Séance en hémicycle du 26 mai 2011 à 9h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • TEPA
  • d’achat
  • d’emploi
  • d’heures
  • trimestre

La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation du sénateur appelé à siéger au sein du comité de surveillance de la Caisse d’amortissement de la dette sociale.

La commission des finances a fait connaître qu’elle propose la candidature de M. Jean-Jacques Jégou pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.

Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l’article 9 du règlement, s’il n’y a pas d’opposition à l’expiration du délai d’une heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L’ordre du jour appelle le débat sur le bilan du dispositif d’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires, organisé à la demande du groupe de l’Union centriste.

La parole est à Mme Roselle Cros, orateur du groupe qui a demandé ce débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Roselle Cros

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat de ce jour portera sur le bilan du dispositif des exonérations de charges fiscales et sociales des heures supplémentaires telles qu’elles ont été prévues par la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite « loi TEPA ».

Cette loi restera la transposition législative d’engagements politiques forts du Président de la République pendant la dernière campagne présidentielle. La loi TEPA ne se limitait pas à l’abaissement du bouclier fiscal à 50 %. Son article 1er, sa principale disposition, exonérait les heures supplémentaires de charges sociales et fiscales.

Près de quatre années après le vote de cette loi, que reste-t-il aujourd’hui du principe : « Travailler plus pour gagner plus » ? L’exonération des heures supplémentaires a-t-elle tenu ses promesses ? Les projections du Gouvernement se sont-elles concrétisées, en dépit des conséquences de la crise économique qui ont totalement changé le contexte : augmentation du taux de chômage, précarisation du marché du travail, fragilisation des PME ?

La présentation de ce débat sera simple. Je tenterai d’abord, au nom de groupe de l’Union centriste, d’établir un bilan des quatre années d’application de l’article 1er de la loi TEPA ; puis je m’essaierai à une évaluation du dispositif tel qu’il est appliqué aujourd’hui.

Le bilan est mitigé : d’un côté, l’exonération des heures supplémentaires a permis un gain global en termes de pouvoir d’achat ; d’un autre côté, elle a introduit de larges distorsions dans l’économie, en créant des disparités entre de nombreuses branches du marché du travail et selon les régions.

Rappelons les bases du dispositif et ses objectifs.

Les heures supplémentaires s’entendent comme les heures de travail effectuées au-delà de la durée hebdomadaire du travail, fixée à 35 heures par les lois Aubry et transcrites depuis dans le code du travail et le code rural.

Le mécanisme de défiscalisation est inclus dans l’article 81 quater du code général des impôts, selon lequel sont exonérés de l’impôt sur le revenu les salaires versés aux salariés au titre des heures supplémentaires de travail, des heures choisies et des heures considérées comme supplémentaires. Cet article a une portée large, dans la mesure où il s’applique également à la fonction publique.

Cette première exonération est doublée des exonérations qui sont prévues aux articles du code de la sécurité sociale et qui ouvrent un droit à réduction des cotisations sociales sur les heures supplémentaires, y compris pour les charges patronales.

Par sa nature juridique, le dispositif est clairement identifiable comme une niche fiscale, laquelle avait trois objectifs simples : d’abord, contourner la législation en vigueur relative à la durée hebdomadaire du travail qui s’est révélée inopérante dans certains secteurs d’activité ; ensuite, accroître le pouvoir d’achat des salariés en valorisant les revenus du travail plutôt que les revenus de transferts ou de substitution ; enfin, dynamiser l’activité économique et favoriser à moyen terme la création d’emplois. Ces objectifs étaient résumés en un triptyque : « travail, emploi, pouvoir d’achat ».

Les projections gouvernementales se voulaient transparentes. Une personne gagnant 1 500 euros de salaire brut mensuel qui effectuerait quatre heures supplémentaires hebdomadaires de travail bénéficierait d’un gain net annuel de 2 500 euros. Pour une heure de travail supplémentaire par semaine, cette même personne gagnerait près de 645 euros de plus par année. Dans l’hypothèse haute, le gain mensuel était de 150 euros, soit une augmentation de 10 % du salaire de base pour un retour de fait aux 39 heures.

L’incidence sur les finances publiques était tout sauf neutre : 4, 88 milliards d’euros dès 2008, puis 5, 98 milliards d’euros en régime de croisière.

Exonérer les charges pesant sur les heures supplémentaires devait avoir un effet positif, soit un gain de 70 millions d’heures supplémentaires par an, ce qui correspond à 48 000 emplois en équivalent temps plein.

Dès la première année d’application, le résultat fut encourageant, mais pas à la hauteur des objectifs et des attentes fixés par le Gouvernement. Plus de 568 000 entreprises se sont déclarées utilisatrices des exonérations d’heures supplémentaires au quatrième trimestre 2007. Quatre millions de salariés ont perçu des rémunérations exonérées.

Les résultats ont été néanmoins inférieurs aux projections. Un indice de la sous-utilisation de cette mesure se retrouve dans son coût budgétaire réel en 2008 : 4, 4 milliards d’euros, soit 400 millions d’euros de moins qu’il était prévu pour financer la relance du pouvoir d’achat, mais 400 millions d’euros de moins pour le déficit.

La commission des finances du Sénat avait opportunément introduit à l’article 1er l’obligation faite au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport d’évaluation de l’exonération des heures supplémentaires. Ce rapport, publié en janvier 2009, était un premier bilan d’étape sur les données constatées avant le déclenchement de la phase la plus aiguë de la crise de l’économie réelle après la crise financière.

La première conclusion que l’on pouvait tirer de ce rapport était la difficulté d’établir une méthode de chiffrage efficace. Le rapport était établi à partir des enquêtes de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale ou ACOSS, des enquêtes dites ACEMO, sur l’activité et les conditions d’emploi de la main-d’œuvre, ou encore des enquêtes de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques ou DARES. Si l’évaluation est nécessaire, force est de constater que la mesure du dispositif ajoute à la complexité de la mesure elle-même.

Sur le fond, le rapport indiquait en filigrane la montée en puissance de nombreuses disparités sur le marché du travail. Ces distorsions sont présentes tant entre le secteur privé et le secteur public qu’au sein de chaque branche elle-même.

Prenons l’exemple du secteur public.

Dès la fin de l’année 2008, il est apparu que, toutes fonctions publiques confondues, l’éducation nationale bénéficiait plus des défiscalisations que les professions hospitalières, les infirmiers principalement. Sur les 263 000 agents de la fonction publique d’État qui ont été bénéficiaires des heures supplémentaires, 83 % des personnes concernées travaillaient pour l’éducation nationale. Chaque agent a perçu une indemnité moyenne de 148 euros.

À l’inverse, les heures supplémentaires dans la fonction publique hospitalière donnent lieu plus à récupération qu’à paiement. De ce fait, elles n’entrent évidemment pas dans le cadre de l’article 81 quater du code général des impôts : elles ne sont pas éligibles à l’exonération de cotisations sociales et à l’impôt sur le revenu. On parle pourtant de 14 millions d’heures de travail, si l’on en croit l’enquête conduite par la mission des études statistiques et démographiques de la direction de l’hospitalisation du ministère de la santé.

En 2008, 727 millions d’heures supplémentaires ont été déclarées, soit l’équivalent de 46 600 emplois en équivalent temps plein. En dépit d’une stagnation apparente du recours aux heures supplémentaires exonérées, le gain macroéconomique pour l’année 2008 n’était pas négligeable : le dispositif aurait contribué pour 0, 15 % du PIB de l’année en soutenant la consommation des ménages du fait de l’augmentation du pouvoir d’achat.

Le Gouvernement tablait sur le relais économique de l’accroissement de l’investissement des entreprises et de l’augmentation du taux d’emploi. Mais c’était avant que la crise financière n’affecte l’économie réelle !

Les cartes n’ont pas été fondamentalement rebattues. La crise a mis en évidence un fait très simple : le dispositif d’exonérations des heures supplémentaires de cotisations sociales et de l’impôt sur le revenu n’était pas de taille à flexibiliser le marché du travail assez profondément pour stimuler l’emploi durablement.

La crise économique de l’année 2009 s’est caractérisée par une forte poussée du chômage dans un climat de récession et d’incertitude des entreprises sur l’avenir. Les heures supplémentaires ont joué un rôle de variable d’ajustement de la masse salariale. Elles ont permis aux entreprises de faire face à des périodes de surcharge temporaires ou saisonnières, mais le dispositif n’a pas été un levier assez puissant pour stimuler l’emploi.

La dernière enquête de l’ACOSTAT, l’organisme statistique de l’ACOSS, en date du dernier trimestre de l’année passée, nous donne des indications précieuses quant à l’état actuel du dispositif.

Entre le dernier trimestre de 2009 et celui de 2010, le volume d’heures supplémentaires a augmenté de 2, 4 %. Il connaît un ralentissement par rapport aux trimestres précédents, puisque l’augmentation était de 6 % au deuxième trimestre et de 5 % au troisième trimestre.

Cette croissance est surtout très inégalement répartie selon les secteurs, et principalement dans le secteur privé. La croissance du volume des heures supplémentaires reste dynamique dans l’industrie, principalement dans la métallurgie et dans l’automobile, avec une croissance de près de 6 %.

Le secteur tertiaire connaît un sort plus mesuré, avec une croissance plus faible qui peine à atteindre 3 %. Le secteur de la construction et du bâtiment et des travaux publics est même en phase de contraction, avec un recul de près de 4 % des heures supplémentaires.

Le nombre d’heures supplémentaires augmente plus dans les entreprises de plus de dix salariés que dans les très petites entreprises.

Sur le plan géographique, l’Île-de-France est clairement en retrait ; elle perd en glissement annuel près de 1, 5 % de son volume d’heures supplémentaires, mais son sort n’est rien en comparaison de ce que l’on peut observer dans les départements d’outre-mer, où, selon les chiffres de l’ACOSS, la Martinique perd plus de 5 % de son volume annuel.

Ces données attestent de la crispation du marché du travail dans une phase de sortie de crise économique.

Les secteurs bénéficiaires ont été les plus durement frappés par la crise. En revanche, le dispositif ne dynamise que trop peu les secteurs les plus riches en emplois peu qualifiés, susceptibles de créer des emplois ; je pense évidemment au secteur de la construction.

Le constat est clair : les régions les plus peuplées et les secteurs économiques les plus dynamiques ne profitent pas du dispositif. La croissance de la masse salariale dans les aires et les secteurs bénéficiaires est artificielle.

Pourtant, le coût budgétaire est important : il atteint près de 4, 5 milliards d’euros annuels, pour un gain moyen de 150 euros par foyer fiscal. Il convient d’y ajouter le coût induit par les lois Aubry.

D’après le rapport budgétaire de la commission des finances du Sénat sur la mission « Travail et emploi » du projet de loi de finances pour 2011, le coût cumulé des dépenses fiscales afférentes aux lois Aubry, aux dispositifs d’exonération Fillon et aux heures supplémentaires coûterait de 12 à 15 milliards d’euros à l’État. Tout cela pour peiner à atteindre, sans le dire, les 39 heures !

Faut-il pérenniser le dispositif, compte tenu de son bilan non pas négatif, mais mitigé ? Le cadre de ce simple débat ne permet pas de répondre à cette question. La seule certitude, c’est que nous ne pourrons pas continuer à accumuler les niches fiscales, source d’une complexité administrative croissante et d’incohérences budgétaires.

Il faudrait en revanche chercher à répondre aux véritables questions, à savoir la relance de la croissance économique et la progression de la compétitivité de nos entreprises. Au regard de ces objectifs, il apparaît très nettement que la défiscalisation des heures supplémentaires n’aura pas été suffisante.

D’après les prévisions du Gouvernement, telles qu’il nous les a transmises dans le cadre du récent programme de stabilité européen, la France peut espérer une croissance économique de 2 % pour cette année. La sortie de crise de l’économie incitera-t-elle les entreprises à transformer les heures supplémentaires en emplois supplémentaires ? La confiance est-elle suffisante, dans le contexte économique actuel, pour que nos entrepreneurs prennent le risque d’une telle recomposition de la masse salariale ?

Nous pensons qu’une nouvelle orientation doit être donnée, pour répondre aux exigences de la loi TEPA et pour bien apprécier le sens et la portée des mots « travail », « emploi » et « pouvoir d’achat ».

L’emploi – il convient de le réaffirmer – est le socle stable et fondateur d’une économie construite pour la croissance et la diminution du chômage.

L’accumulation des heures supplémentaires par des personnes expérimentées employées à temps plein ne favorise pas l’accès des jeunes au monde du travail, que nous recherchons pourtant.

Dans une économie bien portante, le pouvoir d’achat est issu du travail, plutôt que de revenus de transfert. Néanmoins, le travail ne peut être convenablement rémunéré par une part croissante de primes variables et d’heures supplémentaires défiscalisées.

Cette question est d’autant plus actuelle que l’on observe depuis plusieurs mois, au sein de la zone euro, une valse des étiquettes grevant le pouvoir d’achat. Sont concernés les produits laitiers, le carburant, l’électricité, le gaz et nombre de produits alimentaires de première nécessité. En outre, la sécheresse actuelle ne pourra qu’accentuer l’enchérissement du coût de la vie qui frappe les ménages les plus modestes. Des solutions autres que l’exonération des heures supplémentaires devront être trouvées pour, au minimum, maintenir le pouvoir d’achat.

S’agissant de la compétitivité, c’est plus la question de l’organisation du temps de travail que celle de la durée hebdomadaire du travail qui doit être posée dans les entreprises. Il convient d’encourager les négociations avec l’ensemble des partenaires sociaux.

Il est temps aussi de poser la question d’un partage plus équilibré de la valeur ajoutée au sein même des entreprises, et notamment entre les salaires et les dividendes. On a pu récemment observer que les cycles économiques de ces dernières années se sont systématiquement caractérisés par une allocation de la valeur ajoutée toujours plus favorable aux actionnaires par rapport aux salariés.

Nous partageons cette préoccupation avec le Président de la République, qui avait demandé au directeur de l’INSEE, en 2009, un rapport sur le partage de la valeur ajoutée, partage des profits et écarts de rémunérations en France, et propose aujourd’hui l’octroi de primes aux salariés en contrepartie du versement de dividendes. Mais il s’agit de nouveau d’un système de primes et non pas d’une augmentation des salaires.

Quel est donc le bilan du dispositif relatif aux heures supplémentaires ? En une phrase, si ce dispositif a été utile à court terme, il est économiquement insuffisant pour l’emploi et la croissance et budgétairement trop coûteux au regard des résultats obtenus en matière de pouvoir d’achat.

À moyen terme, les objectifs fixés par le Gouvernement en 2007 procèdent d’un impératif qui doit être pérennisé : la relance de la croissance économique par le renforcement de la compétitivité de nos entreprises.

Certains de mes collègues du groupe de l’Union centriste – je pense principalement à M. Jean Arthuis – proposent un élargissement des exonérations de charges sociales, qui serait financé par une hausse de la TVA.

La diminution du coût du travail n’est qu’un facteur parmi d’autres de l’amélioration de notre compétitivité par rapport à nos voisins européens. Elle ne doit pas pour autant porter atteinte à la progression du pouvoir d’achat, la consommation constituant un élément majeur de la croissance économique en France. Si l’on veut supprimer le recours aux exonérations des heures supplémentaires, les équations ne seront pas simples à résoudre, monsieur le secrétaire d’État !

Ce débat doit nous permettre de réfléchir à l’efficacité de ce dispositif, à partir du bilan de ses quatre années d’application, en ne sous-estimant pas l’incidence du contexte de crise, qui a certainement faussé partiellement les résultats.

C’est pour discuter de cette question avec vous tous que nous ouvrons modestement cette discussion, qui se poursuivra sans nul doute au cours des prochains mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en application du slogan de Nicolas Sarkozy : « Travailler plus pour gagner plus », la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite « loi TEPA », a créé un nouveau dispositif d’exonération des cotisations sociales et de l’impôt sur le revenu, concernant les heures supplémentaires et complémentaires.

Près de quatre ans après, quel bilan peut-on tirer de ces dispositions ? Je précise d’emblée, car c’est fondamental, que la décision de recourir aux heures supplémentaires constitue une prérogative de l’employeur, dans l’exercice de son pouvoir de direction. C’est l’employeur, et en aucun cas le salarié, qui décide de recourir ou non aux heures supplémentaires.

Il y a donc, à l’origine de ce dispositif, une confusion délibérément entretenue, destinée à faire croire aux salariés qu’ils peuvent choisir de « travailler plus », alors qu’ils n’ont aucune latitude en la matière. Il en résulte, comme on le verra, que le « procédé TEPA » est donc très habile dans sa conception, mais fondé en partie sur une illusion.

Concernant le volet « heures supplémentaires » de la loi TEPA, il faut savoir que, dès le départ, soit en 2007, ses effets négatifs avaient été annoncés par des économistes d’obédience libérale tels que Pierre Cahuc, dans le cadre du Conseil d’analyse économique. Ce dernier affirmait qu’une telle mesure aurait un effet ambivalent sur l’emploi : d’un côté, elle inciterait les entreprises à faire travailler davantage en heures supplémentaires leurs salariés, lesquels répondraient favorablement à une telle proposition ; de l’autre, elle constituerait un véritable frein à l’embauche, puisque le coût du travail effectué en heures supplémentaires serait inférieur au coût du travail normal.

Il indiquait également que s’ajouterait à cela le problème du financement, car le fait que des heures supplémentaires se substituent à des heures « normales » entraînerait une perte significative de cotisations pour les organismes sociaux, perte qu’il faudrait rapidement refinancer par des charges additionnelles.

Michel Godet, économiste et professeur au CNAM, le Conservatoire national des arts et métiers, systématiquement hostile à la réduction du temps de travail, écrivait dans La Tribune, au début de l’année 2007: « Il ne faut surtout pas soustraire les entreprises aux cotisations, comme le propose l’UMP. Cela aurait un effet d’aubaine par lequel les entreprises s’arrangeraient pour moins embaucher et faire travailler plus de salariés sous le régime des heures supplémentaires, privant ainsi le système de cotisations sociales substantielles. »

Ainsi, on peut facilement calculer que, pour une entreprise de cinquante salariés, trois heures supplémentaires par semaine et par salarié permettent d’économiser quatre embauches sur l’année L’avantage n’existe que pour les employeurs et les salariés qui bénéficient du système. Bref, le dispositif crée un effet de rente.

J’ai d’ailleurs relevé dans la presse l’exemple d’une PME ayant augmenté de 15 % ses heures supplémentaires, ce qui lui a permis de ne réaliser aucune embauche, y compris en contrat à durée déterminée : les salariés travaillent une heure et demie de plus par jour, au tarif horaire normal. Dans cet exemple, l’employeur est donc le grand bénéficiaire. Quant aux salariés, ils se disent satisfaits, ce dispositif leur permettant de boucler leurs fins de mois, ce qui montre que leur salaire est trop faible pour leur permettre de vivre décemment. Il serait d’ailleurs intéressant de savoir combien d’entre eux sont assujettis à l’impôt sur le revenu.

Je souhaite également préciser que le nombre d’heures supplémentaires comptabilisé est également sujet à caution, car le risque d’une fraude concertée entre l’employeur et le salarié est grand : il est en effet plus avantageux de payer au salarié des primes, et de convertir celles-ci en heures supplémentaires non imposables et exonérées de cotisations patronales et salariales. La loi l’interdit certes, mais seules les URSSAF peuvent déceler une telle manœuvre, et ce à condition que des primes aient été versées auparavant.

On a donc vu surgir du néant, dans un premier temps, des heures supplémentaires purement fictives qui ont permis d’alimenter la communication gouvernementale, alors même que la production nationale n’augmentait pas, ce qui offrait l’exemple d’une contradiction insoluble.

Permettez-moi de citer également le rapport d’octobre 2010 du Conseil des prélèvements obligatoires, lequel constitue un véritable réquisitoire contre l’exonération des heures supplémentaires : « La très forte progression du volume d’heures supplémentaires par salarié, de 34, 5 % entre le deuxième trimestre 2007 et le deuxième trimestre 2008, semble notamment peu compatible avec l’évolution de la conjoncture (ralentissement de la croissance en 2008) ».

En 2008, selon le Gouvernement, 750 millions d’heures supplémentaires auraient été effectuées dans le secteur privé par 5, 5 millions de salariés, soit 38 % des salariés à temps complet.

Les auteurs du rapport précité indiquaient cependant que « les entreprises ont recensé avec plus de précision les heures supplémentaires réalisées, alors que les données statistiques sur les heures supplémentaires n’existent que depuis le quatrième trimestre 2007. » Cela sonne comme un aveu !

Dès le premier trimestre de l’année 2009, le nombre d’heures supplémentaires a baissé de 11 % par rapport au dernier trimestre de l’année 2008. À partir de ce moment, il devient curieusement difficile d’obtenir des statistiques…

Le rapport du 6 octobre 2010 du Conseil des prélèvements obligatoires fait encore remarquer que « pour les salariés, la baisse de la fiscalité sur les heures supplémentaires a en principe tendance à encourager l’augmentation de l’offre de travail (incitation financière à travailler). Toutefois, l’incitation à l’accroissement du temps de travail créée par la mesure suppose que l’offre de travail, sous la forme d’heures supplémentaires, ait un impact sur son niveau effectif, ce qui n’est pas garanti. En effet, la baisse de la fiscalité sur les heures supplémentaires comporte un risque de substitution de la rémunération sous forme d’heures supplémentaires à la rémunération sous forme d’heures normales, mutuellement gagnante pour l’employeur et le salarié. Cette substitution peut d’ailleurs se produire par simple réduction de la sous-déclaration des volumes d’heures supplémentaires. La défiscalisation des heures supplémentaires conduit alors à des pratiques d’optimisation visant à maximiser l’assiette exemptée au détriment de l’assiette assujettie. »

Je veux également évoquer les effets négatifs de ce dispositif sur la création d’emplois.

Inutile en période de récession et de chômage élevé, ce dispositif se substitue à des mesures qui pourraient être directement orientées vers le retour à l’emploi, comme des formations ou des contrats aidés.

En période de retour de la croissance, même faible, il freine la création d’emplois, à rebours de l’objectif que devrait poursuivre la politique du Gouvernement.

Aussi la loi TEPA est-elle, selon nous, un mécanisme qui appauvrit la croissance en emplois. Celles de ses dispositions qui sont relatives aux heures supplémentaires constituent de surcroît un encouragement au blocage des salaires, en incitant les employeurs qui le peuvent à proposer des heures supplémentaires à des salariés supposés volontaires, au détriment d’une augmentation collective et négociée des salaires.

La crise de 2008 et la récession consécutive, en rendant inutile le recours aux heures supplémentaires, ont fait échec à l’intention manifeste consistant à individualiser les salaires.

Le mécanisme introduit par la loi TEPA s’applique seulement aux salariés dont la rémunération est inférieure au plafond de la sécurité sociale, c’est-à-dire aux travailleurs qui, parce qu’ils ont le plus besoin d’accroître leurs revenus, peuvent être conduits à accepter des heures supplémentaires pour un bénéfice somme toute modeste, particulièrement s’ils font partie des contribuables exonérés de l’impôt sur le revenu.

Après plusieurs années de blocage des salaires, les revendications portant sur le pouvoir d’achat sont aujourd’hui fortes ; elles s’exaspèrent en raison des difficultés quotidiennes, des informations disponibles sur les revenus considérables des dirigeants de grandes entreprises et du partage inégal des plus-values entre les actionnaires et les salariés.

De plus, comme le fait observer le Conseil des prélèvements obligatoires à propos des salariés qui n’effectuent pas d’heures supplémentaires, « la nécessité de combler la perte pour les finances publiques risque de peser sur leur pouvoir d’achat via des prélèvements obligatoires supplémentaires. »

Au total, pour les salariés concernés par les heures supplémentaires comme pour les autres, le bénéfice résultant du dispositif est largement illusoire, voire négatif.

La loi TEPA prend place dans la guerre de tranchées engagée par le patronat contre les lois de 2000 et 2002 réduisant le temps de travail et fixant à 35 heures la nouvelle durée légale hebdomadaire du travail.

Dans les branches comme dans de nombreuses entreprises, les partenaires sociaux sont parvenus, parfois difficilement, à des accords collectifs acceptables par les deux parties. Sur le terrain, le désir de rouvrir les négociations sur le temps de travail est donc modéré.

C’est pourquoi les gouvernements, soucieux de faire l’économie d’un nouveau grand débat sur ce sujet, ont mis en place, depuis 2004, des dispositifs de contournement utilisables par les employeurs à la demande, et permettant d’accroître la flexibilité du travail en cas d’augmentation de l’activité : il s’est agi d’abord des heures choisies par accord individuel entre l’employeur et le salarié, introduites en 2004, puis de la loi du 20 août 2008.

En autorisant la rémunération des heures supplémentaires au tarif des heures normales, la loi TEPA s’inscrit dans ce processus d’éclatement de la durée du travail. Ses défenseurs font notamment valoir que l’augmentation de la durée du travail, sans augmentation du coût du travail pour l’employeur, contribue à améliorer la compétitivité des entreprises françaises sur le plan international.

Je ne veux pas entrer dans des détails inutiles. Mais il est un fait avéré que l’amélioration de la compétitivité suppose d’agir sur d’autres facteurs, autrement plus importants, comme la recherche et le développement, la réindustrialisation ou la formation des travailleurs, etc.

Rechercher seulement la diminution du coût du travail conduit à des résultats limités, pour au moins deux raisons : la baisse est sans effet sur la nature et la qualité des biens exportés, et elle concerne, de plus en plus, des activités de service pour la plupart inexportables par nature.

En outre, le dispositif va à l’encontre des évolutions souhaitables sur le plan de la protection de la santé et de la sécurité des salariés : ceux-ci, pour gagner davantage, sont obligés de s’exposer à de nouvelles fatigues et à de nouveaux risques.

À cet égard, le dispositif doit être mis en rapport avec le sort réservé à la reconnaissance de la pénibilité, difficilement arrachée au patronat par les syndicats et introduite dans la loi du 9 novembre 2010 sur les retraites : nous voyons là quelle est la réalité de la préoccupation du Gouvernement sur ce sujet…

À propos du coût pour les finances publiques, notamment pour les finances sociales, du dispositif introduit par la loi TEPA dans le domaine des heures supplémentaires, il apparaît que les premières estimations ont vraiment été réalisées « au doigt mouillé »…

La perte de recettes devait être compensée par une augmentation des bénéfices des entreprises et une hausse de la consommation des salariés concernés : la relance de l’économie qui en résulterait devait entraîner une amélioration de l’emploi et des rentrées fiscales.

Ces espoirs ont malheureusement été déçus.

Si les résultats du dispositif ont été nuls, voire négatifs, la contribution de ce dernier au déficit budgétaire s’est révélée en revanche bien réelle.

Le rapport présenté au Parlement par le Gouvernement en janvier 2009 évalue à 0, 15 % l’effet positif de la mesure sur la croissance du PIB, ce qui correspond à un accroissement de 3 milliards d’euros.

Par comparaison, le coût fiscal et social du régime créé par la loi TEPA a été évalué à 4, 4 milliards d’euros en 2009, puis à 4, 1 milliards d’euros en 2010. Il convient d’ajouter à ces montants l’effet mécanique du dispositif sur l’allégement général des cotisations sociales patronales sur les bas salaires dans la limite de 1, 6 fois le SMIC.

Selon le Conseil des prélèvements obligatoires, « l’efficience du dispositif semble très limitée, le gain en PIB étant en tout état de cause inférieur au coût de la mesure. »

En conséquence, le Conseil des prélèvements obligatoires propose la suppression du régime fiscal et social des heures supplémentaires issu de la loi TEPA.

Au total, compte tenu de l’absence de résultats des dispositions de la loi TEPA relatives aux heures supplémentaires, le coût de ces dernières pour les finances de l’État et les finances sociales apparaît totalement disproportionné. À ce seul titre, la loi TEPA constitue l’illustration parfaite d’une mauvaise gestion de l’économie, guidée par des considérations idéologiques et tendant à satisfaire des intérêts particuliers au détriment de l’intérêt général.

Ce dispositif pèse sur les salaires, freine la création d’emplois et coûte plusieurs milliards d’euros aux contribuables : il sert seulement les intérêts des employeurs, aux dépens de ceux de la société.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la lecture du rapport du Conseil des prélèvements obligatoires sur le régime des heures supplémentaires m’a plongé dans le monde des Shadoks : « pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? »

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Certes, le rapport souligne clairement que le dispositif d’exonération des heures supplémentaires présente une efficacité limitée pour un coût élevé.

Mais les trois scenarios décrits par les auteurs du rapport dans leur proposition n° 38 sont d’une complexité qui n’a d’égal que l’opacité de leur style…

Il convient de rappeler le contexte dans lequel ce dispositif a été mis en place : en 2007, l’économie mondiale était euphorique, exaltée par une croissance exceptionnelle qu’alimentait l’appétit insatiable des banques.

Dans son principe, le régime particulier des heures supplémentaires est simple : l’intégralité de la rémunération des heures supplémentaires est exonérée de l’impôt sur le revenu pour les salariés, et de cotisations sociales pour les entreprises.

Imaginé en 2007 dans une période de croissance et consacré par la loi TEPA, ce principe poursuivait à la fois un objectif politique et un objectif économique : augmenter le pouvoir d’achat des salariés en leur permettant de « travailler plus pour gagner plus » et remédier aux conséquences très négatives des 35 heures pour la compétitivité des entreprises et le pouvoir d’achat des salariés.

Cette mesure a permis l’assouplissement du dispositif des 35 heures, dont le coût cumulé depuis 1998 est estimé à 125 milliards d’euros. Elle l’a fait sans modifier la durée légale du travail, permettant aux salariés d’améliorer leur pouvoir d’achat et aux entreprises de mieux amortir leurs équipements.

La crise de septembre 2008 a complètement modifié le contexte international, européen et donc français. Aujourd’hui, après le bouleversement économique et monétaire provoqué par l’ampleur de la crise, un bilan de ce dispositif s’impose.

Soulignons-le, l’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires constitue une niche ; elle entraîne pour l’État une perte de recettes de l’ordre de 4, 1 milliards d’euros.

Mais elle entraîne aussi, pour un contribuable payé au SMIC, le gain d’un treizième mois de salaire et un allégement de charge fiscale d’un montant annuel de 130 euros.

Les entreprises recourent aux heures supplémentaires plutôt qu’elles ne créent des emplois : si donc ce dispositif ne crée pas d’emplois, il est source de pouvoir d’achat.

S’agissant enfin de l’impact de ce dispositif sur la croissance, évalué à 3 milliards d’euros, il est inférieur à son coût, lequel, je le répète, représente une dépense fiscale, et non budgétaire.

Aussi l’efficacité de ce dispositif, qui entraîne un manque à gagner pour l’État au moment où la priorité est d’augmenter les recettes pour réduire les déficits publics, est-elle remise en question.

Assurément, des adaptations sont indispensables. Le Conseil des prélèvements obligatoires envisage trois options.

La première consiste à supprimer le régime des heures supplémentaires ; elle paraît trop radicale, et par conséquent peu vraisemblable, dans la mesure où elle conduirait à mettre en cause tout l’édifice de la loi TEPA.

Je regrette pour ma part que les 35 heures n’aient pas été supprimées ; je peux néanmoins comprendre que les entreprises, encore très fragilisées par la crise, ne souhaitent pas un nouveau bouleversement.

La deuxième option consiste à cibler le dispositif sur les revenus les plus modestes, en supprimant l’exonération d’impôt sur le revenu qui lui est associée. Une telle mesure entraînerait un surcroît de recettes pour l’État d’un montant de 1, 2 milliard d’euros, mais elle conduirait à exclure les classes moyennes du bénéfice du dispositif.

La troisième option, la plus modérée mais aussi la plus confuse, consiste à réintégrer les heures supplémentaires dans le calcul de l’allégement général sur les bas salaires, entraînant 640 millions d’euros d’économies pour l’État.

Les Shadoks ont encore une fois raison : « tout avantage a ses inconvénients et réciproquement. »

Aucun scénario n’a pour l’heure été retenu, mais une approche globale des prélèvements sociaux serait une option à ne pas écarter, malgré sa complexité : plutôt que de considérer seulement l’exonération des heures supplémentaires, ne conviendrait-il pas, en effet, d’envisager une réforme des prélèvements sociaux dans leur ensemble ?

Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement. J’avoue que la lecture des avis de la Cour des comptes m’a plongé dans la plus grande perplexité ; aussi, je serais tenté d’esquiver un choix, alors que j’en perçois mal tous les avantages et tous les inconvénients. C’est la raison pour laquelle je chercherai une échappatoire qui permette de supprimer la dépense fiscale des heures supplémentaires telles qu’elles ont été mises en place par la loi TEPA.

Une TVA anti-délocalisation permettrait, par une baisse des charges salariales et patronales, de conserver leur statut particulier aux heures supplémentaires, qui retrouveraient, espérons-le, toute leur justification dans une reprise qui s’annonce.

Cela permettrait, d’une part, de payer un salaire net supérieur et, d’autre part, de rendre plus compétitifs les produits français, d’inverser ainsi le flux des délocalisations et donc de créer du travail en France.

Comment simplifier un système si complexe dont les conséquences sont difficilement intelligibles, même par les parlementaires, et peut-être aussi par ceux qui l’ont conçu ? En choisissant un concept qui sera compris par tous !

Pour conclure, je m’abriterai, pour masquer ma perplexité, derrière Albert Einstein, qui déclarait : « La chose la plus difficile à comprendre au monde, c’est l’impôt sur le revenu. »

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, quatre ans après l’entrée en vigueur de la loi TEPA, le deuxième dispositif phare de cette loi – après le bouclier fiscal – est aujourd’hui largement critiqué. En effet, la défiscalisation des heures supplémentaires n’a pas eu les effets escomptés par Nicolas Sarkozy, candidat du pouvoir d’achat des salariés grâce au « travailler plus pour gagner plus ».

Pourtant, le Gouvernement nous avait présenté ce dispositif comme une mesure favorable aux salariés. En effet, la loi TEPA instaurait en leur faveur une majoration de 25 % du montant des heures supplémentaires, contre 10 % précédemment.

Cette mesure, destinée à relancer le pouvoir d’achat et la croissance, était accompagnée de dispositions fiscales incitatives pour les entreprises, notamment les PME.

À l’époque, le groupe CRC-SPG et moi-même avions fortement dénoncé ce qui s’annonçait comme une mesure lourde de conséquences pour le budget de l’État et les comptes sociaux. Nous avions également émis de sérieux doutes quant à sa réelle efficacité sur la relance de l’emploi en France.

Dans le cadre du dispositif destiné à relancer le pouvoir d’achat et la croissance, la loi TEPA instaure une exonération d’impôts et de cotisations sociales sur les heures supplémentaires pour les entreprises, la réduction d’impôts et de cotisations sociales prévue s’adressant tant aux entrepreneurs qu’aux salariés.

Le bilan que l’on peut aujourd’hui en tirer pour le budget de l’État est hélas ! celui que nous prédisions.

En effet, la Cour des comptes, dans son rapport annuel de 2010, a chiffré à 4 milliards d’euros « l’incidence », c’est-à-dire le manque à gagner pour l’État en recettes sociales et fiscales, de la mesure d’exonération de cotisations sociales et de défiscalisation des heures supplémentaires : 3 milliards d’euros en moins pour les régimes sociaux et 1 milliard d’euros de recettes fiscales en moins.

Plusieurs économistes, dont Guillaume Duval, ont également mis en accusation un dispositif qui coûte très cher à l’État pour un résultat loin des objectifs affichés par le Gouvernement. M. Duval écrit ceci : « L’État consacre en effet chaque année environ 4 milliards d’euros – 0, 2 % du PIB – pour inciter les salariés et les entreprises à faire des heures supplémentaires plutôt que d’embaucher des jeunes et des chômeurs. Or un emploi coûte en moyenne 40 000 euros par an. Avec ces 4 milliards d’euros, l’État pourrait donc financer entièrement 100 000 emplois supplémentaires. »

Le dispositif de défiscalisation des heures supplémentaires a donc, de toute évidence, creusé le déficit de l’État sans créer une dynamique de relance de l’activité économique, pourtant tant attendue après une période de crise.

Malheureusement, ses conséquences sur les comptes sociaux et sur les créations d’emplois sont tout aussi négatives.

En effet, le supplément de travail créé par les heures supplémentaires a fortement impacté, naturellement, la création de nouveaux emplois. En 2008, les « 727 millions d’heures supplémentaires » enregistrées représentaient « l’équivalent de 466 000 emplois à temps plein ». En 2009, les heures supplémentaires sont retombées à hauteur de « 676 millions », mais cela représenterait encore près de « 434 000 emplois ».

À titre d’exemple, en 2008, alors que les heures supplémentaires augmentaient de 0, 6 %, l’INSEE annonçait un recul du PIB de 0, 3 % au second trimestre de 2008 et la perte de plus de 12 000 emplois dans le secteur concurrentiel, pour la première fois depuis le début de 2004, avec en particulier un recul de 45 000 postes d’intérimaire.

En 2009, avec notamment une baisse historique de 1, 3 % de la masse salariale, les rentrées de cotisations ont fondu de plusieurs milliards d’euros. À l’inverse, 100 000 chômeurs de moins représenteraient 1, 3 milliard d’euros de recettes en plus.

C’est donc en premier lieu d’une inversion de la politique de l’emploi et des salaires dont le financement de la protection sociale a besoin et non d’une politique de défiscalisation du travail et d’exonération de charges sociales.

Il est aberrant que les heures supplémentaires reviennent moins cher aux employeurs que les heures normales travaillées. Il n’est donc pas étonnant que les entreprises recourent aux heures supplémentaires plutôt qu’à la création d’emploi. En pratiquant ce qui s’apparente à de l’optimisation fiscale, elles ont d’ailleurs détruit plus d’emplois qu’elles ne l’auraient fait sans la loi TEPA.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

La défiscalisation des heures supplémentaires entraîne les mêmes effets pervers que les autres exonérations de cotisations sociales. Les salariés et les comptes sociaux sont les grands perdants d’un dispositif qui a d’abord bénéficié aux entreprises, notamment aux plus grosses d’entre elles.

Ainsi, selon l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, 85 % des entreprises de plus de 2 000 salariés ont eu recours à ce dispositif, contre moins du tiers des entreprises de moins de dix salariés.

Sans compter que les heures supplémentaires ont largement servi, dans bien des entreprises, à justifier la modération des augmentations de salaire…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Cependant, les salariés qui ont bénéficié des heures supplémentaires ont-ils réellement travaillé plus ? La réponse est étrangement négative. En effet, le dispositif gouvernemental a constitué une véritable aubaine pour les entreprises, permettant en réalité de légaliser bon nombre de pratiques jusque-là illégales.

Si le nombre d’heures supplémentaires réalisées a été aussi important, c’est essentiellement parce que la loi a conduit les employeurs à déclarer les heures supplémentaires alors effectuées, mais non déclarées.

D’ailleurs, la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, nous mettait en garde contre toute conclusion hâtive en notant que « cette hausse peut refléter pour partie une modification des comportements déclaratifs des entreprises ». Elle explique ainsi que « des travaux d’analyse menés par [elle] montrent que toutes les heures supplémentaires ne sont pas déclarées par les entreprises à l’enquête ACEMO », l’enquête trimestrielle sur l’activité et les conditions d’emploi de la main-d’œuvre.

Elle poursuit : « Il apparaît notamment que les entreprises déclarant une durée hebdomadaire collective de plus de trente-cinq heures omettaient sur les années récentes de déclarer à l’enquête une partie des heures supplémentaires régulièrement travaillées [...]. »

Elle conclut que l’entrée en vigueur de la loi TEPA, avec ses allégements de cotisations sociales, « a vraisemblablement réduit ce biais de sous-déclaration ».

Autrement dit, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, plus qu’une hausse réelle du temps travaillé, le paquet fiscal pourrait bien avoir entraîné un effet d’aubaine pour les entreprises. La fièvre déclarative des entreprises traduisait d’autant moins une augmentation de la production que le niveau de croissance du PIB était plutôt faible.

La situation s’est évidemment dégradée avec la crise financière en 2008, le ralentissement de l’activité économique et la progression du chômage technique qu’elle allait entraîner. Le slogan « travailler plus pour gagner plus » perdait d’un coup de son sens, alors que la question pour les salariés était avant tout de ne pas perdre leur emploi.

La conséquence a été une baisse des heures supplémentaires, qui n’ont d’ailleurs jamais retrouvé leur niveau de départ.

Concrètement, le gain de pouvoir d’achat est limité pour les salariés : en 2009, on estime à 3 milliards d’euros de cotisations sociales et à 1, 3 milliard d’euros d’impôt sur le revenu le gain revenant aux salariés. Mais ces chiffres, rapportés à chaque salarié, démontrent la faiblesse du dispositif, puisque les salariés gagnent en moyenne à peine 550 euros par an en plus, soit la moitié d’un SMIC net.

En conclusion, l’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires se révèle être une mesure néfaste au regard de la situation des comptes publics, de la réalité de la croissance et de l’activité économique, et une mesure catastrophique pour le marché de l’emploi.

C’est la raison pour laquelle les sénateurs du groupe CRC-SPG se prononcent évidemment en faveur de la suppression d’un tel dispositif, en espérant que cet avis soit partagé sur une majorité des travées de cet hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bécot

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le groupe UMP se réjouit de la tenue de ce débat et tient à remercier le groupe de l’Union centriste de son initiative.

Je considère en effet qu’il est nécessaire d’évaluer les politiques que nous mettons en place. L’heure semble désormais être au bilan.

Ce sujet des heures supplémentaires est important, l’exonération fiscale et sociale de ces dernières ayant été la mesure emblématique de la première grande loi du début du quinquennat, la loi TEPA, traduction législative de la promesse de campagne du Président de la République Nicolas Sarkozy.

La valeur travail demeure pour notre groupe une valeur essentielle, une valeur vectrice de cohésion sociale, mais aussi de création de richesses.

L’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires a permis de pallier en partie les effets néfastes des 35 heures pour certaines entreprises en leur donnant la possibilité de diminuer le coût du travail via une déduction forfaitaire de cotisations patronales, pour celles d’entre elles qui ont augmenté la durée de travail de leurs salariés au-delà de la durée légale des 35 heures.

Mais elle a aussi répondu à la problématique du « travailler plus pour gagner plus » en garantissant à ces salariés une augmentation de leurs revenus via une majoration salariale, des exonérations d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales salariales.

Pour les salariés – par exemple, un ouvrier effectuant deux heures supplémentaires par semaine –, ce sont 150 euros de plus par mois. C’est loin d’être négligeable !

En 2008, 9, 4 millions de salariés ont bénéficié de ce dispositif. En 2009, ils étaient 9, 2 millions, malgré les conséquences de la crise économique. En 2010, le nombre semblerait avoir encore progressé.

Pour ce qui concerne la fonction publique d’État, 570 000 fonctionnaires ont bénéficié des heures supplémentaires en 2008, dont 80 % à l’éducation nationale. En 2009, les enseignants ont ainsi bénéficié de 300 millions d’euros de gain des exonérations fiscales et sociales.

Le bilan paraît par conséquent tout à fait positif pour les salariés et les fonctionnaires, et, partant, répond à la promesse de campagne de Nicolas Sarkozy.

Pour les entreprises, cette diminution du coût des heures supplémentaires a été très bénéfique également.

Rappelons que, entre 2000 et 2008, le coût du travail a bien plus progressé en France qu’en Allemagne.

L’assouplissement nécessaire des 35 heures s’est donc concrétisé à travers l’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires, mais a été aussi utilement renforcé en 2008 par la possibilité pour l’employeur de fixer avec les syndicats son propre contingent d’heures.

Pour les finances publiques, le coût de cette mesure est évalué à 4, 4 milliards d’euros en régime de croisière, sur la base d’un volume d’heures supplémentaires de 750 millions et d’un salaire moyen de 1, 25 SMIC.

Ce coût est compensé par affectation directe de recettes fiscales, par exemple la taxe sur les véhicules de société.

Là encore, le bilan est positif. Le coût économique de cette mesure est compensé par un gain de pouvoir d’achat des salariés, qui se traduit par davantage de consommation. La diminution du coût du travail pour les entreprises se traduit par davantage d’investissements et, à moyen terme, d’emplois.

Rappelons-le, lorsqu’une entreprise a recours aux heures supplémentaires, c’est pour répondre à une charge de travail momentanément trop importante. Ces heures supplémentaires lui permettent de satisfaire son client, qui n’hésitera pas alors à la solliciter à nouveau. L’entreprise pourra ainsi accroître son activité et, à terme, créer des emplois. C’est un phénomène important que l’on a souvent tendance à oublier.

Enfin, sachez que, selon un rapport remis au Parlement en janvier 2009, le dispositif d’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires se traduirait par un effet favorable de 0, 15 % sur le PIB.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bécot

Le groupe UMP tire par conséquent un bilan positif du dispositif d’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires et restera attentif à la préservation de la valeur travail, que le Président de la République a su réhabiliter au cours des quatre dernières années.

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, quel est le sens, quatre ans après, de la loi TEPA, que le Parlement a adoptée au cours de l’été 2007 ?

Revaloriser le travail, réconcilier les Français avec le succès et la compétition mondiale, tel était l’objet de cette loi !

Il s’agissait d’un texte de rupture qui mettait fin à des années d’ambiguïté : intellectuelle, d’abord, sur le sens du travail ; morale, ensuite, sur la valeur de l’argent gagné ; économique, enfin, sur l’avenir de la France dans le cadre de la mondialisation. Il convenait de mettre un terme à une période d’enlisement qui avait rendu notre marché du travail de plus en plus rigide et qui avait conduit à déprécier la valeur travail aux yeux de nos concitoyens.

Il fallait avoir le courage, et ce fut le cas de Nicolas Sarkozy, alors candidat à l’élection présidentielle, d’élaborer un programme clair dans lequel étaient levés les tabous de la société française à l’égard du travail et de l’emploi.

Avec énergie, nous avons voulu redonner confiance à nos concitoyens : confiance en eux-mêmes, afin que leur travail soit reconnu à sa juste valeur ; confiance dans les autres, en réduisant certaines pesanteurs ; confiance en l’État, qui est là pour aider nos concitoyens dans le respect de l’intérêt général.

Partant de ce constat et de ces grands principes, le Président de la République a donc proposé, dès août 2007, un projet de loi visant à atteindre un triple objectif : revaloriser le travail, améliorer la croissance potentielle de l’économie et augmenter le pouvoir d’achat des ménages.

La revalorisation du travail était indispensable, la logique qui avait conduit aux 35 heures quelque temps plus tôt étant en effet économiquement absurde.

Soit dit par parenthèse, je rappelle que c’est Dominique Strauss-Kahn qui a « inventé » sur un coin de table les 35 heures qui furent ensuite portées par Mme Aubry.

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

Je m’en souviens parfaitement, car j’étais député à l’époque du débat sur les fameuses « lois Aubry ».

Les 35 heures nous ont en effet plongés, monsieur de Montesquiou, dans le monde des Shadoks : on pensait que, en réduisant la durée du temps de travail, c’est-à-dire en travaillant moins, on accélérerait la croissance et l’on augmenterait la richesse de la nation. C’est naturellement l’inverse qui s’est passé.

Nous vivons dans un monde dans lequel nous sommes confrontés à la concurrence des pays émergents, où les salariés travaillent toujours plus, où les entreprises produisent donc davantage et conquièrent des parts de marché, ce qui contribue à creuser nos déficits.

Voilà l’économie shadokienne inventée par celui qui allait devenir par la suite le directeur général du FMI dans les conditions que l’on sait ! Mais je referme la parenthèse.

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

Cette décision démagogique avait été unanimement dénoncée à l’époque par les économistes du monde entier.

Le temps était venu d’en finir avec le surcroît de complexité dû aux 35 heures. Nous avons donc voulu libérer le travail après l’avoir réhabilité.

Aujourd’hui, chacun, qu’il soit entrepreneur ou salarié, peut adapter son temps de travail à ses besoins professionnels et financiers. Le dispositif que nous avons mis en place, quoi qu’en pense M. Vera, a puissamment aidé la France, dans la période de choc consécutive à la crise, à ajuster l’emploi dans un contexte de contraction très forte de l’économie.

Avant de partager les richesses, il faut les produire. Depuis la loi TEPA, ceux qui veulent travailler plus peuvent en effet gagner plus, monsieur Vera. Allez donc expliquer aux salariés, y compris aux enseignants, qui sont parmi les grands bénéficiaires de cette loi, qui ont perçu entre 500 et 600 euros de plus par an, pourquoi ils devraient y renoncer !

En accroissant l’offre de travail, la loi TEPA contribue également à augmenter la production, donc la croissance potentielle de l’économie française. Dans le rapport remis au Parlement en janvier 2009, l’impact de la mesure d’exonération des heures supplémentaires a même été réévalué, Mme Cros l’a rappelé, à 0, 15 point du PIB, ce qui n’est pas négligeable.

Certes, la mise en œuvre du dispositif a été ensuite fortement perturbée par la crise internationale. De l’ordre de 730 millions en 2007 et en 2008, le volume d’heures supplémentaires mesuré a chuté à 680 millions en 2009, avec le fort ralentissement de l’économie, avant de remonter à 700 millions en 2010.

Il n’est pas étonnant que les entreprises aient eu moins recours que prévu aux heures supplémentaires en 2008 et en 2009. Dois-je rappeler que la crise a provoqué la destruction de 330 000 emplois en France ? Il ne faut donc pas faire le procès des heures supplémentaires et les accuser d’être responsables d’une situation due à la crise.

La situation économique s’est fort heureusement améliorée à partir de 2010 et l’activité continue de s’accélérer en ce début d’année, comme en témoigne la forte croissance de 1 % que nous avons enregistrée au premier trimestre de 2011.

Ce chiffre s’inscrit dans la suite logique des bonnes nouvelles de ces derniers mois : les créations d’emplois ont été plus importantes que prévues en 2010, à savoir 125 000 au lieu des 80 000 attendus au moment du projet de loi de finances, et 58 000 emplois supplémentaires ont été créés au premier trimestre de cette année ; la croissance de la production industrielle a atteint son plus haut niveau depuis trente ans, en progression de 3, 4 % au premier trimestre ; la consommation des ménages reste bien orientée – 0, 6 % au premier trimestre – malgré l’extinction du dispositif de la prime à la casse sur les automobiles à la fin de 2010 ; enfin, l’investissement des entreprises repart à la hausse, avec un gain de 1, 9 % au premier trimestre.

Ces nouvelles devraient tous nous réjouir, tout comme l’annonce faite hier par l’OCDE d’une croissance estimée à 2, 2 % pour la France en 2011.

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

Dans un contexte de post-crise très violent, cela est extrêmement positif !

Nous devrions plutôt travailler ensemble au relèvement de notre économie au lieu de dire « on en reparlera » ! Évitons de céder, par habitude, au scepticisme et à la division entre Gaulois. Le moment est venu de nous unir, en dépit des échéances électorales à venir.

Pour répondre à la demande de bilan formulée par Mme Cros et le groupe de l’Union centriste, je dirais que le cycle économique est désormais plus favorable à l’évaluation du dispositif. D’ores et déjà, nous constatons une augmentation significative du volume des heures supplémentaires, avec une hausse, au premier trimestre de 2011, de 4, 6 % sur un an. Cette augmentation s’accompagne d’une amélioration substantielle du marché de l’emploi avec 58 800 créations nettes d’emplois pendant la même période.

Les chiffres le prouvent : on peut, contrairement à ce qui a été déclaré, augmenter à la fois le nombre d’heures supplémentaires et le nombre d’emplois créés.

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

En ce qui concerne le pouvoir d’achat, le dispositif de la loi TEPA a montré son efficacité dès 2008. Cette année-là, ce sont 9, 4 millions de salariés – un quart des ménages français – qui ont bénéficié des allégements de charges sociales et des exonérations d’impôt sur le revenu sur les heures supplémentaires, soit une amélioration de revenu moyenne de 450 euros par ménage.

Je suis curieux de savoir comment ceux qui trouvent que ce n’est pas assez, ou que c’est trop, comptent expliquer à ces 10 millions de ménages qu’ils vont les priver du bénéfice de ces 500 euros.

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

D’aucuns ont qualifié ce dispositif de cadeau aux entreprises. Sur ce point, les chiffres publiés cette semaine par la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, apportent un démenti catégorique : en 2010, 80 % des allégements de cotisations sociales prévus par la loi TEPA ont bénéficié aux salariés, et pas aux entreprises.

Cette mesure a donc clairement contribué à soutenir le pouvoir d’achat des Français pendant la période troublée de la crise. Le résultat est là, malgré l’ampleur du choc qui a incontestablement perturbé la mise en application de la loi TEPA.

Fait remarquable, le pouvoir d’achat des ménages a continué à augmenter, …

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

… de même que leurs dépenses de consommation. Cela a préparé le pays à sortir de la crise par le haut avec une création nette d’emplois et un redémarrage de l’activité.

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

Je voudrais par ailleurs préciser que le dispositif a pesé moins que prévu sur nos finances publiques, contrairement à ce que disait un autre procès qui nous a été intenté ce matin.

En 2010, le coût net du dispositif pour l’État a été évalué à 4, 8 milliards d’euros, contre 6 milliards d’euros prévus lors de l’examen du projet de loi. L’écart provient d’une surestimation ex ante du volume d’heures supplémentaires effectuées.

Nous avons ainsi démontré que les heures supplémentaires ne sont pas préjudiciables à l’emploi, bien au contraire. Il faut donc cesser de penser l’économie à la manière des Shadoks.

MM. Aymeri de Montesquiou et Michel Bécot sourient.

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

Je vous demande de ne plus vous référer au raisonnement sur lequel se fondaient les 35 heures. Il fut dévastateur à l’époque et il n’augurerait rien de bon pour le débat politique de l’année prochaine.

Monsieur Courteau, affirmer que les heures supplémentaires ont « économisé » des embauches, …

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

… c’est ne rien comprendre au fonctionnement d’une entreprise.

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

Il faut ne jamais être entré dans une entreprise de sa vie pour soutenir que le chef d’entreprise a le choix entre demander à ses salariés d’effectuer des heures supplémentaires ou embaucher.

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

Parler économie en continuant à opposer heures supplémentaires et créations d’emplois, c’est dramatique. C’est ne pas savoir ce qu’est un carnet de commandes, c’est ne rien comprendre au rôle d’un donneur d’ordre. Comme si le job d’un patron consistait à tuer l’emploi, et son entreprise par la même occasion. Dans quel pays vivez-vous, monsieur Courteau ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Pendant qu’un patron crée des heures supplémentaires, il ne crée pas d’emploi : c’est aussi simple que cela !

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

Je sillonne nos régions chaque semaine. Je me bats également sur les marchés internationaux. Je peux vous dire que j’y rencontre des patrons qui défendent leur entreprise. Or non seulement ils recourent aux heures supplémentaires, mais ils embauchent également. Cessez donc d’opposer les unes aux autres !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

C’est vous qui ne comprenez rien ou qui ne voulez rien comprendre !

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

Prétendre qu’il faut partager le nombre d’heures travaillées, c’est être à côté de la plaque.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

C’est vous qui êtes à côté de la plaque !

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

Si telle est votre analyse du marché de l’emploi, …

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

… cela promet pour la prochaine campagne présidentielle. Nous attendons ce débat avec beaucoup d’intérêt !

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

C’est ce que je fais ! Il est très étonnant que vous en soyez resté à une vision caricaturale, shadokienne de l’économie.

M. Vera est même allé jusqu’à prétendre que les heures supplémentaires avaient permis d’arrêter de masquer des heures non déclarées. Là aussi, nous sommes dans l’économie vue par les Shadoks. Arrêtez de considérer que les chefs d’entreprise, surtout ceux qui dirigent des petites et moyennes entreprises, ne cherchent qu’à violer la loi ! Cessez d’instaurer ce climat de défiance !

Nous sommes dans une économie ouverte, en compétition avec le reste du monde. Notre intérêt est d’aider les entreprises à créer des emplois et non de multiplier les obstacles.

Cette loi a libéré de l’énergie, elle a permis aux Français de travailler plus, de gagner un peu plus, et à la France de résister à la crise la plus grave depuis quatre-vingts ans.

Debut de section - Permalien
Pierre Lellouche, secrétaire d'État

Je souhaite que ce soit sur cette base que nous fassions tous notre analyse.

J’aurais évidemment préféré que cette crise phénoménale ne soit jamais survenue. Reste que, à l’heure où la France redémarre, chacun voit bien que la réduction des charges sur les heures supplémentaires, la possibilité de travailler plus, de gagner plus et de créer des emplois sont compatibles.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Nous en avons terminé avec le débat sur le bilan du dispositif d’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Je rappelle que la commission des finances a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Jean-Jacques Jégou membre du comité de surveillance de la Caisse d’amortissement de la dette sociale.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix heures quinze, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Raffarin.