Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Réunion du 7 mai 2019 à 14:5

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • ARCEP
  • CSMP
  • agréées
  • assurer
  • comptez-vous
  • faudrait-il
  • matin
  • merci
  • évoquez

La réunion

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Leleux

Nous recevons cet après-midi M. Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes, ou Arcep, au sujet du projet de loi relatif à la modernisation de la distribution de la presse.

Ce matin, nous avons entendu M. le ministre de la culture nous exposer les grandes lignes de ce projet de loi, examiné en première lecture par le Sénat le 22 mai. L'Arcep devrait se voir confier la régulation de la distribution de la presse, exercée jusqu'à présent par le binôme constitué du Conseil supérieur des messageries de presse, ou CSMP, et de l'Autorité de régulation de la distribution de la presse, ou ARDP.

Cette nouvelle mission ne serait pas un simple transfert, mais s'exercerait dans un cadre industriel profondément rénové. Aussi, monsieur le président, nous sommes impatients de savoir comment vous envisagez votre rôle et le type de régulation que vous souhaitez mettre en place pour ce secteur économique.

Debut de section - Permalien
Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes

Cette audition intervient dans un contexte un peu particulier : alors que vous entendez habituellement l'Arcep sur des sujets sur lesquels elle est experte, ce n'est pas le cas ici ; alors que nous intervenons, en qualité de régulateur, dans un cadre politiquement défini, il s'agit, aujourd'hui, d'évoquer un cadre en cours de définition. Je me propose donc de vous rappeler certains éléments nous concernant et de formuler quelques observations sur ce projet de loi.

Qu'est-ce que l'Arcep ?

Nous sommes un régulateur sectoriel, c'est-à-dire - de manière très grossière - un organisme servant de courroie de transmission entre un marché et des acteurs économiques, d'une part, et des objectifs d'intérêt général, d'autre part. Il s'agit, à travers son action, de s'assurer que le marché remplira un certain nombre d'objectifs qu'il ne couvrirait pas spontanément, comme, par exemple, garantir à un maximum de Français l'accès à des réseaux de télécommunication dans de bonnes conditions et à bon prix. Le régulateur sectoriel n'est qu'un « bras armé » : il a besoin d'objectifs clairement définis par le politique, d'un cadre d'action fixé par la loi et d'une certaine autonomie.

L'Arcep a plusieurs particularités.

C'est un régulateur des « tuyaux ». Son rôle est de permettre que certains moyens de communication, jugés essentiels au fonctionnement de la société, soient accessibles à nos concitoyens, en veillant à des notions d'efficience économique, d'aménagement du territoire et d'ouverture des contenus.

Son action de régulation s'inscrit dans un champ technico-économique. Cela signifie, non pas que l'Arcep s'intéresse seulement à l'économie, mais qu'elle manie des instruments jouant, via des incitations, sur les modèles économiques des acteurs du marché pour les orienter dans le sens souhaité.

La concertation est très présente dans son travail, que ce soit pour chercher des solutions ou édicter certaines normes. Nous organisons des réunions multilatérales avec les acteurs, parfois sur des sujets très techniques ; nous procédons à de très nombreuses auditions et consultations publiques ; nous sommes particulièrement attentifs aux indications qui peuvent nous être données à travers la loi, mais aussi dans le cadre d'un dialogue régulier avec les parlementaires.

En revanche, l'Arcep n'est pas un organisme de tutelle. Ainsi, elle est indifférente à la nature des acteurs qu'elle régule - entreprises privées, entreprises publiques, coopératives, associations, opérateurs locaux, etc. Elle ne prend pas de décision à leur place et tente, autant que faire se peut, de les responsabiliser dans leur champ de compétences.

Ces quelques éléments fondamentaux ayant été rappelés, venons-en à la question de la distribution de la presse et du projet de loi.

Partant du constat de départ que la distribution de la presse, dans sa gouvernance actuelle - fondée sur une organisation très structurée verticalement -, atteint ses limites, le Gouvernement cherche à orienter le secteur vers une organisation un peu plus commerciale, tout en confortant les objectifs de pluralisme de la presse et d'accès à tous les titres prévus par la loi Bichet. Nous comprenons donc ce projet de loi comme traduisant une transition qui ne se fait pas « contre » le modèle en place.

Le Gouvernement n'entend pas juger la gouvernance telle qu'elle a été mise en oeuvre - et il faut saluer le travail du CSMP et de l'ARDP. Mais il estime que, au moment où les volumes distribués baissent fortement et où ce système se heurte à ses propres limites, on ne peut plus penser la distribution de la même manière.

Dans le cadre de cette transition, l'Arcep se verrait confier certaines missions.

Je formulerai quelques commentaires et suggestions d'amélioration sur le texte.

Les objectifs nous semblent extrêmement bien posés : on retrouve les principes fondamentaux de la loi Bichet, correctement articulés avec les outils proposés. S'il est question de changer la gouvernance, c'est bien pour obtenir le même résultat qu'actuellement.

S'agissant du périmètre des acteurs à réguler, le texte est globalement bien ciselé.

On vise bien les deux extrémités de la chaîne - les éditeurs, d'un côté, et les marchands de presse, de l'autre. Le choix, pour les intermédiaires, de définir des distributeurs de presse nous paraît judicieux et adapté, ainsi que le processus d'agrément retenu.

En revanche, il ne nous semble pas souhaitable de reconnaître aux dépositaires de presse un statut particulier. Je ne dis pas que ces derniers doivent disparaître : acteurs essentiels, ils doivent continuer à exercer leurs fonctions. Mais il faut éviter d'introduire une stratification et une rigidité trop fortes au niveau de la loi, et laisser les acteurs économiques s'organiser eux-mêmes. En particulier, le problème de départ est celui de la diminution des volumes, ce qui nous laisse penser - mais, j'y insiste, nous ne sommes pas experts du domaine - que les acteurs devront probablement évoluer vers des flux logistiques mutualisés, non restreints aux publications de presse. Sans savoir précisément comment ce mouvement se fera, il me paraît clair qu'il exige un cadre à la fois flexible et dans lequel les responsabilités sont clairement établies.

Le choix du Gouvernement d'intégrer dans le champ de la régulation les kiosques numériques, mais aussi les agrégateurs de presse nous semble en revanche bienvenu.

Le cadre d'action accorde une place significative au cahier des charges, dont je ne peux pas préciser le contenu, puisque celui-ci donnera lieu à une série de concertations. Néanmoins, prévoir que ce document ne soit établi qu'à la veille de 2023, c'est laisser un « trou dans la raquette », car le régulateur devra attendre plusieurs années avant de pouvoir imposer quoi que ce soit aux acteurs. Nous vous suggérons donc de rendre ce cahier des charges opposable dans un délai plus bref.

Un certain nombre d'outils de régulation économique sont prévus. Celui qui permettra à l'Arcep d'envoyer des signaux économiques sur des encadrements tarifaires, c'est-à-dire d'établir des tendances en termes d'évolution des prix, nous semble très important. Le régulateur pourra également avoir connaissance des coûts supportés par les acteurs, en vérifier l'efficience et engager un dialogue pour éviter que certaines inefficiences soient répercutées sur les éditeurs. Au-delà des strictes questions de prix, il aura aussi accès à certaines dispositions contractuelles.

S'agissant du niveau des diffuseurs, nous sommes totalement en phase avec la logique du texte, notamment avec le maintien d'une commission du réseau de diffusion et le fait de s'appuyer sur un accord interprofessionnel pour la presse hors IPG. Toutefois, dans la version actuelle du texte, il n'est pas certain que l'Arcep pourrait faire respecter l'accord. Or il faut un gendarme pour celui-ci !

Enfin, si nous sommes favorables à l'inclusion du numérique, il nous semble qu'une confusion demeure dans le texte sur la question des données personnelles. Certaines dispositions sur la loyauté de l'information, notamment pour les agrégateurs de presse, devraient être des dispositions de droit commun. En revanche, il faudrait que l'Arcep puisse vérifier qu'un principe de non-discrimination est bien respecté dans la façon dont ces agrégateurs mettent en avant les contenus.

C'est dans une posture d'humilité que nous abordons ce dossier, que nous connaissons mal. Quand on nous a contactés, en amont du dépôt du projet de loi, pour savoir si nous serions prêts à accepter cette responsabilité, nous avons répondu que le choix du régulateur appartenait au législateur. Mais si vous décidez de nous confier une telle mission, nous vous demandons - à nouveau avec humilité - qu'elle soit le plus conforme possible à ce que nous savons et pouvons faire.

- Présidence de Mme Catherine Morin-Desailly, présidente - 

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Laugier

Merci de vos explications : votre regard de « non expert » est déjà très précis. La presse traverse effectivement une période complexe, avec le développement rapide des kiosques numériques et la réduction des volumes distribués, et nous avons besoin d'évaluer comment l'Arcep peut s'adapter pour intervenir dans ce secteur.

Quel sera, selon vous, le délai pour instruire les demandes d'agrément ? Cette question est d'autant plus importante que la fin de la période de transition, avec la nécessité d'assurer la continuité du service, pourrait contraindre à une accélération du calendrier en 2022.

Debut de section - Permalien
Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes

Le lien qui, dans le dispositif actuel, est établi entre les agréments et l'ouverture à la concurrence ne nous semble ni nécessaire ni pertinent. Nous souhaiterions donc pouvoir nous engager dans une logique de cahier des charges et d'agrément très rapidement après l'adoption de la loi. Cela évitera tout risque de rupture de charge à l'horizon de 2023.

La définition du cahier des charges exigera une certaine période de concertation et une appropriation par le Gouvernement, puisqu'il est prévu de passer par décret. Un délai de 9 mois semble être un minimum. Il est par ailleurs difficile de déterminer le délai nécessaire aux décisions d'agrément, mais ce ne pourra être en deçà de trois mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Laugier

Quel type de règles allez-vous chercher à faire respecter dans le cadre du contrôle des tarifs des sociétés agréées ? Qu'en est-il, notamment, de la notion de « coût d'un opérateur efficace » ?

Debut de section - Permalien
Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes

Voici ce que nous pratiquons dans le secteur des télécommunications et des postes, et qui pourrait être transposé à celui de la distribution de la presse.

Tout d'abord, nous nous réunissons avec l'opérateur régulé pour travailler à l'établissement d'une comptabilité réglementaire. Si l'on prend l'exemple d'une tournée de facteur, nous allons, dans un tel cadre, fixer la règle d'imputation du coût du facteur pour les courriers urgents et pour les courriers non urgents. Ce travail garantit que l'équation économique est bien examinée en tenant compte de certains objectifs d'intérêt général et permet une intervention sur la notion d'efficacité. Ainsi, tous les trois ou quatre ans, nous discutons avec La Poste de l'ampleur des augmentations de prix qu'elle est autorisée à pratiquer, en examinant, à partir d'une projection de la diminution des volumes de vente, les efforts qu'elle doit réaliser en termes de gains d'efficacité et ceux qu'elle peut faire porter par le consommateur.

S'agissant du contrôle tarifaire, il s'exerce à deux niveaux. L'Arcep est en mesure de fixer de grandes orientations sur plusieurs années, selon le mécanisme que je viens de décrire. Il revient ensuite aux acteurs de réaliser un travail plus fin sur les prix, au cas par cas. Le régulateur ne fait qu'émettre un avis sur ces choix, par exemple pour mettre en exergue un problème de discrimination ou se prononcer sur des durées d'exclusivité. Cela permet, aussi, d'orienter le marché.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Laugier

Quelles règles comptez-vous appliquer dans le cadre de la fixation des conditions de rémunération des diffuseurs de presse, mission qui vous est confiée par l'article 17 ? Ne faudrait-il pas, comme dans le système actuel, une consultation des organisations professionnelles ?

Debut de section - Permalien
Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes

Nous sommes favorables, en toutes circonstances, à la concertation et à la consultation des acteurs. Vous pouvez le préciser dans la loi, mais soyez assurés que cette pratique fait partie intégrante de notre culture. D'après ce que nous comprenons du texte, le rôle de l'Arcep sera de fixer un cadre en matière de rémunération des diffuseurs, pas nécessairement un tarif.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Laugier

Le Parlement peut actuellement saisir le CSMP d'une demande d'avis ou d'étude sur les activités relevant de sa compétence. Le projet de loi limite cette possibilité au seul gouvernement. Que penseriez-vous de redonner au Parlement ce pouvoir ?

Debut de section - Permalien
Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes

Pour le secteur des télécommunications et des postes, les commissions des affaires économiques des assemblées peuvent à tout moment demander un avis à l'Arcep. Je serais tout à fait favorable à ce que les commissions de la culture, par exemple, puissent le faire s'agissant de la distribution de la presse.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Merci pour cet exposé très clair. Il entre en contradiction avec l'audition que nous avons faite de M. le ministre ce matin sur le point précis du « trou dans la raquette ». J'imaginais que le travail sur le cahier des charges était déjà en cours et que ce dernier serait rapidement construit. Ce « grand vide » est ennuyeux.

Alors que l'article 17 du projet de loi tend à permettre à l'Arcep d'imposer un encadrement pluriannuel des tarifs aux sociétés agréées, vous évoquez plutôt une démarche de concertation. Dans quel cas pensez-vous utiliser l'option offerte à l'article 17 ?

Debut de section - Permalien
Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes

Il y a bien deux niveaux d'intervention sur les tarifs : les grandes orientations et les tarifs au cas par cas. Par exemple, nous avons autorisé La Poste à augmenter les prix du service universel de 5 % par an - c'est une limite maximale qui a été imposée par l'Arcep. Mais le prix du timbre, lui, est fixé par La Poste, choix sur lequel nous pouvons rendre un avis. Dès lors que le maximum est respecté, la fixation de ce prix relève de sa liberté commerciale.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Lafon

L'article 17, toujours, tend à prévoir que l'Arcep reprenne la main et fixe les conditions d'assortiment en cas d'échec des négociations interprofessionnelles pour les publications ne relevant pas de l'IPG. Comment comptez-vous vous y prendre ?

Debut de section - Permalien
Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes

C'est un cas de figure que nous souhaiterions éviter, mais, si nous devions en arriver à cette extrémité, ce serait après un certain nombre de consultations et de concertations. En outre, je rappelle que nous serons toujours indifférents au contenu ; nous chercherions donc à nous appuyer sur des grandeurs objectives, telles que les volumes ou les chiffres d'affaires. Cela étant, vous pourriez aussi penser qu'une telle prérogative n'entre pas dans les missions d'un régulateur indépendant et que ce cas devrait être réglé par décret. Cela ne me choquerait pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Leleux

Supposons, inversement, qu'un accord interprofessionnel ait été trouvé, mais que l'Arcep le juge contraire à l'intérêt général. Auriez-vous besoin que la loi vous accorde des marges de manoeuvre supplémentaires pour intervenir ?

Debut de section - Permalien
Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes

La mécanique de l'avis m'apparaît très efficace dans un tel cas. D'expérience, le fait même que nous estimions qu'un projet d'accord soulève des problèmes de conformité avec la loi le fait capoter.

Debut de section - PermalienPhoto de Céline Brulin

Ce matin, M. le ministre a exprimé sa volonté que le nouveau modèle n'impacte ni le pluralisme ni la proximité. Or vous évoquez des flux logistiques mutualisés... La proximité pourrait-elle en pâtir ?

Vous avez eu l'honnêteté de reconnaître que le domaine était nouveau pour vous. Que faudrait-il modifier dans vos pratiques et fonctionnements pour répondre à ce défi ? De quels moyens avez-vous besoin ? Certains personnels du CSMP pourraient-ils être repris ?

Debut de section - Permalien
Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes

Dès lors que les objectifs sont correctement fixés dans la loi, et c'est le cas ici, nous pouvons organiser un modèle soutenable sous l'angle tant du pluralisme que de la proximité. Si j'en crois mon expérience de la régulation, nous disposons des outils pour rendre l'équation économique « solvable » dans la ruralité. Ce sera, pour nous, un élément d'attention.

Nous sommes en outre favorables à examiner la possibilité d'intégrer dans nos équipes certains personnels, notamment des chargés de mission, du CSMP. Mais cela ne peut se faire qu'au cas par cas. Une intégration automatique des personnels nous poserait effectivement un problème d'indépendance - nombre de ces personnes sont aujourd'hui payées par les éditeurs - et un questionnement en terme de dépenses publiques - d'un financement sur fonds privés, on passerait à un financement sur fonds publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Laugier

De quels moyens supplémentaires souhaitez-vous disposer pour assurer votre nouvelle mission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

En complément de cette question, disposez-vous des compétences requises en interne ou faudra-t-il trouver des complémentarités dans les profils de poste ?

Debut de section - Permalien
Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes

Le projet de loi ne déstabilise pas notre organisation car nous assurons déjà la régulation d'acteurs extrêmement puissants et il conviendrait de ne pas fragiliser d'autres pans de notre activité. Il nous semble en outre que nous pouvons gérer l'évolution des compétences au fil de l'eau. Enfin, s'il fallait créer un régulateur de la distribution de la presse ex nihilo, il faudrait compter une quarantaine de collaborateurs, alors que nous pouvons assurer cette nouvelle mission avec moins de dix collaborateurs supplémentaires en mettant en oeuvre des synergies. Nous sommes en négociation avec le ministère de la culture s'agissant du transfert des équivalent temps plein (ETP) correspondants, car le plus tôt nous disposerons des personnels, le plus tôt nous pourrons commencer à travailler.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

À côté de la distribution physique, n'oublions pas la distribution dématérialisée, avec le développement de la presse numérique. La question de la juste rémunération a progressé, notamment grâce à l'initiative du Sénat sur les droits voisins, mais celle de l'exposition et de l'éditorialisation des contenus reste posée. Elle est intrinsèquement liée au modèle économique des plateformes, qui repose sur des algorithmes peu transparents.

Le projet de loi intègre l'idée que les plateformes devront rendre compte de la manière dont les données personnelles sont utilisées. Mais peut-on vraiment compter sur l'autorégulation du secteur quand on connaît sa puissance et les scandales qui ont éclaté récemment ? De surcroît, selon la directive e-commerce, les plateformes ne sont redevables de rien ! Ne faudrait-il pas aller plus loin ? Je sais que vous avez réfléchi à ces questions, au-delà même des missions dévolues à l'Arcep. Vous avez notamment appelé à inventer une régulation « Robin des Bois » qui reprendrait le pouvoir aux géants du numérique pour le distribuer à tous ! Comment fait-on ?

Debut de section - Permalien
Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes

L'autorité de la concurrence australienne a publié un rapport très intéressant sur la façon dont les plateformes mettent en avant les contenus.

Je ne crois pas à l'autorégulation. En revanche, sur les données personnelles, il ne me paraît pas souhaitable d'éclater les compétences entre les différents régulateurs sectoriels. Je suis donc d'avis de nous en remettre à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) sur ces questions.

Il me semble que le règlement général sur la protection des données, le RGPD, offre un cadre suffisamment large, en prévoyant déjà la question de l'utilisation des données personnelles en lien avec les opinions.

En revanche, aucune règle n'existe aujourd'hui sur la question de l'éditorialisation. Les hébergeurs ne sont responsables de rien, vous avez raison.

Je me rallie aux préconisations de l'autorité australienne : le principe de transparence est important, mais il faut surtout que l'autorité publique ait la capacité de comprendre les algorithmes et d'interroger les plateformes. Il faut par ailleurs affirmer un principe suffisamment flexible de loyauté ou de non-discrimination dans le traitement des contenus.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

La neutralité du net n'est-elle pas illusoire au regard de son modèle économique ? Le respect du pluralisme et la neutralité de l'exposition des informations, des principes qui nous tiennent à coeur, ne risquent-ils pas d'être mis à mal ?

Debut de section - Permalien
Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes

C'est assurément un défi !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

On parle en effet beaucoup d'un rapprochement des différentes autorités de régulation sur ces sujets de plus en plus interconnectés.

Nous vous remercions, monsieur Soriano. Nous vous réinviterons certainement au mois de juin, dans la perspective de l'examen du projet de loi relatif à l'audiovisuel.

La réunion est close à 15h 5.