La réunion est ouverte à 14h05.
Mes chers collègues, nous poursuivons les travaux de notre commission d'enquête sur les mesures de compensation des atteintes à la biodiversité engagées sur des grands projets d'infrastructures en entendant aujourd'hui les représentants du Conseil national de la protection de la nature (CNPN). Même si l'intitulé de la commission d'enquête ne le précise pas, celle-ci s'intéresse à l'efficacité et à l'effectivité de l'ensemble du triptyque « éviter-réduire-compenser », dite aussi séquence ERC.
La commission d'enquête a souhaité que notre réunion d'aujourd'hui soit ouverte au public et à la presse ; elle fera l'objet d'une captation vidéo et sera retransmise en direct sur le site internet du Sénat ; un compte rendu en sera publié.
Nous allons entendre :
Serge Muller, vice-président de la commission « Flore » du CNPN ;
Michel Métais, président de la commission « Faune » du CNPN ;
Serge Urbano, secrétaire du comité permanent du CNPN.
Je vais maintenant, conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, vous demander de prêter serment.
Je rappelle que tout faux témoignage devant la commission d'enquête et toute subornation de témoin serait passible des peines prévues aux articles 434-13, 434-14 et 434-15 du code pénal.
Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, M. Serge Muller, M. Michel Métais et M. Serge Urbano prêtent successivement serment.
Messieurs, à la suite de vos propos introductifs, mon collègue Ronan Dantec, rapporteur de la commission d'enquête, vous posera un certain nombre de questions. Puis les membres de la commission d'enquête vous solliciteront à leur tour.
Pouvez-vous nous indiquer à titre liminaire les liens d'intérêt que vous pourriez avoir avec les quatre projets spécifiques concernés par notre commission d'enquête, à savoir l'autoroute A65, la LGV Tours-Bordeaux, l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, ainsi que la réserve d'actifs naturels de Cossure en plaine de la Crau ?
Je fais partie de la commission de suivi des mesures compensatoires sur la LGV Sud Europe Atlantique.
J'ai fait partie de la commission d'experts qui a évalué le dossier de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes concernant les zones humides.
Je fais également partie de la commission de suivi pour la LGV Sud Europe Atlantique.
Nous vous remercions tout d'abord d'auditionner le Conseil national de la protection de la nature dans le cadre de votre commission d'enquête, laquelle examine un sujet qui nous tient à coeur. Le CNPN s'implique en effet beaucoup dans les avis relatifs à des infrastructures routières, eu égard aux dérogations demandées.
J'interviens en tant que président du comité permanent du CNPN et président de la commission « Flore ». Permettez-moi, au préalable, de vous demander de bien vouloir excuser le président du comité permanent, Vincent Boullet, en mission à La Réunion.
Le CNPN est une commission administrative à caractère consultatif ; elle donne des avis sur les politiques relatives à la protection de la nature ou de la biodiversité, ainsi que sur les demandes de dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces protégées, au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement.
Vous le savez certainement, le CNPN, qui est actuellement une instance mixte regroupant des experts scientifiques - j'y siège en tant que personnalité qualifiée -, des représentants d'associations de protection de la nature - c'est le cas de mes deux collègues -, des gestionnaires d'espaces naturels, y compris des agriculteurs, des chasseurs, des pêcheurs, des forestiers et des représentants des parcs nationaux, de réserves naturelles, ainsi que des représentants des ministères, va évoluer vers une instance constituée exclusivement de personnes nommées intuitu personae, à l'image des conseils scientifiques régionaux du patrimoine naturel (CSRPN). Cela va constituer un bouleversement : le CNPN existe depuis 1946 et travaille donc depuis des décennies sur ces sujets. On espère qu'il pourra continuer à fournir un travail de même qualité. Pour l'heure, nous allons vous présenter le fonctionnement du CNPN dans sa configuration actuelle, avec différentes instances : un comité permanent, que nous représentons, un certain nombre de commissions et le CNPN plénier, qui se réunit en réunion plénière trois ou quatre fois par an.
Concernant les grandes infrastructures, nous ne donnons des avis que sur les espèces protégées ; nous intervenons, je le répète, sur les demandes de dérogation à l'interdiction de destruction relative aux espèces protégées. L'avis du CNPN ne porte que sur ce point : les espèces protégées dans leurs habitats. Pour ce faire, l'avis du CNPN est fondé sur l'examen d'un dossier de demande de dérogation dans lequel le pétitionnaire, avec l'aide d'un bureau d'étude, doit argumenter, en vertu de la réglementation, sur les raisons impératives d'intérêt public majeur du projet qui doivent présider à cette demande, envisager l'absence de solutions alternatives et étudier la séquence « éviter-réduire-compenser » pour chacune des espèces protégées impactées, en vue de garantir ou d'améliorer l'état de conservation de ces espèces et de leurs habitats, ainsi que leurs relations avec la fonctionnalité des écosystèmes dans lesquels celles-ci sont présentes. Nous recevons un grand nombre de dossiers. Les dossiers courants sont traités directement par l'expert délégué « Faune », c'est-à-dire Michel Métais, et l'expert délégué « Flore », c'est-à-dire moi-même, avec une délégation du comité permanent du CNPN. Quelque 300 avis sont rendus par an : plus de 200 pour la commission Faune et une centaine pour la commission Flore.
Les dossiers un peu plus complexes ou présentant un enjeu plus important, soit 10 à 20 % des dossiers, sont examinés en commission : la commission Faune se réunit dix fois par an, contre cinq fois pour la commission Flore. Nous auditionnons les pétitionnaires, avec leur bureau d'étude, en présence parfois de représentants de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) ou de la direction départementale des territoires (DDT). Sur la base de ces auditions, nous donnons un avis.
Nous pouvons également procéder à des expertises préalables ou nous référer à des analyses réalisées par un certain nombre d'organismes : les conservatoires botaniques nationaux concernant la flore, l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) ou l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA), qui fait maintenant partie de l'Agence française pour la biodiversité (AFB), pour ce qui concerne la faune. Par ailleurs, les conseils scientifiques régionaux du patrimoine naturel (CSRPN) peuvent d'une certaine manière donner des pré-avis sur certains dossiers. L'avis de cette instance n'est pas nécessaire pour les dossiers relatifs à l'aménagement, mais il peut éclairer l'avis du CNPN : une instance régionale peut souvent avoir une connaissance plus fine du contexte local.
Les dossiers les plus importants sont ensuite examinés par le comité permanent - nous en sommes tous les trois membres -, après une pré-analyse par les spécialistes siégeant dans les commissions faune et flore. Sur certains dossiers, il arrive même que le CNPN plénier donne l'avis sur une demande de dérogation. Ce fut notamment le cas, voilà quelques années, pour le fameux dossier de la route du littoral à La Réunion.
En cas d'avis favorable sous conditions, le maître d'ouvrage doit suivre les conditions de l'avis favorable, qui sont reprises dans l'arrêté préfectoral - voire, parfois, ministériel, pour une trentaine d'espèces animales à enjeu national - de dérogation. Il revient à l'administration, au préfet et à ses services, qui peuvent aussi missionner d'autres structures, telles que l'ONEMA ou l'ONCFS, de vérifier que les conditions ERC sont bien suivies.
En cas d'avis défavorable - environ 15 % des cas -, le pétitionnaire doit revoir son projet et le modifier de manière à le rendre satisfaisant, pour répondre aux critères ERC, en vue de permettre le maintien ou la restauration du bon état de conservation des espèces protégées impactées par le projet et de leurs habitats. Il arrive que le projet soit abandonné après un premier avis défavorable, voire un deuxième, mais c'est relativement rare. Il arrive aussi que le préfet passe outre l'avis défavorable du CNPN, ce qui nous plaît moins. Ce fut le cas concernant la route du littoral à La Réunion. L'avis avait été défavorable à l'unanimité des votes exprimés, une solution alternative n'ayant pas été prise en compte. Les impacts indirects sur les carrières, notamment, ne figuraient pas dans le dossier, ce qui avait justifié notre avis défavorable. Malgré tout, le projet a été lancé et est apparemment en cours de réalisation.
J'en viens au bilan de la mise en oeuvre de la séquence ERC depuis la loi du 10 juillet 1976, sur lequel vous m'avez interrogé.
Vous l'avez noté, même si elle n'était pas vraiment appliquée, cette séquence figurait déjà dans la loi de 1976. Pour siéger depuis plus de trente ans au sein du CNPN, j'évoquerai parmi les premiers dossiers celui du barrage de Petit-Saut en Guyane, à la fin des années quatre-vingt, jugé insatisfaisant par le CNPN au regard des mesures d'évitement, de réduction et de compensation. On a vu le résultat : plus de 30 000 hectares de forêt tropicale noyés, des déplacements de populations de flore et de faune, avec des résultats très limités, et un impact très fort sur la qualité de l'eau du fleuve Sinnamary.
Le nombre de dossiers examinés a augmenté : nous sommes passés de quelques dossiers par an dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix à quelques dizaines, pour atteindre quelques centaines actuellement.
Globalement, cela s'est amélioré, mes collègues vous le diront. Nous regrettons toutefois que la demande de dérogation soit faite souvent trop tardivement, lorsque la déclaration d'utilité publique est prise, ce qui ne laisse pas une grande marge de manoeuvre pour envisager de réelles possibilités d'évitement ou de réduction des impacts de grande ampleur.
Vous nous demandez quels sont les critères qui permettent d'assurer la réussite d'un projet de compensation. Nous en avons retenus cinq.
Premièrement, l'anticipation d'un projet nous semble importante. Elle nécessite une bonne connaissance préalable du territoire et des enjeux écologiques locaux.
Deuxièmement, les partenariats avec des organismes gestionnaires d'espaces naturels sont essentiels. Ils diffèrent selon les territoires : l'ONEMA, l'ONCFS, l'Office national des forêts (ONF), le Conservatoire du littoral, les conservatoires régionaux d'espaces naturels (CREN), les associations de protection de la nature, les naturalistes, les parcs régionaux, selon les cas.
Troisièmement, la réussite d'un projet repose aussi sur l'application de l'équivalence écologique, de l'additionnalité et de la mutualisation, des points fondamentaux qui vous intéressent.
Quatrièmement, la proximité géographique des mesures compensatoires est essentielle. Il est important de retrouver le caractère identique des habitats affectés ou détruits.
Cinquièmement, enfin, pour ce qui concerne notamment les projets les plus importants, la constitution d'un comité de suivi est capitale. Nous en reparlerons ultérieurement au sujet des grandes infrastructures, on voit la différence selon qu'il y a un comité de suivi ou non : l'exécution des mesures compensatoires, entre autres, est plus ou moins effective ; elle est pratiquement nulle sans comité de suivi.
Au titre des mesures compensatoires, j'évoquerai aussi la proximité géographique, qui est une garantie pour atteindre l'équivalence écologique. Ce point est important eu égard à la notion de compensation écologique introduite par la loi. Ce n'est pas l'un ou l'autre ; il faut vraiment considérer un mix.
La cinquième question du questionnaire que vous nous avez adressé portait sur les apports principaux de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.
Cette loi comprend des dispositions intéressantes, mais suscite aussi, vous le comprenez bien, des inquiétudes.
Je ne reviendrai pas sur la réparation du préjudice écologique, car cette disposition est intéressante. Il en est de même pour l'Agence française pour la biodiversité. Même si ces mesures n'ont pas une relation directe avec le sujet qui nous occupe, cette instance pourrait avoir un rôle important, que je ne développerai pas ici ; ce point sera peut-être abordé lors des questions.
La loi a permis de renforcer le cadre juridique de la démarche ERC, notamment l'obligation de l'absence de perte nette, voire de gain de biodiversité. Cette disposition n'est pas nouvelle ; elle figure dans le guide méthodologique, mais l'inscrire dans la loi permettra aux instructeurs de dossiers de parvenir à des résultats intéressants.
L'obligation de résultat constitue également une disposition très importante, ainsi que la non-autorisation en l'état des projets si les mesures ERC proposées ne sont pas satisfaisantes. Là encore, inscrire cette disposition dans la loi apportera un fondement à nos avis : si les conditions ne sont pas remplies, nous pourrons nous opposer à un projet. À la suite d'avis défavorables du CNPN, des décisions visant à arrêter des projets vont être prises.
La géolocalisation des mesures compensatoires répond à l'un des voeux du CNPN ; cette mesure importante figurait dans nos conclusions de commissions faune et flore de 2015. La géolocalisation, au même titre que les zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF), changera le statut de ces espaces et permettra d'assurer un suivi. D'autres dispositions ont bien sûr été introduites, mais je me suis borné à évoquer les points importants.
Toutefois, je vois une ombre au tableau. Même si le besoin n'est pas énorme, on note un amaigrissement des effectifs au niveau national. Début 2016, outre la personne qui instruisait administrativement les dossiers, c'est le CNPN qui a vraiment fait le lien, sur la base du bénévolat. On atteint quasiment un niveau zéro en termes de moyens liés à l'instruction des dossiers. Cette situation constatée au niveau national est plus criante encore au niveau régional. En effet, les DREAL et les DDT doivent réaliser un travail important : il ne leur incombe pas seulement de vérifier que les dossiers sont bien instruits, certaines d'entre elles ont, en vertu du pouvoir réglementaire, un niveau d'exigence très important à l'égard des pétitionnaires. Je pourrais vous donner de nombreux exemples sur ce point, mais le temps nous manque.
En outre, nous déplorons la non-évaluation des mesures préconisées. L'année dernière, la commission faune a désigné six projets que nous souhaitons réexaminer dans cinq ans. De fait, nous nous sommes autosaisis de ces dossiers, sur lesquels nous avons donné le plus souvent un avis favorable sous conditions. Nous allons vérifier dans cinq ans ce qu'ils seront devenus. Mais, je le répète, cela se fait sur la base du bénévolat, sans aucune forme d'autorité. Nous ferons cette inspection avec l'assentiment ou a minima l'information du pétitionnaire et de l'administration. Il faudrait systématiser cette procédure, surtout pour ce qui concerne les dossiers les plus importants. Il est important de pouvoir suivre les avis émis par l'autorité environnementale, le CNPN. Actuellement, nous n'avons vraiment aucune garantie, sauf à visiter l'infrastructure par la suite.
Je vous l'ai dit, nous comptons sur la mise en place d'un comité de suivi. Or cette évaluation lui incomberait. On le voit bien pour la LGV Tours-Bordeaux, le rôle du comité de suivi essentiel.
Mais cela repose sur une volonté politique à tous les niveaux de l'État pour appliquer la loi adoptée.
J'insiste sur les petits moyens à maintenir ou à développer, et sur la nécessité d'instituer un niveau de contrôle à un temps donné : trois ans, par exemple, après les autorisations pour évaluer ce qui se passe sur le terrain.
Vous nous demandez quel regard nous portons sur l'expérience de réserve d'actifs naturels menée dans la plaine de Crau.
D'un point de vue écologique, le CNPN estime qu'il s'agit d'une réussite dans la mesure où l'on a prévu une bonne trajectoire écologique en remplaçant un verger industriel, précédemment construit sur du « coussoul », par une steppe herbacée, en termes de mesure compensatoire. Si la compensation vise à restaurer ou recréer des milieux, l'expérience est ici très intéressante.
De plus, cette expérimentation s'est déroulée dans une zone à très fort enjeu écologique, le coussoul de Crau. On propose des mesures compensatoires pour des projets qui pourraient encore dénaturer ou détruire du coussoul. Le CNPN s'était alarmé de cette situation en 2009, en demandant un plan de sauvetage du coussoul de Crau.
Cela étant, du point de vue du génie écologique et de la démarche, cette expérimentation a toute sa valeur. Mais se pose, à l'arrière-plan, la question fondamentale du modèle économique de l'expérimentation de réserves d'actifs naturels. Actuellement, environ 50 % des actifs naturels ont été vendus dans la Crau.
L'initiative de la CDC Biodiversité a conduit l'État à réagir : un groupe de travail a été mis en place au sein du Commissariat général au développement durable, en vue de prévoir des expérimentations sur les actifs naturels, auquel le CNPN participe. Je formulerai deux observations.
D'une part, avec les trois expérimentations en cours, des questions se posent en termes de restauration écologique, de disponibilité du foncier et, surtout, de modèle économique eu égard aux investissements à faire au départ.
D'autre part, la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages s'est emparée de ce sujet, avec les projets d'agrément des sites naturels de compensation. Lors de la consultation du CNPN et de la consultation publique sur le projet de décret, il en ressort que ce décret devrait être affiné en traitant plus la question de la gouvernance - cela rejoint les questions que l'on se pose sur le suivi local et l'avis du CNPN. Quand on raisonne en termes de compensation, on raisonne à long terme - trente à cinquante ans. Se pose donc la question de la validité des actifs naturels sur une certaine période. Il faudrait également que le décret intègre beaucoup plus les considérations écologiques s'agissant des capacités à remettre des actifs correspondant aux besoins de compensation.
En ce qui concerne l'analyse du CNPN sur les autres projets que sont l'A65, la LGV Tours-Bordeaux et le projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes, nous n'avons pas tous les éléments, mais nous vous faisons part du regard que nous portons.
L'A65 est quasiment réalisée concernant les compensations. La LGV Tours-Bordeaux est en cours de réalisation. Concernant l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, mon collègue Serge Muller vous répondra.
S'agissant de l'A65, on était un peu dans l'euphorie du Grenelle de l'environnement. On essayait d'impulser une nouvelle dynamique sur la séquence ERC, avec des ambitions fortes en termes de mesures compensatoires, de surfaces et de réalisation. Globalement, le CNPN n'est pas impliqué dans le suivi de ce dossier et ne dispose pas de tous les éléments.
En revanche, le CNPN s'est impliqué dans le projet en cours de réalisation de la LGV Tours-Bordeaux : on a rendu pratiquement dix avis sur ce dossier. Lors de l'instruction du dossier, Réseau ferré de France (RFF) a demandé au CNPN de le conseiller dans la présentation du dossier de demande de dérogation, ce qu'il a fait. Au vu des dossiers déposés par la suite, il a donné un avis défavorable. Au titre de la législation relative aux espèces protégées, de la séquence ERC et de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques, il nous semblait que le dossier aurait pu être plus abouti. Nous avons fait des recommandations pour le densifier.
L'autre élément fort, c'est que nous avions demandé dans notre avis de participer au comité de suivi. Ainsi, pour avoir pu assister régulièrement aux réunions du comité de suivi, nous avons listé différents éléments. Toutefois, il s'agit plus d'un constat - l'opération n'étant pas terminée - dont nous pouvons tirer des enseignements, en soulignant quelques points de vigilance.
Cette opération s'est déroulée à un rythme très rapide. Les arrêtés ont été pris en 2012 et la ligne sera fonctionnelle à la mi-2017. Nous nous interrogeons sur la capacité à disposer d'informations suffisantes en temps et en heure et sur la capacité qu'a le génie écologique à suivre le génie civil. Mettre en place des mesures compensatoires dans un territoire ne s'improvise pas ; cela se construit, c'est toute une approche qui est mise en place. Actuellement, on observe un décalage entre la réalisation progressive des mesures compensatoires et l'achèvement prochain des travaux de génie civil. Cela pose une question de fond, sur laquelle le CNPN a alerté l'État : comment les mesures prévues dans les arrêtés ministériels et interpréfectoraux vont-elles être appliquées, sachant que les mesures compensatoires devaient être mises en oeuvre au 31 décembre 2016 ?
Autre point important : comment évaluer une bonne mutualisation des mesures compensatoires entre espèces ?
Nous échangeons régulièrement sur ce sujet avec le pétitionnaire : il a imaginé un plafond théorique, sur lequel le CNPN ne se prononce absolument pas, et l'on connaîtra la surface et toutes les mutualisations lorsque le projet sera réalisé.
Il faut avoir à l'esprit les ordres de grandeur de ce dossier : 223 espèces protégées impactées, une surface de 25 000 hectares de mesures compensatoires, une emprise d'environ 5 400 hectares. On se demande à quelle hauteur les mesures compensatoires seront mises en place. Actuellement, le pétitionnaire évalue les mesures compensatoires à hauteur de 3 500 hectares environ, dans le cadre d'une mutualisation que nous estimons très forte et théorique ; mais, en l'état, nous ne pouvons pas encore l'examiner.
L'autre point important et révélateur, comme cela a déjà été souligné, concerne la capacité de l'État à assurer l'instruction, le suivi et le contrôle de tels dossiers, avec des compétences scientifiques, pour bien évaluer les équivalences écologiques et les mutualisations. Le CNPN a été quelque peu désemparé par la proposition du pétitionnaire de transformer des mesures surfaciques compensatoires en travaux de génie civil pour améliorer la transparence des ouvrages. Ce fut une première. On peut entendre la démarche, mais cela demande de construire un modèle fort et partagé.
Le CNPN rencontre aussi des difficultés sur un autre point : en fonction des dossiers, chaque pétitionnaire a sa méthode pour calculer les équivalences écologiques. Au titre d'une autre association, on avait alerté le ministère sur ce sujet, en demandant qu'une méthode claire et partagée par tous soit retenue.
La sécurisation foncière est également un point important. Cet exemple est également intéressant en la matière. La durée de la concession étant d'un demi-siècle, la durée des mesures compensatoires devrait correspondre au moins à cette durée. Mais on se heurte vite à des questions légitimes et compréhensibles, à savoir la capacité à opérer une maîtrise foncière qui soit durable dans le temps et l'espace. Un système de conventionnement est certes peut-être plus recevable et plus souple, mais on n'a aucune garantie en termes de durée. Se pose là une vraie question sur la sécurisation foncière des mesures compensatoires.
Je laisse la parole à mon collègue pour évoquer le projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes.
Le comité permanent a été saisi du projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes dans le courant de l'année 2012. Les commissions Faune et Flore ont examinés ces dossiers, puis le comité permanent a donné, avec un vote très partagé, en juillet 2012, un avis favorable sous conditions à la demande relative aux espèces protégées animales et végétales pour laquelle la dérogation avait été demandée à cette date. Ce n'est pas une autorisation de faire les travaux, c'est une dérogation par rapport à l'interdiction de destruction des espèces. Nous avions été assez incommodés, si je puis dire, en termes d'équivalences écologiques, par les unités de compensation qui nous ont été présentées.
Une dérogation a ensuite été demandée pour une autre espèce animale qui avait été découverte, le campagnol amphibie, pour lequel la commission Faune a donné un avis défavorable en avril 2014. S'agissant de la flore, une seule espèce figurait dans la liste initiale, mais il se trouve que trois autres espèces végétales protégées ont été découvertes depuis lors, qui n'ont pas encore fait l'objet de demandes de dérogation. Si le projet devait vraiment se poursuivre, il serait nécessaire de déposer une demande de dérogation, sinon cela constituerait un vice administratif.
J'ai également été impliqué dans ce dossier pour ce qui concerne l'impact sur les zones humides dans la mesure où j'appartenais au comité d'experts, composé de onze membres, nommé par le préfet de Loire-Atlantique pour examiner la dérogation relative aux zones humides. Après une dizaine de réunions et des visites sur le terrain pour rencontrer l'ensemble des parties prenantes, nous avons donné à l'unanimité un avis défavorable sur ce point. Un grand nombre de zones humides sont impactées. Or, du fait de l'évolution de ces milieux, où avait persisté une agriculture extensive à cause du projet d'aéroport, les habitats et les espèces protégées présents sont devenus relativement uniques. Il n'est pas possible de restaurer de tels milieux dans le contexte de changement global actuel, qu'il s'agisse du changement climatique, de l'intensification agricole ou du changement d'usage des terres : cela constituerait une perte de la biodiversité. Ces habitats, avec les espèces présentes dans les zones humides, sont devenus irremplaçables à l'identique. Ce point faisait partie des questions posées au niveau du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), qui avait fixé comme condition d'acceptation du projet la création ou la restauration de zones humides équivalentes sur le plan fonctionnel et sur le plan de la qualité de la biodiversité. C'est pourquoi nous avons donné un avis défavorable à l'unanimité. Cet avis défavorable a été appuyé ensuite par une motion du comité permanent du CNPN en avril 2013.
Pour conclure, je voudrais insister sur les limites de l'exercice « éviter-réduire-compenser », qui ne constitue pas une solution miracle pour lutter contre les impacts sur le patrimoine naturel et la biodiversité. Je ne connais pas de projets actuels ne comportant pas un bilan en partie négatif sur un certain nombre d'espèces et sur leurs habitats, ne serait-ce que du fait de l'artificialisation de milieux. Ce n'est pas à partir d'anciennes routes que l'on recrée des milieux naturels. Mais ce n'est pas pour autant qu'il ne faut rien faire. L'objectif est de retenir la moins mauvaise solution après avoir évalué les raisons impératives d'intérêt public majeur, limité les impacts sur la biodiversité et essayé, autant que possible, de les compenser par des actions de restauration de milieux.
Mon collègue Thierry Dutoit que vous avez auditionné, au mois de décembre dernier, en tant que spécialiste des restaurations, vous a bien précisé que la restauration n'était pas satisfaisante dans la majorité des cas. Celle-ci est relativement facile pour la plaine de Crau parce qu'il s'agit d'agro-écosystèmes. On peut assez facilement restaurer ce milieu par le pâturage, même si la restauration n'est pas totale. Mais pour certains types de zones humides, il ne faut pas se leurrer : la restauration à l'identique, avec la même qualité de biodiversité, n'est pas possible.
Vous le voyez, on atteint là les limites de la démarche ERC. La nouvelle loi en tient compte : lorsqu'il n'est pas possible d'obtenir une compensation satisfaisante par rapport à nos critères, le projet ne doit pas être autorisé. L'ensemble des parties prenantes doivent mettre en balance les impacts sur la biodiversité et l'environnement, et l'intérêt public majeur que présente le projet. Les pouvoirs publics ont la responsabilité de prendre une décision en connaissance de cause.
Si nous n'avons pas le temps d'entendre toutes vos réponses, je précise que vous pourrez nous répondre par écrit.
Nous souhaitons savoir comment il est possible de créer un système cohérent sur l'ensemble des enjeux liés à la biodiversité, intégrant la compensation. L'objet de la commission d'enquête est de pointer les difficultés.
J'entends que la question de l'anticipation reste centrale et que la situation n'est pas satisfaisante non plus en aval de l'enquête publique. Pouvez-vous nous en dire plus, car nous sommes là pour faire des propositions ?
Un autre point essentiel concerne les questions d'équivalence. On l'a bien compris, le CGDD travaille, lui aussi, à fixer des cadres plus précis ; on a en tête l'exemple américain. Pensez-vous que le CNPN, y compris dans sa nouvelle configuration, est en capacité, dans un délai raisonnable - c'est le délai qui m'intéresse -, de participer à l'élaboration d'une trame d'équivalence unique ? Est-ce possible ou l'état des connaissances scientifiques est-il encore trop faible en la matière ?
Un autre sujet, lié au dernier point : comment fait-on en termes de planification ? Vous avez utilisé ce terme. Le monde rural exprime beaucoup d'inquiétudes - et elles sont légitimes - à l'égard de ce que l'on appelle « la double peine ». On reste trop près du projet, considérant que l'équivalence est respectée, avec des terres agricoles de très bonne qualité. Or, en termes d'équivalence écologique, tout en suivant la même logique climatique, il serait peut-être plus intéressant d'aller à 80 kilomètres du site impacté. Qu'entend-on par « proximité » ? Il faut vraiment travailler sur cet aspect des choses.
Enfin, ne pensez-vous pas que les trames verte et bleue, les schémas de cohérence et les outils de planification devraient intégrer et flécher de possibles zones de compensation, c'est-à-dire des zones dégradées ? Il y a un vrai débat sur cette question.
Je poserai une question rapide. Vous m'en excuserez, je ne suis pas un fin connaisseur du dossier de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, mais, comme les médias s'en font régulièrement l'écho et que vous venez de préciser certains points, je m'interroge. Vous avez émis un avis défavorable sur ce dossier au regard de la compensation de destruction de zones humides, qui n'était pas possible. Je comprends que cette compensation ne soit pas possible sur place. Mais est-elle possible en un autre lieu du territoire national ? Cette compensation serait-elle alors satisfaisante ?
Par ailleurs, comment comprendre qu'il soit possible qu'un référendum conduise à prendre une décision allant à l'encontre de l'avis du CNPN ? Le référendum passé, il n'est même plus question de parler de compensation ou de quoi que ce soit dans la mesure où la décision a été prise. Quelle est votre réaction par rapport à cette situation ?
Je poserai une question très brève sur l'amaigrissement des moyens humains que vous avez évoqué concernant l'instruction des dossiers. Pourriez-vous être plus précis sur les moyens actuels, en citant éventuellement quelques exemples et quelques chiffres ? Selon vous, que serait-il souhaitable de faire ?
Merci pour vos exposés précis et courts. Vous dites, au fond, que la réussite d'opérations de ce type passe par l'anticipation, une bonne instruction du dossier, un bon suivi et un bon contrôle, et tout cela dans la durée. On ne peut prévoir de telles opérations si on ne les imagine pas à long terme. Vous insistez beaucoup sur la durée.
Le CNPN est une instance nationale ; vous avez donc à vous prononcer sur des projets concernant l'ensemble du territoire, ce qui suppose une certaine unicité, une certaine cohérence ; c'est en tout cas ce que l'on peut espérer. Mais vous vous appuyez sur les DREAL. Or, avec la réorganisation opérée, tous les personnels ont été mélangés, alors qu'ils étaient très spécialisés : certains oeuvraient au sein des directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF), d'autres au sein des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE). Cela influence-t-il la manière dont le travail est fait localement ? Car, au final, ce sont des responsables locaux qui examinent le dossier. Comment s'articule la coopération entre les DREAL et vous ? Cette réorganisation a-t-elle entraîné des problèmes ?
Monsieur Urbano, j'aimerais que vous me reprécisiez un point, qui m'a quelque peu effrayé. Vous dites que les projets vont trop vite et que vous n'avez pas le temps de les examiner. C'est très grave, j'ai déjà connu des fonctionnaires qui ont été dans cette situation. À titre d'exemple, un directeur de centre d'orientation et de formation m'avait dit un jour qu'il était temps que l'outil industriel s'adapte à l'outil de formation, ce qui était quelque peu ahurissant. Je me méfie donc structurellement des administratifs.
Je suis de Loire-Atlantique, je suis même propriétaire de terres sur la commune de Notre-Dame-des-Landes. Je vous pose une question : quelle est la surface de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes ? La surface modifiée, transformée ? Vous avez des notes sur ce point. La surface est de 120 hectares. J'ai été l'acheteur, j'ai été président du conseil général, je sais exactement ce qui a été acheté et pourquoi. Pourquoi cet aéroport est-il si grand ? On a acheté les deux premières zones de bruit pour éviter toute difficulté au niveau de la propriété. Il y a quelque 1 500 hectares sur lesquels vous pouvez faire ce que vous voulez - vous pouvez protéger la nature comme vous le souhaitez - et 200 hectares qui sont artificialisés. J'espère que les auditions permettront d'apporter des réponses à ces questions, qui ont été savamment raréfiées par le rapporteur.
L'aéroport a été autorisé en 2008. Cette autorisation n'aurait aucune valeur parce qu'elle n'est pas passée par vous en dix ans ? Qu'est-ce que cela signifie exactement ? Je le répète, en 2008, l'aéroport a été autorisé, l'exploitant a été formé. On artificialise 120 hectares et c'est devenu une affaire d'État ! La question du référendum est excellente, mais ce n'est pas la seule. Ramenons les choses à leur juste mesure.
Vous avez évoqué la notion de comité de suivi. Sur quelle durée ? Sur quelles zones ? Est-ce exclusivement sur les zones de compensation ? À l'image de ce qui vient d'être dit sur l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, il y a des zones délaissées pour tous les travaux. Le comité de suivi s'intéresserait-il uniquement à la zone de compensation ou aussi aux zones délaissées, qui peuvent malgré tout faire l'objet d'une préservation ?
Je répondrai d'abord à la dernière question du rapporteur. Il est totalement acquis que nous intégrons les trames verte et bleue (TVB) et le schéma régional de cohérence écologique (SRCE). En tant que praticiens, nous exigeons ce schéma pour tous les espaces. C'est une obligation pour nous : si un pétitionnaire fait un inventaire et ne nous signale pas le SRCE local, on lui demande des précisions. C'est une sorte de garantie. Par ailleurs, nous essayons de faire coller la notion de TVB à la proximité, c'est-à-dire à l'échelle communale. Généralement, lorsque le CNPN est saisi d'un projet assez structurant, avec des incidences environnementales fortes, nous sommes soucieux que la commune soit engagée. Au titre des mesures compensatoires, nous nous adressons aussi à l'État lorsque nous demandons une garantie au moyen d'un arrêté de protection de biotope et la gestion des classements.
Pour prendre un exemple dont on parle beaucoup actuellement, le projet, très contesté, de centre commercial Val Tolosa à Toulouse, l'avis que nous avons remis et l'expertise que nous avons réalisée concernent la commune, car elle est très impliquée dans le projet.
Pour reprendre la question clé des zones humides pour la biodiversité en France, car la perte de zones humides est un facteur important de la baisse de la biodiversité, une compensation à 80 ou 100 kilomètres, et non pas à proximité immédiate, dans des conditions hydrologiques similaires, vous semble-t-elle imaginable, si le gain en termes de biodiversité est positif ?
Cette question se pose dans le cadre du groupe de travail du CGDD sur les actifs naturels : pour « vendre » des actifs naturels, quelle est la zone d'influence ?
Lors d'une expérimentation réalisée dans le vallon de Combe Madame dans les Alpes afin de recréer de l'habitat pour les petits coqs de bruyère, on avait défini une zone de 25 kilomètres. Mais le pétitionnaire a argué du fait qu'il n'avait pas de projets à cette distance qu'il pouvait compenser. Cela pose une véritable question.
D'un point de vue écologique et sociétal, il est préférable que la compensation ait lieu à proximité : les habitants vont mieux comprendre, il y a du lien, des espèces, etc. Je le dis avec toutes les réserves qui s'imposent en termes d'expertise : une marge d'interprétation est possible suivant les espèces et les milieux. Mais, sur le principe, il paraît très difficile - et nous avons eu ce débat sur l'expérimentation dans la Crau - de compenser à l'autre bout de la France. À mon sens, la compensation doit pouvoir être entendue par les citoyens : ils doivent comprendre la démarche écologique et sociétale de proximité.
Si vous le permettez, j'aimerais revenir sur la planification, qui nous semble constituer un enjeu très fort ; en attestent les questions qui se posent actuellement sur les dossiers en cours d'examen. La planification comporte deux volets. Tout d'abord, il faudrait peut-être un débat sur le débat public. On avait eu une discussion sur le projet de TGV Paris-Orléans-Lyon : les ingénieurs de RFF avaient reconnu qu'il serait utile de dire, en fonction des connaissances dont on dispose, que le projet aura des impacts, avec une marge de latitude à l'échelle espace-temps, et d'annoncer les principes de compensation, en vue d'avoir un débat public plus solide.
Par ailleurs, le CGDD a réfléchi à la possibilité de mener une étude d'impact beaucoup plus intégratrice, alliant la connaissance du projet et les différents dispositifs, c'est-à-dire la loi sur l'eau et les milieux aquatiques, la réglementation relative aux espèces protégées, le code forestier, pour englober le tout, quitte à revoir le calendrier de l'enquête publique et de la demande de dérogation par rapport aux arrêtés de déclaration d'utilité publique (DUP).
Il y a peut-être des marges de progrès de ce côté-là pour faire mieux comprendre et réagir sur un projet.
Au vu du temps qui nous reste, pourriez-vous répondre à la question relative à l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, qui intéresse tout le monde ?
J'ai les chiffres : 176 hectares sont imperméabilisés, 726 hectares sont aménagés, pour une DUP demandée sur 1 650 hectares. Voilà les chiffres officiels. Vous l'imaginez bien, il y a des impacts indirects. Lorsqu'on imperméabilise des secteurs de zone humide, des zones de sources, en sommet de plateau, les impacts indirects sont plus étendus.
On m'a demandé s'il était possible d'avoir une compensation. Le système de cette zone est devenu relativement unique dans l'ouest de la France, avec une zone « préservée » par ce projet d'aéroport. Partout ailleurs dans cette partie de la France, il y a eu une intensification au niveau des zones agricoles humides de plateaux oligotrophes. Eu égard à la demande de dérogation, je vous ai donné les délais dans lesquels nous avons donné nos avis : juillet 2012 pour le comité permanent du CNPN, avril 2013 pour la dérogation relative aux zones humides. Si d'autres espèces protégées sont découvertes, la réglementation veut - ce n'est pas moi qui fait la loi, c'est vous ! - qu'une autre demande de dérogation soit déposée. Dès que nous serons saisis, en un temps record de quelques semaines, nous donnerons un avis sur ce point. Mais tant que nous ne sommes pas saisis, nous ne pouvons rien faire.
Une question nous a été posée sur la durée du comité de suivi. En fait, c'est le comité qui décide de sa durée et de son objet. Nous appartenons les uns et les autres à plusieurs comités en tant que membres du CNPN ou lorsque ce dernier y est associé, et c'est très convivial. Ce n'est absolument plus un état d'esprit. Nous voulons tout simplement avoir une présentation du suivi : il s'agit généralement d'un suivi annuel, et c'est tout à fait satisfaisant.
Pour tel aménagement faisant l'objet d'un délai de prescription de trente ans, le cinquième ou sixième comité peut décider de ne se réunir ensuite que deux ou trois ans plus tard. C'est lui qui décide de la périodicité la mise en place d'un comité de suivi incite, de fait, le pétitionnaire à être beaucoup plus soucieux de l'avenir des prescriptions qu'il a lui-même acceptées.
Pour compléter le propos de mon collègue, le comité de suivi comprend aussi des membres du CNPN : ils veillent aux côtés de l'administration à la prise en compte de leurs recommandations. Les premières années sont extrêmement importantes pour la mise en oeuvre des mesures compensatoires.
Pour répondre à la question des moyens dans les territoires, le constat a été dressé : les moyens doivent être renforcés eu égard au nombre de dossiers, avec des personnels compétents ; c'est une évidence pour nous. On aimerait que les dossiers soient parfaitement instruits selon les différentes thématiques et que ce ne soit pas le CNPN qui ait à se prononcer sur la recevabilité du dossier.
Nous n'intervenons pas sur ce point. Je n'ai pas d'avis en la matière. Nous ne faisons que donner des dérogations par rapport aux espèces protégées ou à l'impact sur les zones humides. Je l'ai dit dans la conclusion de mon propos, il ne nous incombe pas de prendre des décisions : ce sont les pouvoirs publics qui le font après avoir suivi la réglementation prévue par le code de l'environnement. C'est un avis simple.
Quand l'administration centrale reçoit un dossier, les commissions Faune et Flore et le comité permanent ont l'obligation de répondre dans les dix semaines. Le délai de consultation et d'analyse du dossier est en général de cinq semaines et nous rendons notre avis au bout de cinq à dix semaines. Si le dossier est déposé au ministère le 2 janvier, la commission, le CNPN ou son expert donneront leur avis avant le 2 mars. Cela ne traîne pas en longueur. Sur les dossiers dits DAU, nous avons l'obligation de donner un avis dans les deux mois ; au terme de ce délai, l'avis est réputé favorable.
Il faut savoir que ces dossiers font des centaines de pages et que nous travaillons bénévolement.
Je vous remercie.
La réunion est close à 15h05.
- Présidence de Mme Sophie Primas, vice-présidente -