La commission a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-François Humbert sur la proposition de loi n° 323 (2005-2006) portant diverses dispositions relatives aux arbitres.
a rappelé que la situation de l'arbitrage en France se caractérisait par une tendance extrêmement inquiétante : la diminution continue du nombre d'arbitres. En cinq ans, plus de 20.000 arbitres, toutes disciplines confondues, auraient ainsi quitté la profession, faute de soutien moral et financier de la part des instances sportives et de l'Etat.
S'il a précisé que toutes les fédérations sportives n'étaient pas concernées par cette tendance de fond, il a néanmoins constaté que la fédération française de football, qui compte dans ses rangs plus de 25.000 arbitres, subissait un taux de rotation extrêmement important : 60 % des nouveaux arbitres abandonneraient ainsi l'activité après trois ans, et 30 % après une année seulement d'exercice.
Il a affirmé que la difficulté à susciter des vocations, qui pourrait handicaper rapidement l'organisation de certaines manifestations sportives, tenait d'abord au développement des incivilités, voire des violences, sur et autour des terrains de sport.
Si, sur le plan purement statistique, les violences à l'encontre des arbitres se résument chaque année à moins d'un millier de plaintes déposées, ces chiffres ne reflètent qu'une partie de la réalité, de nombreux arbitres évitant de porter plainte par peur des représailles ou estimant inutile de saisir la justice pour une simple voie de fait.
Il a considéré que le manque d'attractivité de l'arbitrage en France était également dû au caractère ambigu du régime social et fiscal applicable aux sommes versées aux arbitres dans le cadre de leur activité arbitrale.
Regrettant que la législation ne permette ni de qualifier avec certitude le lien unissant l'arbitre à sa fédération, ni d'identifier par conséquent le régime applicable aux indemnités perçues par les représentants du corps arbitral, il a souligné que les arbitres se tournaient de ce fait vers le système de franchise réservé aux travailleurs salariés institué par la circulaire interministérielle du 28 juillet 1994 pour justifier l'exonération des sommes qu'ils touchent, dans les limites de cinq manifestations arbitrées par mois et de 81 euros par manifestation.
Il a constaté que ce bref panorama des difficultés juridiques, sociales et fiscales rencontrées par les arbitres et les juges permettait de mesurer l'ampleur de la tâche à accomplir afin de rendre à l'activité arbitrale son attrait aux yeux de nos concitoyens. Il est donc du devoir du législateur d'offrir aux arbitres les garanties leur permettant d'exercer leur activité dans de bonnes conditions.
A cet égard, il a souligné que la proposition de loi n'avait pas l'ambition de régler tous les problèmes liés à l'exercice de cette activité mais tendait simplement à définir les bases d'un cadre juridique pérenne, susceptible d'aboutir à la reconnaissance d'un véritable « statut » de l'arbitrage.
Après avoir indiqué qu'il avait modifié considérablement la rédaction initiale de sa proposition de loi pour tenir compte de la codification par l'ordonnance du 23 mai 2006 des dispositions de la loi du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives et du travail réalisé avec les ministères des sports, des affaires sociales et des finances, le rapporteur a précisé que le texte visait à insérer trois nouveaux articles dans le code du sport.
Le nouvel article L. 223-1 pose le principe de l'indépendance « technique » et de l'impartialité des arbitres dans le cadre de l'exercice de leur mission.
Le nouvel article L. 223-2 tend à faire bénéficier les arbitres et les juges de la protection pénale spécifique accordée aux personnes chargées d'une mission de service public. Les violences ou les menaces infligées ou proférées à l'encontre des arbitres dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leur mission seront ainsi considérées comme des violences ou des menaces aggravées passibles des peines renforcées prévues par le code pénal.
Citant l'exemple du Rhône, M. Jean-François Humbert, rapporteur, a considéré que la dissuasion devrait permettre de limiter le nombre d'actes incontrôlables que les arbitres redoutent et qui constituent l'essentiel des agressions. Dans ce département, les barèmes disciplinaires ont en effet été relevés de manière spectaculaire en 2001 : toute violence sur un arbitre, de la part d'un joueur, entraîne désormais radiation à vie. Au total, si en 2001 le département du Rhône avait connu 15 agressions d'arbitres, une seule a été enregistrée cette saison.
Le nouvel article L. 223-3 exclut, quant à lui, tout lien de subordination caractéristique du contrat de travail entre l'arbitre et sa fédération de rattachement. Le rapporteur a estimé que cet article devrait mettre un terme définitif aux controverses jurisprudentielles et doctrinales en affirmant explicitement le caractère indépendant de l'arbitre vis-à-vis de la fédération.
En sus des modifications relatives au code du sport, M. Jean-François Humbert, rapporteur, a proposé l'adoption d'un dispositif fiscal et social pérenne permettant de sortir de l'insécurité juridique caractérisant le recours par les arbitres à la franchise créée par la circulaire du 28 juillet 1994.
En matière sociale, il a souligné que le dispositif proposé visait à :
- clarifier le statut des arbitres au regard du droit de la sécurité sociale en leur offrant un rattachement systématique au régime général ;
- obliger les fédérations sportives à remplir les obligations relatives aux déclarations et versements des cotisations et contributions afférentes aux rémunérations versées aux arbitres et juges sportifs ;
- définir un mécanisme d'exonération de cotisations et de contributions de sécurité sociale pour les sommes versées à compter du 1er janvier 2007 par les fédérations aux arbitres, dans la limite de 35 fois le montant du plafond journalier de la sécurité sociale.
Il a précisé dès lors que les sommes versées aux arbitres et juges sportifs dépasseraient ce seuil, qu'elles seraient soumises dès le premier euro perçu aux cotisations et contributions de sécurité sociale.
S'agissant du régime fiscal des indemnités versées aux arbitres, il a indiqué que celui-ci s'alignait sur le régime social. D'une part, les indemnités versées dans le cadre de l'arbitrage seront assimilées à des bénéfices non commerciaux. D'autre part, ces sommes seront exonérées d'impôt sur le revenu à compter du 1er janvier 2007 dans la limite de 35 fois le montant du plafond journalier de la sécurité sociale.
Il a ajouté que ce dispositif ne visait pas à créer un abattement et que, dès lors que les sommes versées aux arbitres et juges sportifs dépasseront le seuil prévu, elles seront soumises dès le premier euro perçu à l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices non commerciaux.
Un débat s'est engagé.
s'est interrogé sur le statut des arbitres internationaux et sur le lien les unissant à leur fédération nationale.
a regretté la multiplication des incivilités à l'égard des arbitres sur les terrains de sport. Il a déclaré que ce phénomène concernait toutes les disciplines et qu'il fallait par conséquent éviter de se focaliser sur le cas du football.
Après avoir souligné la nécessité de reconnaître l'indépendance technique des arbitres et de leur garantir une meilleure protection pénale, il a estimé qu'il convenait de faire preuve de prudence en matière fiscale et sociale afin de ne pas décourager les arbitres amateurs.
S'agissant des aménagements du temps de travail des arbitres et des juges, il a affirmé que l'activité arbitrale était une passion pour la personne qui s'y adonne et ne nécessitait pas forcément de mesures législatives.
a regretté que la proposition de loi s'attache principalement à résoudre les difficultés rencontrées par les arbitres de football. Elle s'est interrogée sur les conséquences que pourrait avoir ce texte sur les autres disciplines sportives elles aussi concernées par les problèmes d'arbitrage.
a souhaité connaître le nombre d'incivilités constatées dans d'autres sports que le football. Il a affirmé qu'afin d'éviter la multiplication des incivilités au niveau local, il convenait de pénaliser financièrement les clubs fautifs.
Soulignant l'importance des indemnités perçues par les arbitres de Ligue 1 et de Ligue 2, il a souhaité savoir si la proposition de loi prévoyait des dispositions particulières pour cette catégorie privilégiée d'arbitres sportifs.
Après s'être montré circonspect sur l'opportunité de supprimer le lien de subordination au sens du contrat de travail entre l'arbitre et la fédération, il a regretté que les arbitres de football officiant au plus haut niveau se voient confier une délégation de service public au titre de leur activité arbitrale.
En réponse à ces interventions, M. Jean-François Humbert, rapporteur, à apporté les précisions suivantes :
- ce texte vise à améliorer le cadre juridique applicable à l'ensemble des arbitres et juges sportifs. Il ne vise donc pas exclusivement le football, même s'il convient toutefois de constater que la fédération française de football est celle qui compte le plus de licenciés, nécessite le plus d'arbitres, organise le plus de compétitions et connaît les plus importantes difficultés en matière d'arbitrage ;
- la plupart des disciplines sportives connaissent des problèmes d'effectifs en matière d'arbitrage. Tous les clubs concernés par ces difficultés doivent ainsi payer des pénalités à la fédération dont ils dépendent, dès lors qu'ils ne parviennent pas à fournir le nombre d'arbitres exigé à l'occasion des compétitions officielles ;
- les seuils fixés par le texte en matière fiscale et sociale ne concernent que les arbitres amateurs. Les arbitres dépassant ces seuils, notamment les arbitres de Ligue 1 et de Ligue 2, ne bénéficieront par conséquent pas des exonérations prévues par la proposition de loi ;
- il n'est pas nécessaire d'être un bon joueur pour faire un bon arbitre sportif. Le meilleur arbitre de football français n'a ainsi jamais signé de licence en tant que joueur.
La commission est ensuite passée à l'examen des articles de la proposition de loi, qu'elle a adoptés sans modification.
La commission a alors adopté les conclusions proposées par le rapporteur sur cette proposition de loi, les groupes socialiste et communiste républicain et citoyen ne prenant pas part au vote.