Commission spéciale croissance, activité et égalité des chances économiques

Réunion du 3 mars 2015 à 17h30

Résumé de la réunion

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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Nous avons désormais le statut de commission spéciale depuis le 19 février dernier, date à laquelle cette transformation a été annoncée en séance publique. Il nous revient de constituer les instances de la commission et je vous propose de confirmer la composition du bureau et le choix des rapporteurs qui ont été effectués précédemment par le groupe de travail.

La commission confirme les désignations effectuées par le groupe de travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Nous entendons M. Alain Vidalies, secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le Secrétaire d'État, les premiers articles du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques sont consacrés à la mobilité et ont été assez sensiblement modifiés par nos collègues de l'Assemblée nationale. Extension du périmètre de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (Araf), ouverture des transports routiers par autocar, ordonnances sur la liaison ferroviaire Charles-de-Gaulle Express, sur le canal Seine-Nord Europe, sur les gares routières, obligations applicables aux sociétés concessionnaires d'autoroutes en matière de passation de marchés, mais aussi retour sur une mesure relative aux véhicules de transport avec chauffeur (VTC) - c'est la proposition de loi Thévenoud - interdiction de la location d'un bateau de marchandises avec équipage et ratios applicables aux règles d'investissement de Réseau ferré de France (RFF), les sujets ne manquent pas concernant les secteurs dont vous avez la charge ! Vous pourrez nous dire dans quelle mesure les dispositions du projet de loi pourraient faire l'objet d'ajustements lors de l'examen du texte au Sénat. Nous souhaiterions également que vous nous éclairiez sur les modalités de mise en oeuvre des dispositifs proposés.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche

Vous l'avez dit, le spectre est large. M. Macron vous détaillera l'économie générale de ce projet de loi, lors de son audition prévue demain. Je me concentrerai donc sur les dispositions concernant le secteur des transports, et notamment sur les deux nouveautés introduites dans ce texte : le développement des lignes de transport en autocar, librement organisées dans un cadre maîtrisé, et l'extension des pouvoirs de l'Araf dans le domaine des concessions autoroutières. D'autres dispositions encadrent les conditions de travail des salariés du secteur, mais aussi la cession des participations dans les sociétés exploitant des autoroutes ou des aéroports et l'accélération de projets essentiels, comme la liaison rapide Charles-de-Gaulle Express pour laquelle le Gouvernement sollicite une habilitation à légiférer par ordonnance.

L'article 1er étend les compétences de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (qui devient Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières ou Arafer), aux autocars et à certains aspects du secteur autoroutier. Cela répond au souci du Gouvernement d'inscrire le développement du transport dans une logique multimodale. L'article 1 quater modifié par l'Assemblée nationale prévoit, en matière d'open data, que les voyageurs disposeront d'un accès en ligne aux principales données des services réguliers de transport public. Le Gouvernement a chargé M. Francis Jutand, directeur scientifique de l'Institut Mines-Télécom et membre du Conseil national du numérique, d'examiner cet article, qui devra être complété dans le cadre de la prochaine loi sur la stratégie numérique, que le Parlement devrait examiner avant l'été.

L'article 2 encadre le développement de services de transports interurbains routiers. Il s'agit de compléter l'offre de transport entre les villes en autorisant l'initiative privée là où la loi d'orientation des transports intérieurs (Loti) n'autorise que la seule intervention des collectivités publiques dans le cadre de contrats de service public. Si les conditions de confort, de régularité et de fréquence répondent aux besoins des usagers, le car est une alternative crédible à la voiture, ou même au train pour certaines liaisons mal assurées, comme Bordeaux-Lyon, par exemple. Un assouplissement du cadre juridique favorable au développement de ce mode de transport aura des effets bénéfiques tant du point de vue économique qu'environnemental ou social. Pour autant, les autorités organisatrices de transports (AOT) doivent bénéficier d'un pouvoir de contrôle renforcé, pour privilégier la complémentarité et prévenir la concurrence déloyale à l'égard des services de transport répondant à des obligations de service public.

Il y a eu beaucoup de débats à l'Assemblée nationale sur le dispositif qui prévoit qu'avec l'accord de l'Arafer, une AOT pourra interdire la création d'un service privé de moins de 100 kilomètres, si ce service bouleverse l'équilibre d'un contrat de transport comportant des obligations de service public. Sur les lignes de plus de 100 kilomètres, elle pourra également limiter la vente de tickets aux voyageurs effectuant sur la ligne un trajet de moins de 100 kilomètres. C'est ce que le rapporteur du volet mobilité à l'Assemblée nationale a appelé le « seuil kilométrique glissant ». L'AOT disposera d'un délai de deux mois pour saisir l'Arafer qui devra rendre son avis dans les deux mois suivants, avec la possibilité d'un mois de réflexion supplémentaire, l'absence de réponse passé ce délai valant avis favorable à l'ouverture des nouveaux services. Plutôt qu'un seuil de 100 kilomètres, l'Autorité de la concurrence a préconisé 200 kilomètres ; l'Union des transports publics et ferroviaires a proposé de porter ce seuil à 250 kilomètres, et les régions sont favorables à l'instauration d'un seuil au moins équivalent. Nous pourrons en rediscuter, mais le seuil glissant mérite d'être examiné.

Enfin, il est important que le législateur impose aux nouveaux services les mêmes exigences de qualité en matière d'accessibilité que celles qui s'appliquent aux transports publics. Nous proposerons des amendements en ce sens.

Les articles 3 bis et 3 bis A comportent une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance, afin d'accélérer la réalisation de deux projets essentiels pour la croissance de notre économie : le canal Seine-Nord Europe et le Charles-de-Gaulle Express. Il s'agira dans le premier cas de créer une société de projet dédiée qui contribuera à renforcer l'efficacité, la visibilité et la participation des collectivités concernées, déjà très largement mobilisées. Le dossier du canal Seine-Nord Europe a été présenté devant la Commission européenne, jeudi dernier, pour un financement des travaux à hauteur de 40 % sur la période 2015-2020. La création d'une société de projet est un argument auquel Bruxelles est sensible. À nous d'avancer dans la réalisation de ce canal qui doit être la grande infrastructure de transport durable du Nord de la France, comme s'y est engagé le Premier Ministre.

Paris est l'une des rares capitales à ne pas avoir de liaison rapide avec son aéroport principal, deuxième aéroport européen avec 64 millions de voyageurs par an. Les accès sont saturés, tant par la route (autoroutes A1 et A3) que par les transports en commun. Après l'échec de la concession, en 2006, le projet du Charles-de-Gaulle Express a été relancé en 2014 grâce à la création d'une filiale commune d'Aéroports de Paris et de SNCF Réseau, avec éventuellement un tiers investisseur. Le Conseil d'État a confirmé la faisabilité juridique de ce montage, sous réserve d'une disposition législative qui devra recevoir au préalable un avis favorable de la Commission européenne. Des études sont en cours pour préciser l'équilibre financier du modèle. Grâce à l'habilitation à légiférer par ordonnance, le Gouvernement pourra prendre rapidement les mesures nécessaires à la réalisation du projet.

L'article 5 encadre de façon plus stricte les concessions autoroutières, selon les recommandations de la Cour des comptes et de l'Autorité de la concurrence. L'Assemblée nationale a enrichi le texte en élargissant le champ d'intervention de l'Arafer et en introduisant des règles pour encadrer l'activité des sociétés concessionnaires. Nous présenterons plusieurs amendements pour harmoniser ces dispositions avec celles que le Sénat a introduites sur les péages autoroutiers dans le projet de loi relatif à la transition énergétique.

Quant à l'article 6 bis, il vise à ratifier l'ordonnance sur la Société du Grand Paris. En effet, l'article 8 de la loi du 2 janvier 2014 prévoyait que soient déterminées les conditions de participation de la Société du Grand Paris au financement de projets d'infrastructures en correspondance avec le réseau de transports publics dont elle est responsable. Sur cette base, une ordonnance a été adoptée le 26 juin 2014, le projet de loi de ratification a été examiné par le Conseil d'État le 14 octobre 2014 et délibéré en Conseil des ministres le 29 octobre. Il est inscrit pour ratification dans le présent projet de loi.

L'article additionnel 22 bis encadre les dispositions qui s'appliquent aux armateurs et entreprises de travail maritime en matière de protection des gens de mer, s'agissant des obligations de rapatriement. Il autorise également les plaisanciers à recruter des gens de mer qualifiés via des services spécialisés - aux conditions sociales du premier registre. On évitera ainsi le développement du travail illégal dans ce secteur. Enfin, il supprime la procédure d'agrément des entreprises de travail maritime, rendue inutile par leur inscription sur le Registre national des services de placement des gens de mer.

L'article 49 prévoit que les opérations de cession des participations de l'État dans des sociétés exploitantes d'autoroutes ou d'aéroports devront être systématiquement autorisées par une loi. Je suis pleinement satisfait de ces enrichissements apportés par l'Assemblée nationale.

L'article 51 intègre les dispositions concernant la règle d'or de SNCF Réseau, prévue dans la loi de réforme ferroviaire. L'évaluation des investissements de développement du réseau ferré national se fera par un ratio, dont la valeur fixée par décret correspondra au rapport entre la dette financière nette et la marge opérationnelle de SNCF Réseau. En cas de dépassement du ratio, les projets seront financés par l'État, les collectivités territoriales ou tout autre demandeur, afin d'éviter de creuser un déficit sur les comptes de SNCF Réseau.

Le titre III comporte un article 96 bis qui répond à un objectif prioritaire du Gouvernement : la lutte contre le dumping social. Il reprend pour cela certaines dispositions de la loi du 10 juillet 2014, en les adaptant au secteur du transport : obligation de déclaration de détachement à l'inspection du travail, désignation d'un représentant de l'employeur sur le territoire national pour tenir compte des spécificités d'emploi des salariés roulants ou navigants. Une autre disposition de l'article 96 bis assimile le destinataire du contrat de transport au donneur d'ordre pour l'application des règles issues de la loi du 10 juillet 2014. En effet, dans le cas où le donneur d'ordre est établi à l'étranger, il faut que l'agent de contrôle puisse avoir un interlocuteur en France. Ce dispositif contribuera à éviter la concurrence déloyale tout en favorisant une meilleure effectivité du droit concernant le détachement. Les partenaires sociaux s'y montrent favorables.

Enfin, les articles 97 bis et ter comprennent des dispositions visant à mieux réguler le transport fluvial. Elles ont été élaborées en étroite concertation avec les professionnels concernés. D'une part, le contrat de transport de marchandises par voie fluviale conclu entre les parties doit faire l'objet d'une confirmation approuvée du transporteur et de son co-contractant. D'autre part la location transfrontalière est interdite pour le transport fluvial de marchandises.

Le projet de loi vise au total à moderniser l'ensemble du secteur des transports. Le Gouvernement sera attentif aux améliorations que le Sénat souhaitera apporter, dès lors qu'elles s'inscriront dans l'objectif partagé de la croissance et de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

L'Araf voit son champ de compétences élargi, du ferroviaire à l'autoroutier. Quels moyens seront dégagés pour faciliter son action ? Pourquoi avoir choisi de renvoyer la question de son financement à la loi de finances pour 2016 ? Quant au seuil fixé à 100 kilomètres, il est nettement insuffisant dans un pays où la densité est lâche et où les distances à parcourir sont importantes, et cela même si l'on prend en compte le seuil glissant. Dans l'article 2, il est précisé que la question du recensement des gares routières devra être réglée dans les six mois qui suivront la promulgation de la loi. Ce délai est-il suffisant ? Ne risque-t-on pas de susciter dans l'intervalle un développement anarchique qui portera préjudice aux usagers, notamment pour la dépose des passagers ? Enfin, on parle d'un accord prochain entre l'État et les sociétés d'autoroutes. Pouvez-vous nous en dire plus ? Quels seront les termes de cet accord ? Dans quel délai prendra-t-il effet ? Cela aura des incidences, notamment sur l'article 5 du projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Notre rapporteure Mme Deroche ayant été retenue, je me fais son porte-parole. L'article 96 bis prévoit qu'un décret en Conseil d'État remplace la déclaration de détachement des travailleurs de droit commun par une attestation établie par les entreprises de transport routier et fluvial. En quoi cette attestation améliorera le contrôle des travailleurs salariés détachés ? Ce même décret arrêtera la période pendant laquelle le référent en France des entreprises qui détachent les salariés sur le territoire national doit se tenir à la disposition des agents en charge de la lutte contre le travail illégal. Le droit commun prévoit que cette période est égale à la durée de la prestation réalisée en France. Quelle sera la période retenue par le Gouvernement dans le cas des entreprises de transport étrangères ? L'article 96 bis prévoit également que le destinataire du contrat de transport est assimilé au donneur d'ordre, dans le cas d'un prestataire étranger. Cette assimilation est-elle générale et absolue, ou connaît-elle des exceptions ? Enfin, plus généralement, pensez-vous que les mesures prises à l'article 96 bis répondent aux attentes des entreprises de transport routier qui souffrent de la concurrence du cabotage routier ? Ne serait-il pas plus efficace de modifier les règles de cabotage au niveau européen ?

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d'État

Sur la première question, portant sur les moyens de l'Arafer, l'enjeu est minime : six personnes devraient être affectées à la régulation des autocars, six autres à la régulation des autoroutes... Aucune augmentation d'effectifs n'est prévue, car le plafond d'emploi n'est pas dépassé. Les ressources de l'Autorité sont issues du ferroviaire. La justice exige de revoir ce financement, mais il est des montagnes plus hautes à gravir : le besoin est estimé tout au plus à 2 millions d'euros, qui pourront être trouvés grâce à une taxe affectée en loi de finances, ou à une redevance fixée par un décret et ratifiée en loi de finances.

En ce qui concerne les autoroutes, chacun connaît la procédure. Le Gouvernement travaille avec les parlementaires. Les débats sont en cours, pour examiner des questions au demeurant légitimes. Attendons les conclusions du rapport. Quant au recensement des gares routières, il ne devrait pas poser problème. Ces gares existent. Il n'y a plus qu'à prévoir des règles d'accès, cela se fera par voie d'ordonnance.

La création d'une agence européenne de contrôle serait la réponse idéale pour régler le problème de la concurrence déloyale. L'Allemagne a adopté un texte qui va plus loin que le nôtre, soumettant au smic allemand toutes les entreprises, y compris celles dont les camions traversent le pays sans s'arrêter - mais l'application en est suspendue. Plusieurs autres pays ont pris des initiatives. La situation est désastreuse dans le secteur du transport. Elle entretient un sentiment anti-européen et nourrit le vote d'extrême-droite. Il faut que la Commission en prenne conscience. Il est temps de dépasser le stade des propos incantatoires. Pour notre part, nous avons fait le choix d'appliquer au secteur des transports les principes de la directive sur le détachement. D'où l'assimilation du destinataire du contrat au donneur d'ordre qui nous donne l'assise juridique nécessaire pour procéder aux contrôles. Il n'en reste pas moins qu'une agence européenne de contrôle est souhaitable.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Je voudrais saluer cette disposition introduite par le Gouvernement à l'article 96 bis. La Fédération nationale des transporteurs routiers l'attendait et l'espérait ; et la CGT l'a qualifiée de « révolution dans le secteur ». Une telle unanimité est assez rare.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Quel est exactement votre objectif en matière de transport routier de voyageurs ? Je n'y vois pas très clair ! À mon sens, c'est plutôt un service à tendance régalienne. Pourriez-vous nous donner l'exemple d'un cas localisé où le système complexe que vous nous avez décrit pourrait porter ses fruits ? Dans un certain nombre de territoires, les transports sur les petites et moyennes distances sont organisés par les conseils régionaux et fonctionnent bien. Je crains que la mesure dont vous nous avez parlé ne soit réservée à la région parisienne. J'espère qu'elle ne portera pas atteinte à l'aménagement du territoire dans le reste du pays, et qu'elle n'entraînera pas l'abandon de lignes dont l'État est l'autorité organisatrice, notamment les trains d'équilibre du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

J'ai été rapporteur du projet de loi sur les grands ports maritimes en 2009. Le trafic à Anvers équivaut à celui de l'ensemble des grands ports français. C'est le premier port, en volume, pour la desserte de Paris ! Et pourtant notre pays ne manque pas d'atouts. Y a-t-il des mesures dans le texte pour réactiver nos grands ports maritimes ?

La loi sur la transition énergétique recommandait de réduire la circulation des voitures diesel qui polluent plus que celles à essence. Les cars fonctionnent au diesel. N'y a-t-il pas la une incohérence ? Si le facteur environnemental est une priorité, ne serait-il pas plus logique de développer le ferroviaire qui fonctionne à l'électricité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bosino

Je partage ces remarques ! Pourquoi le Gouvernement ne développe-t-il pas davantage le ferroviaire ? On sait combien de lignes de train importantes ont été supprimées. Le 31 juillet 1982, 44 enfants de Crépy-en-Valois sont morts brûlés vifs dans deux autobus sur l'autoroute de Beaune. Il y a quinze jours, sur l'autoroute A1, près de Compiègne, des enfants anglais ont tout juste eu le temps de descendre de leur autobus en flammes, pris entre deux camions. Quelles mesures sont prévues pour renforcer la sécurité sur les routes ? Je n'ai pas compris en quoi consistera le pouvoir de contrôle des AOT sur les services privés de transport par car. Quant à la filialisation de la SNCF, elle remettra en cause le statut d'un certain nombre de cheminots. La CGT s'en inquiète. Enfin, le canal Seine-Nord Europe n'est qu'une partie de la liaison Seine-Nord Europe. Quelle différence fondamentale y a-t-il entre le partenariat public privé initialement prévu et la société de projet dédiée dont vous avez parlé ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Le projet du Charles-de-Gaulle Express est un serpent de mer. Déjà initié à la fin de l'année 2000, il est tombé à l'eau à l'issue d'un débat contradictoire entre les experts. Je me souviens de la visite d'une équipe de la SNCF à Pavillons-sous-Bois, nous annonçant le futur chantier du tunnel... Le projet de liaison directe refait surface. Certes, il est regrettable qu'il n'existe pas de liaison dédiée entre l'aéroport et la capitale. Cependant, la vraie question reste celle de la rentabilité. Des études sont en cours. Si la rentabilité n'est pas au rendez-vous, est-ce l'État qui assurera l'équilibre financier ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

La très grande majorité des usagers de transports publics gérés par des AOT voyagent à moins de 100 kilomètres, me semble-t-il : pouvez-vous le confirmer par des chiffres précis ? Comment envisagez-vous de résoudre l'équation économique du projet Seine-Nord Europe ? Enfin, les tarifs des autoroutes sont fixés par les contrats des concessions. Je ne vois pas bien sur quoi peut porter le rôle régulateur de l'Arafer dans ce domaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Morisset

Dans les années quatre-vingt, on a supprimé des trains dans les départements ruraux pour mettre en place des lignes régulières de car, qui sont déficitaires et qui bénéficient de l'aide du département. Dans ces conditions, je ne vois pas bien comment d'autres opérateurs proposeraient des services supplémentaires ! Vous avez dit que l'Arafer pourra valider la mise en place de nouvelles lignes. Pourra-t-elle également éviter la fermeture des lignes TER qui disparaissent progressivement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Qu'en est-il de la libéralisation des transports en surface de la région Ile-de-France ? Concernant le projet du Charles-de-Gaulle Express, il est étonnant que le Gouvernement demande une habilitation à légiférer par ordonnance avant d'avoir procédé aux études et établi l'équilibre financier. La SNCF accepte d'investir dans le projet, alors qu'Air France avait refusé en son temps. Je souhaiterais avoir l'assurance qu'il n'y aura pas d'impôt supplémentaire pour financer cette liaison. Quel sera le coût pour l'utilisateur ? Le terminal se situera-t-il dans le quartier de la gare de l'Est, comme on l'avait prévu initialement ?

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d'État

La libéralisation du transport par autocar n'a rien à voir avec l'aménagement du territoire. Certes, dans certains départements ruraux, l'initiative n'aura aucun effet. La fermeture des TER dépend des présidents de région, pas de l'État. Dans les pays voisins, le transport par autocar connaît un succès certain, avec 5 millions, parfois 8 millions de voyageurs, contre 130 000 chez nous. Ceux qui voyagent par autocar le font pour des motifs économiques, car cela prend deux à trois plus de temps qu'en train pour aller de Paris à Bordeaux ou de Paris à Marseille. Les mêmes réticences s'étaient manifestées sur la question du transport aérien low cost. On a refusé de le contrôler. Résultat, Ryanair compte plus de voyageurs qu'Air France ou Lufthansa. L'Arafer a un rôle à jouer pour éviter que le développement de ce type de transport se fasse au détriment du service public. En tant qu'élus locaux, vous savez bien que la mobilité est une question sociale majeure, en zone rurale comme en zone urbaine. Il faut pouvoir se déplacer pour chercher du travail, pour faire des études, pour avoir accès à la culture... Nous ne nous lançons pas dans un projet aventureux ; nous sommes éclairés par l'expérience des pays voisins.

Aucun acteur privé n'ouvrira de ligne entre Mont-de-Marsan et Tartas, j'en suis bien persuadé ! L'objectif, c'est de dynamiser les lignes importantes... qui existent déjà, du reste, car les lignes internationales ont la possibilité de prévoir des arrêts secondaires si la part des voyages intérieurs ne dépasse pas 50 %. Les compagnies échafaudent des business plans où les autocars ne sont remplis qu'à moitié, pour respecter ce seuil.

Ces jeunes, ces étudiants, ces gens qui veulent voyager, pourquoi les priver de ce transport collectif ? Il faut simplement des verrous pour empêcher la libéralisation d'avoir un impact sur les transports existants. Le travail du Parlement, c'est de vérifier que les dispositions de la loi correspondent bien à l'objectif.

Le Charles-de-Gaulle Express est confié à une société filiale d'Aéroports de Paris et de la SNCF. Le prix du billet devrait être de 23 ou 24 euros. Un déficit est-il possible ? Nos études visent l'équilibre. Mais s'il y en a un, il ne sera pas comblé par un paiement de l'État. La participation des actionnaires, une taxe sur les billets ou sur l'utilisation des infrastructures devront être examinées.

Le précédent projet de canal Seine-Nord Europe, reposait sur un partenariat public privé qui ne fonctionnait pas. Il a été redimensionné. Le travail de Rémi Pauvros a montré l'implication des collectivités concernées. La réduction de la voilure a abouti à une société de projet, précisément pour associer les collectivités. Les conditions de la réussite passent bien sûr par une réponse positive de l'Union européenne. Les ministres wallon et flamand, et moi-même, avons déposé notre dossier ; une participation de 40 % rendrait la résolution des équations plus facile. Il s'agirait aussi d'un outil d'aménagement, favorisant des ports sur le territoire français - Le Havre au premier chef - avec des aménagements sur l'Oise et des bases logistiques. Mais sur ces derniers aspects, ce sont les régions qui prennent le relais. C'est un report modal majeur, puisque des camions qui occupent l'autoroute A1 utiliseraient la voie fluviale. Sur ce mode, nous partons de tellement bas que nous avons une très grande marge de progression ! Nous n'avons pas utilisé toutes nos potentialités. Le financement complémentaire s'inscrira dans le cadre de la directive « Eurovignette III ». Sur la ligne Lyon-Turin, j'ai sollicité Michel Bouvard et Michel Destot qui me remettront leur rapport d'ici deux ou trois mois. Le plan Juncker est aussi une piste.

Si nous ne voulons pas que la libéralisation des autocars perturbe l'existant, il faut des règles, et que la puissance publique ou l'autorité de régulation reprenne la main. Avec la règle des 100 kilomètres glissants, si un transporteur prévoit un parcours entre deux arrêts distants de moins de 100 kilomètres sur lequel il existe un service public, l'AOT pourra s'y opposer en saisissant l'Arafer. Enfin, aucune disposition de cette loi ne peut être interprétée, même extensivement, comme une remise en question du statut des cheminots.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

L'article 1er bis dispose que les autocars devront répondre aux normes d'émissions polluantes Euro 6. Quid des petites entreprises qui n'auront pas immédiatement un matériel qui convient ? Ne peut-on pas faire en sorte qu'elles ne soient pas tout de suite déclassées ?

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d'État

La loi prévoit en effet le respect des exigences européennes. Je vous ferai passer une note complémentaire, mais voici le principe de ce qui est prévu : les exigences entreront en vigueur en sifflet. Les entreprises qui ont du matériel ancien pourront attendre trois ou quatre ans et procéder à la mise aux normes à l'occasion du renouvellement de leur parc.