La réunion est ouverte à 9 h 30.
Trois avis budgétaires à l'ordre du jour ce matin. Avant de passer la parole à nos rapporteurs, je voudrais faire quelques brèves observations liminaires. Notre commission présente au total huit avis budgétaires sur le projet de loi de finances : six concernent la mission écologie et développement durable dont quatre pour les transports (aériens, ferroviaires, maritimes, routiers), un pour la prévention des risques et un pour la biodiversité et la transition énergétique ; un avis recouvre la mission politique des territoires et un avis traite d'une partie de la mission recherche, pour les crédits consacrés au développement durable.
Nous avons pu programmer deux auditions de ministres sur leurs budgets : celle de Mme Pinel il y a une dizaine de jours et celle d'Alain Vidalies la semaine prochaine. Je vous propose donc qu'à la fin de la présentation des rapports pour avis qui concernent des budgets que défendra Alain Vidalies, nous reportions notre vote à une réunion postérieure à l'audition du ministre.
Les crédits du projet de loi de finances pour 2016 consacrés aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux, comprennent trois séries de dispositions :
- une partie des crédits inscrits au programme budgétaire 203 intitulé « Infrastructures et services de transport » ;
- des fonds de concours parmi lesquels figurent, au premier rang, les crédits de l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) ;
- le compte d'affectation spéciale « services nationaux de transport conventionné de voyageurs », qui concerne les trains d'équilibre du territoire (TET).
Après vous avoir présenté les crédits de l'État et de l'AFITF, je vous ferai part de mes vives préoccupations concernant le financement des infrastructures de transport, devenu erratique depuis l'abandon de l'écotaxe, puis les enjeux spécifiques au domaine ferroviaire, qui souffre toujours d'un manque d'État stratège, d'une infrastructure vieillissante malgré les efforts réalisés, et d'une absence de vision à moyen long terme extrêmement préjudiciable pour le système ferroviaire et en particulier pour notre industrie.
L'enveloppe accordée à SNCF Réseau, qui représente 80 % des crédits du programme budgétaire 203, s'élève à 2,5 milliards d'euros, soit un montant stabilisé par rapport à celui de l'année dernière. Elle couvre la redevance d'accès facturée par le gestionnaire d'infrastructure pour l'exploitation des trains express régionaux, les TER, des trains d'équilibre du territoire, les TET, ainsi qu'une participation de l'État pour l'utilisation du réseau par les trains de fret.
Dans les crédits consacrés au soutien, à la régulation et à la sécurité des transports terrestres, 26 millions d'euros sont prévus pour compenser à SNCF Mobilités les tarifications sociales nationales imposées par l'État, et 15 millions d'euros sont dédiés au soutien au transport combiné ferroviaire, soit 1,4 million d'euros de moins qu'en 2015.
Pour les transports fluviaux, la subvention versée à Voies navigables de France s'élève à 252 millions d'euros, en diminution aussi par rapport à 2015. 7 millions d'euros sont destinés au soutien au transport combiné fluvial et maritime, en diminution de plus de 13 % par rapport à l'année dernière.
Enfin, 17 millions d'euros serviront à financer les dépenses transversales du programme « infrastructures et services de transport », telles que les études et les dépenses de logistique de la DGITM ou des services qui lui sont rattachés, en diminution de 7 % par rapport à 2015.
On observe donc sans surprise, du côté des crédits du budget général, une diminution significative des dépenses sur nombre de lignes budgétaires.
Sur les fonds de concours apportés par l'AFITF, 339 millions d'euros doivent servir à financer des opérations contractualisées dans les contrats de projet ou de plan État-régions dans le domaine des transports ferroviaires et collectifs. Mais ce montant, en baisse de 9 % par rapport à l'année dernière, n'est encore qu'estimatif, le budget de l'AFITF devant être arrêté en décembre. En outre, 28 millions d'euros seront destinés à la mise en sécurité des passages à niveau et des tunnels.
Je dois vous faire part de ma très vive préoccupation à propos du budget de l'AFITF.
Tout d'abord, et j'en suis désolé pour nous tous, nous avons été dupés sur le budget 2015 de l'agence ! Je vous rappelle que l'AFITF avait connu deux années très difficiles, en 2013 et en 2014, en raison des reports de l'entrée en vigueur de l'écotaxe. L'État avait commencé à réduire sa contribution au financement de l'agence, alors que la taxe n'était pas collectée et ne pouvait donc rapporter les recettes prévues.
Une fois ce projet de taxe poids lourds définitivement enterré, l'État a décidé, pour l'exercice 2015, d'augmenter la fiscalité sur le gazole et d'affecter le produit de cette augmentation à l'AFITF, soit 1,139 milliard d'euros. Cela devait lui permettre de retrouver un budget plus raisonnable, de 2,2 milliards d'euros, dont 1,9 milliard de crédits d'« intervention » destinés au financement effectif des infrastructures de transport. C'est en tout cas ce qu'on nous avait annoncé à l'automne dernier.
À l'époque, nous nous étions inquiétés, avec la rapporteure spéciale de la commission des finances, Marie Hélène des Esgaulx, de la façon dont serait assumée l'indemnité due à Ecomouv', qui se chiffre tout de même à un milliard d'euros. Lors d'une audition devant nos deux commissions le 29 octobre 2014, le secrétaire d'État aux transports nous avait assuré que ces montants ne seraient pas ponctionnés sur le budget de l'AFITF. Je le cite : « Les recettes consacrées au financement des infrastructures sont non seulement fléchées, mais sécurisées pour l'année 2015. Quoiqu'il arrive, ce n'est pas sur ce budget là que l'on viendra ponctionner les sommes nécessaires au paiement d'une indemnité. » Et finalement, quand on regarde le budget d'intervention de l'AFITF de 2015 tel qu'il a été exécuté, que voit-on ? Un prélèvement d'autorité de 528 millions d'euros, pour financer la première partie de ladite indemnité...
C'est très grave. D'abord, parce qu'on n'a pas dit la vérité aux parlementaires que nous sommes.
Ensuite, parce que l'Agence n'est plus en mesure d'assumer les engagements qu'elle a pris par le passé. Certes, son budget d'intervention a pu être maintenu pour 2015 à 1,8 milliard d'euros, soit 100 millions de moins par rapport à ce qui était prévu initialement, malgré la ponction de ces 528 millions d'euros. Mais à quel prix ? Elle a dû renoncer à certaines dépenses d'intervention ainsi qu'au remboursement prévu de l'avance faite par l'Agence France Trésor et utiliser la quasi-totalité de son fonds de roulement - ce qui ne sera donc plus possible à l'avenir. Elle a aussi bénéficié, il est vrai, d'une recette supplémentaire de 100 millions d'euros, la contribution volontaire des sociétés d'autoroutes. La résiliation du contrat avec Ecomouv' a plusieurs conséquences pour le budget de l'AFITF. Elle crée deux nouvelles dépenses : d'une part, l'indemnité immédiate, versée en 2015, de 528 millions d'euros, d'autre part, les créances « Dailly » à rembourser chaque année jusqu'en 2024 (environ 50 millions d'euros par an). Elle supprime également une dépense, le loyer annuel qui était dû à la société Ecomouv' pour la collecte de la taxe (250 millions d'euros par an).
Mais nous sommes toujours loin du compte. Il ne faut pas oublier que l'AFITF a accumulé, depuis 2013, près de 700 millions d'euros de retards de paiement vis à vis de SNCF Réseau, qui n'ont toujours pas été honorés en cette fin 2015 ! Cette situation anormale génère bien évidemment des frais financiers - plus de 20 millions d'euros aujourd'hui.
Et si l'on se tourne vers l'avenir, la situation est encore plus préoccupante. Dans le projet de loi de finances pour 2016, la part du produit de la TICPE affectée à l'AFITF a été réduite de 400 millions d'euros, passant de 1,139 milliard d'euros à 715 millions d'euros ! Je soutiendrai un amendement de Marie-Hélène des Esgaulx pour restituer l'affectation de 1,139 milliard d'euros à l'AFITF.
Malgré cette réduction, l'agence devrait retrouver un budget d'intervention de l'ordre de 1,9 milliard d'euros, car elle n'aura plus 528 millions d'euros d'indemnité à verser à Ecomouv'. Mais il n'en reste pas moins que cette somme est largement insuffisante pour satisfaire les engagements passés de l'agence. Elle ne pourra prendre de nouveaux engagements qu'en reportant à nouveau le remboursement de ses retards de paiement vis-à-vis de SNCF Réseau.
Or, les nouveaux engagements ne manquent pas, puisque l'agence va devoir payer les loyers des contrats de partenariat signés pour la LGV Bretagne Pays de la Loire, le contournement Nîmes Montpellier, la rocade L2 de Marseille, les contrats de plan État régions 2015-2020, le troisième appel à projets pour les transports collectifs en site propre (TCSP) - si attendu -, sans compter les projets à venir du Canal Seine Nord Europe et de la liaison ferroviaire Lyon Turin... Enfin, il reste encore tous les projets du scénario 2 de la Commission Mobilité 21, sur lequel le Gouvernement, et en particulier le Premier ministre, s'était engagé ! Mais où sont les neiges d'antan et la valeur des engagements pris ?
Cette situation est d'autant plus regrettable que le Gouvernement avait une solution simple pour s'en sortir, et affecter, enfin, un niveau convenable de recettes à l'AFITF : utiliser la TICPE. La baisse d'un centime de la fiscalité sur l'essence qu'il a proposée est démagogique et ne correspond pas à l'engagement de notre pays en faveur de la transition énergétique et de la COP 21. Il n'y avait aucune raison objective de baisser le prix de l'essence, une énergie fossile dont la consommation ne saurait être encouragée. D'après un calcul rapide, cela fait perdre près de 160 millions d'euros, qui auraient pu être affectés à l'AFITF. Mais non, le Gouvernement préfère préserver le caractère erratique du financement des infrastructures de transport !
C'est dommage, car nous avions créé, avec l'AFITF - qui a fêté son dixième anniversaire cette année -, un bel outil financier, permettant l'affectation de recettes stables et prévisibles à des dépenses d'investissements qui s'étalent sur plusieurs années, et dans une perspective de report modal. Je rappelle que l'Agence a engagé 33 milliards d'euros depuis sa création, dont 21 milliards ont déjà été payés, et que deux tiers de ces sommes concernent des transports alternatifs à la route. Je doute que nous serions arrivés au même résultat si cet outil financier n'avait pas existé. Il est particulièrement significatif que l'AFITF commence d'ailleurs à intéresser des pays étrangers : Slovénie, Chine, Allemagne ont rencontré le président de l'agence pour avoir un retour sur ce dispositif.
En ce qui concerne le financement de la politique des transports, je ne suis pas plus rassuré quand je me tourne vers l'échelon local... L'article 4 du projet de loi de finances relève à 11 salariés le seuil de soumission au versement transport, ce qui correspond à un manque à gagner qui se chiffre en centaines de millions d'euros selon le Groupement des autorités responsables de transport (Gart) pour les autorités organisatrices de transport locales. Il est compensé cette année compensé par un prélèvement sur recettes, mais qu'adviendra-t-il les années suivantes ? On sait que les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent.
J'en viens désormais aux enjeux spécifiques du domaine ferroviaire, qui attend toujours le retour de « l'État stratège », pourtant maintes fois réaffirmé dans la loi de réforme ferroviaire. Mais sur le terrain, on en est encore loin...
Au risque de me répéter, il faut tout de même souligner ce paradoxe d'un État qui reporte au maximum l'échéance d'une ouverture à la concurrence des transports ferroviaires, et obtient gain de cause à Bruxelles dans le cadre des négociations sur le quatrième paquet ferroviaire - la date d'ouverture à la concurrence a été repoussée à 2026 pour les services conventionnés - , tout en décidant d'introduire dès à présent sur son territoire la libéralisation du transport par autocar, sans verrou, qui met frontalement en concurrence, sur son territoire, les modes ferroviaire et routier. Bien entendu, je ne suis pas opposé à cette libéralisation du transport par autocar, mais il me semble logique que dans ce cas, l'on permette aussi au rail de s'adapter, en l'ouvrant à la concurrence.
Sur la modernisation du réseau ferroviaire, on attend aussi plus de vision stratégique. Réseau ferré de France a certes adopté en septembre 2013, à la demande du Gouvernement, un grand plan de modernisation du réseau (GPMR), avec une enveloppe de 15 milliards d'euros sur six ans, pour mettre un frein au vieillissement du réseau, constaté par l'école polytechnique de Lausanne. Mais l'État n'a pas pu s'engager de façon pluriannuelle sur ces crédits, et l'on nous dit aujourd'hui que les montants consacrés à l'entretien du réseau dépendront du contrat signé entre l'État et SNCF Réseau. J'espère donc que l'État fera le nécessaire pour engager les actions annoncées le plus vite possible. Il y va de l'efficacité et de la sécurité de notre réseau.
Autre exemple où l'État peine à s'affirmer : les trains d'équilibre du territoire. Comme vous le savez, la convention signée en 2010 entre l'État et la SNCF n'est pas satisfaisante - l'offre mérite d'être revue, l'architecture financière aussi, la Cour des comptes l'a clairement souligné. Or, le Gouvernement ne cesse de reporter l'échéance d'une reprise en main de ce dossier, comme s'il avait grand peine à exercer son rôle d'autorité organisatrice ! Il aurait en effet pu modifier cette convention dès 2013, mais n'a fait que la prolonger par avenant depuis cette date.
Certes, il a créé l'année dernière une commission à ce sujet, présidée par Philippe Duron. Elle a conclu à la nécessité d'une reprise en main effective de ce dossier par l'État, d'une refonte des dessertes, d'un effort de maîtrise des coûts d'exploitation de la part de l'opérateur et d'une préparation à l'ouverture à la concurrence. Mais la question est loin d'être réglée, puisqu'un préfet, François Philizot, a été missionné pour discuter avec les régions des évolutions de desserte. Celui-ci ne pourra rendre ses conclusions qu'une fois que les nouvelles régions auront été mises en place. Cela ne me choque pas, mais on perd encore quelques mois dans ce dossier, alors qu'il aurait pu être repris en main dès 2013. Et en attendant, ces trains se vident, vieillissent, et coûtent de plus en plus cher...
Le compte d'affectation spéciale qui retrace les recettes et dépenses affectées à ces trains d'équilibre du territoire est doté pour 2016 de 335 millions d'euros, dont 217 millions pour l'exploitation des services, en augmentation de 15% par rapport à l'année dernière, et 118 millions pour la maintenance du matériel roulant.
Pour mémoire, ses recettes proviennent quasi-exclusivement de la SNCF, par le biais de la contribution de solidarité territoriale et de la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires. Et c'est l'augmentation de la contribution de solidarité territoriale qui permet d'absorber l'augmentation des coûts d'exploitation. C'est le chat qui se mord la queue. Seuls 19 millions d'euros sont issus du produit de la taxe d'aménagement du territoire imposée aux sociétés concessionnaires d'autoroutes.
Sur le fret ferroviaire, l'État a mis en place une conférence ministérielle périodique à ce sujet. Je rappelle toutefois qu'il n'assume pas en totalité l'enveloppe qu'il est censé reverser à SNCF Réseau pour prendre en charge une partie des péages fret. Cela représente, pour SNCF Réseau, un manque à gagner de 232 millions d'euros. C'est pour ce motif que l'ARAF a refusé à deux reprises cette année de valider les tarifs des péages fret. Elle ne les a acceptés qu'après avoir obtenu l'engagement de l'État que ses éventuels défauts de paiement pourraient être financés par une fraction du dividende de SNCF Mobilités. Mais, comme l'a souligné le président de l'ARAF lui-même, ce n'est pas du tout l'esprit de la réforme du 4 août 2014, qui était d'utiliser ces dividendes pour désendetter le réseau et non pour répondre aux difficultés budgétaires de l'État.
En outre, les tarifs des péages fret vont augmenter de 6,27 % en 2016, puis 2,4 % en 2017. Ce choc ferroviaire ne pourra pas être absorbé par les entreprises. Il faut rendre la gestion du réseau plus performante.
Enfin, la filière industrielle ferroviaire attend aussi un retour de l'État stratège. Je ne m'attarde pas sur ce point, que j'ai déjà évoqué devant vous, mais je rappelle que c'est tout un vivier d'emplois et de compétences qui est en danger, dans un domaine où la France avait pourtant tiré son épingle du jeu jusqu'à présent. Quel dommage de ne pas préserver cet acquis !
Je termine mon propos par un regret : le report au 1er janvier 2018 de l'entrée en vigueur de la dépénalisation des infractions au stationnement payant. Cette réforme d'envergure porte en elle de belles potentialités pour le développement des politiques de transports collectifs, en donnant enfin aux élus locaux la maîtrise pleine de ce qui doit être perçu comme une véritable politique publique, mais elle a rencontré trop de freins, ce que je regrette vivement.
Comme l'a évoqué le président, nous ne voterons sur ces crédits qu'après avoir entendu le ministre. Mais je doute pour ma part que cette audition change mon analyse de ces crédits, sur lesquels je vous proposerai d'émettre un avis défavorable, si le budget affecté à l'AFITF n'évolue pas favorablement d'ici là et s'il n'est pas fait place à une vision de long terme du financement des infrastructures de transports.
Je remercie le rapporteur pour sa précision et sa rigueur. J'ajouterai un petit complément sur la question du prélèvement sur le dividende de SNCF Mobilités. Je siège au conseil de surveillance de la SNCF depuis la mise en place des nouvelles structures le 1er juillet. Il nous a été indiqué, comme l'a dit le rapporteur, qu'au titre de la compensation pour le fret, il y aurait un prélèvement de l'État cette année de 28 millions d'euros à la suite de la demande de l'ARAF. Naturellement les dirigeants de la SNCF sont tout à fait opposés à ce prélèvement, qui est contraire à l'esprit de la réforme lors de laquelle il avait été clairement dit que le dividende devait permettre ou en tout cas contribuer à résorber le déficit de la SNCF, qui est de 40 milliards d'euros aujourd'hui, et dont on espère la stabilisation à 60 milliards environ d'ici dix ans. On le sait, la situation est donc plus que préoccupante et ce prélèvement n'est pas le bienvenu.
Nous nous attendions au rapport fait par le rapporteur. La situation financière est compliquée et est héritée de l'histoire de la SNCF et de notre pays. Il faut féliciter le Gouvernement d'avoir tenu un certain nombre de caps dans ce contexte, en particulier le budget du ferroviaire qui est stabilisé, notamment les crédits de SNCF Réseau. J'ai aussi relevé dans les documents budgétaires que le fonds de concours de l'action 10 augmente pour atteindre 415 millions d'euros. La SNCF a des problèmes d'infrastructures. Je voudrais rappeler que nous avions demandé à l'époque que l'entretien soit renforcé sur le réseau d'Île-de-France, qui connaissait des difficultés depuis l'accident de Bretigny. Le Gouvernement a affecté en deux ans, d'abord cinq cents emplois supplémentaires, puis encore 350 emplois pour la maintenance des réseaux.
Globalement sur le ferroviaire, le budget devrait permettre de tenir en 2016. À la suite du rapport TET, le Gouvernement souhaite reprendre en mains sa responsabilité d'autorité organisatrice de transports. Il y a une ferme volonté de passer la convention avec les régions mais c'est toujours plus long que prévu malheureusement. Il semble aussi que nous soyons obligés de passer par un nouveau marché pour acheter des machines. En même temps, le Gouvernement a réinscrit un objectif d'un milliard et demi d'euros d'achat de matériel pour les TET.
Je voudrais aussi rappeler que la réforme de la SNCF se met en place comme prévu. La réforme du 4 août 2014 s'est mise en place avec une meilleure cohérence opérationnelle pour la réunification des métiers d'infrastructures. Tout le monde s'en félicite aujourd'hui. Quant à l'amélioration de la trajectoire financière du système ferroviaire, nous sommes d'accord que malheureusement nous en sommes à environ 45 milliards d'euros de déficit et qu'il augmente de 3,5 milliards tous les ans. Le cadre social harmonisé est en cours de négociation et le déroulement est plutôt positif.
Sur l'AFITF, nous sommes tous attentifs. Son budget d'intervention est maintenu pour 2016. Mais les trajectoires futures devront être aux alentours de 2,8 milliards d'euros pour faire face aux échéances. Je suis persuadé que le Gouvernement fera les efforts nécessaires pour que cette trajectoire soit tenue.
Je rappelle que l'ARAFER a été mise en place : c'est une évolution positive. Le plan de relance prévu à la suite de la mission sur les autoroutes est lancé. Les négociations avec les sociétés de travaux publics sont en cours. Le Gouvernement tient à maintenir les 55 % de petites entreprises de travaux publics. Je me satisfais de la situation tout en sachant qu'il faudra faire des efforts pour les infrastructures dans les années à venir.
Pour finir, j'évoquerai la LGV-SEA Paris-Tours-Bordeaux. Cette négociation qui date de 2010 est une véritable catastrophe financière et technologique. Il faut espérer que les autres projets seront conduits différemment, avec des conditions de travail différentes et notamment davantage d'argent public.
Sur la mise en oeuvre de la réforme, je rappelle que le fait de commencer par un prélèvement sur le dividende au profit de l'État, contrairement à l'esprit de la réforme, n'est pas un très bon signal.
En écoutant notre rapporteur, on a presque le moral à zéro. D'une manière générale en effet, on voit que sur le dossier des infrastructures routières et ferroviaires, la parole de l'État n'est plus crédible. On assiste à des mensonges répétés. Je prendrais pour exemple l'abandon de l'écotaxe, qui a des conséquences catastrophiques, à la fois pour les conseils départementaux mais aussi pour l'État. On nous a menti au sujet des indemnités à Ecomouv, j'ai pour ma part une question. La ministre Ségolène Royal nous avait indiqué que les portiques seraient réutilisés. S'agit-il encore d'un mensonge ? Où en est-on ?
Nous avons entendu le procureur général Louis Nègre dans une intervention incisive. Mais faisons attention. Lorsque vous dites que les promesses n'engagent que ceux qui les entendent, je crois que le Gouvernement précédent était justement spécialiste en la matière. Je souhaite revenir sur les crédits de l'AFITF. Je me félicite qu'ils soient stabilisés. Entre 2012 et 2016, il y a une stabilisation autour de 1,85 milliard d'euros. Comme l'a dit Jean-Jacques Filleul, il faudrait à terme arriver à 2,5 milliards. Je rappelle tout de même que nous sommes dans une situation particulièrement difficile et que l'opposition elle-même nous enjoint à faire des économies. Aujourd'hui, le rapporteur-procureur préconise de faire des efforts supplémentaires.
Sur la question du versement transport, je note avec satisfaction que le Gouvernement s'engage pour une compensation totale. On peut s'interroger sur l'avenir mais quelle est la cause de cela ? C'est une harmonisation des seuils sociaux que les entreprises et les syndicats patronaux ne cessent de demander. On y arrive justement et il faut s'en féliciter. Je répète que je soutiens les remarques formulées par Jean-Jacques Filleul et que je ne partage pas l'analyse du rapporteur. L'opposition s'oppose mécaniquement et fait de la démagogie mais ce n'est jamais bon pour les citoyens qui nous observent car on sait que ce que l'on promet aujourd'hui, on ne l'a pas tenu hier et on ne le tiendra pas demain.
Je félicite le rapporteur pour son analyse très complète. Je suis pour ma part très favorable au ferroviaire. Je considère que nos ancêtres ont su réaliser au fil du temps, le meilleur maillage qui existe en Europe. Le recul pris chaque année devient dramatique dans certains secteurs. Monsieur le président, ne pourrait-on pas faire un véritable état des lieux sur ce sujet ?
De manière plus spécifique, le sujet est lié à celui des ports. Dans certains ports européens - comme par exemple Hambourg - 50 % du fret se fait par le ferroviaire ou le fluvial. Or, chez nous, nous sommes à 4 ou 5 % pour le ferroviaire et 8 ou 10 % pour le fluvial. Pourtant, souvent, il ne s'agirait que d'aménagements qui permettraient de développer le fluvial ou le ferroviaire et d'avoir un effet pour nos ports et l'emploi qu'ils drainent.
Je réserverai le détail de mes remarques pour la séance. Mais je crois qu'il faut arrêter les postures. Cela devient lassant. On sait tous qu'il n'y a pas assez d'argent pour les infrastructures. Nous avons un gros déficit. Lorsqu'on dit que l'AFITF manque de crédits, on le sait depuis le début puisque nous avions prévu à l'origine que l'AFITF fonctionnerait grâce aux dividendes des autoroutes. Dès le moment où on a privatisé les autoroutes, en 2005, on a de fait supprimé la principale ressource de l'AFITF. Puis il y a eu les épisodes malheureux de l'écotaxe. Vous savez tous, gouvernements de droite comme de gauche, qu'il y a derrière cela l'incapacité de Bercy à accepter qu'une somme d'argent lui échappe et soit fléchée sur un organisme. Ce n'est pas nouveau. En fin de compte, nous n'avons pas assez d'argent pour le service public. Or, on n'arrête pas de faire du service public bashing. On démantèle les opérateurs historiques qui sont une force pour notre pays : c'est ce qui se passe avec l'injonction de l'Europe sur les concessions hydrauliques. Tant que ces politiques-là seront à l'oeuvre, nous n'en sortirons pas. C'est à cela qu'il faut s'attaquer : la richesse produite en France aujourd'hui va aux actionnaires plutôt que d'aller aux services publics.
Je remercie notre rapporteur, dont je partage l'inquiétude concernant l'avenir de la « nébuleuse SNCF ». Je vis au quotidien l'agonie technique de la ligne Paris-Toulouse. Chaque semaine il y a un incident technique qui cause des retards. Nous avons été quelques-uns à écouter un excellent rapport du président de La Poste qui nous a démontré que c'était son changement de statut qui permettait de sauver l'avenir de La Poste et l'emploi des 277 000 salariés. Tant que la SNCF aura un droit de tirage permanent sur les deniers publics, cela ne marchera pas car ce système ne génère pas de dirigeants capables de gérer la SNCF. Les nantis de la SNCF, ceux qui ont une ligne, ont de la chance pour l'instant mais cela ne durera pas si l'on ne réforme pas la SNCF, car nous n'avons pas les moyens d'entretenir ces lignes. C'est une gestion de gribouille qui donne le droit à la SNCF de tirer de l'argent public et d'assécher un État déjà lui aussi à l'agonie sur le plan financier.
Je ne reviens pas sur la situation financière de la SNCF aujourd'hui. Pour avoir participé au rapport Duron sur les TET avec mon collègue Jean-Jacques Filleul, nous avons bien constaté que la situation n'était pas simple et ne pouvait être réglée rapidement car elle est le résultat d'années de gestion. Il faut trouver des financements. Je voudrais rappeler que nos territoires ont besoin du ferroviaire. En Vendée par exemple, depuis le rapport Duron, une association se mobilise à Luçon pour le ferroviaire parce que le ferroviaire est source de désenclavement et de développement économique.
Je remercie le rapporteur pour ses éclaircissements. Je ne sais pas si dire la vérité et nous mettre devant nos responsabilités, c'est être procureur. Moi je ne le pense pas en tout cas. Nous devons pouvoir prendre en considération toutes les difficultés financières. L'abandon de l'écotaxe en est une des principales causes. Mettre en difficulté la SNCF, c'est en faire subir les conséquences à nos territoires puisque les plus petits territoires ne seront plus reliés entre eux. Il y aura aussi des conséquences fortes en matière d'emploi pour toutes les entreprises qui travaillent pour le ferroviaire. Lundi, j'ai discuté avec le nouveau directeur d'Alstom : leur cahier des charges et leur plan de travail ne vont pas loin.
Je suis d'accord avec vous, M. Filleul, la situation financière est compliquée. C'est une situation ancienne, oui. Reconnaissons aussi que nous n'avons pas toujours été parfaits. On peut se tromper. Mais il faut tout de même dire ce qui est. Nous avons fait des erreurs mais qu'attendez-vous, maintenant que vous êtes au pouvoir, pour changer cela ? Vous citez à juste titre l'accident de Bretigny avec les 850 postes supplémentaires affectés à l'entretien : sont-ce des créations de postes ? Comment sont-elles financées ? Dans ma région, brutalement, tous les emplois liés à la modernisation de la ligne Grasse-Cannes ont été pris et envoyés pour faire de la sécurisation et du contrôle des voies. Il ne faut pas habiller Pierre en déshabillant Paul.
Eh bien j'attends une réponse de la ministre pour savoir comment sont financés 850 postes supplémentaires.
Vous ne pouvez pas dire cela. Il y a des besoins de maintenance. On ne peut pas d'un côté déplorer que la maintenance ne se fasse pas et de l'autre se demander comment on la paye lorsqu'on la recrute.
Moi je considère qu'un choix est possible. Sur le fond, je crois qu'il y a des possibilités de faire différemment. Mon rapport est certes critique. Mais lorsque vous signalez que la dette est de 45 milliards et qu'elle passera à 60 milliards, on ne peut que s'inquiéter pour l'avenir. Il n'y a pas d'augmentation des fonds de concours de l'AFITF. En crédits de paiement, on avait l'année dernière 371 millions et en 2016, on a plus que 339 millions. Il y a donc une diminution de 9 %. Sur les crédits de l'AFITF, il y a une diminution de 3 % sur le fluvial et le portuaire, M. Revet, une diminution de 4 % de la subvention allouée à Voies navigables de France (VNF) et le transport combiné fluvial et portuaire baisse de 13 %. Sur l'ARAFER, nous sommes d'accord : le fait que 55 % de petites entreprises puissent contribuer, c'est une bonne chose. M. Cornu, vous avez souligné la question de la crédibilité. Il vaudrait mieux en effet parler moins et tenir ses promesses. M. Bérit-Débat, vous m'appelez procureur général. Dans notre commission, nous avons une grande liberté de parole et je m'en félicite. Mais mon rapport est un cri d'alerte. Je suis malheureux de cette situation. L'argument de ce qu'a fait le précédent Gouvernement n'est pas le meilleur à mon avis : cela signifie que vous n'avez pas fait mieux trois ans après. Par ailleurs, l'objectif est bien de trouver 2 ou 2,5 milliards d'euros supplémentaires pour l'AFITF. Philippe Duron le dit lui-même. Nous avons une vision partagée sur ce montant.
M. Revet, vous montez au créneau sur le portuaire avec raison. Pourquoi n'est-on pas plus efficace dans ce domaine ? Certains aménagements spécifiques pour relier les ports aux voies ferrées ne sont pas faits et cette situation n'est pas bonne pour la France.
Mme Didier, vous souhaitez que l'on arrête les postures. Il faut commencer par balayer devant sa propre porte. Lorsque vous dites que Bercy est toujours immobile, je ne sais plus où vous vous situez. Vous dénoncez le service public bashing. Mais M. Mayet lui, parle « d'agonie » : il est dans la réalité. Je ne suis pas dans le service public bashing : je voudrais simplement un service public qui marche. Dans mon département, il y a ceux que l'on appelle les « naufragés du TER », qui voudraient simplement les « 3A » : à l'heure, avertis et assis. Dans mon département, les trains sont sales, taggés et peu abordables. Je reviens de Transports for London. J'y ai entendu quelque chose qui m'a intéressé. Transports for London a récupéré une ligne qui avait été faite par une autre compagnie. Elle fonctionnait très mal et était sale. Après la reprise en main, on a constaté une augmentation de 260 %, uniquement grâce à des choses simples. M. Mayet, comme vous, je suis favorable à l'ouverture à la concurrence de la SNCF. On n'arrive pas à réformer la SNCF de l'intérieur : seule l'ouverture à la concurrence permettrait de stimuler ce grand corps malade. Quant à son « droit de tirage » permanent sur les deniers publics : oui c'est vrai. Mme Billon, il faut se mobiliser pour trouver des financements, je suis d'accord. M. Longeot, vous parlez à juste raison des difficultés causées par l'abandon de l'écotaxe.
Je terminerai en rappelant que ce système ferroviaire était l'un des meilleurs du monde. La SNCF est encore une signature dans le monde entier. Ses filiales internationales et Keolis prennent des marchés dans le monde entier. Nous avons donc un potentiel extraordinaire dans cette entreprise. On augmente nos parts de marché à l'extérieur. Je critique l'incohérence de la politique menée : d'un côté, on interdit l'ouverture à la concurrence du ferroviaire et de l'autre, on ouvre à la concurrence des cars. Je n'arrive pas à suivre le fil de cette politique. Deuxième critique, si on veut faire avancer les choses, il faut une vision à long terme. Enfin, la gestion financière n'est pas à la hauteur : on vit sur la dette, on l'augmente et on fonctionne sur elle. Cette gestion n'a pas d'avenir.
J'aurai un discours beaucoup plus optimiste sur les crédits consacrés aux transports routiers que mon collègue sur les transports ferroviaires.
L'année 2015 a été marquée par de profondes évolutions, très positives, dans le secteur des transports routiers. Des avancées majeures ont été obtenues dans le domaine de la régulation du secteur autoroutier. Notre commission avait été l'une des premières à réagir, à l'automne dernier, à la publication de l'avis de l'Autorité de la concurrence qui dénonçait la rentabilité exceptionnelle des sociétés d'autoroutes dites « historiques ». La commission avait alors créé un groupe de travail, conduit par Jean-Jacques Filleul et Louis-Jean de Nicolaÿ, qui avait appelé à une transparence accrue dans ce domaine, et à une renégociation du plan de relance. C'est bien la direction qu'a prise le Gouvernement. Puisqu'il s'est attaché à renégocier le plan de relance qu'il s'apprêtait à signer avec ces sociétés, en s'appuyant sur un groupe de travail mis en place par le Premier ministre, auquel participaient nos deux collègues. Un protocole d'accord a ainsi été signé le 9 avril 2015 avec les sociétés d'autoroutes. Il permet la réalisation du plan de relance autoroutier, mais avec plusieurs garde-fous destinés à plafonner le bénéfice que pourraient en tirer ces sociétés. Par exemple, une fois un certain seuil de rentabilité dépassé, la durée de la concession autoroutière pourra être réduite.
Les sociétés d'autoroutes ont par ailleurs accepté de reverser une part de leurs profits au bénéfice du financement des infrastructures de transport, en versant 1 milliard d'euros à l'AFITF sur l'ensemble de la durée des concessions. Les premières années, cela se traduira par une recette supplémentaire de 100 millions d'euros pour l'AFITF. Elles donneront aussi collectivement 200 millions d'euros pour la création d'un fonds d'investissement durable, et ont mis en place des actions commerciales pour les jeunes, le covoiturage et les voitures écologiques.
Il faut se réjouir de l'équilibre qui a été trouvé sur ce dossier complexe. La réalisation de ce plan de relance autoroutier permettra en effet de mobiliser 3,27 milliards d'euros pour la relance des travaux publics, avec, à la clef, près de 10 000 emplois directs ou indirects. Les sociétés d'autoroutes se sont d'ailleurs engagées à ce que plus de la moitié des travaux réalisés le soient par des PME et des PMI non liées aux grands groupes autoroutiers.
L'autre réponse a été législative. La loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a considérablement renforcé la régulation de ce secteur, en étendant les activités de l'autorité de régulation du secteur ferroviaire au domaine autoroutier. L'autorité de régulation des activités ferroviaires et routières ou ARAFER émettra un avis sur les avenants aux contrats de concession et aura pour mission de collecter et rendre publiques les informations relatives au secteur autoroutier. La loi Macron fixe également de nouvelles règles, plus contraignantes, pour la passation des marchés des sociétés d'autoroutes, conformément au souhait du groupe de travail de notre commission. Enfin, elle introduit un dispositif de modération des péages ou de réduction de la durée des concessions en cas de profits supérieurs aux estimations, et interdit l'allongement de la durée des concessions sans accord du Parlement. Il s'agit là de progrès majeurs dans la régulation du secteur autoroutier, qui auront des répercussions budgétaires certaines pour les usagers.
L'autre bonne nouvelle, c'est le développement d'une nouvelle offre de transport collectif, qui répond à une demande aujourd'hui non satisfaite, à savoir la libéralisation du transport par autocar, autorisée par la même loi Macron. Cette offre permettra de répondre aux besoins de mobilité non satisfaits par le transport ferroviaire, soit pour des raisons de desserte, soit pour des raisons de coût, et de réduire le recours à la voiture individuelle. Là aussi, des créations d'emplois sont attendues. La note de France Stratégie évoquait le chiffre de 22 000 emplois. En un peu plus d'un mois, 700 emplois ont déjà été créés. Ces autocars doivent répondre à des normes d'émissions de polluants atmosphériques strictes - la norme Euro 5 jusqu'à la fin 2017, et la norme Euro 6 ensuite.
Pour ce qui est des transports conventionnés, la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République a unifié cette compétence à l'échelle des régions à partir de 2017, afin de favoriser l'intermodalité entre les modes ferroviaire et routier notamment.
Enfin, pour rester dans le domaine du verdissement des transports, nous pouvons nous féliciter des avancées permises par la loi de transition énergétique, qui pose des obligations en matière de renouvellement des parcs automobiles ou d'installation de bornes de recharge électriques et prévoit la mise en place d'une prime à la conversion octroyée en échange de la mise à la casse d'un véhicule polluant ancien. Nous savons bien que c'est le parc diesel en circulation le plus ancien qui est le plus nocif, même si le scandale Volkswagen nous invite à une certaine prudence sur les véhicules les plus récents.
Pour l'année 2016, le Gouvernement s'est attaché à résoudre la question de la compensation des recettes de l'écotaxe, à la suite de son abandon. Pour mémoire, nous avons augmenté l'année dernière de 2 centimes la TICPE sur le gazole pour les véhicules particuliers, et de 4 centimes celle applicable aux transporteurs routiers de marchandises. Cette solution avait alors été présentée comme provisoire, le temps qu'un groupe de travail créé à ce sujet rende ses conclusions. Celui-ci a d'ailleurs pu s'appuyer sur un rapport du conseil général de l'environnement et du développement durable.
À l'issue de ces travaux, il apparaît que la solution d'une taxation supplémentaire sur le gazole, déjà mise en place pour 2015, est préférable à la création d'une vignette pour les transporteurs routiers. Outre qu'elle amorce le rapprochement tant attendu des fiscalités de l'essence et du gazole, cette mesure permet de collecter un montant considérable, sans générer de frais de collecte ou d'obligations déclaratives pour les entreprises, ce qui n'est pas le cas d'une vignette. L'augmentation de la fiscalité sur le diesel est en outre supportable, à l'heure où les prix des carburants sont très bas. Les entreprises de transport routier peuvent répercuter cette hausse sur leurs tarifs. Enfin, le risque d'un « effet d'éviction », suivant lequel cette augmentation du prix du gazole conduirait les poids lourds étrangers à faire leur plein à l'étranger, est dans les faits limité. L'augmentation de la fiscalité sur le gazole est donc maintenue pour 2016, et ne sera pas remplacée par la mise en place d'une vignette.
Le rapprochement entre les deux fiscalités se poursuit même, pour les véhicules légers, avec l'adoption à l'Assemblée nationale d'un amendement du Gouvernement qui augmente d'un centime la TICPE sur le gazole et diminue du même montant celle de l'essence. La part du produit de TICPE affectée à l'AFITF est moins importante que l'année dernière, mais son budget d'intervention, estimé à 1,9 milliard d'euros, reste non négligeable, et supérieur à celui de l'année dernière. Il faudra prévoir, à l'avenir, des moyens supplémentaires pour que l'agence puisse effectivement remplir ses engagements et rembourser ses dettes. Pour 2016, et dans le contexte actuel de maîtrise des dépenses, je ne serai pas aussi alarmiste que mon collègue.
Concernant les crédits consacrés au transport routier dans le projet de loi de finances pour 2016, ceux-ci se divisent entre les crédits inscrits au programme budgétaire 203 intitulé « Infrastructures et services de transport » et les crédits de l'AFITF.
Le développement des infrastructures routières a la particularité d'être exclusivement financé par des fonds de concours versés par l'AFITF et par les collectivités territoriales. Ils sont aujourd'hui évalués à 671 millions d'euros en crédits de paiement, dont 394 millions proviendront de l'AFITF. Cette somme servira notamment à financer les volets routiers des contrats de plan État-régions 2015-2020. Le financement des infrastructures routières a en effet été réintégré à ces contrats, contrairement à la génération précédente des contrats de projets. C'est un choix qui me semble pertinent, dans une perspective multimodale mais aussi parce que dans certains territoires, le transport routier est le seul mode de transport possible et ne doit donc pas être négligé.
Pour l'entretien et l'exploitation du réseau routier national, une enveloppe de 324 millions d'euros de crédits de l'État est prévue, soit un montant proche de celui adopté en loi de finances initiale pour 2015. Cette enveloppe devrait être complétée par 328 millions d'euros de fonds de concours provenant de l'AFITF, en hausse de 38 % par rapport à l'année dernière. C'est encore une bonne nouvelle, car les montants consacrés à l'entretien et l'exploitation du réseau routier national ne sauraient être inférieurs à ces montants, faute de quoi le réseau serait amené à se détériorer et deviendrait de plus en plus cher à entretenir.
Enfin, 48 millions d'euros sont prévus pour les actions de soutien et de régulation du secteur des transports terrestres, et 17 millions seront destinés aux dépenses de prospective et de logistique de la DGITM.
Concernant le compte d'affectation spéciale intitulé « aides à l'acquisition de véhicules propres », qui sert à financer le bonus automobile et la prime à la conversion, le barème du malus applicable depuis 2014 est maintenu pour 2016, et devrait rapporter 266 millions d'euros. Du côté des dépenses, le recentrage du bonus automobile sur les véhicules les plus propres, déjà entamé en 2015, devrait se poursuivre, avec la diminution au 1er janvier 2016 du bonus versé pour un véhicule full hybride de 2 000 euros à 750 euros, le bonus versé pour un hybride rechargeable étant quant à lui réduit de 4 000 à 1 000 euros. Le bonus accordé en faveur des véhicules électriques, de 6 300 euros, sera en revanche préservé. Au total, le bonus automobile devrait engendrer 236 millions d'euros de dépenses.
Le compte d'affectation spéciale finance également la prime à la conversion, accordée pour la mise au rebut d'un véhicule diesel immatriculé avant le 1er janvier 2001, soit avant l'entrée en vigueur de la norme Euro 3, pour l'achat d'un véhicule plus propre. Cette prime à la conversion, ou prime à la casse, est cumulable avec le bonus automobile, et s'élève aujourd'hui à 3 700 euros pour l'achat d'un véhicule électrique, ce qui porte à 10 000 euros la somme du bonus et de la prime à la conversion, et à 2 500 euros pour l'achat d'un véhicule hybride rechargeable.
Pour les ménages non imposables au titre de l'impôt sur le revenu, une prime à la conversion de 500 euros peut être obtenue pour l'achat d'un véhicule thermique neuf respectant la norme Euro 6 et émettant entre 61 et 110 grammes de CO2 par kilomètre, ou pour l'achat d'un véhicule d'occasion, qu'il soit de cette même catégorie, électrique ou hybride. Le Gouvernement envisage de renforcer ce dispositif, en augmentant son montant à 1 000 euros et en élargissant son assiette à la mise au rebut de tous les véhicules diesel de plus de dix ans. Cette mesure sera financée par une part du produit de la hausse de 1 centime de la fiscalité sur le gazole. Si le dispositif est en vigueur depuis le 1er avril 2015, il n'est pas encore possible d'en dresser un bilan solide, car il existe un délai de plusieurs mois entre la commande d'un véhicule et son immatriculation, qui ouvre droit à cette prime. Le fait d'agir sur le parc automobile existant, dont on sait qu'il est le plus polluant, et en prévoyant des mesures spécifiques en faveur des publics les plus défavorisés, me semble aller dans le bon sens.
Je ne suis donc pas aussi réservé que mon collègue sur les crédits consacrés aux transports routiers. Je ne doute pas que le secrétaire d'État aux transports répondra le 12 novembre à toutes les interrogations qui resteront à la suite de nos échanges d'aujourd'hui. Je vous proposerai ensuite, lorsque nous devrons nous prononcer à ce sujet, un avis favorable sur ces crédits.
Concernant l'État et les sociétés d'autoroutes, nous avons saisi le Premier ministre à plusieurs reprises pour avoir copie des accords. Nous n'avons jamais eu de réponse. Nous recevrons le ministre de l'économie, Emmanuel Macron, le 1er décembre. J'espère qu'il sera en mesure de nous communiquer enfin la teneur de ces accords.
Sur l'avenir de la SNCF et du système ferroviaire, il est important de pouvoir faire une évaluation constructive : ce système est rongé par l'endettement et nous devons trouver des solutions, en faveur d'une entreprise de service public avec une part de concurrence, certes, mais qui apporte aux voyageurs les services qu'ils attendent.
Concernant les transports routiers, inutile de noircir le trait. Le rapporteur a montré que le budget se tasse. Globalement cependant, le budget pour les routes va permettre de franchir l'année 2016 dans de bonnes conditions. Nous avons désormais le plan de relance autoroutier. L'accord passé entre l'État et les sociétés d'autoroutes a été présenté par le ministre. 100 millions d'euros seront versés par les compagnies autoroutières. 55 % des marchés devraient être réservés aux entreprises extérieures à ces groupements majoritaires. Tout cela va dans le bon sens. Les contrats de plan apporteront par ailleurs, d'ici à 2020, des moyens importants pour le réseau routier.
La situation n'est pas catastrophique. Nous apportons donc notre soutien aux crédits proposés.
Je félicite le rapporteur pour son optimisme... Je me réjouis qu'il ne soit plus question de reprise des concessions autoroutières. Avec réalisme, Emmanuel Macron a privilégié un plan de relance dans le cadre d'un contrat avec ces sociétés. Je rappellerai simplement que les concessions autoroutières reversent tous les ans 3,5 milliards d'euros à l'État, ce qu'on ne dit pas assez souvent.
Nous pouvons également nous féliciter que les PME et les PMI aient désormais accès à ce marché. Je serai en revanche plus pessimiste pour nos régions du Sud de la France, où il n'y a plus de PME et de PMI capables de répondre à ces appels d'offres et d'assumer ces travaux. Le marché y restera donc fermé.
Concernant la circulation des autocars, les chiffres sont encourageants sur certaines lignes. En revanche, en matière de sécurité et d'émissions de polluants, je ne suis pas certain que la multiplication des autocars et des poids lourds sur les routes soit une bonne chose.
Nous pourrons évoquer le développement du parc d'autocars lors de l'audition à venir du ministre. Disposons-nous déjà d'un premier état des lieux du dispositif ? À l'heure de la COP 21, il me paraît en contradiction avec l'orientation générale de protection de l'environnement et de diminution du trafic sur les routes. J'ai le sentiment que c'est en raison de notre incapacité à financer ce qui devrait être fait sur le réseau ferroviaire qu'on a mis en place ce palliatif.
Je suis pour le tram-train. La France a un maillage ferroviaire extraordinaire. Le tram-train s'est développé dans d'autres pays. Il permet de relier jusqu'au coeur des villes. Nous aurions dû retenir cette orientation avec ainsi la possibilité de diminuer le nombre de véhicules automobiles et donc la pollution.
J'indiquerai pour commencer que l'excessivité que l'on reproche à notre opposition n'a d'égale que l'excessivité de votre soutien au gouvernement.
Nous sommes favorables au fait de créer de l'emploi par le développement des autocars. Il ne faut cependant pas que cela conduise à affaiblir le service offert aux voyageurs, les autocars n'ayant pas le même confort sur une certaine distance qu'un voyage en train. Il ne faut pas non plus que cela serve d'alibi à la SNCF pour oublier d'améliorer sa gestion.
Concernant les autoroutes, la question de la liaison manquante entre Vesoul et Langres perturbe la liaison entre l'Atlantique et la Suisse. C'est un tronçon d'autoroute non rentable. Nous avons l'autorisation de l'Europe pour qu'il y ait une aide de l'État pour financer cette autoroute. L'aide de l'État se fait sous forme de deux déviations routières de deux fois deux voies. L'une est en cours de construction ; pour l'autre, les études se terminent. Pourquoi cette autoroute, sous prétexte qu'il y a insuffisamment de véhicules par jour, a-t-elle été reléguée en toute dernière priorité au niveau national ? Ce territoire a besoin d'être irrigué pour sa survie. Le montage financier était accordé. Nous sommes dans une crise de centralisation, contraire à l'esprit transversal de l'aménagement du territoire.
J'ai siégé à RFF pendant trois ans. J'ai pu voir comment cela fonctionnait, avec le pouvoir aux mains de hauts fonctionnaires et un désintérêt de ce qui se passe sur les territoires. Je n'ai pas eu le sentiment d'une grande proximité.
Concernant les marchés autoroutiers, il sera désormais demandé que 50 % de l'entretien soit réalisé par des entreprises extérieures au groupe concessionnaire. Il y a eu un échec total sur la ligne LGV Atlantique qui va de Tours à Bordeaux. Il était prévu que l'entreprise délègue un certain nombre de marchés aux entreprises locales : cela n'a pas été le cas. Un seul pont a été délégué ; tout le reste a été donné à ses filiales. Il faudra donc un contrôle très strict.
Dans le rapport sur les crédits routiers comme dans le rapport sur les crédits ferroviaires, même si les conclusions ne sont pas les mêmes, se pose le problème du financement. Le rapporteur a tenté d'expliquer que l'augmentation du prix du gazole compense la suppression de l'écotaxe. Je suis dubitatif. L'augmentation du prix du gazole n'est supportée que par nos concitoyens. Le pouvoir d'achat du contribuable français se trouve grevé.
Je suis prêt à comprendre le développement des autocars dans les secteurs où il n'y a pas de liaisons ferroviaires. Mais ne disons pas qu'ils ont été mis en place parce qu'une catégorie de nos concitoyens ne peut pas prendre le train à cause des tarifs trop élevés. Cela revient à dire à nos concitoyens : « dites-moi ce dont vous avez besoin je vous expliquerai comment vous en passer »... Ce n'est pas un argument et c'est recréer la troisième classe de la SNCF qui existait il y a encore quelques années.
Je suis très favorable à la libéralisation des systèmes de transports. Néanmoins, en ce qui concerne les autocars, permettez-moi de penser que cela ne va pas nécessairement dans le sens d'un meilleur bilan environnemental. Nous n'avons pas immédiatement imposé les meilleures normes aux véhicules, alors même que nous savons aujourd'hui que nous sommes dans l'incapacité de respecter les normes. Cela a été reconnu par la récente décision de la Commission européenne. En zone non dense, lorsque les autocars ne sont pas remplis, le bilan carbone par passager est très mauvais. Il aurait sans doute été préférable de plus mettre l'accent sur l'auto-partage ou le covoiturage qui se développent très bien dans ces zones.
Nous avions eu un débat assez intéressant avec Ségolène Royal sur l'écotaxe. Dans le cadre des élections régionales, il n'aura échappé à personne qu'en Île-de-France, tous les candidats, y compris socialistes, se réclament d'une écotaxe régionale. Il y a une vraie contradiction : sauf erreur de ma part, le marché de démantèlement des portiques est toujours en cours. Le gouvernement n'a fait aucune proposition pour permettre la mise en place par les régions d'écotaxes régionales et pour éviter d'assumer une double charge. Nous allons payer pour le démantèlement des portiques actuels et payer à nouveau pour mettre en place un nouveau système d'écotaxe régionale.
Le rapporteur a démontré par sa présentation sa capacité à voir le verre à moitié plein... Pour ma part, je persiste et signe sur le centime de baisse de l'essence. C'est contradictoire avec ce que nous essayons de faire. J'ai été favorable aux avancées contenues dans la loi pour la transition énergétique. Cette baisse sur l'essence est un signal politique que je ne comprends pas. Il en va de la cohérence de l'action politique.
Sur les crédits routiers du CPER de la région Provence-Alpes-Côte-D'azur, où sont les crédits affectés aux Alpes-Maritimes ? Je n'ai pas vu grand-chose malgré cette augmentation mirifique de la ligne budgétaire que vous évoquez.
L'Allemagne a développé le système de concurrence par autocar. Dans un premier temps, cela a conduit à une augmentation considérable des passagers, au détriment, pour un tiers, de la Deutsche Bahn. Un tiers avait abandonné la voiture au profit de l'autocar. Soyons donc prudents. Après quelques années, on constate une concurrence tellement forte que la plupart des petites entreprises disparaissent au profit de quelques-unes. En Grande-Bretagne, on peut constater une double avancée, dans le ferroviaire et dans les autocars. La concurrence y est très libérale. Elle permet de développer le transport par autocar et parallèlement le train. Nous avions pris ici position, comme au GART, pour limiter la concurrence au-delà de 200 kilomètres entre deux points d'arrêt. Le seuil de 100 kilomètres nous a malheureusement été imposé. Cela va porter atteinte à nos transporteurs locaux.
Sur la vignette, une excellente étude a été réalisée par le Conseil général de l'environnement et du développement durable et rendue publique. Après une étude comparée en Europe, il ressort que le système de la vignette est parfait dans la mesure où personne ne passe à travers mais il est très coûteux. Sur le nombre élevé de poids lourds étrangers qui traversent la France, près de 30 %, certains préfèrent prendre leur gazole en France. Le gazole italien ou britannique est plus cher. Il y a donc certainement une forme de compensation qu'il faudrait étudier de manière très fine. L'association syndicale des transporteurs OTRE a souhaité qu'on en reste à l'augmentation de la TICPE. C'est signe qu'il y a là une possibilité de réguler et d'encourager le transfert modal.
Dernière remarque : on ne parle que d'argent ce matin. Nous sommes face à des choix politiques. France Stratégie a récemment démontré que la France dépense 7 points de PIB de plus que l'Allemagne en dépenses sociales. Cela représente 140 milliards d'euros chaque année. Je suis persuadé qu'avec une simple baisse de 10 % de ces dépenses, on pourrait résorber les problèmes de financement dans les transports.
Concernant la sécurité, une analyse a montré qu'il valait mieux utiliser les autocars que les véhicules individuels. C'est moins accidentogène et moins polluant. Les trains qui ne sont pas en surcharge sont deux fois plus polluants que les autocars, comme cela a été vérifié par l'Ademe.
Les créations d'emplois que je vous indiquais, au nombre de 700, ont été décomptées depuis le vote de la loi Macron. D'ici à la fin de l'année 2015, on espère la création de 100 lignes supplémentaires.
Les dépenses opérationnelles de l'AFITF restent stables : 1,856 milliard en 2012, 1,9 milliard en 2013, 1,7 milliard en 2014, 1,844 milliard en 2015 et 1,855 milliard prévu pour 2016. Les dépenses sont donc vraiment identiques.
Les sociétés d'autoroutes sont engagées dans le cadre du protocole d'accord comme je l'ai évoqué.
En matière de sécurité, beaucoup est fait pour la formation des chauffeurs afin de réduire les risques d'accidents. Aujourd'hui, les accidents les plus fréquents restent ceux en deux-roues et en véhicule individuel.
Globalement les crédits sont stables, en légère baisse de 0,4 %. C'est pour cette raison que je suis plus positif que Louis Nègre et que je défendrai ce budget avec mes collègues.
Je présente, pour la première fois, les crédits du programme 190 relatifs à la recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables, inscrits dans la mission « Recherche et enseignement supérieur » du projet de loi de finances pour 2016. Je succède en cela à Geneviève Jean qui nous avait présenté ces crédits l'an dernier.
Le programme 190 a pour objet de financer des actions de recherche dans les domaines du développement durable, qu'ils portent sur l'énergie, les risques, les transports ou encore la construction et l'aménagement.
Le total des crédits que le projet de loi de finances pour 2016 alloue au programme 190 s'élève à environ 1,4 milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.
Ce montant global est en hausse de 2 % par rapport à celui ouvert par la loi de finances pour 2015. Cette hausse s'explique par la forte élévation des crédits versés au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) pour la couverture des charges nucléaires de long terme de ses installations et le financement des opérations de démantèlement et d'assainissement en cours.
Les crédits du programme ont vocation à financer six opérateurs de l'État : l'IFP Énergies nouvelles (IFPEN), l'Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux (IFSTTAR), l'Institut de radioprotection et de la sûreté nucléaire (IRSN), l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), et l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS).
Pour donner un ordre de grandeur, le principal bénéficiaire du programme 190 est, de loin, le CEA, avec 917 millions d'euros de subventions. L'IRSN, l'IFPEN et l'IFSTTAR perçoivent respectivement 175, 131 et 87 millions d'euros. Les subventions de l'INERIS et de l'Anses sont de 6 et 1,6 millions d'euros.
À l'heure de la mise en oeuvre du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte et à quelques jours de la COP 21, je souhaiterais insister, plus que jamais, sur l'importance des crédits du programme 190. C'est par la recherche et l'innovation que la France pourra changer de modèle en matière d'énergie, de bilan carbone, ou encore de mobilité et d'aménagement durables.
À ce titre, la hausse globale du montant de ces crédits est un signal positif, même si elle ne bénéficie pas à chacun des opérateurs du programme.
Le CEA tire son épingle du jeu : le montant global de ses subventions augmente de plus de 4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2015. Cette hausse correspond essentiellement à la couverture des charges nucléaires de long terme du CEA et au financement des opérations de démantèlement.
En matière de nucléaire civil, les crédits du programme ont aussi vocation à financer le développement de grands outils nécessaires aux activités de recherche - tels que le réacteur Jules Horowitz au centre de Cadarache -, des réacteurs et combustibles de quatrième génération et à optimiser le nucléaire industriel actuel.
Dans le domaine des nouvelles technologies de l'énergie, le CEA concentre ses travaux de recherche et développement sur le bâtiment et les transports, qu'il s'agisse de technologies du solaire (photovoltaïque, solaire thermique et thermodynamique), de procédés d'électrification de véhicules ou de stockage de l'électricité.
Depuis cette année, le programme 190 porte aussi les moyens de financement du Centre national d'alerte aux tsunamis exploité par le CEA.
Ce centre, opérationnel depuis le 1er juillet 2012, fonctionne 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, en coopération avec le SHOM et le CNRS. Il reçoit en temps réel les informations émanant des stations sismiques et de mesure du niveau de la mer situées sur le pourtour méditerranéen et le littoral atlantique.
Pour tout séisme potentiellement générateur de tsunami dans la zone couvrant le nord-est de l'Atlantique et la Méditerranée occidentale, le centre transmet, en moins de 15 minutes, un premier message d'alerte ou d'information aux autorités françaises en prévenant le Centre opérationnel de gestion interministérielle des crises, puis confirme ou infirme l'alerte en fonction des mesures sur les signaux reçus des marégraphes.
Entre 2012 et 2015, 10 séismes de magnitude comprise entre 5,5 et 7 ont fait l'objet de messages d'information émis par le Centre.
Je crois que nous pouvons nous réjouir qu'un million d'euros soit débloqué pour financer le maintien en conditions opérationnelles de ce centre d'alerte. Au-delà de la prévision de ces événements exceptionnels, une réflexion pourrait toutefois être menée sur l'amélioration et la modernisation des moyens utilisés pour alerter les populations en cas de risque.
L'autre opérateur impliqué dans le domaine nucléaire est l'IRSN. Cet établissement contribue à la mise en oeuvre des politiques publiques relatives à la sûreté et à la sécurité nucléaires, à la protection de l'homme et de l'environnement contre les effets des rayonnements ionisants, ainsi qu'à la protection des matières nucléaires, de leurs installations et de leur transport vis-à-vis du risque de malveillance.
Après avoir connu une forte baisse en 2013, 2014 et 2015, ses dotations sont à peu près stabilisées cette année. Je m'en réjouis, car l'IRSN a dû reporter, les années précédentes, le lancement de programmes de recherche.
La contribution versée au profit de l'IRSN par les exploitants d'installations nucléaires de base est maintenue avec un plafond de 62,5 M€. En forte augmentation depuis 2013, cette taxe affectée vient compenser, au moins en partie, la diminution des financements directs de l'État.
Tout comme le CEA, l'IRSN va se trouver, dans les années à venir, confronté aux défis liés au vieillissement et au démantèlement des réacteurs actuels.
Ce contexte va se traduire par une forte croissance des demandes pesant sur l'institut. L'IRSN estime à ce titre que 35 ETPT et 6 millions d'euros seraient nécessaires pour y faire face, et réclame une évolution du dispositif actuel de versement de contribution par les exploitants d'installation nucléaire de base. La révision de ce dispositif a d'ailleurs été évoquée par notre collègue Michel Berson dans un rapport d'information fait au nom de la commission des finances en 2014.
Héritier de l'Institut français du pétrole, l'IFP Énergies nouvelles est désormais pleinement engagé dans la transition énergétique. À titre d'illustration, l'IFPEN est très impliqué dans l'exploration de technologies devant permettre de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports et de limiter la dépendance au pétrole, à travers trois axes : l'hybridation, la réduction des consommations des véhicules thermiques et la mise au point de biocarburants avancés. L'établissement travaille aussi à différentes solutions de récupération de l'énergie thermique perdue à l'échappement, pour des applications dans les domaines ferroviaires et maritimes, certaines pouvant même s'adapter aux poids-lourds et autocars.
Sujet qui me tient particulièrement à coeur, l'IFPEN travaille sur des solutions technologiques dans le domaine de l'éolien offshore, posé et flottant. L'institut a déposé 18 brevets dans ce secteur entre 2012 et 2014. Ses études portent notamment sur la connaissance de la ressource en vent, l'optimisation de la production d'électricité et des coûts, le dimensionnement des éoliennes et sur des supports flottants adaptés. C'est un secteur particulièrement prometteur puisqu'on évalue qu'à puissance égale, l'éolien offshore flottant produira 60 % de plus que l'éolien terrestre.
Le PLF 2016 envisage d'accorder 131 millions d'euros de subvention pour charges de service public à l'IFPEN qui est ainsi, parmi les opérateurs du programme 190, celui qui enregistre, en valeur relative, la plus forte baisse de crédits (-6,6 %).
La diminution constante, depuis 2002, de la subvention qui lui est allouée fragilise la situation budgétaire de l'établissement : son budget prévisionnel fait, une fois encore, apparaître une perte de 6 M€.
L'IFPEN estime que ses ressources propres, issues notamment des produits des dividendes de ses filiales et de redevances pour exploitation de licences, ne permettent plus de compenser la baisse de sa dotation. Il a été contraint de réduire ses effectifs de près de 150 personnes depuis 2010 et d'arrêter des projets de recherche à hauts risques mais aux débouchés à long terme.
Il nous faut être vigilant sur la pression budgétaire exercée sur l'IFPEN, supérieure à celle des autres opérateurs. Il conviendrait d'éviter de nouveaux gels de crédits au cours de l'année à venir.
L'IFSTTAR est un établissement public à caractère scientifique et technologique qui a pour mission de réaliser des recherches dans les domaines du génie urbain et de l'aménagement du territoire ; du génie civil, des infrastructures, des matériaux de construction et de leurs impacts ; des risques naturels et de la mobilité des personnes et des biens, des systèmes de transports, de leur sécurité et fiabilité.
Deux projets de l'IFSTTAR contribuent en particulier à la mise en oeuvre de la transition énergétique. En premier lieu, le projet Sense-city, mini-ville climatique permettant de tester en milieu réaliste des micro-capteurs et nano-capteurs développés pour instrumenter et piloter la ville ; le permis de construire vient d'être obtenu et la phase opérationnelle peut donc commencer. Il pourra d'ailleurs être intéressant pour la commission de la visiter ! En second lieu, le projet Transpolis, ville laboratoire permettant de tester et d'évaluer les innovations en matière de transport urbain.
Je citerai également un projet particulièrement intéressant sur lequel travaille l'IFSTTAR dans une optique de stockage du CO2 : l'utilisation de la carbonatation des bétons de démolition et leur recyclage. La carbonatation est un processus naturel d'absorption de CO2 par le ciment présent dans les déchets de béton concassés. L'idée est d'utiliser les déchets de béton comme puits de stockage du carbone puis de les réutiliser dans des constructions neuves. L'IFSTTAR a défini sous quelles conditions le piégeage de CO2 est optimal : il est possible de recapter 10 % du CO2 libéré initialement lors de la fabrication du béton, soit 20 à 30 kg de CO2 par m de béton.
Je me réjouis donc que la dotation budgétaire allouée à l'IFSTTAR au titre du programme 190 reste quasiment stable par rapport à celle fixée par la loi de finances initiale pour 2015.
L'INERIS mène des recherches sur l'évaluation et la prévention des risques technologiques et des pollutions, liés à l'après mine, aux stockages souterrains, aux risques naturels, aux produits chimiques, etc.
Il devrait percevoir une dotation budgétaire de 6,4 M€ en 2016, en baisse de 2,7 % par rapport à 2015. Compte tenu de l'évolution de ses autres dotations, ses crédits globaux sont quasiment stables.
L'INERIS est aussi un acteur clé de la transition énergétique et de la prévention des risques sanitaires et environnementaux. Il travaille sur le stockage de l'énergie, la méthanisation et l'hydrogène, notamment sous l'angle de la sécurité et des risques d'explosion des batteries. Il mène des recherches en toxicologie et en éco-toxicologie sur les risques émergents que sont les perturbateurs endocriniens, les nano-matériaux et les ondes électromagnétiques. Il apporte un appui aux pouvoirs publics pour la surveillance de la qualité de l'air, en développant des modèles de prévisions.
Pour terminer, l'Anses développe l'appui scientifique et technique nécessaires à l'élaboration des politiques de protection de la santé, liées aux expositions alimentaires, environnementales ou professionnelles, et à la mise en oeuvre des mesures de gestion des risques dans ces domaines.
L'Anses reçoit à titre principal des crédits du programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », et seulement 1,6 % de sa dotation budgétaire totale (c'est-à-dire 1,6 million d'euros), à partir du programme 190. Sa dotation budgétaire globale est en très légère hausse par rapport à 2015.
Cette évolution positive doit toutefois être analysée à l'aune de la forte croissance des missions de l'Anses. En effet, l'agence est chargée de délivrer, depuis le 1er juillet 2015, les autorisations de mise sur le marché des produits phytosanitaires et des matières fertilisantes, et met en place un dispositif de phyto-pharmacovigilance. En 2016, elle devrait en outre prendre en charge les décisions d'autorisation de mise sur le marché des produits biocides et la toxico-vigilance.
Ces différents transferts de compétence traduisent la confiance des pouvoirs publics dans l'indépendance et la qualité d'expertise de l'Anses. Sur le long terme, il nous faudra cependant veiller à ce que les efforts de maîtrise des dépenses publiques ne viennent pas menacer son équilibre budgétaire.
Au total, ces crédits étant globalement stabilisés dans un contexte financier contraint, je vous proposerai de donner un avis favorable à leur adoption.
Je vous félicite pour cet exposé, et d'avoir adopté, comme notre collègue Jacques Cornano hier, une démarche « 0 papier ».
Sur le dossier des éoliennes, nous sommes plusieurs à être choqués qu'il n'y ait aucun plan qui régisse leur développement, avec des conséquences désastreuses sur le paysage. Il y avait auparavant des champs d'éoliennes, mais aujourd'hui, les maires donnent leur accord à des projets isolés, pour 50 ou 60 000 euros.
Quel montant du budget est consacré à ce sujet ? Ne faudrait-il pas réglementer cette question, et ensuite, partager le produit des taxes que ces éoliennes rapportent ?
La quasi-stagnation des moyens de l'Anses, alors que ses missions se sont multipliées, interroge. Il faudrait que nous approfondissions cette question ainsi que celle de lui avoir confié le rôle d'autorité d'évaluation et de délivrance de certificats.
Je me suis rendu compte des problèmes que représentent les éoliennes lorsque j'étais rapporteur du projet de loi de transition énergétique. Avec Cédric Perrin, nous avons demandé la création d'une commission d'enquête sur cette question.
Pour répondre à Chantal Jouanno, la loi sur l'agriculture a prévu que l'Anses rende compte de son activité chaque année devant les commissions compétentes du Parlement.
Les crédits de recherche que j'ai évoqués concernent avant tout l'éolien offshore, qui produit 60 % de plus que l'éolien terrestre. Celui-ci n'entre donc pas dans mon champ de compétence aujourd'hui. Là où il y a eu une réflexion globale, et l'élaboration d'un plan régional à ce sujet, ce plan a été attaqué en justice par des associations et annulé. Il y a une difficulté entre la volonté de communes qui agissent seules, et celle des départements et des régions de préserver des zones pour ces éoliennes.
Au total, 130,9 millions d'euros sont consacrés à IFPEN mais je n'ai pas le détail des crédits de recherche consacrés à l'éolien.
Je suis d'accord avec Chantal Jouanno sur le fait que nous devons être vigilants sur l'évolution des moyens de l'Anses. Mais le budget que j'ai évoqué ne couvre qu'une infime partie des crédits alloués à l'Anses. Ils évoluent d'ailleurs de façon positive, puisqu'ils ont augmenté de 1,9 %.
Toutes les personnes que nous avons entendues lors des auditions ont réfléchi très en amont à l'évolution de leurs moyens et m'ont semblé très à l'écoute de ce que l'on pouvait exiger d'eux. À part l'IFPEN, bon élève dans sa gestion et sa mobilisation de fonds privés, qui en a d'ailleurs été sanctionné par la baisse de sa dotation, tous les autres organismes ont accepté de remettre en cause leur fonctionnement et anticipé des baisses de personnel. Ils sont tous très désireux de faire connaître leurs projets.
Cela me semble effectivement important car chacun de ces organismes a ses spécificités.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits « Recherche en matière de développement durable » du projet de loi de finances pour 2016.
Jean Bizet est désigné pour siéger au sein du Conseil supérieur de l'aviation civile.
Nous devons désigner les sénateurs appelés à siéger dans la commission mixte paritaire (CMP) relative au projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la prévention des risques.
Sont désignés comme titulaires MM. Hervé Maurey, Michel Raison, Didier Mandelli, Michel Vaspart et Jean-Jacques Filleul, et Mmes Nelly Tocqueville et Evelyne Didier et comme suppléants M. Guillaume Arnell, Mme Natacha Bouchart, MM. Gérard Cornu, Jean-Claude Leroy, Pierre Médevielle, Hervé Poher et Rémy Pointereau.
Evelyne Didier est nommée rapporteure de la proposition de loi n° 113 (2015-2016) permettant de maintenir et de développer sur l'ensemble du territoire national une offre de transport ferroviaire régional de qualité.
Je rappelle qu'à la suite du travail de Jean-François Longeot, nous avions demandé à faire un rapport plus poussé sur la désertification médicale, que nous pourrions faire en commun avec la commission des affaires sociales.
Nous allons regarder cela en bureau.
Pour la mission d'information relative à la sécurité dans les gares, lancée à l'initiative d'Alain Fouché, la commission des lois est aussi concernée. Elle a désigné ce matin François Bonhomme comme co-rapporteur. Les travaux de nos deux collègues vont donc pouvoir commencer.
Alain Fouché est nommé co-rapporteur de la mission d'information relative à la sécurité dans les gares.
La réunion est levée à 11 h 45.