Mes chers collègues, je suis ravie de vous retrouver après cette pause estivale bienvenue, et avant une période automnale traditionnellement chargée pour notre commission.
Nous examinons ce matin le rapport de notre collègue Jean-Marie Vanlerenberghe sur deux textes très techniques, mais néanmoins importants pour l'organisation de nos travaux.
Effectivement, ces textes sont d'apparence technique, mais ils ont une grande importance sur notre rôle dans le vote du budget de la sécurité sociale. Aussi, je vous demanderai d'y être très attentifs.
Il s'agit de deux textes de notre collègue député Thomas Mesnier, l'un organique et l'autre « ordinaire », ayant pour objet de réformer les lois de financement de la sécurité sociale (LFSS).
Vous le savez, nous avons nous-mêmes conduit une réflexion sur le cadre organique des LFSS lors de travaux lancés sur l'initiative de Jean-Noël Cardoux, alors président de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss), et dont je vous avais présenté les conclusions en juillet 2020. J'ai d'ailleurs, sur cette base, déposé une proposition de loi organique (PPLO) en mars dernier, qui a été cosignée par Catherine Deroche, présidente de notre commission, Alain Milon, René-Paul Savary, président de la Mecss, et l'ensemble des rapporteurs de branche du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
Je tiens donc tout d'abord à me féliciter de ce que l'initiative parallèle de Thomas Mesnier, rapporteur général de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, nous offre l'occasion de faire évoluer en droit le cadre organique des LFSS à l'occasion de la navette. En effet, même si le calendrier n'est pas bouclé, l'idée est bien de faire aboutir ce texte avant la fin de l'actuelle législature. Il s'agit donc d'une occasion à saisir, car ce genre d'opportunité ne se rencontre que rarement : ainsi, depuis la création des LFSS en 1996, une seule réforme d'envergure a été menée, en 2005 - voilà donc déjà 16 ans.
Venons-en au fond en examinant le contenu des propositions de loi transmises par l'Assemblée nationale.
S'agissant de la proposition de loi organique, qui contient de loin les dispositions les plus substantielles, son article 1er procède à une réécriture complète de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, qui définit les périmètres (obligatoire, exclusif et facultatif) des LFSS. Ce faisant, il reprend bien sûr une grande partie du droit existant, que vous connaissez et dont je vous ferai grâce pour me concentrer sur les principales innovations du texte, étant entendu que vous pourrez vous reporter au rapport écrit afin d'avoir l'ensemble des détails.
En premier lieu, il est proposé de créer une nouvelle catégorie de LFSS : les lois d'approbation des comptes de la sécurité sociale (LACSS), qui seraient discutées au printemps, temps fort de l'évaluation parlementaire, sur le modèle des lois de règlement du budget de l'État. Les LACSS remplaceraient ainsi l'actuelle première partie de la LFSS de l'année, dont il faut reconnaître qu'elle est souvent traitée à la va-vite, personne n'ayant envie, en octobre et en novembre, de regarder dans le rétroviseur, alors que tout le monde a l'esprit tourné vers les mesures que propose le Gouvernement pour l'année à venir. La proposition de loi sénatoriale, déposée avant celle de l'Assemblée nationale, contenait d'ailleurs déjà la même mesure.
En deuxième lieu, un article liminaire figurerait désormais en tête des PLFSS de l'année. Selon la formulation retenue par les députés, cet article présenterait, pour le dernier exercice clos, pour l'exercice en cours et pour l'année à venir, l'état des prévisions de dépenses, de recettes et de solde des « administrations de sécurité sociale » (ASSO). Je vous rappelle que ce dernier terme est bien plus large que le périmètre des LFSS et englobe l'assurance chômage, les régimes complémentaires de retraite, la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades), le Fonds de réserve pour les retraites (FRR), les hôpitaux, etc. Il s'agit d'un sous-secteur des administrations publiques au sens de la comptabilité européenne, et c'est sur ce périmètre que sont fixés les prévisions et objectifs des lois de programmation des finances publiques.
En troisième lieu, la PPLO propose une extension du périmètre exclusif de la sécurité sociale, c'est-à-dire des mesures qui ne peuvent figurer que dans une LFSS à l'exclusion de toute autre loi. Ce monopole des LFSS concernerait également la répartition entre les régimes, branches et organismes de sécurité sociale des recettes transférées de l'État à la sécurité sociale, lesquelles seraient désormais envoyées à l'Urssaf Caisse nationale - l'ancienne Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) -, qui se chargerait ensuite de la répartition entre branches. Le but, que nombre d'entre nous ne peuvent qu'approuver, serait de simplifier l'article de « tuyauterie » financière qui se trouve en fin de première partie des PLFSS.
Par ailleurs, une nouvelle disposition à la rédaction complexe vise à ce que toute loi hors LFSS ne puisse contenir des dispositions relatives à des exonérations, réductions ou abattements de cotisations ou de contributions sociales non compensés à la sécurité sociale qu'en prévoyant une durée d'application inférieure à trois ans, à compter du moment de leur entrée en vigueur. La pérennisation de ces exonérations, à savoir la suppression de la « borne » ou limitation dans le temps de son application, ne pourrait être inscrite qu'au sein des LFSS. Si je comprends l'intention, la bonne articulation de ce dispositif avec le monopole existant des LFSS sur toute mesure de réduction de recettes non compensée ne va pas de soi. Je vous proposerai peut-être des aménagements de ce dispositif d'ici à la séance publique.
Enfin, le texte propose également de modifier le périmètre facultatif des LFSS, c'est-à-dire les mesures pouvant figurer dans une LFSS sans constituer des « cavaliers sociaux », mais également susceptibles de figurer dans un autre type de loi.
Le domaine des LFSS serait ainsi étendu aux mesures relatives à la dette des hôpitaux. On peut se demander s'il ne s'agit pas d'une régularisation a posteriori d'un article relatif aux modalités des transferts de dette hospitalière à la Cades, dont nous avons débattu l'année dernière en PLFSS...
Pourraient également figurer dans les LFSS les mesures ayant un impact financier sur la sécurité sociale pour l'année N+1 et les années suivantes, sans pour autant être pérennes.
Dernière chose en matière de présentation des LFSS, les tableaux d'équilibre soumis à notre vote ne concerneraient plus que les régimes obligatoires de base de sécurité sociale (ROBSS), sans vote spécifique sur le seul régime général.
L'article 2 de la PPLO de l'Assemblée nationale réécrit, de la même manière, l'article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale, relatif aux annexes des PLFSS. Là encore, je centrerai mon propos sur les principales nouveautés que contient le texte des députés.
Une première série de modifications consiste en une rationalisation des annexes existantes, certaines étant rassemblées et des éléments peu nécessaires ou obsolètes étant supprimés.
Cette réorganisation s'accompagne d'une différenciation plus importante des annexes selon le type de PLFSS. Ainsi, un nombre restreint d'annexes est prévu pour les projets de loi de financement rectificative, avec pour intention d'alléger les freins au dépôt de tels projets.
Un deuxième mouvement conduit à la réécriture de cet article L.O. 111-4 pour un accroissement de l'information du Parlement en matière de sécurité sociale. Je remarque à ce titre que, sans faire entrer le régime d'assurance chômage dans le champ des LFSS, nos collègues députés demandent que soit jointe au PLFSS une annexe sur ses comptes. Deux autres annexes, relatives, d'une part, aux régimes de retraite complémentaire et, d'autre part, à la situation financière des établissements de santé, que nous appelions de nos voeux, sont en outre prévues. Une plus grande information concernant la construction de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) comme une évaluation plus suivie des niches sociales est également inscrite.
Par ailleurs, le dernier volet des modifications apportées est celui qui est présenté comme le plus déterminant, avec un remaniement du rapport annexé au PLFSS, qui constitue aujourd'hui « l'annexe B ». Le rapporteur général de l'Assemblée nationale propose ainsi ce qu'il désigne comme un « compteur des écarts » : devront figurer dans le rapport annexé un recensement des écarts entre le PLFSS et les objectifs de dépenses votés en loi de programmation. Cette logique, qui me paraît aller dans le sens d'un approfondissement de la vision pluriannuelle des finances sociales et d'un souci plus fort de respect des lois de programmation, me paraît tout à fait bienvenue, mais inaboutie. Nous aurons l'occasion d'y revenir dans la série d'amendements que je vous soumettrai.
Enfin, l'article 3 avance le calendrier de dépôt des PLFSS. Ceux-ci devraient désormais être transmis à l'Assemblée nationale au plus tard le premier mardi d'octobre. Cela devrait améliorer les conditions d'examen du texte à l'Assemblée nationale, la commission des affaires sociales ne disposant actuellement, en général, que d'une semaine avant d'examiner le texte en commission. Le projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale devrait, quant à lui, être déposé avant le 1er juin de l'année suivant celle de l'exercice auquel il se rapporte. Il s'agit là d'une proposition de la Cour des comptes.
Il est à noter que l'Assemblée nationale a introduit, comme dans le projet de réforme de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), une disposition prévoyant que « la Conférence des présidents de chaque assemblée peut décider qu'une semaine prévue au quatrième alinéa de l'article 48 de la Constitution est consacrée prioritairement au contrôle de l'exécution des lois de financement de la sécurité sociale ». Il s'agit d'élever au rang organique le « printemps de l'évaluation » qu'organise l'Assemblée nationale. Cette mesure n'a évidemment pas d'utilité propre, puisque, d'une part, l'Assemblée nationale organise déjà ainsi son temps sans disposition organique, et que, d'autre part, notre commission s'intéresse à l'application de la LFSS depuis 2015 dans un autre cadre. Je vous indique simplement ne pas vous proposer de la supprimer à ce stade ; nous verrons si une initiative de ce genre voit le jour d'ici à la séance publique.
Je serai plus bref pour ce qui concerne la proposition de loi ordinaire soumise à notre examen, qui ne comporte qu'une modification des conditions de saisine des caisses de sécurité sociale du PLFSS. Alors que les caisses doivent actuellement, en une semaine, se prononcer sur l'avant-projet de loi avant son examen en Conseil des ministres, elles disposeraient, dans le nouveau système, de deux semaines pour transmettre un avis au Parlement, et non plus au Gouvernement, sur le projet de loi lui-même.
L'ensemble des dispositions proposées, en loi organique comme en loi ordinaire, entrerait en vigueur en juin 2022, à l'exception des dispositions destinées à assurer une transition entre les deux systèmes, en particulier en conservant une première partie de la LFSS pour 2023 en l'absence de LACSS. Le temps d'adaptation des administrations sera donc assez réduit.
Voilà donc, mes chers collègues, les principales dispositions sur lesquelles nous sommes invités à nous prononcer. L'examen des amendements me permettra de développer mes analyses et les ajouts qui me semblent nécessaires. Je vous dirai simplement, à ce stade, que les évolutions proposées vont plutôt dans le bon sens, tout en étant moins complètes et parfois plus timides que celles qui figurent dans la proposition de loi organique du Sénat. Vous ne serez donc pas surpris que des amendements proposent d'enrichir le texte de Thomas Mesnier de la quasi-totalité des mesures de la PPLO sénatoriale. Cela concernera en particulier l'assurance chômage, la procédure de révision à la hausse de certains des sous-objectifs de l'Ondam, qui ne correspondent pas au versement de prestations, ou encore la règle d'or destinée à assurer l'équilibre des comptes de la sécurité sociale à moyen terme.
Je remercie le rapporteur d'avoir contribué à éclaircir ces textes. Comme il l'a dit, les révisions de l'organisation de la discussion de la loi de financement de la sécurité sociale ont été rares. Pourtant, nous n'avons de cesse de nous plaindre que les choses n'évoluent pas assez.
Vous avez raison, Monsieur le rapporteur, ces textes sont importants en ce qu'ils portent sur les relations du Parlement avec le Gouvernement et les partenaires sociaux. Les propositions de M. Mesnier me semblent constituer un pas important, mais nous souhaitons néanmoins y apporter des éléments pour montrer que le Parlement a son mot à dire dans la gestion de la protection sociale, qui représente plus de 500 milliards d'euros de dépenses publiques. Je vous invite à regarder attentivement les amendements proposés par le rapporteur et par nos collègues, tout en espérant qu'un compromis pourra se dessiner avec l'Assemblée nationale.
Je remercie à mon tour le rapporteur d'avoir tenté d'éclairer notre lanterne, mais je regrette que rien ne soit prévu pour renforcer notre droit d'amendement et le périmètre de recevabilité de nos amendements. Je vous rappelle que, lors du dernier PLFSS, 30 % des amendements du groupe CRCE ont été déclarés irrecevables. Dans ces conditions, il nous est impossible de faire bouger les lignes.
De surcroît, rien n'est prévu pour la transparence de nos débats. Par exemple, il nous est impossible de connaître le poids des aides publiques dans le coût des médicaments. Enfin, il est à noter que l'architecture de notre système de cotisations sociales est de plus en plus illisible.
Effectivement, ces textes sont très techniques, mais l'exposé des motifs est d'un bon secours pour leur compréhension.
Vous l'avez précisé, Monsieur le rapporteur, les exigences comptables européennes nous imposent de présenter une vision consolidée de toutes les dépenses publiques. À cet égard, le Parlement a tout son rôle à jouer.
Cependant, je dois vous avertir que les partenaires sociaux sont inquiets, car ils craignent que le principe de gestion contracyclique ne soit remis en cause, ce qui rendrait leur mission plus complexe. Pouvez-vous les rassurer sur ce point ?
Par ailleurs, il faut alléger les débats et rationaliser nos interventions, car nous avons tendance à nous éloigner des citoyens. Prévoyez-vous des dispositions en ce sens ?
Enfin, j'avais déposé un amendement au projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel visant à imposer la transmission au Parlement, avant les partenaires sociaux, du document de cadrage relatif à l'assurance chômage, prévu à l'article L. 5422-20-1 du code du travail. Pourrait-on l'envisager dans ces textes ?
Je cherche toujours la signification politique d'un texte derrière son aspect technique. Ainsi, je n'ai pas manqué de remarquer que d'autres textes relatifs à la discussion du projet de loi de finances sont aussi en examen à la commission des finances...
L'objectif est d'améliorer la transparence et la lisibilité des textes financiers. On ne peut que le partager. Il est notamment prévu une évaluation de l'exécution des LFSS au printemps suivant l'année à laquelle elles se rapportent. L'idée est intéressante. L'Assemblée nationale le fait déjà. Cependant, le haut conseil du financement de la protection sociale a émis des réserves sur cette mesure, craignant qu'un tel débat ne soit trop technique. Qu'en pensez-vous ?
Par ailleurs, ces textes tendent à renforcer le domaine réservé des LFSS, avec l'instauration d'une forme de monopole dans la durée sur l'instauration d'exonérations sociales. Pour notre part, nous y voyons un risque de limitation des prérogatives parlementaires sur d'autres textes. Imaginez par exemple un texte sur les déserts médicaux qui ne pourrait s'appuyer sur la mise en place de telles exonérations. Quel est l'intérêt d'ajouter de nouvelles contraintes au droit à légiférer des parlementaires ?
Enfin, la pluriannualité est une idée intéressante, mais la question est toujours posée sous l'angle de la dépense. C'est le seul point d'analyse de nos travaux. Tous ces textes ont la même philosophie : contracter la dépense, sans jamais parler des recettes. En fait, sous couvert de technicité, ces textes sont éminemment politiques, puisqu'ils poursuivent l'étatisation des finances sociales.
Et pourtant ! Regardez l'Unédic, l'Agirc-Arrco ! Le mouvement arrive à son terme. Seulement, on ne peut pas en même temps vouloir des syndicats responsables et leur retirer leurs outils de gestion. Le Parlement a, certes, son mot à dire, mais nous ne pouvons pas nous résoudre à affaiblir sans cesse le paritarisme. Cela a déjà été fait pour l'assurance maladie dont la gestion paritaire n'est plus que de façade, alors essayons de préserver ce qui subsiste et qui marche bien.
Monsieur le rapporteur, qui ici, à part vous du fait de vos anciennes fonctions de rapporteur général, est capable de dire quelle a été l'affectation précise de la contribution sociale généralisée (CSG) ces dernières années ? Bercy organise une instabilité permanente des finances sociales, au détriment tant du Parlement que des partenaires sociaux.
Madame Apourceau-Poly, je connais vos positions en matière de droit d'amendement, mais il s'agit ici d'un autre type de texte, une proposition de loi organique et non une révision constitutionnelle.
Madame Puissat, vous avez raison, les partenaires sociaux sont inquiets, mais à tort, car la gestion contracyclique n'est aucunement remise en cause. C'est un phénomène naturel : l'assurance chômage a un excédent de recettes en période de croissance et moins de dépenses. On ne touche pas à ce principe.
Monsieur Jomier, nous ne souhaitons pas remettre en cause le paritarisme, même si le Parlement voit son droit de regard renforcé, et c'est bien normal : songez que, sur les 40 milliards d'euros de recettes de l'assurance chômage, 14 proviennent de la CSG. Dans ces conditions, on sort un peu du système assurantiel strict et il me paraît légitime que le Parlement contrôle l'utilisation de cet argent public. Par ailleurs, je fais le pari que, même après la réforme des retraites quand elle interviendra, des régimes complémentaires continueront à exister.
Avant le dépôt de notre proposition de loi organique, en mars dernier, nous avions demandé aux partenaires sociaux de nous faire des propositions sur l'assurance chômage : seul le Medef a répondu ! Le problème est ancien, et il convient de placer chacun devant ses responsabilités, car les partenaires sociaux pourraient aussi prendre des initiatives.
Je confirme que nous avions rencontré les partenaires sociaux au printemps dernier, avant le dépôt du texte. Après, il nous revient de prendre nos responsabilités en tant que législateurs.
EXAMEN DES ARTICLES DE LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE
Article 1er
L'amendement COM-5 tend à apporter des précisions sur l'article liminaire des lois de financement de la sécurité sociale. Il prévoit notamment que les données relatives aux ASSO seront ventilées par sous-secteurs.
L'amendement COM-5 est adopté.
L'amendement COM-6 porte sur l'assurance chômage. Je comprends les craintes des partenaires sociaux sur la gestion paritaire, mais, aujourd'hui, sans le concours de l'État via la CSG, le paritarisme n'est pas viable. Je le répète, il est légitime que le Parlement contrôle l'utilisation de l'argent public. Il s'agit ainsi de tirer les conséquences de la réforme de l'assurance chômage de 2018, qui donne le pouvoir réel au Gouvernement. Je suis néanmoins ouvert à la discussion et à d'autres propositions.
La proposition de l'Assemblée nationale est limitée, puisqu'elle n'introduit l'assurance chômage que dans les annexes, ce qui limite notre pouvoir de discussion. Avec cet amendement, je vous propose d'élargir notre contrôle à l'ensemble du régime, l'idéal étant que nous puissions discuter des éléments de cadrage.
Cet amendement appelle le débat, mais j'ai bien conscience qu'il risque de ne pas rencontrer l'accord des députés lors de la CMP...
L'amendement COM-6 est adopté.
Dans notre proposition de loi organique, nous avions envisagé un dispositif de crédit limitatif pour ce qui ne relevait pas des prestations obligatoires. Sans entrer dans une querelle sémantique, l'amendement COM-7 est relatif aux dépassements de crédits votés en loi de financement de la sécurité sociale. Nous voulons pouvoir débattre et nous prononcer, selon une procédure proche de celle des décrets d'avance pour le budget de l'État, lorsque les dotations prévues sont dépassées, sauf, bien entendu, en cas d'urgence. Il s'agit de renforcer le contrôle du Parlement sur certaines dépenses de l'assurance maladie.
Cet amendement, que je trouve intéressant, nous renvoie à des situations que nous avons observées. En 2020, les dotations de l'assurance maladie à Santé publique France ont été relevées de 150 millions d'euros, à 4,8 milliards d'euros, par simple arrêté ministériel, sans information ni consultation des commissions des affaires sociales. Pourtant, cela aurait nécessité un collectif budgétaire. De même, les parlementaires ont été privés d'un débat sur les augmentations consécutives au Ségur de la santé. Et je pourrais également mentionner les dépassements liés aux tests et aux vaccins cette année. L'objectif n'est évidemment pas d'empêcher le Gouvernement d'agir quand il y a urgence. Il faut simplement que le Parlement puisse être informé et débattre. Je soutiendrai donc cet amendement.
L'amendement COM-7 est adopté.
L'amendement COM-8 vise à interdire les contractions entre les recettes et les dépenses. Nous en avons récemment eu un exemple flagrant : l'imputation d'un produit nouveau, la taxe exceptionnelle sur les organismes complémentaires, qui était comptabilisée comme une moindre dépense sur l'Ondam. Nous souhaitons empêcher de tels tours de passe-passe.
L'amendement COM-8 est adopté.
Lors de l'examen des textes organique et législatif relatifs à la dette sociale et à l'autonomie, la commission des affaires sociales avait supprimé le transfert à la Cades de la reprise de dette hospitalière annoncée par le Gouvernement. Une telle approche a été confirmée lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, qui comprenait une redéfinition des modalités de répartition et de versement des dotations, sans aucun effet sur le solde de l'assurance maladie. Cette disposition avait été supprimée par le Sénat.
L'amendement COM-3, déposé par Mme Imbert, vise à supprimer l'ajout dans le texte de dispositions ne relevant pas de la mission confiée par la Constitution au projet de loi de financement de la sécurité sociale.
L'amendement COM-3 est adopté, de même que l'amendement de coordination COM-9.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 2
Le texte adopté par l'Assemblée nationale prévoit seulement un constat des écarts à la trajectoire de la loi de programmation en termes de dépenses. Il paraît nécessaire d'analyser aussi les écarts en matière de recettes alors que de nombreuses politiques prennent la forme d'exonérations ou d'actions sur les contributions sociales. L'enjeu réel est bien l'équilibre des comptes sociaux, donc des soldes cumulés, qui conjuguent dépenses et recettes.
C'est pourquoi l'amendement COM-10 vise à compléter le « compteur des écarts ».
L'amendement COM-10 est adopté.
L'amendement COM-11 tend à créer une « règle d'or » destinée à garantir un équilibre financier à moyen terme des comptes de la sécurité sociale. Ce dispositif imposerait que la somme des soldes consolidés des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) des années n à n+4 soit toujours positive ou nulle. Nous voulons qu'il y ait un équilibre parfait sur une période de cinq ans. Il s'agit de contrebalancer le compteur des écarts.
L'amendement COM-11 est adopté.
L'amendement COM-12 vise à compléter les annexes au projet de loi de financement en introduisant des documents visant à engager dès l'année n-1 la démarche de performance que les rapports d'évaluation des politiques de sécurité sociale (REPSS) entendent évaluer en année n+1 avec la loi d'approbation des comptes. Cela permet de mieux mesurer l'évolution pluriannuelle des comptes.
L'amendement COM-12 est adopté.
L'amendement COM-4, déposé par Mme Imbert, vise à compléter l'information du Parlement, notamment sur les établissements du service public hospitalier, sur les dépenses d'investissement, mais aussi sur la dette et les actions conduites en la matière. Sur ce point, un suivi particulier apparaît nécessaire, alors que l'équilibre financier des établissements est un problème récurrent et que la loi relative à la dette sociale et à l'autonomie prévoyait une « reprise de dette » en vue de rétablir un meilleur équilibre des comptes.
L'amendement COM-4 est adopté, de même que l'amendement rédactionnel COM-13.
Alors que le Parlement dispose de délais contraints d'examen des PLFSS, il est nécessaire de garantir ses capacités d'analyse des enjeux financiers qu'il doit approuver. L'amendement COM-14 vise donc à prévoir la bonne exploitabilité des données contenues dans les annexes des projets de loi de financement. Nous rencontrons parfois des difficultés pour obtenir les renseignements dans des formats nous permettant de les exploiter.
L'amendement COM-14 est adopté, de même que l'amendement de coordination COM-15.
L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 3
L'article 3 est adopté sans modification.
Articles additionnels après l'article 3
L'information effective et la capacité réelle du Parlement à évaluer les politiques menées concernant le pilotage de la sécurité sociale reposent aujourd'hui, pour une part non négligeable, sur la disponibilité de données exploitables qui, hélas, ne sont pas toujours mises à disposition.
Par conséquent, l'amendement COM-1, présenté par M. Savary, vise à apporter deux précisions. D'une part, l'évaluation de l'impact financier de l'évolution d'une ou plusieurs dispositions législatives encadrant des prestations légalement servies figurerait parmi les « renseignements d'ordre administratif et financier » qui peuvent être demandés aux différents acteurs interrogés. D'autre part, la présentation des documents et informations sollicitées par les commissions des affaires sociales sous un format leur permettant de les traiter serait imposée.
Le sous-amendement COM-20 vise à mentionner de manière expresse le rapporteur général de la commission des affaires sociales parmi les autorités habilitées à solliciter de telles informations.
Le sous-amendement COM-20 est adopté. L'amendement COM-1, ainsi sous-amendé, est adopté et devient article additionnel.
L'amendement COM-17 tend à renforcer la procédure permettant d'augmenter le plafond de découvert des organismes de sécurité sociale autorisés à recourir à un tel mode de financement.
En 2020, face à la crise sanitaire, par deux décrets successifs, le Gouvernement a plus que doublé le plafond de découvert de l'Acoss, le faisant passer de 39 milliards d'euros à 95 milliards d'euros sans la moindre autorisation parlementaire.
Un mécanisme proche de celui qu'a mis en place la LOLF pour les décrets d'avance pourrait renforcer le contrôle du Parlement sur de telles augmentations. Ainsi, en cas d'urgence, le Gouvernement devrait saisir les commissions des affaires sociales des deux assemblées, qui disposeraient d'une semaine pour adresser leur avis au Premier ministre. Cela n'entraverait pas la bonne marche de l'action publique.
L'amendement COM-17 est adopté et devient article additionnel.
L'exercice 2020 a été caractérisé par les conséquences majeures de la pandémie sur les finances sociales, tant sur les recettes, par le choc de cotisations dû à l'activité partielle, que sur les dépenses, notamment avec des besoins importants en matière d'équipements d'urgence ou de fonctionnement des hôpitaux.
Pourtant, alors que quatre projets de loi de finances rectificative ont été déposés sur l'année, le Parlement n'a été saisi d'aucun projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS), hormis la deuxième partie du PLFSS pour 2021, ce qui était obligatoire. Face aux demandes répétées de la commission des affaires sociales du Sénat que soit présenté un PLFRSS, le Gouvernement a régulièrement répondu qu'il n'était pas tenu de le faire.
L'amendement COM-2, déposé par Mme Doineau, vise à renforcer les obligations du Gouvernement en la matière dans la loi organique.
L'amendement COM-2 est adopté et devient article additionnel.
L'amendement COM-16 vise à faire en sorte que la transmission du rapport annuel de la Cour des comptes sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale soit conjointe au dépôt du projet de loi d'approbation des comptes. Cela permettrait d'améliorer l'information du Parlement en temps utile.
L'amendement COM-16 est adopté et devient article additionnel.
L'amendement COM-18 vise à prévoir que les conclusions des enquêtes de la Cour des comptes demandées par la commission des affaires sociales lui soient obligatoirement communiquées dans un délai de huit mois, comme c'est le cas pour la commission des finances.
L'amendement COM-18 est adopté et devient article additionnel.
Article 4
L'amendement COM-19 tend à préciser que la « règle d'or » introduite à l'article 2 s'appliquera seulement à compter du PLFSS pour 2025. La première période de cinq ans sur laquelle l'équilibre des comptes devrait être respecté comprendrait ainsi les années 2024 à 2028. Il s'agit d'accorder un délai raisonnable à l'issue de la crise actuelle pour un retour vers l'équilibre des comptes.
L'amendement COM-19 est adopté.
L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 5
L'article 5 demeure supprimé.
La proposition de loi organique est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
TABLEAU DES SORTS
EXAMEN DES ARTICLES DE LA PROPOSITION DE LOI
Article 1er
L'amendement COM-1, qui concerne les modalités de saisine des organismes de sécurité sociale du PLFSS, a pour objet de conserver les deux acquis de la proposition des députés en matière de démocratie sociale : donner plus de temps aux caisses pour examiner le PLFSS et transmettre leur avis au Parlement en temps utile pour que celui-ci puisse influer sur la rédaction du texte en cours de navette.
En revanche, nous proposons que les caisses soient saisies de l'avant-projet de loi au moment de sa transmission au Conseil d'État, comme c'est le cas actuellement, et non lors du dépôt du texte à l'Assemblée nationale, comme le prônent les députés. En effet, l'avis des caisses porte non pas sur un examen légistique précis, mais sur les équilibres financiers et les principales mesures du texte qui figurent déjà dans l'avant-projet de loi. De plus, la transmission de l'avant-projet de loi aux caisses assure dans les faits la publicité du texte, ce qui permet aux députés et sénateurs de prendre connaissance des tableaux d'équilibre et des principales mesures dès la fin du mois de septembre. Il est important de conserver un tel acquis, sauf à dégrader les délais d'examen parlementaire, que l'on souhaite au contraire améliorer.
L'amendement COM-1 est adopté.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 2
L'article 2 est adopté sans modification.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
La commission désigne M. Bernard Jomier rapporteur sur la proposition de loi n° 811 (2020-2021) instaurant la vaccination obligatoire contre le SARS-CoV-2, présentée par MM. Patrick Kanner, Bernard Jomier, Mmes Marie-Pierre de La Gontrie, Monique Lubin et plusieurs de leurs collègues.
Je donne la parole à notre collègue Jean Sol, qui souhaite faire une communication.
À la demande de M. le garde des sceaux, je me suis rendu à Montpellier lundi dernier, en tant que rapporteur du rapport d'information intitulé Expertise psychiatrique et psychologique en matière pénale : mieux organiser pour mieux juger, que j'ai rédigé avec notre collègue Jean-Yves Roux. Le Gouvernement s'est inspiré de nos conclusions pour formuler plusieurs propositions, notamment sur la rémunération des experts libéraux et l'amélioration des conditions de travail dans les établissements pénitentiaires. Je m'en réjouis.
Au nom de la commission, je remercie nos collègues de leur travail sur ce sujet si important.
La réunion est close à 10 h 45.