Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Réunion du 21 novembre 2012 : 2ème réunion

Résumé de la réunion

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  • artistique
  • spectacle

La réunion

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Au cours d'une première séance, tenue dans la matinée, la commission examine les amendements sur la proposition de loi n° 120 (2011-2012) relative aux écoles de production.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Nous sommes saisis d'une motion déposée par le groupe socialiste tendant à opposer la question préalable sur la proposition de loi relative aux écoles de production.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques-Bernard Magner

Il ne nous semble pas souhaitable d'étendre, même à titre expérimental, le dispositif des écoles de production qui ne concerne, pour l'heure, qu'une quinzaine d'établissements. Il s'adresse en partie à des enfants de 14 ans qui ont cruellement besoin de formation générale. Les réflexions que nous conduisons dans le cadre du groupe de travail sur le pré-recrutement dans l'éducation nationale nous démontrent qu'il n'est pas judicieux d'enfermer les étudiants enseignants dans des parcours universitaires excessivement spécialisés et restrictifs. Il en va de même, à mon sens, pour des jeunes de 14 à 16 ans qui, bien qu'ils aient décroché du système scolaire traditionnel, ne savent pas pour autant comment ils veulent se réaliser professionnellement. Il est parfois nécessaire de leur donner le temps de réfléchir à leur projet éducatif, en prenant soin de ne pas les prédéterminer dans une voie de formation presque exclusivement professionnelle. Certains, lorsqu'ils ont acquis un peu plus de maturité, sont parfois prêts à reprendre des études.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Comme le soulignent les auteurs de cette motion, le statut mis en place par cette proposition de loi relève d'un aménagement juridique assez artificiel qui tend à faire bénéficier les écoles de production des avantages juridico-financiers à la fois réservés aux organismes de formation des apprentis et aux établissements sous contrat avec l'éducation nationale, sans aucune contrepartie en termes de contrôle pédagogique.

Je suis donc favorable à l'adoption de cette motion.

La commission décide de donner un avis favorable à l'adoption de la motion tendant à opposer la question préalable sur la proposition de loi relative aux écoles de production.

Puis la commission examine les rapports pour avis de MM. Vincent Eblé, Philippe Nachbar, Mme Maryvonne Blondin, MM. Pierre Laurent sur les crédits de la mission « Culture » du projet de loi de finances pour 2013.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Eblé

En introduction, je souhaiterais dire que je me suis attaché, dans ce rapport, à analyser non seulement les crédits destinés aux différentes catégories de patrimoine, mais aussi à essayer de définir les sujets clés qui mériteront toute notre attention dans les mois à venir. Ceci est d'autant plus important que la ministre a annoncé un projet de loi sur les patrimoines en 2013 et il est évident que notre commission aura un grand rôle à jouer à cette occasion. Avec le programme 175, qui regroupe les crédits de la mission « Culture » destinés à soutenir le patrimoine sous toutes ses formes, le ministère de la culture contribue aujourd'hui à l'effort budgétaire collectif proposé par le Gouvernement.

On observe une diminution des crédits en 2013 :

- de 5,5 % pour les autorisations d'engagement qui s'établissent à 760,49 millions d'euros ;

- et de 9,9 % des crédits de paiement qui s'élèvent à 775,92 millions d'euros.

Ceci constitue la plus forte baisse de la mission « Culture », en comparaison avec les programmes « Création » et « Transmission des savoirs ». Une bonne partie de la diminution des crédits est toutefois liée à l'achèvement de grands travaux (je pense ici au MuCEM ou aux Archives nationales) ou à l'annulation de projets comme la Maison de l'Histoire de France, qui avait d'ailleurs suscité de vives inquiétudes au sein de notre commission dès l'année dernière.

Seule l'action 2, relative à l'architecture, est préservée puisque ses crédits augmentent de 4,2 % en autorisations d'engagement et de 0,8 % en crédits de paiement. Je me félicite de cette bonne nouvelle pour le patrimoine de demain, et de la cohérence de l'action du ministère puisque le même effort est prévu dans le programme 224 « Transmission des savoirs ». Ces crédits vont permettre en 2013 de soutenir la profession d'architecte, et de valoriser la promotion de la qualité architecturale, urbaine et paysagère. 3,35 millions d'euros sont prévus pour accompagner la transformation des zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) en aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (AVAP) en application de la loi dite « Grenelle 2 ». Parallèlement, la ministre a indiqué son souhait de revenir sur le délai couperet de 2015, ce dont je me réjouis car sur les 675 ZPPAUP, 100 d'entre elles au plus auraient été prêtes à devenir des AVAP dans les délais définis par la loi.

L'action 1 « Patrimoine monumental » enregistre des baisses de crédits importantes, jusqu'à 12,9 % pour les crédits de paiement qui s'établissent à 328 millions d'euros, tandis que les autorisations d'engagement, avec 339 millions d'euros, diminuent très peu (de 0,9 %). Les crédits de paiement hors grands projets s'élèvent à 297 millions d'euros. Si les crédits destinés à la restauration diminuent de 13,3 % par rapport à 2012, en revanche les autorisations d'engagement des crédits déconcentrés ont augmenté de 10 millions d'euros depuis 2 ans, ce qui est une bonne nouvelle pour nos territoires. Mais, au-delà du montant des crédits qui correspondent à l'effort budgétaire jugé nécessaire en temps de crise, je crois qu'il faut surtout s'inquiéter de deux phénomènes :

- le premier est la sous-consommation des crédits dont les acteurs de terrain comme la Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture (FNCC), le G8 ou le groupement français des entreprises de restauration de monuments historiques (GMH) ressentent les effets. Tant les volumes consommés que le taux d'exécution des crédits de paiement ont chuté ces dernières années. On est ainsi passé d'un taux de plus de 93 % en 2004-2005 à 73 % en 2011. Cette tendance risque fortement de s'accentuer avec le désengagement des collectivités qui doivent faire des arbitrages, souvent au profit des dépenses sociales. L'effet multiplicateur des financements croisés agit aussi malheureusement à la baisse.

- le second concerne la réforme de la maîtrise d'ouvrage, désormais confiée aux propriétaires. Même si le code du patrimoine prévoit une assistance à maîtrise d'ouvrage, celle-ci est méconnue et peu utilisée, comme le montrent les tous premiers résultats d'une étude menée par l'observatoire de la réforme, structure mise en place en 2010.

Sans qu'aucune analyse chiffrée ne soit disponible, et au regard des témoignages relayés lors de mes auditions, je crois que les petites collectivités, les plus fragiles, se trouvent dans une situation difficile. La maîtrise d'ouvrage est une mission complexe qui requiert de fortes compétences techniques. Or l'architecte en chef des monuments historiques, qui jouait autrefois un rôle de juge et partie en diagnostiquant les travaux qu'il dirigeait ensuite, ne prodigue plus de conseils en amont.

Seules les collectivités les plus grandes parviennent à s'organiser pour pallier cette carence, sous forme de société d'économie mixte (SEM) ou d'agences par exemple. Il me semble urgent de demander à l'État d'agir, que ce soit au travers d'études réalisées par les directions régionales des affaires culturelles (DRAC), ou à travers une mission de conseil que l'Observatoire des publics, des professionnels et des institutions de la culture (OPPIC), l'opérateur immobilier de la culture, pourrait réaliser compte tenu de son expérience de plus de deux ans en la matière. Le directeur général des patrimoines a en outre indiqué que le ministère rappellera très prochainement aux DRAC les possibilités d'avance existantes, pouvant aller jusqu'à 30 % du montant total de la subvention.

Les crédits de la politique muséale sont répartis entre deux actions : l'action 3 « Patrimoine des musées de France » et l'action 8 « Acquisitions et enrichissement des collections publiques ». Au sein de l'action 3 on note une baisse des crédits très mesurée, et, pour la première année, la budgétisation des 18 millions d'euros destinés à compenser la gratuité d'accès aux collections permanentes pour les 18-25 ans. En revanche les crédits d'acquisition chutent cette année de près de 49 %, ce qui devrait faciliter le travail de récolement qui doit s'achever en 2014. Les crédits de paiement en faveur des musées territoriaux sont maintenus, démontrant ici encore l'effort du ministère en direction de nos territoires.

Au-delà de la question des crédits, il me semble urgent de s'intéresser à la question du renouvellement du corps des conservateurs. Leur démographie est particulièrement inquiétante. A tire d'illustration, 60 % des conservateurs territoriaux partiront en retraite dans les dix prochaines années. Une réflexion a d'ailleurs été initiée avec le centre de formation de la fonction publique territoriale pour produire une étude sur l'ensemble des métiers de la conservation.

Je souhaite aussi relayer l'alerte lancée par l'association générale des conservateurs des collections publiques au sujet du patrimoine scientifique, technique et naturel (PSTN). Une réflexion interministérielle s'impose à mon sens afin que ce patrimoine, géré à la fois par le ministère de la culture (pour les effectifs) et par celui de l'enseignement supérieur et de la recherche (pour les crédits), ne soit plus systématiquement marginalisé.

Un rapide mot des Archives nationales, puisque le site de Pierrefitte va ouvrir en janvier prochain sa salle de lecture, ce qui pourrait d'ailleurs faire l'objet d'une visite de notre commission. Je souhaite simplement soulever la question de la numérisation qui constitue un enjeu pour les Archives nationales mais aussi et surtout pour les archives départementales puisque des sociétés privées proposent désormais leurs services pour la mise en ligne des documents. Il me semble que l'on pourrait à tout le moins réfléchir à une action de coordination et pourquoi pas à une plateforme commune et publique qui permettrait d'éviter un phénomène de privatisation des archives.

Enfin l'archéologie préventive, comme vous le savez, est en cours d'évaluation puisqu'une commission a débuté ses travaux et doit rendre un livre blanc en mars 2013. J'ajoute qu'aujourd'hui même ont lieu les premières rencontres nationales de l'archéologie préventive, le ministère ayant mis en oeuvre l'une des recommandations d'Yves Dauge et de notre collègue Pierre Bordier. En ce qui concerne le budget, j'attire votre attention sur l'article 63 du projet de loi de finances, rattaché à la mission « Culture ». Il propose de revenir sur l'exonération de la redevance d'archéologie préventive (RAP) des constructions individuelles, reprenant ainsi l'amendement que nous avions adopté, au sein de notre commission et au Sénat, lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative en décembre dernier. L'assemblée nationale était malheureusement revenue sur sa version initiale. Je propose donc de donner un avis favorable à l'adoption de cet article pour trois raisons :

- c'est une question de justice sociale, puisqu'il n'y a pas de raison d'exonérer la construction de maisons individuelles alors que les logements sociaux sont soumis à la RAP ;

- ce choix est plus cohérent avec l'objectif de lutte contre l'étalement urbain ;

- enfin, j'y vois une raison économique puisque grâce à cet élargissement d'assiette on pourra atteindre le rendement nécessaire au bon fonctionnement de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap), ce qui constitue la première condition pour réduire les délais de chantiers.

En conclusion, et au regard de toutes les observations que je viens de partager avec vous, je vous propose de rendre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Culture ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nachbar

Le programme 224 est relativement épargné par rapport aux autres programmes « Patrimoines » et « Création » de la mission « Culture ». Les crédits sont de 1 065 millions d'euros en AE une hausse de soit 0,7 % et de 1 077 millions d'euros en CP soit une diminution de 0,2 %.

Je rappelle que le pilotage du programme s'articule autour de trois priorités :

- améliorer l'attractivité de l'enseignement supérieur et assurer l'insertion professionnelle des diplômés ;

- favoriser l'accès de chacun à la culture et l'irrigation culturelle du territoire, notamment grâce au développement de l'éduction artistique et culturelle ;

- faciliter le développement des politiques culturelles transversales et partenariales sur l'ensemble du territoire et à l'international.

On note de fortes disparités au sein du programme 224. Tout d'abord, deux actions sont en hausse :

- l'action 1 regroupe les crédits destinés à l'enseignement supérieur qui augmentent de 4,7 % en AE et de 2,5 % en CP ;

- l'action 7 en faveur des fonctions de soutien du ministère, dont les crédits augmentent de 2,2 % en AE et de 1,5 % en CP.

Les crédits de toutes les autres actions sont en baisse :

- la démocratisation culturelle et l'éducation artistique et culturelle, qui baisse de 10 %, même si ce chiffre doit tenir compte d'une majoration non reconductible décidée lors des débats budgétaires en 2011 ;

- les enseignements artistiques dont les crédits chutent de 25 % ;

- l'action culturelle internationale avec une diminution de 35 %.

Le plafond d'emplois diminue de 67 ETPT par rapport à 2012, et s'établit à 10 928 ETPT pour 2013 répartis de la façon suivante : 39 % dans la filière administrative, 23 % dans la filière technique et enseignement, 18 % dans la filière accueil et surveillance, enfin 20 % dans la filière scientifique. Il faut noter la création de 30 postes d'enseignants dans les écoles supérieures d'architecture, ce qui confirme le soutien du ministère en faveur de l'architecture, évoquée par notre collègue Vincent Éblé.

Comme dans les autres programmes, les opérateurs du programme 224 sont mis à contribution puisque les subventions diminuent de 1 % à 2,5 %. Mais sont épargnées :

- les écoles nationales d'architecture : +3,6 % de leurs subventions soit 45,56 millions d'euros ;

- les écoles d'art en région : +10,24 % de leurs subventions soit 11,27 millions d'euros.

Dans le domaine de l'enseignement supérieur, l'accent est mis sur :

- la recherche et l'intégration à des PRES (pôles de recherche et d'enseignement supérieur). Il faut effectivement éviter que ces écoles fonctionnent de manière isolée ;

- les conditions de vie des étudiants : avec 18 millions d'euros, les crédits d'investissement croissent de 22 % en CP. Ils sont destinés aux travaux de rénovation des écoles d'architecture. En outre, les crédits prévus pour les bourses d'études et aides individuelles augmentent de plus de 10 % avec 28,75 millions d'euros ;

- la poursuite de la structuration autour d'EPCC (établissements publics de coopération culturelle) : on observe une dynamique dans le domaine des arts plastiques puisque 31 EPCC ont été créés ; elle est plus modeste dans celui du spectacle vivant avec 3 EPCC.

Les crédits de l'action 2 relative à la démocratisation de la culture et à l'éducation artistique et culturelle (EAC) s'élèvent à 75,41 millions d'euros :

- 33,2 millions d'euros pour l'éducation artistique et culturelle. 2,5 millions sont prévus pour le lancement du « Plan EAC » pluriannuel qui sera lancé en 2013, sous le pilotage de Marie Desplechin, avec une consultation nationale. Cette politique est essentielle pour la démocratisation de la culture et l'égalité des chances. Je rappellerai toutefois qu'il ne faut pas oublier d'associer les professionnels de l'art contemporain et que l'implication de l'éducation nationale est absolument indispensable puisque c'est bien du ministère que relèvent les programmes scolaires. Pour ce plan, sont prévus 5 millions en 2014 et 7,5 millions en 2015 ;

- les crédits de fonctionnement de l'action 2 visent entre autres le soutien aux pratiques amateurs, pour 4,7 millions, les actions en direction des publics spécifiques comme dans le milieu carcéral, les pratiques innovantes et numériques dont les crédits sont en baisse de 2 millions, et Marseille 2013. Sont également en baisse au sein de l'action les crédits de la Cité nationale de l'histoire de l'immigration.

Les crédits de l'action culturelle internationale diminuent de 3 millions d'euros, soit une baisse de 35 % des moyens affectés à la coopération et aux échanges entre institutions culturelles ainsi qu'à l'accueil des professionnels de la culture et des artistes étrangers en France.

J'aborde enfin le domaine des enseignements artistiques sur lequel notre collègue Catherine Morin-Desailly a beaucoup travaillé. Un rapport avait été fait sur le sujet. Les crédits chutent malheureusement de 25 %. Les 29,23 millions n'ont pas été sanctuarisés et passent à quasiment 22 millions pour le financement des 36 conservatoires régionaux (CRR) et 101 conservatoires départementaux (CRD). Le ministère évoque une « reprise du dialogue en 2013 entre l'État et les associations d'élus à travers la CCDTC (conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel ». J'insisterai dans mon rapport sur l'augmentation de la charge que cela représentera pour les collectivités, notamment les municipalités et les structures intercommunales.

A titre personnel, je voterai en faveur de ces crédits et je propose à la commission la sagesse.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je souhaiterais revenir sur les enseignements artistiques et insister sur la chute drastique de ces crédits, dans un contexte de dialogue permanent avec le conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel avec lequel nous avons travaillé pour tirer les conséquences de la réforme de 2004. Celle-ci visait d'une part, une réforme pédagogique pour une ouverture des établissements au plus grand nombre incluant les amateurs, et, d'autre part, à répartir la charge sur l'ensemble des collectivités, en mettant en évidence la dimension régionale. Je regrette, alors que les régions étaient rassurées sur le transfert des crédits et l'absence de surcoût de la réforme, que l'on baisse ces crédits. C'est assez grave car pour moi la réforme est plombée et je me demande ce que pensent les associations d'élus des grandes villes qui soutenaient ce projet. Cela va à l'encontre des annonces de la ministre relatives à l'action en faveur des territoires et de la promotion de l'éducation artistique et culturelle car les professionnels de ces établissements sont les passeurs de savoir. J'avais proposé un aménagement de la loi pour rassurer l'ensemble des partenaires, sur la base d'un consensus sur la répartition des charges et des responsabilités. C'est une ambition collective que l'on est en train d'abandonner.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Une remarque également car le programme 224 est stratégique pour toute politique culturelle. Il y a une ambition affichée, l'annonce de la nomination de Marie Desplechin qui est une bonne nouvelle. Mais les crédits à l'appui de cette ambition ne sont pas du tout au rendez-vous. Ce qui est en train de se passer sur le sujet des rythmes scolaires avec la manière dont on conduit une action nationale mais aussi territoriale, avec ou non des moyens, est une question très importante. Notre collègue Vincent Éblé parlait tout à l'heure de l'effet démultiplicateur des financements croisés et je crois que cela peut être inquiétant. Je ne partage pas l'avis favorable sur ce budget. Soit on dit qu'il est relativement épargné, soit, et c'est ma lecture, il nous prive de toute ambition malgré les intentions affichées avec sincérité par la ministre. Enfin, nous n'avons pas de réponse à la question de l'existence d'une réelle ambition éducative pour l'éducation artistique et culturelle

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

L'effort en direction des écoles d'architecture mérite d'être souligné, d'autant que la ministre de la culture a missionné un rapporteur, M. Vincent Feltesse, pour faire des propositions pour ces écoles. En ce qui concerne l'éducation artistique et culturelle pour tous, je garde espoir compte tenu de ce que nous a dit la ministre et ce doit être un acte important de la refondation de l'école.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Bouchoux

On ne peut que regretter la situation budgétaire en général et celle de la culture en particulier. Il ne faut pas écarter la question des intermittents du spectacle de celle de l'éducation artistique et culturelle, et c'est d'ailleurs un dossier sur lequel nous allons bientôt travailler. Cependant, compte tenu de tout ce que nous a dit la ministre, nous voterons favorablement ce budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Il est vrai que lorsque l'on fait des coupes cela est difficile et je comprends la réaction de Catherine Morin Desailly, mais ayant interpelé Mme Filippetti et M. Peillon sur l'éducation artistique, j'espère au moins que cette partie-là sera préservée. Mais il est vrai que la situation pèsera sur les conservatoires, même si j'espère que l'éducation artistique pour tous compensera cette difficulté et avec le RDSE nous voterons ce budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nachbar

Une remarque pour dire qu'il sera essentiel que nous pesions sur le ministère de l'éducation nationale, afin d'appuyer cette réforme de l'éducation artistique et culturelle pour tous que nous appelons depuis des années et qui chemine modérément.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Ces échanges nous montrent la complexité de la transversalité des débats. L'agenda législatif va nous amener les lois les unes après les autres et, pourtant, tout se tient entre culture et éducation : la révision du régime de l'intermittence est prévue pour la fin 2013 ; la loi sur l'école début 2013 ; or la réforme des collectivités sera examinée en janvier, ces dernières étant concernées par les enseignements artistiques mais aussi par les rythmes scolaires et par les intervenants extérieurs. Il faudra peut-être que notre commission puisse débattre globalement de l'intérêt de la culture dans ces textes successifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Alors que nous fêtons cette année le centenaire de la naissance de Jean Vilar, permettez-moi tout d'abord de rendre hommage à ce grand défenseur du théâtre populaire, ainsi qu'à Jeanne Laurent. Cette personnalité bretonne, alors sous-directrice des Spectacles et de la Musique, a permis sa nomination au Théâtre national populaire (TNP) en 1961. Je la cite : « La nomination de Jean Vilar était l'aboutissement d'une politique théâtrale, menée avec continuité depuis la Libération avec le seul souci de l'intérêt national sans avoir à subir les contrecoups des luttes politiques. » Ce souci de l'intérêt national continue à nous guider, et pas seulement pour la politique théâtrale ! Dans cet esprit, je tiens à saluer les choix retenus par la ministre, Aurélie Filippetti, dans un cadre budgétaire contraint. La reconstitution des crédits initialement gelés pour 2012 avait donné une bouffée d'oxygène et démontré le soutien du Gouvernement à ce secteur parfois fragilisé de la culture. Pour 2013, je ne citerai que quelques chiffres et vous renvoie à mon rapport écrit pour plus de détails.

Je salue les priorités du budget et de la politique conduite par une recherche de sens, en termes de lien social, d'emploi et de vitalité dans les territoires.

Priorité est donnée à l'emploi, en préservant notamment les crédits d'intervention des directions régionales des affaires culturelles (DRAC) (en crédits de paiement). Les DRAC, dont le rôle est essentiel, pourront donc soutenir les activités artistiques et culturelles mises en oeuvre par les labels, réseaux, équipes artistiques, scènes conventionnées et autres dispositifs, lieux et institutions de création et de diffusion du spectacle vivant.

Vous le savez, les annexes 8 et 10 du régime de l'intermittence devront être renégociées par les partenaires sociaux en 2013. Le Bureau de notre commission a décidé de créer un groupe de travail sur le sujet et je m'en réjouis. Vous trouverez dans mon rapport écrit les derniers chiffres sur cette question.

Les crédits consacrés au spectacle vivant augmentent de 2,06 % en AE et baissent de 0,8 % en CP, mais l'effort portera surtout sur les établissements publics nationaux, les opérateurs de l'État participant à l'effort de maîtrise des dépenses publiques. Leurs crédits connaissent une baisse d'environ 7 millions d'euros, avec - 2,5 % pour l'Opéra de Paris, la Cité de la musique et l'établissement public de la Villette, et - 1 % pour les autres opérateurs du spectacle vivant.

S'y ajoutent des baisses exceptionnelles, qui varient en fonction de chaque opérateur et ne touchent pas l'ensemble des établissements : elles dépendent de leur niveau de fonds de roulement et de leurs marges de manoeuvre complémentaires. Ainsi, on enregistre une baisse de 0,5 million d'euros pour la Comédie française, 0,1 million d'euros pour la Villette et 3,4 millions d'euros pour l'Opéra de Paris. J'ai auditionné le directeur de l'Opéra : il réduit certaines dépenses de production, ce qui ne s'avère pas facile, les saisons étant engagées jusqu'en 2015-2016. La filiale de production audiovisuelle créée en 2012 devrait être à l'équilibre dès 2014 et elle complètera les actions de démocratisation développées par l'Opéra. Ses recettes propres ont cru de 30 % en 3 ans. L'effort demandé aux opéras nationaux permettra un rééquilibrage en faveur des autres structures.

A cet égard, je me réjouis bien sûr du maintien du dispositif fiscal en faveur du mécénat. C'était essentiel et logique puisqu'il est demandé aux structures culturelles de développer leurs ressources propres et que le prix des billets de spectacles a une faible élasticité. Les structures devraient aussi davantage recourir aux crédits européens. Mais, hormis les grands opérateurs, leur taille et leurs effectifs leur permettent rarement de monter de tels dossiers. Il m'apparaît donc nécessaire de mutualiser les démarches au sein d'une même région, en vue d'obtenir des crédits européens. Une concertation entre DRAC et missions économiques pourrait être conduite à cette fin. Des initiatives de cette nature sont déjà conduites dans certaines régions.

Je rappelle, par ailleurs, que le taux de TVA « super réduit » de 2,1 % sur les spectacles continuera de s'appliquer dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui. Voici une aide indirecte essentielle.

Priorité est donnée aussi aux chantiers qui font sens : ainsi les crédits centraux d'intervention finançant l'investissement augmentent de 4 millions d'euros, la Philharmonie de Paris requérant 5 millions d'euros supplémentaires pour couvrir les échéances de paiement du chantier. L'évaluation et le financement de ce projet posent certes question, comme l'a souligné notre collègue Yann Gaillard dans son récent rapport d'information. Mais ce projet peut être un succès s'il gagne son pari en termes d'éducation artistique, culturelle, et de démocratisation de l'accès à la musique classique des habitants de l'Est de Paris et de la banlieue parisienne. L'enjeu porte sur la création d'un écosystème vertueux avec les structures existantes, en particulier avec la Cité de la musique ; dans cette perspective et cette attente, le contrat de performance de la Villette, arrivé à son terme en 2012, n'a pas encore été renouvelé.

Les dispositifs d'aides extrabudgétaires, envisagés avec le projet de Centre national de la musique sont en suspens, mais les inquiétudes sont en passe d'être apaisées, la ministre ayant relancé la concertation. La dynamique engagée sera ainsi préservée. Je m'en réjouis car les attentes des professionnels du spectacle vivant sont grandes, après bien des désaccords au départ.

Outre le lancement de la mission de Pierre Lescure, une mission « musique » est organisée au sein du ministère, avec la création d'une plateforme commune entre la direction générale de la création artistique (DGCA) et la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC). Je m'en réjouis car il me paraît indispensable que le dialogue entre les deux secteurs se prolonge au sein des autorités de tutelle.

A cet égard, il me semble que la réflexion sur la réforme du crédit d'impôt phonographique devrait être poursuivie quant à son périmètre : ne pourrions-nous envisager un volet en faveur des producteurs de spectacles ? Ceci d'autant plus que les producteurs phonographiques s'orientent de plus en plus vers la production de spectacles et entrent donc en concurrence avec les opérateurs habituels.

Quelques mots sur l'actualité législative et réglementaire.

Tout d'abord, un satisfecit : la loi du 12 mars 2012 relative à la lutte contre la vente illégale de billets de spectacles, votée à l'unanimité au Sénat, semble avoir un effet dissuasif. Il m'apparaît néanmoins nécessaire d'informer les publics sur les règles en vigueur et de les inciter à la vigilance. L'efficacité de la loi suppose aussi un effort de pédagogie.

Dans un autre domaine, la clarification de l'action financière de l'État, engagée à l'issue des Entretiens de Valois, se poursuivra, assortie de la publication d'un corpus complet de nouveaux textes début 2014. Je souhaite qu'elle intègre une nécessité absolue : la plus grande diffusion des spectacles. Ce sujet reste une préoccupation majeure. Il est indispensable de mieux accompagner la vie des spectacles par une meilleure diffusion des oeuvres, en termes de nombre de représentations, de répartition territoriale, d'itinérance, d'exportation. Il est également essentiel que les projets subventionnés s'engagent dans une démarche de conquête de nouveaux publics.

Autre priorité, et ces sujets sont liés : le dialogue avec les élus locaux, essentiel et à renforcer dans la perspective de l'actualité législative à venir. En effet, un projet de loi d'orientation sur la création nous sera proposé, après des années d'attente. Mon rapport écrit en évoque les objectifs et contours. Bien entendu, cette loi devra s'articuler avec la future réforme de la décentralisation. Compétences partagées et droit à l'expérimentation s'imposent dans le domaine culturel. Et nous serons bien sûr vigilants pour que les spécificités de la culture soient bien prises en compte, y compris s'agissant des missions des DRAC.

Mon rapport écrit évoque plusieurs autres défis à relever. J'en évoquerai brièvement quelques-uns :

- les travaux en vue de la création d'un observatoire du spectacle vivant progressent, lentement mais sûrement semble-t-il... Il serait utile que ce processus aboutisse dès que possible ;

- les festivals qui irriguent tant nos territoires ne seraient-ils pas victimes de leurs succès ? J'observe un effet ciseau : d'un côté, des festivals de plus en plus nombreux ; de l'autre côté, des crédits budgétaires qui s'érodent progressivement depuis 10 ans et sont de plus en plus concentrés sur un nombre restreint de manifestations. A l'inverse, il est vrai que les 25 % de la rémunération pour copie privée consacrés aux actions culturelles sont supposées contribuer au financement d'un grand nombre de festivals.

Il n'empêche que les professionnels manifestent quelques inquiétudes :

- les musiques actuelles, plébiscitées par les Français, ne bénéficient que d'aides très dispersées et souffrent d'une certaine fragilité. Elles nécessiteraient des mesures d'urgence en 2013, dans l'attente des décisions structurelles de financement extrabudgétaires déjà évoquées ;

- une attention particulière doit être portée aux arts de la rue, jeune filière en cours de structuration, et aux arts du cirque, secteur qui conjugue diversité et dynamisme. Il leur faut le plus souvent pouvoir accéder à l'espace public, ce qui s'avère souvent trop difficile. Nous avons aussi à exercer un rôle de sensibilisation des élus locaux à l'égard des pratiques créatrices de lien social.

En conclusion, je vous demanderai de donner un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à l'action n° 1 « Spectacle vivant » du programme « Création » de la mission « Culture » pour 2013.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Merci pour cet exposé clair et précis. Les crédits de ce programme sont sanctuarisés, mais il nous faut aborder le budget dans sa globalité. Or, il prévoit une baisse drastique des dotations aux collectivités locales, alors que ces dernières assurent 75 % du financement du spectacle vivant. Il faut donc en tenir compte dans l'évaluation de ce budget. J'exprime une inquiétude : comment État et collectivités peuvent-ils co-construire les politiques culturelles quand les dotations aux collectivités sont si diminuées ? Par ailleurs, puisque vous avez évoqué la création d'un observatoire, avez-vous évalué l'action des COREPS ?

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Je relèverai deux ou trois points dans ce rapport intéressant. Il est important de recourir aux crédits européens qui sont, il est vrai, complexes à mettre en place, car ils requièrent beaucoup d'ingénierie. A part quelques expériences, l'État et les régions ne jouent pas vraiment leurs rôles dans ce domaine, quand on compare aux efforts fournis en Allemagne par les Länder. La France est en quelque sorte déficitaire au regard des crédits qu'elle est en mesure d'espérer. Avez-vous pris en compte l'importance de l'économie solidaire et sociale, car elle participe au développement et au renforcement des actions culturelles dans les territoires ?

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Je suis globalement d'accord avec la rapporteure. Des efforts sont demandés aux grandes institutions, ce qui n'est pas toujours facile pour elles, mais cela permet de maintenir les crédits déconcentrés. Il faut voir comment les DRAC les géreront. Il fallait en effet maintenir le dispositif du mécénat puisque l'on demande aux structures d'augmenter leurs fonds propres. Comme la rapporteure pour avis a pu le constater aux réunions du groupe d'étude que je préside sur les arts de la scène, les arts de la rue et les festivals en région, des secteurs comme le cirque ou la danse demandent une certaine reconnaissance. Par ailleurs, nous nous interrogeons sur le point de savoir si les chiffres que vous avez donnés intègrent ou non les crédits destinés aux pensions des fonctionnaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

Je remarque que certains FRAC (fonds régionaux d'art contemporain) ont une politique de gestion des oeuvres qu'ils détiennent en sommeil alors que d'autres sont plus dynamiques.

La loi sur le mécénat a heureusement été maintenue. Le Sénat a bataillé en ce sens. Cependant il faudrait sécuriser certaines de ses dispositions sur le plan fiscal car elles sont appliquées différemment selon les services des impôts. Cela fragilise les petits et gros investissements que certains voudraient réaliser.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Notre commission examine pour la deuxième année consécutive un rapport pour avis sur les arts visuels, qui se rattache à l'action 2 du programme « Création », relative au soutien, à la création, à la production et à la diffusion des arts plastiques.

En préambule, permettez-moi de dire combien les acteurs concernés, artistes plasticiens et photographes, ont été sensibles à ce choix politique et heureux de constater que le Sénat suit avec une attention toute particulière leur secteur.

Au sein du programme « Création » dont elle représente moins de 10 % des crédits, l'action 2 connaît une évolution similaire à celle du spectacle vivant mais en plus marquée : les autorisations d'engagement augmentent de 2,9 % tandis que les crédits de paiement diminuent fortement, de 9,6 %.

En ce qui concerne les dépenses d'investissement, je note que la baisse des crédits de 80 % est certes due à l'achèvement des travaux du Palais de Tokyo mais pas seulement. Ce projet parisien, dont plusieurs d'entre vous ont constaté les résultats lors d'une récente visite de la commission, représentait en effet 71 % de ces crédits, créant ainsi un phénomène d'aspiration des moyens, au détriment de l'irrigation des territoires. Mais « hors Palais de Tokyo », les crédits baissent tout de même fortement de 54 % en autorisations d'engagement et de 28 % en crédits de paiement, le million et demi d'euros restant étant destiné à la Cité de la Céramique à Sèvres et au Mobilier national. Je demande, dans mon rapport, que l'État prenne toutes les mesures pour que soit respecté l'objectif fixé au Palais de Tokyo qui consiste à accorder une place significative aux Fonds régionaux d'art contemporain (FRAC) et centres d'art pour une valorisation des politiques territoriales en matière d'art contemporain.

L'évolution des dépenses d'intervention constitue un effort en période de repli budgétaire. On observe une hausse de 21,4 % des autorisations d'engagement qui s'établissent à 54,41 millions d'euros, et une augmentation de 1,6 % des crédits de paiement qui s'élèvent à 44,38 millions d'euros. Les crédits centraux d'investissement sont principalement liés à la commande publique (pour 19,36 millions) et les crédits de fonctionnement soutiennent la structuration du secteur, les associations dont celle des FRAC « Platform », ainsi que le Jeu de Paume. Les crédits déconcentrés augmentent surtout en raison des travaux d'extension de la collection Lambert en Avignon. Ceux destinés aux 47 centres d'art et aux 22 FRAC sont stables. Ils concernent notamment les chantiers des FRAC dits « de nouvelle génération » dont les effectifs passent en moyenne de 9 à 15 agents.

Enfin, les dépenses de fonctionnement diminuent de 38 %, illustrant ainsi le poids des choix budgétaires du Gouvernement. Les opérateurs des arts plastiques sont touchés comme dans le reste de la mission « Culture », tandis que sont transférées en crédits d'intervention les sommes jusqu'alors allouées à la RMN-Grand Palais pour « Monumenta ».

Je souhaiterais rappeler combien le gel de 6 % des crédits a représenté un coup dur pour les petites structures d'art contemporain. A titre d'exemple, 6 % c'était le salaire de deux postes à temps plein pour le FRAC du Languedoc-Roussillon. Je me réjouis de l'annonce de la ministre en commission mercredi dernier : le feu vert de Bercy en faveur du dégel est crucial pour les acteurs des arts plastiques qui sont financièrement fragiles et pourraient difficilement faire face au prolongement d'une telle situation.

Au-delà des crédits, la priorité pour le secteur est clairement la structuration professionnelle et l'accompagnement social. A l'initiative de la Fédération des professionnels de l'art contemporain (CIPAC) et du Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac), des discussions ont été entamées pour définir les principes d'une convention collective. On peut espérer que le ministère soutiendra fortement cette démarche jusqu'au bout, en veillant à bien associer les artistes plasticiens aux côtés des structures d'art contemporain. Cette convention pourrait notamment consacrer le droit au revenu des artistes en réaffirmant le droit de représentation trop souvent oublié.

Annoncée en octobre 2011 parmi les 15 mesures en faveur du monde des arts plastiques, la création d'un fonds pour la formation professionnelle continue des artistes auteurs est en train d'aboutir, le décret éponyme venant d'être examiné par le Conseil d'État. Ce fonds a pour objectif de former 6 à 7 000 professionnels par an, grâce à une cotisation des professionnels et un apport des sociétés d'auteur, définis par la loi de finances rectificative du 28 décembre 2011.

Enfin, une réflexion va être lancée sur la protection sociale des artistes, afin d'examiner les synergies entre l'Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs (Agessa) et la Maison des Artistes.

Le deuxième axe de mon rapport traite plus particulièrement de la photographie en rappelant que le secteur est toujours en quête d'un accompagnement des pouvoirs publics. J'ai noté un effort du ministère pour mieux identifier les crédits dédiés à la photographie qui s'élèvent, au sein de l'action 2 du programme « Création » à presque 7 millions d'euros. Ils doivent financer :

- la commande publique du Centre national des arts plastiques (CNAP) et des FRAC, pour 1,15 million d'euros ;

- les centres d'art dédiés à la photographie, dont le Jeu de Paume, pour 4,6 millions d'euros ;

- les festivals, dont Arles et Perpignan pour un total de 876 000 euros, avec un déséquilibre notable au profit d'Arles qui bénéficie de 600 000 euros, contre 129 000 pour Perpignan ;

- les aides aux projets pour 330 000 euros.

On peut se réjouir du lancement, au mois de mars 2012, du portail « Arago », qui a pour but d'offrir un accès libre et direct sur Internet à la connaissance de l'ensemble des collections et des fonds de photographies conservés en France. L'État aura in fine contribué à hauteur de 70 % du budget total, évalué à 2,3 millions d'euros. 17 000 images sont désormais en ligne, issues essentiellement de fonds déjà numérisés. L'agence photographique de la RMN qui gère le portail devra veiller, en cas de ventes de photographies, à ne pas tirer les prix vers le bas.

Enfin, je souhaite rappeler les priorités de la profession qui sont toujours d'actualité. Il s'agit en premier lieu de la question des droits d'auteur, à commencer par le sujet de la mention des « droits réservés » ou DR. Je vous rappelle que votre proposition de loi n° 441, madame la Présidente, est actuellement en navette et en attente d'inscription à l'ordre du jour à l'Assemblée nationale. Le ministère a, de son côté, indiqué avoir organisé une série de réunions avec les organisations professionnelles des photographes et élaboré un projet de cadre conventionnel de signature des photos de presse. Les éditeurs n'ont pas encore apporté leurs observations.

Les droits d'auteur sont d'autant plus importants qu'ils représentent désormais le mode de rémunération le plus courant, notamment des photojournalistes qui ont dû s'adapter à la crise économique de la presse et à la chute du salariat dans leur secteur. Ils ont largement diversifié leur activité, devenant ainsi enseignants, ou réalisateurs de web-documentaires, ce qui soulève d'ailleurs des difficultés pour accéder aux prestations sociales ou à la carte de presse. Ce dernier point est d'autant plus crucial, à mes yeux, qu'il soulève en plus la question de la pluralité des sources d'information. Sans accès aux zones de conflit, et avec un monopole économique du tandem Getty-AFP, les photojournalistes nous alertent, à juste titre, sur les conséquences de leur situation en termes de démocratie dans les médias. Ils évoquent d'ailleurs l'idée d'un quota de production d'images qui serait imposé aux organismes de presse.

En conclusion, je constate que le secteur des arts plastiques, malgré les efforts du ministère de la culture pour en protéger les crédits d'intervention, n'échappe pas au repli budgétaire total.

Cela prive le secteur de toute ambition de développement et des marges de manoeuvre nécessaires, notamment pour faire reculer la précarisation de la filière des métiers et de la création dans les arts plastiques, action dont tous soulignent la nécessité.

A titre personnel, je propose, compte tenu de l'ensemble de ces observations, de donner un avis défavorable, et je vous laisse le soin d'apprécier l'état des crédits de l'action 2 du programme « Création » de la mission « Culture ».

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

A-t-on une identification précise à l'intérieur de ce domaine de l'investissement destiné aux arts numériques ? Il y a des initiatives prises au niveau des collectivités territoriales comme la Gaîté lyrique à Paris. Nous avons des écoles performantes comme les Gobelins. C'est un domaine en plein essor. Or, je pense que les efforts consentis ne sont pas à la hauteur des défis et des enjeux.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je n'ai pas de réponse précise. Je vous propose d'interroger le ministère pour nous donner des éléments d'identification plus précis comme nous l'avons fait dans le domaine de la photo. Nous pourrions également regarder du côté de la commande publique des FRAC car il y a une part grandissante d'acquisition concernant les arts numériques.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Je vous rappelle que la commission s'exprime globalement sur l'ensemble des crédits de la mission « culture » qui ont été commenté par :

- M. Jean-Pierre Leleux sur le cinéma, qui a émis un avis favorable ;

- Mme Maryvonne Blondin sur le spectacle vivant, qui a émis un avis favorable ;

- M. Vincent Eblé sur les patrimoines, qui a émis un avis favorable ;

- M. Philippe Nachbar sur les transmissions des savoirs, qui a émis à titre personnel un avis favorable et qui propose à la commission un vote de sagesse ;

- M. Pierre Laurent sur les arts visuels, qui a émis à titre personnel un avis défavorable et qui laisse la commission faire son choix.

Mes chers collègues, je vous donne la parole pour des explications de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je considère ce budget en très forte diminution. La justification qui consiste à penser qu'en période de difficultés budgétaires et de crise, il est normal que ce secteur comme les autres contribue, nous pose problème. Du même qu'il est utile de protéger les crédits du secteur de l'éducation, il est aussi nécessaire de sanctuariser ceux de la culture. Nous pensons que cette évolution risque de nous entraîner dans de plus grandes difficultés d'autant qu'elle s'ajoute à une pression accrue sur le budget des collectivités territoriales. Pour la première année du changement, cela nous semble un très mauvais signal et c'est pour cette raison que nous émettrons un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Je n'ai pas une lecture aussi sévère de ce budget. Certes, globalement il y a une baisse mais, comme l'a dit la ministre, en examinant chaque domaine, certaines priorités sont préservées, notamment les crédits dévolus aux DRAC dans nos territoires pour maintenir la vivacité de la création culturelle et ceux consacrés au spectacle vivant et à la création. Certes, certains grands projets « pharaoniques » ont été arrêtés. Dans une période de crise, la coupe me paraît juste et raisonnable. Cela n'a pas été un coup de rabot indifférent dans tous les domaines. Comme nous partageons les priorités qui sont affichées, nous émettrons un vote favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Le groupe RDSE est favorable à ce budget. Cela fait plusieurs années que nous avons des budgets « contraints ». Nous émettrons donc un vote de confiance car nous savons que lors de la loi d'orientation, du texte sur les intermittents et dans les discussions avec l'éducation nationale, beaucoup de nos choix seront portés et défendus.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

La réalité et les difficultés ont rattrapé l'actuel titulaire du ministère de la culture et nous mettent dans une situation étrange. Il est difficile d'apprécier le budget tellement sa présentation est « émiettée ». Il est difficile d'avoir une vision claire des politiques culturelles. Ce budget peut être comparé avec les ambitions affichées par l'ancien gouvernement. J'ai en mémoire les déclarations de Mme Aubry au Festival d'Avignon en 2011 annonçant une augmentation de 50 % des crédits de la culture. Je crois que les années précédentes nous étions attentifs au moins à sanctuariser le budget de la culture. Et nous y étions encore arrivés l'an dernier. Je constate cette année que pour la première fois, le budget est en baisse. Il y a sans doute des points satisfaisants dans ce budget, il faut être objectif. Mais le budget est en recul et c'est une sacrée évolution par rapport aux ambitions proclamées. C'est parce que les difficultés et les contraintes sont là. Ce qui m'intéresse, c'est de savoir quelle est l'attitude à prendre pour aider l'actuel titulaire du ministère de la culture, Mme Filippetti, à résister à la pression de ses collègues de Bercy pour qui il est toujours tentant de réduire le budget de la culture et d'en faire une variable d'ajustement. On est passé de l'ambition à la variable d'ajustement. Il y a dans ce budget des diminutions préoccupantes ou choquantes. Je m'inquiète pour le patrimoine où les besoins sont énormes. Si tous les crédits ne sont pas consommés il faudrait peut-être secouer sérieusement les services du ministère et je considère cette baisse comme très préoccupante. Ce qui nous a aussi choqués, c'est en matière d'éducation artistique, une volonté affirmée qui se traduit dans le domaine de l'architecture mais en ce qui concerne la musique, il y a un net recul des crédits consacrés aux conservatoires de musique. C'est très fâcheux, j'espère que l'on ne remettra pas en cause l'existence des conservatoires. Cela veut dire aussi que les collectivités territoriales vont devoir mettre la main à la poche et dépenser encore plus alors que la part des dépenses culturelles dans le budget des collectivités n'a cessé d'augmenter. Nous nous en sommes déjà préoccupés. Je ne méconnais pas les efforts qu'a faits Mme Filippetti, mais nous émettrons un vote défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Le groupe UDI-UC ne votera pas ce budget en l'état d'une part, pour les remarques qui viennent d'être formulées par Jacques Legendre mais aussi parce que nous examinons ce budget dans sa globalité. Je rappellerai qu'au-delà même du secteur qui intéresse notre commission, il y a la prise en compte de toutes les dotations qui vont vers les collectivités territoriales. La mission du Sénat est aussi de défendre les collectivités territoriales et d'examiner quel va être leur sort dans les missions qui sont les leurs, notamment l'accès à la culture au plus grand nombre, lors du vote de ce budget. Ce que je retiens, c'est que le gouvernement souhaite un pacte de confiance et de stabilité avec les collectivités territoriales. Je trouve qu'il y aurait dû y avoir, pour le moins, une stabilité du budget à travers les dotations aux collectivités comme dans l'attribution des subventions du ministère de la culture vers les collectivités. Je m'inquiète de cette double baisse. C'est un tour de passe-passe quand Mme Cartron dit que la priorité doit être donnée aux crédits des DRAC pour l'action dans les territoires puisque par ailleurs, on va baisser les dotations aux collectivités, voire les subventions directement affectées aux établissements. En regardant le budget à l'aune de tout ceci, je regrette que la seule priorité soit donnée au ministère de l'éducation nationale, car la culture est aussi un facteur d'émancipation et d'épanouissement pour tous. Je m'inquiète également de l'appréciation de la culture par des notions d'évaluation, de rentabilité, d'indicateurs et de résultats. Quand Mme Filippetti parle de « redressement créatif », on est dans le seul domaine économique. C'est autre chose la culture et cela ne se mesure pas forcément en terme de rentabilité directe, c'est une action de long terme. Voilà les raisons pour lesquelles nous sommes très déçus par ce budget. Malgré la crise et les difficultés financières, les précédents budgets de la culture ont toujours été stabilisés au moins en pourcentage, si ce n'est en euros constants. Nous sommes vraiment sur une pente très inquiétante.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Les débats ont habituellement lieu en séance, mais quand il s'agit du budget, les arguments s'échangent beaucoup en commission car le temps manque en séance. Donc je me permets de dire quelques mots sur le fond.

En réponse à M. Pierre Laurent qui considère qu'un budget qui baisse n'est pas bon, je voudrais lui dire que par exemple, pour sauver France Télévisions, nous avons adopté un amendement à l'unanimité, y compris vous Pierre Laurent, avec enthousiasme parce que la réalité est là et lors de la discussion d'un budget, c'est la réalité qui prime. Si on allait au bout de cette logique, le rejet de ces crédits, mais je ne préjuge de rien, ferait que l'on n'aurait pas ces 50 millions pour le service public.

Après, j'entends bien le débat sur la sanctuarisation. Il y a dans ce qu'a fait Aurélie Filippetti et le budget tel qu'il nous est présenté, une sanctuarisation. Est-elle absolue ? Non, mais les missions fondamentales ont été sanctuarisées après des batailles. Monsieur Legendre, maintenant que vous êtes dans l'opposition, vous nous dites que ce budget en baisse est inacceptable, alors que vous êtes contre le déficit et vouliez une règle d'or. Nous avons 600 milliards de déficit et tout le monde est d'accord sur la règle d'or. Il faut aller chercher l'argent, on ne peut plus faire semblant. C'est notre indépendance économique qui est en jeu. L'année dernière, vous plastronniez en disant que l'opposition voulait dépenser à tout va, alors que la majorité de l'époque était sérieuse dans la gestion. Et vous nous reprochez cette année cette baisse des crédits, alors que cet effort est destiné à résorber la dette de la France pour préserver notre indépendance économique. Sur tous les budgets vous pouvez faire les mêmes remarques, mais cela n'empêchera pas que les DRAC ont été affaiblies avec la politique de la droite et que nous, on n'y touche pas.

Dans le domaine de l'éducation artistique, un effort sans précédent va être fait non pas sur le budget de la culture mais dans le cadre de la refondation de l'école et la façon dont on permet réellement que tous les enfants puissent avoir accès à cette éducation, y compris par des rythmes scolaires modifiés. Des vrais moyens ont été dégagés. Il faut défendre nos conservatoires, mais l'éducation artistique ne se résume pas seulement aux conservatoires. Ils sont souvent réservés aux privilégiés. Cette éducation n'est pas à la portée de tous les enfants. Je connais les capacités de ces structures dans le XXe arrondissement. Les gens doivent faire la queue la nuit pour y inscrire leur enfant. Que cela soit pris en compte par l'Éducation nationale compensera largement la baisse évoquée du budget du ministère de la culture.

Quant à l'audiovisuel, vous avez supprimé la manne qui venait de la publicité et déstabilisé le service public tout en affirmant qu'il fallait arrêter de dépenser trop.

Vous êtes dans l'incohérence !

Nous essayons de composer avec cet héritage. Ici, il n'y a que des parlementaires qui ont combattu pour que la culture ne soit pas la variable d'ajustement et qui continueront à le faire avec la même détermination et non pas avec des propos à géométrie variable et des postures politiques en fonction de qui est au gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Le groupe écologiste votera ce budget de la culture non sans regret car dès qu'il y a réduction budgétaire, c'est toujours inquiétant. Mais comme membres de la majorité, nous considérons devoir participer à l'effort pour le redressement des finances publiques. Si le ministère de la culture est affecté, je rappellerai que le ministère de l'écologie connaît une baisse de son budget de 4,5 %. D'une manière générale, les économies ont été faites d'abord en direction d'anciens grands travaux décidés dans l'urgence et en fin de mandat. Nous avons auditionné cette année le Président du Louvre, on a eu des effets d'annonce l'année passée à Avignon où on nous créait des antennes décentralisées de tous les grands musées, de choses absolument pas budgétées. Je ne suis pas nécessairement malheureux de voir la Maison de l'Histoire de France dont le financement n'était absolument pas assuré, passer à la trappe.

Bien sûr, il faudra être vigilant dans les budgets à venir, voir comment éviter des coupes immédiates et comment réorganiser l'investissement culturel sachant que le budget de l'État en matière culturelle représente aujourd'hui une minorité des investissements et des politiques publiques engagées en France. Tout cela doit s'apprécier au global de la part des collectivités locales et du rôle joué par l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

J'ai bien noté les positions des uns et des autres.

Je vous rappellerai deux chiffres qui font mal : Il y a 110 millions d'euros en moins dans le budget de la culture et personne ne s'en réjouit. Mais ces 110 millions sont à mettre en perspective avec d'autres chiffres. La Philharmonie était prévue à 100-150 millions, et ce sont finalement 390 millions d'euros qui seront nécessaires pour achever le chantier. Éviter que le BTP nous réitère systématiquement ce racket sur les fonds publics, qu'ils soient des collectivités ou de l'État, nous donnerait l'oxygène indispensable pour ne pas avoir ces débats de regrets sur une culture qui subit les conséquences de ces dérapages financiers. Ce genre de pratiques nous coûte cher. C'est une remarque personnelle.

La commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Culture ».

Présidence de Mme Françoise Cartron, vice-présidente -