Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Réunion du 17 juillet 2012 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Madame Garriaud Maylam, vous m'avez demandé d'intervenir à propos de la discussion qui a eu lieu en votre absence sur le projet de loi sur le régime matrimonial entre la France et l'Allemagne dont vous étiez le rapporteur et dont j'ai présenté le rapport en votre nom, mardi dernier, puisque vous étiez, je crois, retenue à Londres.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

J'étais en effet retenue au Royaume-Uni, à l'occasion de la visite du président de la République. En tant que sénateur représentant les Français de l'étranger, j'avais représenté, dans le système précédent, nos compatriotes résidant dans ce pays. Il y a eu lors du débat sur ce texte deux interventions concernant l'Office franco allemand de la jeunesse et une information erronée à été donnée sur le droit de l'Etat de résidence en cas de divorce. Cette information, qui ne tient pas compte des accords dits de « Rome III » pourrait amener beaucoup de confusion et risque d'induire en erreur. J'avais demandé qu'on supprime ce passage du bulletin de la commission mais cela n'a pas été possible s'agissant du prononcé en commission. J'avais également envisagé que ce texte puisse être discuté en séance publique et non sous forme simplifiée. Je compte faire un rappel au règlement lors de la séance publique demain et je tenais à en informer la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

La conférence des président s'est prononcée sur l'examen de ce texte en forme simplifiée. C'est également ce qu'a décidé notre commission. Il n'était effectivement plus possible d'en demander la discussion selon la procédure normale. Quant au bulletin de la commission, il reflète exactement nos débats. Vous êtes parfaitement libre de faire un rappel au règlement mais je tiens à préciser que celui-ci ne peut intervenir lors de l'appel des conventions qui ont été adoptées en forme simplifiée. Une prise de parole sur l'un de ces textes n'est en effet pas possible.

La commission examine le rapport d'information de MM. Jeanny Lorgeoux et André Trillard, co-présidents du groupe de travail sur la maritimisation, sur les enjeux maritimes de la France.

Le compte rendu sera publié ultérieurement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

« Royaume de l'insolence », d'après le titre d'un célèbre ouvrage, l'Afghanistan n'a jamais été soumis ; son histoire est avant tout celle d'une résistance énigmatique et tenace contre tous les empires : moghol, perse, britannique, puis soviétique. Ce magnifique pays, l'un des plus pauvres du monde, livré aux fléaux de la corruption, du terrorisme et du trafic de drogue, martyrisé par trois décennies de guerre, dispose pourtant d'atouts pour son décollage.

Après la Surobi en avril, c'est la province de Kapisa, dans laquelle 53 des 87 soldats français tués en Afghanistan depuis 2001 ont trouvé la mort, qui a, il y a tout juste deux semaines, été transférée aux autorités afghanes. Ainsi se tourne une nouvelle page de son histoire. La France fait désormais le choix de concentrer ses efforts sur la construction de la paix et la prise en main de leur destin par les Afghans. Le chemin de cette « décennie de transformation » qui s'ouvre devant nous sera long, mais il n'y en a pas d'autre. C'est pour construire ce développement que le gouvernement soumet à notre ratification le traité d'amitié et de coopération entre la France et l'Afghanistan, signé à Paris le 27 janvier dernier par les deux Présidents de la République.

Ce projet de loi, examiné en Conseil des ministres mercredi dernier, a été déposé en premier lieu au Sénat. Il sera débattu demain en séance publique, et mercredi prochain à l'Assemblée nationale, pour être adopté définitivement avant la fin juillet. Évidemment, ces délais sont très courts ! Nous vous avons d'ailleurs fait passer tous les éléments avant même le passage en conseil des ministres.

Mais il y a urgence : urgence à nous doter d'un instrument qui grave dans le marbre du droit international notre engagement dans la durée, pour 20 ans, aux côtés du peuple afghan. Urgence aussi à fixer un cadre qui garantisse la sécurité et la stabilité de nos actions de coopération pour l'avenir. Urgence enfin à rassembler, unifier et mettre en cohérence tous nos dispositifs d'aide et surtout, à les revitaliser, à les vivifier, à leur donner une nouvelle dynamique et une nouvelle dimension, à la hauteur des besoins, immenses, de ce pays exsangue après 30 ans de guerre. L'enjeu est simple : il s'agit de réussir la paix ! L'opinion publique nous regarde : elle ne comprendrait pas qu'on abandonne les Afghans et que nos soldats soient « morts pour rien ».

Ce traité est le principal outil pour pouvoir travailler efficacement à construire une paix durable. C'est pourquoi nous l'examinons dans le même esprit de continuité républicaine que celui qui a poussé le nouveau Gouvernement à inscrire ce texte signé par le précédent Président de la République à l'ordre du jour de sa première session législative.

Mais attention : cette discussion un peu bousculée -il faut quand même le dire, même si nous l'avons acceptée !-, n'est pas un « solde de tout compte » sur le sujet de l'Afghanistan... Car nous aurons un débat en séance, à l'automne, en présence du ministre des Affaires étrangères et du ministre de la Défense, qui nous ont déjà donné leur accord, sur le bilan de nos plus de 10 ans d'engagement et sur l'état du pays à la veille du retrait de la coalition. Il s'agira, aussi, pour nous, de participer à l'évaluation de nos nouvelles relations avec nos partenaires au sein de l'Alliance atlantique, depuis que nous en avons réintégré le commandement militaire intégré.

L'intervention en Afghanistan, décidée par le Président Chirac et le Premier Ministre Lionel Jospin, avait au départ un objectif clair, celui de lutter contre Al Qaïda à la suite des attentats du 11 septembre. Ses finalités se sont peu à peu transformées, pour ne pas dire brouillées, (aux yeux de l'opinion publique en tous cas), sans doute à partir de la tragédie d'Uzbeen à l'été 2008, sous l'effet d'une communication insuffisante. Nous sommes nombreux, pourtant, à pouvoir témoigner, pour nous être rendus aux côtés de nos soldats, de la qualité remarquable du travail de terrain effectué par nos forces sur ce théâtre particulièrement exigeant.

Finalement, notre mission en Afghanistan aura été double, comme l'a dit le Président François Hollande lors de l'Hommage aux Invalides : elle aura consisté à la fois à : « Lutter contre le fanatisme et la haine aveugle et à aider fraternellement un peuple à retrouver le chemin de sa souveraineté ».

Vous connaissez les conditions de ce retrait, engagement du Président de la République concerté avec nos alliés lors du Sommet de Chicago :

- les forces « au contact », soit 2 000 hommes sur 3 400, auront quitté l'Afghanistan d'ici la fin de l'année, 650 seront rapatriés dès la fin août, nos Mirage sont rentrés la semaine dernière ;

- une présence militaire de 1 000 hommes sera maintenue en 2013 pour sécuriser la manoeuvre logistique des 1 000 véhicules et 1 500 containers restants. La réouverture, après six mois de blocage, de la route Pakistanaise, dix fois moins chère que la voie aérienne et 2 fois moins chère que la route ferroviaire du Nord, devrait nous faciliter la tâche, bien qu'elle soit peu sûre et encombrée par le retrait des 23 000 soldats américains ;

- jusqu'à fin 2014, avec environ 400 hommes, nous gardons 3 responsabilités : celle de l'hôpital militaire de Kaboul, qui fait un travail exceptionnel, nous continuons bien sûr le travail de formation des forces de sécurité afghanes aux côtés de nos alliés, et nous avons à partir du 1er octobre prochain la responsabilité de l'aéroport international de Kaboul, ce qui peut s'avérer utile pour sécuriser le retrait.

Les scénarios catastrophe fleurissent ces derniers temps sur l'évolution future de ce pays si attachant mais si complexe, accablé des fléaux que sont la corruption et le trafic de drogue : scénarios d'éclatement, de guerre civile, de reconstitution des féodalités, de retour des talibans...

Je pose une question et une seule : y a t-il une autre voie qui permette à l'Afghanistan de sortir de son extrême pauvreté, source de tous ses maux, je dirais presque de sortir du « moyen âge » sanitaire et social dans lequel il se trouve, que celle du développement économique ? Ma réponse est : Non.

La meilleure lutte contre l'insécurité c'est la croissance, qui donne à chacun de quoi vivre. La meilleure lutte contre l'obscurantisme c'est l'alphabétisation. Le rempart le plus efficace contre l'embrigadement dans des milices, c'est un travail pour tous dans une société plus sûre. Quelles meilleures armes contre la pauvreté que l'accès aux soins, la reconstruction des routes, la remise sur pied d'une agriculture fruitière et pastorale jadis florissante ?

Quelle part la France veut-elle prendre dans cette reconstruction ? C'est tout l'enjeu du Traité et du programme d'action quinquennale qui l'accompagne. Il devrait permettre de donner un nouvel élan à un certain nombre de projets emblématiques, comme par exemple :

. Dans le domaine de la sécurité, l'appui à la création d'une École de Guerre afghane et d'une gendarmerie afghane ;

. En matière de santé, la réalisation d'une deuxième, puis d'une troisième phase de l'hôpital français pour la mère et l'enfant de Kaboul, dans ce pays aux conditions sanitaires très précaires.

. L'appui à la création de lycées techniques agricoles, à des projets d'irrigation, à l'apiculture, à la pisciculture, pour relever une agriculture aujourd'hui dévastée.

. Un partenariat pour former des ingénieurs des mines et des géologues dans ce pays aux ressources prometteuses.

. Une contribution à des projets d'infrastructures, comme l'adduction d'eau.

Le traité comporte enfin un volet de « gouvernance » destiné à la consolidation des institutions. Nous avons déjà, par le passé, posé un diagnostic très lucide sur l'extrême fragilité et les malversations qui gangrènent les institutions jusqu'aux plus hauts niveaux. C'est le principal enjeu, le principal verrou pour permettre aux Afghans de retrouver confiance et à la société d'avancer.

Je voudrais d'ailleurs saluer l'engagement des assemblées parlementaires françaises pour construire le Parlement afghan. Dès 2004, bien avant le tournant de 2008 sur « l'approche globale », des experts du Sénat ont séjourné à Kaboul pour conseiller la mise en place du Parlement, former les futurs fonctionnaires, rédiger le règlement et amorcer une coopération qui ne s'est jamais ralentie, et qui s'est concrétisée, encore en juin dernier, par une mission de légistique de l'Assemblée nationale française à Kaboul.

Par le traité, les Afghans s'engagent à lutter contre la production de drogue et le terrorisme. Le traité prévoit l'octroi, attendu depuis longtemps, d'exemptions fiscales et douanières pour l'Agence française de développement et pour nos ONG, ou d'emphytéoses de 99 ans pour l'Institut français et la Délégation archéologique. Le traité prévoit enfin la promotion de la langue française à tous les niveaux d'enseignement et la pérennisation de nos instituts culturels.

Vous l'aurez compris, je vous proposerai donc d'adopter le projet de loi de ratification qui nous est soumis. Mais, si vous en êtes d'accord, j'aimerais faire part au Gouvernement en votre nom de trois interrogations fortes -pour ne pas dire plus- sur sa mise en oeuvre :

D'abord, le montant, et -question qui est son corollaire-, la dispersion de l'aide française. Évidemment, nous ne partons pas de rien. La France, à l'origine du tournant de Bucarest, en 2008, rompant avec le « tout militaire », s'est déjà impliquée fortement pour la reconstruction de l'Afghanistan. Dans les districts de la Task Force La Fayette, nous avons vu des champs en culture, des écoles qui fonctionnaient, des lignes électriques rétablies. Au total, la France aura déboursé 240 millions d'euros d'aide civile ces 10 dernières années, avec un positionnement de notre aide orienté sur les besoins vitaux : la santé, l'éducation, l'agriculture et l'accès à l'eau.

Pourtant, nous ne sommes qu'au 14e rang mondial des financeurs internationaux, et là où nous mettons 35 millions d'euros par an, l'Allemagne et le Royaume-Uni en mettent sept fois plus, sans parler des États-Unis ni du Japon...

Nous avons consacré jusqu'à 500 millions d'euros par an de « surcoût OPEX » à l'Afghanistan, combien pourrons-nous mettre sur la table pour donner vie au programme quinquennal ambitieux arrêté au début de l'année ?

Lors de la conférence de Tokyo il y a 8 jours, Laurent Fabius a annoncé une augmentation de 50 % de l'aide française, avec une aide globale portée à 308 millions d'euros, sur 5 ans, soit 50 millions d'euros par an en moyenne, contre 35 auparavant. Je fais confiance à nos rapporteurs sur les crédits du développement pour veiller à ce que les lois de finances viennent effectivement remplir cet engagement.

Il faut aussi engager un effort de rationalisation. La visibilité de notre aide souffre de la multiplicité des circuits de financement, bilatéraux et multilatéraux. La multiplication des guichets favorise l'éclatement, le saupoudrage et l'absence de lisibilité.

Enfin, le ministre des Affaires étrangères nous a dit que la France avait besoin d'une diplomatie économique forte : qu'en est-il du positionnement des entreprises françaises sur les marchés afghans où va affluer l'aide internationale ? Il ne faudrait pas que nous assurions la formation des géologues au titre de la coopération, pour qu'ensuite les Chinois décrochent les contrats d'exploitation des mines ! Les entreprises françaises peuvent se positionner sur plusieurs secteurs où nous avons des atouts : ciment, construction, énergie, eau, agroalimentaire. Comment la diplomatie va-t-elle accompagner et faciliter la montée en puissance des entreprises françaises ?

Deuxième préoccupation forte : la sécurité future de nos experts et de nos entreprises. En Afghanistan, quatre générations de menaces se sont succédé pour se cumuler au final : à la guérilla classique sont venus se rajouter les engins explosifs improvisés, puis le recours aux bombes humaines et récemment les attaques internes, par infiltration des forces afghanes. Même si le ministre de la Défense nous a dit être « résolument optimiste » sur l'évolution sécuritaire, dans certaines zones, la situation est préoccupante.

Le traité prévoit un certain nombre d'immunités, en particulier de juridiction, pour les personnes qui oeuvrent dans le cadre de notre coopération ; c'est un premier train de garanties. Mais est-ce suffisant ? Qu'en sera-t-il demain, une fois les forces combattantes retirées et l'État-major basculé sur le camp de Ware House ? Et qu'en sera-t-il, surtout, après demain ? Dans le contexte du retrait de la coalition, avec la montée en puissance très progressive des forces de sécurité nationales afghanes, leur autonomie encore limitée, alors que la rébellion couve toujours et se nourrit d'un trafic de drogue qui représente la première ressource du pays, c'est plus qu'une préoccupation, c'est une inquiétude.

Je questionnerai aussi le ministre sur le sort des personnels afghans qui travaillent à nos côtés depuis des années. Qu'est-il prévu pour eux, au-delà de la seule rupture de leur contrat ? Quel suivi envisageons-nous pour ces interprètes, ces experts, tous ces Afghans qui se sont engagés auprès des troupes françaises ?

Enfin, dernier sujet de vigilance, le contrôle de la destination des fonds. Nous n'avons pas attendu le scandale de la Kabul Bank pour savoir -et pour dire, haut et fort !- que la corruption endémique gangrène ce pays, nourrit la rébellion, sape la légitimité du gouvernement et ruine la plupart des efforts de la communauté internationale pour faire arriver l'aide au plus près des populations. Le rapport d'information de notre commission en 2009 était sans complaisance. Certaines études estiment à un quart du PIB le montant annuel des pots de vin versés en Afghanistan.

C'est toute la question de la conditionnalité de l'aide qui est posée. La position des Européens est d'obtenir :

- la tenue d'élections libres et équitables en 2014 et 2015 ;

- la mise en oeuvre des recommandations du FMI sur l'assainissement des finances publiques, et la réforme des systèmes fiscal et douanier ;

- et la poursuite des progrès engagés en matière de protection des droits de l'Homme, en particulier s'agissant de la situation des femmes, qui s'est dégradée avec l'augmentation de l'insécurité.

Sous le bénéfice de ces 3 fortes observations, je vous proposerai d'adopter le projet de loi de ratification qui nous est soumis.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Votre rapport nous conduira à voter cet accord, même si je partage les doutes que vous avez émis. Pour être allé trois fois en Afghanistan, je m'interroge comme vous sur la possibilité d'y implanter une démocratie « Jeffersonnienne ». Mon intervention dans le débat de demain portera sur l'environnement régional : l'Inde, le Pakistan, l'Iran, la Russie et la Chine sont les clés du noeud gordien afghan. Je crois comme vous que la vraie difficulté sera de gagner la paix. Pour les entreprises françaises, je me demande s'il n'est pas déjà trop tard, compte tenu de la présence économique chinoise pour l'exploitation future des mines, notamment. Ne nous parons pas des plumes du paon pour l'hôpital de Kaboul, qui est largement financé par la fondation de l'Aga Khan.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Nous avons pu aussi, lors de nos missions en Afghanistan, constater l'effort en matière d'accès à la santé, notamment dans les hôpitaux de campagne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Je suis aussi sceptique que vous car l'histoire montre que la paix n'est jamais imposée par les militaires. Nous l'avons vu en Indochine et en Algérie. J'apporterai toutefois mon soutien au traité car on ne peut faire autrement.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Le projet de loi qui nous est soumis est un symbole fort car le premier texte international examiné sous la nouvelle législature a été signé par le précédent Président de la République. Cette continuité est un signal positif.

Nous sommes nombreux à avoir eu, depuis longtemps déjà, l'intuition que la l'approche militaire ne résoudrait pas à tous les problèmes. Le traité va dans le bon sens, même si nous partageons vos nombreuses incertitudes. Nous serons vigilants, d'abord sur le volet financier, car 308 millions d'euros sur cinq ans nous semblent un défi budgétaire difficile à relever. Sur le plan des principes, quelle cohérence avec notre priorité de flécher l'aide au développement sur les pays les plus pauvres, alors qu'on ne consacre que 10 millions d'euros par an au Mali, par exemple ?

Nous considérons que les Français ont avalisé le nouveau calendrier du retrait proposé par le Président de la République, mais cette accélération a-t-elle bien pris en compte l'accent mis sur la coopération civile ? Comment les forces qui vont rester sur place assureront-elles la sécurité de nos experts ?

Enfin, quelle sera l'efficacité de cette aide, dans un Etat pris à la gorge par la corruption, où le trafic de drogue représente des dizaines de milliards d'euros, où les libertés publiques sont malmenées, comme encore tout récemment avec l'exécution sommaire d'une femme soupçonnée d'adultère ?

Nous entrons donc dans ce traité avec espoir mais aussi avec vigilance sur les conditions de sa mise en oeuvre. La Cour des comptes vient de critiquer le saupoudrage de notre aide au développement. Il faudra veiller aussi à la cohérence de nos interventions.

Merci pour la tonalité de votre rapport ; ce premier texte international de la législature devrait faire consensus.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Je suis convaincu par vos interrogations, que je partage. Je ne peux voter ce texte qui prévoit de consacrer 308 millions d'euros à une aide dont on ne pourra mesurer l'utilité, alors que la pauvreté existe encore en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Josette Durrieu

Nous sommes devant un choix complexe puisque nous connaissons l'emprise des fléaux que sont le trafic de drogue et les féodalités internes, mais aussi externes, auxquels est soumise l'Afghanistan : il nous faut en quelque sorte « payer pour partir », mais n'est-ce pas un véritable tonneau des Danaïdes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

La culture du pavot rapporte davantage aux intermédiaires qu'aux exploitants agricoles eux-mêmes. Il y a quelques années, l'Afghanistan disposait d'une production fruitière exceptionnelle et jouissait de l'autosuffisance alimentaire. Relever l'agriculture est nécessaire. J'entends votre pessimisme, mais de quelle autre solution disposons-nous ? Dans le débat que nous aurons en séance à l'automne, nous pourrons faire le point plus complètement sur les raisons de notre engagement, sur nos plus de dix ans de présence et sur la situation du pays. Il s'agira, en fait, de faire un bilan plus complet et de dresser des perspectives.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

Mes divers contacts en Afghanistan, avec des entretiens au plus haut niveau politique, m'ont conforté dans l'idée que l'aide n'arrive pas toujours auprès des populations qui en ont besoin. C'est peu dire que je partage vos questionnements, je suis même plus pessimiste que vous. Toutefois, je pense que la situation serait pire encore si nous n'adoptions pas ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

On ne gagne pas une guerre d'occupation. Lorsque j'ai voté l'intervention en Afghanistan, c'était pour lutter contre le terrorisme au nom de la liberté et du progrès, qui sont les valeurs cardinales de la République. Je constate, comme vous, les méfaits de la corruption et du trafic de drogue que la coalition a laissé perdurer. Je partage naturellement les grands objectifs de ce traité, mais où iront nos 308 millions ? Il faut cibler et tracer la destination des fonds d'aide au développement. Lors de la première guerre du Golfe, nous avons engagé des troupes mais n'avons récolté aucun bénéfice de la reconstruction du Koweit. Comment les entreprises françaises participeront-elles à la reconstruction économique de l'Afghanistan ? Je voterai ce traité car nous n'avons pas d'autre solution.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

Le traité ne prévoit pas assez de contrôle de la destination des fonds...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Mais enfin, mais c'est le pays le plus pauvre du monde, où les femmes vivent dans des conditions désastreuses !

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

je ne le conteste pas, mais j'estime que l'Afghanistan mérite mieux que le traité que nous sommes en train d'examiner. D'abord, je n'ai pas compris la procédure accélérée : nous allons avoir un débat à l'automne, pourquoi ne pas avoir discuté le texte à ce moment-là ? Ensuite, je suis sceptique car cela fait des années que les ministres se succèdent à notre tribune pour nous proposer des stratégies toujours plus efficaces en Afghanistan, qui se soldent par toujours moins de résultats dans les faits. Les citoyens attendent plus de sincérité. Enfin, je considère que ce traité, présenté en janvier 2012 pour permettre à la France d'exister politiquement sur la scène internationale, n'offre aucune garantie. D'ailleurs, la moitié de la coopération concernera la défense et la police.

Je partage les doutes que vous avez exprimés, ce qui me conduira, au nom de mon groupe, à m'abstenir. Je souhaite enfin que si la commission organise une série d'auditions pour préparer notre débat de l'automne, nous puissions entendre les ONG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Je soutiens, comme la majorité d'entre nous, le gouvernement, lorsqu'il nous soumet un texte qui met en oeuvre l'un des soixante engagements pris par le Président de la République devant les Français. N'oublions pas que le retrait des troupes combattantes d'Afghanistan amènera 650 soldats à quitter ce territoire dès le mois prochain. Même si je partage vos analyses sur le développement de la pauvreté en France, je ne perds pas de vue non plus la très grande précarité du peuple afghan qui vit dans des conditions sanitaires dramatiques, où les droits des femmes bafoués, où la croissance économique sera déstabilisée par le départ des alliés... Il s'agit d'un des pays les plus pauvres du monde, où les besoins sont immenses. Même si le traité ne règlera pas définitivement tous les problèmes, il n'y a pas de solution alternative. Mais je respecte naturellement votre vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Piras

Je voterai le texte que le gouvernement nous soumet, même si mon expérience passée d'ingénieur agricole dans les pays d'outre-mer m'amène à relativiser l'efficacité des dispositifs qui nous sont proposés.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Boutant

Quand un médecin a plusieurs malades, doit-il ne soigner que ceux qui vont s'en sortir ? Je refuse la victoire de la résignation et les postures qui sont pour moi une abdication de l'espoir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Berthou

Il faut relativiser les sommes en jeu : notre aide sera versée projet par projet. De plus, que se passerait-il si la France ne ratifiait pas ce traité ? Comment nos entreprises, qui disposent de tant d'atouts dans le secteur du ciment, des barrages..., pourraient-elles se positionner ?

Debut de section - PermalienPhoto de Rachel Mazuir

Churchill disait que le succès consiste à aller d'échec en échec sans perdre son enthousiasme...

Puis la commission adopte le projet de loi à l'unanimité, deux sénateurs s'abstenant.

Puis la commission procède à la nomination de rapporteurs pour avis sur le projet de loi de finances pour 2013 :

Sont désignés rapporteurs pour avis :

Mission Action extérieure de l'Etat : . Programme 105 : moyens de l'action internationale : M. Alain Gournac . Programme 151 : Français de l'étranger : M. Jean-Marc Pastor

Mission Médias . Programme 115 : action audiovisuelle extérieure : M. André Vallini