du Boston Consulting Group (BCG)

Le « tourniquet » est le mécanisme de l'accord-cadre de la DITP, dont nous sommes attributaires. Nous le vivons donc au quotidien. C'est un système qui a une vertu d'équité entre les attributaires du contrat, qui doivent normalement récupérer des volumes d'activité équilibrés. La seconde vertu, c'est qu'il donne l'occasion aux donneurs d'ordres recourir à des prestataires différents. Le mécanisme est également simple dans sa mise en oeuvre.

Pour ce qui nous concerne, il est vrai que la compréhension de la place de chacun dans le « tourniquet » pour telle ou telle administration n'est pas toujours très claire. Nous n'avons pas systématiquement l'information : ce sont les donneurs d'ordre qui décident à quel moment tourne le « tourniquet ». Nous n'intervenons pas du tout sur ce point.

Le « tourniquet » a ses avantages : nous sommes conviés à certaines missions pour telle ou telle administration, sans vraiment savoir pourquoi c'est notre tour.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Il semble qu'il y ait un droit de suite, lorsqu'un cabinet a démarré une intervention auprès d'une administration et que la mission se prolonge. On peut le comprendre. Néanmoins, lors de la crise sanitaire, il semble qu'un cabinet ait bénéficié de 11 missions successives. N'est-ce pas excessif ?

Debut de section - Permalien
Jean-Christophe Gard, directeur associé du Boston Consulting Group (BCG)

Sans doute. Ce n'était pas le cas du BCG.

Par ailleurs, il peut arriver que nous ne soyons pas en capacité de répondre à une demande car nous n'avons pas les compétences requises ou la ressource disponible. Nous pouvons alors laisser passer notre tour, au bénéfice des autres attributaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Et dans le cadre de l'UGAP, comment procède-t-on à l'évaluation des prestations?

Debut de section - Permalien
Jean-Christophe Gard, directeur associé du Boston Consulting Group (BCG)

Nous ne sommes pas attributaires de l'accord-cadre de l'UGAP.

Debut de section - Permalien
Guillaume Charlin, directeur général du Boston Consulting Group (BCG)

Sur les conflits d'intérêts, les salariés qui rejoignent le BCG ont l'obligation de nous déclarer tous leurs investissements et toutes les positions officielles qui pourraient les amener à avoir des conflits d'intérêts au sein de la société.

C'est un rappel que nous faisons tous les ans, avec une obligation de déclaration pour nos employés. Nous dispose d'un registre, parfaitement informé, qui nous permet d'identifier les conflits d'intérêts et de les traiter.

Debut de section - Permalien
Claudia Montero, directrice générale d'Eurogroup Consulting

Nous considérons que le « tourniquet » est in fine relativement efficace par rapport à ce que l'on peut observer dans d'autres accords-cadres, qui fonctionnent sur la base de marchés subséquents. Quand l'administration a une demande dans un temps contraint, cette règle constitue un moyen simple de distribuer équitablement les projets, sous réserve bien sûr que le cabinet sollicité dispose de la compétence attendue.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Et si le cabinet ne dispose pas de la compétence ? Le recours à la sous-traitance est-il fréquent ?

Debut de section - Permalien
Claudia Montero, directrice générale d'Eurogroup Consulting

Nous sommes titulaires, parfois cotraitants, d'accords-cadres et faisons alors appel à des sous-traitants.

Lorsqu'arrive le tour d'Eurogroup dans le « tourniquet », la prestation peut être exécutée par notre cabinet, par un de ses partenaires cotraitants ou sous-traitants, en fonction des compétences.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Quel est le pourcentage de recours à la sous-traitance ?

Debut de section - Permalien
Claudia Montero, directrice générale d'Eurogroup Consulting

Nous allons vérifier et nous vous donnerons la réponse par écrit.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Cette demande s'applique aux trois cabinets. Cela nous intéresse de connaître la proportion de recours à la sous-traitance, notamment dans l'accord-cadre de la DITP.

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Sur la question des conflits d'intérêts, comme je le précisais, nous avons un comité d'éthique qui peut être saisi par chaque consultant ou qui peut se saisir lui-même. Il est souverain et sa décision s'applique à l'intérieur du cabinet.

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Il y a un suivi des requêtes.

Debut de section - Permalien
Laurent Benarousse, associé chez Roland Berger

En réponse à votre question, Roland Berger n'interagit pas avec la HATVP. En revanche, lorsqu'il nous est arrivé de recruter quelqu'un qui devait demander un avis à la Haute Autorité, nous avons vérifié que cette demande avaient bien été faite et que la HATVP avait rendu un avis favorable.

Concernant le « tourniquet », aucun système n'est parfait. Mais le système est pensé de manière rationnelle, au sens où il permet un bon équilibre entre le recours assez rapide aux cabinets de conseil par leur préréférencement, et un équilibre en chiffre d'affaires entre les différents prestataires.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Disposez-vous d'indications transparentes sur le fonctionnement du « tourniquet » ? Il a été indiqué que ce dispositif n'était pas évident à suivre...

Debut de section - Permalien
Laurent Benarousse, associé chez Roland Berger

Personnellement, je ne l'ai pas.

Je crois que le « tourniquet » est organisé à la fois au niveau de la DITP et des ministères. Il y a bien un seul véhicule contractuel, mais qui peut être mobilisé soit par la DITP sur son propre budget, soit par chacun des ministères.

Mon appréciation est que le système fonctionne assez bien. Est-ce qu'il a été dévoyé ? Je ne saurais le dire.

Pour répondre à la question connexe de la sous-traitance, lorsque le « tourniquet » tombe sur nous, nous ne transférons jamais le travail à un sous-traitant. Quand nous travaillons avec des sous-traitants, ce sont des sous-traitants qui contribuent de manière spécifique à une expertise aux côtés de Roland Berger ou de son cotraitant, qui est Wavestone dans le cadre du marché DITP.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

La plupart de vos prestations semblent relever de l'accord-cadre de la DITP. Est-ce bien le cas ? Recevez-vous des commandes directes de la part des ministères ou des grandes administrations ?

Debut de section - Permalien
Jean-Christophe Gard, directeur associé du Boston Consulting Group (BCG)

C'est tout à fait ça pour nous.

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Ce n'est pas le cas d'Eurogroup : nous avons aussi des contrats avec l'UGAP et le ministère des Armées. Les appels à projets s'y organisent différemment.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Nous savons que les contrats avec le ministère des Armées sont à part, pour des raisons que chacun comprendra. En dehors de ce contrat, et de votre contrat avec l'UGAP, recevez-vous des commandes directes de la part d'autres administrations ?

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Non.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Eurogroup est-il intervenu dans la réorganisation des services de la présidence de la République en 2018 ?

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Oui.

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Non. Un premier appel d'offres a été conduit par la présidence de la République...

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Par « directement », nous entendons « sans passer par l'accord-cadre de la DITP ».

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Pour ce marché, nous ne sommes pas passés par l'accord-cadre. Nous avons d'abord remporté un appel d'offres porté par le secrétariat général de l'Élysée. La suite de cette prestation a été effectuée à travers l'accord-cadre de l'UGAP.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Pourriez-vous préciser les missions liées à cette prestation ?

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Nous sommes d'abord intervenus entre mars et juillet 2018, dans le cadre d'une commande directe, pour un plan de transformation sur la base d'un audit réalisé par les services de l'Élysée. Le montant de cette première commande s'élevait à 46 000 euros.

La deuxième mission a commencé en septembre 2018, via un marché porté par l'UGAP. Elle a consisté à accompagner la transformation de l'Élysée sur plus d'un an. Le montant de la commande s'élevait à 1,2 million d'euros. La Cour des comptes, dans le cadre du contrôle annuel des comptes et de la gestion des services de la présidence de la République pour l'année 2019, a souligné l'efficacité de notre intervention.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Cette réorganisation était-elle liée aux problèmes de sécurité mis en évidence par l'affaire « Benalla » ?

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Absolument pas. L'organisation antérieure, constituée de seize services, « se caractérisait par un fort particularisme dans le fonctionnement de chaque service et par des modes opératoires [...] insuffisamment formalisés », relevait la Cour des comptes. Nous avons aidé l'Élysée à créer une direction générale des services (DGS), à s'organiser en quatre directions et à optimiser un certain nombre de travaux. La Cour des comptes a souligné que notre intervention avait réduit les heures supplémentaires de 20 %.

Nous sommes donc intervenus dans le cadre d'une volonté de l'Élysée de réorganiser ses services support. La sécurité ne faisait pas partie de nos missions : cela n'entre pas dans nos compétences, et nous n'avons pas été sollicités sur cette problématique.

Debut de section - Permalien
Laurent Benarousse, associé chez Roland Berger

Roland Berger n'est pas attributaire de l'accord-cadre de l'UGAP. En revanche, nous sommes attributaires des lots n° 1 et n° 3 de l'accord-cadre de la DITP et du lot n° 5 de l'accord-cadre de restructuration mis en place en 2020 par le ministère de l'économie et des finances.

L'écrasante majorité de nos prestations s'effectue dans le cadre du contrat de la DITP, même si nous continuons à répondre à des demandes de consultations directes pour la Caisse des dépôts et consignations, Bpifrance ou pour entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Roland Berger est intervenu pour la commission sur les 1 000 premiers jours de l'enfant, lancée en septembre 2019, pour un montant d'environ 425 000 euros. Pouvez-vous nous décrire cette prestation ?

Quelles mesures avez-vous recommandées en faveur de l'industrie, dans le cadre du plan de relance ? Avez-vous suggéré d'alléger la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises ou les impôts fonciers ?

Debut de section - Permalien
Laurent Benarousse, associé chez Roland Berger

Nous sommes intervenus en 2019 sur les 1 000 premiers jours de l'enfant. L'objectif était d'organiser au mieux pour le nouveau-né, mais aussi pour la maman, l'accès aux services publics. Ce travail a été mené en collaboration avec les services de l'État, à travers des ateliers, des entretiens avec les jeunes mamans pour comprendre leurs besoins, ainsi que ceux des jeunes papas. Il a donné lieu à un réalignement des services de l'État en fonction de ces besoins. Cela fait partie des projets dont nous sommes fiers, car il a donné un accès plus aisé à ces services.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

C'est justement ce type de prestations qui nous interpelle : n'y a-t-il personne, au sein de notre administration, qui soit capable de mener des missions comme celle-ci ?

Debut de section - Permalien
Laurent Benarousse, associé chez Roland Berger

Il est difficile pour moi d'y répondre, sinon en tant qu'observateur de cet environnement. Permettez-moi au préalable de ne pas minimiser les méthodologies que nous apportons. Elles ont une vraie valeur ajoutée.

Debut de section - Permalien
Laurent Benarousse, associé chez Roland Berger

Je comprends, mais je souhaite insister sur ce qu'est la valeur ajoutée d'un cabinet comme le nôtre dans le cadre de ce travail.

Notre intervention a consisté, en un temps relativement court - comme d'habitude : c'est le propre de notre métier - à comprendre, à faire accoucher, sans mauvais jeu de mots, les parents de leurs besoins ; à comprendre les contraintes spécifiques aux dispositifs existants et à essayer, aussi rapidement que possible, de proposer des solutions tenant compte de cette attente et de ces contraintes. C'est une expertise que de savoir écouter, prendre le temps, concilier, convaincre les agents de l'État de changer. C'est ce que nous avons mis en place dans ce projet.

Y a-t-il des compétences équivalentes dans l'administration ? Certainement, ne serait-ce que parce qu'il y a d'anciens consultants dans ses rangs... Y en a-t-il suffisamment ? Je ne saurais le dire. Y avait-il des compétences disponibles, à ce moment-là, pour mener ces travaux ? J'imagine que non, mais je ne peux pas vous le certifier.

Quant au plan de relance, nous ne sommes pas entrés dans ce niveau de détail. De mémoire, nous avons délivré 25 jours de prestation. La mission a consisté à identifier pour chacune des industries concernées - l'aéronautique, l'automobile, les industries chimiques et parachimiques - ce qui pourrait être fait pour les aider à combler leurs vulnérabilités. Nous restions à un niveau principiel, aux grandes idées. Nous ne sommes pas entrés dans le niveau de détail que vous évoquez, ni dans les questions de fiscalité.

La prestation a été réalisée bénévolement par nos équipes, et elle a donné lieu à un contrat en bonne et due forme avec la DGE.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Le BCG peut-il nous présenter l'étude sur la réindustrialisation de la France qui lui aurait été confiée par Bercy en 2021 ? Le sujet m'intéresse particulièrement, et je ne crois pas être la seule. Pouvez-vous préciser son coût et son état d'avancement ?

Ma deuxième question porte sur la contre-étude sur l'action environnementale du Gouvernement, réalisée en février 2021 et commandée par ce dernier pour justifier son action. Comment avez-vous assuré l'indépendance de cette prestation ?

Enfin, le BCG compte-t-il des énarques dans ses effectifs ?

Debut de section - Permalien
Jean-Christophe Gard, directeur associé du Boston Consulting Group (BCG)

À l'heure actuelle, nous n'avons aucun énarque parmi nos employés, même si nous avons pu en avoir à certains moments.

Debut de section - Permalien
Jean-Christophe Gard, directeur associé du Boston Consulting Group (BCG)

L'un de mes collaborateurs, qui travaillait dans le secteur de l'assurance, était énarque. Il nous a quittés voici trois ou quatre ans. C'est donc une présence très marginale.

L'étude sur la réindustrialisation de la France, qui a fait l'objet de plusieurs articles de presse, est une fake news. Nous n'avons jamais réalisé cette prestation. Je vous remercie de me donner l'occasion de clarifier cette question.

Le BCG a, en revanche, été sollicité par le ministère de la transition écologique pour déterminer si l'ensemble des mesures prises positionnaient la France sur sa trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES). En cinq ou six semaines, nous avons construit un modèle pour analyser ces mesures. Il s'agissait également d'en apprécier la faisabilité concrète.

Nous sommes intervenus car nous disposons d'une forte expertise dans ces domaines : nous considérons que les transformations environnementales sont de même amplitude que les transformations technologiques et digitales, qui touchent notre monde en profondeur. Nous investissons beaucoup en savoir-faire, en expertise, en compétences, en données, ce qui nous positionne de manière très pertinente sur ces sujets. C'est la raison pour laquelle, je le crois, nous avons été sollicités.

Cette étude a-t-elle été conduite sous la dictée ? La marque de fabrique du BCG, comme, je le suppose, celle de mes confrères, est une très grande indépendance intellectuelle vis-à-vis de nos donneurs d'ordre. C'est notre grande fierté - peut-être jusqu'à l'arrogance parfois... Nous disons ce que nous pensons. Si ce n'est pas ce que le client a envie d'entendre, nous le disons aussi habilement et poliment que possible, mais nous le disons.

Si nous avons conclu que la France, avec le corpus d'initiatives prises par le Gouvernement, est en mesure de respecter sa trajectoire de réduction de GES, c'est que nous en étions convaincus. Sinon, nous ne l'aurions pas dit.

Notre réputation et l'intégrité de nos recommandations sont les raisons pour lesquelles nos clients nous sollicitent. Ce contrat n'a pas été rédigé sous la dictée, et les faits remontés reposent sur des analyses aussi factuelles et scientifiques que possible, compte tenu de l'état de l'art.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Je me tourne vers Eurogroup : comment les clients de l'UGAP évaluent-ils votre intervention ?

La deuxième question porte sur vos interventions auprès du ministère des Armées. Quelles sont les principales missions qui vous sont confiées, sans bien sûr trahir le secret de la défense nationale ?

Debut de section - Permalien
Claudia Montero, directrice générale d'Eurogroup Consulting

Eurogroup est titulaire de deux accords-cadres avec l'UGAP, sur le conseil en stratégie - en tant que co-traitants, et avec des sous-traitants - et le conseil en organisation.

Le fonctionnement du marché UGAP a la particularité de donner la possibilité, dès le début, d'entrer directement en discussion avec le client final, pour instruire son besoin et co-construire la proposition d'accompagnement avec lui. Dans ce processus de structuration de l'intervention, les choses peuvent s'arrêter à tout moment si le client n'est pas satisfait.

Une fois le processus arrivé à son terme et la proposition acceptée par le client, la mission se déroule. À la fin de chaque intervention, un questionnaire d'évaluation est envoyé par l'UGAP au client, sous forme numérique. Nous recevons les résultats de cette évaluation.

Pour chaque intervention, nous mettons en place, avec nos clients, des « moments-clés » au cours desquels nous vérifions ensemble la conformité de la production, en termes de délais comme de contenu.

Dès qu'une étape de production est franchie, dès qu'un « livrable » est remis au bénéficiaire, celui-ci le valide. Il peut aussi demander qu'il soit complété, voire le rejeter. La facturation repose sur la validation stricte de ces prestations. En validant le livrable, le client signe un PV de réception, ce qui donne lieu à la facturation.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Ces deux éléments d'évaluation et de validation des livrables sont-ils prévus par la procédure de l'UGAP, ou est-ce une plus-value de votre cabinet ?

Debut de section - Permalien
Claudia Montero, directrice générale d'Eurogroup Consulting

La réception de service est toujours présente dans nos contrats avec le secteur public, de manière plus ou moins formalisée. Dans le cas de l'UGAP, il y a un véritable process. C'est une relation tripartite : nous avons un client, l'UGAP, et un bénéficiaire final. Le questionnaire d'évaluation est spécifique à l'UGAP ; nous avons proposé qu'il soit numérisé, alors qu'il était auparavant en format papier.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Favreau

D'après vos propos, les entités publiques ou parapubliques représentent 30 à 40 % de votre activité. L'UGAP est un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). Cette centrale d'achat relève-t-elle du droit public ou du droit privé ?

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Le chiffre de 30 à 40 % couvre l'administration mais aussi les collectivités territoriales, les établissements publics et l'ensemble des entreprises dont l'État est actionnaire, comme Engie, EDF, la RATP ou la SNCF.

Debut de section - Permalien
Claudia Montero, directrice générale d'Eurogroup Consulting

L'appel d'offres de l'UGAP est public, et relève du code de la commande publique.

Le métier d'origine de l'UGAP est l'achat, au contraire des collectivités territoriales ou d'autres groupements publics. Dans cette relation, nous avons face à nous des acheteurs, en même temps que des personnes en contact quotidien avec le secteur public. C'est un marché dont la procédure est spécifique, mais qui relève bien du public.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Favreau

L'UGAP réalise 5 milliards d'euros d'achats par an. J'ignorais, avant cette audition, que son champ couvrait également les prestations intellectuelles...

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

La part du conseil dans les achats de l'UGAP est infinitésimale.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Notre commission d'enquête a également auditionné l'UGAP.

Debut de section - Permalien
Gilles Bonnenfant, président d'Eurogroup Consulting

Concernant nos prestations pour le ministère des Armées, nous travaillons notamment sur la transformation numérique, pour dégager des capacités de production pharmaceutiques à travers une démarche de lean management. Nous avons aussi travaillé en appui à la mise en place de l'Observatoire de la santé des militaires. Nous travaillons actuellement sur un projet pour améliorer le taux de disponibilité de certains aéronefs du ministère. Nous commençons à obtenir des résultats concrets.

Sur d'autres sujets, je ne pourrai répondre que dans le respect des règles de confidentialité imposées par le ministère des Armées.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Bazin

Je vous remercie, Madame et Messieurs, d'avoir éclairé la commission sur vos activités.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 19 h 30.