La commission entend Mme Hélène Farnaud-Defromont, directrice de l'agence pour l'enseignement français à l'étranger.
J'accueille Mme Hélène Farnaud-Defromont, directrice de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. Nous avions organisé l'an passé une table ronde relative aux actions extérieures de la France en matière de culture et d'éducation avec l'ensemble des partenaires. Nous avions alors été frappés par leur diversité et leur compétence.
A titre liminaire, je souhaiterais vous présenter l'Agence et son réseau d'établissements à travers un film institutionnel. Puis je vous préciserai certains chiffres en complément de la vidéo et du rapport d'activité qui vous a été remis.
Avec 320 000 élèves dont 200 000 élèves étrangers, la France dispose du premier réseau d'enseignement à l'extérieur de son territoire, comparé à l'Allemagne (80 000 élèves scolarisés à l'étranger) et à l'Espagne (40 000 élèves). Les États-Unis et le Royaume-Uni ne disposent pas non plus de réseau comparable. De ce point de vue, nous disposons d'un outil unique.
La double mission de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), créée par la loi du 6 juillet 1990, réside dans la scolarisation des élèves français (un tiers des élèves) et dans le rayonnement de l'enseignement « à la française » via la scolarisation des élèves étrangers. Une autre mission, très importante à mes yeux, même si elle ne constitue pas le coeur de notre action, consiste dans la coopération éducative avec les systèmes éducatifs des pays où nous sommes implantés.
Il existe des spécificités du réseau de l'AEFE par rapport au système éducatif en France.
Le réseau d'enseignement français à l'étranger rassemble 488 établissements scolaires. Homologués par le ministère de l'éducation nationale, ils offrent un programme français enseigné en français. Il existe trois types de statuts : 75 de ces établissements sont gérés directement par l'Agence (établissements en gestion directe - EGD), 156 ont passé une convention avec elle (établissements conventionnés, souvent à gestion parentale) et 257 autres sont des établissements partenaires.
Les personnels sont recrutés selon des modalités qui varient d'un établissement à l'autre. Dans les deux premiers types d'établissements, on accueille des enseignants titulaires du ministère de l'éducation nationale nommés par l'Agence. Dans le dernier cas, ils sont exclusivement détachés par leur ministère. Au total, le réseau compte 1 147 expatriés (occupant essentiellement des postes de direction), 5 466 résidents et 13 000 recrutés locaux.
Le système fonctionne à la satisfaction des familles, puisque le taux de réussite au baccalauréat atteint 95,4 %, dont 20 % de mention « très bien ». Chaque année, plusieurs élèves du réseau s'illustrent au concours général.
Le réseau bénéficie d'un financement mixte, avec plus de 535 millions d'euros de dotation budgétaire pour 2014, incluant l'aide à la scolarité (bourses) complétés par une contribution des familles qui s'établit à 65 % du budget. La totalité du budget de l'Agence représente 1,2 milliard d'euro, ce qui en fait l'un des plus importants opérateurs de l'État. Se pose aujourd'hui la question du niveau des frais de scolarité qui sont réglés par les familles et dont l'augmentation continue n'est pas soutenable. Nous devons donc veiller à leur évolution. À cet effet, une mission est en cours, dont font partie la sénatrice Corinne Lepage et le député Philip Cordery, à la demande conjointe du ministre des affaires étrangères et de la ministre déléguée chargée des Français de l'étranger, pour élaborer des propositions sur cette question.
La place des parents constitue une autre spécificité de l'enseignement français à l'étranger. Ils représentent de véritables acteurs du réseau à travers leur contribution financière et leur participation à la gestion des établissements.
Nous nous positionnons par rapport au ministère de l'éducation nationale comme un laboratoire d'innovation où est testé un certain nombre de dispositifs pédagogiques, notamment en matière d'apprentissage des langues. Nos élèves sont souvent trilingues en fin de scolarité ; ils maîtrisent le français, la langue du pays et l'anglais.
L'AEFE entretient des relations suivies avec le ministère de l'éducation nationale. Nous devons mettre en oeuvre le programme de l'éducation nationale et ses grandes directives comme la loi portant refondation de l'école ou la charte sur la laïcité en les déclinant en fonction des spécificités de notre réseau. Nous sommes parfois en avance sur certaines réformes comme celle qui concerne les rythmes scolaires. En effet, dans la réalité, 90 % des établissements français à l'étranger travaillent déjà cinq jours par semaine, en raison du contexte local.
Nos établissements offrent également d'ores et déjà une place majeure au numérique avec, par exemple, l'extension progressive de la dématérialisation de la correction des copies du baccalauréat dans les deux tiers du réseau.
Face à l'augmentation et l'évolution de la demande et au contexte budgétaire contraint, l'AEFE est aujourd'hui confrontée à de nouveaux défis.
Dans le cadre des priorités clairement affirmées d'accompagnement de la diplomatie économique, d'attractivité et d'influence, un plan d'action a fait l'objet de recommandations à la fin de l'été dernier et se trouve désormais en cours de rédaction.
Nous réfléchissons, pour les années à venir, au redéploiement du réseau. Quels sont les pays ou régions du monde où nous ne sommes pas assez présents ? Quelles sont les régions où l'on peut trouver un système d'enseignement satisfaisant et où les parents n'aspirent qu'à se voir proposer un dispositif complémentaire afin de maintenir un lien avec la France ? Comment ne pas être en situation de malthusianisme dans un certain nombre d'endroits où notre dispositif est insuffisant pour répondre à une demande croissante ?
Ces questions sont d'ordre politique, diplomatique, stratégique. La nouveauté de ce plan d'action réside dans la concertation interministérielle préalable destinée à ce que chaque partie intéressée réfléchisse aux évolutions attendues et aux réponses que nous pouvons apporter en termes d'enseignement français à l'étranger.
Ce plan d'action constitue une matrice pour les années à venir. Il permettra notamment de renforcer le dialogue avec le ministère de l'éducation nationale et de travailler sur la consolidation de l'excellence pédagogique. Il trouvera sa traduction dans le plan d'orientation stratégique de l'AEFE pour la période 2014-2017, qui sera présenté au conseil d'administration au mois de mars.
En conclusion, nous bénéficions d'un outil extraordinaire au service de l'expatriation de nos compatriotes et du rayonnement de notre pays. Notre réseau est une « success story » avec une demande croissante et nous sommes particulièrement optimistes pour les années à venir.
Il convient d'avoir à l'esprit que nous sommes en présence d'un réseau d'établissements privés français, non en raison de leurs statuts juridiques, qui sont locaux, divers et variés, mais bien par l'enseignement qui y est dispensé.
Vous avez certes conclu vos propos sur une note optimiste, mais je voudrais souligner le fait que l'enseignement français à l'étranger est aujourd'hui à la croisée des chemins, obligé de s'adapter aux évolutions qui se profilent et dont vous semblez être parfaitement consciente.
Dans le contexte budgétaire actuel, les dotations de l'État sont en diminution constante : alors qu'elles représentaient plus de la moitié des ressources financières des établissements, ceux-ci tirent désormais 65 % de leurs revenus des frais de scolarité, en augmentation constante, payés par les parents d'élèves. Devenus premiers contributeurs financiers du réseau d'enseignement français, et par ailleurs bien informés des possibilités offertes par d'autres systèmes tels que le réseau anglo-saxon, les parents d'élèves sont de plus en plus exigeants et impliqués dans la vie des établissements, ce qui génère parfois quelques difficultés lors des conseils de gestion. C'est notamment le cas lorsque, par exemple, il faut expliquer que l'augmentation du nombre de recrutement dits « hors plafond » -c'est-à-dire non-constitués de titulaires détachés de l'éducation nationale- entraîne une augmentation des sommes à reverser à l'AEFE.
Comme je l'indiquais dans mon avis budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2014, les établissements devront moderniser leurs outils d'enseignement grâce à un recours plus fréquent au numérique, mais aussi développer des synergies avec le centre national d'enseignement à distance (CNED) et diversifier les formes d'enseignement, notamment s'agissant des filières bilingues et de l'enseignement technique.
Enfin, reste la question des inégalités statutaires des personnels et notamment de l'absence de protection sociale pour les ressortissants français agents de droit local.
En résumé, le réseau d'établissements d'enseignement français à l'étranger doit réfléchir, d'une part à un nouveau modèle économique pour mobiliser des moyens financiers adaptés à une activité en forte croissance, et d'autre part à un modèle pédagogique qui lui permettra de répondre, mieux encore, aux besoins des élèves et aux attentes de leurs parents.
Monsieur le rapporteur, nous partageons votre diagnostic s'agissant de l'augmentation constante des besoins du réseau : besoins en enseignants d'abord, avec notamment la nécessité d'une juste répartition des enseignants français pour un maintien de la qualité de l'enseignement que les parents sont en droit d'exiger, mais aussi besoins en financements nouveaux. Sur ce dernier point, nous avons à résoudre au plus vite une équation complexe. Une conférence va être organisée prochainement avec les services de Bercy pour déterminer les moyens budgétaires à mobiliser sur le triennat à venir. Par ailleurs, nous devons nous-mêmes être réactifs pour trouver sur le terrain des solutions adaptées à chaque établissement.
À cette fin, nous nous efforçons de sensibiliser nos interlocuteurs dans les ambassades, travaillons avec les parents d'élèves, qui sont effectivement nos premiers contributeurs financiers, et nouons des relations de partenariat avec les grandes entreprises qui emploient des expatriés français.
S'agissant des enseignements dispensés, notre plan d'orientation stratégique est largement consacré au numérique. Nous n'imposons pas de dispositifs depuis Paris mais nous observons ce qui se fait sur le terrain, pour ensuite diffuser ce qui réussit. Nous allons, par exemple, essayer de pallier une pénurie relative d'enseignants en philosophie et dans les matières scientifiques en mettant en oeuvre des dispositifs d'enseignement en ligne. Nous travaillons actuellement avec Cédric Villani, mathématicien français, médaille Fields 2010, pour l'élaboration de cours enregistrés qui constitueront une ressource supplémentaire mise à la disposition des établissements.
S'agissant enfin de la disparité des statuts et des profils d'enseignants français ou étrangers en poste dans le réseau, nous nous attachons à faire bénéficier les recrutés locaux d'une protection sociale satisfaisante en discutant au cas par cas avec l'Ambassade compétente. Par ailleurs, pour garantir l'homogénéité des enseignements dispensés, nous mettons en oeuvre 19 plans régionaux de formation.
Ma première question concerne les personnels enseignants des établissements français à l'étranger : quelles tendances observe-t-on s'agissant de leur mobilité géographique ? En d'autres termes, s'installent-ils pour de longues années dans un pays ou, au contraire, présentent-ils des profils de carrière à mobilité courte dans plusieurs pays successifs ?
J'aimerais également vous interroger sur les relations qu'entretiennent l'AEFE et des systèmes d'enseignement proches ou complémentaires, à l'instar du CNED ou des écoles internationales installées sur le territoire français, qui représentent un appui pédagogique utile pour des ressortissants français à l'étranger comme étrangers en France.
Enfin, en tant que président du groupe interparlementaire d'amitié France-Algérie, je souhaite attirer votre attention sur les difficultés rencontrées par nos compatriotes expatriés en Algérie au regard de l'insuffisance de l'offre d'enseignement en français. Certes, le lycée Alexandre Dumas d'Alger, malgré des capacités d'accueil limitées, scolarise la majorité des élèves français résidant dans la capitale, mais l'offre est absolument inexistante dans les autres villes du pays. Dans ces circonstances, comment envisagez-vous de développer le réseau d'enseignement en français dans ce pays ?
Les inégalités statutaires entre personnels des établissements français à l'étranger constituent un sujet de tension récurrent. Ainsi, lors d'un déplacement à Varsovie, une mère d'élève du lycée français m'a interpellée sur les difficultés de gestion du personnel qui en découlaient mais également sur le manque de moyens humains de l'établissement.
Dans le cadre des formations que vous proposez aux recrutés locaux, quelle place est faite à la pédagogie et à l'accompagnement des élèves, qui constituent des spécificités fortes de l'enseignement français ? Par ailleurs, quelle politique menez-vous en faveur de l'accueil des enfants handicapés dans vos établissements ?
J'aimerais également être éclairée sur les relations que l'Agence entretient avec les alliances françaises dans les pays qui ne disposent pas d'un établissement en propre mais où, malgré tout, existe une demande d'enseignement en français.
Enfin, vous avez évoqué l'action de l'AEFE en vue d'inciter les bacheliers du réseau à poursuivre leurs études supérieures en France. Quelle proportion d'entre eux est aujourd'hui concernée et quels sont les objectifs affichés par le plan d'orientation stratégique de l'Agence dans ce domaine ?
Je souhaite tout d'abord me faire l'écho des préoccupations de notre collègue Corinne Lepage, qui regrette de ne pouvoir assister à votre audition. Le réseau d'enseignement français à l'étranger fait aujourd'hui face à un double défi : quantitatif d'abord, avec une demande en constante augmentation tant de la part des Français, toujours plus nombreux à s'expatrier, que des familles locales, notamment dans les pays émergents ; qualitatif ensuite, en raison de l'exigence toujours plus grande, et d'ailleurs légitime, des familles et de la concurrence effrénée des autres systèmes d'enseignement.
L'enseignement français à l'étranger constitue un véritable laboratoire d'idées et d'expériences à l'égard de l'apprentissage des langues comme de l'usage des nouvelles technologies. Les riches expériences de ces professeurs français, confrontés au cours de leur carrière à d'autres cultures et d'autres outils, représentent un atout incontestable pour l'éducation nationale, qui doit davantage en tirer profit.
Le quatrième point du plan d'action pour notre politique scolaire extérieure vise à consolider l'excellence pédagogique du réseau. Cet objectif exige l'implication du ministère de l'éducation nationale, aujourd'hui cantonné au détachement des enseignants et à l'homologation des établissements. Cette participation renforcée pourrait être l'occasion d'une plus grande ouverture de l'école de la République sur l'Europe et le monde.
Pour ce qui concerne mes propres interrogations, je souhaiterais revenir sur vos propos relatifs à l'application, par les établissements français à l'étranger, de la réforme des rythmes scolaires. Il m'a semblé vous avoir entendu évoquer le chiffre de 90 % d'établissements sous le régime d'une scolarité de cinq jours par semaine. Cette proportion est-elle exacte ?
S'agissant enfin des innovations pédagogiques au sein de ces établissements et notamment du développement de l'enseignement en ligne, quelles sont vos perspectives de partenariat avec le ministère de l'éducation nationale, notamment en matière d'enseignement des langues rares qui mobilise parfois, dans les établissements de l'éducation nationale, un professeur pour quatre ou cinq élèves seulement ?
Vous avez indiqué que, sur un total de 320 000 élèves, les établissements relevant de l'AEFE scolarisaient 120 000 Français. Parmi eux, pouvez-vous nous indiquer combien sont en réalité des binationaux ?
À la différence des familles binationales ou des Français ayant décidé de s'installer définitivement ou pour une longue période dans un pays étranger, de nombreux expatriés n'y résident que quelques années pour des raisons économiques. Quelles solutions alternatives proposez-vous à ces familles lorsqu'aucune place n'est disponible dans un établissement du réseau ? Disposez-vous par exemple de partenariats avec des établissements locaux ? À défaut, des cours en ligne sont-ils mis à disposition de ces élèves, comme d'ailleurs d'élèves étrangers souhaitant suivre tout ou partie d'un enseignement en français ?
Quelles relations entretient l'AEFE avec les pays d'accueil ? Plus précisément, l'Agence décide-t-elle de son propre chef de développer son réseau dans tel ou tel pays ou, au contraire, répond-elle à des demandes spécifiques des autorités locales ? Je me souviens en particulier de la création de l'école française du Caucase, fruit d'une volonté et d'un financement privés soutenus par l'ambassade de France. Dans le même temps, nous avions pu observer une volonté politique de diminuer drastiquement le volume d'enseignement du français dans les établissements scolaires locaux.
Beaucoup d'entre vous ont évoqué les richesses pédagogiques développées dans les établissements de l'AEFE, dont pourrait bénéficier l'école de la République. Il me semble, en particulier, que les enseignants qui développent l'accueil de primo-arrivants sur notre territoire gagneraient à bénéficier, dans le cadre de leur formation, du savoir-faire de ceux qui accueillent des jeunes enfants non francophones à l'étranger. Mais nous avons pu constater, comme notre collègue Jacques-Bernard Magner, rapporteur de la mission d'information sur les écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE), une certaine frilosité à l'égard des intervenants extérieurs. Nous devons mobiliser toutes les universités et les ESPE car les enseignants issus du réseau de l'AEFE sont porteurs d'un savoir-faire précieux.
Permettez-moi de regrouper certaines questions pour y répondre de façon exhaustive.
Concernant les personnels enseignants français, il convient de distinguer deux catégories :
- les personnels expatriés, qui regroupent à la fois les personnels de direction et les personnels enseignants investis d'une mission à caractère pédagogique dans le secondaire, soit environ 1 200 personnes. Ils n'ont pas vocation à s'installer dans les pays où ils sont nommés et connaissent généralement plusieurs expériences à l'étranger entrecoupés d'un aller-retour en France ;
- les personnels résidents, majoritaires, au sein desquels ils convient de distinguer les « vrais résidents », ayant fait le choix de s'installer définitivement dans le pays où ils enseignent, et les « faux résidents », souvent jeunes et très mobiles, qui peuvent occuper successivement plusieurs postes.
S'agissant de nos relations avec le CNED, auquel une convention nous lie, nous travaillons à la redéfinition de ses outils en vue de permettre une « offre hybride », comprenant un enseignement en ligne pour les trois matières principales que sont le français, les mathématiques et l'histoire-géographie. Ceci permettra de diminuer les documents envoyés, qui représentent, à titre d'exemple, un poids de 15 kilogrammes pour un élève de sixième.
Les relations avec les réseaux locaux et la coopération linguistique doivent répondre à un objectif de cohérence d'action de la France à travers les acteurs que sont les lycées français, les alliances ou l'Institut français. Les ambassadeurs ont pour mission de définir une stratégie cohérente de présence et d'expansion. En outre, les chefs d'établissement de l'AEFE sont encouragés à coopérer avec les établissements locaux, afin de favoriser l'ouverture sur les pays d'accueil. Pour ce qui concerne le cas particulier de l'Algérie, je rappelle que le « lycée international » -nous ne pouvions pas le nommer autrement- a rouvert ses portes il y a 10 ans et qu'il accueille en majorité des enfants algériens, certains pouvant avoir la double nationalité franco-algérienne sans nécessairement l'indiquer. Il existe une très forte demande et, dès la rentrée 2014, nous allons augmenter la capacité d'accueil sans pour autant ouvrir d'autres établissements en dehors d'Alger. Vous avez raison de souligner que l'enseignement du français dans les établissements locaux constitue un lien important. Au Maroc, où le réseau de lycées est historiquement le plus important, nous notons un fort intérêt pour ouvrir des sections internationales francophones dans les lycées marocains publics et privés. La nécessité de mutualiser les ressources documentaires conduit à privilégier l'ouverture de telles sections dans les villes où un lycée français est déjà implanté. La stratégie de développement de l'AEFE évolue ainsi d'une logique de substitution à une logique de coopération qui aide le système éducatif marocain à s'ouvrir au français.
Le sujet de la vie scolaire constitue un marqueur du système scolaire français. Au sein des comités de vie lycéenne, les élèves prennent toute leur part au fonctionnement des établissements. Dès que ceux-ci atteignent une certaine taille, nous essayons d'avoir des conseillers principaux d'orientation (CPE), afin que les personnels d'encadrement soient formés.
La situation des enfants atteints d'un handicap constitue une réelle préoccupation pour l'Agence, où une personne se consacre spécialement à cette question. Sur 320 000 élèves, nous avons identifié 3 000 enfants en situation de difficulté scolaire. Cette approche est plus large que celle du seul handicap et inclut également les troubles tels que la dyslexie. Les établissements reçoivent des instructions pour prendre en compte ces situations, ce qui peut soulever quelques difficultés dans le cas des établissements conventionnés où le droit local s'applique, et non la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Les situations y sont traitées au cas par cas.
Pour répondre à votre question, madame Blondin, environ 50 % des 13 500 à 14 000 des élèves du réseau de l'AEFE qui obtiennent chaque année le baccalauréat poursuivent aujourd'hui leurs études supérieures en France. La marge de progression dans ce domaine est donc encore importante. Nous y travaillons avec les référents « Orientation » en poste dans les lycées français en sensibilisant les élèves dès la classe de première. Par ailleurs, les élèves ayant préféré débuter leurs études supérieures dans leur pays de résidence ou dans le système anglo-saxon, reviennent pour certains en France à compter de la licence ou du master. L'augmentation du nombre de bacheliers choisissant un cursus français constitue l'un de nos principaux objectifs. À titre d'exemple, nous signerons la semaine prochaine avec sept instituts d'études politiques en région une convention permettant l'ouverture, dès 2014, de quatre centres de concours décentralisés à Casablanca, Bogota, Shanghai et Bangkok, afin d'éviter à nos étudiants de se rendre en France pour un concours d'entrée qui se tient traditionnellement au mois de mai. D'autres centres devraient ouvrir au cours des prochaines années.
Madame Cartron, en réalité, 80 % de nos établissements pratiquent un rythme de cinq jours ouvrés, simplement pour être en conformité avec les rythmes locaux et ce, bien avant la réforme de l'organisation scolaire en France. Les horaires d'ouverture des établissements varient toutefois grandement d'un pays à l'autre : les cours se terminent généralement en début d'après-midi dans les pays au climat le plus chaud tandis que d'autres proposent des activités extra-scolaires après 15 heures. S'agissant de l'enseignement des langues rares, nous proposons des sections spécialisées dans certains pays, comme pour le thaï en Thaïlande, et travaillons avec le ministère de l'éducation nationale afin de développer en France et à distance ce type d'enseignement.
En réponse à M. Gattolin, j'indiquerai qu'il est particulièrement difficile de connaître le pourcentage de binationaux parmi nos élèves, pourcentage qui varie en tout état de cause d'un pays à l'autre. Pour ce qui concerne ceux que nous pourrions qualifier d'expatriés « provisoires », nous faisons systématiquement en sorte de les accueillir dans nos établissements. Il s'agit pour nous d'un public prioritaire. Leur nombre est en croissance exponentielle à Dubaï (+ 20 % à la rentrée 2013), à Abu Dhabi et à Doha. Nous n'y refusons aucune demande à ce jour mais je dois bien reconnaître que la situation, en termes d'effectifs, est tendue. Dans ces pays, comme dans d'autres, l'AEFE est donc favorable au développement de partenariats avec des établissements locaux. Au cours de l'année 2014, les ambassadeurs devront faire des propositions au ministre des affaires étrangères en matière de présence scolaire française au regard de l'évolution de la communauté nationale sur place au cours des trois prochaines années. Ces études permettront à la tutelle de l'AEFE de disposer d'une visibilité afin de prévoir d'éventuels redéploiements des moyens en cohérence avec les besoins locaux, mais également de négocier avec le ministère de l'économie et des finances les crédits nécessaires au développement du réseau.
Il me semble effectivement essentiel de mieux valoriser les compétences et l'expérience des enseignants qui reviennent exercer leur métier en France. Si l'AEFE dialogue au cas par cas avec le ministère de l'éducation nationale s'agissant de l'affectation de retour des personnels de direction, la situation est effectivement plus compliquée pour les enseignants en raison de leur nombre. L'Agence signale toutefois à la direction des ressources humaines du ministère de l'éducation nationale les dossiers des enseignants dont la qualité et l'expérience ont été particulièrement saluées. Le recteur concerné par l'affectation en est alors informé. Mais il est vrai que cette procédure quelque peu informelle pourrait être systématisée afin de favoriser les retours en France dans les meilleures conditions.
Les familles françaises sont de plus en plus enclines à l'apprentissage de la langue de leur pays de résidence et à la découverte, dans le cadre scolaire, d'une autre culture. Il y a une douzaine d'années en Jordanie, je me souviens d'avoir rencontré des parents dubitatifs à l'idée que la langue arabe soit enseignée aux élèves les plus jeunes. La situation était totalement inverse en septembre 2013 lorsque je me suis rendue à Amman à l'occasion de l'inauguration du lycée français. Désormais, en Jordanie, comme au Vietnam où votre commission a pu observer le dispositif, une assistante de la langue du pays accompagne l'enseignant francophone, ce qui permet aux enfants d'être parfaitement bilingues à l'entrée au cours préparatoire.
Je souhaiterais connaître la nature de vos relations avec Campus France, organisme placé sous la double tutelle du ministère des affaires étrangères et du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui a des missions similaires aux vôtres en matière de promotion de l'enseignement supérieur français auprès des jeunes étrangers.
Nous avons signé une convention avec Campus France, avec qui nous sommes en dialogue constant, pour la mise en place d'une plateforme numérique expérimentale, l'organisation de salons consacrés à l'enseignement supérieur ou encore pour des actions d'information dans nos établissements.
Je vous remercie pour la qualité des réponses que vous avez fournies aux commissaires qui, vous l'avez constaté, se sont montrés particulièrement intéressés par l'action de l'AEFE.
Mes chers collègues, je vous rappelle que mercredi prochain, dans le cadre de ses travaux sur le projet de loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, notre commission se déplacera sur le site de l'École nationale vétérinaire d'Alfort (ENVA).