La commission est réunie pour examiner les éventuels amendements sur la proposition de loi n° 384 (2009-2010) visant à assurer la sauvegarde du service public de la télévision.
Aucun amendement n'ayant été déposé sur ce texte, il n'y a pas lieu de délibérer.
Selon le guide pratique d'application de la révision constitutionnelle au Sénat, les propositions de loi ou de résolution des groupes d'opposition ou minoritaires inscrites à l'ordre du jour réservé sont discutées sur la base du texte initial. Même en cas de désaccord de la commission sur l'ensemble du texte, celui-ci doit être examiné par le Sénat en séance publique, sans qu'une question préalable ou une exception d'irrecevabilité puisse être déposée. Il n'est pas fait mention du renvoi en commission. Le président Jean Arthuis a ainsi accepté de discuter d'une proposition de loi de mon groupe portant sur le bouclier fiscal « par courtoisie sénatoriale ». A l'inverse, Mme Isabelle Pasquet, qui voulait en décembre 2009 déposer une motion de renvoi en commission sur une proposition de loi centriste, s'est vu répondre que ce n'était pas l'usage... Je regrette que notre commission ne s'inscrive pas dans cette démarche ; je le dirai en séance publique.
La courtoisie est ici, je crois, la règle. Le renvoi en commission signifie simplement que nous discuterons ultérieurement. La question sera abordée ce soir en Conférence des présidents. Ce n'est pas parce que votre groupe dépose une proposition de loi que la commission doit y adhérer : en l'occurrence, la majorité était en désaccord sur une partie - une partie seulement - de votre texte. Par ailleurs, nous attendons des informations supplémentaires : la commission débattra quand elle sera en possession de tous les éléments. Vous pourrez alors vous exprimer librement.
Le Président Gérard Larcher avait reconnu la « nuance comique » de cette réforme : les propositions de loi de l'opposition sont certes débattues et mises au vote, mais n'aboutissent jamais ! Nous sommes loin de la « révolution » que vantait M. Roger Karoutchi lors du débat sur la révision constitutionnelle ! Je me réjouis que la Conférence des présidents aborde ce point.
La discourtoisie serait de refuser le débat. La révision constitutionnelle a renforcé le contrôle du Parlement et les droits de l'opposition, mais il y a toujours une majorité et une minorité !
La commission procède à l'examen du rapport et à l'élaboration du texte pour la deuxième lecture de la proposition de loi n° 364 (2009-2010), modifiée par l'Assemblée nationale, visant à encadrer la profession d'agent sportif.
Nous avions adopté cette proposition de loi de notre collègue M. Jean-François Humbert, en première lecture, le 4 juin 2008 ; l'Assemblée nationale l'a votée le 24 mars dernier. Le Gouvernement l'a l'inscrite à l'ordre du jour prioritaire à l'Assemblée nationale, et au Sénat pour la deuxième lecture, ce qui montre l'engagement fort du gouvernement sur ce dossier. Une fois encore, nous sommes à l'avant-garde en matière de moralisation du sport !
Ce texte, qui vise à moraliser la profession d'agent, n'a été modifié qu'à la marge par l'Assemblée nationale. Il durcit tout d'abord l'accès à la profession : les personnes morales ne pourront plus avoir de licence, et le régime des incompatibilités et des incapacités est renforcé, afin d'éviter les conflits d'intérêt et les risques de collusion. Les agents de l'Union européenne devront respecter certaines règles spécifiques, conformes aux principes de la liberté d'établissement et de la liberté d'entreprendre. Enfin les agents extracommunautaires ne seront pas tenus d'avoir une licence mais devront conclure une convention de présentation avec un agent détenteur de la licence en France.
Afin de rendre plus transparent l'exercice de la profession, le club sera désormais autorisé à payer l'agent, ce qui est aujourd'hui interdit et pousse, en fait, les clubs à payer ces derniers de manière officieuse, créant des circuits d'argent sale. Je n'ai pas d'opposition de principe à ce système. Parallèlement, le texte impose que l'ensemble des contrats soient transmis aux fédérations. L'Assemblée nationale a également imposé que les contrats passés entre les agents et les sportifs mineurs, qui ne peuvent donner lieu à rémunération, soient transmis à la fédération concernée.
Enfin la proposition de loi aggrave les sanctions, notamment financières, à l'encontre des agents qui exerceront dans l'illégalité. L'Assemblée nationale a souhaité que les sanctions prises par les fédérations soient publiées. Aujourd'hui, des agents condamnés demeurent agents de grands footballeurs, et même d'entraîneurs !
Leur rémunération ne peut excéder 10 % du salaire brut des joueurs, et du montant du transfert. Quand on connaît les montants en jeu - 94 000 euros par semaine pour un international français ! - l'adoption de cette proposition de loi est plus que nécessaire !
Selon une étude de 2009, la Commission européenne ne peut intervenir sur ce sujet que par la voie de recommandations. En attendant, la France doit avancer. Il n'y a jamais eu autant d'argent dans le sport, et jamais autant d'agents ! Le Parlement devait se saisir de la question, d'autant que, avec les transferts, on atteint des sommes exorbitantes.
Nous avons un point de divergence avec les députés. Ils ont autorisé les avocats à devenir agents, ce que nous avions formellement interdit. Les avocats souhaitaient quant à eux pouvoir devenir agents sans même disposer de licence, ce que permet l'actuel règlement de la FIFA. Le choix de l'Assemblée est équilibré : le maintien de la licence pour tout le monde évitera le mélange des genres. Je vous propose donc d'adopter cette proposition de loi sans la modifier.
Comme un parlementaire peut devenir avocat, cela nous ouvre des perspectives... !
C'est vrai, mais les régimes fiscaux varient selon les pays. Le Real Madrid a dû vendre une partie de son patrimoine immobilier pour acheter des joueurs. Les clubs anglais sont parmi les plus endettés, mais à Manchester United, un nouveau mécène fait preuve d'une grande générosité...
Dans le milieu du football, ce sont parfois les agents qui suscitent les transferts, sans se soucier des souhaits des joueurs : leur intérêt prime sur le reste. Les intermédiaires sont d'ailleurs nombreux, et chacun touche sa part...
C'est une véritable mafia ! Les joueurs sont traités comme une simple marchandise ! Certains agents sportifs font venir en Europe de jeunes footballeurs africains, qui, s'ils ne sont pas recrutés par un club, se retrouvent totalement démunis. Que faire ?
C'est une bonne question. Mais le texte renforce les sanctions pénales. Les contrats passés avec des mineurs doivent impérativement être déclarés auprès de la fédération, et ne donnent lieu à aucune retombée financière pour les agents.
Il faut être impitoyable avec ces pratiques, qui s'apparentent à une véritable traite ; ces jeunes sont ensuite brisés !
Ils ne devraient pas entrer sur le territoire sans un contrat en bonne et due forme. M. Pierre Martin pourrait insister en séance publique sur ce point, qui semble faire l'unanimité.
En Afrique, il y a, d'une part, des lieux de formation pour des jeunes à qui l'on fait miroiter une carrière en Europe, et, d'autre part, des centres de formation appartenant aux clubs européens, et donc « délocalisés », qui forment des jeunes sur le terrain, en toute légalité.
Cette marchandisation des joueurs est inquiétante. Ces jeunes sont achetés dès leur sortie du centre de formation : à 18 ans, le milieu offensif sochalien, M. Raphaël Dias, est déjà en contact avec un club anglais ! Or, loin de leur famille, ces joueurs ne s'épanouissent pas, et ne jouent pas à leur meilleur niveau... En restant plus longtemps dans leur club d'origine, ils auraient le temps d'acquérir une véritable culture footbalistique ! Dorénavant, l'argent prime sur la carrière.
M. Gervais Martel, le président du RC Lens, que nous avons auditionné, dit s'estimer heureux si deux sur les 60 jeunes actuellement au centre de formation parviennent en équipe première. Pour les 58 autres, advienne que pourra ! Le rugby suit aujourd'hui la même pente... L'argent est entré dans le sport, je l'ai dit à M. Frédéric Thiriez. Nous sommes bien loin des principes de Pierre de Coubertin !
En France, la formation commence très tôt. Résultat, les joueurs suscitent déjà les appétits des clubs étrangers à 16 ans ! Les clubs formateurs ont alors des droits. Mais sachez que l'on propose également de l'argent à la famille pour accompagner le joueur : difficile souvent de résister à la tentation...
C'est vrai. Mais un joueur peut aussi se voir retenu par son club, et mis « en quarantaine » ; l'agent peut alors le sortir de cette situation en le proposant à un autre club, où il s'épanouira davantage. À la loi de montrer le chemin, et de prévoir des sanctions, notamment pénales, en cas de dérives.
De gros efforts ont été faits pour protéger les droits des centres et clubs de formation. Jusqu'à la fin de leur carrière, M. Lilian Thuram ou M. Claude Makelele ont fait bénéficier leurs clubs d'origine, respectivement Fontainebleau et Melun, des retombées de leur succès. C'est important pour des clubs moyens.
Quant à la relation entre argent et sport, qu'a évoquée M. René-Pierre Signé, ce n'est pas la légalisation des paris en ligne qui va arranger les choses !
Madame Blondin, M. Bernard Laporte, que j'avais interrogé au sujet des jeunes joueurs africains échoués en France, m'avait répondu que le gouvernement allait s'en occuper... Mme Rama Yade, elle, m'a répondu qu'un dispositif était en train de se mettre en place. Monsieur le président, peut-être pourrions-nous entendre la ministre sur cette question ?
Vous avez deviné ma pensée ! Nous lui demanderons de venir devant nous avant la fin de la session.
D'autant que Mme Rama Yade dit avoir beaucoup admiré Madame Bâ, le beau livre d'Éric Orsenna !
Enfin - et c'est là un propos peut-être plus polémique -, je trouve scandaleux que des agents qui gagnent autant à vendre des joueurs français à l'étranger soient protégés par le bouclier fiscal ! Ce n'est pas une question de politique, mais de morale ! Enfin, chacun sa morale, chacun son Dieu...
La majorité, sinon la totalité de ces agents n'ont pas de comptes en France, et ne bénéficient donc pas du bouclier fiscal ! Souvent, les joueurs eux-mêmes s'établissent dans le pays où ils jouent, notamment en Espagne. Le régime fiscal y serait-il pour quelque chose ?
La loi de 2000, qui réglemente la profession d'agent sportif, s'est révélée facile à contourner : c'est pourquoi il faut aujourd'hui se montrer très rigoureux. Ce texte présente des avancées, notamment en durcissant les conditions d'accès et en renforçant la transparence des flux financiers.
Reste le problème du double mandatement : l'agent ne doit pas être payé par le club, mais par le seul sportif ! Le système actuel favorise les dérives et l'évasion fiscale. Il faudrait également une approche plus globale des transferts. Dans les faits, les jeunes Africains que nous évoquions ne sont pas approchés par des agents, mais directement par les recruteurs des clubs, qui sont des salariés !
Le souci de transparence exige que les sportifs déclarent à leur fédération les agents qui travaillent avec eux : certains en ont six ou sept ! Il est regrettable que la Direction nationale de contrôle de gestion (DNCG) n'ait pas connaissance des commissions versées aux agents par les joueurs et les clubs.
Enfin, il me paraît impératif d'exiger des agents extracommunautaires l'obtention de la licence. Une convention avec un agent français ne suffit pas.
Le double mandatement ? Je ne connais qu'un seul joueur qui paye lui-même son agent ! Nous ne faisons que régulariser la situation existante.
Les transferts relèvent de règlements internationaux. Imposer aux agents extracommunautaires de s'associer à un agent français est là encore une avancée. Nous avons trouvé un dispositif qui s'applique à tous les sports.
Plusieurs membres de l'entourage des joueurs touchent une indemnité lors des transferts. Les agents seront tenus de déclarer ces associés aux fédérations : c'est une autre avancée. Enfin, la DNCG aura connaissance des sommes versées aux agents, qui apparaîtront désormais dans les comptes des clubs.
Je suis consternée. Les chiffres que l'on entend contrastent cruellement avec la misère du sport scolaire, qui mériterait pourtant le même niveau d'exigence !
Ce n'est pas le même problème. Le sport scolaire sert en effet trop souvent de variable d'ajustement. Pour qu'il se développe, il faut toutefois une volonté. Or les collectivités locales, de toute couleur, ont tendance à privilégier le sport professionnel au détriment du sport scolaire...
C'est leur rôle d'accompagnement qui justifie le maintien de leur compétence pour le sport et la culture. Ce que nous découvrons est surréaliste !
Ce sont deux mondes différents. Les dérives du sport spectacle, pollué par l'argent, entraînent des réactions de dégoût. Mais ce texte vise à moraliser ces pratiques. Il nous faudra, il est vrai, reprendre la réflexion sur la place du sport dans l'éducation et la scolarité.
Les médias sont aussi coupables : à force d'abreuver les gens de retransmissions et de commentaires, qui suscitent les passions, on en arrive aux stades de la honte et aux violences que nous connaissons !
Je me réjouis que l'on poursuive cette moralisation de la profession après les efforts faits dans la lutte contre le dopage et la violence. Je m'interroge toutefois sur la place des avocats : peut-on ainsi s'improviser agent sportif ? Quelles sont les qualités requises ?
Il faut passer un concours organisé par les fédérations pour obtenir la licence. Pour le football, le taux de réussite est de 10 %. Il n'y a pas de profil défini. L'Assemblée nationale a conclu qu'un avocat pouvait être agent ; nous précisons qu'il doit posséder la licence, donc passer le concours. C'est l'avocat de Mme Laure Manaudou qui négociait ses contrats... Nous essayons de moraliser ces pratiques : c'est la politique des petits pas !
Certaines chaînes diffusent avec succès du sport 24 heures sur 24, Monsieur Signé ! Et le club champion de France a limité le nombre d'abonnements à 50 000 : tout le monde court au stade !
Nous retrouvons le panem et circenses de l'Empire romain ! Lundi soir, le sélectionneur de l'équipe de France a annoncé la liste des trente joueurs retenus pour la Coupe du monde sur TF1 devant pas moins de 10,5 millions de téléspectateurs !
Avec la révision générale des politiques publiques, les responsables de l'Union nationale du sport scolaire dans nos départements se retrouvent à la rue, au motif qu'ils relèvent du monde associatif et non de l'Éducation nationale. Cela distend encore plus le lien entre l'Éducation nationale et le sport scolaire...
Il faut distinguer le sport scolaire, la pratique sportive amateur et le monde du sport professionnel, dont ce texte vise à endiguer certains excès.
Le rapporteur ne propose pas d'amendements. Le délai limite pour déposer vos amendements auprès du service de la séance est fixé au 25 mai à 14 heures.
La proposition de loi est adoptée sans modification, le groupe socialiste et le groupe CRC ne participant pas au vote.
La réunion est levée à 11 h 05.