Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation

Réunion du 25 juin 2014 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission procède tout d'abord à l'examen du rapport pour avis de M. François Patriat, sur le projet de loi n° 1468 (AN - XIVe législature) portant réforme ferroviaire.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Le système ferroviaire français, dans sa configuration actuelle, résulte de la loi de 1997 qui a créé Réseau ferré de France (RFF). Il s'agissait alors de séparer le transporteur et le gestionnaire d'infrastructure, conformément aux premières règles européennes en la matière.

Seulement, nous ne sommes pas allés au bout de la logique. En effet, si RFF est propriétaire et gestionnaire de l'infrastructure, il se doit se tourner vers une filiale de la SNCF - SNCF-Infra - pour réaliser les travaux. SNCF-Infra, qui comprend environ 40 000 cheminots, est ainsi qualifiée de gestionnaire d'infrastructure délégué. Cette solution avait été retenue en 1997 afin de préserver la paix sociale au sein de l'entreprise SNCF.

Le gestionnaire d'infrastructure et le gestionnaire d'infrastructure délégué sont donc dans une situation de collaboration forcée, formalisée par de nombreuses conventions, au contenu procédural et tatillon.

En 1997, RFF a repris 20,5 milliards d'euros de dette à la SNCF. Ainsi, l'opérateur historique retrouvait des marges de manoeuvre financières pour son développement. En outre, l'État ne reprenant pas cette dette, il était plus aisé d'atteindre les critères de Maastricht en vue du passage à l'euro. RFF est en effet considéré comme une entreprise commerciale puisque son actif - le réseau - lui procure des recettes qui permettent de couvrir son passif. RFF n'est donc pas consolidé dans les comptes des administrations publiques. C'est, en quelque sorte, une structure de cantonnement d'une dette quasi-publique.

Enfin, RFF pilote la gestion et l'attribution des « sillons », c'est-à-dire des créneaux de circulation sur le réseau, mais c'est une direction autonome de la SNCF, appelée la direction de la circulation ferroviaire (DCF), qui en assure la gestion opérationnelle au quotidien.

Pour résumer, RFF, bien que propriétaire et gestionnaire de l'infrastructure, est obligé de s'en remettre à deux filiales du transporteur historique - SNCF-Infra et la DCF - pour mener à bien ses missions.

Aujourd'hui, ce système fonctionne mal. S'agissant de la gestion des sillons, la France a été condamnée l'année dernière par la Cour de justice de l'Union européenne. Il faut donc que la DCF quitte le giron de la SNCF pour être pleinement intégrée à RFF.

S'agissant de la maintenance, une enquête de la Cour des comptes demandée en 2012 par Marie-Hélène Des Esgaulx, rapporteur spécial pour les transports terrestres, avait tracé un constat accablant.

RFF et SNCF-Infra sont des partenaires contraints avec des objectifs contradictoires. Guillaume Pépy, président de SNCF, et Jacques Rapoport, président de RFF, disent eux-mêmes que les deux entreprises ont l'habitude de se « faire la guerre ». En conséquence, elles ont conclu différentes conventions dont le suivi est assuré par plus de 200 personnes de part et d'autre. Les systèmes d'information ne sont pas non plus compatibles.

Plus grave, les coûts d'entretien du réseau sont insuffisamment maîtrisés. Les arbitrages entre sillons et travaux sont mal assurés. En effet, le gestionnaire doit arbitrer entre réaliser des travaux et perdre des recettes de péages. Il s'agit d'un réglage fin, que les deux entreprises, faute d'une bonne communication, ne réalisent pas au mieux.

Le diagnostic est largement partagé. Il avait fait l'objet d'un consensus lors des Assises du ferroviaire, organisées par le Gouvernement à la fin 2011.

Le remède est lui aussi consensuel : il s'agit de réunir au sein d'un même établissement public RFF, SNCF-Infra et la DCF. C'est ainsi que le projet de loi crée un nouvel établissement public industriel et commercial appelé SNCF Réseau. Ce dernier sera donc le propriétaire et le gestionnaire à part entière de l'ensemble du réseau ferré national.

Un autre établissement public industriel et commercial est également créé. Il poursuit les activités de l'opérateur historique en matière de transports de voyageurs et de marchandises. Il s'appellera SNCF Mobilités.

SNCF Mobilités et SNCF Réseau sont deux filiales parfaitement étanches l'une de l'autre, pour des raisons d'euro-compatibilité. Elles sont coiffées par un établissement public industriel et commercial (EPIC) appelé SNCF.

La tête aura vocation à assurer des fonctions transversales à l'ensemble du groupe (sûreté ferroviaire, informatique, définition de la politique de ressources humaines, etc.).

Ainsi, le projet de loi procède à la réunification de l'infrastructure mais aussi à la création d'un groupe public ferroviaire. C'est un point important d'un point de vue financier.

La dette ferroviaire atteint environ 44 milliards d'euros, à raison de 7 milliards d'euros pour la SNCF et de 37 milliards d'euros pour le gestionnaire du réseau. La dette de la SNCF apparaît sous contrôle et ne pose de problème particulier.

En revanche, la dette de RFF est plus préoccupante. En l'état actuel, l'établissement est confronté à un déficit annuel de 1,5 milliard d'euros au titre de la maintenance du réseau existant. En outre, il doit également lever environ 1,5 milliard d'euros pour financer le développement de quatre nouvelles lignes à grande vitesse (LGV), qui seront mises en service à compter de 2017.

Ainsi, en l'absence de réforme, on estime que la dette de RFF pourrait atteindre 70 milliards d'euros d'ici dix ans. Il est donc urgent d'agir et de rétablir les comptes du gestionnaire.

L'équilibre financier de la réforme est le suivant. D'abord, la constitution de SNCF Réseau doit permettre de dégager de substantiels gains de productivité et de mutualisation, estimés à environ 900 millions par an d'ici dix ans.

Ensuite, SNCF Mobilités est engagé dans un plan de performances qui doit permettre de dégager 500 millions d'euros en 2020. Une partie de cette somme serait transférée de SNCF Mobilités vers SNCF Réseau via l'EPIC de tête. Autrement dit, une partie des bénéfices de Mobilités permet de rééquilibrer les comptes du gestionnaire du réseau, d'où l'importance de constituer un groupe unique. Parallèlement, l'État ne percevrait plus de dividendes de la part de SNCF Mobilités.

Enfin, l'État a accepté que le groupe ferroviaire se constitue en groupe fiscal. Ainsi, les déficits de SNCF Réseau pourront être compensés par les bénéfices de SNCF Mobilités, ce qui réduit l'impôt sur les sociétés dû par le groupe.

Au total, l'effort de l'État, au titre de l'abandon du dividende et de l'impôt sur les sociétés, représente un gain de 500 millions d'euros pour SNCF Réseau.

L'objectif poursuivi par la réforme consiste donc à stabiliser la dette de SNCF Réseau à horizon dix ans. Je note cependant que mes interlocuteurs sont restés très prudents sur la cible visée d'ici 2025. Certains ont évoqué une stabilisation à hauteur de 60 milliards d'euros à cette date.

Le projet de loi comprend des garde-fous pour éviter que SNCF Réseau ne dérive de la trajectoire financière fixée par l'État.

Ainsi, l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF) a pour mission d'émettre un avis sur le projet de budget annuel de SNCF Réseau et de l'inciter à le corriger s'il s'écarte de la trajectoire retenue.

Le second garde-fou, c'est la « règle d'or » ou règle prudentielle pour le financement des investissements de développement, c'est-à-dire l'ouverture de nouvelles lignes.

Aujourd'hui, l'article 4 des statuts de RFF prévoit que, pour la création d'une nouvelle ligne, il ne peut s'endetter qu'à hauteur des recettes prévisionnelles. Dans le cas contraire, les autorités publiques doivent apporter le complément de financement.

En pratique, le retour sur investissement de plusieurs lignes mises en chantier récemment risque de se révéler plus faible que prévu. Autrement dit, RFF va devoir supporter une part du financement plus importante. Le renforcement de la règle d'or part donc du constat que les opérations de développement ont lourdement pesé sur les comptes de RFF.

Le projet de loi propose de réécrire la règle d'or. Ainsi, la capacité de SNCF Réseau de financer des investissements serait évaluée en fonction de différents ratios, notamment le poids de la dette par rapport à sa marge opérationnelle. Si SNCF Réseau apparaît déjà comme étant trop endetté, il ne pourra pas investir dans un projet de développement.

Dans le cas contraire, il pourra investir mais, tout comme aujourd'hui, seulement à hauteur des recettes attendues. Le respect de la règle d'or est lui-même surveillé par l'ARAF.

Cette trajectoire financière est-elle tenable ?

Aux dires de la SNCF et de RFF, l'État ne va pas assez loin et les comptes ne seront pas équilibrés à horizon dix ans. Il est vrai que des contraintes fortes pèsent sur le secteur.

D'abord, les recettes de SNCF Réseau risquent de ne pas être dynamiques. La crise économique a conduit à une baisse du trafic voyageurs et de marchandises. Les hausses des péages d'infrastructure, fortes ces quatre dernières années, seront limitées au moins jusqu'en 2018. SNCF Réseau ne pourra donc pas augmenter ses recettes par un effet-prix.

Ensuite, les subventions publiques seront, au mieux, maintenues mais il y a peu de chance pour qu'elles augmentent.

Enfin, SNCF Réseau reste exposé, comme l'État, au risque que les taux d'intérêt remontent dans les mois qui viennent.

Les efforts sur la dépense devront donc être très importants. L'idée de la reprise d'une partie de la dette de SNCF Réseau par l'État est régulièrement avancée pour l'aider à retrouver plus rapidement une trajectoire financière équilibrée.

Cette idée s'appuie notamment sur le fait que l'INSEE, le mois dernier, a requalifié un tiers de la dette de RFF, soit environ 10 milliards d'euros, en dette publique. Il s'agit donc de la fin d'un tabou et peut-être aussi d'une forme d'hypocrisie.

Néanmoins, il faut souligner que l'INSEE a reconnu qu'un actif - le réseau - était inscrit face à cette dette. En conséquence, le stock de dette publique nette - celui qui est pris en compte pour le calcul des ratios « maastrichiens » - n'est pas modifié.

À l'inverse, si l'État venait à reprendre cette dette, il n'y aurait plus d'actif inscrit en contrepartie et la dette nette augmenterait à due concurrence. La reprise de dette me semble être fausse bonne idée pour l'instant.

D'abord, RFF reste un emprunteur crédible sur les marchés. Une analyse de Standard & Poor's montre que les investisseurs considèrent qu'il s'agit d'une dette de l'État français. La dette est donc peu risquée et la différence de taux d'intérêt entre RFF et l'État est minime. En pratique, il n'y a pas d'urgence à libérer RFF de ce fardeau.

Surtout, on pourrait s'interroger sur le caractère vertueux d'une reprise de dette par l'État. Aujourd'hui, le poids de la dette est un puissant moteur pour que RFF, puis SNCF Réseau, se transforme et se modernise. C'est aussi un aiguillon qui pousse à choisir avec parcimonie les projets de développement.

Enlever un tiers de la dette ne contribue pas à nous interroger collectivement sur les bons choix à opérer pour notre réseau ferré national. En particulier, tous les rapports d'expertise soulignent que le réseau est trop grand et qu'il doit être réduit pour que nous réussissions à le maintenir dans un état de performance acceptable. L'année dernière, le rapport de la Commission Mobilité 21 a souligné que nous devions faire des choix, établir des priorités entre la construction de nouvelles infrastructures et maintenir le réseau en l'état. La reprise de la dette ne doit pas occulter ces questions fondamentales.

Ceci étant dit, il y a également un consensus pour dire qu'une partie de la dette de SNCF Réseau ne sera pas amortissable par le système ferroviaire. À terme, l'État sera donc probablement contraint d'en reprendre une partie.

L'article 2 ter du projet de loi, voté à l'initiative du rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale, demande au Gouvernement de rendre un rapport, d'ici deux ans, afin d'étudier les possibilités permettant de « traiter l'évolution de la dette historique du système ferroviaire ». Faudra-t-il faire une caisse d'amortissement de la dette ferroviaire (CADEF) ? La question sera posée.

Cela me semble un bon compromis. Pour l'instant, la reprise de dette ne me paraît pas urgente, moins urgente en tout cas qu'une réflexion collective sur le devenir de notre réseau.

Sous le bénéfice de ces observations et des amendements que je vous proposerai, je suis d'avis que la commission des finances propose au Sénat d'adopter le projet de loi portant réforme ferroviaire et, plus particulièrement, les articles 1er, 2, 2 ter, 4 et 5 qui comportent des dispositions qui intéressent plus directement l'équilibre financier de la réforme.

Ce texte de loi a quatre points essentiels. Celui de maintenir l'unité de la SNCF ; celui de garantir le statut des personnels ; celui de permettre de faire des économies et de réduire la dette ; celui de permettre l'ouverture à la concurrence que demande l'Europe d'ici 2019.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Permettez-moi de saluer votre position courageuse en ce qui concerne le refus de l'hypothèse de la reprise par l'Etat de la dette, ou d'une quote-part de celle-ci. Cette position va dans le sens des responsabilités qu'une commission des finances doit exercer.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Notre rapporteur est fondé à proposer l'adoption de ce texte, qui a la vertu d'éclaircir la situation, de laisser ouverte la perspective de la concurrence sur les réseaux et de clarifier les choses en ce qui concerne la dette.

Ma question porte sur la nouvelle règle d'or et son lien avec les préconisations du rapport Duron. La règle d'or, qui était auparavant un peu sommaire dans sa mise en oeuvre, tiendrait désormais compte de différents ratios. La nouvelle règle d'or implique-t-elle un examen des projets au cas par cas ? En d'autres termes, s'agit-il d'une logique - osons le mot - libérale, qui impliquerait que chaque ligne ferroviaire soit financée par ses propres recettes, de manière autosuffisante ? Dès lors, les préoccupations d'aménagement du territoire et de solidarité peuvent paraître quelque peu mises à l'écart par la formulation de cette nouvelle règle d'or. Les préconisations du rapport Duron aboutiraient alors à une hiérarchisation entre les projets rentables, lesquels seraient mis en oeuvre tout de suite, et les projets qui le sont moins, lesquels seraient repoussés ad vitam eternam...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Permettez-moi de faire une réserve sémantique sur l'utilisation de l'expression « règle d'or ». Cette expression recouvre d'ordinaire l'idée selon laquelle l'emprunt doit être réservé aux investissements. La « règle d'or » proposée ici est plus complexe, car adaptée au contexte du système ferroviaire public - même s'il fallait bien trouver une appellation simple et pédagogique. Pourriez-vous nous rappeler ce que cette règle d'or contient en l'espèce ? Qu'en est-il de l'aménagement du territoire évoqué par le rapporteur général ? On peut toutefois rappeler qu'il existe d'autres outils d'aménagement du territoire, comme par exemple le fait de ne pas appliquer de manière homogène les écotaxes...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Absolument. Et de fait, tous les territoires ne sont pas traversés par des canaux... Nous vivons bien nos contradictions.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

D'abord, une réflexion personnelle du président d'exécutif local que je suis : peut-être que si nous avions eu d'autres règles d'or plus tôt, nous aurions aujourd'hui sur nos territoires moins d'équipements dont l'efficacité n'est pas démontrée... Je pourrais vous citer maints exemples de dépenses importantes en matière d'équipements portuaires, aéroportuaires ou ferroviaires, à la charge de l'Etat et des collectivités territoriales, dont l'efficacité n'a pas été vérifiée.

Par exemple, mon prédécesseur à la tête de la région Bourgogne - auquel je n'ai pas de reproches à faire - avait engagé entre 2002 et 2004 près de 10 millions d'euros pour huit gares de transport de bois, dans les massifs du Morvan et du Châtillonnais. Aujourd'hui, ces huit gares-bois sont fermées. Si nous nous étions demandé à l'époque si ces gares-bois allaient être utilisées, aurait-on réalisé ces investissements ? Voilà pourquoi nous avons besoin d'une règle d'or intelligente, qui permette d'investir avec lucidité. Certains équipements sont parfois brillants sur le plan politique, excellents en termes de perspectives et d'espoir pour les territoires, mais leur rentabilité n'est pas prouvée. Voyez par exemple la ligne « Paris - Orléans - Clermont-Ferrand » (POCL), pour laquelle j'ai dû participer à plus de 35 réunions...

La règle d'or permettra donc de protéger les finances de SNCF Réseau, d'où un raisonnement au cas par cas sur les projets. Quant au développement de projets d'intérêt général pour le territoire, il n'est évidemment pas oublié, mais leur financement sera à la charge de l'Etat ou des collectivités, et pas de SNCF Réseau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je remercie François Patriat qui, en creux, dit assez clairement les choses sur la dette, sur le risque que cette dette ne s'amenuise pas et sur le fait que les résultats de cette réforme demeurent incertains.

Une fois de plus, on ne prend pas le taureau par les cornes, on ne met pas tout sur la table, on ne fait pas complètement la réforme des transports publics qui est pourtant un vrai sujet. Après la Bourgogne, je prendrai le cas de l'Île-de-France : la SNCF et la RATP se font concurrence sur certaines lignes, ouvrent des lignes parallèles... uniquement parce que les deux entreprises refusent de travailler ensemble ! Combien de gares avec un quai SNCF et un quai RATP ? Cela coûte des dizaines de millions d'euros et personne n'intervient pour remettre de l'ordre. Voilà qui nécessiterait une règle d'or ! On nous explique que les ingénieurs ne travaillent pas ensemble et que les entreprises ont des projets différents pour le territoire, mais ce sont les collectivités territoriales et les usagers qui paient le prix de ces divergences.

Deuxièmement, je n'ai jamais été favorable à la séparation entre la SNCF et RFF. J'ai organisé des réunions entre les deux, au titre de mes différentes fonctions : ils répètent qu'ils ne peuvent pas travailler ensemble et en oublient qu'ils travaillent d'abord pour le service des usagers. On ne peut donc pas se lamenter de la disparition de RFF.

Mais en réalité, que fait-on ? On remplace RFF par SNCF Réseau, mais cette nouvelle entité sera gérée de manière totalement autonome par rapport à SNCF Mobilités, et pour que l'ensemble puisse fonctionner, on va prendre de l'argent à SNCF Mobilités pour le donner à SNCF Réseau qui est couvert de dettes ! En clair, on nous dit très sereinement qu'il va falloir soit augmenter les tarifs des voyageurs, soit demander aux collectivités territoriales de faire les compensations nécessaires, pour que SNCF Mobilités puisse combler les dettes de SNCF Réseau. Nous sommes quand même dans un système un peu fou ! Et je ne parle pas des grèves qui viennent d'avoir lieu, car le statut des cheminots n'est pas en cause dans cette réforme.

La réalité est que l'équilibre financier du système n'est absolument pas garanti. La réforme ne change absolument rien. Elle va supprimer un monstre de technocratie, de bureaucratie et d'administration... pour en créer un autre ! Elle est présentée comme une réorganisation, mais ne fait que transférer deux entreprises à une entité qui couvre en fait deux entreprises totalement autonomes, qui ne sont ni à l'équilibre, ni réformées. Il n'y a pas de réforme, il n'y a qu'un transfert. Ce n'est pas plus simple, c'est la même chose !

En Île-de-France, nous nous battons pour une vision plus rationnelle du transport public, mais personne n'intervient sur la RATP, personne n'intervient sur la SNCF. Ces autorités considèrent qu'elles sont les seules détentrices de la capacité et de la compétence, que les hommes politiques sont par définition des incompétents et des incapables. Mais viendra un moment où l'on ne pourra plus faire l'économie d'une véritable réforme du transport public en Île-de-France. En attendant, je ne voterai pas la réforme proposée.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je remercie Roger Karoutchi pour son exposé éclairant. Il faudrait que nous puissions mieux comprendre ce que change concrètement cette nouvelle organisation, même si nous ne sommes en l'occurrence que saisis pour avis. S'agit-il d'une simple réorganisation juridique ? Ou bien d'une véritable simplification qui permettra de réduire les coûts et de clarifier le financement des investissements, comme le dit le Gouvernement ?

J'ai vu passer de nombreuses réformes depuis 1986. On nous disait que la séparation des infrastructures et de la gestion du réseau était indispensable au regard du droit communautaire et permettrait l'ouverture à la concurrence des infrastructures de transport ; il semblerait qu'il soit désormais possible de regrouper ces deux activités au sein du même établissement public.

Je me demande cependant si les deux filiales auront deux bilans et deux comptes d'exploitation séparés ? C'est un point important car une seule d'entre elle est tenue de respecter la règle d'or.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Le rapporteur peut-il nous dire s'il y a des pays comparables dont le réseau ferroviaire est bénéficiaire ? Par ailleurs, nous n'avons pas abordé la question du statut des 250 000 cheminots, sur lequel on entend des choses délirantes. Or cela a un effet sur le coût du fonctionnement.

Enfin, j'entends le rapporteur dire qu'il faudrait supprimer les lignes déficitaires. Mais ces lignes constituent un service public. Il est schizophrénique de vouloir supprimer des lignes de chemin de fer quand dans le même temps on tient des discours environnementalistes...

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

On nous dit que cette réforme devrait permettre des gains de productivité, mais je ne vois pas bien d'où ils pourraient provenir... Je note par ailleurs que l'addition de deux dettes ne permet pas à elle seule de les faire diminuer...

S'agissant de l'état du réseau de la SNCF, il est tout à fait satisfaisant en ce qui concerne le réseau principal, mais l'état du réseau secondaire m'inquiète. En quoi cette réforme permettra-t-elle d'améliorer cette situation ? Sinon, ce sont les collectivités territoriales qui devront financer...

Je partage le souci de Roger Karoutchi de mettre de l'ordre dans notre dispositif. Il faut que les diverses autorités organisatrices des transports s'entendent.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

La séparation de RFF et de la SNCF n'a pas fonctionné, en termes de service public proposé, que ce soit pour le transport de passagers ou de marchandises. Les entreprises qui voudraient recourir au fret ferroviaire ne le peuvent pas, faute d'une offre suffisante. Mais cela n'empêche pas de tenir parallèlement des discours volontaristes lors des Grenelles...

Je suis sceptique quant aux gains de productivité que permettrait le projet qui nous est présenté. Pour en réaliser, il faudrait investir dans les infrastructures et sur le matériel roulant. Sinon, les seuls gains de productivité porteront sur la réduction des personnels... qui a ses limites, si on ne veut pas dégrader le service rendu.

On nous avait dit qu'on ferait payer les sillons à un niveau qui permettrait d'équilibrer le budget. Mais ce n'est pas le cas ! Et leur niveau est pourtant très élevé... D'ailleurs, on voit bien en matière de transports urbains qu'il faut toujours une intervention publique pour équilibrer les budgets. Et l'on observe que l'Allemagne et le Royaume-Uni ont dû réinjecter de l'argent public dans leur système ferroviaire. Il faut des outils de financement.

Ce projet de loi ne répond pas à la nécessité de rendre le système plus efficace. On risque d'augmenter encore la dette de la SNCF. Quant à l'ouverture à la concurrence, on a bien vu qu'elle ne fonctionnait pas concernant le transport de marchandises, en se portant exclusivement sur les créneaux les plus rentables.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Je n'étais pas convaincu à l'époque que la séparation des deux entités permette des économies, pas plus que je ne suis persuadé que leur réunification aujourd'hui puisse permettre d'améliorer le système.

Néanmoins, les mouvements sociaux de ces derniers jours ont perturbé la vie de millions de Français et m'ont convaincu qu'il fallait aller dans le sens de cette réforme, car je crois qu'ils étaient alimentés par la crainte de gains de productivité. Mais à combien s'élèveront ces gains de productivité ? Il me semble qu'ils ne sont pas vraiment documentés.

Et comment fonctionnera précisément cette règle d'or ? Il sera possible de s'endetter pour construire de nouvelles lignes à hauteur des recettes prévisionnelles : mais sur quelle durée ? Et ce critère ne me semble pas suffisant : les infrastructures de transport peuvent être créatrices de richesse. Je pense par exemple au Grand Paris Express, pour lequel j'avais d'ailleurs proposé un financement à partir de la valorisation du territoire que ces investissements permettent.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

François Patriat nous a tenu un discours de vérité et, par les amendements qu'il propose, fait ce qu'il peut dans le cadre du dispositif. Je souhaiterais toutefois revenir un peu en arrière. Des choix ont été faits en faveur du TGV. C'était aussi un moyen de soutenir la filière ferroviaire, notamment Alstom dont nous avons beaucoup parlé ce week-end. Mais nous ne l'avons guère vendu qu'au Maroc... et financé par des subventions publiques françaises. Nous sommes concurrencés par d'autres pays qui offrent la même qualité, mais qui sont moins onéreux et qui sont capables de s'inscrire dans une concurrence mondiale - je pense à la Corée, à l'Espagne, et bien sûr à l'Allemagne. Or notre soutien au TGV s'est fait au détriment de l'entretien des infrastructures en Île-de-France, qui ont pour beaucoup plus de 40 ans et ne sont plus au rendez-vous aujourd'hui, d'où d'énormes problèmes causés par de petites pannes. Les gens qui viennent travailler en RER n'en peuvent plus. Ils ont très mal vécu le mouvement de ces derniers jours.

De même, il y a un véritable problème avec Roissy : après 6 heures du matin, il faut deux heures pour arriver à Paris ! Dans une capitale comme Moscou, qui compte 23 millions d'habitants, une demi-heure suffit pour rejoindre le centre-ville depuis l'aéroport. Il faut donc absolument faire quelque chose. Mais on ne trouve ni financement public, ni financement privé. Une grande entreprise française a renoncé il y a quelques années. On me dit que la RATP serait en train de préparer un projet, mais rien n'est joué. Les choix stratégiques du passé pèsent sur les choix que nous sommes obligés de faire aujourd'hui.

Concernant la concurrence que se livrent la SNCF et la RATP, je peux tout de même attester d'une réussite : Systra, une structure commune d'ingénierie, qui fait un excellent travail et mérite d'être soutenue à l'international. Malheureusement, c'est le seul exemple.

La question essentielle à mes yeux est celle de la dette. François Patriat a fait référence à la CADEF, qui serait une structure de cantonnement. La dette est en effet une question essentielle.

Le montage - une holding et deux filiales - est conçu pour passer l'étape bruxelloise : la dette de la nouvelle entité ne sera donc pas prise en compte dans la dette publique au sens de Maastricht, mais il n'empêche qu'elle est là. La question reste donc entière. Cela ne m'empêchera pas, bien sûr, de voter le texte, car il faut en finir avec cette affaire.

Je m'interroge tout de même sur le sens de cette « règle d'or ». Ce n'est pas le terme qui me gêne, mais le fait qu'on fixe une règle qui pourrait ne pas être appliquée. Il y a des représentants de l'Etat dans les conseils d'administration : quel est leur rôle, si ce n'est de choisir les projets, se prononcer pour tel choix et pas un autre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

En d'autres termes : faut-il que cela se trouve dans la loi ? En libéral indécrottable, je n'aime pas que tout soit figé dans les textes.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Si l'Etat n'est pas d'accord avec un projet, il peut le dire par la voix de ses représentants. À quoi cela sert-il d'avoir des administrateurs si c'est pour qu'ils soient - c'est le terme qu'on a souvent utilisé - transparents, si c'est pour qu'ils ne participent pas aux choix stratégiques ? C'est leur travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Quand on a l'esprit transparent, on n'y peut rien. On sera toujours transparent. Ça ne se décide pas dans les textes.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

On peut toujours faire mieux. Vous avez une vision de droite pessimiste, j'ai une vision de gauche optimiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La dette, qu'elle soit maastrichtienne ou pas, reste de la dette. Il faudra la rembourser, et c'est du risque qui ne fait que s'accumuler. Il en va pour la dette ferroviaire comme pour la dette des investissements d'avenir, dont on nous exposait hier les règles très complexes : il faudra en assurer le service. Peu importe l'habillage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

Je n'ai pas l'opinion définitive et déterminée de certains, car je suis utilisateur de la SNCF, et j'ai aussi connu, comme tout exécutif local, les demandes qui nous sont faites par les uns et les autres. Cette réforme est complexe - si les solutions étaient simples, cela se saurait depuis des années. C'est d'ailleurs pour cela qu'à l'Assemblée nationale comme au Sénat, à gauche comme à droite, les opinions des uns et des autres peuvent être différentes et parfois concordantes. Cela d'ailleurs ne me choque pas : je pense que l'un des défauts du système politique français est d'empêcher les accords transpartisans, sauf à être condamné par son propre camp... alors que dans le même temps le parti populaire européen (PPE) et les sociaux-démocrates (S&D) se mettent d'accord pour présider alternativement le Parlement européen.

La SNCF n'est pas une entreprise comme les autres. C'est une entreprise qui a une histoire, une histoire importante dans les moments difficiles de notre pays, et qui touche énormément de Français chaque jour - c'est pour cela que les conflits sociaux sont compliqués.

Voici ce que je comprends de la réforme. Alors que la dette de 44 milliards d'euros augmente de 3 milliards d'euros par an, la réforme permettrait d'économiser 1,5 milliard d'euros chaque année. De plus, les discussions à l'Assemblée nationale ont permis de dégager un socle social commun, avec notamment un comité central d'entreprise (CCE) unique, qui a convaincu, sinon l'ensemble, au moins un certain nombre de cheminots et de syndicats. Enfin, une règle d'or prévoit que ceux qui demandent de nouvelles lignes - l'Etat ou les collectivités - en assurent le financement. Je pense qu'il s'agit d'une réforme compréhensible pour les Français et d'une véritable avancée à défaut de solution complète. C'est toujours mieux que le statu quo.

Je souscris au propos de Marie-France Beaufils : comme tout service public, le transport ferroviaire ne peut fonctionner sans subvention publique. Certes, l'Allemagne n'a plus de dette ferroviaire, mais la raison est très simple : lors de la réunification, il a été décidé du rachat total des dettes des deux systèmes, celui de la République fédérale d'Allemagne et celui de la République démocratique d'Allemagne - rachat d'ailleurs en partie payé par l'Union européenne. Mis à part ce cas très particulier, le système ferroviaire ne s'autofinance dans aucun pays à ma connaissance.

Le TGV illustre le fait que la SNCF est une entreprise spéciale. Le TGV ne s'est certes pas beaucoup vendu : à l'Espagne, à l'Italie, à la Corée du Sud et au Maroc - et encore dans ce dernier cas s'agit-il d'une compensation du roi pour avoir préféré le F16 américain au Rafale français. Mais le TGV, c'est aussi un rêve français. Bien sûr, on pourrait raisonner en purs technocrates et en constater après le résultat - notamment la progression de certains partis. Le TGV ne s'est pas vendu, mais il est quand même une grande réussite technologique de l'intelligence française. On peut se moquer des records de vitesse, mais pour beaucoup dans notre pays, c'est une fierté - et je ne m'en désolidarise pas. Évidemment, nous pourrions avoir de meilleurs commerciaux, mais il reste que nos ingénieurs ont accompli quelque chose de bien. Il est légitime que les cheminots en soient fiers.

Un dernier mot sur les gares-bois évoquées par François Patriat. Il y a dans certaines régions des mots sacrés, et j'imagine qu'en disant « le bois ! » dans un hémicycle, on suscite immédiatement l'enthousiasme des écologistes, des sylviculteurs, du monde agricole, des conseillers généraux, de certains maires etc.

Ensuite, les choses s'enchaînent : nous avons le plus grand réseau forestier, mais nous n'arrivons pas à le vendre, faute de pouvoir le transporter. Comment le transporter ? Arrêtons les camions qui polluent et choisissons le rail. On ne peut que voter pour cela ! Ensuite, les syndicats accentuent leurs pressions, enthousiastes devant les perspectives de créations d'emplois. Puis l'on trouve un petit village avec une gare en dépérissement : c'est l'endroit idéal pour la gare-bois, car cela permettra de maintenir l'école. Et pour peu que le directeur de l'école vienne s'étonner que l'on transporte du bois - même si cela ne marche pas - et pas des élèves, on décide de faire passer un TER !

Bien sûr, je suis le seul à céder à ce genre de pressions, à avoir cette espèce de faiblesse devant les électeurs... Je fais cette confession. Je sais que chacun, autour de la table, a refusé de manger de ce pain-là, n'ayant pour seul souci que le solde structurel du pays. Je demande donc à tous ceux qui savent lutter de me dire comment ils ont réussi à le faire !

Plus sérieusement, il faut bien comprendre que c'est notre système lui-même qui aboutit, de fil en aiguille, à cette situation : la responsabilité est partagée.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Vous nous avez exposé votre vécu de ce système, que nous partageons... Chacun doit faire son autocritique.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Je suis convaincue que nous avons les meilleurs ingénieurs du monde.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Quand ils font du rentable, ce n'est pas plus mal ! Ils sont parfois un peu perfectionnistes.

Ainsi, je dois dire que mon père - qui était ingénieur - avait une notion de la vérité, du blanc et du noir, ce qui est vrai, ce qui est faux... Il avait certainement raison. Quant à moi, la vie m'a plutôt amené dans des zones grises...

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Ça tombe bien, pendant vingt ans on m'a appelé « le député des petits gris » !

La vraie question que pose ce texte c'est qu'il y a de la bonne et de la mauvaise dette. Or nous sommes désormais bloqués dans notre possibilité d'investir par les critères européens sur le déficit. Je pense qu'il faudrait que les investissements finançant des infrastructures soient exclus de la dette maastrichtienne. Il me semble que ce genre de mesure pourrait être acceptable... sinon on ne peut plus rien négocier ! Je souhaiterais que cette motion soit mise aux voix.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

On peut négocier quand on respecte ses engagements ; mais si l'on veut faire évoluer les règles pour pouvoir toujours s'endetter davantage... La vraie question est de savoir pourquoi on a exclu les investissements dans les infrastructures du périmètre des investissements d'avenir. Les deux co-présidents du comité de surveillance du programme d'investissements d'avenir (PIA) avaient d'ailleurs sur ce point des avis différents : Michel Rocard y était favorable, tandis qu'Alain Juppé y était opposé.

Nous ne pouvons pas faire de motion mais peut-être pourrions-nous formuler un voeu sur l'intégration du transport terrestre dans le périmètre du PIA.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Je constate que le statut des personnels n'est pas en cause, on peut donc se désoler de l'archaïsme de certains syndicats qui pendant plusieurs jours ont pénalisé les entreprises et les usagers.

Je note également que la séparation de la SNCF et de RFF a été un facteur de confusion et une erreur, puisque l'on revient dessus.

Par ailleurs, je m'inquiète des difficultés à financer la ligne à grande vitesse vers la Bretagne, qui est pourtant nécessaire. À l'issue de cette réforme, quelle sera la capacité d'investissement de la SNCF ? Enfin, pense-t-on sérieusement que la SNCF sera en capacité de rembourser sa dette, dans le contexte que nous venons de décrire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

J'ai été pendant quatre ans administratrice de RFF, je connais donc bien le sujet. RFF faisait des travaux pour justifier la non inclusion de sa dette dans le périmètre maastrichtien, en se basant sur la rentabilité de son réseau... mais la réalité financière des dernières années a montré que cela ne fonctionnait pas. La dette de RFF a augmenté comme une boule de neige, notamment car l'État n'a pas respecté le contrat d'objectifs et de moyens. Je pense en particulier au plan de régénération du réseau secondaire. Je souhaite souligner qu'aucun réseau ferroviaire ne s'autofinance... mais que cela est également vrai pour les réseaux routiers.

Par ailleurs, le conseil d'administration était préoccupé du glissement des charges de personnels, dont 10 000 avaient le statut SNCF. Au traumatisme du partage du patrimoine a succédé une tension SNCF - RFF liée à cette question du personnel mis à disposition.

Nicole Bricq faisait remarquer il y a un instant qu'il y avait des représentants de l'État dans les conseils d'administration, mais ils ne sont pas toujours d'accord entre eux... entre les budgétaires, ceux qui s'occupent des comptes de RFF, ceux qui représentent le ministère des transports... d'où la nécessité d'une règle d'or.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Il faut effectivement être lucide. Si l'on fait un état des lieux : le service du réseau ferré s'améliore-t-il en France ? Non ! Il se dégrade. Chaque jour, je prends le TGV entre Dijon et Paris. Quatre fois sur cinq, le train a entre quinze et vingt minutes de retard. Il n'est jamais à l'heure, pour des raisons d'infrastructures, de caténaires, etc.

Un rapport de l'École polytechnique fédérale de Lausanne confirme que l'état de notre réseau est dramatiquement mauvais. Sur certaines lignes, il n'est plus possible de rouler au-delà de 40 kilomètres par heure, sous peine que les trains ne versent. Nous n'avons pas le meilleur système du monde, ni le plus performant, ni le plus sécurisé. Je vous livre le sentiment de l'usager que je suis.

En tant que président de région, en donnant chaque année 150 millions d'euros à la SNCF pour faire fonctionner les TER, j'ai l'impression de ne pas en avoir pour mon argent. Quand je prends le TER et qu'il est à l'heure à Paris : « la SNCF est heureuse de vous avoir accompagné et vous souhaite une bonne journée » ; s'il est en retard : « la région Bourgogne s'excuse du retard »...

J'ai donc un peu du mal à comprendre ceux qui ne veulent pas voter cette réforme. Soit ils pensent que ça marche très bien, soit ils pensent qu'elle ne va pas assez loin. En tout cas, une chose est sûre, de mon point de vue, le statu quo ne permettra pas de meilleurs résultats.

La SNCF s'est engagée, d'ici 2020, sur un plan de performances permettant de dégager un milliard d'euros et pas seulement - je le dis à Marie-France Beaufils - sur les réfactions de personnel.

Monsieur le Président, la réforme va au-delà d'une simple clarification juridique. La mutualisation des métiers de l'infrastructure (RFF, SNCF-Infra et DCF) est un élément fort de la maîtrise des coûts et de l'équilibre du gestionnaire. Il y aura bien deux bilans et une séparation stricte entre Mobilités et Réseau. La tête a notamment pour fonction de recevoir des dividendes depuis SNCF Mobilités et de les faire redescendre vers SNCF Réseau. Cette organisation permet de garantir l'euro-compatibilité tout en visant l'équilibre financier.

On peut faire des économies à la fois par des gains de productivité mais aussi en évitant tous les dysfonctionnements qui coûtent chers aujourd'hui. L'objectif c'est la stabilisation de la dette. Sans réforme, sans économies, la dette atteindra 70 milliards d'euros dans 10 ans, continuera à croître et le système ira à vau-l'eau.

Pour répondre à Aymeri de Montesquiou, je suis désolé d'avoir gâché sa matinée... Les fonctions de gestion de réseau sont rarement bénéficiaires, comme vient de le dire Jean Germain. En Allemagne, la situation serait plus favorable car l'État a repris la dette. Quand j'en discute avec Guillaume Pépy, il me dit « donnez moi les conditions d'exploitation allemandes et, demain, je serai bénéficiaire ». Il parle aussi bien de la dette que du statut et des rémunérations.

Sur le fret, les concurrents de la SNCF peuvent atteindre des prix 45 % moins chers. Le problème un jour, se posera dans ces termes-là. Je ne dis pas qu'il faut changer le statut...

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Mais il faut avoir à l'esprit que les conditions d'exploitation doivent être modifiées.

S'agissant des gains de productivité, pour répondre à Dominique de Legge et à Vincent Delahaye, le Gouvernement a mené des contre-expertises sur les montants avancés par les deux entreprises. Néanmoins, nous ne pouvons avoir aucune certitude sur leur montant et leur échéance. Nous avons fixé un cap. Le rapport écrit sera plus précis sur ce point.

Je rappelle que la « règle d'or » ne s'applique qu'à SNCF Réseau : elle n'empêche pas que l'État ou tout autre demandeur finance le développement d'une infrastructure.

Je voudrais rassurer Marie-France Beaufils : il est bien prévu que les interventions publiques soient maintenues. D'ailleurs, l'État consent 500 millions d'euros pour l'abandon des dividendes et la moindre recette d'impôt sur les sociétés.

Il nous faut fermer des lignes TER. En Bourgogne, si nous payions un taxi pour transporter les gens entre Saulieu et Avallon, je gagnerais de l'argent ! Vous avez dit « il faut des outils de financement ». Oui, mais lesquels envisagez-vous ?

Nicole Bricq a justement rappelé que les investissements pour développement le TGV ont été réalisés au détriment de l'entretien du réseau existant. Au surplus, ils ont contribué à augmenter la dette de RFF. Pour l'instant, nous avons pour objectif de stabiliser - et pas de diminuer - cette dette. Pour l'instant, si l'INSEE considère que 10 milliards d'euros de dette portée par RFF est de la dette publique, cela n'a d'impact que sur le niveau de la dette brute et non sur celui de la dette nette.

Comme le disait Jean Germain, dans aucun pays ou presque, le gestionnaire du réseau n'atteint l'équilibre financier. C'est aussi pourquoi il n'a souvent pas la responsabilité de financer le développement, qui est laissée à l'État et aux collectivités territoriales. Pour le reste, je souscris totalement à ses propos.

Si l'on suit la proposition de Francis Delattre, à savoir ne pas inclure dans les ratios les dettes dites « productives », alors, demain, toutes les dettes seront ainsi qualifiées. Ce serait un artifice.

Quant aux analyses de Fabienne Keller, je les partage

Elle connaît bien la question également d'un point de vue régional. La région Alsace a fait un effort conséquent en finançant deux LGV en même temps. Sur la ligne Rhin-Rhône, pour 10 kilomètres en Bourgogne, nous avons participé à hauteur de 110 millions d'euros. Nous avons donc beaucoup aidé l'Alsace. Cette voie fait déjà la liaison entre les régions Bourgogne et Franche-Comté, même si elle n'a de terminaison ni vers Mulhouse, ni vers Dijon.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Ils sont tous rédactionnels ou quasi-rédactionnels. Certains procèdent à des réorganisations au sein du texte. Ils visent à la clarification des dispositions financières.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je crois que nous pouvons donner au rapporteur acte de son travail et le soutenir dans son entreprise de clarification.

Les amendements n° 1, n° 2, n° 3 et n° 4 sont adoptés.

Sur l'avis sur les articles dont nous sommes saisis, je vais consulter la commission.

Quant à la proposition de Francis Delattre, un amendement doit être présenté par écrit et fera l'objet d'un avis de la commission saisie au fond.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Je souhaite que la commission des finances se prononce.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je me retourne alors vers notre rapporteur. Il s'agit d'un amendement visant à financer les infrastructures de transport ferroviaire au titre des programmes d'investissement d'avenir. Cet amendement doit encore être rédigé, mais cela ne doit pas être trop difficile.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Il faut que cet amendement soit rédigé pour que nous puissions en débattre. Je ne vois pas très bien comment on pourrait, à la hussarde, à la va-vite, voter une motion d'une telle importance.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Vous ne souhaitez donc pas émettre d'avis à ce stade ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La procédure des commissions parlementaires, c'est de présenter des amendements écrits pour qu'ils soient soumis à la discussion et au vote. Il ne faudrait pas créer de précédent. Notre tradition est celle du droit écrit.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Faute d'un support écrit, nous ne pouvons aller plus loin.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

On va tous pleurer sur les investissements et la dégradation des infrastructures... Je regrette qu'il n'y ait pas une unanimité de notre commission pour envoyer un signal sur cette question importante. Je m'expliquerai donc lors de la séance publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je regrette que votre intention généreuse n'ait pas été suivie.

Je vais maintenant vous consulter.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des articles dont elle s'est saisie, tels que modifiés par ses amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Nous devons également donner l'autorisation au rapporteur de déposer en vue de la séance publique les amendements que la commission du développement durable, saisie au fond, n'aurait pas intégrés à son texte.

Il en est ainsi décidé.

Présidence de M. Jean-Pierre Caffet, vice-président

La commission entend ensuite une communication de M. Philippe Marini, rapporteur spécial, sur la dépense fiscale en faveur des anciens combattants.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le Président, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, je vais vous présenter les résultats du contrôle que j'ai mené cette année, en tant que rapporteur spécial, sur la dépense fiscale en faveur des anciens combattants. La dépense fiscale est un enjeu de pilotage des finances publiques. Elle augmente de manière importante et prend au fil des années une part grandissante dans cette mission que j'ai le plaisir de rapporter. C'est une évolution spontanée, car il n'y a aucune disposition législative nouvelle qui ait alourdi la dépense fiscale depuis 2002, année de l'exonération d'impôt sur le revenu de l'allocation de reconnaissance pour les harkis.

Le chiffrage de dépense fiscale, tous dispositifs confondus, s'établissait en 2008 à 420 millions d'euros, c'est-à-dire 12 % des crédits de paiement consommés de la mission. En 2013, il s'agirait de 566 millions d'euros, soit près de 19 % de ces crédits. Cela représente une hausse de près de 35 % et de 146 millions en six ans, alors que pendant la même période, les crédits de paiements consommés avaient baissé de 16 %. Cette hausse est appelée à se poursuivre et s'accentuer, la projection donnant environ 775 millions d'euros en 2018.

La dépense fiscale de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » comprend trois principaux dispositifs : premièrement, la demi-part supplémentaire pour les contribuables et leurs veufs ou veuves de plus de soixante-quinze ans titulaires de la carte du combattant, deuxièmement, l'exonération de l'impôt sur le revenu de la retraite du combattant, des pensions militaires d'invalidité et de divers autres dispositifs, et troisièmement, la déduction du revenu imposable des versements effectués en vue de la retraite mutualiste du combattant.

Je vais plus précisément axer ma présentation sur la demi-part supplémentaire qui est la dépense fiscale la plus importante, la plus dynamique. Cette dépense présentait un coût de 200 millions d'euros en 2002, de 295 millions en 2012 et l'estimation s'établit à 540 millions en 2018. Pourquoi ?

Rappelons que ce dispositif résulte de la loi de finances pour 1982. Il n'a pas changé depuis. Il est prévu qu'une demi-part supplémentaire de quotient familial est accordée aux contribuables âgés de plus de soixante-quinze ans et titulaires de la carte du combattant ou d'une pension servie en vertu des dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, ainsi qu'à leurs veuves ou veufs, sous la même condition d'âge. Pour bénéficier de la demi-part supplémentaire, il faut donc remplir deux conditions cumulatives : avoir plus de soixante-quinze ans et être titulaire de la carte du combattant ou d'une pension servie en vertu du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre.

L'avantage de quotient familial dont bénéficient les contribuables mariés ou pacsés s'applique, dans ce domaine comme dans d'autres domaines, au niveau du foyer fiscal et ne peut excéder une demi-part. Les veuves ou veufs de personnes ayant bénéficié de la demi-part supplémentaire en bénéficient à leur tour personnellement. Cet avantage est plafonné. Le plafond est de 2 997 euros en 2014. Le coût de la demi-part supplémentaire a été évalué de manière définitive à 295 millions d'euros pour l'année 2012. Ceci équivaut à une dépense moyenne de 510 euros par foyer bénéficiaire. Il y en avait 578 000 en 2012.

On peut s'expliquer l'augmentation de la charge que représente cette dépense fiscale par l'entrée progressive dans le dispositif des anciens combattants de la guerre d'Algérie. La classe d'âge qui a eu vingt ans en 1953 et a constitué ce qu'on a appelé « des rappelés », a eu soixante-quinze ans en 2008, première année où l'augmentation est constatée après des années de baisse. L'année 2010, qui a enregistré une brusque augmentation de 44 000 nouveaux bénéficiaires, pourrait correspondre à la classe de mobilisation de 1956, massivement appelée sous les drapeaux.

Selon le ministère des finances, « les générations d'anciens combattants de la guerre d'Algérie (2,8 millions d'appelés au total) ont commencé à atteindre l'âge de 75 ans. De ce fait, il peut être considéré que l'augmentation de la dépense fiscale observée en revenus 2011 sera encore observée pendant plusieurs années ».

À vrai dire, avant que nous nous y intéressions, ceci n'avait fait l'objet d'aucune anticipation, ce qui explique les écarts très importants constatés depuis 2009 entre estimation initiale et chiffrage définitif. Par exemple, l'écart observé a été de 65 millions d'euros pour deux années consécutives, en 2011 et 2012. Constatant ces écarts importants, l'administration affine sa méthodologie, mais se repose toujours sur des conventions, faute de données statistiques. Elle estime désormais qu'en 2018, le coût de la demi-part supplémentaire sera de 540 millions d'euros, soit plus du double du coût de l'exercice 2011.

Malgré le contexte budgétaire contraint, aucune réforme du régime de la dépense fiscale en faveur des anciens combattants n'est actuellement envisagée. Les marges de manoeuvre évoquées par le ministère des finances sont les suivantes : premièrement, améliorer le chiffrage de la dépense liée à la demi-part fiscale en demandant au ministère de la défense la transmission de données prospectives générationnelles sur les anciens combattants de la guerre d'Algérie, ce qui pourrait être fait via le logiciel KAPTA déjà mis en place pour la gestion des cartes et des titres ; deuxièmement, réfléchir à un recadrage des dispositifs relatifs à la rente mutualiste qui bénéficie d'exonérations à l'entrée et à la sortie, par exemple en supprimant la déductibilité des versements ou en restreignant les critères d'éligibilité.

À mon sens, ces pistes demeurent limitées. Il est vrai que le sujet est sensible. 578 000 foyers sont concernés et les dépenses fiscales participent à la juste réparation en faveur du monde combattant. Ceci étant dit, nous ne pouvons non plus nous contenter de constater les effets de l'évolution spontanée de la dépense fiscale, sans essayer de mettre au point un pilotage, sinon sans insérer ce sujet dans une réflexion plus globale sur l'évolution, le contingentement de la dépense fiscale dans son ensemble.

Peut-être est-il nécessaire d'ouvrir deux chantiers, l'un pour régler rapidement la question du chiffrage et du pilotage de la dépense fiscale. Dans ce cadre, le ministère des finances en premier lieu devrait affiner ses méthodes pour évaluer et surtout piloter la dépense fiscale. Son effort pour obtenir des données démographiques prospectives ne peut se limiter aux seuls anciens combattants de la guerre d'Algérie. Cet effort doit être poursuivi auprès de tous les titulaires de carte, afin d'anticiper les entrées dans les dispositifs et de simuler les conséquences de toutes modifications de ceux-ci. Rappelons que 61 268 cartes du combattant ont été délivrées au titre des opérations extérieures (OPEX) au 15 juillet 2013. Toutes ces personnes atteindront soixante-quinze ans un jour et bénéficieront dès lors de la demi-part. Aucun recensement ni actualisation n'est fait pour connaître cette population.

Ceci faisait déjà partie des recommandations formulées l'an dernier lors de mon contrôle sur l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC-VG). Le ministre chargé des anciens combattants avait été informé officiellement de cette recommandation, mais n'y a pas donné suite.

En second lieu, il conviendrait de mieux intégrer la dépense fiscale dans le budget de la mission et dans la documentation budgétaire. Celle-ci en constitue en effet une part croissante et n'est absolument pas prise en compte dans la présentation stratégique du projet annuel de performance ou dans la présentation des actions. La dépense fiscale n'est mentionnée que dans un tableau et sans commentaire. Or, il serait utile d'expliquer en quoi la dépense fiscale contribue aux objectifs des programmes. J'attends plus de détail que la simple mention « aider les anciens combattants », qui est l'objectif mentionné actuellement et qui est une expression assez minimaliste.

Il me semble qu'une réflexion sur la manière de mesurer la performance de la dépense fiscale devrait également être menée. On ne peut à mon sens consacrer aujourd'hui 566 millions d'euros à une mission sans essayer d'en vérifier la performance.

Un autre chantier, plus prospectif, me semble devoir être mené, en concertation avec le monde combattant, pour réfléchir notamment au poids de la dépense fiscale dans la mission et aux avantages et inconvénients qu'il y aurait à transformer, ne serait-ce que partiellement, la dépense fiscale en subvention budgétaire.

Dans ce cadre, deux réflexions par lesquelles je termine. Premièrement, je demande la mise en oeuvre sans délai de l'évaluation prévue par l'article 18 de la loi de de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 pour mesurer l'efficience et l'efficacité des dépenses fiscales de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». Je rappelle qu'un rapport élaboré en 2011 par le Comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, que dirigeait alors l'inspecteur général des finances honoraire Henri Guillaume, avait attribué la note de 0 sur 3 à deux des trois principales dépenses fiscales de la mission, les considérant inefficaces, en fonction des raisonnements qui étaient les siens bien entendu. Il s'agissait des dispositifs liés à la demi-part fiscale supplémentaire et à la déduction du revenu imposable des versements effectués en vue de la retraite mutualiste du combattant. À mon sens, nous pourrions reprendre cette analyse.

Par le passé, nous avons demandé deux fois dans des lois de finances au Gouvernement de remettre un rapport sur l'opportunité de transformer les dépenses fiscales en faveur de l'outre-mer en subventions budgétaires. Ce rapport n'a jamais été remis. Il est des rapports ou des idées qui brûlent les doigts de leurs auteurs. Or un jour ou l'autre, il faudra bien entrer dans ces débats, que ce soit pour l'outre-mer, que ce soit pour les anciens combattants.

Deuxièmement, je suggère l'organisation d'une concertation avec les associations représentatives d'anciens combattants en vue de la refonte du système de la dépense fiscale. Il semble opportun d'adapter ces dispositifs au contexte actuel, de réfléchir en fonction de la professionnalisation de l'armée, d'une couverture sociale meilleure, d'une durée plus brève des conflits. Est-ce qu'il est indispensable, même s'il s'agit d'enjeux à moyen, voire à long terme, de laisser le régime vivre et apporter chaque année des demi-parts supplémentaires à des gens qui ont pu s'engager beaucoup plus récemment que la guerre d'Algérie. Peut-être faudrait-il au minimum que la population soit délimitée, peut-être pourrait-on aussi, mais je le dis très timidement, regarder les conditions, par exemple de ressources.

Une telle discussion pourrait permettre de réfléchir à l'opportunité de contingenter la dépense fiscale (notamment, au moyen de conditions de ressources) pour favoriser les mesures d'intervention directes qui bénéficient de manière plus décisive à tous ceux qui en ont réellement besoin, par exemple, en améliorant la couverture sociale, en augmentant éventuellement la retraite du combattant pour certains publics qui seraient plus précisément ciblés.

Voilà les quelques considérations que je voulais vous livrer, en souhaitant que la question de la dépense fiscale soit examinée en profondeur, pour qu'elle ne soit plus subie, pour qu'elle fasse l'objet un jour de réels choix budgétaires et d'un pilotage. Je crois que sur une mission comme les anciens combattants, si l'on s'abstient de regarder cette masse que constitue la dépense fiscale et qui est celle qui évolue le plus vite, on risque de passer à côté de l'essentiel.

Je vous remercie de votre attention.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Merci pour cette présentation complète mais également préoccupante.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Je remercie Philippe Marini pour cet exposé détaillé et sans tabou sur un sujet sensible. Nous sommes tous, dans le cadre de nos fonctions respectives, amenés à participer aux assemblées annuelles des anciens combattants. Nous savons que nos compatriotes qui ont accomplis ces missions au service de la France sont vigilants quant à la reconnaissance qu'ils attendent de la part de la Nation. Les questions posées sont certainement tout à fait judicieuses et appellent une réflexion sur la performance du dispositif en question.

Je me rallie tout à fait à la préconisation qui est faite, car il faut examiner cette dépense fiscale, comme toutes les autres d'ailleurs, et je m'associe aux conclusions de notre rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de François Trucy

Je me rappelle l'état d'esprit pendant la guerre d'Algérie. Plus que les efforts à produire et les dangers, c'est la question du temps qui préoccupait les appelés. J'ai fait vingt-huit mois et je ne m'en suis pas plus plaint que les autres. Mais je sais que lorsqu'on a fait cet effort-là, on en demande de la reconnaissance et souvent des décorations. Par contre, je suis parfaitement le rapporteur Marini : s'il y a un avantage financier représentant un coût fiscal important, il faut le soumettre à des conditions de ressources. Cela est vrai d'ailleurs de toute mesure fiscale spéciale, sortant du cadre ordinaire. J'ai vu tout au long de ma longue carrière des aberrations, y compris au niveau local, lorsqu'on ne tenait pas compte des différences de ressources et qu'on gaspillait beaucoup d'argent sans en obtenir de reconnaissance particulière.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

Il y a deux sujets dans ce que nous a exposé Philippe Marini. Tout d'abord, l'écart entre la prévision et la réalité de la dépense : vous nous l'aviez d'ailleurs déjà dit l'année dernière, lors de la présentation de votre rapport sur la mission. Je rappelle que la dépense fiscale de la mission « Anciens combattants » augmente mais que les autres crédits diminuent. Des mesures ont déjà été proposées, comme la diminution de 20 % sur la partie mutualiste. C'est un sujet important, mais c'est également un sujet délicat. Au départ les choses avaient été faites pour des personnes qui avaient fait quatre, cinq, six ans de service militaire - avec les conséquences que l'on imagine sur leur carrière, quel que soit leur niveau de fortune. Je ne parle pas seulement de la première guerre mondiale : il y a des gens qui ont fait leur service militaire en 1936, qui ont été libérés en 1939, qui ont fait la guerre jusqu'en 1940 et qui ont ensuite été dans la Résistance. Et ce n'est pas une question de revenus. Il y a des gens comme Emmanuel d'Astier de la Vigerie qui ont été de grands résistants, il y a des gens modestes qui ont été collaborateurs. L'inverse a aussi existé. Sur la guerre d'Algérie, on a moins de recul. Faire de la technocratie là-dessus, je crois que c'est difficile.

L'autre sujet est qu'on est passé d'un service militaire pour tous à une armée professionnelle. Cela change les choses. La question se pose de ces avantages qui vont désormais à des personnes qui ont fait le choix de l'armée professionnelle. De plus, tous les militaires ne sont pas exposés aux mêmes risques. Les gens qui sont allés en opération, par exemple sur la frontière entre le Liban et Israël, attendent que cela soit reconnu. Ils demandent à être distingués des autres militaires. Je suis opposé à toute réfaction des avantages des personnes qui ont participé à des opérations, dans le cadre de leur service militaire, au nom de la Nation française. Je suis peut-être très rétrograde, mais je suis de ceux qui sont convaincus que cela a été une grave erreur de supprimer totalement le service militaire. Plus aucun internat, plus de service militaire, dans ces conditions comment réussir la mixité sociale ... Comme, en plus, les gens ne vivent pas dans les mêmes lieux et n'ont pas les mêmes logements, c'est compliqué. Pour les militaires de carrière, c'est un autre sujet. Voilà mon opinion et, comme dirait un humoriste, je la partage. Je m'avancerais là-dedans avec une grande prudence.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La question est posée : à quoi doit servir l'outil fiscal ? Souvenez-vous, nous avions eu un débat analogue - et à vrai dire assez cruel - sur la demi-part des veuves. L'outil fiscal est-il destiné à apporter une reconnaissance de la Nation à des personnes qui ont exercé des missions que l'on va considérer comme d'intérêt général ? Ou bien l'outil fiscal n'est-il qu'un moyen de répartition des ressources et des charges, d'intervention au bénéfice des plus faibles dans la société ? Nous sommes face à une politique mixte, ce qui nous met parfois mal à l'aise. Au demeurant, nous pouvons aussi transposer ce débat à la politique familiale, notamment au sujet du plafonnement du quotient familial. J'entends des personnes invoquer la famille, la démographie, l'avenir du pays, la morale, etc. Je les écoute toutes volontiers, mais j'écoute aussi ceux qui disent que cet avantage n'a pas la même portée selon les ressources globales du foyer et qu'il n'est pas totalement illogique de le plafonner. S'agissant de la demi-part des anciens combattants, raisonnera-t-on un jour de la même manière ? Il y a déjà un plafonnement, mais un ministre des finances ne sera-t-il pas un jour tenté de réguler ce plafond, de revoir les conditions d'entrée dans le dispositif ? Quand on a fixé, en 1982, l'âge de soixante-quinze ans, l'espérance de vie n'était pas la même. C'était une excellente mesure qui ne coûtait pas cher. Ne faudrait-il pas se remettre dans les conditions de 1982 et s'adapter à la progression de l'espérance de vie ? Il y a une réflexion à avoir. J'ai été très prudent dans mes recommandations. Nous avons un peu avancé en termes de prévisibilité de la dépense. Pourquoi y avait-il de tels écarts ? Parce que le sujet était un peu tabou. La mission de contrôle nous a permis de mieux explorer cette question.

La commission donne acte de sa communication à M. Philippe Marini, rapporteur spécial, et en autorise la publication sous la forme d'un rapport d'information.

La commission entend enfin une communication de M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, sur l'Agence des aires marines protégées (AAMP) et la politique de protection du milieu marin.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Monsieur le Président, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, dans le cadre de ma mission de contrôle en tant que rapporteur spécial de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », j'ai souhaité m'intéresser à l'Agence des aires marines protégées (AAMP), opérateur qui joue un rôle fondamental dans la politique de protection du milieu marin.

Cet établissement public administratif est une structure récente, née en 2006 dans le cadre de la loi relative aux parcs nationaux, aux parcs naturels régionaux et aux parcs naturels marins. Sa création répondait à la volonté de pouvoir disposer d'un opérateur de l'État dédié à la protection des milieux marins, dans un contexte de développement des activités maritimes pouvant avoir un impact sur la biodiversité marine. Il s'agissait en quelque sorte de mettre un terme à la vision de la mer comme un « dépotoir », en instaurant un cadre de régulation de l'ensemble des activités marines.

L'enjeu est d'autant plus important que la France détient le deuxième domaine public maritime au monde, derrière les États-Unis, avec 11 millions de kilomètres carrés.

Les missions de l'agence sont définies dans son contrat d'objectifs et de performance, qui couvre actuellement la période 2012-2014. L'agence apporte un appui aux politiques publiques pour la constitution et la gestion d'un réseau d'aires marines protégées, au premier rang desquelles les parcs naturels marins, outils qui reposent sur une gouvernance originale associant l'ensemble des parties locales dans le cadre d'un conseil de gestion. On en compte six, le dernier en date étant celui d'Arcachon.

L'agence est rattachée au programme 113 « Paysages, eau et biodiversité » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». En 2014, elle dispose d'une subvention pour charges de service public de 22 millions d'euros, qui représente plus des trois quart de ses ressources. Les autres subventions d'exploitation issues de cofinancements, notamment européens, sont toutefois en progression.

En outre, son plafond d'emplois s'élève à 146 équivalents temps plein (ETP). Les effectifs réellement présents sont cependant supérieurs au plafond d'emplois, l'agence disposant également d'emplois hors plafond (contrats aidés, agents mis à disposition, postes financés sur des ressources externes, stagiaires gratifiés).

Le personnel de l'agence se caractérise par une grande diversité de profils et de statuts, avec une proportion relativement importante de contractuels de droit public, essentiellement sur les postes d'ingénierie. En effet, on trouve encore difficilement ce type de compétences au sein de la fonction publique. De façon plus générale, l'agence se heurte à un problème de gestion des compétences au sein des corps.

Je m'arrêterai un instant sur la question des implantations immobilières, qui représente une spécificité de l'AAMP. Son siège se situe à Brest, réparti sur deux sites. L'un abrite le secrétariat général et l'agence en est propriétaire. L'autre accueille le département d'appui aux politiques publiques et fait l'objet d'une location, pour un coût voisin de 100 000 euros par an. C'est pourquoi l'agence a indiqué mettre en oeuvre des solutions pour s'en séparer et réintégrer l'ensemble de ses personnels sur le premier site, à travers son extension. Les travaux doivent être financés par un prélèvement sur son fonds de roulement. Elle a d'ailleurs constitué une réserve de trois à quatre mois de fonctionnement à cet effet.

En outre, pour exercer ses missions, l'organisation de l'agence repose sur une structure intégrée comprenant deux organes déconcentrés : les parcs naturels marins d'un côté, les antennes de l'autre. En ce qui concerne les parcs, l'étendue de l'espace maritime peut nécessiter la mise en place d'un deuxième site en plus du siège afin d'assurer une couverture complète de l'espace couvert par le parc. S'agissant des antennes, elles sont chargées de décliner la mission d'appui aux politiques publiques de l'agence. Elles sont les interlocuteurs privilégiés des services déconcentrés de l'État, des organismes professionnels ou associatifs locaux.

L'agence compte sept antennes à ce titre, aussi bien en métropole qu'en outre-mer. Les équipes des antennes sont logées en majorité au sein des services de l'État et ne disposent généralement que d'un site, sauf cas particulier. L'agence exploite aussi les possibilités de mutualisation : par exemple, l'antenne Antilles est assurée par le parc national de Guadeloupe.

Au total, les dépenses de loyer représentent 61 % des charges de fonctionnement de l'agence.

L'Agence des aires marines protégées doit aujourd'hui faire face à la montée en puissance de ses missions autour de trois chantiers principaux : le déploiement du réseau Natura 2000 en mer, la création et la gestion des parcs naturels marins, et la mise en oeuvre de la directive-cadre « Stratégie pour le milieu marin » (DCSSM). Cette dernière fixe un objectif très ambitieux et sans équivalent au niveau terrestre, qui consiste à atteindre ou à maintenir un « bon état écologique » du milieu marin au plus tard en 2020. Cette obligation de résultats sera ensuite réappréciée et mise à jour tous les six ans. Elle s'applique aux eaux métropolitaines sous souveraineté ou juridiction française. Elle implique la définition et l'élaboration de nombreux indicateurs et documents opérationnels.

Dans ce contexte, on constate une inadéquation entre des moyens contraints et des objectifs toujours plus nombreux au regard des exigences européennes. Ainsi, l'estimation des moyens nécessaires, dans le périmètre de missions actuel et des objectifs assignés à l'agence dans son contrat d'objectifs 2012-2014, était de 32 millions d'euros et 263 ETP en 2013, puis 39 millions d'euros et 340 ETP en 2014.

On est donc loin du compte et l'agence ne peut plus satisfaire aux objectifs de son contrat, tout en ayant bénéficié d'un traitement privilégié au regard des autres opérateurs. Le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie lui accorde en effet une attention particulière compte tenu de son rôle fondamental dans la politique de protection du milieu marin. Cette dernière présente des enjeux budgétaires très lourds, estimés à 100 millions d'euros par an à compter de 2015 puis 500 millions d'euros par an à compter de 2020.

En conséquence, l'agence a dû opérer des arbitrages entre ses différentes activités. Elle a privilégié le fonctionnement et la gestion des parcs naturels marins existants au détriment de son activité de collecte de données. Cette situation a également eu pour conséquence de retarder l'ouverture de plusieurs parcs, au risque d'entamer la crédibilité de l'agence auprès des parties concernées. En outre, les travaux d'étude ayant été provisoirement délaissés, cela pose la question de la péremption des études sur lesquelles se fondent les travaux de l'agence. Autrement dit, celle-ci ne pourra pas mettre en sommeil très longtemps cette activité.

Au terme de ce contrôle, je souhaite donc plus particulièrement appeler votre attention sur deux points.

D'une part, la création de l'Agence française de la biodiversité, dans le cadre du projet de loi sur la biodiversité, offre des perspectives intéressantes de mutualisation. L'idée est de regrouper les moyens jusqu'à présent dispersés dans différentes structures pour mutualiser les activités comme la connaissance ou l'information. De plus, la future agence a pour ambition de mieux prendre en compte la gestion de la biodiversité ordinaire et les dynamiques globales telles que celles qui sont liées au cycle de l'eau.

Dans sa configuration actuelle, avant l'examen du projet de loi par le Parlement, la future agence regroupe notamment l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA), l'Agence des aires marines protégées et Parcs nationaux de France. Cela permettra de couvrir tout le champ de la biodiversité terrestre et marine, ce qui est de nature à renforcer la protection des différents milieux. En effet, la plupart des pollutions marines proviennent d'activités terrestres. Le regroupement proposé me paraît donc pertinent, en répondant à une logique de solidarité terre/mer.

D'autre part, je crois qu'il faut envisager une diversification des ressources de la politique de protection du milieu marin. En effet, comme je l'ai dit, les besoins estimés pour la mise en oeuvre de cette politique, notamment au titre de la directive-cadre stratégie sur le milieu marin, sont très importants. Or, les recettes actuellement mobilisables ne sont pas à la hauteur des enjeux. Cela fait donc courir le risque à la France de ne pas être en mesure de respecter ses engagements européens et internationaux dans ce domaine avec, au-delà du préjudice environnemental que cela impliquerait, des conséquences budgétaires en cas de contentieux, comme cela a été le cas par le passé avec la mise en oeuvre de la directive sur les eaux résiduaires urbaines.

L'une des solutions envisageables, bien que peu orthodoxe du point de vue de la commission des finances, serait de pouvoir affecter une ressource dédiée spécifique à la politique de protection du milieu marin. Des réflexions sont en cours sur la valorisation du domaine public maritime et leur aboutissement pourrait constituer une piste intéressante à cet égard. Je vous remercie de votre attention.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La protection du milieu marin est un sujet auquel je suis particulièrement sensible, puisque le département dont je suis élu possède 900 kilomètres de côtes et a également pu disposer du premier parc naturel marin, celui d'Iroise. En outre, comme Gérard Miquel l'a dit, l'Agence des aires marines protégées a son siège à Brest. Il me semble donc que la région brestoise aurait une certaine légitimité à accueillir la future Agence française de la biodiversité, dont il faudra définir une localisation optimale.

Après ces considérations locales, je voudrais remercier Gérard Miquel pour la pertinence de ses interrogations, notamment s'agissant des inquiétudes exprimées en ce qui concerne la création de certains parcs marins, qui n'aboutit pas toujours aussi vite qu'espéré, dans un contexte budgétaire particulièrement contraint.

En outre, Gérard Miquel a évoqué la question centrale des études. On connaît l'accélération du réchauffement climatique et ses conséquences considérables sur le milieu marin. Je pense donc que retarder l'activité d'études approfondies sur des sujets aussi sensibles pour l'avenir pourrait se révéler dommageable, voire inquiétant. Je partage donc les analyses du rapporteur spécial sur ce point.

Toutefois, des arbitrages devront être opérés, notamment en ce qui concerne les moyens humains - Gérard Miquel a parlé de 340 ETP. On se trouve une nouvelle fois confronté à la problématique de la réduction des moyens, qui affecte l'ensemble des services publics. Je crains donc qu'au-delà des questionnements, nous ne puissions pour le moment que demander à l'Agence des aires marines protégées de faire plus avec moins.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

C'est peut-être possible. Gérard Miquel pourra nous dire quels sont les risques principaux qu'il perçoit s'agissant du manque de moyens, ce dont nous pourrons nous souvenir au cours des débats budgétaires pour soutenir cette cause majeure pour notre avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Avez-vous ressenti une inquiétude ou, au contraire, une adhésion de la part des personnes que vous avez pu rencontrer au sujet de la création de l'Agence française de la biodiversité ? Celle-ci s'annonce importante, si l'on en croit l'espérance qu'elle suscite et la diversité des missions qui seront les siennes. Le choix de son implantation devra prendre en compte le fait que l'agence traitera de l'ensemble des problématiques de biodiversité.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Vous avez indiqué que les ressources de l'agence proviennent pour 75 % de subventions publiques, et pour 25 % de subventions d'exploitation issues de cofinancements notamment européens. Vous dites que ceux-ci sont en progression. Pensez-vous qu'il serait possible de diversifier quelque peu les ressources de l'Agence des aires marines protégées ? Au-delà, dans le cadre de l'Agence française de la biodiversité, peut-être pourrait-on nous dire ultérieurement quels seraient les équilibres financiers et comment se partagerait le financement de l'agence fusionnée entre la subvention issue du ministère et le reste des ressources ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Comme je l'ai déjà dit au rapporteur général, nous avons été remarquablement reçus à Brest, par une équipe particulièrement dynamique, dans des locaux superbes, sur la rade, par un jour de grand soleil. Nous avons pu voguer sur la mer d'Iroise et voir un peu comment travaillent les agents qui mettent en oeuvre les politiques de l'agence. Nous avons été reçus par son président, notre collègue député Paul Giacobbi, et par son directeur Olivier Laroussinie, tous deux favorables et très impliqués dans la création de l'Agence française de la biodiversité, même s'ils ne sont pas sûrs de retrouver leurs hautes fonctions au sein de la future structure. Ils pensent en effet que l'on pourra mutualiser les moyens et réaliser des économies pour investir sur d'autres sites. Ils estiment également que le regroupement des structures de protection de la biodiversité terrestre et marine est pertinent, dans la mesure où, et il ne faut pas l'oublier, la pollution marine vient aussi de la terre. Ce sont des personnes particulièrement innovantes et progressistes, attitude que je souhaite saluer. Loin de pleurer sur leur sort, ils vont de l'avant, avec les moyens dont ils disposent ; ils se heurtent cependant à un problème particulier au niveau de la gestion des personnels, en raison d'un manque de souplesse dans les recrutements. En effet, les compétences requises pour la protection du milieu marin sont assez spécifiques et on ne les trouve pas toujours dans les différents corps existants de la fonction publique.

Le risque de contentieux européen existe : si l'on ne met pas les moyens aujourd'hui, on se limitera notamment dans la mise en place de nouveaux Parcs naturels marins, ce qui est également dommageable du point de vue environnemental.

Le périmètre actuel de l'Agence française de la biodiversité conduit à regrouper 1 200 personnes et à consolider au sein d'un budget unique les 211 millions d'euros actuellement dédiés aux structures composant l'agence, mais la question des moyens doit plus précisément être arbitrée dans le cadre du programme triennal 2015-2017. En principe, le premier budget de l'agence pourrait être voté dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, si la création de l'agence est adoptée d'ici là, mais le texte n'a pas encore été examiné par le Parlement.

Pour ma part, je suis extrêmement favorable à la création de l'Agence française de la biodiversité. Je crois que nous aurons là un bel outil de protection de la nature, dans ses dimensions terrestre et marine.

La commission donne acte de sa communication à M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, et en autorise la publication sous la forme d'un rapport d'information.

La réunion est levée à 12 h 26