Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Réunion du 13 juillet 2011 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • drone
  • libye
  • pod
  • porte-avions

La réunion

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

J'ai demandé à M. Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement, de bien vouloir venir devant la commission évoquer les enseignements tirés, au plan technique, de l'engagement de nos matériels dans les opérations, et notamment en Libye. Je souhaite que vous évoquiez les points de satisfaction, mais également les lacunes ou les axes d'amélioration à privilégier.

Debut de section - Permalien
Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement

Nous analysons en permanence le retour d'expérience des différentes opérations extérieures, et en particulier celle sur la Libye.

Globalement, nous sommes relativement satisfaits de la manière dont se comportent, au plan, technique, les systèmes d'armes que nous avons eu la responsabilité de définir.

Le théâtre libyen se démarque nettement du théâtre afghan en ce qu'il sollicite particulièrement les composantes aériennes, aéronavales, aéroterrestre, et même spatiales.

L'opération libyenne représente pour nos forces un effort soutenu et elles y ont opéré ce que l'on appelle l'entrée en premier. Elles font face à une menace persistante, même si on en parle peu. Je pense surtout aux tirs de missiles sol-air libyens qui représentent une menace réelle en particulier pour les appareils volant à basse altitude, à savoir les hélicoptères.

Nous constatons avec satisfaction la bonne performance de nos matériels.

Une grande partie des capacités du Rafale ont été démontrées lors de l'opération Harmattan. Celle-ci a validé la pertinence du choix de la polyvalence, enviée par nos alliés britanniques. La disponibilité du Rafale est excellente. Les Rafale engagés ont effectué près de 500 sorties et 3 000 heures de vol. Cette disponibilité a un prix. Elle réclame un engagement permanent des personnels des armées en charge du soutien, et bien entendu des pilotes, soumis au rythme effréné de missions longues, nécessitant des ravitaillements en vol. Les choix architecturaux du Rafale s'avèrent ainsi confortés. C'est un avion facile à piloter et à utiliser, doté d'excellents armements.

Les missiles de croisière Scalp EG ont été tirés, avec succès, au début de l'opération. Ils ont fait à chaque fois coup au but, avec une précision remarquable. C'est le fruit de la performance intrinsèque du missile et du professionnalisme des personnels qui les mettent en oeuvre.

La nacelle de reconnaissance Reco NG a démontré de très bonnes performances, avec une très bonne qualité d'image. Elle a fourni une grande partie des prises d'images transmises à l'OTAN.

L'armement air-sol modulaire (AASM) affiche un taux de réussite de l'ordre de 98 %, tant en mode inertiel que sur coordonnées GPS.

C'est la démonstration pratique que les choix d'ensemble étaient pertinents et que les performances sont atteintes.

S'agissant des hélicoptères d'attaque, le Tigre a démontré ses grandes qualités en Afghanistan. Il procure aux troupes au sol un appui rapide et son canon de 30 mm asservi au viseur de casque s'avère d'une redoutable efficacité. En Libye, nous avons engagé des Tigre, des Gazelle, des hélicoptères dédiés aux missions de recherche et sauvetage au combat (CSAR) et des hélicoptères Caracal des forces spéciales. La disponibilité des Tigre est excellente, proche de 100 %.

Pour les hélicoptères comme pour les avions de combat, le haut niveau de disponibilité en opération a évidemment pour contrepartie une disponibilité moindre dans les bases.

Nous portons une attention particulière à l'autoprotection des Tigre, afin d'adapter nos contre-mesures, comme les leurres infrarouge, à la menace à laquelle nos appareils sont exposés.

L'opération en Libye souligne le rôle clef de la capacité de renseignement d'origine électromagnétique. Nous nous appuyons sur les Transall C160 Gabriel et sur la nacelle Astac des Mirage F1. Ces moyens datent un peu, mais ils ont fourni le renseignement nécessaire et nous ont permis de disposer des caractéristiques précises des systèmes sol-air libyens. Nous avons ainsi pu programmer les brouilleurs de nos avions de combat préalablement à leur entrée en premier sur le théâtre.

Dans cette opération, la DGA apporte son soutien technique aux forces. En particulier, nous instruisons et validons les adaptations à apporter en urgence à nos systèmes pour répondre aux particularités du théâtre.

Il nous faut être très réactifs face à ces « urgences opération ».

Nos industriels ont également été impliqués dans ce soutien. Par exemple, Dassault-Aviation est intervenu à Solenzara et sur le porte-avions pour apporter son assistance et effectuer quelques réglages en matière de radio et de circuits de carburant.

A ce stade, la DGA n'a pas été saisie de demande de recomplètement des systèmes d'armes par l'état-major des armées. Je suis convaincu que, le cas échéant, nos industriels sauraient répondre avec souplesse et réactivité. Ils l'ont démontré lorsqu'il a fallu rapidement commander une centaine de kits AASM supplémentaires à livrer en 2011.

Bien entendu, nous faisons valoir le retour d'expérience des opérations en cours auprès des partenaires intéressés par nos équipements. Certains pays se montrent très intéressés par le Tigre qui s'est révélé être un système d'armes redoutable, alors même que dans sa configuration HAP il n'a pas encore de capacité antichar.

Les enseignements principaux que nous tirons de l'opération en Libye portent sur la nécessité d'une très forte réactivité dans la planification des opérations et sur l'attention toute particulière à porter sur le renseignement, qu'il provienne des satellites, des pods de reconnaissance ou des drones. Il faut à la fois améliorer la permanence sur zone du recueil de renseignement et la rapidité de sa transmission aux échelons pertinents, et renforcer la capacité de nos liaisons en termes de débit.

Nous avons progressé dans nos capacités d'identification, afin d'éviter les dommages collatéraux. En particulier, ces opérations confirment l'apport majeur des drones de type MALE notamment à travers l'engagement de drones REAPER américains. Ces drones ont été extrêmement efficaces et ont apporté une plus-value exceptionnelle pour la détection de cibles d'opportunité qui ont ainsi pu être assignées aux avions de combat.

Nous considérons également qu'il faut rapidement améliorer les capacités du pod Damocles dans l'identification de petites cibles de jour. Nous devons pouvoir renforcer notre capacité de tir sur cibles mobiles. Une expérimentation a été effectuée en ce sens avec l'AASM (Laser) au centre DGA-Essais de missiles de Biscarosse.

Enfin, l'intensité des opérations provoque des tensions sur le maintien en condition opérationnelle. Nous enregistrons des pics de consommation de potentiel et de charge d'entretien des matériels.

Pour conclure, ce retour d'expérience permet de valider les choix que nous avions effectués lors de la conception des matériels et de conforter nos analyses capacitaires antérieures. Dans cette perspective, les priorités porteront sur le pod de désignation laser de nouvelle génération, sur les ravitailleurs multi-rôles MRTT - nous avons mobilisé une grande partie de nos ravitailleurs dans l'opération Harmattan -, sur l'A400M, sur le satellite d'écoute électromagnétique CERES, nécessaire pour établir l'ordre de bataille adverse, et bien entendu sur les drones d'observation MALE. Nous allons également évaluer la possibilité d'équiper le Rafale de missiles antichar Brimstone, ce qui soulève quelques difficultés telles que les flammes lors du départ du missile.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

La presse fait état de la forte sollicitation du matériel dans l'opération en Libye, notamment en ce qui concerne le porte-avions. Il risque d'y avoir un vrai problème concernant le maintien en condition opérationnelle des équipements. Comment envisagez-vous les choses ? Les forces françaises ont tiré un grand nombre d'obus. Il va falloir recompléter les stocks, comment voyez-vous la situation ? Par ailleurs, est-ce que les autorités brésiliennes ont été informées des performances du Rafale ? Quelles leçons tirez-vous pour l'instant de la coopération franco-britannique ?

Debut de section - Permalien
Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement

L'usure du porte-avions va immanquablement se répercuter tôt ou tard et le délai d'interruption qu'il devra subir sera supérieur à ce qu'il aurait été autrement. A la DGA, nous veillons plus particulièrement à l'usure des catapultes et au bon fonctionnement de la ligne d'arbre. Sur ces deux sujets tout se passe bien et nous n'avons pas d'inquiétude particulière. Le reste est de la maintenance habituelle et il n'y a pas de vrai problème. Pour ce qui concerne les Rafale, nous allons livrer le centième avion à l'armée de l'air et les flottilles aéronavales sont équipées convenablement. Les forces ont ce dont elles ont besoin. Nous avons fait ce qu'il faut. Par ailleurs, le Mirage 2000D est parfaitement rodé. Le porte-avions devra subir une intervention très lourde en 2015. Il restera immobilisé pendant dix-huit mois. Il faudra que l'on recharge son combustible nucléaire.

Concernant les obus, la consommation est importante, mais elle se fait sur des munitions qui sont produites en France. Nexter a réussi un mariage munitions-canon tout à fait excellent.

S'agissant de la promotion des équipements français, nous faisons ce qu'il faut pour que nos amis brésiliens soient informés des performances de nos équipements en général et du Rafale en particulier. Avec les Emirats-arabes unis, les discussions ont lieu à un rythme soutenu. Quant aux forces indiennes, nous sommes dans l'expectative.

Pour ce qui est de la coopération franco-britannique en Libye, nous savons qu'ils ont des problèmes sur la maintenance de leurs hélicoptères Apache, mais c'est un problème récurrent sur cette machine qui est très sophistiquée et donc très fragile. Pour ce qui est des Typhoon, ils sont effectivement désormais « combat proven », dans la mission de défense aérienne, même s'ils n'ont pas été beaucoup inquiétés par la chasse libyenne. Concernant les chasseurs bombardiers, nos amis britanniques ont une vraie inquiétude entre le retrait programmé des Tornado et les JSF qui ont beaucoup de retard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Monsieur le délégué général, nous nous avons une vraie faiblesse dans le domaine des drones MALE. Un comité ministériel d'investissement (CMI) était prévu fin juillet sur cette question. Or une lettre de demande (letter of request) n'a toujours pas été envoyée à General Atomics. Nous savons que cette entreprise a fait une offre très compétitive qui a le mérite de ne pas obérer l'avenir industriel de la filière drone française. Qu'en est-il ?

Deuxième question : les forces attendent avec impatience l'arrivée des avions ravitailleurs MRTT. Quand nous déciderons nous à accélérer la deuxième partie de la loi de programmation militaire ?

Les pods Damoclès sont, selon nos pilotes, inadaptés aux missions qui sont les leurs en Libye. L'industriel nous dit qu'ils n'ont pas été conçus pour cela. Quand aurons-nous des pods de désignation d'objectifs à la hauteur ?

Enfin, nous avons beaucoup milité au Sénat pour le missile terrestre à moyenne portée (MMP). Est-ce que l'on avance dans ce sens ?

Debut de section - Permalien
Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement

Concernant les drones tout d'abord, nous connaissons parfaitement les offres de General Atomics, de Dassault-IAI et de Cassidian. Mais nous n'avons toujours pas de décision.. Nous ne pouvons pas continuer à maintenir les Harfang, ce qui pourrait conduire à un vrai problème en 2013-2014. Nous avons trois options : rénover ces systèmes, mais nous retomberons sur un vecteur aux capacités limitées. Ce n'est pas l'option de la DGA. Nous connaissons par coeur les propositions de General Atomics. Ils ont oublié que, dans le processus des Foreign Military Sales, l'armée de l'air américaine rajoute aux prix des producteurs 4 % de frais de gestion. Nous connaissons également par coeur l'offre de Dassault et de l'Israélien IAI pour le Héron TP. Le ministre a tous les éléments en sa main. En Libye, l'apport des drones REAPER engagés par les Américains a permis tout à la fois de conforter si besoin l'intérêt de ce type de moyens et de souligner la dépendance envers des moyens américains.. Nous sommes confrontés à un vrai problème de souveraineté.

Pour le MRTT, nous restons calés sur un lancement du programme en 2013 et les premières livraisons dans les forces en 2017. Nous étudions avec nos alliés britanniques la possibilité de faire du pooling and sharing. Je vous invite par ailleurs, même si je sais que le budget « voyages » de la commission est mesuré au plus près, à visiter l'usine de Getafe en Espagne où sont transformés les A330 en ravitailleurs MRTT. C'est tout à fait instructif et l'on comprend mieux pourquoi on ne peut pas effectuer cette transformation sur les chaînes d'assemblage à Toulouse.

Le pod Damoclès actuel n'est pas parfaitement adapté, c'est un fait. Nos forces ont besoin d'un pod avec une voie jour excellente, du même niveau que les pods Sniper ou Lightning. Nos industriels savent le faire. Nous avons du reste bouclé une négociation avec Thales sur ce sujet.

Enfin, sur le MMP, j'ai des raisons de penser que nous approchons du but..

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Le porte-avions sera indisponible dans deux ou trois ans pour une durée de dix-huit mois et nous serons alors au pied du mur. On voit bien que le problème était d'en faire deux ou pas du tout. Alors que toute la tension actuelle se concentre sur les rives de la Méditerranée, nous serons bientôt sans moyen d'actions. Cela fait bientôt dix ans que nous tournons autour du pot avec nos amis britanniques. Nous avons même dépensé beaucoup d'argent dans des études dont nous n'avons aucunement profité. Le résultat de notre indécision est qu'il y aura un trou capacitaire.

Debut de section - Permalien
Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement

Effectivement, nous avons mené des travaux avec les Britanniques qui ont produit un « design » qui est maintenant la propriété de BAE. Les Britanniques réaliseront deux coques, dont une seule portera des catapultes. Le second porte-avions est un sujet qui reviendra immanquablement à l'ordre du jour en 2012-2013 lorsqu'il s'agira de réviser le Livre blanc. S'agissant de la mutualisation, le porte-avions britannique pourra recevoir des Rafale français sans aucun problème. Mais s'ils maintiennent leur option pour le JSF naval, qui est un avion très lourd, notre porte-avions ne sera pas capable de les accueillir. Compte tenu des retards accumulés sur le JSF, la solution serait bien évidemment qu'ils achètent du Rafale naval. Mais le voudront-ils ? Leur dépendance envers les Etats-Unis n'est pas sans susciter quelques interrogations chez eux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Chevènement

Le porte-avions tiendra peut être jusqu'au Ramadan, qui comme chacun le sait sera cette année au mois d'août. Mais tout de même, il nous manque toujours les moyens militaires nécessaires à nos ambitions politiques. Tout cela parce que nous avons sacrifié à des dieux qui aujourd'hui s'effondrent sur les marchés financiers. Je voudrais savoir quel est le coût journalier des opérations militaires en Libye. Comment va-t-on le financer ?

Du point de vue des munitions, comment fait-on pour se réapprovisionner ? Par ailleurs, à toute chose malheur est bon, il faut quand même que cette guerre nous serve à faire la promotion de nos équipements militaires. Que faites vous en ce sens ?

Enfin, je suis très inquiet concernant l'exécution de la loi de programmation militaire. Tous les adversaires de la dissuasion nucléaire vont se manifester et c'est dans la pensée, sinon affichée, du moins en filigrane, de beaucoup de gens réputés qui s'expriment dans les journaux.

Debut de section - Permalien
Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement

Les munitions que nous utilisons en Libye sont toutes produites en France. Les seules munitions que nous achetons à l'étranger sont les balles de 5,56 mm et les bombes GBU que nous achetons aux Américains. Sur ces dernières, les Américains jouent le jeu et nous fournissent en tant que de besoin.

Pour ce qui est de la promotion de nos équipements, nous avons réalisé - pour ce qui nous concerne - des campagnes ciblées sur nos principaux prospects. Je regrette en revanche que la presse nationale ne se fasse pas davantage l'écho des succès que nous enregistrons, alors que les papiers à la gloire des armées et de leurs équipements sont journaliers Outre-manche. Nous avons réalisé pour les prochaines Universités d'été de la défense une numérisation en trois dimensions de la vallée de la Kapissa en Afghanistan. J'ai pu réaliser que c'était un vrai guêpier en termes militaires. Je ne parle pas seulement des montagnes et des cols, mais je parle de la plaine et des villes, qui ont des rues étroites avec des murs de plus de trois mètres de haut, qui interdisent toute vision d'ensemble et rendent la tâche facile à des groupes de combattants insurgés. Or la presse n'en parle pas.

S'agissant de la dissuasion nucléaire, il nous faut admettre que notre outil de production a vieilli et qu'il faudra bientôt songer à le remplacer. Or ce sont des équipements extrêmement coûteux.

La commission entend une communication de M. Josselin de Rohan sur la réunion des présidents de commission de défense des Parlements de l'Union européenne, à Varsovie les 4 et 5 juillet 2011.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Du 3 au 5 juillet dernier, j'ai effectué un déplacement à Varsovie afin de participer à la réunion des présidents des commissions de la défense des Parlements de l'Union européenne, organisée par la Diète et le Sénat polonais, dans le cadre de la présidence polonaise de l'Union européenne, qui a débuté le 1er juillet.

La dernière réunion de ce type s'était tenue en novembre 2009 à Stockholm, sous présidence suédoise de l'Union européenne. En effet, aucun des trois pays qui ont exercé la présidence semestrielle de l'Union européenne depuis cette date, c'est-à-dire la Belgique, l'Espagne et la Hongrie, n'avait jugé utile d'organiser une telle réunion.

Cela illustre toute l'importance accordée par la Pologne au renforcement de la politique de sécurité et de défense commune, qui figure parmi les priorités de la présidence polonaise de l'Union européenne.

Je tiens, à cet égard, à féliciter et à remercier les présidents des commissions de la défense de la Diète, M. Stanislaw Wziatek, et du Sénat, M. Maciej Klima, pour la qualité de leur accueil et la très bonne organisation de cette réunion.

Lors de cette conférence, la plupart des parlements de l'Union européenne étaient représentés, à l'exception notable de l'Allemagne. L'Assemblée nationale était représentée par le Président, M. Guy Teissier, tandis que le Parlement européen était représenté par notre compatriote M. Arnaud Danjean, qui préside la sous-commission « défense et sécurité ».

Au cours de cette réunion, nous avons entendu des interventions du Président de la République de Pologne, M. Bronislaw Komorowski, du Maréchal de la Diète, M. Grzegorz Schetyna, du ministre polonais de la Défense, M. Bogdan Klich, du Secrétaire général adjoint du service européen pour l'action extérieure, M. Maciej Popowski, de la vice-Présidente de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN, Mme Jadwiga Zakrzewska, du conseiller diplomatique du Président polonais, M. Roman Kuzniar, de l'ancien ministre polonais des affaires étrangères, M. Adam Rotfeld, et du Président de la commission de la défense du Conseil de la Fédération de Russie, M. Viktor Ozerov.

Au cours de notre visite, nous avons également eu un entretien très intéressant avec notre ambassadeur en Pologne, M. François Barry Delongchamps, qui nous a « décrypté » la politique étrangère polonaise.

Trois principaux thèmes ont été évoqués au cours de la conférence :

- les priorités de la présidence polonaise concernant la politique de sécurité et de défense commune ;

- la politique étrangère de l'Union européenne, en particulier à la lumière de la Libye ;

- les relations entre l'Union européenne et la Fédération de Russie.

Je vous présenterai donc mes réflexions sur ces trois points.

Le premier thème de la réunion a porté sur les priorités de la présidence polonaise concernant la politique de sécurité et de défense commune.

Alors que la Pologne figurait, il y a encore quelques années, parmi les Etats membres de l'Union européenne les plus réticents à l'égard de l'Europe de la défense et comme un soutien inconditionnel de l'OTAN et des Etats-Unis sur le continent européen (comme l'ont illustré le soutien de la Pologne à l'intervention en Irak ou encore l'achat de chasseurs F16 américains), la Pologne a fait du renforcement de l'Europe de la défense l'une des priorités de sa présidence de l'Union européenne.

Ainsi, nous avons retrouvé, dans les plaidoyers, aux accents « gaulliens », du Président de la République de Pologne, M. Bronislaw Komorowski, et du ministre polonais de la défense, M. Bogdan Klich, en faveur du renforcement de l'Europe de la défense, des idées que la France plaide sans relâche depuis plus de vingt ans, sans recevoir un grand écho jusqu'à présent au sein de l'Union européenne.

Quelles sont les raisons qui expliquent cette conversion tardive de la Pologne à l'Europe de la défense ?

La première raison tient à l'arrivée au pouvoir d'un gouvernement libéral dirigé par le Premier ministre M. Donald Tusk et à l'élection d'un Président de la République, M. Bronislaw Komorowski, « pro-européens », après la politique nationaliste et atlantiste des jumeaux Kaczynski.

Une autre explication tient au succès économique de la Pologne, depuis son adhésion à l'Union européenne le 1er mai 2004.

Ainsi, la Pologne a été le seul pays européen à avoir été épargné par la crise économique en 2009 et est aujourd'hui le premier bénéficiaire des fonds structurels, ce qui explique que l'opinion publique polonaise est très « europhile ».

Mais ce revirement s'explique principalement par la profonde déception de la Pologne à l'égard des Etats-Unis.

Ainsi, la Pologne a été « humiliée » par la décision prise par le Président Barack Obama de renoncer à l'installation d'intercepteurs du système américain de défense anti-missiles sur son territoire, dans le cadre de sa politique de rapprochement avec la Russie (le « reset »), même si l'installation en Pologne d'intercepteurs SM3, dans le cadre du système de défense anti-missiles de l'OTAN, est prévue à l'horizon 2018.

D'autant plus que cette décision a été annoncée par les Etats-Unis le 17 septembre 2009, soit le jour de l'anniversaire de l'invasion de la Pologne par l'Union soviétique, en application du Pacte Ribbentrop-Molotov.

Alors que la Pologne s'était fortement engagée aux côtés des Etats-Unis, en Irak ou en Afghanistan, elle estime n'avoir pas été « payée » en retour et en a tiré une profonde amertume, d'autant plus que les américains ont maintenu l'obligation de visas pour les Polonais souhaitant se rendre aux Etats-Unis. Surtout, cette décision a été perçue par la Pologne comme le début d'un retrait des Etats-Unis, dont le signe précurseur avait été l'absence totale de réaction américaine et de l'OTAN lors de la guerre russo-géorgienne de l'été 2008, sentiment qui a été conforté par le récent discours de Robert Gates, appelant les Européens à prendre leurs responsabilités pour assurer leur sécurité.

Dans ce contexte, la Pologne a opéré un « revirement stratégique » et soutient désormais fortement le renforcement de l'Europe de la défense, dont elle a fait l'une des priorités de sa présidence de l'Union européenne.

Cependant, alors que ce ralliement de la Pologne à l'Europe de la défense aurait dû conduire à nous rapprocher, il nous conduit paradoxalement à nous éloigner.

Ainsi, la presse française s'est fait l'écho des supposées « réserves » manifestées par plusieurs pays, dont la France, à l'égard des propositions de la Pologne concernant le renforcement de l'Europe de la défense.

Pour simplifier, c'est un peu comme si on se retrouvait dans la situation inverse, avec la Pologne qui se montre très allante sur l'Europe de la défense et la France qui se montre plus réticente.

Comment expliquer ce paradoxe ?

Comme nous avons pu le constater lors de nos entretiens, la réintégration pleine et entière de la France dans les structures de l'OTAN et surtout les récents accords franco-britanniques en matière de défense ont été perçus par beaucoup de pays européens, dont la Pologne, comme le signe d'un « renoncement » par la France à l'ambition d'une défense européenne autonome, ce qui n'est évidemment pas le cas.

Une autre explication tient au fait que la présidence polonaise développe une approche très « institutionnelle » de l'Europe de la défense, alors que la France privilégie une approche pragmatique et concrète.

Ainsi, la Pologne souhaitait, dans le cadre de sa présidence, donner corps à la notion de « coopération structurée permanente ». Je rappelle que la « coopération structurée permanente » est un concept introduit par le traité de Lisbonne, qui permet à un groupe d'Etats membres qui le souhaitent et qui remplissent certains critères dans le domaine des capacités militaires d'aller plus loin en matière de défense.

La « coopération structurée permanente » est donc une forme particulière de « coopération renforcée », qui permettrait par exemple à un groupe d'Etats de renforcer leur coopération en matière d'armements, d'interopérabilité de leurs forces armées ou encore de lancer des programmes communs d'équipements.

Il s'agit toutefois d'un mécanisme assez rigide, puisqu'il suppose une adoption par le Conseil et une convention entre les Etats.

Surtout, une telle initiative supposerait la mise en commun de capacités militaires, ce qui paraît très difficile dans un contexte de réduction des budgets de la défense en Europe, en raison de la crise économique. La plupart des Etats membres, dont le Royaume-Uni, la France et l'Allemagne, ont émis des réserves et la Pologne a du renoncer à cette idée.

Si nous partageons l'objectif d'une relance de l'Europe de la défense, il nous paraît qu'une approche plus pragmatique et concrète serait plus efficace.

C'est la raison pour laquelle la France, l'Allemagne et la Pologne ont fait, dans le cadre du « Triangle de Weimar », des propositions concrètes pour relancer l'Europe de la défense, qui figurent dans une lettre adressée par les ministres des affaires étrangères et de la défense des trois pays à la Haute représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Mme Catherine Ashton.

Ces propositions, qui témoignent d'une approche pragmatique et concrète, s'articulent autour de quatre priorités :

- le renforcement des capacités permanentes de planification et de conduite des opérations au niveau européen ;

- la coopération entre l'Union européenne et l'OTAN ;

- l'utilisation des groupements tactiques ;

- la mutualisation des capacités (« pooling and sharing »).

Toutefois, si ces quatre thèmes ont été repris par la présidence polonaise, les premières consultations menées auprès des représentants des Etats membres n'ont guère été encourageantes, comme cela nous a été confirmé.

La création d'un véritable centre permanent de planification et de conduite des opérations (sorte de « quartier général européen ») de l'Union européenne se heurte toujours au veto du Royaume-Uni, qui y voit une duplication de l'OTAN.

La coopération entre l'Union européenne et l'OTAN est durablement bloquée en raison du conflit chypriote et de l'intransigeance de la Turquie, qui refuse toujours d'appliquer les dispositions du protocole d'Ankara et d'ouvrir ses ports aux navires en provenance de Chypre, malgré les inconvénients de cette situation sur les théâtres d'opérations, comme en Afghanistan.

Alors qu'il existe, depuis déjà plusieurs années, une vingtaine de « groupements tactiques », ils n'ont jusqu'à présent encore jamais été utilisés en opérations.

Dans un contexte de réduction sensible des budgets de la défense chez la quasi-totalité de nos partenaires, il paraît très difficile d'envisager de nouvelles coopérations industrielles en matière d'armement.

L'Agence européenne de défense, dont Chypre bloque l'accès à la Turquie par représailles, a vu son budget « gelé » pour 2012, à la demande des britanniques, son budget ne représentant pourtant que 30 millions d'euros.

La plupart des Etats membres, et en particulier l'Allemagne, sont réticents à l'idée de lancer de nouvelles opérations de l'Union européenne, en large partie pour des raisons budgétaires et en raison d'une certaine « lassitude » de l'opinion publique, notamment par rapport à l'Afghanistan. Le sentiment général est qu'il n'existe pas aujourd'hui parmi les vingt-sept Etats membres de réelle volonté d'avancer sur l'Europe de la défense.

C'est la raison pour laquelle j'ai plaidé pour que ce sujet soit évoqué lors d'un Conseil européen, car il me semble que, dans le contexte actuel, seule une forte volonté politique au niveau des chefs d'Etat et de gouvernement permettrait réellement de relancer la politique de sécurité et de défense commune.

En effet, Mme Catherine Ashton elle-même ne semble pas manifester un grand intérêt pour les questions de défense. Ainsi, la Haute représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité a annoncé qu'elle ne participera pas à la prochaine réunion des ministres de la défense, car elle préfère se rendre à New York pour participer à une conférence sur le racisme.

En réalité, à la veille de la présidence polonaise, la crise libyenne a porté un coup sévère à l'Europe de la défense, puisque l'Union européenne est restée spectatrice d'une crise majeure intervenue à sa porte, exactement comme il y a une dizaine d'années dans les Balkans.

Le deuxième sujet de la conférence a porté sur la politique étrangère de l'Union européenne.

Lors de la crise libyenne, l'Union européenne est apparue fortement divisée, avec d'un côté les pays favorables à une intervention, comme la France et le Royaume-Uni, et de l'autre les pays opposés, comme l'Allemagne et la Pologne. Le conseiller diplomatique du président polonais n'a d'ailleurs pas manqué de s'interroger publiquement au cours de la conférence sur la légitimité, le déroulement et l'issue de cette opération, ce qui a conduit les représentants français et britannique à réagir à ses propos.

Malgré la création du Haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et du service européen pour l'action extérieure par le traité de Lisbonne, l'Union européenne n'arrive toujours pas à parler d'une seule voix sur la scène internationale en raison des divisions entre les Etats membres.

A cet égard, de nombreux intervenants ont évoqué le risque que l'Union européenne apparaisse à nouveau fortement divisée, en septembre prochain, dans l'hypothèse du vote sur une éventuelle résolution sur la reconnaissance de l'Etat palestinien aux Nations Unies.

Un autre risque tient au fait que, faute d'une défense européenne crédible et autonome, l'Union européenne s'en tienne à une « diplomatie du chéquier », c'est-à-dire qu'elle intervienne uniquement sur les aspects civils ou humanitaires, devenant ainsi une sorte de « super ONG » ou d' « OSCE bis », alors que les opérations militaires seraient assurées par l'OTAN, à l'image de l'intervention en Libye.

Or, le profil du service européen pour l'action extérieure et l'influence de la Commission européenne accentuent cette tendance européenne.

Enfin, le dernier sujet qui a été évoqué lors de la conférence a porté sur les relations entre l'Union européenne et la Russie.

Depuis déjà quelques années, la Pologne a effectué un rapprochement avec la Russie, qui s'est notamment illustré lors de la tragédie de Smolensk.

Le renforcement des relations avec la Russie figure ainsi parmi les priorités de la présidence polonaise de l'Union européenne.

Pour autant, si les relations se sont en apparence apaisées, il semble encore subsister beaucoup de méfiance de la part de la Pologne à l'égard de son voisin.

Lors de la réunion, nous avons entendu une intervention très intéressante de M. Adam Rotfeld, ancien ministre polonais des affaires étrangères. Nous avons également pu écouter le président de la commission de la défense du Conseil de la Fédération de Russie, M. Viktor Ozerov.

En ce qui concerne les relations entre l'OTAN et la Russie, c'est surtout la question du système de défense anti-missiles qui a été évoquée, puisque, malgré la volonté de coopération annoncée lors du Sommet de l'OTAN à Lisbonne, de nombreux désaccords persistent entre l'OTAN et la Russie sur l'architecture et la localisation de ce système.

S'agissant des relations entre l'Union européenne et la Russie, il a été beaucoup question du « Partenariat oriental ».

La Pologne souhaite, en effet, organiser un Sommet des pays du Partenariat oriental (Ukraine, Moldavie, Géorgie, Arménie et Azerbaïdjan), afin de renforcer la coopération avec les voisins orientaux, ce qui soulève une certaine inquiétude de la part de la Russie, qui veut conserver son influence dans ce qu'elle considère comme son « pré-carré ».

Pour ma part, j'ai évoqué l'idée de la chancelière allemande Mme Angela Merkel de créer un Conseil Union européenne-Russie, sur le modèle du Conseil OTAN-Russie, pour discuter de la politique étrangère, tout en souhaitant davantage d'ouverture de la part de la Russie s'agissant de la résolution des « conflits gelés », comme la Transnistrie, le Haut-Karabakh ou encore les entités séparatistes en Géorgie.

En réponse, le président de la commission de la défense russe n'a pas manqué de faire un parallèle entre les entités séparatistes d'Ossétie du Sud et d'Abkhazie avec le Kosovo et de critiquer l'intervention en Libye.

L'idée d'un accord sur la participation de la Russie aux opérations militaires de l'Union européenne a également été abordée, à la lumière de l'expérience au Tchad, où la Russie avait fourni quatre de ses hélicoptères.

Toutefois, cet accord se heurte à une difficulté car autant la Russie est disposée à placer ses troupes sous commandement européen ou mixte, autant les européens, et notamment les pays d'Europe centrale et orientale, ne sont pas disposés à placer leurs hommes sous commandement russe.

En conclusion, tous les participants ont souligné l'intérêt, pour les parlementaires nationaux, de pouvoir échanger régulièrement sur les questions de politique étrangère et de défense au niveau européen.

La mise en place d'une conférence semestrielle consacrée au suivi des questions de politique étrangère et de défense par les Parlements nationaux, après la disparition de l'assemblée de l'UEO, figurait d'ailleurs à l'ordre du jour de la dernière conférence des présidents des Parlements, où j'avais accompagné le Président Gérard Larcher.

Toutefois, il n'avait pas été possible d'aboutir à un accord sur la taille de la délégation du Parlement européen, puisque celui-ci réclamait au moins vingt-sept représentants, contre six représentants pour chaque Etat membre.

Ce sujet devrait être à nouveau évoqué lors de la COSAC.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Je vous remercie pour votre communication.

Le changement d'approche de la Pologne à l'égard de l'Europe de la défense constitue une nouveauté importante, comme nous avions pu le percevoir lors de l'audition de l'ambassadeur de Pologne sur les priorités de la présidence polonaise de l'Union européenne, le 29 juin dernier. La Pologne participe à de nombreuses opérations de l'OTAN et de l'Union européenne, en Afghanistan, en Bosnie-Herzégovine, en Macédoine et au Kosovo, en Géorgie, au Congo ou encore au Tchad et en République centrafricaine. La Pologne a fait du renforcement de la politique de sécurité et de défense commune l'une des priorités de sa présidence de l'Union européenne.

L'absence de l'Allemagne à cette réunion illustre la position de repli de ce pays, que l'on perçoit également au sein de l'assemblée parlementaire de l'OTAN, à l'égard des questions de défense et comme le montre son abstention lors du vote de la résolution 1973 au Conseil de sécurité des Nations unies sur la Libye.

Enfin, j'ai relevé avec intérêt votre analyse de la perception par la Pologne de l'attitude de retrait de la France à l'égard de l'Europe de la défense, après la réintégration pleine et entière de la France dans les structures de commandement de l'OTAN et la conclusion des accords franco-britanniques en matière de défense, sur lesquels j'étais et je suis toujours personnellement très réservé.

Je rappelle à cet égard que la décision prise par le Président de la République de la réintégration pleine et entière de la France dans les structures et organes de l'OTAN avait été conditionnée par des progrès de la politique de sécurité et de défense commune.

Or, malgré les discours, notamment pendant la présidence française de l'Union européenne, aucune avancée n'a été réalisée en ce qui concerne l'Europe de la défense ces dernières années.

Par ailleurs, comme j'ai pu moi-même le constater lors de mes différents entretiens ou visites à l'étranger, les accords franco-britanniques en matière de défense ont été perçus par nos partenaires européens comme un renoncement par la France de l'ambition d'une défense européenne autonome.

Ces accords ont provoqué un véritable « malaise » chez nos partenaires européens, auprès des responsables politiques, mais aussi dans les milieux industriels, je pense notamment au délégué général pour l'armement italien, avec lequel j'ai eu l'occasion de m'entretenir.

C'est la raison pour laquelle j'étais personnellement très réservé sur ces accords.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

L'attitude allemande face à la crise libyenne s'explique par les dissensions existantes au sein de la coalition gouvernementale entre la CDU-CSU de la chancelière Mme Angela Merkel, qui était plutôt favorable à une intervention, et son partenaire de la coalition, le parti libéral-démocrate, dont est issu le ministre des affaires étrangères M. Guido Westerwelle, qui était hostile à cette intervention.

Les difficultés budgétaires et une certaine lassitude de l'opinion publique à l'égard des opérations extérieures, notamment à la lumière de l'expérience en Afghanistan, expliquent aussi cette réticence.

Comme nous l'a indiqué le ministre allemand de la défense, M. Thomas de Maizière, lors de son audition conjointe avec la commission de la défense de l'Assemblée nationale, le 6 juillet dernier, l'Allemagne a engagé une profonde réforme de sa politique de défense, avec en particulier la professionnalisation de son armée et le renforcement de son industrie de défense. Cette réforme pourrait conduire l'Allemagne à se rapprocher des analyses françaises.

Dans un contexte de réduction des budgets de la défense chez la quasi-totalité de nos partenaires européens, en raison de la crise économique et de l'absence de menace identifiée, les Européens sont davantage tentés de remettre leur propre sécurité entre les mains de l'OTAN et des Etats-Unis, comme l'illustre la question de la défense anti-missiles.

Cela explique l'absence de volonté au sein de l'Union européenne pour progresser sur la défense européenne.

J'ai la conviction, qui est tirée de l'avertissement adressé aux Européens par Robert Gates, que l'Europe de la défense pourra réellement progresser le jour où les contribuables américains ne voudront plus payer pour financer la défense du continent européen.

Ce jour là, les Européens seront placés devant leurs propres responsabilités et devront s'entendre pour assurer seuls leur propre sécurité sur le continent européen.

Alors, l'Europe de la défense, que nous appelons tous de nos voeux, s'imposera enfin comme une nécessité.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

Je rappelle que, pour les pays d'Europe centrale et orientale, l'adhésion à l'Union européenne était synonyme de prospérité économique, mais qu'en matière de sécurité et de défense, leur première priorité était l'entrée dans l'OTAN et la protection offerte par les Etats-Unis.

La crise libyenne a montré l'absence de politique étrangère et de défense de l'Union européenne et a illustré l'intérêt de l'OTAN, exactement comme il y a dix ans dans les Balkans.