La présidente Annie David étant retenue par la commission mixte paritaire, en cours, sur le projet de loi « médicaments », je vous propose, Monsieur le ministre, d'examiner d'abord les crédits de la mission « Travail et emploi », avant d'aborder la mission « Santé », dont vous avez également la responsabilité.
Le projet de loi de finances pour 2012 est discuté dans un contexte très particulier, marqué par la crise des dettes souveraines, qui intervient à la suite de la grave crise économique que nous avons déjà connue en 2009.
Le budget du travail et de l'emploi contribue à l'effort de réduction des déficits publics. Les crédits avaient fortement augmenté en 2009 et en 2010, sous l'effet du plan de relance, ce qui explique, pour une grande part, la forte baisse constatée en 2012. Les mesures d'économie votées dans la loi de finances pour 2011, notamment celles qui touchent les services à la personne et la restauration, produisent également leurs effets cette année et entraînent une diminution des dépenses de l'ordre de 300 millions d'euros. Enfin, l'extinction de dispositifs de préretraite, la suppression de l'allocation équivalent retraite (AER) et de l'allocation en faveur des demandeurs d'emploi en formation (Afdef), entraînent mécaniquement une réduction des dépenses de 250 millions.
La baisse des crédits, à hauteur de 1,2 milliard, est donc la conséquence de décisions prises antérieurement. Elle n'empêchera pas le Gouvernement de mettre en oeuvre ses priorités en matière d'emploi et de formation.
Les mesures prises ces derniers mois, à commencer par le relèvement du quota d'apprentis dans les entreprises de plus de 250 salariés, ont permis de faire augmenter le nombre de jeunes formés en alternance de 5,5 % depuis le début de l'année. Le nombre de demandeurs d'emploi de moins de vingt-cinq ans a diminué de 2 % au cours de l'année écoulée, ce qui n'est pas un résultat spectaculaire mais marque néanmoins une tendance positive.
Les crédits alloués aux missions locales, au fonds pour l'insertion professionnelle des jeunes et aux écoles de la deuxième chance sont maintenus.
Le nombre de contrats aidés sera stabilisé, étant entendu que le recours à ces contrats ne me pose aucun problème de principe et qu'il faut savoir faire preuve de pragmatisme en ce domaine. Les contrats aidés permettent de remettre le pied à l'étrier à des chômeurs de longue durée. Leurs titulaires doivent bénéficier d'une formation dès le premier jour. Je souhaite également mobiliser les conseils généraux pour favoriser l'embauche en contrats aidés de titulaires du revenu de solidarité active (RSA).
Un effort important sera réalisé, en 2012, en direction des personnes handicapées puisque mille aides au poste supplémentaires vont être financées dans les entreprises adaptées.
Nous avons besoin d'un service public de l'emploi efficace pour assurer la transparence du marché du travail. De nouvelles orientations vont être données à Pôle emploi pour les trois ans à venir, avec l'objectif d'offrir un service personnalisé aux demandeurs d'emploi et de rendre l'institution plus réactive. Deux mille postes vont être redéployés des fonctions support vers l'accompagnement des demandeurs d'emploi.
J'ai quelques questions à vous poser, en ma qualité de rapporteur pour avis, sur les crédits de la mission.
J'aimerais d'abord savoir si, compte tenu du contexte de crise que vous nous avez rappelé, l'objectif de ramener le taux de chômage sous la barre des 9 % d'ici la fin de l'année est toujours d'actualité.
Ensuite, quelles sont les intentions du Gouvernement concernant les maisons de l'emploi, qui voient leur dotation diminuer fortement pour la deuxième année consécutive ?
Quel bilan faites-vous de la mise en oeuvre du contrat d'autonomie, dont le rapport coût-efficacité a été critiqué par nos collègues députés ?
Pourquoi le Gouvernement a-t-il décidé la suppression de l'allocation spéciale du fonds national de l'emploi (ASFNE) ? Les dispositifs de préretraite ne conservent-ils pas une utilité alors que l'âge de départ à la retraite est reporté ?
L'an dernier, le Gouvernement avait justifié le prélèvement de 300 millions sur le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) en expliquant que la montée en charge du fonds était progressive et qu'il disposait donc de ressources inemployées. Comment justifiez-vous le prélèvement proposé cette année ?
Enfin, alors que le développement de la formation professionnelle est une priorité du Gouvernement, l'Etat ne devrait-il pas apporter un soutien accru à l'association pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) ?
Si je connaissais avec certitude le taux de croissance, je pourrais répondre plus précisément à votre première question. Il est certain, en tout cas, que nous ne restons passifs devant la situation de l'emploi. J'ai décidé de mobiliser les préfets de région pour qu'ils agissent au plus près du terrain et j'ai sollicité les conseils généraux pour qu'ils signent plus d'emplois aidés pour les titulaires du RSA. Nous nous battons pour développer les formations en alternance. Je suis également attentif au problème de l'adéquation entre offres et demandes d'emploi : nous savons qu'il existe des secteurs en tension et des offres non pourvues. La progression de 12 %, depuis un an, du nombre d'offres d'emploi pourvues montre néanmoins qu'il est possible d'obtenir des résultats en ce domaine.
Concernant les maisons de l'emploi, je rappelle que l'Assemblée nationale a augmenté les crédits qui leur sont alloués à hauteur de 15 millions d'euros. Nous sommes attentifs à cette demande des parlementaires, même si le gage qui a été retenu pour compenser cette dépense nous pose une difficulté. En tant que maire, je suis attaché aux maisons de l'emploi qui ont été créées pour permettre aux élus d'avoir des informations que Pôle emploi ne leur communiquait pas toujours. Maintenant qu'elles ont été mises en place, il ne paraît pas illégitime de vouloir réduire la voilure. Les crédits sont en effet attribués sur la base d'un nouveau cahier des charges et le rapprochement des maisons de l'emploi avec d'autres structures permet de réaliser des économies. En outre, les investissements qui ont dû être effectués au moment de leur création ne sont plus nécessaires aujourd'hui. Les maisons de l'emploi sont en train de trouver leur rythme de croisière et il n'est pas justifié de parler de désengagement de l'Etat alors que celui-ci apporte encore 70 % de leur financement.
En un an, j'ai fait évoluer la politique de l'emploi, qui était auparavant exclusivement centrée sur Pôle emploi. Pour moi, l'essentiel est de ramener les gens au travail, peu importe que ce soit Pôle emploi, la maison de l'emploi ou une mission locale qui y parvienne. Il faut tenir compte des différences entre les bassins d'emploi et réduire les écarts de dotations entre les maisons de l'emploi, qui pouvaient varier dans un rapport de un à vingt.
Le contrat d'autonomie est souvent décrié en raison de son rapport coût-efficacité, qui serait insuffisant. J'observe cependant que le taux de sortie positive des jeunes passés par ce contrat est de 42 %, ce qui est non négligeable, et que ce taux augmente régulièrement, malgré la crise. Nous avons fait le choix de recentrer le dispositif sur les douze départements qui enregistrent les meilleurs résultats et sur les quartiers où le chômage des jeunes est le plus élevé. Je ne souhaite pas casser la dynamique des missions locales qui mettent en oeuvre le contrat d'autonomie.
Concernant l'ASFNE, je rappelle qu'il s'agit du dernier dispositif de préretraite publique non ciblé encore en vigueur. Sa suppression est cohérente avec la politique menée en faveur de l'emploi des seniors depuis plusieurs années. Elle est justifiée aussi par les difficultés de gestion que pose cette allocation du fait du faible nombre d'entrées dans le dispositif. Son maintien fait naître de faux espoirs chez les salariés et il est difficile de respecter l'égalité de traitement entre les salariés licenciés pour motif économique dans la mesure où le versement de l'allocation est soumis à des considérations d'espèce. J'ajoute que le contrat de sécurisation des parcours professionnels (CSP) apporte une réponse plus globale et adaptée à ces salariés et que les titulaires actuels de l'allocation continueront naturellement à la percevoir.
Au sujet du FPSPP, je dirai simplement qu'il n'est pas utile, dans la situation budgétaire actuelle, de laisser subsister d'importantes trésoreries dormantes. Je salue le sens des responsabilités des partenaires sociaux qui jouent le jeu, alors qu'ils auraient pu claquer la porte pour marquer leur mauvaise humeur. J'ajoute que les partenaires sociaux ont décidé d'appeler un taux de contribution de 10 % en 2012, soit un niveau inférieur au maximum prévu par la loi.
S'agissant de l'Afpa, je rappelle qu'un marché public a été passé avec l'Etat pour la mise en oeuvre de prestations d'accompagnement de publics ciblés (travailleurs handicapés ressortissants d'outre mer, détenus, militaires en reconversion). L'Afpa reste compétente pour l'activité de certification et elle touche, à ce titre, une contribution de 50 millions d'euros versée par le FPSPP. Des baux emphytéotiques vont être signés avec l'Afpa pour l'aider à gérer dans la durée son patrimoine immobilier. Je n'ignore pas les inquiétudes des personnels mais je pense que la situation évolue positivement, étant entendu que ce sont désormais les régions qui financent la plus grande partie des achats de formation.
Je voudrais savoir si le Gouvernement compte remplacer l'AER par un dispositif comparable. A défaut, un certain nombre de titulaires du RSA vont percevoir plus longtemps cette allocation, du fait du report programmé de l'âge de départ en retraite, alors que les conseils généraux, qui en ont la charge, sont déjà confrontés à une situation financière tendue.
Le ministre a l'air de considérer que tout va bien à Pôle emploi. Mais alors, dans ce cas, comment expliquer le mouvement de grève de lundi ?
Tous les agents n'étaient pas en grève, loin de là : seuls 6,5 % d'entre eux ont pris part à ce mouvement social.
Comment procéderez-vous au redéploiement, que vous avez annoncé, de deux mille agents en équivalent temps plein à Pôle emploi ?
Certaines villes ont un taux de chômage des jeunes plus élevé que la moyenne. A Mulhouse, il atteint par exemple 29 %. Que comptez-vous faire pour résoudre ce problème ?
Je regrette que les titulaires du RSA bénéficient d'un suivi insuffisant de la part de Pôle emploi. Un accompagnement personnalisé est indispensable pour les aider à se réinsérer professionnellement. Or vous semblez minimiser les difficultés que rencontre aujourd'hui Pôle emploi et qui l'empêchent d'assumer convenablement ses missions.
Je suis heureux que le ministre porte un jugement positif sur les contrats aidés. Ses déclarations contrastent avec le discours habituel du Gouvernement qui les assimile à de l'assistanat... J'observe cependant que les crédits consacrés aux contrats aidés sont en baisse sensible dans ce projet de budget et que l'on va demander aux départements de prendre en charge une part plus importante du coût des contrats d'accompagnement vers l'emploi (CAE). Quand cesserez-vous d'afficher ainsi vos certitudes, Monsieur le ministre ?
J'ai appris à vous connaître lors de la grave crise sanitaire causée à la Réunion par le chikungunya, en 2006, et je peux vous dire que j'ai été ébranlé de constater, à l'époque, qu'aucune leçon n'avait été tirée des défaillances de l'institut national de veille sanitaire (InVS) en 2003.
Je suis allé au moins six fois à la Réunion. J'ai mis en place des moyens massifs pour la prévention, qui ont permis d'éviter le retour du chikungunya l'année suivante. Et vous oubliez de rappeler que le virus a muté !
Les moyens amenés de métropole ont permis d'éviter l'effondrement du système sanitaire à la Réunion, vous le savez. Et j'ai été un des premiers à mettre en doute les affirmations des scientifiques selon lesquelles la maladie n'était pas mortelle. Je n'accepte pas que vous laissiez entendre que nous n'avons pas tiré toutes les leçons de cette crise.
Vous avez définitivement l'ADN de la certitude, Monsieur le ministre...
Comme vous, je considère que les contrats aidés ont toute leur utilité. Vous avez indiqué qu'il fallait avoir l'obsession de la formation. Mais ne risque-t-on pas d'orienter certains titulaires de contrats aidés vers des formations sans débouchés ? Par ailleurs, comment régler les problèmes de mobilité en milieu rural ? Enfin, Nicolas Sarkozy a indiqué qu'il souhaitait que tous les titulaires du RSA travaillent sept heures par semaine : selon quelles modalités pensez-vous mettre en oeuvre cette mesure ?
Concernant l'AER, je rappelle qu'une allocation transitoire de solidarité (ATS), d'un montant identique, a été créée pour prendre en compte la situation particulière des demandeurs d'emploi qui étaient indemnisés par l'assurance chômage à la date du 10 novembre 2010. Si nous ne l'avions pas fait, nous aurions créé une injustice. L'ATS devrait bénéficier à 11 000 personnes et coûter 40 millions d'euros. Elle sera financée par redéploiement de crédits : un certain nombre de bénéficiaires de l'ASS vont désormais percevoir l'ATS, ce qui nous permettra de disposer d'une marge de manoeuvre sur le plan financier.
Mais nous voulons surtout créer les conditions d'un retour au plein emploi. On ne peut pas s'habituer à avoir un taux de chômage à 9 % dans notre pays. Le RSA doit contribuer à traiter le problème du chômage. La campagne présidentielle donnera l'occasion de comparer les propositions des uns et des autres sur ce sujet.
Sur Pôle emploi, j'ai une stratégie d'action par bassin d'emploi. On n'a pas besoin du même accompagnement selon que l'on est un chômeur de longue durée ou un jeune à la recherche de son premier emploi. Les sous-préfets sont chargés d'animer le service public de l'emploi local, au plus près du terrain. Les deux mille postes qui vont être redéployés à Pôle emploi proviendront des fonctions support et du redimensionnement des services aux entreprises. Cela va permettre d'augmenter de 40 % les moyens consacrés à l'accompagnement.
Pôle emploi a réussi à faire face à la montée du chômage et à verser les indemnisations sans retard. Mais le travail des agents manque de souplesse : la durée des entretiens est de trente minutes, or certains demandeurs d'emploi ont besoin d'un rendez-vous plus long. Par ailleurs, les agents assument trop de charges administratives et ont trop d'indicateurs de suivi à renseigner. Après une période de centralisation nécessaire pour réaliser la fusion, il faut également donner plus de pouvoirs aux agences locales, notamment en matière de formation, actuellement gérée par les directions régionales, afin de raccourcir les circuits de décision. En 2011, nous allons ouvrir 145 000 entrées en formation, dont certaines préparent directement à une embauche. Les formations prescrites par Pôle emploi doivent notamment permettre de répondre aux besoins des métiers en tension.
Jamais je n'ai critiqué les contrats aidés et je vous mets au défi de trouver une seule déclaration en ce sens de ma part...
Vous n'êtes pas solidaire de votre Gouvernement dans ce cas ! Je pourrais citer des dizaines de déclarations de vos collègues qui assimilent les contrats aidés à de l'assistanat...Même sur ce sujet, vous polémiquez et affichez vos certitudes !
Je suis tentée de répondre à mon collègue que si certains ont l'ADN de la certitude, d'autres ont celui de la mauvaise foi !
Sur le cofinancement des contrats aidés par les conseils généraux, je souligne que la dépense obligatoire à la charge d'un département, au titre du versement du RSA à une personne seule, s'élève à 467 euros par mois, tandis que la dépense est seulement de 411 euros en cas de cofinancement d'un contrat aidé. Dans ces conditions, on ne peut pas parler de désengagement de l'Etat. Quand les conseils généraux cofinancent un contrat aidé, ils viennent en aide à une personne au chômage et réalisent une économie.
En ce qui concerne les sept heures de travail pour les titulaires du RSA, je précise que cette mesure sera d'abord mise en oeuvre dans dix départements volontaires. Elle vise à redonner à ces personnes l'habitude du travail pour qu'elles retrouvent ensuite le chemin de l'insertion professionnelle. De cette manière, nous les aiderons à se resocialiser et à sortir du chômage de longue durée.
Je note avec satisfaction que les orientations retenues pour Pôle emploi rejoignent les préconisations du rapport de la mission d'information sénatoriale sur Pôle emploi que nous avons adopté il y a quelques mois.
Je me souviens que vous m'aviez auditionné à l'époque. J'ai fait de nombreuses réunions de travail sur le terrain qui m'ont aidé à concevoir une « feuille de route » consensuelle pour Pôle emploi.
- Présidence de Mme Annie David, présidente -
S'agissant des crédits de la mission « Santé » dans le projet de loi de finances pour 2012, ils s'élèvent à près de 1,4 milliard d'euros contre 1,2 milliard en 2011. Leur progression est conforme à la programmation pluriannuelle votée par le Parlement à laquelle s'ajoute une dotation nouvelle de 150 millions d'euros à l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) à la suite de l'affaire du Mediator. Le budget de l'Afssaps augmente ainsi de 40 millions et bénéficiera de quarante nouveaux postes en 2012 et en 2013. Nous avons fait le choix d'une parfaite étanchéité des ressources de l'agence par rapport à l'industrie pharmaceutique et je pense que c'est une bonne chose. Mais j'appelle les parlementaires à la vigilance. Il ne faut pas que dans les prochaines années, le budget de l'Afssaps devienne une variable d'ajustement du budget. Ce serait plus qu'une erreur, ce serait une faute car il s'agit des crédits de la sécurité sanitaire.
Par ailleurs, l'Afssaps, comme toutes les agences, s'est engagée dans un processus de rationalisation de ses coûts.
J'ai plusieurs questions à vous poser.
- Pourquoi l'augmentation des besoins de l'ex-Afssaps a-t-elle été évaluée à 40 millions d'euros ?
- Pourquoi le Gouvernement est-il opposé à la mise en place d'une contribution de l'industrie cosmétique pour la rémunération de la cosmétovigilance assurée par l'ex-Afssaps ?
- Quelles suites le Gouvernement entend-il donner au rapport de la Cour des comptes sur la politique de prévention en matière de santé, remis à la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) de l'Assemblée nationale, qui dresse un constat sévère sur le manque de coordination des actions menées ?
- Quel constat le Gouvernement fait-il sur l'évolution des inégalités géographiques et sociales de santé ?
- Quel bilan dressez-vous des restrictions apportées à l'aide médicale d'Etat (AME) dans la loi de finances pour 2011 ?
- Le droit de timbre de 30 euros mis en place à cette occasion a-t-il pour but de restreindre le nombre des titulaires de l'aide ?
- Pouvez-vous nous présenter le mécanisme destiné à couvrir le défaut d'assurance de certains médecins spécialistes tel qu'il figure à l'article 60 du présent projet de loi de finances ?
S'agissant de l'augmentation du budget de l'Afssaps de 40 millions d'euros, ce montant a été élaboré en concertation avec le directeur de l'agence, Dominique Maraninchi. Il couvre plusieurs postes, et tout d'abord le recrutement d'experts indépendants et la possibilité de leur offrir une progression de carrière. C'est plus important que de créer un corps de super-experts comme le recommandait le rapport Even-Debré. Ces fonds permettront également, en matière de pharmacovigilance de matériovigilance et de pharmaco-épidémiologie, de couvrir une augmentation de la masse salariale, les frais d'achat de nouveaux instruments et les frais d'investissements. Tout ceci a fait l'objet d'un calibrage détaillé.
Je pense néanmoins qu'il faudra faire une évaluation complète dans deux ou trois ans car je ne prétends pas avoir la science infuse.
S'agissant de la taxe sur l'industrie cosmétique, je vous rappelle que Nora Berra a donné un avis favorable à l'amendement présenté par Alain Milon sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012.
Vous abordez aussi la question tant débattue de l'AME. Je n'ai pas l'intention d'assister passivement à l'augmentation des dépenses qui lui sont consacrées. Notre but est de mettre en place une bonne gestion de l'aide mais sans réduction de l'accès aux soins.
S'agissant des réformes adoptées l'année dernière par le Parlement, les nouvelles conditions sont entrées en vigueur avec le décret du 17 octobre dernier et il est donc trop tôt pour en tirer un bilan. Je souligne simplement que la procréation médicale assistée et le thermalisme ont été retirés du panier de soins ouvert aux titulaires de l'AME car la réalité est qu'ils y figuraient.
Je souligne également que l'accès à l'AME se fait dans le respect de la décision du Conseil constitutionnel du 28 décembre 2010 qui a prévu que les contrôles préalables à l'ouverture des droits ne devaient pas se faire dans des délais susceptibles de porter atteinte à la santé des personnes. Les contrôles seront effectués sous quinze jours, à défaut de quoi la décision de la caisse sera réputée favorable.
Pour moi, le droit de timbre ne pose pas de difficulté sur le terrain. Vous imaginez l'emballement médiatique s'il en créait, et les associations avec lesquelles nous travaillons ne nous ont pas alertés sur ce sujet.
S'agissant du nombre de titulaires, on note une quasi-stabilisation au premier semestre 2011 mais il est difficile de dire si cela est lié au droit de timbre qui n'a été mis en place qu'au 1er mars. Nous effectuerons un suivi détaillé pour savoir si des personnes éligibles n'ont pu avoir accès à l'aide en raison du droit de timbre. A ce stade, la stabilisation du nombre de titulaires me paraît une bonne chose.
Concernant l'article 60 du projet de loi de finances pour 2012, il s'agit de la responsabilité civile médicale. La question avait été réglée à l'occasion de la proposition de loi Fourcade mais des parlementaires ont choisi de déférer ce texte devant le Conseil constitutionnel et la disposition a été annulée. Cela a créé une grande inquiétude chez les professionnels, alors que le Conseil s'est alors prononcé sur des raisons de forme, liées au caractère de « cavalier » de cette mesure, et pas de fond.
Concrètement, nous mettons en place un mécanisme de garantie avec un seuil qui passe de 3 à 8 millions d'euros. Je vous signale que le sinistre le plus important prononcé par les juridictions est de 7 millions d'euros et concerne d'ailleurs un généraliste. Je pense que l'article 60 apporte une solution durable aux problèmes que rencontrent les professionnels en matière de responsabilité.
Je vais tout d'abord vous donner les chiffres du conseil national de l'ordre des médecins. Cette année, il y a eu 9 % d'installations de professionnels en zone rurale de plus que de départs. C'est une bonne nouvelle et c'est peut-être pour cela que l'on n'en parle pas. Nous avons par ailleurs deux cent trente maisons de santé pluridisciplinaires qui fonctionnent à travers la France.
Pour moi, elles apportent la meilleure réponse. La région de France qui a le moins de médecins est, je le dis sous le contrôle d'Yves Daudigny et de Caroline Cayeux, la Picardie. Pourquoi ? Parce qu'elle est à proximité de très grandes régions. Il faut donc trouver des solutions adaptées aux réalités de terrain. Pour moi, ce sont les incitations, les contrats de service public et les maisons de santé qui fonctionnent, et pas les mesures coercitives. Dans le cadre de la stratégie nationale de santé que nous avons élaborée pour la période 2011-2015, nous continuerons à avoir des résultats.
Mme Claire-Lise Campion. - Ce sont les collectivités locales qui financent les maisons de santé.
Je n'ai jamais dit que les maisons de santé étaient uniquement financées par l'Etat. Je pense que l'Etat et les collectivités locales ont intérêt à travailler ensemble.
S'agissant du rapport de la Cour des comptes sur la politique de prévention, certes, il y a des problèmes de coordination mais pour moi, la question fondamentale est celle de la volonté politique. Je crois profondément en la politique de santé, et particulièrement en ce qui concerne la prévention. J'ai mis en place deux programmes importants et efficaces : M'T dents et l'ostéodensitométrie. Mais qui peut dire combien ces programmes ont permis d'économiser en matière de soins ? La réalité est que notre système curatif est l'un des meilleurs du monde mais qu'il est insuffisamment préventif.
Il faut parvenir à faire des investissements malgré des budgets restreints, fixer des objectifs atteignables et mobiliser les acteurs. Avec la fixation des objectifs nationaux et le rôle des agences régionales de santé (ARS), je pense que nous y parviendrons. J'ai chargé le directeur national de la santé d'avoir un regard particulier sur cette question. Comme le recommande la Cour des comptes, je suis favorable à ce qu'il devienne également délégué interministériel de la santé.
Vous parlez des ARS. Elles pilotent désormais les programmes interdépartementaux d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie (Priac). Des priorités sont fixées mais elles ne sont pas financées. On a donc un décalage entre ce qui a été déterminé comme priorité sur le terrain et le financement.
La question des Priac n'est pas de ma compétence mais de celle de Roselyne Bachelot-Narquin. Je livre néanmoins ceci à votre réflexion : qui retarde la mise en oeuvre des Priac ? Les départements et les ARS ont tendance à se renvoyer la balle et c'est pour cela que les projets attendent.
Vous avez décidé de mettre en place une quatrième journée de carence pour les indemnités journalières. Or, nous allons rentrer dans une période d'épidémie grippale. Cela ne va-t-il pas pousser les personnes malades à adopter des comportements à risques en reprenant le travail trop tôt au risque de contaminer leurs collègues ?
Je ne partage pas du tout votre discours. Les personnes qui sont malades se mettent en arrêt maladie et ne vont pas travailler. Vous semblez suggérer qu'il faudrait qu'elles se mettent en arrêt maladie à titre préventif. Ceci étant, s'agissant du délai de carence, de nombreuses entreprises - je n'ai pas dit toutes les entreprises - le prennent en charge.
Il ne faut pas se voiler la face sur les arrêts de travail abusifs. Selon les médecins-conseil de la sécurité sociale, qui sont d'abord des médecins, cela concerne 10 % à 15 % des arrêts pour longue maladie.
J'ai eu l'occasion, dans le cadre de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, d'établir un rapport sur le lien entre santé et territoire et j'ai été frappée par l'intérêt de la télémédecine. Par ailleurs, les médecins font des études longues et il nous a paru intéressant qu'on puisse intégrer à leur cursus un an de stage en médecine de ville dans les zones sous-dotées.
C'est effectivement une idée intéressante pour améliorer l'accès aux soins dans les zones sensibles, et pas seulement dans les zones rurales. Un contact précoce avec le terrain est nécessaire pour favoriser l'implantation des médecins dans les zones sous-dotées. Nous sommes en train d'élaborer des maquettes nécessaires avec le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Sur la télémédecine, il faut qu'il y ait effectivement un médecin de l'autre côté de l'appareil mais, je suis d'accord avec vous, cela offre de vraies perspectives.
Une délégation de la commission des affaires sociales a eu l'occasion de se rendre l'année dernière en Guyane. Nous avons pu voir comment, dans des zones difficiles d'accès, la télémédecine apporte de véritables progrès.