Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission entend tout d'abord une communication de Mme Catherine Morin-Desailly sur le projet de contrat d'objectifs et de moyens (COM) entre l'Institut national de l'audiovisuel et l'Etat pour la période 2010-2014.
Je commencerai par quelques remarques préliminaires. L'Institut national de l'audiovisuel, créé en 1974 par un amendement sénatorial, est un établissement que le reste du monde nous envie. Il s'agit de la première banque d'archives numérisées en Europe. Voilà une entreprise dynamique et résolument tournée vers le futur, qui a réussi avec brio la révolution numérique, alors même que l'on aurait pu penser que son coeur de métier, la conservation des archives, l'immobiliserait dans le passé. Son savoir-faire exceptionnel en matière de numérisation en fait une référence, en France comme à l'étranger, lorsqu'il s'agit de former aux métiers de l'image en même temps qu'aux métiers de l'informatique. A l'heure du média global qui veut que les professionnels de l'image et de l'information soient capables de produire pour tous les supports, l'expérience de l'INA est un véritable joyau sur lequel il faut capitaliser.
Afin de prolonger la dynamique des deux précédents contrats, ce troisième COM met en avant trois objectifs stratégiques pour la période 2010-2014 : la sauvegarde et l'enrichissement du fonds d'archives de l'INA, la valorisation et la commercialisation de ses collections et le développement de l'enseignement à l'image et aux médias.
En matière de sauvegarde des archives, l'enjeu consistera à poursuivre la mise en oeuvre du plan de sauvegarde et de numérisation et à en étendre le périmètre à d'autres archives menacées de dégradation. Ce plan se verra alloué un montant de 51,6 millions d'euros pour la période 2010-2014. Toutefois, il devrait rester environ 100 000 heures à numériser pour un montant de 22 millions d'euros qui n'est pas abondé par le COM. C'est pourquoi l'INA a élaboré un projet visant à accélérer la mise en oeuvre du plan mais aussi à étendre son périmètre à d'autres fonds qui présentent de nouvelles menaces de dégradation. L'idée est que ce projet pourrait être financé à hauteur de 51,4 millions d'euros par le grand emprunt national. C'est seulement si l'INA parvient à maintenir son avantage compétitif dans le domaine de la numérisation que ses recettes commerciales continueront à augmenter. Le plan de numérisation est donc capital à cet égard.
C'est pourquoi je vous propose que notre commission apporte son soutien total à ce projet en appelant à ce qu'il soit rapidement validé dans le cadre du grand emprunt national.
Par ailleurs, le fonds de programmes collectés par l'Institut au titre du dépôt légal de la radio et de la télévision constitue une source d'information exceptionnelle pour les chercheurs et les universitaires. Or, la loi n'autorise à rendre consultable le dépôt légal que dans les emprises de l'INA. Afin de décentraliser l'accès au dépôt légal et d'éviter aux chercheurs d'avoir à se rendre à Paris, l'INA a équipé ses six délégations régionales de points de consultation du dépôt légal. Toutefois, au-delà des points de consultation physiques, c'est véritablement l'accès en ligne au dépôt légal des chercheurs accrédités qu'il faut développer.
C'est pourquoi je vous propose de recommander la mise en place d'un service d'accès en ligne sécurisé à destination des chercheurs accrédités qui soit notamment disponible dans le réseau des bibliothèques de dépôt légal imprimeur et les universités ayant conclu un partenariat avec l'INA. Ce service d'accès en ligne pourrait, le cas échéant, prendre la forme d'un extranet. Un indicateur de suivi mesurant le nombre de consultations à caractère scientifique du dépôt légal hors de la BNF pourrait ainsi être renseigné chaque année dans le contrat d'exécution du COM.
L'INA devra également bientôt mettre en oeuvre le dépôt légal de l'Internet, introduit par la loi Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information (DADVSI) du 1er août 2006. Toutefois, le décret sur le dépôt légal du web n'est pas encore paru.
C'est pourquoi nous devrions exiger la parution dans les plus brefs délais du décret relatif au dépôt légal de l'Internet et appeler l'INA à renseigner dès le prochain rapport d'exécution du COM le nombre de sites web captés au titre du dépôt légal, le cas échéant au travers d'un indicateur cible.
En matière de valorisation et de commercialisation des collections, j'insisterai sur le défi du rétrécissement du périmètre des droits commercialisables de l'INA. En effet, les principales chaînes de télévision sont devenues les propriétaires d'un nombre de plus en plus important de leurs programmes d'archives, en particulier depuis les années 1990. Plus on avance dans le temps, plus le nombre de programmes que l'INA pourra exploiter sous forme intégrale diminuera.
Pour faire face à ce défi, l'INA compte, d'une part, mettre l'accent sur la commercialisation des extraits d'archives pour lesquels l'Institut a développé un vrai savoir-faire en termes d'éditorialisation et de mise à disposition du grand public avec le site ina.fr, et, d'autre part, enrichir son catalogue de programmes en accueillant de nouveaux fonds d'archives par le biais des prises de mandats d'exploitation. Ce procédé permet à des chaînes mais aussi à des producteurs privés indépendants de confier leurs archives à l'INA qui se charge de les numériser et ensuite de les commercialiser. Par exemple, TF1 a confié à l'INA la gestion de 31 000 heures de ses programmes d'actualité, et ce mandat a représenté à lui seul pas moins de 50 % du chiffre d'affaires total de l'INA au titre de ses mandats d'exploitation. Je rappelle aujourd'hui que l'INA réalise 90 % de son chiffre d'affaires global de cessions de droits à partir de seulement 5 % de ses archives. Les marges de progression sont donc encore substantielles.
Le service en ligne Inamediapro.com permet l'accès des professionnels aux contenus numérisés par l'intermédiaire d'un extranet. Il constitue une source dynamique de recettes commerciales : l'INA dispose de 10 000 clients professionnels dont 30 % sont à l'étranger. Le site « ina.fr » ouvert en 2006 permet désormais au grand public de visionner près de 25 500 heures de programmes en 2009. L'objectif en termes d'heures de programmes accessibles en ligne pour le grand public a été constamment dépassé entre 2006 et 2009, avec une augmentation sur la période de 108 %. Or, le projet de COM table sur une augmentation de seulement 28 % de cet indicateur sur la période 2010-2014.
C'est pourquoi je vous propose d'inciter l'INA et l'Etat à se fixer des objectifs plus ambitieux en termes de contenus numérisés accessibles en ligne pour le grand public dans la mesure où la progression affichée pour la période 2010-2014 est presque quatre fois moins importante que celle observée sur la période 2006-2009.
En matière d'enseignement à l'image et aux médias, l'INA aura pour objectif de créer, au sein du pôle « Université Paris Est », une filière d'excellence dans les métiers de l'image et du numérique. A cet égard, l'INA envisage un vaste projet de développement immobilier sur le site de Bry-sur-Marne de 75 millions d'euros, dont 55 seront apportés par l'Etat et les 20 restants prélevés sur le fonds de roulement de l'INA.
Aujourd'hui, le site de Bry-sur-Marne ne répond plus aux normes de sécurité pour le stockage des archives. Il suffirait d'une étincelle pour que la plus grande partie de notre patrimoine audiovisuel parte en fumée. Le projet immobilier prévoit donc la rénovation de la partie « conservation » du site, en même temps que la constitution d'un pôle universitaire.
Compte tenu des enjeux majeurs qui s'attachent à ce gigantesque projet immobilier, je vous propose de recommander qu'un calendrier précis de mise en oeuvre du projet immobilier soit renseigné dès le prochain rapport d'exécution du COM, en détaillant le montant des investissements engagés chaque année. Les rapports d'exécution devraient également renseigner chaque année un indicateur de suivi mesurant la part des supports physiques et numériques conservés en environnement contrôlé et sécurisé. Les difficultés de l'INA, depuis 2007, pour atteindre ses objectifs en matière de sécurisation de ses capacités de stockage plaident clairement pour le maintien de cet indicateur.
Par ailleurs, l'INA dispose d'une offre de formation qui séduit bien au-delà du public universitaire. Même les banques ont recours à l'Institut pour la numérisation et la sécurisation de leurs données.
C'est pourquoi nous pourrions recommander que l'INA renseigne chaque année un indicateur de suivi mesurant le nombre d'heures de formation dispensées auprès d'organismes extérieurs de tous types ou mesurant les recettes propres générées par l'activité de formation de l'INA.
Pour financer l'ensemble de ces objectifs, l'INA s'appuiera sur deux types de ressources. D'un côté, ses ressources propres générées par ses recettes commerciales, d'un montant de 38 millions d'euros en 2009, devraient progresser de 13,5 % sur la période 2010-2014. De l'autre, ses ressources publiques, principalement constituées par la quote-part de la contribution à l'audiovisuel public pour un montant de 84 millions d'euros en 2009, devraient continuer à augmenter de 9 % sur la période 2010-2014. Grâce à notre commission, la contribution à l'audiovisuel public constitue une ressource pérenne et dynamique du fait de sa récente augmentation et de son indexation. Dans la mesure où l'INA a prouvé, avec un très grand succès, que ses activités constituaient une continuité et un complément indispensables des activités des diffuseurs, notamment des chaînes publiques, et compte tenu de l'ampleur de ses projets futurs, le fait de lui attribuer une part de la contribution à l'audiovisuel public me semble désormais tout à fait justifié.
En outre, l'INA a fourni d'importants efforts de maîtrise de ses frais de structure. Il doit continuer à être encouragé dans ce sens.
C'est pourquoi il serait utile de conserver dans le nouveau COM l'ancien indicateur mesurant la part des frais généraux dans les charges d'exploitation pour continuer à suivre la maîtrise par l'INA de ses frais de structure. Cet indicateur reste important au regard de l'information du citoyen pour montrer que l'argent public est bien destiné à des actions dont il bénéficie. Cet indicateur est d'ailleurs commun à toutes les sociétés de l'audiovisuel public. Pour plus de cohérence, je vous propose donc de recommander qu'il soit conservé dans le prochain COM.
Enfin, en matière de rayonnement de notre patrimoine audiovisuel à l'international, l'INA doit, selon moi, jouer pleinement son rôle. Il doit impérativement resserrer ses liens avec les opérateurs de notre action culturelle et audiovisuelle à l'étranger pour développer son ouverture internationale. Dans cette logique, nous pourrions recommander que l'INA conclue un partenariat pluriannuel avec le futur Institut français qui devrait bientôt se voir reconnaître par la loi une compétence en matière de diffusion de notre patrimoine audiovisuel à l'étranger. Dans le cadre de cet accord, l'Institut français devrait mobiliser les moyens de notre réseau culturel pour diffuser les programmes de l'INA et, en échange, l'INA pourrait participer à la formation de nos attachés culturels dans les domaines de la numérisation et de l'image. Je vous propose de recommander également que l'INA conclue un partenariat avec la société Audiovisuel extérieur de la France. L'INA a tout intérêt à s'intéresser à la gestion des archives de RFI, de France 24 et de TV5 Monde et à aider à former leurs personnels. Nous pourrions enfin recommander que l'INA développe des fonctions de conseil et d'ingénierie auprès de nos partenaires francophones africains et au Moyen-Orient pour la sauvegarde de leurs archives.
En conclusion, mes chers collègues, je vous propose de donner un avis favorable à la signature du projet de COM entre l'INA et l'Etat pour la période 2010-2014, en l'assortissant des recommandations que j'ai formulées précédemment.
En tant que représentant du Sénat au sein du conseil d'administration de l'INA, j'ai eu l'occasion de constater le dynamisme et l'ambition qui animent cette entreprise, et je partage totalement les recommandations formulées par notre collègue. Le plan de sauvegarde et de numérisation mis en oeuvre par l'INA est exemplaire et unique au monde, il avance à bon train. En 1974, le Parlement a imaginé un concept novateur : séparer juridiquement les organismes responsables de la diffusion et de la conservation des documents audiovisuels. La conservation des archives audiovisuelles est ainsi devenue un objectif à part entière, traité prioritairement par un organisme aux moyens bien identifiés, alors qu'elle est parfois diluée parmi les autres activités audiovisuelles chez nos partenaires étrangers, voire effacée au profit de la diffusion.
En ce qui concerne le dépôt légal de l'Internet, il me semble impératif de préciser avec soin les rôles respectifs de l'INA et de la BNF. Je rappelle également que l'INA a breveté une nouvelle technologie de filtrage, appelée « Signature », qui offre la possibilité d'empêcher la mise en ligne de vidéos lorsque les ayants droit ne le souhaitent pas ou de gérer des accords concernant ces contenus. Cette innovation technologique a permis de rassurer considérablement les clients de l'INA en matière de sécurisation de l'exploitation de leurs documents d'archive.
Se pose enfin la question de la pérennité des supports, impliquant que des techniques soient adoptées afin que les contenus soient régénérés rapidement sur de nouveaux supports. A cet égard, l'Académie des sciences vient de publier un rapport précisant que les fréquences de renouvellement sont de dix ans, ce qui est un peu court, notamment beaucoup plus court que pour d'autres supports magnétiques antérieurs.
Un dernier mot sur la situation sociale de l'entreprise. J'ai pu constater au conseil d'administration que les relations entre la direction et les représentants syndicaux étaient bonnes même si de nouveaux défis sont en cours, que le nouveau président Matthieu Gallet aura à relever.
Savez-vous, Mme le rapporteur, si des sanctions pénales sont aujourd'hui prévues en cas de non respect des obligations liées au dépôt légal de l'Internet ? En matière de formation, il faut, à mon sens, que l'on réfléchisse sérieusement aux possibilités d'élargir l'offre de l'INA à tous les publics, en investissant notamment dans la formation à distance, le cas échéant par le biais d'un partenariat avec le Centre national d'enseignement à distance (CNED).
La photographie constitue un fonds d'archives exceptionnel qu'il faut valoriser et j'aurais voulu savoir dans quelle mesure l'INA pourrait intervenir dans ce sens, notamment en partenariat avec la Réunion des monuments nationaux. Je rejoins également mes collègues sur ce qui a été dit sur l'ampleur du défi que représente la mise en oeuvre du dépôt légal de l'Internet.
Il faut souligner, d'autre part, que la dimension du défi est amplifiée par le développement extraordinaire de la mission de l'INA. A cet égard, le volume de la saisie d'Internet est incroyablement élevé. Cette saisie est certes utile : dans le cadre de l'élaboration du rapport sur la grippe, sans la possibilité d'accéder aux pages Internet antérieures, nous n'aurions pas obtenu la preuve que l'OMS avait modifié sa définition de la pandémie en mai 2009. Il me semble que ce développement des missions de l'INA est considérable. L'Académie des sciences est très optimiste quand elle affirme que la fréquence de renouvellement des contenus est de dix ans, certains affirmant même qu'elle est de cinq ans. Il faut que les autorités publiques soient bien conscientes du fait qu'un accroissement des moyens de l'INA doit aller de pair avec l'élargissement de ses missions.
Vous dites que le projet immobilier de l'INA sera financé par l'Etat à hauteur de 55 millions d'euros, le reste étant prélevé sur son fonds de roulement. Est-ce que ce fonds de roulement est suffisant aujourd'hui ? Vous préconisez, par ailleurs, que l'accélération et la poursuite du plan de sauvegarde et de numérisation de l'INA soient validées dans le cadre du grand emprunt national. Pour quel montant ?
Quelles formes devrait prendre ce financement ? Avez-vous une idée des retours sur investissement envisagés ?
Vraisemblablement le financement interviendra sous la forme de prêts accordés dans le cadre du grand emprunt. L'INA a élaboré un projet très précis d'accélération et d'extension de son plan de sauvegarde et de numérisation (PSN) qui en souligne les impacts économiques, culturels et éducatifs et qui précise naturellement les retours sur investissement qui en sont attendus, ceux-ci conditionnant l'octroi d'une aide dans le cadre du grand emprunt national.
Le projet immobilier de l'INA se déroulera-t-il sur le seul site de Bry-sur-Marne ? Le pôle universitaire que vous évoquiez sera-t-il créé ou existe-t-il déjà et est appelé à être étendu ?
Si vous me le permettez, je répondrai d'abord aux questions d'ordre financier qui m'ont été posées. Le projet immobilier de Bry-sur-Marne est évalué à 75 millions d'euros, 55 millions d'euros étant apportés par l'Etat et les 20 millions restants seront effectivement prélevés sur le fonds de roulement de l'INA, qui s'élève aujourd'hui à 30 millions d'euros, ce qui est un résultat exceptionnel. Pour répondre à notre président, le développement immobilier envisagé ne concernera que le site de Bry-sur-Marne et comportera bien deux volets : d'une part, la rénovation de son pôle « conservation » afin que le bâtiment réponde aux normes de sécurité, et, d'autre part, la création d'un pôle universitaire pour consolider une filière d'excellence dans les secteurs de l'image et du numérique à l'Est de Paris, dans le cadre du projet du Grand Paris. Je rappelle, à ce titre, que l'INA dispose déjà d'une longue expérience universitaire puisque l'InaSup' a diplômé, en 2009, 239 étudiants.
S'agissant du dépôt légal de l'Internet, le projet de décret préparé par le ministère de la culture et de la communication prévoit, après une longue période de consultations et de négociations, une répartition des responsabilités entre l'INA et la Bibliothèque nationale de France (BnF). En l'absence de parution de ce décret, les sanctions pénales prévues par le code du patrimoine en cas de non respect volontaire des obligations de dépôt légal ne peuvent évidemment s'appliquer. En tout état de cause, cet avis sera l'occasion pour notre commission de rappeler, encore une fois, l'urgence pour le Gouvernement de publier des décrets d'application qui se font attendre de longue date. Je rappelle, par ailleurs, que la mise en oeuvre du dépôt légal a fait l'objet d'une longue phase de préfiguration au sein de l'INA qui est désormais préparé à capter entre 4 000 et 6 000 sites web par an.
J'adhère totalement à la proposition de notre collègue Françoise Laborde qui a raison de souligner la nécessité d'élargir les publics auxquels l'INA doit s'adresser en matière de formation et je propose d'intégrer dans le rapport une recommandation visant à développer l'offre de formation de l'INA à distance.
En matière de photographie, je crois savoir que l'INA dispose déjà d'un fonds de photographies mais dont l'exploitation n'en est probablement encore qu'à ses débuts. A l'évidence, il serait intéressant qu'elle participe à la valorisation de notre patrimoine photographique en s'appuyant sur sa longue expérience en matière de numérisation et en envisageant éventuellement un partenariat avec la Réunion des monuments nationaux.
Je vous remercie pour vos précisions. Mes chers collègues, êtes-vous favorables aux conclusions de notre rapporteur ?
A mon sens, l'INA est sans doute l'une des plus nobles de nos structures intervenant dans le secteur de l'audiovisuel. Une fois n'est pas coutume, notre groupe votera donc pour l'adoption des conclusions de notre collègue Catherine Morin-Desailly.
Notre groupe n'a pas reçu de consigne de votre sur ce sujet, mais compte tenu des explications de notre rapporteur, nous voterons également en faveur de l'adoption de ses conclusions.
La commission adopte à l'unanimité les conclusions du rapporteur dont elle autorise la publication et donne un avis favorable au projet de contrat d'objectifs et de moyens entre l'Institut national de l'audiovisuel et l'Etat pour la période 2010-2014.
La commission entend le rapport de Mme Françoise Férat, au nom du groupe de travail sur le Centre des monuments nationaux (CMN).
Vous avez confié au groupe de travail dont j'ai l'honneur d'être aujourd'hui le rapporteur, une mission extrêmement importante et passionnante sur l'avenir du CMN.
À l'occasion du débat en séance sur le projet de loi de finances pour 2010, notre commission s'était interrogée en découvrant l'article 52. Son contenu nous avait paru discutable pour deux raisons : tout d'abord il prévoyait de relancer la décentralisation opérée en application de la loi du 13 août 2004, sans aucun bilan préalable de la première vague de transferts ; ensuite et surtout, il n'encadrait ce processus d'aucune précaution permettant de garantir la cohérence de la politique patrimoniale nationale. Cette carence mettait en danger l'avenir du Centre des monuments nationaux. Rappelons que sa mission séculaire est de mutualiser les moyens entre les monuments historiques dont il a la charge, au profit d'une politique nationale cohérente du patrimoine monumental de l'État.
Le groupe de travail a constaté que le CMN est un outil précieux au service d'une politique dynamique de protection et de valorisation du patrimoine de l'État. Avec sa présidente, l'établissement a poursuivi ses efforts pour définir une approche pragmatique de ses missions. Celles-ci devaient nécessairement évoluer pour tenir compte la nouvelle compétence de la maîtrise d'ouvrage, renforcer et valoriser la compétence scientifique de l'établissement, et développer l'offre culturelle, notamment grâce à des ressources propres plus importantes. Le groupe de travail a pu apprécier la cohérence du projet global de réforme du CMN qui privilégie à la fois le fond, à savoir l'offre culturelle et l'expertise scientifique, et la forme, avec le développement économique et les relations extérieures.
La réforme de l'établissement s'est également traduite par le renforcement du rôle des administrateurs. On peut souhaiter que le CMN et le ministère de la culture arrêtent rapidement le contrat de performance qui était attendu pour le premier semestre de l'année 2010.
Il est évidemment trop tôt pour dresser un bilan de la réforme du CMN. Cependant, notre groupe de travail a pu constater que de nombreux travaux ont été engagés pour optimiser les équipements, pour améliorer les parcours de visite et l'accessibilité des monuments. En outre, la stratégie de développement des ressources propres du CMN s'inscrit dans une politique globale où « l'économie est au service de la culture ». En dressant ce premier bilan, on peut penser que tout ce savoir-faire pourrait être davantage valorisé au profit des sites reconnus patrimoine mondial de l'UNESCO ou encore des cathédrales.
Notre groupe de travail a néanmoins constaté plusieurs difficultés qui compliquent la mise en oeuvre des missions du CMN : la transition de la maîtrise d'ouvrage, les contraintes pesant sur la gestion des ressources humaines et surtout les incertitudes relatives à l'évolution de son périmètre. Notre position ne consiste pas à refuser tout changement. Notre inquiétude concerne la pérennité du système de péréquation qui fonde la mission du CMN.
Or la relance de la dévolution aux collectivités est toujours d'actualité avec la proposition de loi de Mme Marland-Militello déposée à l'Assemblée nationale. Il nous paraît donc urgent de réaffirmer notre choix d'une dévolution encadrée, respectueuse de la politique patrimoniale nationale dont le CMN constitue l'un des acteurs majeurs.
Les propositions que je vous présenterai dans quelques instants partent de trois constats.
Le premier constat est fondé sur le témoignage des collectivités devenues propriétaires d'un monument de l'État en application de la loi de 2004. 22 d'entre elles - soit environ un tiers - ont répondu à notre questionnaire qui visait à faire un bilan des transferts. Leurs réponses ont permis de constater une politique de restauration et d'animation extrêmement dynamique de la part des collectivités, mais aussi des défaillances qui nous font penser que tout transfert devrait s'accompagner non seulement d'une obligation d'information s'imposant à toutes les conventions mais d'un réel suivi pour ne pas laisser aux collectivités les moins importantes des situations difficiles à gérer.
Le deuxième élément dont il nous semblait devoir tenir compte est relatif aux règles de la domanialité publique. Nous craignons une multiplication des décisions de déclassement du domaine public de monuments historiques ou de certaines parcelles, parallèlement au développement des projets de valorisation touristiques. Réaffirmer que les monuments historiques à vocation culturelle forment un tout nous paraît indispensable.
Le troisième et dernier constat est relatif au contexte de la politique immobilière de l'État qui ne prend pas en compte la signification patrimoniale et symbolique des monuments historiques qui ne relèvent pas du ministère de la culture. La cession de ces biens chargés d'histoire est aujourd'hui envisagée au même titre que celle de simples bâtiments de bureaux. À cet égard, la polémique de l'hôtel de la Marine est regrettable à deux titres. Tout d'abord parce qu'elle choque les personnes attachées à notre patrimoine monumental qui peuvent douter de la volonté de l'État à demeurer le garant d'une politique nationale cohérente du patrimoine, ce que nous ne pouvons accepter. Ensuite, parce qu'elle jette inutilement l'opprobre sur la nouvelle politique immobilière de l'État qui pourtant paraît indispensable pour nos finances publiques. Fort de ces constats, le groupe de travail estime qu'il devient urgent de définir les contours d'un principe de précaution appliqué au patrimoine monumental de la nation, dont les propositions suivantes constitueraient la base.
Il s'agirait premièrement de « réactiver » le principe de « transférabilité » des monuments historiques appartenant à l'État, dont les critères avaient été définis par la commission Rémond. Cette première proposition implique de reprendre la liste, établie par ladite commission, des monuments dont le ministère de la culture avait la charge. Une nouvelle commission similaire devrait être constituée pour poursuivre ce travail sur l'ensemble des monuments historiques aujourd'hui gérés par France Domaine et identifier ceux devant rester propriété de l'État.
La deuxième étape serait l'identification, par cette même nouvelle commission, des monuments historiques ayant une vocation culturelle. Le critère de la vocation culturelle, que la commission détaillerait, pourrait avoir trois effets :
- dans l'hypothèse d'un transfert possible, il entraînerait la cession à titre gratuit ;
- en cas de conservation par l'État, le critère de vocation culturelle et les prescriptions afférentes serviraient de guide pour la définition des cahiers des charges quels qu'ils soient, par exemple dans le cadre d'une convention de transfert de gestion d'un monument ou d'un bail emphytéotique administratif de l'État ;
- enfin, tout projet de déclassement du domaine public, total ou partiel, d'un monument ainsi identifié, pourrait se voir imposer l'avis préalable de la commission, y compris donc à la suite d'un transfert à une collectivité. Ce troisième aspect est fondamental, car il constitue une garantie de protection du caractère inaliénable des monuments historiques, reprenant la philosophie du rapport Rigaud sur l'inaliénabilité des oeuvres des collections publiques des musées. Ce « verrou » scientifique répond aux inquiétudes exprimées par notre commission quant au devenir des monuments transférés dont on pourrait craindre une revente inappropriée, puisque tout acte de cession à une personne privée nécessite un acte de déclassement du domaine public.
Enfin, il faut prévoir les conditions encadrant la procédure de transfert des monuments de l'État aux collectivités. Elles concerneraient les délais, les obligations d'information, réaffirmeraient le rôle prééminent du ministre en charge des monuments historiques pour autoriser un transfert, et interdiraient le dépeçage du patrimoine via des transferts partiels.
Ces mesures essaient de trouver un double équilibre entre l'État et les collectivités d'une part, et entre le principe de libre administration des collectivités et celui d'inaliénabilité du patrimoine de l'État d'autre part. Elles offriraient en outre au CMN la garantie du maintien des fondamentaux qui sous-tendent son rôle. Elles permettraient enfin sans nul doute d'apporter un peu de sérénité aux débats actuels sur le patrimoine monumental de l'État.
J'ai eu le privilège de participer aux travaux de ce groupe de travail. J'ai beaucoup appris. À ce titre, je voudrais remercier notre rapporteur. J'ai découvert des lieux que je ne connaissais pas. Il me semble que plus on avance, plus des questions se posent. Notre réflexion doit se poursuivre. Vous n'avez pas mentionné le déplacement du groupe de travail à Rome. Quels enseignements utiles à votre réflexion en avez-vous tirés ?
Ce déplacement a été riche d'enseignements. Tout d'abord, nous avons retenu des points positifs, en termes de soutien à la culture dans le sens le plus large ; c'est ainsi qu'une forme de mécénat a été mise en place avec le concours essentiellement des organismes bancaires.
Mais cette organisation comporte aussi des aspects négatifs : contrairement à ce qui se passe en France, en Italie, la boutique est gérée par une entité, la restauration par une autre, la librairie par une troisième. On peut ainsi assister à une situation incroyable : si la convention s'est terminée pour la boutique et que l'appel d'offres n'a pas permis de trouver un autre prestataire, la boutique peut ne pas fonctionner alors que les autres activités se poursuivent. Cela parait tellement de bon sens de pouvoir gérer simultanément les dates de fin de convention des prestataires.
Il existe aussi des hôtels de la culture. C'est assez intéressant ; le Centre des monuments nationaux (CNM) a l'intention de s'en inspirer.
Par ailleurs, un décret législatif en cours d'adoption envisage la dévolution du patrimoine de l'État aux collectivités territoriales. L'Italie prévoit d'établir la liste des biens transférables dans ce cadre ; actuellement, l'État a la propriété de tous les lieux culturels.
Les hôtels de la culture proposent non seulement un hébergement mais aussi un accompagnement culturel. L'hôtel est toujours lié à un véritable programme culturel. Il y a une volonté de faire en sorte que l'hébergement ne soit pas unique.
J'ai eu aussi le plaisir de participer à ce groupe de travail. Je m'associe aux félicitations de notre collègue Mme Monique Papon. Je souscris tout à fait à ce que vous avez dit quant à la cohérence et au dynamisme du Centre des monuments nationaux. C'est un outil remarquable, qui accomplit un excellent travail sur le plan de la communication mais aussi en profondeur. Il faudra être très vigilant pour préserver l'équilibre financier de cet organisme et surtout ne pas le priver des monuments rentables par rapport à ceux qui ne le sont pas.
J'ai beaucoup apprécié le travail fait sur le constat des transferts précédents. L'enquête que vous avez menée est significative car un tiers des villes ou collectivités concernées ont répondu. Elle permet de mesurer ce qui est positif et ce qui l'est moins. On peut espérer ainsi construire des conventions de transfert plus fiables pour les collectivités territoriales qui préservent le patrimoine local tel qu'il est transféré sous réserve des améliorations nécessaires.
Je voulais aussi vous remercier d'avoir bien voulu nous associer à l'élaboration du plan du rapport. J'ai fait observer qu'il y avait un doute au cas où une collectivité qui se serait vu transférer un bien et qui ne serait pas en mesure de le valoriser souhaiterait le revendre. Nous pourrions être d'accord sur le fait qu'il faut que, dans ce cas là, l'État soit en mesure de reprendre le patrimoine et de le préserver, puisque l'inaliénabilité du patrimoine doit être garantie.
J'exprime ma satisfaction personnelle. Nous aurons plaisir à continuer à travailler sur ce sujet car il est important en termes de valorisation culturelle mais aussi touristique et économique. Nous avons également le devoir d'être vigilant par rapport à des tentations qui ne seraient pas acceptables.
C'est un travail que nous avons fait en toute objectivité en essayant de partir du constat initial. Les expériences négatives sont toujours utiles pour la suite des événements de manière à ne pas les répéter. J'ai réalisé ce travail avec beaucoup d'enthousiasme.
Je voudrais vous remercier de la qualité objective de votre rapport. Les craintes que nous avions formulées lors de la discussion sur l'article 52 du projet de loi de finances pour 2010, étaient justifiées et partagées par tous les bords de cette commission.
Ce qui a été évoqué sur l'éventuelle revente d'un bien par une collectivité mérite beaucoup d'attention. Il me paraît essentiel que cela puisse être rediscuté et surveillé. C'est un point important. En effet, il peut y avoir la vente à la découpe de ce bien. Cela est dramatique.
L'État vient de mettre en vente près de 1 700 biens immobiliers. Nous avons dans le département du Finistère des phares. J'ai l'expérience d'un des phares d'Ouessant qui a été transféré à la collectivité d'Ouessant ; mais celle ci n'avait pas du tout les moyens de le restaurer et de le financer. Il a été repris par le conseil général qui en fait une résidence d'artistes pour leur permettre de travailler en toute sérénité. Évidemment, ce sont des travaux très lourds. Il en est de même pour des châteaux du Finistère.
Nous avons cinq sites départementaux qui nécessitent des financements très importants, à l'exemple du domaine de Trévarez qui comprend un château et un parc magnifique. Nous avons créé un établissement public de coopération culturelle (EPCC) pour pouvoir gérer ces cinq domaines patrimoniaux. La première difficulté a été de trouver un financement, il s'agira ensuite de maintenir le niveau d'activité et de projets que nous voulons faire, compte tenu des contraintes budgétaires que les collectivités vont rencontrer dans les années à venir.
L'État nous a proposé un autre château, celui de Kergean. Devant les travaux de restauration indispensables - qui nécessitent de respecter les avis des architectes des bâtiments de France, de recourir à des entreprises qualifiées et agréées, ce qui double presque le prix de la restauration - il n'a pas été possible de le reprendre. En revanche, une association qui est financée par le conseil général s'occupe de ce domaine.
Ce transfert de l'État de biens culturels me semble important. Nous serons toujours vigilants car il demeurera ce problème crucial du financement pour les collectivités territoriales et cette éventuelle tentation de revendre le bien.
L'ensemble du rapport tel qu'il nous a été présenté, me semble très intéressant. Mais j'aimerais peut-être qu'il lui soit donné plus de nervosité !
Lors des différents déplacements, en général, on était toujours d'accord. On avait toujours en tête l'environnement. Or, je trouve que l'environnement devrait être souligné. Le débat sur la réforme des collectivités territoriales bouleverse les idées par rapport à ce débat. Il faut l'évoquer, car on n'est pas dans une stratosphère !
Il existe aussi un mouvement d'externalisation des personnels de gardiennage qui s'accroît.
Je trouve que la notion de service public figure dans votre esprit et dans votre rapport à travers la relation État et collectivités territoriales. Il existe aussi au niveau républicain, c'est-à-dire au niveau général. L'État doit s'en préoccuper, et la collectivité territoriale aussi. Je souhaiterais que figurent dans le rapport deux ou trois lignes qui traitent de cette question.
Vous avez évoqué à juste titre l'hôtel de la Marine. C'est un sujet très préoccupant. Je constate qu'une certaine distance est prise par rapport au groupe de M. Alexandre Allard. En réalité, pour le moment, il est toujours là. Il faut savoir qu'il est un des principaux financiers des rencontres d'État du ministère de la culture à Avignon chaque année. La vente n'est certes plus envisagée. Le ministre de la défense évoque un bail emphytéotique mais la question n'est pas réglée.
Il aurait été intéressant de mentionner davantage le rapport Rigaud. À l'origine, le rapport Jouyet-Lévy est le premier qui a posé la question. Ce rapport qui n'a jamais été voté nulle part est appliqué partout. Y figure un passage sur l'inaliénabilité. Dans la lettre de mission du Président de la République du 1er août 2007 à Mme Christine Albanel, cela figure en toutes lettres : il faut faire des expériences. Elle a désigné M. Jacques Rigaud qui a rédigé un rapport dans lequel il rappelle la proposition de loi déposée en octobre 2007 par l'ancien député Jean-François Mancel qui distingue les trésors nationaux et les oeuvres libres d'utilisation. Les gens du terrain sont opposés à ce corpus de pensée.
Je partage votre avis sur le fait que France Domaine doit être contrôlé. Ce n'est pas possible qu'une partie de la mise sur le marché de biens soit faite par des comptables et Bercy, et échappe totalement au ministère de la culture. C'est sans doute la proposition la plus forte. Je la soutiens et je suis satisfait que vous repreniez l'expression de principe de précaution, qui avait été utilisée par Mme Christine Albanel dans son discours lors de la présentation du rapport de M. Jacques Rigaud. Il est important aussi d'évoquer les personnels.
L'évocation du voyage du groupe de travail à Rome m'a fait penser au Palais Farnèse et à notre patrimoine français à l'étranger - ambassades, consulats... Je mentionnerai aussi les instituts culturels. Certains sont aujourd'hui menacés de vente. C'est inquiétant. L'ambassade de France à Dublin a déjà été vendue.
Je prendrai l'exemple du Palais Lenzi à Florence qui abrite le consulat honoraire et l'institut culturel. C'est un magnifique palais qui nécessite des travaux de rénovation extrêmement importants. Il se peut qu'au lieu d'effectuer les travaux on se décide à le vendre. Certaines activités sont lucratives et pourraient aider à sauver le Palais Lenzi, telles les résidences d'artistes, la librairie. Or le produit de ces activités repart sur le budget général et n'est donc pas affecté à son entretien.
Est-ce que ce patrimoine français à l'étranger a fait l'objet également de votre étude ? Comment s'intègre-t-il dans le dispositif que vous avez décrit ? Qu'est-ce qu'on peut faire pour le sauver ?
Le Palais Farnèse appartient à l'Italie. Il fait l'objet d'un bail emphytéotique dont le terme approche. Cette question a été abordée avec notre ambassadeur. En ce qui concerne les autres bâtiments qui appartiennent à l'État français, ils feront partie du travail que nous souhaitons mener avec cette commission. Tous les lieux culturels seront traités d'égale manière.
Dans ma présentation rapide, je n'ai pas pu inscrire tout ce que nous avons perçu sur le terrain. C'est à la lecture du rapport que vous allez pouvoir appréhender les lignes de force de notre travail. Je me permets d'insister sur le fait que la dévolution aux collectivités territoriales sera demain, si nous en sommes d'accord, mieux encadrée. Un véritable état des lieux devra être dressé avant la dévolution.
Je voudrais remercier chaleureusement Mme Françoise Férat pour son rapport. Nous sommes plusieurs ici à avoir siégé ou à siéger au Centre des monuments nationaux, M. Jack Ralite, nous y avons siégé ensemble, M. Yves Dauge qui est actuellement membre, comme moi-même. Cela nous a contraints à une certaine distance vis-à-vis du groupe de travail que nous avons cependant souhaité.
Il s'agissait de se poser plusieurs problèmes :
- la politique de l'État français par rapport à l'ensemble des monuments historiques ;
- la situation du CMN qui est un opérateur essentiel pour la préservation de ces monuments appartenant à l'État, sans être le seul ;
- la tendance voire la tentation de céder certains bâtiments à vocation culturelle soit à des collectivités territoriales soit à des opérateurs privés.
Si des monuments relevant du CMN sont cédés par l'État à des collectivités et s'ils sont parmi ceux qui lui rapportaient de l'argent, il risque de ne pouvoir continuer à exercer sa mission de solidarité. Il faut rappeler que ce Centre des monuments nationaux est utile et qu'il a un rôle d'organisation solidaire entre monuments qui rapportent et ceux qui ne rapportent pas. Nous considérons qu'il faut lui donner le plus grand dynamisme et lui permettre de jouer pleinement son rôle. Vous avez constaté un dynamisme nouveau qui mérite d'être salué, appuyé et conforté par la représentation nationale.
Il est nécessaire également de bien encadrer les conditions dans lesquelles des monuments du CMN sont cédés à des collectivités territoriales pour faire en sorte d'une part, que ce transfert ne déséquilibre pas le CMN et, d'autre part, que les collectivités en fassent un usage culturel à leur tour. Il faut analyser lors de la cession quel est le projet de la collectivité et si elle a les moyens de le mener. Ceci explique le souhait déjà exprimé par notre commission, lors de la discussion sur l'article 52 du projet de loi de finances pour 2010, de ne pas s'en remettre au préfet, qui peut être soumis à des pressions locales, mais au ministre en charge de la culture afin que le projet culturel soit prioritaire par rapport au contexte local.
J'ai été membre de la commission Rémond qui avait été mise en place par M. Jean-Jacques Aillagon. Cette commission n'a traité qu'une partie du problème, même si le travail réalisé était passionnant. Elle a essayé de recenser les biens immobiliers appartenant à l'État qui relevaient du ministère en charge des affaires culturelles et d'une de ses directions, la direction du patrimoine. Il y en a d'autres ailleurs. S'il y a une chose à souhaiter, c'est que l'État mette un peu d'ordre dans les biens qui lui appartiennent et que le travail commencé par la commission Rémond soit fait systématiquement - et dans le même esprit - pour l'ensemble des ministères.
J'ai travaillé sur ces questions au Conseil de l'Europe lorsque je présidais la sous-commission du patrimoine. Beaucoup de secteurs dans des pays européens sont menacés de voir leur patrimoine dilapidé ou remis en cause, en particulier le secteur hospitalier, et les bâtiments militaires. Nous venons de vivre l'abandon d'un certain nombre de sites par l'armée française, ce qui signifie que l'État a la tentation de les donner, contre un euro symbolique, à la collectivité sur laquelle ils sont situés. Il me semble utile avant de faire ce geste de vérifier ce que la collectivité peut et veut en faire.
Il faut exiger une étude méthodique de l'ensemble des bâtiments en main d'État pour procéder à un tri entre ceux qui n'ont pas d'intérêt culturel et ceux qui en ont un. Il faudrait instaurer une forme de mouvement entre les monuments qui peuvent sortir du CMN et ceux qui peuvent y rentrer. Il est juste de reconnaître que si le CMN a abandonné, par exemple, le château du Haut-Koenigsbourg, il y en a d'autres qui ont été attribué récemment au CMN, le château de Rambouillet ou la Villa Cavrois, qui ne sont pas de petits monuments, dont il faut reconnaître l'intérêt du transfert.
Si votre rapport peut permettre de mettre toutes ces demandes en exergue, nous aurons contribué à préserver ce patrimoine.
En explication de vote, je voudrais dire que nous ne donnons pas quitus à l'État. Une inquiétude subsiste sur la diminution du nombre de postes dans le domaine de la vie culturelle. Le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux a des conséquences catastrophiques pour tout ce qui nous anime ici. Il faut rappeler aussi les insuffisances budgétaires de l'État.
Certains dossiers nous inquiètent du point de vue de l'attitude de l'État, mais le groupe de travail n'y est pour rien, bien entendu. Je citerai l'affaire de l'hôtel de la Marine, ce superbe palais ; dans d'autre pays, ce serait un palais de la culture.
Je me félicite du rôle joué par le Sénat avec la publication d'un tel rapport, ainsi que de la décision qui a été prise de confier le Musée du Luxembourg à la Réunion des musées nationaux (RMN) ; il relèvera ainsi du service public de l'ensemble des musées.
Nous donnons quitus au travail remarquable réalisé par le groupe de travail dirigé par Mme Françoise Férat. Ce rapport formule des propositions, des préconisations, une espèce de philosophie des monuments nationaux. Nous allons voter favorablement en y intégrant les remarques du président de notre commission. C'est le type de rapport où les affaires de l'esprit ne sont pas dominées par l'esprit des affaires !
Nous adoptons le rapport en partageant toutes les félicitations exprimées. Je pense que l'identification, la vigilance, l'inaliénation sont des critères parfaits. Il est important de dépassionner le débat. S'agissant de la partie finances, on a tous compris qu'il fallait « se méfier » de France Domaine, car il ne faut pas non plus laisser partir tout notre patrimoine. Je n'ai pas de réserve sur le rapport, mais bien sûr il ne faut pas donner quitus à l'État.
J'approuverai ce rapport en félicitant le groupe de travail et ma collègue. Vous avez évoqué les hôpitaux, c'est un vrai problème. Lorsque j'entends dire que le sénateur-maire de Lyon veut vendre l'Hôtel-Dieu à un groupe international pour faire un hôtel cinq étoiles, cela me gêne un petit peu.
J'ai un certain regret de ne pouvoir disposer du rapport dès à présent.
La réunion de ce jour doit valider les conclusions du groupe de travail et en autoriser la publication.
L'ambassadeur de France met tout en oeuvre pour se donner tous les arguments de validation pour la suite. Il n'y a pas de doute particulier dans ce domaine : on n'imagine pas l'État italien retirer la prestigieuse ambassade de France à Rome, ce serait un cas de casus belli !
C'est une histoire ancienne. La France a été propriétaire du Palais Farnèse. Sous Mussolini et à la suite de nombreuses pressions, l'État italien l'a récupéré, pour des raisons de prestige, et l'a consenti par bail emphytéotique pour abriter l'ambassade de France ; la France, par mesure de rétorsion, a fait la même chose pour l'ambassade d'Italie à Paris qui est située aussi dans un très bel hôtel particulier du 7e arrondissement. Nous avons là une situation diplomatique dans laquelle les deux États se tiennent un petit peu en équilibre.
Le deuxième problème est celui du coût d'entretien de ce bâtiment. Le troisième, qui agace les Italiens, est celui du très grand nombre de bâtiments - villas, églises - que la France possède à Rome. L'ensemble des bâtiments en main française est considérable.
Je reprends la parole pour vous expliquer le vote de mes collègues socialistes. Nous nous sommes déjà exprimés sur le rapport lui-même. Avec la proposition que vous avez évoquée de répertorier les biens immobiliers dans les autres ministères - et je rajoute celui de la justice - nous rejoignons la position prise par notre collègue Ivan Renar. Nous ne donnons pas quitus à l'État en adoptant ce rapport car dans le cadre de la réforme des collectivités territoriales, avec les problèmes de financement, la clarification des compétences, nous sommes dans une situation autre que l'accord que nous donnons à Mme Françoise Férat pour son rapport.
Nous pouvons être tous d'accord que pour ce qui est du patrimoine, nous n'avons pas les yeux fermés, au contraire nous voulons les avoir grands ouverts. Nous posons un acte avec ce rapport et nous entendons continuer à examiner au plus près la situation de manière à pouvoir peser sur la définition de cette politique du patrimoine.
La commission a adopté à l'unanimité les conclusions de son rapporteur et en a autorisé la publication sous la forme d'un rapport d'information.
Monsieur le président, je souhaite revenir sur l'audition de Mme Marion Zalay, directrice générale de l'enseignement et de la recherche du ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, le 22 juin dernier. J'avais alors qualifié son exposé de « stratosphérique » et je maintiens ces propos.
Dans la presse agricole Agra Presse du 21 juin 2010 que je n'avais pas eu le temps de consulter avant l'audition, est parue une information selon laquelle, dans l'enseignement technique agricole, 248 postes devaient être supprimés en 2011, c'est-à-dire pour la prochaine rentrée scolaire, 168 en 2012 et 168 en 2013, soit au total 584 postes sur trois ans.
Je trouve un peu indécent que Mme Zalay nous ait dit qu'elle n'avait pas d'informations sur l'évolution des moyens de l'enseignement agricole. J'ai le sentiment d'avoir été un peu flouée lors de cette audition et j'espère que les hauts fonctionnaires ne viennent devant nos commissions avec la volonté de dissimuler une situation qui apparaîtra inévitablement à un moment donné, et qui est préjudiciable à l'idée que nous nous faisons du service public de l'éducation qu'elle soit nationale ou agricole.
Chère collègue, nous ne pouvons pas considérer que ce qui est écrit dans un journal ait valeur de décision. Si j'ai insisté pour que la directrice générale de l'enseignement et de la recherche viennent devant notre commission en juin, à un moment où les arbitrages budgétaires ne sont pas encore finalisés, c'est justement pour bien faire comprendre au ministère de l'agriculture que si l'enseignement agricole devait être sorti de la mission « enseignement scolaire », nous devrions en tirer toutes les conséquences et veiller à ce que son budget soit convenable. On peut comprendre qu'un haut fonctionnaire n'ait pas la liberté de parole d'un ministre, notamment dans ces phases d'arbitrage. Mais il fallait faire passer le message.
Monsieur le président, je souhaite émettre une vive protestation relative à l'attitude du nouveau président de l'Agence France-Presse, dont je sais que vous avez souhaité l'audition par la commission depuis sa nomination au mois d'avril.
Il m'a été indiqué qu'en dépit de sollicitations répétées des services de la commission, M. Emmanuel Hoog n'est toujours pas en mesure de répondre à cette invitation, alors qu'il a rencontré le Président du Sénat la semaine dernière.
Cette attitude est pour le moins surprenante, alors qu'il est d'usage que les ministres ou personnalités du secteur public ou privé répondent rapidement aux sollicitations de la représentation nationale.
Je partage vos préoccupations mon cher collègue et c'est pourquoi j'ai demandé à M. Emmanuel Hoog de se rendre disponible dès la rentrée de septembre pour venir devant notre commission nous présenter ses projets pour l'AFP.
- Présidence de M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, et de M. Jean Arthuis, président de la commission des finances -