Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission des finances, conjointement avec la commission des affaires sociales, entend une communication de M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur pour la commission des finances, et Mme Janine Rozier, rapporteur pour la commission des affaires sociales, sur la réforme de l'administration des anciens combattants.
La communication sur la réforme de l'administration des anciens combattants, que vont vous présenter Janine Rozier et Jean-Marc Todeschini, est une coproduction de nos deux commissions et je salue tout particulièrement la présence en force de la commission des affaires sociales dans notre salle.
Je me réjouis du travail commun réalisé entre nos deux commissions et je laisse la parole aux rapporteurs.
Les rapporteurs successifs de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » se sont inquiétés à plusieurs reprises de l'ajustement de ses moyens à la diminution inéluctable du nombre d'ayants droit à réparation. Un premier contrôle a été mené, fin 2007, par la commission des finances sur les directions interdépartementales des anciens combattants (DIAC).
Dans le même temps, le premier Conseil de modernisation des politiques publiques décidait, le 12 décembre 2007, de mettre en oeuvre « la rationalisation de l'administration au service des anciens combattants ». La réforme, intervenant dans le cadre de la RGPP, a pour conséquence principale la suppression progressive de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale (DSPRS), d'ici à la fin de 2011. Elle vise principalement à simplifier et moderniser l'organisation de l'administration au service des anciens combattants avec la création d'un point unique d'accueil et de renseignements de proximité, le service départemental de l'Office national des anciens combattants (ONAC).
Le contrôle de 2008 a donc accompagné le début de la réforme. À mi-parcours de sa mise en oeuvre et compte tenu des inquiétudes soulevées par cette décision dans la population combattante comme chez les personnels, il nous a semblé important de nous assurer que les choix retenus permettront bien de garantir la réparation équitable et l'accompagnement de qualité dus à nos anciens combattants et d'assurer le reclassement des personnels concernés par cette mutation.
La DSPRS dispose de services déconcentrés : les dix-huit DIAC, le service des ressortissants résidant à l'étranger de Château-Chinon et les services de Casablanca, de Tunis et d'Alger. Elle exerce également la tutelle sur les deux établissements publics opérateurs du programme : l'ONAC et l'Institution nationale des Invalides (INI). L'Observatoire de la santé des vétérans lui est également rattaché.
Pour mettre en oeuvre cette réforme, deux instances ont été créées : un comité de pilotage, présidé par le directeur de cabinet du Secrétaire d'Etat, et une commission de suivi, présidée par la directrice de la DSPRS. Une direction de projet a été constituée pour coordonner le travail de près de cent personnes réparties en quinze groupes de travail.
Dix missions ont été identifiées parmi celles exercées par la DSPRS, dont une part a été transférée vers l'ONAC qui assure une fonction de guichet unique à l'échelon départemental. Les autres sont reprises soit par d'autres services du ministère de la défense, soit par les établissements publics qui étaient opérateurs rattachés de la direction supprimée.
Les principaux transferts d'effectifs et de crédits ont été actés et un calendrier de fermeture des sites a été défini : il prévoit la fermeture des directions interdépartementales de la DSPRS de manière échelonnée en 2010, et celle des directions interrégionales, du service des ressortissants à l'étranger implanté à Château-Chinon et de l'administration centrale de la DSPRS, à Paris et à Caen, tout au long de l'année 2011
Les organismes « repreneurs des missions » s'organisent progressivement, avec l'aide de la DSPRS, au rythme des fermetures programmées des dix-huit services déconcentrés. Les premiers transferts ont eu lieu dès le 1er janvier 2010.
Nous avons choisi de nous déplacer à Montpellier, le 1er avril, sur un site en cours de fermeture puisqu'elle intervenait le 1er mai. La directrice de l'ONAC s'est montrée confiante dans la capacité du service à remplir sa mission nouvelle de guichet de proximité.
Les responsables de la DIAC, le médiateur mobilité régional de la défense et le secrétaire général de la préfecture de l'Hérault ont évoqué les difficultés de reclassement, liées aux restructurations locales de la défense conjuguées à la situation régionale de l'emploi. Elles ont été confirmées par les représentants du personnel de la DIAC. Selon le dernier recensement transmis par la DSPRS, au 30 avril, veille de la fermeture de la DIAC, sur les cinquante-deux présents au début de l'opération il en restait seize à reclasser.
En ce qui concerne l'ensemble du personnel, sur les 1 352 équivalents temps plein (ETP) affectés par la réforme, 624 auront été supprimés, 210 transférés en interne et 518 transférés aux opérateurs au cours de la période 2008-2012. Ainsi, le montant des transferts s'établit à environ 23 millions d'euros pour les dépenses de personnel à comparer avec les 55,2 millions attribués au même poste selon la loi de règlement des comptes pour 2008.
Il convient également de prendre en compte la réduction des personnels de l'ONAC à hauteur de cent cinquante personnes, dont trente pour le siège, permise par le non remplacement de départs à la retraite. Cette réduction intervient malgré les nouvelles missions qui lui sont confiées. Les économies pour les dépenses de fonctionnement sont plus difficiles à estimer, notamment en raison des transferts. Ainsi, l'ensemble des crédits transférés à l'ONAC s'établit à 13,8 millions d'euros en 2010 et 3 millions en 2011.
Je conclurai, d'une part, en approuvant le schéma retenu, qui prévoit le maintien d'un service de proximité pour la population combattante, tout en confortant le rôle de l'ONAC, d'autre part, en vous exposant mes sujets d'inquiétude, même si nous avons pu constater que cette réforme donne, dans son ensemble, satisfaction à la majorité des associations.
Tout d'abord, je souhaite que cette réforme ne laisse pas des personnels qui s'étaient, depuis des années, investis au service du monde combattant sur le bord du chemin. Je reste donc inquiet quant à la réussite complète du processus de reclassement, même si les autorités qui en ont la charge m'ont paru préoccupées d'aboutir à un minimum de frustrations.
Ensuite, je relève deux points d'achoppement dans cette entreprise : l'inégalité de traitement entre ouvriers de l'État et fonctionnaires en matière d'indemnité de départ volontaire (IDV) et l'existence de sites où les possibilités de reclassement sont amoindries par des restructurations locales d'autres administrations, notamment de la défense, déjà en cours. Je formule le souhait que ces difficultés n'entraînent pas l'application de mesures trop coercitives pour le personnel.
La dernière inquiétude que j'évoquerai porte sur l'avenir de la mission appareillage : sur sa pérennité d'une part, sur le maintien du service de proximité dû à la population handicapée à laquelle elle s'adresse, d'autre part.
Après que Jean-Marc Todeschini vous a rappelé l'historique de la réforme et présenté l'état d'avancement de sa mise en oeuvre, je souhaite revenir sur deux points essentiels : les conditions de reclassement des personnels d'une part, le maintien de la qualité de service pour les usagers, d'autre part.
Grâce au savoir-faire dont le ministère de la défense dispose en matière d'accompagnement des restructurations militaires, le reclassement des personnels concernés par les premières fermetures de directions interdépartementales s'est, jusqu'à présent, déroulé dans des conditions satisfaisantes. Le nouveau dispositif en vigueur depuis 2009 combine en effet incitations financières à la mobilité et au départ et accompagnement personnalisé, au plus près des personnels.
Il est appréciable que tous les personnels, qu'ils relèvent des catégories A, B ou C, profitent du même niveau d'aides à la mobilité, qui varient uniquement en fonction de la situation familiale et de la distance - en particulier selon qu'elle implique ou non un changement de domicile. On regrettera, en revanche, la différence de traitement manifeste entre fonctionnaires et ouvriers de l'État en matière d'IVD : en plus d'un montant d'indemnité plus élevé, les ouvriers de l'État sont les seuls à bénéficier d'une exonération d'impôt sur le revenu et d'un droit à l'indemnisation chômage et peuvent y accéder jusqu'à deux ans avant l'âge d'ouverture du droit à pension, contre cinq ans pour les fonctionnaires. Cette situation crée un fort ressentiment parmi les fonctionnaires et réduit considérablement l'attractivité, pour ces derniers, de cette disposition.
Au-delà des aides matérielles, le dispositif d'accompagnement des restructurations se décline, au niveau local, entre les antennes mobilité reclassement (AMR), chargées du suivi des personnels tout au long du processus, et les commissions locales de restructuration (CLR), instances de concertation avec les organisations syndicales. Il est complété par l'action des sept médiateurs mobilité qui sont chargés de traiter des cas les plus difficiles et d'assurer l'interface avec les administrations d'accueil. Cet accompagnement personnalisé des agents les a protégés, jusqu'à présent, contre les syndromes d'isolement ou d'abandon et certains drames sociaux vécus lors d'autres restructurations.
Au 30 avril 2010, les services de la DSPRS estimaient qu'une solution avait été trouvée ou était en passe de l'être pour 469 agents, soit près de 58 % des 814 effectifs présents au 1er janvier 2009 : 42 agents avaient pris leur retraite, 16 avaient choisi l'IDV, 192 étaient déjà détachés ou mis à disposition et 97 dossiers de reclassement étaient en cours de traitement, tandis que 117 personnes devront avoir pris leur retraite d'ici à 2012 ; les personnels des directions fermées au 1er mars ont été reclassés sans difficulté majeure de même que ceux des directions de Clermont et Rouen, fermées au 1er mai, et les prévisions sur les fermetures à venir sont plutôt optimistes.
A contrario, les conditions de fermeture des sites de Montpellier et, pour l'avenir, de Limoges ou de Château-Chinon sont plus préoccupantes, car marquées par la conjonction de restructurations civiles et militaires qui limitent considérablement les solutions locales de reclassement.
Autre difficulté : le profil des agents de la DSPRS, dont la moyenne d'âge est plus élevée que dans le reste du ministère - cinquante-deux ans contre quarante cinq ans et dix mois - et qui relèvent majoritairement de la catégorie C, supposés moins mobiles, entraînerait de fortes réticences à la mobilité. Cette dernière idée reçue est cependant mise à mal sur le terrain puisque les solutions de reclassement sont parfois plus difficiles à trouver pour les « catégorie B », aux tâches de secrétariat peu différenciées, que pour les « catégorie C », à la technicité recherchée.
En dernier recours, des procédures plus contraignantes peuvent être mises en oeuvre comme le reclassement d'office après trois refus d'affectation, voire, en cas de refus de ce dernier poste, la mise en disponibilité d'office sans traitement.
Le second objectif poursuivi par la réforme a consisté à préserver le droit à réparation dû à nos anciens combattants en confortant l'ONAC dans son ancrage de proximité : au-delà des missions nouvelles qui leur sont confiées, les services départementaux de l'office sont désormais l'interlocuteur privilégié du monde combattant et doivent à ce titre accueillir, informer et orienter les ressortissants dans le nouveau système. À cet égard, on regrettera seulement que les formations à l'accueil et aux nouvelles procédures des personnels de l'ONAC n'aient pas été organisées plus en amont des premières fermetures. L'interconnexion avec les outils de gestion des services repreneurs doit aussi progresser pour assurer le suivi des dossiers.
Grâce à l'appui de pôles de soutien mutualisant les tâches strictement administratives, les services départementaux seront recentrés sur leurs missions de proximité et les temps de traitement réduits.
Au vu, notamment, des premiers retours de terrain, la qualité du service rendu par les nouveaux services repreneurs apparaît aussi préservée. Cette réussite, qu'il faudra toutefois valider sur plus long terme, s'explique d'abord par le caractère progressif de la réforme mais surtout par la logique de métier qui a procédé au choix des services : ainsi, la Caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS), choisie pour la gestion des soins médicaux gratuits, avait déjà pour mission de rembourser des prestations maladie et maternité et le service des pensions de La Rochelle traitait déjà des pensions d'invalidité des militaires. Certains repreneurs ont dû gérer des difficultés transitoires, par exemple pour résoudre les différences de régimes indemnitaires avec les personnels reclassés - c'est le cas de l'INI pour le rattachement du Centre d'études et de recherche sur l'appareillage des handicapés (CERAH) - ou pour recruter des personnels supplémentaires : les soixante-quinze postes ouverts aux agents de la DSPRS pour gérer les soins médicaux gratuits n'ayant pas été pourvus, la CNMSS a été contrainte d'ouvrir un concours pour quarante postes, avec toutes les charges d'organisation correspondantes. Elle a cependant accueilli très favorablement cette nouvelle activité, dans un contexte marqué par la remise en cause régulière des régimes spéciaux. De la même façon, l'INI voit, avec la reprise du CERAH, sa capacité d'expertise en matière d'appareillage renforcée.
Malgré la satisfaction générale exprimée par la très grande majorité de nos interlocuteurs, plusieurs points particuliers, liés à la réforme elle-même ou aux chantiers de modernisation en cours à l'ONAC, soulèvent encore l'inquiétude des ressortissants et de leurs représentants : outre la crainte que les services de l'office ne disposent pas de moyens humains et matériels suffisants, ceux-ci souhaitent recevoir l'assurance que les dossiers de PMI seront traités avec la même bienveillance que par le passé. Dans les deux cas, rien ne permettait, à la date de notre contrôle, de douter de la qualité du service rendu.
Autre sujet de vive préoccupation : le devenir du réseau de l'appareillage. En reprenant les consultations et prescriptions d'appareillage, le Service de santé des armées (SSA) a mis en place un maillage territorial souple, combinant sites primaires et sites secondaires et préservant la possibilité de consultations à domicile. Or, si la solution retenue a le mérite d'assurer la proximité, plusieurs éléments attestent de son caractère non pérenne : chute d'activité prévisible dans les cinq prochaines années, refus de la CNAM de conventionner, pour ses assurés, avec le nouvel opérateur, prochains départs à la retraite de nombreux médecins et techniciens et mise à disposition par le SSA de praticiens à temps complet auprès d'établissements où ils n'exerceront pourtant qu'une part très minoritaire de leur activité au profit des anciens combattants. Cette problématique se posait déjà, il est vrai, à la DSPRS avant la réforme.
La suppression des « délégués mémoire » et la mise en place de « pôles mémoire » régionalisés, qui fait craindre à certains une baisse de l'activité mémoire de l'office, devraient permettre aux directeurs, par ailleurs déchargés de tâches administratives, d'exercer pleinement leur rôle de chef de file en la matière, avec l'appui des « coordonnateurs mémoire ».
Enfin, et bien que les projets de textes correspondants aient été adoptés à une très large majorité au conseil d'administration de l'ONAC, la création de la fondation « Mémoire et solidarité pour le monde combattant », qui doit reprendre la gestion des établissements médico-sociaux de l'office - écoles de reconversion professionnelle et maisons de retraite - suscite encore, chez une minorité de représentants, la crainte d'une privatisation des établissements ou d'une perte de substance de l'ONAC. De mon point de vue, cette solution a l'avantage de répondre aux difficultés actuelles de gestion des établissements et de leur permettre de faire face aux défis nouveaux du vieillissement, de la dépendance et des handicaps sociaux tout en maintenant un lien fort avec le monde combattant, comme en atteste le fait que les associations resteront majoritaires dans le conseil d'administration de la fondation.
Au terme de cette mission de contrôle budgétaire, il nous est apparu que, dès lors que le reclassement des personnels s'opérait dans des conditions satisfaisantes, chacun avait à gagner dans la réforme :
- le contribuable, d'abord, car la rationalisation administrative doit produire, à terme, des gains financiers et de productivité importants ;
- les ressortissants, ensuite, qui bénéficieront, tout à la fois, du maintien d'un maillage territorial de proximité et de la garantie d'un haut niveau de prestations ;
- les opérateurs, enfin : l'ONAC est consacré dans son rôle de pivot du système quand les autres établissements voient leur capacité d'expertise renforcée.
Ce rapport détaille les interrogations, et parfois les craintes, exprimées par le monde combattant à mesure de l'avancement de la réforme. Nous avons reçu les responsables des principales associations qui ont tous témoigné de leur satisfaction d'avoir un secrétariat d'État bien à eux, en charge de leurs problèmes et à l'écoute de leurs aspirations.
Le monde combattant reste, en tous les cas, très vigilant sur le droit à réparation et attaché au fait que l'ONAC demeure et soit conforté. À part un seul interlocuteur, tous les représentants que nous avons rencontrés étaient sereins et confiants.
Une question se pose à propos des commissions d'appareillage : ce système paraît aujourd'hui anachronique dans la mesure où il est géré par le service de santé des armées alors que la majorité des appareillés sont désormais des civils. N'y a-t-il pas là une réforme plus profonde à engager quand on connaît la difficulté de personnes handicapées à recourir à un appareillage ? Nous ne mettons pas en cause l'organisation actuelle mais il apparaît un peu surprenant que des commissions qui dépendent du ministère de la défense examinent l'ensemble des dossiers d'appareillage.
Ce rapport présente des informations très précises et de nombreux chiffres. Ce contrôle confronte, pour la première fois, une décision prise dans le cadre de la RGPP et son application. Parmi les 1 352 équivalents temps plein dont vous nous avez dit qu'ils étaient affectés par la réforme, combien sont réellement supprimés ? Vous nous avez également indiqué que 210 sont transférés en interne et 518 aux opérateurs sur la période 2008-2012. Je souhaiterais avoir des précisions sur ces chiffres.
Quel est l'impact réel sur le budget ? Le secrétariat d'Etat aux anciens combattants semble a priori sauvé mais qu'en est-il des services départementaux de l'ONAC ? Il n'y a bien souvent que deux ou trois personnes pour assumer le travail et j'en profite pour saluer leur dévouement. Les craintes existent aussi tant sur la pérennité du droit à réparation que sur les conséquences de la suppression des délégués mémoire, à l'heure où nous devons pourtant faire vivre la mémoire.
La reprise de la gestion des établissements médico-sociaux de l'ONAC par la fondation « mémoire et solidarité pour le monde combattant » s'apparente à une privatisation. Quoi qu'il en soit, tous ces renseignements précieux nous serviront sans aucun doute pour préparer les débats budgétaires de l'automne.
Ma question est simple : est-ce que cette réforme marque le début de la disparition du secrétariat d'Etat aux Anciens combattants ?
A juste raison, les anciens combattants sont attachés à ce que l'ONAC soit préservé dans son rôle de pivot et que ses activités soient garanties. A-t-on cependant prévu, tout en préservant la spécificité des anciens combattants, la mise en oeuvre de synergies, notamment avec les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ?
Je regrette la fermeture de nombreux sites au moment où l'on cherche à promouvoir le devoir de mémoire et où l'on salue le travail des bénévoles ; ceci ne va pas forcément dans le bons sens. Nous sommes conscients de la nécessité de la réforme mais dès lors où l'on touche aux moyens humains, c'est du service de proximité qui disparaît. Dans votre rapport, vous citez le contribuable comme gagnant de la réforme alors que le budget des anciens combattants, qui est déjà en baisse, ne figure pas parmi les plus grandes masses de la loi de finances.
Il faut saluer le travail remarquable de nos deux rapporteurs et la qualité de leurs communications. Si le budget d'une mission diminue, nous devons nous en réjouir, car c'est le signe que la dépense publique peut refluer. Il a été souligné qu'avec des moyens maîtrisés le service est bien rendu et que l'on a pu assurer le reclassement des personnels sans drames humains. La RGPP est conduite, dans ce cas, avec un grand respect des personnes même si, comme l'ont souligné les rapporteurs, nous devons conjuguer le devoir de mémoire avec un nécessaire et constant devoir de vigilance.
Pour avoir été quatre ans chef de cabinet de Jean-Pierre Masseret, alors secrétaire d'Etat aux anciens combattants, j'ai connu l'adossement du secrétariat d'Etat aux anciens combattants au ministère de la défense ; dans ce cadre, la RGPP apparaît beaucoup plus simple que dans d'autres ministères. Je veux rappeler que la hantise principale de l'époque était de voir le secrétariat d'Etat rattaché au ministère des affaires sociales. En ce qui concerne la baisse des crédits, je vous assure que nous avons pu supprimer de nombreux postes budgétés tout simplement parce qu'ils n'étaient pas occupés dans les faits.
Il existe un côté surréaliste à débattre parfois d'emplois théoriques alors que l'on ne parvient pas à connaître précisément le nombre d'emplois réels dans les ministères.
Il faut rappeler que sans l'adossement au ministère de la défense, la spécificité de l'administration des anciens combattants, qui aurait alors relevé du droit commun, était perdue et c'est la raison pour laquelle le monde combattant l'a soutenu. Nous vivons aujourd'hui la suite de cette réforme et cette administration semble confortée.
Nous avons été surpris par le fait que le personnel des services départementaux de l'ONAC semblait très serein. Il se perçoit notamment comme devant assumer ce rôle de guichet unique, de « boite aux lettres », sans forcément de grands renforts. Il faut également dire que les principales associations d'anciens combattants consultées se sont montrées, devant nous, satisfaites.
Sur la question de la suppression du secrétariat d'Etat aux anciens combattants et de la création de la fondation, il sera temps d'en débattre lorsque le Parlement en sera saisi. Au final, cette réforme, en dehors de difficultés de reclassement, ne devrait pas poser de graves problèmes.
Sur la question de l'appareillage, l'évolution se serait produite même sans la réforme, par le fait de simples considérations démographiques et notamment en raison du départ à la retraite des médecins spécialisés. La possibilité de synergies avec les MDPH doit être examinée avec la plus grande prudence, car il s'agit d'un point très sensible pour les anciens combattants qui ne veulent absolument pas être considérés comme des accidentés civils. Même si certains médecins conventionnent localement avec des structures locales, dont des MDPH, il ne devrait pas y avoir de problèmes majeurs. Peut-être devrons-nous à l'avenir auditionner le président de la fédération nationale des plus grands invalides de guerre ?
Pour répondre directement sur les suppressions d'emplois, celles-ci sont au nombre de 624 suppressions nettes. En ce qui concerne les transferts internes d'emplois, ils sont opérés au sein même du ministère de la défense. Quant aux 518 transferts vers les opérateurs, il s'agit pour l'essentiel de mouvements vers l'ONAC ou le CERAH.
Je suis en total accord avec les propos de Jean-Marc Todeschini et souhaite souligner que les associations que nous avons reçues se sont montrées confiantes et sereines. Nous resterons cependant très vigilants sur les quelques sujets d'inquiétude qu'elles ont évoqués, s'agissant en particulier de l'appareillage.
Concernant les personnels des services départementaux de l'ONAC, il est vrai que certains ne seront composés que de trois ou quatre agents mais d'autres bénéficieront, si les besoins l'exigent, d'effectifs plus importants. Il faut par ailleurs rappeler que l'ONAC est conforté, budget après budget, dans sa mission d'action sociale, en particulier à l'égard des ressortissants les plus démunis ou des veuves, comme en témoigne la hausse, depuis deux ans, de sa subvention d'action sociale.
Quand on parle de rapprochement avec les MDPH, il s'agit de la gestion des dossiers et non de l'appareillage. On s'aperçoit qu'avec le reformatage du SSA, on se trouvera, à moyen terme, dans une situation de pénurie pour les disciplines d'appareillage qui voient leurs effectifs diminuer, ce qui posera un problème tant pour les bénéficiaires civils que militaires. Certes, il existe une nécessité de rationaliser l'organisation avec moins d'opérateurs. Il y a certainement quelque chose à faire et nous avons intérêt à rassembler les intervenants civilo-militaires dans une même entité.
Sur cette question, ne serait-il pas du rôle des services départementaux des anciens combattants de faire appel aux meilleures compétences ?
Le problème est qu'il existe une réelle pénurie de techniciens et de médecins dans ces spécialités, car très peu d'étudiants s'engagent dans cette filière. Le ministère des anciens combattants gérait déjà l'appareillage au bénéfice de nombreux civils, sans lesquels ce service, et notamment des centres de recherches importants comme le CERAH, ne pourrait plus exister. Cette question n'a pas été traitée par la réforme.
Il existe en effet de nombreux polytraumatisés qui bénéficient de ces appareillages.
Les civils peuvent depuis longtemps utiliser ces structures et leur part a d'ailleurs augmenté régulièrement ; il existe dans le secteur public et privé des médecins d'appareillages. Il va falloir organiser au niveau national un système pouvant répondre à tous les mutilés de la vie et il est clair que le ministère de la défense ne pourra pas payer indéfiniment des médecins mis à disposition dans les hôpitaux qui ne consacrent que 10 % de leur temps aux anciens combattants.
Nous devons rester très vigilants sur l'information des usagers, notamment sur l'appareillage. Sur toutes ces réformes, les élus locaux sont souvent questionnés et pas toujours bien informés.
Afin de permettre la meilleure information possible dans l'ensemble de nos départements et de nos communes, je vous propose d'adopter ce rapport et d'en autoriser la publication. Je tiens également à dire que je me réjouis de ces missions conjointes avec d'autres commissions et j'espère que nous continuerons. Je constate l'unanimité sur l'adoption de ce rapport, qui sera donc publié.
A l'unanimité, les commissions des finances et des affaires sociales donnent acte à M. Jean-Marc Todeschini et à Mme Janine Rozier de leur communication et en autorisent la publication sous la forme d'un rapport d'information.
Ces travaux conjoints sont, en effet, fort utiles et nous aurons l'occasion, d'ici à la fin de l'année, d'adopter la même démarche sur la question des régimes spéciaux de retraite de la SNCF et de la RATP ainsi que sur celle de l'évaluation des coûts de l'allocation aux adultes handicapés.
- Présidence de M. Jean Arthuis, président -
M. le président du Sénat nous demande de désigner un membre de la commission pour siéger au sein du conseil supérieur des prestations agricoles, en application de l'article D. 721-3 du code rural. Je vous propose de reconduire le titulaire sortant, notre collègue Jean-Jacques Jégou.
est désigné comme candidat au poste de sénateur appelé à siéger au sein du conseil supérieur des prestations agricoles.
- Présidence de M. Jean Arthuis, président, et de M. Philippe Adnot, secrétaire -
La commission entend ensuite une communication de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur la situation économique et financière de l'Italie et de la Croatie, en présence d'une délégation de la commission des finances et du budget du parlement croate, conduite par son président Goran Mariæ.
C'est un grand privilège pour nous de pouvoir entendre ces communications en présence de représentants de la commission des finances et du budget du Parlement croate, le Sabor.
Nous avons le plaisir d'accueillir M. Goran Mariæ, président de la commission, Mme Nevenka Majdeniæ, membre de la commission et également présidente de la commission des élections, des nominations et de l'administration, M. Zlatko Koraèeviæ, membre de la commission et également président de la commission du développement régional, de la forêt et de la gestion de l'eau, Mme Nada Èavloviæ Smiljanec, membre de la commission, et M. Dino Buleiæ, responsable du secrétariat de la commission.
Cette visite de nos collègues croates, qui fait suite à une invitation lancée en janvier par le rapporteur général, lorsqu'il a été reçu au Sabor, est particulièrement précieuse car nous sommes désireux de mieux connaître la Croatie, qui devrait devenir en 2012 le 28ème membre de l'Union européenne. En outre, en cette période de crise, les contacts bilatéraux sont indispensables pour échanger des analyses et élaborer des solutions.
Hier, nos collègues croates ont eu des échanges techniques avec le secrétariat de la commission, portant notamment sur les pouvoirs budgétaires du Sénat et de la commission des finances, sur le rôle de notre commission dans l'examen des textes non budgétaires et sur nos relations avec la Cour des comptes.
procédant à l'aide d'une vidéo-projection). - Je me déplace autant que possible dans des capitales européennes car une monnaie commune sans gouvernement économique rend nécessaire la multiplication des contacts bilatéraux. S'agissant de l'Italie, où je me suis rendu du 2 au 4 mai 2010, il est intéressant d'observer une situation différente de celle de la France, caractérisée par un endettement public depuis longtemps supérieur à 100% du produit intérieur brut, un déficit budgétaire sous contrôle et, face la crise, l'absence de mise en oeuvre d'un plan de relance. L'Italie s'apparente à une « zone euro miniature », avec un nord prospère et un sud dont le niveau de développement est plus proche de celui de la Grèce.
L'Italie, comme l'Allemagne, a subi en 2009 un recul de son PIB de près de 5 %. En 2010, la reprise serait modérée avec un taux de croissance d'environ 1 %. La baisse de l'activité s'explique essentiellement par la chute de la demande externe. Dans certains secteurs, comme par exemple les biens d'équipement, la production est encore aujourd'hui inférieure de 20 % à 30 % à ce qu'elle était avant la crise. 360 000 emplois auraient disparu entre 2008 et 2009, le taux de chômage s'élevant à 8,7 % en 2010. Il faut noter la qualité de la méthodologie mise en oeuvre par l'Italie pour quantifier l'économie informelle prise en compte pour le calcul du revenu national.
L'une des explications de l'ampleur de la récession est l'absence de relance budgétaire en Italie, qui lui a permis de ne pas perdre totalement le bénéfice des efforts produits avant la crise et de conserver un déficit public sous contrôle. Malgré des prévisions de croissance moins bonnes que celles de la France, la trajectoire de solde de l'Italie est calée sur celle de l'Allemagne, voire un peu meilleure. Cela s'explique autant par la vertu que par la contrainte, compte tenu de son niveau d'endettement public, qui constitue une grande source de fragilité. Son ratio dette/PIB est le plus élevé de l'Union européenne avec celui de la Grèce, et la crise l'a fait remonter à son niveau de la fin des années 1990, au-delà de 115 % du PIB. L'endettement public élevé s'accompagne cependant d'un faible niveau d'endettement privé, qui permet à l'Italie de financer sa dette publique principalement auprès de résidents, plutôt des ménages. Cette « force » avait été soulignée par l'agence Moody's au mois de décembre 2009.
L'Italie n'a pas connu de crise financière, ni de bulle immobilière comparable à celles qui sont apparues dans d'autres Etats européens. La lenteur de la reprise s'explique par la dépendance à l'égard de la demande internationale. Dans la crise, le système financier que l'on dit parfois archaïque, fait de fondations et de petites banques « de proximité », a plutôt constitué un atout en permettant d'accompagner les petites et moyennes entreprises de manière adaptée à chaque province.
Pour autant, l'Italie connaît toujours des difficultés structurelles qu'elle devra surmonter, en particulier son déclin démographique, l'ampleur de son économie informelle, des phénomènes d'évasion fiscale et un taux de prélèvements obligatoires élevé, proche de celui de la France. Il existe dans ce pays une réflexion sur l'amélioration de la compétitivité par la réorientation d'une partie des prélèvements obligatoires vers les impôts indirects.
L'Italie s'est dotée depuis deux ans d'un nouveau cadre institutionnel en matière de finances publiques. Il repose, en premier lieu, sur la loi du 5 mai 2009 relative à la mise en oeuvre du fédéralisme fiscal, qui est issue d'un accord politique entre le Peuple de la liberté du président du Conseil, Silvio Berlusconi, et son allié la Ligue du Nord, et qui reflète la volonté de cette dernière de revoir les relations financières entre les différentes composantes territoriales de l'Italie. Le second pilier est la loi du 31 décembre 2009 « de comptabilité et de finances publiques », inspirée par des principes proches de ceux sur lesquels repose notre loi organique relative aux lois de finances. Pour superviser la mise en oeuvre de ces deux textes, les deux chambres du Parlement ont créé une structure commune.
Ce nouveau cadre institutionnel permet une meilleure articulation entre les calendriers budgétaires européen et national. En 2003, la « loi de finances » est devenue la « loi de stabilité ». Les orientations budgétaires triennales sont transmises au Parlement avant l'été, arrêtées en septembre dans le cadre d'une « décision des finances publiques » adoptée par le Parlement mais n'ayant pas le caractère de loi, et déclinées dans les lois budgétaires. Le programme de stabilité est communiqué au Parlement au moins deux semaines avant sa transmission au Conseil et à la Commission européenne.
L'Italie s'est dotée de deux dispositifs de pilotage global des finances publiques : le pacte de stabilité interne, qui vise à associer l'ensemble des administrations publiques au respect de la trajectoire de finances publiques et prévoit des mécanismes de récompense et de sanction à l'égard des collectivités qui ne respectent pas leurs engagements, et le pacte de convergence, issu de la loi sur le fédéralisme fiscal, qui a vocation à définir, pour les compétences obligatoires financées par l'Etat, des « coûts standards » uniformes pour l'ensemble des régions, les surcoûts éventuels étant mis à la charge des autorités locales.
En matière de procédure budgétaire, l'Italie a renforcé ses règles de « couverture financière » des mesures ayant un impact sur le solde des administrations publiques et des « clauses de sauvegarde » doivent désormais être prévues pour les mesures dont le coût ne peut être défini avec précision à l'avance. Ces mesures s'appliquent automatiquement en cas de dérapage de la dépense. Les services techniques des deux chambres du Parlement ont accès à des données leur permettant d'évaluer la pertinence des chiffrages établis par les services du Gouvernement.
L'économie italienne redémarre progressivement malgré l'absence de plan de relance, ce qui a permis de contenir la dégradation du déficit budgétaire en période de crise.
L'impact de l'économie informelle sur le PIB est-il pris en compte dans le calcul des contributions de l'Italie au budget européen ?
Tous les Etats prennent en compte des estimations de l'économie informelle dans le calcul de leur revenu national. En France, en 2000, les redressements effectués représentaient 47,3 milliards d'euros, soit 3,3 % du PIB.
Quel est le poids du secteur public en Italie ? Des mesures comparables à celle consistant à ne pas remplacer un départ en retraite sur deux dans le secteur public sont-elles mises en oeuvre ?
A-t-on une idée du rôle de la mafia dans l'organisation de l'économie informelle ?
Ma mission n'a pas été suffisamment longue et approfondie pour me permettre de répondre à cette question.
Le poids du secteur public est comparable à celui de la France, et de mesures de même esprit y sont appliquées.
Il ressort de la communication du rapporteur qu'il y a beaucoup à retenir de l'expérience italienne. Existe-t-il une convergence de vue entre l'Italie et la France sur la façon de gérer la crise de l'euro ?
L'Italie et la France ont rapidement pris les dispositions d'ordre interne pour permettre la mise en oeuvre du dispositif d'aide à la Grèce, la France procédant par collectif budgétaire et l'Italie par décret-loi. Sur le fond, nous ne devons pas hésiter à nous concerter car l'Italie a une approche rigoureuse en matière de gestion des finances publiques, est attachée à la monnaie unique et soutient les efforts de renforcement de la gouvernance économique de la zone euro.
La commission remercie le rapporteur général pour sa communication sur la situation économique et financière de l'Italie et va à présent entendre celle consacrée à la situation de la Croatie.
Je me suis rendu à Zagreb du 17 au 19 janvier 2010 afin de mieux connaître le futur 28ème membre de l'Union européenne, d'analyser l'impact de la crise sur les négociations d'adhésion et de me rendre compte de sa capacité à « absorber » les fonds européens.
La Croatie a une superficie supérieure à celle des Pays-Bas et du Danemark et inférieure à celle de la Lettonie ou de l'Irlande. Sa population est environ deux fois plus élevée que celle de la Slovénie et s'élève à 4,4 millions d'habitants, dont près d'un quart à Zagreb. La Croatie partage avec les Etats de l'Europe de l'ouest, de manière peut-être même plus aiguë, la forte exposition de son économie aux risques de délocalisation puisqu'elle est frontalière de pays parlant la même langue et dont le coût du travail est très inférieur à celui de sa main d'oeuvre.
L'adhésion de la Croatie à l'Union européenne devrait intervenir en 2012, mais des chapitres de négociation importants restent à ouvrir, en particulier celui de la politique étrangère, de sécurité et de défense, bloqué en raison du différend territorial avec la Slovénie, ceux de la concurrence ainsi que de la justice et des droits fondamentaux, sachant que les exigences imposées à la Croatie, notamment en matière de lutte contre la corruption, sont renforcées par rapport aux procédures appliquées aux précédents entrants dans l'Union européenne. Il serait utile de connaître le sentiment de nos invités sur les facteurs de blocage du chapitre « Justice et droits fondamentaux », sur la capacité de la Croatie à achever les négociations en 2010 et sur l'état de l'opinion publique, qui était partagée au mois de janvier, au sujet de l'adhésion.
Je tiens d'abord à remercier, au nom de l'ensemble de la délégation, les membres de la commission des finances du Sénat français pour la qualité de leur accueil.
La crise n'a en effet pas évité la Croatie, comme le montrent plusieurs indicateurs économiques : le PIB a diminué de 5,8 % en 2009, la production industrielle de 9 % et les exportations de plus de 20 %. Le problème le plus grave reste le chômage, qui touche 21 % de la population active. La Croatie connaît également des retards de paiements importants, comme l'ensemble des pays en transition.
Par ailleurs, la dette extérieure croate est relativement élevée ; elle représente 98 % du PIB et a cru de 4 milliards d'euros entre 2008 et 2009. Le pays est donc dans une situation économique très grave.
Toutefois, certains signes sont encourageants. La Croatie a su conserver la stabilité de son système bancaire, aucun établissement de crédit n'ayant fait faillite. Les prix et la monnaie sont également restés stables, ce qui a contribué à l'efficacité des mesures prises par le Gouvernement pour lutter contre la crise.
Au premier semestre de 2010, le rythme de baisse du PIB a ralenti à 1,5 %. Les recettes fiscales sont supérieures de 2,8 % à celles de la même période en 2009, ce qui permet de conserver un équilibre entre les ressources et les dépenses budgétaires. La production industrielle a augmenté de 0,3 % sur la même période et les exportations de 5 %.
Le gouvernement croate a prévu un nouveau train de mesures visant à une baisse des dépenses publiques, à une réduction à 45 jours des délais de paiement et à une meilleure efficacité des sociétés encore détenues par l'Etat. Certaines participations de l'Etat dans des sociétés privées seront d'ailleurs cédées, ce qui devrait générer un produit supérieur à un milliard d'euros.
En 2009, le produit national brut de la Croatie a été égal à celui de l'année 2006 mais nous avons bon espoir qu'il ne diminue pas en 2010. Le déséquilibre entre les importations et les exportations reste modéré et les perspectives en matière de développement touristique sont positives.
Les indicateurs seraient toutefois meilleurs si les taux d'intérêt étaient moins élevés.
La Croatie est désormais une démocratie apaisée, avec un gouvernement de centre-droit qui « cohabite » avec un président de centre gauche. Son entrée dans l'Union constituerait à la fois un espoir pour les pays balkaniques, un facteur de normalisation des relations entre Etats issus de l'ancienne Yougoslavie et permettrait d'étendre la sphère d'influence de l'Union européenne. J'ai eu le sentiment que l'action de la France y était appréciée. Les contacts se multiplient, comme en témoigne la visite du président Gérard Larcher en octobre 2009, mais les relations commerciales restent limitées, la France n'étant que le dixième client et le septième fournisseur de la Croatie.
La perspective d'adhésion accélère les réformes structurelles dans ce pays en pleine convergence. Le PIB par habitant représente désormais environ 60 % de la moyenne européenne. Il a progressé fortement ces dernières années et dépasse celui de la Bulgarie, de la Roumanie, de la Lettonie, de la Pologne ou encore de la Turquie. L'euro est déjà largement la devise de l'économie croate. La parité entre la monnaie nationale, la kuna, et l'euro est stable malgré la crise. Plus de 90 % des banques appartiennent à des groupes étrangers et la majorité des crédits et des dépôts sont libellés en euro. En revanche, on ne connaît pas encore les incidences de la crise grecque sur la possible adoption de la monnaie européenne par la Croatie et sur l'évolution des critères d'entrée dans la zone euro. De nombreuses faiblesses structurelles restent à surmonter et la question qui se pose est celle du consensus politique sur les réformes à conduire.
On peut considérer que la crise, qui s'est traduite par une récession de 5,8 %, a été habilement gérée par la Banque centrale et le Gouvernement, qui a mis en oeuvre un plan de relance limité et centré sur le développement de l'offre.
L'adhésion de la Croatie représente un défi à relever pour l'Union européenne. Des interrogations subsistent sur la capacité, d'une part, à mettre en oeuvre une politique efficace de lutte contre la corruption et de consolidation de l'Etat de droit et, d'autre part, à « absorber » les fonds structurels. L'expérience de la Grèce plaide pour un renforcement des contrôles et de l'évaluation de leur utilisation. Cependant, un échec de la candidature croate enverrait un signal très négatif en direction des Etats de la région et par conséquent la France doit poursuivre son soutien aux efforts de la Croatie.
Il est clair que la Croatie est capable de réaliser tous les efforts nécessaires pour répondre aux critères d'adhésion à l'Union européenne. Les négociations peuvent s'achever en 2010 et l'adhésion avoir lieu au 1er janvier 2012. Dans les derniers sondages, seule la moitié de la population croate semblait favorable à l'adhésion. Toutefois, nombreux sont ceux qui ne se déclarent pas favorables mais qui, en réalité, hésitent et n'ont pas encore forgé leur opinion. L'adhésion à l'Union européenne est la seule voie possible.
Des facteurs de scepticisme à l'égard de l'Union persistent. Ainsi, de nombreux croates estiment que les conditions d'adhésion imposées à leur pays sont plus strictes que celles qui ont été fixées pour la Slovénie, par exemple.
La crise économique mondiale et la crise grecque en particulier ont également eu des incidences négatives sur l'opinion publique. Un certain manque de sérieux de la Grèce a pu être perçu, la situation n'étant pas parfaite dans l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne.
Ces crises ont-elles renforcé la volonté des pouvoirs publics de maîtriser les finances publiques ?
Absolument. Même si une partie importante du budget de l'Etat est consacrée au financement des réparations des destructions liées à la guerre. Des efforts majeurs sont aussi conduits dans la lutte contre la corruption, comme l'indique le nombre élevé d'anciens gérants de sociétés actuellement en détention provisoire.
Je souhaite remercier la délégation de sa venue en France et lui poser deux questions. L'adhésion à l'Union européenne fera-t-elle l'objet d'un referendum ou d'un vote du Parlement ? La Croatie va-t-elle demander simultanément son entrée dans la zone euro ?
L'adhésion se fera par un vote du Parlement, en raison du large consensus politique qui règne sur ce sujet. Elle ne nécessite par un référendum. Concernant l'adoption de l'euro, les avis sont partagés. Certains pensent qu'il faudrait conserver, pendant un temps, la kuna. A titre personnel, je suis favorable à une adhésion la plus rapide possible à la zone euro, à laquelle la Croatie est structurellement prête.
Heureusement, la zone euro a su réagir à la crise grecque mais si cette crise devait se prolonger, elle aurait nécessairement un impact sur notre pays.
A l'issue de cet échange, la commission donne acte de sa communication à M. Philippe Marini, rapporteur général.
- Présidence de M. Jean Arthuis, président -