Séance en hémicycle du 9 janvier 2008 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • ANPE
  • ASSEDIC
  • UNEDIC
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  • demandeur
  • fusion
  • maison

La séance

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La séance est ouverte à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application de l'article 67 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, le rapport sur la mise en application de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il sera transmis à la commission des lois et sera disponible au bureau de la distribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

J'ai reçu avis de la démission de M. Simon Loueckhote, comme membre de la commission des affaires culturelles.

J'informe le Sénat que le Groupe Union pour un Mouvement populaire a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu'il propose pour siéger à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, à la place laissée vacante par Serge Vinçon, décédé.

Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à l'article 8 du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. le président de la commission des finances, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais brièvement revenir sur les modalités d'application de l'article 40 de la Constitution.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Pendant de longues années, le Sénat a eu une lecture spécifique de l'article 40.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Toutefois, chacun ici s'en souvient, les décisions du Conseil constitutionnel sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 nous ont amenés à conduire une réflexion collective au sein de la conférence des présidents et, avec l'accord de l'ensemble des responsables des groupes, nous sommes convenus d'appliquer dans sa rigueur l'article 40 de la Constitution.

Je mesure à quel point des incompréhensions peuvent apparaître ici ou là. Ainsi, hier soir, lors de la discussion des deux textes relatifs aux archives, l'un de nos collègues, M. Peyronnet, a eu comme une réaction de protestation.

Je voudrais rappeler que la commission des finances s'efforce d'assurer, dans les conditions les plus rigoureuses possibles, le respect de l'article 40, puisqu'elle en a la mission. Vous voudrez bien en convenir, ce n'est pas l'aspect le plus gratifiant de notre travail que de devoir, à certains moments, expliquer à tel ou tel collègue que l'amendement qu'il a déposé ne viendra pas en discussion parce qu'il contient une disposition qui n'est pas recevable. Aussi, nous essayons chaque fois de prévenir les auteurs des amendements susceptibles de tomber sous le coup de l'article 40, de façon qu'ils puissent modifier leur texte et éviter l'irrecevabilité.

Contrairement à ce qu'on a laissé entendre hier, lundi, alors que j'étais dans mon département, mon administrateur m'a informé que l'amendement de M. Peyronnet contenait des dispositions auxquelles risquait de s'appliquer l'article 40, et il m'en a saisi. Je lui ai fait connaître mon appréciation et lui ai demandé de se mettre en rapport avec l'auteur de la proposition afin qu'il puisse en modifier le texte.

Je veux dissiper tout malentendu : ce n'est pas l'administration de la commission des finances en tant que telle qui décide de l'application de l'article 40. Avec mes collègues de la commission des finances, j'exerce mes prérogatives et j'assume totalement la responsabilité de l'irrecevabilité qui est prononcée à l'égard de certains amendements.

Je reste à la disposition de chacun d'entre vous, mes chers collègues, pour, en tant que de besoin, expliquer nos positions, les faire comprendre et, je l'espère, les faire partager. Je rappelle que, avant la fin du semestre en cours, nous procéderons à un rapport d'étape qui nous permettra de tirer les enseignements d'une année d'application de l'article 40 au Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Aux termes du règlement, mon cher collègue, je ne peux pas vous donner la parole. Néanmoins, étant donné l'importance du sujet, je vais vous permettre de vous exprimer, mais très brièvement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Je vous remercie, monsieur le président, de bien vouloir me donner la parole sur un sujet qui, effectivement, est difficile et fait l'objet d'une incompréhension non pas seulement de ma part, monsieur le président de la commission des finances, mais également de la part de plusieurs de nos collègues : peut-être les membres de la commission des finances sont-ils tous bien au fait, mais les membres des autres commissions, il faut le reconnaître, se posent souvent des questions.

En l'occurrence, sans revenir sur le débat, je proposais qu'un fonctionnaire d'État puisse être remplacé par un fonctionnaire territorial au poste de directeur départemental des archives et, considérant qu'alors l'État réalisait une économie, je demandais, tout naturellement, que la charge du salaire de ce fonctionnaire territorial soit compensée par un versement au conseil général.

Vous dites, monsieur le président de la commission, qu'il s'agit d'une dépense nouvelle. Je ne le comprends pas ainsi ! Vous estimez que le poste existe par ailleurs : non ! Et c'est là qu'il y a incompréhension entre nous ; c'est un poste vacant et l'État n'est donc pas obligé d'en payer par ailleurs le titulaire. Par conséquent, il n'y a pas de dépense nouvelle !

Si les fonctionnaires de la commission des finances ou vous-mêmes avez été choqués, sur la forme, par mon intervention, je le regrette, car je sais que vous faites tous votre travail avec la plus grande honnêteté.

Mais, sur le fond, l'article 40 nous pose un réel problème. Bien sûr, on sait pourquoi il a été créé : il s'agissait de limiter les pouvoirs du Parlement. Il joue donc pleinement son rôle.

Toutefois, au moment où l'on se demande s'il ne faut pas, au contraire, renforcer les droits du Parlement, l'article 40 lui-même est à revoir ou, du moins, la façon dont il est appliqué. Le bilan que la commission des finances établira en juin permettra assurément une discussion ouverte et approfondie sur ce sujet, et débouchera peut-être sur une libéralisation de l'application de cet article de la Constitution qui nous permettrait de trouver une solution ménageant le droit légitime du Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

L'article 40 ne se prête pas à l'interprétation. Si un amendement a pour conséquence une diminution des ressources publiques, il est irrecevable. Toutefois, le mot « ressources » étant au pluriel, on peut recourir aux gages ; j'ignore si le tabac pourra continuer durablement à remplir cette fonction comme il l'a fait jusqu'à maintenant. En revanche, s'agissant de la création ou de l'aggravation d'une charge publique, la formulation est au singulier : aucune compensation n'est donc possible.

Dans l'amendement que vous vouliez présenter, monsieur Peyronnet, vous proposiez que des agents issus de la fonction publique territoriale puissent exercer les fonctions de directeur départemental des archives et que, dans cette hypothèse, l'État devrait compenser. C'est votre excès de scrupule qui a rendu irrecevable votre amendement !

C'est la raison pour laquelle je vous avais suggéré de retirer cette précision : s'il est évident, de votre point de vue, que l'agent recruté par l'État restera à la disposition du département mais sera payé par l'État, ce n'est pas la peine de le dire. Si vous le précisez, c'est qu'il y a doute ; et s'il y a doute, c'est qu'une aggravation de la charge publique est possible, ce qui fait tomber l'amendement sous le coup de l'irrecevabilité prévue à l'article 40.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à la réforme du service public de l'emploi (urgence déclarée) (nos 141, 154).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - Permalien
Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les objectifs du Gouvernement sont simples : atteindre le plein-emploi en 2012, ramener le taux de chômage à 5 % et le taux d'emploi à 70 %.

La France a probablement une chance historique d'atteindre ces objectifs en raison des transformations qui sont à l'oeuvre sur le marché du travail et qui tiennent à deux facteurs : d'une part, une dynamique retrouvée de création d'emplois ; d'autre part, la transition démographique qui, ajoutée à une modification significative de notre économie, peut nous permettre de réaliser nos objectifs d'ici à 2012.

La baisse du chômage, continue depuis deux ans, s'est accélérée au troisième trimestre 2007, nous permettant de passer désormais sous la barre symbolique des 8 %, sous la barre symbolique des 2 millions de demandeurs d'emploi : cela montre clairement que nous sommes sur la bonne voie.

Un homme politique célèbre en son temps constatait : « Contre le chômage, on a tout essayé. » Nous souhaitons nous placer dans une autre logique, non pas dans la logique du traitement du chômage mais, tout simplement, dans la logique de la libération de l'emploi.

Le projet de loi que j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs, constitue la première étape d'une ambitieuse réforme du service public de l'emploi et du marché du travail. Celle-ci nous occupera pendant toute l'année 2008. Les étapes en ont été fixées avec les partenaires sociaux lors de la conférence sociale du 19 décembre dernier, tenue sous la présidence de M. le Président de la République.

J'aborderai trois points, en essayant d'être brève : d'abord, je vous exposerai ma logique de la politique de l'emploi ; ensuite, je reviendrai sur les principes fondamentaux qui inspirent la fusion des réseaux opérationnels de l'Agence nationale pour l'emploi, l'ANPE, et de l'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce, l'UNEDIC ; enfin, je vous présenterai les principaux éléments de cette réforme.

Pour revenir au plein-emploi, c'est-à-dire à 5 % de chômage, nous souhaitons adopter une politique active destinée à encourager la création d'emplois et à faciliter le placement, c'est-à-dire la rencontre entre des demandeurs d'emploi et des offres d'emplois non encore pourvus.

Nous ne devons jamais perdre de vue que la création d'emplois constitue la réponse la plus durable au chômage.

De ce point de vue, on ne peut que se féliciter des chiffres de l'année 2007 : plus de 312 000 créations d'emplois, c'est-à-dire un tiers de plus que sur toute l'année 2006. Si l'on y ajoute la création probable, cette année, de plus de 300 000 entreprises, c'est clairement un mouvement de croissance qui est en marche et dont on ne peut que se réjouir pour l'emploi.

Toute la logique de notre action, c'est qu'il ne sert à rien de diviser le travail ; il faut au contraire le multiplier. Ce n'est pas en travaillant moins que l'on travaillera tous ; c'est en travaillant plus que l'on inventera de nouveaux emplois dans le secteur des nouvelles technologies, notamment de l'information, de la communication et, enfin, dans le secteur des services à la personne.

Mais créer des emplois ne suffira pas ; encore faut-il qu'ils puissent être pourvus. Certains ergotent sur le chiffre exact : s'agit-il de 450 000, de 500 000, de 550 000 emplois non pourvus ? Nous le voyons bien, les uns et les autres, dans nos circonscriptions, aujourd'hui, nombre d'entreprises n'arrivent pas à trouver les personnes susceptibles d'occuper les emplois disponibles, et les tensions que nous connaissons déjà pourraient s'aggraver dans l'avenir.

Il faut en effet s'attendre à de profondes modifications du marché de l'emploi dans les prochaines années. L'économie qui est déjà à plus de 70 % « tertiarisée » va poursuivre ce mouvement aux deux extrêmes de l'échelle des qualifications : il y aura davantage d'emplois qualifiés de niveau cadre dans l'informatique, le commerce et les services aux entreprises, mais aussi, et selon des formes probablement nouvelles et à réinventer au fur et à mesure du vieillissement de la population et de la dépendance, davantage d'emplois, souvent moins qualifiés, dans les services à la personne, qu'il s'agisse des aides à domicile, des employés de maison, des assistantes maternelles, des agents d'entretien ; tous ces secteurs constituent un gisement de créations d'emplois considérable.

Debut de section - Permalien
Christine Lagarde, ministre

En ajoutant les emplois libérés par les départs à la retraite aux créations nettes d'emplois, on peut quantifier les besoins en main-d'oeuvre à environ 750 000 par an jusqu'en 2015, alors que la population active devrait se stabiliser d'ici à quelques années.

Or, en dépit du nombre d'actifs disponibles sur le marché du travail, ces déséquilibres ne se résorberont pas d'eux-mêmes, parce que les profils recherchés ne correspondent pas toujours aux profils disponibles et parce que certains métiers en tension sont perçus, à tort d'ailleurs, comme peu attractifs et, en particulier, peu susceptibles d'intéresser les jeunes.

Des efforts devront être accomplis dans ce domaine, parce que les services en charge de l'intermédiation entre l'offre et la demande ne sont pas assez efficaces.

Nous avons donc aujourd'hui une formidable opportunité pour en finir avec le chômage. Néanmoins, si nous ne faisons rien, nous risquons de nous trouver face à un paradoxe : les employeurs qui souhaitent embaucher n'y parviennent pas, tandis que les chômeurs ne trouvent pas d'emploi.

Notre pays est confronté à un défi considérable, que nous devons tous ensemble relever. Pour être en mesure de le faire, il faut, bien entendu, agir au niveau de l'orientation, avec un système de formation capable de répondre aux nouveaux besoins de qualification et, bien sûr, au niveau du service public de l'emploi, pour qu'il soit plus efficace.

La formation concerne au premier plan les jeunes. Avec Valérie Pécresse et Xavier Darcos, nous voulons améliorer leur chance de trouver un travail à la sortie de leurs études. Le rôle des universités dans l'insertion professionnelle a été inscrit dans la loi votée l'été dernier. L'orientation des jeunes est un sujet majeur dont le Gouvernement s'est saisi. Parallèlement, je poursuivrai la politique de développement des dispositifs d'alternance, dont les résultats en termes d'insertion professionnelle sont unanimement reconnus.

Mais la formation ne doit pas s'arrêter aux portes de la vie active. Elle doit être présente au coeur des entreprises et des branches, dans le service public de l'emploi, comme l'a à juste titre souligné la mission d'information sur le fonctionnement des dispositifs de formation professionnelle, présidée par M. Jean-Claude Carle, que je souhaite saluer ici.

Ce sujet est au centre de la négociation sur la sécurisation des parcours professionnels qui entre dans sa phase finale aujourd'hui. Je souhaite que les partenaires sociaux parviennent à des avancées concrètes, notamment en ce qui concerne l'accès des demandeurs d'emploi à la formation.

Quoi qu'il arrive, le Gouvernement entend progresser sur ce sujet en 2008, en y associant les régions et les partenaires sociaux. Conformément à l'agenda social défini par le Président de la République, je vais donc mettre en place dans les tout prochains jours un groupe de travail sur la formation professionnelle continue, qui réunira l'État, les partenaires sociaux et les régions. Il s'agira de clarifier les priorités stratégiques en matière de formation professionnelle et d'établir un partage clair entre les sujets qui relèveront de la compétence des partenaires sociaux et ceux qui relèveront de la compétence du législateur, et ce d'ici à la fin de l'année 2008.

Amélioration des services de placement et d'accompagnement, développement de la formation tout au long de la vie, réforme du contrat de travail, meilleure prise en charge des périodes de chômage, ce sont là les éléments constitutifs de la vaste réforme du marché du travail engagée par le Gouvernement, à laquelle Xavier Bertrand et moi-même participons et à laquelle les partenaires sociaux sont évidemment associés de manière particulièrement efficace : des négociations importantes sont en cours.

L'objectif est clair : construire avec les salariés et les entreprises des formes de sécurisation des parcours professionnels adaptés à notre économie mondialisée, post-industrielle et de plus en plus « tertiarisée ».

J'en viens maintenant au coeur de la réforme qui est soumise à votre examen.

La première étape de cette réforme, c'est évidemment le projet de fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC. Pourquoi fusionner l'ANPE et les ASSEDIC ? Je commencerai par quelques brefs constats.

Le premier constat, c'est la multiplicité des acteurs sur le terrain et la coexistence de plusieurs réseaux qui ont parfois du mal à se coordonner. Nous le savons tous, même si nous n'osons pas toujours l'avouer, la multiplicité de ces réseaux n'est pas propice à la réalisation de cette intermédiation entre les demandeurs d'emploi, d'une part, et les entreprises, d'autre part.

Le deuxième constat, c'est ce qui se passe au-delà des frontières de la France. Que font nos voisins ? La plupart de ceux qui ont réussi en matière de créations d'emplois et d'intermédiation entre les demandeurs d'emplois et les entreprises disposent d'un réseau unifié. En l'espèce, il s'agit du Royaume-Uni, de l'Allemagne, du Danemark et, plus loin de nous, de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande ou des États-Unis, qui disposent tous de services unifiés.

Debut de section - Permalien
Christine Lagarde, ministre

La tendance est générale dans les pays les plus performants. Et cela se fonde sur un constat éprouvé : l'accompagnement d'un demandeur d'emploi est un tout qui associe l'accueil, la prise en charge financière, le diagnostic, les propositions de formation et le placement. Pourquoi se priver d'un outil qui a fait ses preuves ailleurs ?

Le troisième constat, c'est que la voie du « rapprochement sur le terrain » des deux réseaux au sein de guichets uniques et par les maisons de l'emploi, voie qui avait été retenue par la loi de programmation pour la cohésion sociale et qui a fourni un certain nombre de résultats, a probablement atteint ses limites.

Les réalisations concrètes en matière d'unicité de réseaux peinent à se construire et à se déployer. Pour ne prendre que cet exemple, les véritables guichets uniques, c'est-à-dire des sites entièrement communs, se comptent sur les doigts des deux mains : pas plus de dix sont réellement constitués en site unique où toutes les prestations sont disponibles.

Quant au système d'information commun, le GIE informatique qui en constitue le support n'a commencé à fonctionner que l'été dernier. Heureusement que nous l'avons : il permettra, dans le cadre de la fusion, de faire avancer les dossiers plus rapidement. Mais sa mise en place fut laborieuse, malgré toutes les bonnes volontés.

Cela ne permet pas de traiter l'ensemble des problèmes : l'enrichissement de l'offre de service vers les entreprises et les demandeurs d'emploi, la rationalisation des moyens mis en oeuvre, et surtout la dualité du marché du placement entre, d'une part, les chômeurs indemnisés et, d'autre part, les chômeurs non indemnisés. Ce que nous souhaitons, c'est parvenir au placement de tous ceux qui sont à la recherche d'un emploi, qu'ils soient indemnisés ou qu'ils ne le soient pas.

Au total, je crois que la direction retenue dans la loi de programmation pour la cohésion sociale était la bonne, que le rapprochement était une étape indispensable et que les premiers efforts entrepris ont permis de faire mûrir les esprits. C'est d'ailleurs parce que les acteurs se sont rapprochés que ce projet de fusion peut aujourd'hui être acceptable par la plupart d'entre eux.

Mais il faut maintenant passer à la vitesse supérieure. Quels sont les objectifs de ce nouveau chantier ?

Le premier objectif est d'améliorer le service rendu aux usagers. Certes, nous allons modifier une structure juridique, rapprocher des personnels et, en particulier, travailler à la création d'une culture nouvelle. Toutefois, ce qui est fondamental et ce qui permettra de fédérer les énergies, c'est, bien sûr, le service rendu aux usagers, les demandeurs d'emploi, d'un côté, les entreprises, de l'autre. Car c'est en favorisant la rencontre entre les offres des uns et les demandes des autres que nous parviendrons à lutter contre le chômage et à créer des emplois, et ce en mettant en place des guichets uniques en tout point du territoire.

Ces plateformes polyvalentes seront en charge de l'intégralité des prestations : l'accueil, le diagnostic, la recommandation de formation, l'accompagnement, le suivi, le placement et l'indemnisation. Et quand je parle des usagers, je pense aux demandeurs d'emploi, qui doivent véritablement être pris par la main quand c'est nécessaire, notamment lorsqu'il s'agit de publics qui sont depuis longtemps éloignés de l'emploi ou qui sont particulièrement en difficulté, comme les séniors, mais je pense aussi aux entreprises, car il faut non seulement aller chercher les demandeurs d'emploi, les accompagner, mais également se rendre sur le terrain, là où se trouvent les emplois.

Le deuxième objectif est de proposer une gamme de prestations complètes pour tous les demandeurs d'emploi, c'est-à-dire ceux qui sont indemnisés et ceux qui ne le sont pas. C'est un élément très important de notre réforme.

Le troisième objectif est de renforcer l'accompagnement des demandeurs d'emploi, notamment ceux qui sont le plus en difficulté, grâce à la mutualisation des moyens qui permettra de déployer plus d'agents sur le terrain.

Vous le voyez, au travers de ces objectifs, notre réforme va créer non pas un nouveau monstre administratif à deux têtes, mais plutôt un attelage de course, rapide et performant, au service de l'emploi.

La fusion n'est pas une construction bureaucratique dont la portée serait purement institutionnelle. Elle a des implications concrètes sur le terrain, pour les demandeurs d'emploi comme pour les entreprises.

Ne pas attendre plusieurs jours, ne pas avoir à faire des kilomètres pour se rendre à l'ANPE, puis à l'ASSEDIC, c'est du concret pour les demandeurs d'emploi.

Pouvoir désormais proposer toutes les prestations à l'ensemble des demandeurs d'emploi et non plus seulement aux demandeurs d'emploi indemnisés pour certaines prestations, c'est aussi du concret.

Redéployer davantage d'agents au contact direct des usagers, après les périodes de formation nécessaires à cet effet, c'est encore du concret.

La mise en oeuvre de cette opération sera essentielle. Elle ne sera pas simple, elle sera graduelle, mais l'étape législative que nous commençons aujourd'hui au Sénat est déterminante.

La fusion elle-même n'est qu'une première étape de la réforme du service public de l'emploi. Elle en est le socle, mais elle n'épuise pas, et de loin, la réforme que nous voulons conduire.

J'entends porter une attention particulière au contenu de l'offre de service du nouvel opérateur, qui sera définie par la convention que passeront avec lui les deux commanditaires que sont l'État, d'une part, et le régime d'assurance chômage, d'autre part.

Il s'agira de définir les publics prioritaires du nouveau service public de l'emploi, en ce qui concerne tant les entreprises que les salariés, les prestations offertes en matière de formation et d'orientation et les conditions de collaboration avec les réseaux spécialisés, publics ou privés, qui devront trouver toute leur place dans ce nouveau dispositif.

Je souhaite mener ces différents chantiers selon le même mode que le chantier de la fusion lui-même, en associant systématiquement en amont toutes les parties prenantes, tous les partenaires sociaux, toutes les collectivités territoriales et tous les usagers. Pour ce faire, nous allons mettre en place au sein du Comité supérieur de l'emploi un groupe de travail qui accompagnera ces différentes études.

En conclusion, je vous présenterai les modalités pratiques de l'opération, telles qu'elles sont prévues dans le projet de loi.

Elles correspondent, pour l'essentiel, à cinq grands principes, qui se sont peu à peu dégagés de l'intense concertation que nous menons depuis le mois de juillet dernier avec les partenaires sociaux, dont le point culminant a été la réunion du Comité supérieur de l'emploi le 19 novembre dernier, et qui a permis de faire évoluer les esprits de chacun sur ce dossier pour le rendre, je l'espère, acceptable.

Premier principe que nous avons retenu et que nous réaffirmons : le respect du paritarisme.

Le régime paritaire d'assurance chômage demeure sous la responsabilité de l'UNEDIC. Je veillerai notamment à ce que le transfert aux URSSAF du recouvrement des contributions d'assurance chômage n'entame ni l'autonomie financière de l'UNEDIC ni la qualité et la mise à jour de l'information qu'elle détient et dont elle demeurera propriétaire.

Deuxième principe : une gouvernance efficace, autour des deux financeurs et commanditaires.

Les partenaires sociaux seront majoritaires au sein du conseil, mais c'est l'État qui aura la responsabilité de la nomination du directeur général, afin que le nouvel opérateur reste un outil de la politique de l'emploi, laquelle relève du domaine de l'État. Cet équilibre obtenu par la concertation est à la fois politique et juridique.

À l'extérieur de l'opérateur, un conseil national de l'emploi, que je présiderai, assurera la cohérence des politiques de l'emploi. C'est également la vocation de la convention tripartite entre l'État, l'UNEDIC et la nouvelle institution, qui fixera les priorités et les moyens alloués.

Troisième principe : la mise en tension de l'opérateur, avec la définition d'objectifs de résultat, le recours à l'évaluation et le principe d'un appel systématique à des opérateurs spécialisés.

Un comité de suivi de la convention tripartite conclue entre l'État, l'UNEDIC et le nouvel opérateur vérifiera le respect et la mise en oeuvre de ces principes. Au sein de l'institution, j'ai également souhaité la création d'un comité d'audit permanent. Chaque fois que de nouvelles priorités seront fixées et que de nouveaux moyens seront déployés pour mettre en place de nouveaux programmes, nous examinerons l'efficacité de ces derniers pour savoir s'il faut continuer de les financer.

Quatrième principe : la dimension territoriale des politiques d'emploi, qui est un facteur clé pour leur succès.

On le sait, c'est sur le terrain, au plus près des demandeurs d'emploi et des entreprises créatrices d'emploi, que nous trouverons les solutions. Les politiques de l'emploi seront adaptées aux situations locales grâce aux budgets d'intervention déconcentrés et aux coopérations que le nouvel opérateur entretiendra avec tous les réseaux secondaires spécialisés, qu'il s'agisse de l'APEC, l'Association pour l'emploi des cadres, des missions locales, ou encore de Cap Emploi.

Pour ce qui concerne plus particulièrement les maisons de l'emploi, dont le rôle de coordination est essentiel dans les bassins d'emploi où elles sont implantées, j'ai confié une mission au député Jean-Paul Anciaux pour formuler des recommandations sur le futur cahier des charges des maisons de l'emploi, qui permette une bonne articulation avec le réseau territorial du nouvel opérateur. Il s'agit donc non pas d'absorber les maisons de l'emploi, mais de mettre en place une bonne coordination avec cette nouvelle institution pour que chacun respecte ses devoirs et ses engagements.

Cinquième principe : le pragmatisme dans la mise en oeuvre.

Le projet de loi prévoit notamment la mise en place immédiate d'une instance provisoire, qui permettra de préparer la naissance officielle de la nouvelle institution d'ici à la fin de l'année 2008. C'est elle qui sera notamment chargée de conduire une réflexion sur l'organisation territoriale du réseau. Je souhaite que cela se fasse dans la concertation.

Naturellement, comme je m'y étais engagée devant le Comité supérieur de l'emploi et en m'adressant directement, au travers de leurs directeurs, aux agents concernés, j'ai tenu à inscrire dans le texte des garanties fortes pour les agents des deux institutions. Il s'agit d'un projet ambitieux en raison des objectifs que nous nous sommes fixés et des difficultés qui se présenteront du fait du mécanisme même de la fusion.

C'est ainsi que le statut actuel des personnels des ASSEDIC, qui résulte d'une convention collective, sera conservé jusqu'à ce qu'ait pu être négociée une nouvelle convention collective au sein de la nouvelle institution. Je le réaffirme, il n'y aura pas, contrairement à ce que prévoit le code du travail en pareil cas, de dénonciation de la convention actuelle. La convention collective continuera de s'appliquer jusqu'à ce qu'un autre texte, qui fera l'objet d'une négociation, s'y substitue.

Les personnels de l'ANPE conserveront également leur statut actuel, qui est un statut de droit public durant cette période de négociation de la nouvelle convention collective.

Une fois la convention collective négociée et signée, ils auront le choix, pendant un an, de rejoindre le statut commun ou de conserver, à titre dérogatoire, le statut public qu'ils ont aujourd'hui. Nous le savons, le passage d'un statut public à un statut privé est un changement important, mais la convention collective comportera des garanties qui tiendront compte de la nature particulière des missions de service public exercées par ces agents, comme le prévoit d'ailleurs une convention de l'Organisation internationale du travail.

Au-delà des dispositions législatives, j'ai par ailleurs indiqué clairement que la fusion des réseaux n'avait pas pour objet de réduire les effectifs ; il s?agissait simplement de mieux les utiliser pour répondre au seul objectif que nous poursuivons, à savoir la lutte contre le chômage.

Debut de section - Permalien
Christine Lagarde, ministre

De la même manière, j'en ai pris l'engagement, il n'y aura pas de mobilité géographique imposée.

Tout cela doit permettre de mettre en place rapidement, mais sereinement, le nouvel opérateur central du service public de l'emploi.

Vous aurez peut-être remarqué, mesdames, messieurs les sénateurs, que je n'ai pas évoqué, durant cette présentation, le nom de cette nouvelle institution, même si, en tant que futurs parents, nous allons probablement passer un certain temps avec ce nouvel enfant. En fait, nous allons tout simplement demander à l'instance de préfiguration de la nouvelle institution de proposer un certain nombre de dénominations - vous en avez sans doute déjà lu quelques-unes, ici ou là, dans la presse - pour que les équipes elles-mêmes se rassemblent autour d'éléments d'identification tels que les couleurs, les marques, les logos ou encore les sigles, et se l'approprient.

Quel que soit son nom, je suis convaincue que ce nouvel organisme répondra aux attentes des usagers, demandeurs d'emploi et entreprises. Mon souhait le plus cher est qu'il soit un meilleur intermédiaire entre les offres et les demandes d'emploi, afin que les chefs d'entreprise ne nous disent plus jamais qu'ils préfèrent consulter un chasseur de têtes plutôt qu'un agent de l'ANPE et que les jeunes qui sortent du système universitaire aient immédiatement le réflexe de se tourner vers l'ANPE plutôt que d'aller dans une agence d'intérim.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Applaudissements sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons cet après-midi prévoit une réforme ambitieuse des deux principaux opérateurs du service public de l'emploi que sont l'ANPE et l'UNEDIC.

Cette réforme est ambitieuse, car ces deux organismes sont de statuts très différents : l'ANPE est un établissement public administratif, tandis que l'UNEDIC est une association, gérée paritairement par les partenaires sociaux, tout comme les trente ASSEDIC qui constituent son réseau. Ces organismes exercent des missions complémentaires : l'ANPE est chargée du placement des demandeurs d'emploi et l'UNEDIC de leur indemnisation.

Cette réforme est ambitieuse, car elle prévoit de créer un opérateur unique, qui assurera à la fois le placement et l'indemnisation des demandeurs d'emploi, en fusionnant l'ANPE et le réseau opérationnel de l'UNEDIC. Or, l'histoire l'a montré, toute fusion est toujours un peu compliquée.

La fusion, qui a été voulue et annoncée par le Président de la République, a un objectif premier, essentiel à mes yeux - et pas seulement aux miens, puisque presque toutes les personnes auditionnées l'ont estimé indispensable : améliorer le service rendu aux demandeurs d'emploi en simplifiant leurs démarches.

Le regroupement des deux réseaux entraînera des économies de gestion - je dis bien des « économies de gestion » et non des « économies de personnel », ainsi que Mme la ministre l'a de nouveau rappelé -, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Mais rien ne vous rassure, mon cher collègue !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

... économies qui permettront de consacrer plus de moyens à l'accompagnement de ceux qui cherchent un emploi ou veulent en changer.

Comme Mme Lagarde l'a souligné, l'objectif du Gouvernement est de parvenir, à terme, à un ratio de soixante demandeurs d'emploi, puis de trente, pour un conseiller ANPE, contre un pour 100 ou 120 actuellement. Les visites que j'ai tenues à faire sur le terrain et les discussions que j'ai eues avec les personnels des agences locales m'ont conforté dans l'idée que plus ils consacraient de temps à un demandeur d'emploi, plus ils pouvaient personnaliser la demande et donc être plus efficaces pour lui trouver un emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

L'ambition concerne aussi le service rendu aux entreprises, que l'on oublie parfois, la fusion devant permettre de mieux rapprocher les offres et les demandes d'emploi, et notamment d'améliorer l'embauche dans les secteurs d'activité qui rencontrent des difficultés de recrutement.

En revanche, il est clair que cette idée n'est pas nouvelle, l'éventualité d'une fusion de ces deux institutions ayant été, à plusieurs reprises, envisagée dans le passé. Aujourd'hui, on passe enfin aux actes, l'intention devient réalité, car un obstacle a été levé.

En effet, au début de l'année 2007, lorsque le président Jacques Chirac avait exprimé ce souhait, le bureau de l'UNEDIC avait unanimement fait part de sa désapprobation. Les partenaires sociaux ne voulaient pas perdre leurs prérogatives en matière de définition des règles de l'assurance chômage.

Mais la concertation approfondie qui a été menée par le Gouvernement, et notamment par Mme la ministre de l'économie, a permis de trouver une solution de compromis : les partenaires sociaux continueront de définir, par voie conventionnelle, les paramètres de l'assurance chômage et l'UNEDIC sera maintenue comme une structure support permettant de gérer la convention. Cette garantie a rassuré les organisations syndicales et patronales qui composent la majorité de gestion de l'UNEDIC et explique pourquoi ce projet de fusion est aujourd'hui approuvé dans son principe général.

Une convention conclue entre l'État, le nouvel opérateur et l'UNEDIC leur permettra de coordonner leurs actions. Un Conseil national de l'emploi, qui se substituera à l'actuel Comité supérieur de l'emploi, permettra en outre d'associer tous les acteurs à la définition de la politique de l'emploi.

Ce nouvel opérateur sera chargé, pour le compte de l'UNEDIC, de verser les allocations chômage et, dans un premier temps tout au moins, de collecter les contributions d'assurance chômage. Au plus tard en 2012, le recouvrement des contributions d'assurance chômage sera en effet transféré aux URSSAF. Il s'agit, à nos yeux, d'une mesure de rationalisation administrative bienvenue. Dans la mesure où l'assiette des contributions d'assurance chômage est quasiment identique à celle des cotisations de sécurité sociale, pourquoi laisser subsister deux réseaux de collecte ? Je vous rappelle, mes chers collègues, que, depuis le 1er janvier 2008, c'est ainsi que fonctionne le RSI, le régime social des indépendants.

Cette réforme suscite cependant une préoccupation très légitime de la part des salariés des ASSEDIC qui s'interrogent sur le devenir de leurs collègues affectés aux tâches de recouvrement. L'inquiétude est particulièrement vive au sein du GARP, le groupement des ASSEDIC de la région parisienne, dont les 500 salariés collectent les contributions pour toute l'Île-de-France.

Le délai prévu avant l'entrée en vigueur du transfert doit justement permettre d'organiser le reclassement professionnel de ces salariés : une partie d'entre eux pourrait être recrutée par les URSSAF, dans des conditions à définir avec l'ACOSS, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale ; ils pourraient notamment rejoindre le nouveau corps de contrôleurs du recouvrement que l'ACOSS prévoit de mettre en place pour mieux lutter contre la fraude. Cette préoccupation devrait faire partie des négociations de la nouvelle institution.

D'autres salariés pourraient demeurer au sein du nouvel opérateur et être affectés à d'autres tâches, qu'il s'agisse de l'accompagnement des chômeurs ou d'une mise en relation avec les entreprises, par exemple, ce qui suppose qu'un effort important soit réalisé en matière de formation. Je me permets d'insister sur cette question, madame la ministre. Certes, je le sais bien, ce n'est pas vous, mais la future institution qui établira le plan de formation, et l'UNEDIC y travaille déjà, mais il faut que celui-ci intègre, dès cette année, une formation vers les métiers de l'orientation pour tous les salariés qui souhaitent changer d'orientation. Il ne faut pas attendre 2010 ou 2011 !

Les contours de la réforme étant posés, je voudrais maintenant décrire rapidement l'organisation du nouvel opérateur qui résultera de la fusion. Bien qu'il s'apparente à un établissement public administratif, le projet de loi le définit comme une « institution nationale » afin de souligner l'originalité de son statut, qui emprunte, sur certains points, le mode de gestion du secteur privé.

Par exemple, sa comptabilité sera celle qui est utilisée par les entreprises et son personnel sera soumis au code du travail.

Le nouvel opérateur sera piloté par un conseil d'administration au sein duquel les partenaires sociaux seront majoritaires et il sera dirigé, sur le plan opérationnel, par un directeur général nommé en conseil des ministres.

Des directions régionales concluront, chaque année, une convention avec le préfet de région pour déterminer de quelle manière les interventions de l'opérateur s'adapteront à la situation locale de l'emploi.

Son budget sera divisé en plusieurs sections non fongibles, afin de bien distinguer les dépenses d'indemnisation du chômage financées par l'UNEDIC, les dépenses de solidarité, qui bénéficient aux chômeurs en fin de droit et sont prises en charge par l'État ou le fonds de solidarité, les dépenses de fonctionnement, d'investissement et d'intervention au profit des chômeurs, financées conjointement par l'État, l'UNEDIC et, éventuellement, d'autres acteurs tels que les collectivités territoriales.

La commission approuve globalement l'organisation proposée pour le nouvel opérateur, mais elle vous présentera quelques amendements visant, notamment, à préciser les prérogatives du conseil d'administration par rapport au directeur général, à améliorer la structure du budget et à fixer les règles applicables en matière de passation de marchés.

Je veux également évoquer la question du nom de cette future institution : au cours de nos auditions, la plupart de nos interlocuteurs nous ont instamment demandé de baptiser cette nouvelle structure. La commission estime qu'il appartient au futur conseil d'administration de proposer un nom et d'associer les personnels à ce choix. C'est un processus d'appropriation essentiel et beaucoup plus fondateur qu'un baptême purement parlementaire ou gouvernemental.

Je constate avec plaisir, madame la ministre, que vous avez rejoint notre position et je vous remercie d'avoir annoncé que vous acceptiez notre amendement sur ce point.

J'aborderai à présent la mise en oeuvre concrète de la fusion : elle suppose régler de nombreux problèmes techniques. Une mission a été confiée à cet effet à une inspectrice générale des affaires sociales qui fera le point, d'ici à la fin du mois de janvier, sur les questions en suspens.

D'ores et déjà, le projet de loi s'attache à régler les questions relatives au statut du personnel et au transfert des biens immobiliers.

Les salariés du nouvel opérateur seront des salariés de droit privé régis par le code du travail. Il convient cependant d'apporter deux précisions : en premier lieu, les agents de l'ANPE actuellement en poste auront la possibilité de conserver, s'ils le souhaitent, leur statut de contractuel de droit public ; en second lieu, la direction du nouvel opérateur et les syndicats représentatifs devront négocier une nouvelle convention collective, qui apportera aux salariés les garanties nécessaires à l'accomplissement de leurs missions, au regard notamment des règles de l'OIT.

Cette nouvelle convention collective s'appliquera aux salariés employés par les ASSEDIC, aux agents de l'ANPE qui choisiront de renoncer à leur statut public, ainsi qu'aux nouveaux embauchés.

Les salariés des ASSEDIC craignent que la nouvelle convention collective leur soit moins favorable que celle qui est actuellement en vigueur. Leurs délégués du personnel et représentants syndicaux, ainsi que les manifestants, hier, ont demandé qu'ils bénéficient d'un « droit d'option ».

Après avoir longuement réfléchi, il m'apparaît malgré tout déraisonnable de faire coexister trois systèmes au sein d'un même organisme : deux conventions collectives et un statut de droit public.

Je comprends parfaitement l'inquiétude des salariés des ASSEDIC, mais le risque que la nouvelle convention leur soit défavorable me semble en réalité assez faible. Outre les déclarations de Mme la ministre, j'affirme que, moi - et il semble que l'opposition ne me suive pas -, je crois à la volonté des syndicats de défendre les salariés, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

... quelle que soit leur origine institutionnelle.

La convention en vigueur doit servir de base à la négociation et les syndicats n'auront aucun intérêt à signer un accord consacrant un recul des droits des salariés.

Enfin, je ne voudrais pas que la nouvelle convention ne s'applique qu'aux futurs embauchés, les anciens de l'ANPE conservant la leur et ceux de l'UNEDIC la leur. Cela reviendrait à établir une sorte de ségrégation entre les anciens et les nouveaux et empêcherait l'intégration des nouveaux salariés. Telle est ma conviction profonde.

Comme je ne doute pas que la nouvelle convention sera proche de celle qui est en vigueur aux ASSEDIC, je pense que la fusion pourrait avoir un coût financier non négligeable dans la mesure où les rémunérations versées aux ASSEDIC sont sensiblement plus élevées que celles qui sont versées à l'ANPE.

Madame la ministre, pourriez-vous nous donner des indications sur les évaluations dont vous disposez à ce sujet ?

Pour les biens appartenant à l'ANPE et à l'UNEDIC, notamment s'agissant de leur patrimoine immobilier, le projet de loi prévoit un transfert, de plein droit et à titre gratuit, des biens de l'ANPE à la nouvelle institution.

La situation est plus complexe pour les biens des ASSEDIC, en raison de leur nature associative : au moment de leur dissolution, les ASSEDIC transféreront leurs biens à l'UNEDIC, qui les mettra ensuite à la disposition du nouvel opérateur pour un montant symbolique.

La fusion a pu donner lieu à des inquiétudes, y compris au sein de la commission, concernant le maillage territorial de la nouvelle institution. L'objectif est de disposer, à terme et sur l'ensemble du territoire, d'implantations polyvalentes, dans lesquelles les demandeurs d'emploi pourront trouver tous les services actuellement offerts par l'ANPE et par les ASSEDIC, ce qui conduira parfois, en agglomération, à fermer une agence locale pour l'emploi et une antenne ASSEDIC pour les regrouper sur un même site.

La fusion ne saurait, en revanche, servir de prétexte à un recul du service public de l'emploi dans les zones rurales ; vous nous l'avez assuré, madame la ministre, lors de votre audition par la commission. J'espère que vous le confirmerez aux sénateurs issus des milieux ruraux qui sont présents dans cet hémicycle.

J'ai entendu les inquiétudes des élus locaux - nous le sommes quasiment tous - quant aux incertitudes pesant sur les maisons de l'emploi. Sur ce point, la commission a déposé un amendement, qui pourra être amélioré par l'Assemblée nationale, en particulier à la suite des conclusions de la mission menée par le député Jean-Paul Anciaux.

Enfin, je vous suggérerai d'introduire dans la loi une disposition visant à créer une instance régionale, qui permettra à la nouvelle institution d'être plus proche des réalités de terrain régionales, départementales et locales.

La commission vous propose d'approuver le projet de fusion de l'ANPE et des ASSEDIC, amélioré par le travail et les amendements du Sénat.

En cet instant, je tiens à remercier les sénateurs qui ont sacrifié leurs vacances pour travailler à mes côtés et participer aux auditions de la commission.

Ce texte marque une première étape de la réforme du marché du travail. Celle-ci sera complétée dans les prochains mois par une réforme du contrat de travail et de notre système de formation professionnelle. Mais, comme disait Rudyard Kipling, cela est une autre histoire !

Sourires et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui, déclaré d'urgence, une fois de plus, porte sur la réforme du service public de l'emploi, titre usurpé s'il en est, ce que je m'emploierai à démontrer dans quelques minutes.

Mais je veux d'abord dénoncer, madame la ministre, les conditions dans lesquelles les sénateurs ont travaillé pour préparer ce débat.

Une première présentation a été faite par vous, en commission des affaires sociales, le 12 décembre dernier, sans texte, ce qui est normal. Puis le projet de loi nous a été communiqué juste avant la suspension des travaux du Sénat, le 20 décembre. Des auditions ont été conduites par Mme le rapporteur - elle a été désignée le 12 décembre - entre le 18 décembre et le 7 janvier. Et ce n'est que ce matin que le rapport de la commission nous a été remis.

Je veux d'ailleurs vous remercier, madame Procaccia, d'avoir ouvert les auditions à l'ensemble des sénateurs, ce qui nous a permis de rencontrer les acteurs institutionnels et les partenaires sociaux concernés par ce projet de loi.

Permettez-moi de vous rappeler, mes chers collègues, que ce texte, dont l'examen était initialement programmé en première lecture à l'Assemblée nationale à la fin de l'année 2007, a été transféré dans la précipitation au Sénat. Tel qu'il nous est présenté, sur le fond, mérite-t-il vraiment d'être déclaré d'urgence ? Contribuera-t-il à améliorer la situation des demandeurs d'emploi ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Nous pensons que non ! La précipitation et la communication font toujours fonction de politique pour le Président de la République.

Madame la ministre, je veux vous redire en séance publique ce que je vous ai indiqué en commission : nous sommes favorables au guichet unique pour recevoir les chômeurs, indemnisés ou non, un lieu où ils peuvent rencontrer des professionnels qui traitent leur dossier administratif et leur indemnisation, qui les accompagnent dans l'accès ou le retour à l'emploi. Cela existe, vous l'avez dit, et dans un nombre plus élevé de territoires, d'ailleurs, que vous ne l'avez indiqué : on constate d'ores et déjà des regroupements entre les ASSEDIC et l'ANPE ; il y a également des maisons de l'emploi.

Je vais plus loin : nous sommes favorables à la fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC.

Mais nous ne sommes pas favorables à ce projet de loi, et je vais vous indiquer pourquoi.

D'abord, je l'ai dit, le titre est une tromperie : il annonce une réforme du service public de l'emploi. La réforme semblait être l'objectif effectif après que le Président de la République avait déclaré, le 18 septembre dernier - je ne le cite pas souvent : « Nous sommes, sans doute, le seul pays où le suivi de la recherche effective d'emploi est assuré par trois institutions : l'État, l'assurance chômage et l'ANPE. Autant dire qu'elle n'est suivie par personne »

La réforme du service public de l'emploi suppose la prise en compte de l'ensemble des dimensions de ce service tel que le prévoit l'article L 311-1 du code du travail, soit le placement, l'indemnisation, l'insertion, la formation et l'accompagnement des demandeurs d'emplois.

Or, à la lecture de l'exposé des motifs, nous nous apercevons rapidement que, si le titre se veut évocateur, il n'en demeure pas moins trompeur : il s'agit non pas d'une réforme du service public de l'emploi, mais de la fusion de deux opérateurs de ce service public, l'ANPE et l'UNEDIC. Concrètement, il s'agit de la fusion des réseaux opérationnels de l'ANPE et des ASSEDIC, puisque l'UNEDIC demeure.

Si la réforme du service public de l'emploi avait été une volonté réelle du Gouvernement, la logique et la cohérence, pour ne pas dire le sérieux, auraient commandé qu'avant de réformer le cadre le Gouvernement tire un premier bilan des effets de la signature de la convention tripartite État-ANPE- UNEDIC de mai 2006, qui a permis la création de 190 guichets uniques et de 180 maisons de l'emploi, l'instauration d'un dossier unique de demandeur d'emploi, le rapprochement au sein d'un groupement d'intérêt économique, ou GIE, des services informatiques de tous les opérateurs publics de l'emploi... Cela nécessitait pour le moins une évaluation.

Il aurait également été souhaitable que le Gouvernement laisse se conclure la grande négociation sur le marché du travail, qu'il prenne en considération les travaux effectués en matière de formation professionnelle, laquelle devrait faire l'objet d'une réforme, comme ceux de la conférence tripartite sur l'emploi et le pouvoir d'achat, réunie pour la première fois le 23 octobre dernier, et qu'il s'emploie à oeuvrer pour sécuriser les parcours professionnels

Ainsi, sauf à considérer qu'il convient de modifier les outils avant même de se mettre d'accord sur le contenu d'une réelle politique de l'emploi, en d'autres termes que la lutte contre le chômage dépend uniquement de la fusion de deux opérateurs, ce sont bien toutes les dimensions du service public de l'emploi qu'il aurait été nécessaire de prendre en compte.

Ce faisant, nous aurions pu définir une politique de l'emploi cohérente et dynamique, une politique qui ne se limite pas, comme c'est le cas actuellement, à la seule et dangereuse baisse des cotisations sociales et au « travailler plus pour gagner moins ».

Compte tenu de ces observations, vous comprendrez que nous nous étonnions de la déclaration d'urgence sur ce texte, qui n'a de réforme que le nom.

Plusieurs éléments démontrent qu'il s'agit d'un faux-semblant de réforme et d'une démarche inaboutie. J'insisterai sur six points.

Le premier point concerne l'absence de dénomination de la nouvelle institution : celle-ci est simplement mentionnée dans la rédaction proposée par l'article 1er pour l'article L. 311-1 du code du travail. Certes, ce point n'est pas le plus important, mais il est symbolique du manque de précision qui caractérise ce texte.

J'ai bien entendu Mme le ministre et Mme le rapporteur ; néanmoins, je ne suis pas certaine que les administrateurs et les personnels de cette nouvelle institution tiennent à lui donner un nom ; ils auront d'autres priorités.

Même en la limitant au strict cadre de la fusion entre l'ANPE et l'UNEDIC, la démarche engagée par le Gouvernement reste inaboutie.

Le deuxième point est relatif au devenir et à la place des autres opérateurs. Chacun sait qu'au-delà de l'ANPE et de l'UNEDIC d'autres opérateurs interviennent : l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, l'AFPA, les services déconcentrés de l'État, les missions locales, les maisons de l'emploi, et bien d'autres encore ; nous connaissons tous, dans nos territoires, de nombreuses associations qui oeuvrent pour des publics spécifiques. Or le projet de loi n'apporte aucune précision sur la place et le rôle de la future institution, pas plus que sur la nature de ses missions ou sur les modalités d'intervention des uns et des autres. Seul l'exposé des motifs dresse rapidement une liste incomplète de réseaux avec lesquels il faudra « resserrer les liens ».

Ce manque de précision suscite de nombreuses interrogations au sein des structures qui ont signé des conventions avec l'ANPE et/ou les ASSEDIC.

Seul l'article 2 dispose qu'une convention conclue annuellement par le préfet de région et le directeur régional de la nouvelle institution précisera les conditions de collaboration entre celle-ci et les autres réseaux et intervenants du service public de l'emploi. Aucune précision n'est apportée sur l'articulation entre le champ d'action de la nouvelle institution et la dimension territoriale dans laquelle agissent ces différents réseaux.

Et lorsqu'on vous entend, madame la ministre, annoncer le gel de ces conventions au motif qu'on « n'aurait plus besoin d'elles une fois la fusion intervenue », on ne peut que s'inquiéter et, surtout, penser que vous avez mis la charrue avant les boeufs. En effet, on traite de l'outil sans répondre à la question fondamentale de ce que doit être une politique de l'emploi, tant au niveau national qu'au niveau territorial ; j'y reviendrai

De même, on peut s'interroger sur les suites qui seront données aux expérimentations réalisées par des services privés de placement, permises par la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale. Ne va-t-on pas assister à une accentuation de la concurrence entre les organismes de placement, à une segmentation encore plus grande des demandeurs d'emploi, répartis selon leur degré d'éloignement du marché du travail, le secteur public s'occupant, avec moins de moyens, des personnes les plus en difficulté ?

Un tel flou est dommageable, voire inquiétant, et interroge sur la volonté réelle du Gouvernement. La vilaine petite musique sur les sanctions et les radiations de chômeurs en cas de deux refus successifs d'une « offre valable d'emploi » ne nous rassure pas du tout.

Le troisième point a trait à la territorialisation du nouveau dispositif.

Chacun s'accorde à dire que les problèmes de l'emploi trouvent une solution très majoritairement à l'échelon territorial. Aussi, on ne peut que s'interroger sur la place des collectivités territoriales, dont les compétences ont été fixées par le législateur : la formation des jeunes et des demandeurs d'emploi pour les régions, l'insertion sociale et professionnelle des allocataires du revenu minimum d'insertion pour les départements.

Les régions ont fait part de leur position sur cette réforme, tout comme les départements. Elles s'interrogent sur l'organisation et le pilotage des multiples structures qui existent à l'échelon territorial et qui interviennent dans l'accueil, l'accompagnement et l'orientation des demandeurs d'emploi.

La création des maisons de l'emploi et de la formation, en 2005, a permis le rapprochement des équipes sur le terrain, au bénéfice du demandeur d'emploi. Parce qu'elles jouent un rôle dans la formation et dans le retour à l'emploi, les régions doivent être parties prenantes : présentes au conseil d'administration de l'ANPE, elles doivent l'être au conseil d'administration de la nouvelle institution ; nous avons d'ailleurs déposé plusieurs amendements en ce sens.

En outre, comme le demandent les régions, pourquoi la loi n'autoriserait-elle pas celles qui le souhaitent à élaborer, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, après concertation avec l'État, les collectivités locales et leurs groupements, les organismes du service public de l'emploi et les partenaires sociaux, un schéma régional de l'emploi opposable aux différents partenaires ?

Cette proposition de redéfinition de la gouvernance territoriale s'inscrit dans une logique d'amélioration de la cohérence et de la coordination des outils dévolus à l'emploi.

Le quatrième point concerne la question du financement.

S'agissant de la dimension financière de la fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC, le préalable consiste à garantir que les fonds destinés à l'indemnisation des chômeurs et collectés auprès des entreprises et des salariés seront « fléchés » vers les demandeurs d'emploi.

Le fait que l'assurance chômage ait enregistré en 2007 un excédent de 3, 5 milliards d'euros, lequel devrait atteindre 5 milliards d'euros cette année, ne doit pas être l'occasion pour l'État, qui ne cesse de creuser les déficits, de se servir de ces fonds afin de se désendetter un peu. Car la tentation est sans doute grande de se servir de cette manne, d'autant que le budget pour 2008 a été bâti sur des hypothèses de croissance particulièrement déraisonnables et que la protection sociale s'inscrit dans une « dynamique » déficitaire qui devrait la conduire à un déficit cumulé de plusieurs dizaines de milliards d'euros à l'horizon 2012.

Au-delà de la volonté affichée de mettre ce texte au service des demandeurs d'emploi, la question relative au traitement comptable de ce dossier mérite d'être posée. En effet, l'article 3 dispose qu'au moins 10 % des cotisations d'assurance chômage sont « fléchées » pour financer la nouvelle structure. Or le surplus que représente cette masse budgétaire n'est pas pris en charge par le budget de l'État. Dans les faits, cela signifie donc un désengagement de l'État à l'endroit du service public de l'emploi.

Si le nouvel article L. 311-7-5 prévoit que le budget de l'institution comporte trois sections non fongibles - « assurance chômage », « solidarité » et « fonctionnement, intervention et investissement » -, la part de l'État n'est pas précisée.

Partant, des interrogations se posent quant aux dispositifs d'indemnisation et à leur non-fongibilité. En outre, si, comme le souhaite la présidente de l'UNEDIC, les cotisations restent acquises uniquement aux demandeurs d'emploi indemnisés, ce ne sont que 50 % des chômeurs qui sont concernés. Quid du devenir de la solidarité nationale envers les autres ?

Cette question revêt une dimension capitale quand on sait que les 426 100 décisions de radiation prises au cours de l'année 2006 ont été deux fois plus nombreuses qu'en 2002 et cinq fois plus qu'en 1996.

S'y ajoute la question de la traduction de la mobilité géographique des demandeurs d'emploi, telle qu'elle est mentionnée au 2° du nouvel article L. 311-7. Deviendra-t-elle un motif supplémentaire de radiation en cas de non-respect ? Les récentes déclarations du Président de la République peuvent nous inciter à le penser. Ne risque-t-on pas de voir les publics les plus en difficulté orientés vers les collectivités locales, en particulier les conseils généraux, notamment au travers de la montée en charge du revenu de solidarité active, le RSA ?

Enfin, comment ne pas prendre en considération la volonté du MEDEF de gérer la politique de l'emploi dès lors que sa position au sein de la nouvelle instance est renforcée par la mise en place d'une majorité de gestion, consacrée par l'alliance entre l'État et les employeurs ?

Le cinquième point est relatif au devenir des personnels.

Le projet de loi précise qu'à l'horizon 2012 l'URSSAF assurera le recouvrement des cotisations d'assurance chômage. La disparition annoncée de ce service des ASSEDIC concerne 1 800 salariés, dont l'activité devra connaître une nécessaire évolution vers les demandeurs d'emploi ou vers les entreprises.

La grève du 27 novembre dernier a mobilisé près de 70 % du personnel, lequel recourt très rarement à ce genre d'action. Les mots d'ordre centrés sur le recouvrement et les garanties concernant la convention collective démontrent combien les personnels sont inquiets face aux risques de dégradation de leurs conditions de travail, mais aussi de remise en cause de leurs acquis sociaux.

Pour la réussite de l'opération, il est indispensable que le personnel soit associé, et non pas contraint.

En outre, rien n'est précisé quant à la prise en compte de l'impact budgétaire du nouveau statut.

Ainsi, dans la mesure où c'est la nature juridique de l'employeur qui détermine l'affiliation aux régimes complémentaires, les agents de l'ANPE pourraient, en raison de leur transfert vers une institution nationale, qui, selon l'article 2, « est soumise en matière de gestion financière et comptable aux règles applicables aux entreprises industrielles et commerciales », être affiliés à l'ARRCO et à l'AGIRC.

D'ailleurs, les représentants de l'IRCANTEC, que nous avons reçus sur l'initiative de Mme la rapporteur, nous ont fait part de l'inquiétude des agents de l'ANPE quant à la perspective d'être affiliés à l'ARRCO et à l'AGIRC. De fait, il y aura des conséquences directes non seulement sur le taux de cotisation, mais aussi sur le niveau des pensions. Dans un contexte de dégradation constante du pouvoir d'achat et de remise en cause des périodes de cotisations retraite, cette inquiétude est légitime.

En tout état de cause, les incertitudes qui pèsent sur le statut des personnels ne sont pas de nature à permettre aux professionnels de vivre cette fusion dans la sérénité. Ces derniers jours, j'ai ressenti une crispation de la part des personnels de l'ANPE et des ASSEDIC.

Le sixième point a trait à la question immobilière.

L'article 2 prévoit, par l'insertion d'un article L. 311-7-11 dans le code du travail, que les biens immobiliers détenus par l'UNEDIC et par les ASSEDIC, lesquelles sont régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, relèvent du domaine privé. L'article 7 dispose que ces biens sont mis à disposition de la nouvelle institution dès sa création.

Lorsque les ASSEDIC vont se dissoudre pour intégrer le nouvel opérateur, le transfert ne pourra s'effectuer que vers une association ayant le même objet, soit l'UNEDIC. Dans ce cadre, il est essentiel que les procédures mais aussi les intérêts patrimoniaux concernés soient scrupuleusement respectés. Tel est le sens de la délibération adoptée par le conseil d'administration de l'UNEDIC le 29 novembre dernier. Or la rédaction proposée dans le projet de loi ne le garantit pas.

Cette question est d'autant plus importante que, si l'on en croit la presse, le nombre d'antennes passerait de 1 600 à 1 200 et la carte des nouvelles implantations serait d'ores et déjà en cours d'élaboration, voire finalisée. Madame la ministre, j'espère que vous nous rassurerez sur ce point.

En conclusion, nous pensons que ce texte ne constitue en rien une réforme et qu'il ne peut constituer une solution de rechange à une politique de l'emploi dynamique et rénovée qui prendrait en considération l'ensemble des éléments permettant de lutter contre le chômage. Une telle politique fait défaut à notre pays. Je pense particulièrement aux jeunes, notamment à ceux qui sont victimes de discriminations dans l'accès à l'emploi ; je pense aussi aux travailleurs séniors qui, comme me l'ont rapporté des associations, se trouvent écartés des entreprises dès 45 ans ; et je pense à bien d'autres encore.

Ce texte se singularise par des manques, des incohérences, voire des contradictions, sources d'inquiétudes légitimes pour les acteurs de l'emploi et les personnels concernés par la fusion.

Ce projet de loi hâtif, voulu par le Président de la République, réforme pour parler et communiquer, n'apporte pas de vraie réponse en matière de politique de l'emploi.

Alors qu'un nouveau rapport de l'Inspection générale des affaires sociales devrait paraître à la fin de janvier, qu'un nouveau contrat de travail est en discussion, qu'une réforme du marché du travail est en négociation, que la sécurisation des parcours professionnels fait l'objet d'un débat, que doit être réformée la formation professionnelle et qu'un rapport est attendu sur les maisons de l'emploi, décidément, rien ne justifiait une telle précipitation dans la présentation et le vote de ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je voudrais tout d'abord vous remercier, madame le rapporteur, du rapport que vous avez établi au nom de la commission des affaires sociales, rapport qui est maintenant celui du Sénat.

Comme vous le soulignez, la fusion de l'ANPE et de l'UNEDIC constitue une étape essentielle de la démarche de modernisation de notre marché du travail.

Madame la ministre, vous l'avez dit, la baisse du chômage depuis le début de l'année 2006 est une réalité tendancielle, qui rend d'ailleurs a posteriori assez dérisoires certains « faux débats » sur les statistiques de l'année dernière.

Mais nous pouvons, nous devons faire mieux, notamment en termes de taux d'activité, d'emploi des jeunes et des séniors. Ceux-ci ont trop souvent été des variables d'ajustement en raison d'une politique de l'emploi inexistante depuis vingt-cinq ans.

Notre marché du travail a besoin d'être optimisé. Par exemple, le délai est trop long entre la rencontre de l'offre et de la demande d'emploi. Savez-vous, mes chers collègues, que, voilà quatre ans, ce délai était en moyenne de six mois ?

Cette rigidité s'explique par un faisceau de causes.

Il s'agit, d'abord, de la complexité de nos dispositifs et de nos structures - État, Agence nationale pour l'emploi, UNEDIC -, qui ne pouvaient même pas dialoguer, sur le plan informatique, il y a encore peu de temps.

Il s'agit, ensuite, de la complexité de nos relations du travail, qui, avec l'objectif légitime de protéger le salarié, nous a conduits trop souvent aux licenciements détournés, aux conflits, parfois aux vrai-faux conflits, ou au passage du salarié par la case « chômage », faute de pouvoir construire une transition professionnelle.

Je l'ai dit, l'exclusion des jeunes et des séniors a été trop massive.

Le texte que vous nous présentez, madame la ministre, s'il est rupture au sens moléculaire, suivie d'une fusion de réseaux, s'inscrit, en la renforçant, dans la continuité d'une démarche engagée en 2004 par la remise à François Fillon d'un rapport rédigé par Jean Marimbert et évoquant une « mosaïque » dont le cryptage était tel qu'il ne permettait pas de communiquer et de se comprendre. Ce rapport fut d'ailleurs pour partie à l'origine du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale que j'ai eu l'honneur, avec Jean-Louis Borloo, de défendre en 2004 à cette tribune.

Ce texte est aussi le fruit de l'accord du 18 janvier 2006 entre les partenaires sociaux sur la nouvelle convention d'assurance chômage, de la convention de reclassement personnalisé et de l'expérimentation du contrat de transition professionnelle.

Un cheminement de près de quatre ans nous permet aujourd'hui d'aborder l'examen de ce texte et de prendre une décision tout à fait essentielle.

Je procéderai à quelques rappels sur les apports de la loi de programmation pour la cohésion sociale.

La convention tripartite entre l'État, l'ANPE et l'UNEDIC du 8 octobre 2005 a eu pour objet d'améliorer le service rendu aux demandeurs d'emploi. Car nous devons d'abord nous intéresser aux demandeurs d'emploi avant d'aborder la question des structures ! Celles-ci sont certes importantes, mais elles ne sont que des outils. Nous avons trop tendance, dans notre pays, à croire que, parce qu'on a créé une structure, on a réglé un problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Or le sujet essentiel, c'est la rencontre entre un demandeur d'emploi et un offreur d'emploi.

Il faut aussi tenir compte de l'expérimentation des guichets uniques - madame Procaccia, dans votre rapport, vous parlez de l'expérience très positive d'Issy-les-Moulineaux - et du rapprochement opérationnel s'agissant du système d'information commun, le GIE informatique. Ce rapprochement n'a pas été simple.

Enfin, il convient de citer le suivi mensuel personnalisé des demandeurs d'emplois.

Il faudra mettre fin à quelques paradoxes, mais un texte ou une réorganisation ne suffiront pas !

Alors que 500 000 emplois ne sont pas pourvus aujourd'hui, il existe 100 métiers en tension. Comment peut-on accélérer la mise en relation entre offres et demandes d'emploi ?

Alors que nous sommes le pays qui, en pourcentage, a le plus d'agents affectés à la lutte contre le chômage - 24 000 plus 14 000 salariés, auxquels s'ajoutent les services de l'État -, nous faisons partie de ceux qui ont le moins de conseillers référents par demandeur d'emploi : les pays qui réussissent sur le marché de l'emploi comptent trente demandeurs pour un conseiller référent, contre plus de cent chez nous, parce que nos structures absorbent le reste.

Aujourd'hui, l'objectif est de rétablir des conseillers auprès des demandeurs d'emploi pour assurer un suivi personnalisé. La priorité est de permettre à des hommes et des femmes qui en sont privés de trouver ou de retrouver un emploi. Nous l'avons constaté au fil des années avec les partenaires sociaux. Regardons ce qui se passe chez nos voisins européens.

Il faut mieux conseiller, mieux accompagner, mieux rechercher les offres d'emploi. Car du fait de la lenteur de la mise en relation de l'offre et de la demande, un certain nombre d'employeurs se retirent de la dynamique de création d'emplois et n'offrent plus d'emplois.

Il faut aussi mieux assurer la préparation à la transition professionnelle. Je voudrais insister sur le rapport de nos collègues Jean-Claude Carle et Bernard Seillier sur la formation tout au long de la vie, y compris au moment de la transition professionnelle, afin que les salariés qui changent d'emploi ne soient plus contraints de passer par la case « chômage ». Nous devons éviter de mettre en place des « usines à gaz » et préparer des hommes et des femmes aux métiers de demain.

Madame la ministre, vous avez engagé une longue concertation avec les partenaires sociaux. D'ailleurs, quand le Comité supérieur de l'emploi approuve un projet de texte, c'est un signe !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Les grands principes que vous avez posés me paraissent essentiels : le respect d'un paritarisme fort - il faut que l'assurance chômage demeure un acte majeur de responsabilité des partenaires sociaux, qui doivent être les « co-constructeurs » de la politique de l'emploi - ; une gouvernance nouvelle avec des partenaires sociaux majoritaires ; une dimension territoriale des politiques de l'emploi, sans oublier le rôle des collectivités territoriales - la région pour la formation -, du bassin d'emploi, des maisons d'emploi ; enfin, le pragmatisme dans l'évaluation des résultats.

Mme le rapporteur a fait allusion aux interrogations des personnels, qui sont légitimes ; nous avons d'ailleurs eu des échanges sur ce point. Les réponses apportées, le travail d'écoute et de proposition qui a été conduit sous votre autorité, monsieur le président de la commission, sont porteurs d'assurance. Le débat devrait permettre de rassurer les uns et les autres.

Vous le comprenez, je suis favorable à la fusion des réseaux, qui est le fruit de quatre années de cheminement.

Pour conclure, n'oublions jamais que les structures, certes importantes, ne sont que des outils et que le coeur de notre débat c'est l'emploi. Il est une catégorie dans ce pays qui a longtemps été maltraitée : le demandeur d'emploi non indemnisé. Il a souvent été l'oublié de nos politiques de l'emploi ; il doit être au coeur de nos préoccupations.

C'est donc avec joie que je voterai ce texte, enrichi des amendements de la commission.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'emploi est depuis des années l'une des préoccupations majeures de nos concitoyennes et de nos concitoyens. Depuis trop longtemps, notre pays subit les conséquences d'un taux de chômage élevé : précarité, pauvreté, insécurité, mal-être social.

Or dans notre pays existent l'ANPE et l'assurance chômage.

Le 13 juillet 1967, un jeune secrétaire d'État aux affaires sociales, Jacques Chirac, crée l'Agence nationale pour l'emploi, alors que le chômage commence à se développer en France. Pour le gouvernement de Georges Pompidou, il y avait urgence à intervenir, au point que, dans une procédure d'exception, le Premier ministre défend la création d'une « organisation du marché du travail, comprenant tout d'abord un appareil de placement, d'orientation et de conseils ».

C'est cette organisation que Jacques Chirac aura mission de mettre sur pied. Il y a alors quelque 430 000 chômeurs, soit 2, 1 % de la population. Le même secrétaire d'État chargé de l'emploi minore déjà ce nombre, en n'annonçant pas plus de 140 000 sans-emploi.

Cette agence a pour objet d'aider les demandeurs d'emploi dans leur recherche et dans leur parcours de retour à une activité professionnelle. Elle est un service public, puisqu'elle remplit une mission nécessaire et indispensable pour notre société. De plus, il est fondamental que de tels services soient accessibles de manière égale à tous les citoyens.

Aussi, les sénateurs et sénatrices du groupe CRC sont très attachés à son existence et à son rôle de lutte contre le phénomène de violence sociale, inhérent au système capitaliste, qu'est le chômage, pour en limiter ses aspects.

L'ANPE était donc créée. À n'en pas douter, vous aimeriez aujourd'hui la voir disparaître ou, pour le moins, la contrôler en la plaçant sous la tutelle directe du pouvoir politique.

Pourtant, le chômage perdure et, en 1967 déjà, Georges Pompidou en décrivait les motifs : l'ouverture des frontières et la mise en concurrence des entreprises européennes entre elles, que le Premier ministre présentait comme « une nouvelle mutation pour notre économie qu'il convient non seulement de prévoir mais de préparer, et qui est la dernière étape du marché commun ». Il s'agit, en d'autres termes, de l'inflation et de la naissance progressive d'un capitalisme financiarisé qui trouve aujourd'hui son âge d'or.

Mais qu'avez-vous fait depuis ? Vous avez privatisé des domaines qui ne l'étaient pas encore ; je pense à EDF ou GDF, dont le Sénat a débattu hier.

Qu'avez-vous fait encore pour « prévoir et préparer » les crises à venir ? Vous les avez facilitées en défendant dans l'économie de service la directive Bolkestein et en organisant, avec vos amis de la Banque centrale européenne, la fin des monopôles des services publics.

Quarante ans plus tard, il y a encore 8, 5 % de chômeurs, preuve, s'il en est, que vos réformes toujours plus libérales, toujours plus à l'écoute du patronat et de ses désirs, à la recherche de toujours plus d'économies pour l'État et de précarisation du marché du travail, auront été contre-productives.

Quant au système français de protection sociale contre la privation involontaire d'emploi, il a été créé le 31 décembre 1958. Géré par l'UNEDIC, sa politique est mise en oeuvre par les ASSEDIC. Financée par les cotisations des salariés et des employeurs, l'assurance chômage est imprégnée du principe de solidarité que l'on retrouve en pratique au travers de la redistribution des cotisations.

Le groupe CRC est très attaché à ce principe de solidarité, tout comme au rôle de l'État, seul rempart contre les débordements et abus de l'économie de marché qui induit licenciements, emplois précaires et nombre d'autres maux sociétaux.

Aujourd'hui, force est de constater que le nombre de personnes privées d'emploi reste très élevé, puisqu'il est de 1, 4 million environ selon les chiffres officiels.

Si ce chiffre est aussi important, oscillant entre 8 % et 10% selon les systèmes de comptage et l'importance des radiations, sans doute est-ce la preuve, me direz-vous, qu'il faut réformer le service public de l'emploi. Probablement ! Mais il existe de nombreux types de réformes.

Depuis quelques années, le mot « réforme » est brandi de manière incantatoire par les gouvernements successifs, à croire que ce n'est pas le contenu qui compte, ni l'idéologie que ce terme sous-tend. Il faut réformer le régime des retraites, l'éducation, la santé et, maintenant, le service public de l'emploi.

L'actuel gouvernement, digne héritier des gouvernements de droite précédents, n'échappe pas à la règle. Il n'est plus question de rupture !

Mais penchons-nous un peu sur le contenu de ces réformes et sur la manière qu'elles ont de transformer en profondeur notre pays et son organisation sociale, pour réaliser un projet de société en adéquation parfaite avec l'économie libérale et ses thèses les plus antisociales.

Le service public de l'emploi en est un exemple éloquent. Maintes fois réformée, cette institution n'est plus aujourd'hui au service exclusif des salariés privés d'emploi, alors que telle était sa mission première. Pire, elle doit fournir aux entreprises des travailleurs façonnés selon leurs besoins. Les 500 000 emplois non pourvus brandis par le MEDEF sont malheureusement là pour me donner raison !

Les « privés d'emploi » sont étroitement surveillés. Ils sont culpabilisés, stigmatisés, et on imagine aisément que l'institution qui va prochainement être mise en place renforcera cette surveillance.

Cette conception est aux antipodes de celle que nous défendons. Nous considérons que, après un licenciement, le salarié est la victime. Il ne doit pas être soupçonné et surveillé comme un voyou alors que les responsables, ceux qu'il faut blâmer, sont les entreprises qui, malgré leurs profits colossaux, délocalisent pour gagner toujours plus.

Malheureusement, les exemples ne manquent pas : en Isère, récemment, l'entreprise Poliméri, dont l'actionnaire majoritaire, ENI, vient d'être condamné pour entente illicite par la Commission européenne, a mis à la porte 250 personnes avant de délocaliser son activité en Inde ! Madame la ministre, j'ai interrogé vos services sur ce sujet ; j'espère que vous pourrez m'apporter une réponse.

En France, environ 15 000 suppressions d'emplois par an sont dues aux délocalisations.

J'en reviens à votre réforme. Malgré les dispositions prévues dans le projet de loi, on peut s'interroger sur le statut des agents de la nouvelle institution. Comment être sûr qu'aucun ne sera désavantagé, puisqu'une nouvelle convention doit être négociée ?

Certes, madame Procaccia, nous sommes persuadés que les partenaires sociaux négocieront en pensant aux salariés. Toutefois, s'ils sortaient gagnants de toutes les négociations, cela saurait et il y aurait sans doute moins de manifestants dans les rues ! Je leur fais entière confiance pour revendiquer et réclamer un statut de bonne qualité pour les agents, mais je ne suis pas persuadée qu'ils seront entendus...

Par ailleurs, comment être sûr que les agents parviendront à assurer convenablement certaines missions pour lesquelles ils n'ont pas été formés, et que chacun d'eux conservera son emploi, notamment chez les cadres - il en est qui comparent cette fusion à un « tsunami » - ou encore chez les titulaires d'un CDD ?

Votre projet de loi comporte décidément de nombreuses zones d'ombre.

Madame la ministre, je m'étonne également que vous puissiez croire, ou tenter de faire croire, que c'est en fusionnant l'ANPE et les ASSEDIC que vous parviendrez à diminuer durablement le nombre de demandeurs d'emploi. Il n'y a, en la matière, ni mystère ni secret et, sur ce point, je rejoins M. Gérard Larcher : pour réduire le chômage, il faut offrir plus qu'un travail, il faut offrir un emploi stable et rémunéré à hauteur des qualifications demandées.

Il ne suffira pas de créer un guichet unique - une structure de plus, comme le dit encore M. Larcher - à destination des demandeurs d'emploi, car, ne vous en déplaise, ce qui fait défaut, ce sont bien les offres d'emploi elles-mêmes. Et je ne parle pas des quelques centaines de milliers d'emplois non pourvus, de ces temps partiels imposés et payés une misère, des emplois difficiles et non reconnus sur le plan salarial, que le MEDEF entend combler par tous les moyens et pour lesquels il sait pouvoir compter sur votre soutien.

L'adoption du plan d'aide au retour à l'emploi, le PARE, et l'esprit même de ce projet de loi en sont des exemples. Et que dire de l'émergence de la nouvelle notion, volontairement très abstraite, d'offre acceptable d'emploi, qui se substituera peut-être à l'offre valable d'emploi, l'OVE, dont on connaît les critères de référence ?

Madame la ministre, nous arrivons ici au coeur même de votre projet de loi. Vous soutenez que son objectif est double : d'une part, faciliter les démarches des usagers par la mise à disposition d'une plateforme polyvalente assurant l'ensemble des prestations nécessaires au recrutement et au placement et, d'autre part, mettre à disposition, au seul bénéfice cette fois des salariés et des personnes à la recherche d'un emploi, un ensemble de prestations facilitant leur orientation sur le marché du travail et leur donnant accès, à chaque étape de leur parcours professionnel, à l'accompagnement et, le cas échéant, à la formation dont ils peuvent avoir besoin. Mais de créations d'emplois, il n'est nullement question !

Pour ma part, je vois aussi deux objectifs dans votre texte, mais ils sont bien loin de ceux que vous affichez : faire des économies sur le dos des chômeurs et des agents ; finaliser votre projet de « modernisation » du marché du travail.

Votre premier objectif consiste donc à faire des économies.

Le Président de la République a une obsession : diminuer le nombre de fonctionnaires pour tenir sa promesse. Or, il est impossible de réduire trop massivement les effectifs de la justice, de la police ou de l'éducation tant ces domaines sont sensibles. Pour autant, ils ne seront pas épargnés, loin s'en faut, mais cela ne suffira pas. C'est ailleurs, ou plutôt partout, qu'il faut économiser : l'ANPE et ses agents en feront les frais.

Le projet de loi prévoit de fusionner des agences en les réunissant dans un même lieu géographique, d'où la fermeture de locaux. Ce sera le cas en ville, mais aussi dans les zones rurales, ce qui aura pour conséquence d'éloigner plus encore les demandeurs d'emplois du lieu qui devrait leur permettre de trouver un travail ou d'être justement indemnisés.

Cela aura également des incidences sur l'aménagement même des territoires périurbains et ruraux, déjà sinistrés par la fermeture des bureaux de poste, des hôpitaux et des maternités, des tribunaux de proximité, des gendarmeries, des classes d'écoles.

Mais cela ne vous émeut guère : pour vous, ce sont les économies réalisées qui comptent ! Les régions, les départements et les communes n'auront qu'à compenser, en acceptant par exemple l'installation sur leur territoire de maisons de l'emploi qu'il faudra financer, si tant est que vous ne les supprimiez pas purement et simplement.

Des fermetures de sites interviendront donc. On recense aujourd'hui 1 800 sites ANPE et ASSEDIC confondus. Vous avez promis aux partenaires sociaux que 1 000 sites au moins resteraient ouverts. Cela veut-il dire que près de 800 d'entre eux fermeront ?

Pouvez-vous me préciser selon quels critères sera effectuée la «sélection » entre les sites destinés à perdurer et ceux qui sont voués à la fermeture ? Avez-vous déjà élaboré un projet que vous gardez secret, sans doute par crainte des réactions qu'il susciterait ?

La presse évoque la suppression de vingt-cinq unités spécialisées mises en place par l'ANPE afin de répondre à des situations particulières touchant notamment les cadres, les anciens détenus ou les professionnels des métiers des arts et du spectacle. Madame la ministre, pouvez-vous confirmer ou infirmer cette information devant les sénatrices et les sénateurs, ainsi que devant les partenaires sociaux qui, je le sais, sont attentifs à nos débats ? La clarté est nécessaire à la pleine mesure de votre réforme.

En tout cas, nul doute que la recherche d'économies est l'un des objectifs du Gouvernement. Le Premier ministre ne s'en est d'ailleurs pas caché, allant jusqu'à préciser qu'il financerait ses réformes par de substantielles économies, réalisées notamment par la fusion de l'ANPE et des ASSEDIC. Autrement dit, vous faites payer aux chômeurs et aux agents les cadeaux qui ont été faits dans la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, dite loi TEPA !

On apprend, à la lecture du journal Les Echos du 4 janvier 2008 que, dans une note de synthèse datée du 14 décembre, le groupe de travail chargé de l'organisation pointe plusieurs sources de rationalisation : « des économies liées au maillage territorial » - j'ai évoqué les territoires ruraux -, « des économies liées à la dématérialisation » - fermetures de sites -, « des économies liées directement à la fusion. » - quid des agents ? On ne saurait être plus clair !

Le second objectif de votre projet de loi réside dans la mutation totale du marché du travail et des missions de ce que sera la future institution.

Vous voulez faire des demandeurs d'emplois une main-d'oeuvre corvéable à souhait, les contraindre demain à accepter sans condition tout emploi proposé, au nom de la fameuse offre valable d'emploi sur laquelle je reviendrai.

Cette volonté s'inscrit dans la logique du PARE et de l'ensemble des réformes votées par la droite et concoctées par le MEDEF. D'ailleurs, le Président de la République ne fait pas secret de ses projets : il veut renforcer les sanctions contre les chômeurs qui refusent deux offres acceptables d'emploi. Et M. Laurent Wauquiez de préciser : « il y a un travail en commun qui devra être fait avec les partenaires sociaux pour définir ce que sont deux offres d'emploi acceptables ».

C'est bien, en effet, la question dont nous aurons à discuter. Pour les partenaires sociaux et les associations, une offre valable d'emploi doit tenir compte d'au moins trois critères auxquels le MEDEF est par principe opposé : la formation du demandeur d'emploi, la même zone géographique et la garantie d'un salaire au moins égal au précédent.

Or, on sait déjà que, pour Mme Parisot et ses amis, la référence est anglo-saxonne. Outre-Manche, l'offre d'emploi et sa «viabilité » s'analysent non au regard des besoins du salarié ou de ses spécificités, mais au regard de l'agence de placement, rémunérée au pourcentage.

Ce modèle britannique que vous vantez tant a conduit la grande majorité des « privés d'emplois » à accepter, sous la pression, n'importe quel travail, quitte à cumuler les emplois pour être tout juste au-dessus du seuil de survie, à tel point que la Grande-Bretagne compte un nombre très important de travailleurs pauvres.

On est bien loin de la définition posée par l'Organisation internationale du travail en 1934, qui instaurait comme critères la distance entre le travail et le domicile, le niveau de rémunération et la stabilité du poste. On mesure bien la différence : on pense non plus offre valable d'emploi, mais offre acceptable d'emploi, autrement dit employabilité du demandeur d'emploi ou manière la plus rapide de le sortir des statistiques du chômage et des indemnisations, tout en satisfaisant le patronat.

Voilà le futur que vous promettez aux salariés de notre pays. Vous voulez les contraindre non seulement à travailler plus pour ne pas gagner nécessairement plus, mais aussi à travailler dans des domaines qui ne sont pas les leurs.

Une réforme est-elle nécessaire, ai-je demandé tout à l'heure. Eh bien oui, mais dans le sens de l'acquisition de nouveaux droits sociaux pour les salariés. Car les communistes ne sont pas pour le statu quo. Face à votre projet de fusion des ASSEDIC et de l'ANPE, qui vise à soumettre un peu plus le service public de l'emploi aux intérêts des entreprises, nous avançons des propositions.

Comme vous n'avez de cesse de reprendre vos vielles méthodes libérales - qui n'ont pourtant pas fait leur preuve, je viens de vous le démontrer -, je vous suggère d'innover en créant une véritable sécurisation des parcours professionnels.

Cela passe d'abord, et je comprends que cela vous déplaise, par le renforcement des droits des salariés : suppression des CNE et autres contrats précaires, suppression des trappes à bas salaires et des exonérations patronales.

Cela passe également par le renforcement du contrat de travail et par l'affiliation de tous les salariés à une institution de sécurisation des parcours professionnels.

Cela passe aussi par le droit à la formation continue, que vous avez évoqué à juste titre, madame la ministre. Il faut renforcer et amplifier la formation continue, en lien étroit avec l'Association nationale pour la formation professionnelle, l'AFPA, le Conservatoire national des arts et métiers, le CNAM, l'éducation nationale, les associations, les entreprises privées de formation, afin de permettre à chaque salarié d'évoluer au cours de son activité professionnelle, d'en changer s'il en ressent l'envie et de bénéficier d'un vrai droit à une formation qualifiante.

Cela passe enfin par un réel service public de l'emploi, rénové, intégrant la refonte de l'ANPE, de l'UNEDIC, des missions locales, ainsi que leur articulation et coopération nouvelle.

Enfin, dernier étage de cette construction ambitieuse, la réorientation et le contrôle des fonds publics, dont l'octroi pourrait être soumis à une obligation en termes d'emploi, par exemple en interdisant les licenciements spéculatifs sans remboursement des fonds publics alloués

Naturellement, et nous aurons tout loisir d'y revenir dans les prochains mois, il convient de maintenir les 35 heures qui, vous le savez, ont permis des créations d'emplois, même si, trop souvent, leur application a pu créer des difficultés.

Madame la ministre, comme vous pouvez le constater, nous sommes en totale opposition avec votre projet de loi, qui s'insère dans une démarche beaucoup plus large de libéralisation du monde du travail. Il stigmatise les chômeurs, précarise le monde du travail pour favoriser des entreprises qui font déjà des profits astronomiques, j'y reviendrai lors de l'examen des articles. Il est inefficace en matière d'emploi, dangereux pour les salariés de l'ANPE et des ASSEDIC, ainsi que pour les demandeurs d'emplois.

En conséquence, madame la ministre, mes chers collègues, vous aurez compris que nous voterons contre ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j'évoquerai brièvement les raisons pour lesquelles mon groupe votera le projet de loi qui nous est soumis.

La première est très simple : le chômage reste l'un des problèmes majeurs de notre société. Le Gouvernement tente d'y remédier par la mise en oeuvre de politiques économiques ou sociales et par l'action du service public de l'emploi, que ce texte vise à renforcer, ce que j'approuve. En effet, notre pays a besoin d'un service public de l'emploi fort afin que tous ceux et toutes celles qui sont à la recherche d'un emploi soient traités d'une façon égale.

Cette conviction résulte de l'expérience que j'ai acquise dans mon département ; j'y suis chargé de trouver des moyens pour aider les plus pauvres, ceux qui sont le plus éloignés de l'emploi, c'est-à-dire les bénéficiaires du RMI.

Si nous sommes parvenus, dans le département du Rhône, à réduire de 17 % le nombre de bénéficiaires du RMI en une année, nous le devons d'abord à la volonté de ces derniers de chercher un emploi : personne n'est volontaire pour être RMIste, tout le monde a envie de s'en sortir. Nous le devons ensuite au travail de grande qualité que nous avons pu bâtir avec l'ANPE.

La première caractéristique de votre projet de loi, madame la ministre, réside dans l'affirmation que l'emploi reste une affaire de l'État et qu'un service public est nécessaire pour s'en occuper. Je trouve quelque peu bizarre que personne n'ait encore relevé ce fait, notamment là où l'on aurait dû le faire ! C'est pourtant un point essentiel dans la façon de vivre à la française. Pour nous, il est extrêmement important que vous réaffirmiez la nécessité de l'existence d'un service public de l'emploi.

Beaucoup a été dit, et avec justesse, sur la « mosaïque » du service public de l'emploi, pour reprendre l'expression de M. Jean Marimbert, qui est assuré soit par une association, l'UNEDIC, dotée de missions de service public, soit par un établissement public, l'ANPE. Leurs rôles sont concomitants, elles vont dans le même sens ; il faut donc les renforcer, les faire aller de concert.

La fusion de ces deux organismes est, par conséquent, une très bonne chose. Notre groupe politique l'avait d'ailleurs demandée à deux reprises, en 2003 et en 2005. On nous avait expliqué alors que nous étions en avance, ce qui ne nous étonne guère, d'ailleurs, puisque c'est l'une de nos caractéristiques essentielles ! §J'ai généralement votre soutien dans ces cas-là, monsieur Fischer, et je vous en remercie !

Madame la ministre, il ne faut pas avoir honte de le dire avec force : nous avons besoin d'un grand service public de l'emploi, d'un organisme public qui va s'occuper complètement, du début à la fin, de tous les demandeurs d'emplois et les traiter de façon égalitaire.

Il est assez facile de placer des gens qui sont proches de l'emploi, qui sont concernés par des métiers dans lesquels la demande est forte ; il est beaucoup plus difficile de placer des gens qui sont loin de l'emploi, qui ont besoin de formation et qu'on aurait tendance à laisser de côté. L'écrémage existe lorsque l'on veut réduire le chômage ; cela se traduit par de bons chiffres pendant quelques temps, mais cela fait aussi des gens qui restent très loin, et très longtemps, de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

En tant que responsable, dans un département, des bénéficiaires du RMI, je sais bien que c'est l'ANPE qui met en place le traitement égalitaire de tous les demandeurs d'emplois. Il convient d'insister sur cette qualité du service public de l'emploi, ce qui justifie pleinement le soutien que nous apporterons à votre projet de loi.

Alors, bien sûr, des questions se posent

On peut, certes, s'interroger sur le nom du service public d'aide à emploi. Vous nous avez expliqué que vous laisseriez les partenaires le trouver ; pourquoi pas ? En revanche, nous ne pouvons pas être incertains sur la nature juridique de cet opérateur. Au cours du débat, madame la ministre, vous devrez être très claire sur ce point, qui est essentiel et sur lequel je souhaite que nous puissions avancer.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Nous devons également parler du devenir des « maisons de l'emploi », mises en place par la loi précédente. Le système est quelque peu confus, touffu ; il faut le rationaliser, le rendre efficace et dire quel sera le rôle de ces maisons.

La question du statut des personnels se pose aussi ; Mme le rapporteur l'a traitée de façon approfondie. Nous savons bien que cela ne peut se faire que s'il n'y a pas de pertes pour les agents ; certains vont même être gagnants.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Je voudrais savoir, madame la ministre, comment vous comptez financer l'augmentation des traitements des agents de l'ANPE.

Aujourd'hui, cette agence est financée par une dotation budgétaire de l'État - cela peut se comprendre -, par une dotation budgétaire de l'UNEDIC - cela peut également se comprendre puisque, chaque fois que l'ANPE travaille bien, les bénéficiaires de l'UNEDIC sont moins nombreux -, et, dans une moindre mesure, par une dotation budgétaire des collectivités locales qui passent des contrats avec l'ANPE pour placer des chômeurs, notamment des RMIstes. Dans mon département, nous consacrons ainsi un peu plus de 1, 5 million d'euros chaque année à l'ANPE.

Cela va-t-il nous coûter plus cher ? J'ai bien compris que la réponse est « oui », même si vous ne nous avez pas encore répondu !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Madame la ministre, nous attendons que vous nous apportiez des précisions sur l'ensemble de ces sujets.

En résumé, notre groupe est favorable à la fusion des services, à l'affirmation du rôle de l'État, à la création d'un grand service public de l'emploi. Nous attendons des débats qui vont suivre les réponses aux questions qui demeurent en suspens. Ainsi, en suivant Mme le rapporteur, nous pourrons faire en sorte que le projet de loi que vous nous présentez devienne réalité le plus tôt possible !

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Jarraud-Vergnolle

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les bonnes résolutions sont de saison, comme les réformes. L'urgence semble être un mode cher au Gouvernement et, par voie de conséquence, l'une des obligations du Parlement « nouvelle tendance ».

La réforme du service public de l'emploi, vaste sujet qui mérite toute notre attention et une mobilisation de tous les instants, n'y coupe pas. Ce texte, initialement programmé à l'Assemblée nationale, a été transféré au Sénat dans la hâte. Saura-t-on jamais la raison d'une telle précipitation ?

Certes, il est urgent de résorber le chômage. Depuis le temps qu'on y travaille, on s'étonne que l'urgence n'ait pas été déclarée plus tôt pour cette idée d'une fusion ASSEDIC-ANPE, qui n'est pas une nouveauté, n'en déplaise à notre Président qui n'est pas avare d'idées neuves ! Elle date de 1984 ; elle est ressortie des cartons en 1990, a réapparu en 2007 à l'Assemblée nationale et, enfin, cette année, elle est soumise au Sénat.

Les raisons de cet historique laborieux ne sont pas le sujet. Et, puisque nous y sommes conviés, nous pratiquerons l'ouverture - au moins d'esprit - en nous interrogeant sur la contribution réelle de ce projet à l'amélioration de la situation des demandeurs d'emploi et sur la réalité de l'efficience des transformations en matière de politiques sociale et de l'emploi.

Dès lors, l'urgence ne nous sert pas, mais nous ne sommes pas à une contradiction près !

Malgré la célérité vertigineuse des auditions préalables à l'examen de ce texte, son contenu appelle un certain nombre de remarques dont il nous faudra tenir compte ici, afin de ne pas installer une entité nouvelle qui soit ingérable. Pour ce faire, il nous faut prendre le temps d'opérer quelques rappels.

La loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005, notamment son article 1er, définit parfaitement le rôle et les missions du service public de l'emploi et sa déclinaison sur le territoire, prévoyant des modalités de coordination des actions respectives des différents intervenants, notamment l'ANPE et les ASSEDIC. De nombreux rapprochements ont déjà eu lieu et les deux organismes ont adopté le dossier unique du demandeur d'emploi. Alors, pourquoi envisager aujourd'hui une fusion dans l'urgence ?

De même, le plan de cohésion sociale a favorisé les créations des maisons de l'emploi, dans l'objectif de rapprocher le service public de l'emploi - ANPE, ASSEDIC - et les multiples partenaires que sont les missions locales, l'AFPA, les chambres consulaires, les organismes de développement économique, les structures d'insertion professionnelle, etc. Or, sans tenir compte de ce qui a été réalisé, vous introduisez de façon prématurée votre projet de loi alors même qu'une évaluation de ces maisons de l'emploi était programmée.

Parallèlement, un certain nombre d'élus qui s'étaient investis s'interrogent sur le devenir de ces maisons. Rappelons-nous que vous venez de geler leur conventionnement, alors que le territoire n'est pas totalement couvert et qu'elles n'ont pas encore été évaluées.

Elles ont pourtant une mission de diagnostic sur les territoires, d'observation, d'anticipation et d'adaptation des différentes mutations économiques. Elles ont développé un partenariat, une complémentarité, une mutualisation des ressources qui contribuent à optimiser leurs actions. Leurs autres missions correspondent bien à la structuration de l'offre d'emploi, au rapprochement et à l'accompagnement des demandeurs d'emploi jusqu'à leur insertion. Alors, pourquoi casser un outil qui commençait à se développer et à devenir réellement un guichet unique ?

Durant la dernière législature, de nombreuses modifications sont déjà intervenues dans le champ de la gestion des demandeurs d'emploi : création de 220 guichets uniques dans lesquels l'inscription peut être réalisée par un conseiller ANPE ou ASSEDIC ; adoption d'un dossier électronique unique résumant les parcours du demandeur d'emploi, dossier accessible à tous les organismes publics et privés participant à l'accompagnement des demandeurs d'emploi ; mise en place, en 2007, d'un GIE pour intégrer les services informatiques... Toutes ces avancées sont balayées d'un revers de main sans même avoir été évaluées.

Ce rappel préliminaire me permet d'introduire une analyse plus avancée du contenu de ce projet de loi. Les remarques que le texte appelle resteront dans le ton.

Comme vous nous l'avez annoncé le 10 décembre dernier, le projet de loi relatif à la réforme du service public de l'emploi que vous présentez a pour ambition de réduire le chômage, d'augmenter la croissance et l'emploi. Afin d'atteindre ces objectifs, vous envisagez la fusion de l'ANPE avec les ASSEDIC.

Si nous approuvons la création d'un guichet unique devant faciliter les démarches des usagers - demandeurs d'emploi et entreprises -, nous ne voyons pas en quoi la création de cette nouvelle institution contribuera à l'augmentation de la croissance.

Nous redoutons également que la vision strictement budgétaire, dans un souci de rationalisation des coûts du chômage en France, ne revienne à une centralisation de la politique de l'emploi autour de Bercy, au détriment des actions locales, qui sont souvent plus adaptées aux réalités des territoires que l'idée que l'on s'en fait à Paris.

Par ailleurs, la très louable rationalisation des dépenses sociales ne doit pas faire dépendre la politique sociale de choix économiques dont les chômeurs, pas plus que les travailleurs, ne sont responsables.

À ce titre, nous nous inquiétons aussi du fait que la reprise en main par l'État du financement et de l'attribution des allocations de chômage ainsi que du contrôle et du placement des demandeurs d'emploi via la fusion des deux instances n'ait pas fait l'objet d'une ligne budgétaire spécifique dans le projet de loi de finances pour 2008.

En effet, le budget de 2008 ne prévoit rien, si ce n'est 89, 2 millions d'euros pour financer le fonctionnement des maisons de l'emploi et 8, 8 millions d'euros pour investir dans trente-six maisons de l'emploi en cours de conventionnement.

Certes, la fusion ANPE-ASSEDIC devrait permettre de réaliser une économie telle que la subvention de l'État passerait de 1, 36 milliard d'euros à 1, 31 milliard d'euros. Mais le coût total de l'opération a été évalué par le rapport Marimbert à 300 millions d'euros. L'économie ne suffira donc pas. Qui donc y pourvoira ? Comptez-vous sur les réserves de l'UNEDIC ?

À moins que votre objectif ne soit l'économie pour elle-même, non pas comme un moyen mais comme une fin en soi. Ce serait dramatique pour la politique de l'emploi, mais se situerait néanmoins dans la droite ligne des réductions de crédits pour 2008 concernant notamment les contrats aidés, l'insertion par l'activité, l'insertion professionnelle des jeunes et, plus généralement, de la diminution du budget dans tous les secteurs, à l'exception des exonérations de cotisations sociales patronales, notamment dans la branche dite HCR, à savoir les hôtels, les cafés et les restaurants !

Le statut juridique de cette nouvelle entité n'est, en outre, pas clairement défini ni explicité. Vous évoquez une « institution nationale nouvelle ». Est-ce un établissement privé assurant des missions de service public, avec des salariés soumis au code du travail et à une gestion comptable et financière conforme aux règles applicables aux entreprises industrielles et commerciales, ou est-ce un établissement public à caractère industriel et commercial, de type EPIC ?

La question de la gouvernance est également posée dans le texte qui nous est soumis. Et ce n'est pas anodin !

J'ai évoqué une « reprise en main par l'État ». Or, la rationalisation des dépenses justifie-t-elle une centralisation et si oui, en quels termes ? Qui dirigera l'institution née de la fusion ?

Ce texte contient de grandes similitudes entre le mode de gouvernance proposé pour la future entité et ce qui a été réalisé pour l'assurance maladie : un directeur général nommé par le Gouvernement et disposant de tous les pouvoirs ainsi qu'un conseil d'administration paritaire réduit à la portion congrue. On notera en passant que le paritarisme est organisé ici de telle sorte que les représentants de l'État, des personnalités qualifiées et du patronat constituent toujours une majorité. En somme, pour les orientations et la gestion de la politique de l'emploi en France, le paritarisme n'est plus de mise !

Par ailleurs, si nous sommes renseignés sur la gouvernance à l'échelle nationale, il n'en est pas de même pour les instances régionales, qui n'associent pas les collectivités territoriales pourtant compétentes sur certains segments de la politique de l'emploi. Je pense notamment aux conseils régionaux pour la formation, aux conseils généraux pour le RMA et l'insertion, et aux collectivités locales pour la gestion des maisons de l'emploi.

Le fait de laisser les collectivités territoriales de côté, alors même qu'on leur demande de façon prévisionnelle de financer certaines prestations qui pourront être rendues par la nouvelle institution, laisse présager qu'elles devront gérer les populations les plus éloignées de l'emploi, via le RSA notamment, tandis que la gestion de la main-d'oeuvre qualifiée sera recentrée.

En conséquence, on s'interroge autant sur la couverture territoriale que sur les incidences pour les personnels. La gestion du personnel de chaque entité locale, avec deux cultures professionnelles différentes et un responsable issu de l'une ou de l'autre institution, ne sera réalisable que si elle est préparée dans un temps nécessaire et suffisant à la formation et à l'adaptation de ces personnels.

De quelle gestion des doublons prévisibles, notamment dans les effectifs des cadres, s'accompagnera le redéploiement des personnels ? Le suivi renforcé des demandeurs d'emploi nécessiterait au minimum 4 500 agents pour passer de la gestion de 60 à 30 demandeurs d'emploi par agent. Actuellement, nous sommes plus proches des 120 à 150 personnes par agent. La formation de ces agents n'a pas été prévue dans le budget pour 2008.

Quant au statut de droit public ou privé - 28 000 agents publics ANPE et 14 000 salariés de droit privé ASSEDIC -, le projet de loi prévoit le maintien de l'existant pour les salariés actuels et une nouvelle convention collective pour les nouveaux entrants. Outre la disparition d'une nouvelle catégorie d'agents publics, le renouvellement des CDD de nombreux salariés de l'ANPE est gelé. Même si la future convention collective devra être conforme aux prescriptions de l'OIT en matière de garanties déontologiques, les personnels de droit privé seront, de fait, plus vulnérables. Il s'agit bien là d'une nouvelle réduction d'effectifs de la fonction publique, sous couvert de fusion !

De même, de quelle gestion « immobilière » s'accompagnera la réforme ? Si je me réfère à ce qu'ont dit les précédents orateurs, j'ai vraiment l'impression de me répéter ... En fait, cela pose autant la question de la desserte territoriale que de l'accessibilité des services pour les demandeurs d'emploi résidant en zone rurale.

Pour ces questions très pragmatiques, il n'y pas trace de la moindre anticipation. Comme l'écrit Mme Annie Thomas, présidente de l'UNEDIC, dans Le Monde d'aujourd'hui : « on a construit l'outil avant de définir ses missions » !

J'en viens précisément aux missions.

Les récentes déclarations du Président de la République en matière de sanctions à l'égard des chômeurs récidivistes du rejet d'offres d'emploi « acceptables » apportent un éclairage nouveau sur les missions de la nouvelle entité. Elles confirment également les intentions déjà très claires du patronat dans ce dossier et son implication dans la négociation sur le contrat de travail et l'indemnisation des chômeurs.

Surveiller et punir, mais de façon unilatérale, bien sûr ! Une sorte de tri sélectif est une formule plus élégante, mais qui, prise au pied de la lettre, n'en est pas moins effrayante.

Je ne doute pas que mes collègues de l'opposition seront soutenus par les membres les plus éclairés de la majorité pour relever le caractère inique et détestable de cet état d'esprit lors des débats qui suivront. J'ose espérer qu'il apparaîtra à tous que cet état d'esprit n'est pas tourné vers les chômeurs, qu'il n'a pas l'intention de les soulager, ni de mieux les accompagner, malgré ce qui est dit.

La traque aux prétendus profiteurs - combien sont-ils au fait, le sait-on vraiment ou s'agit-il encore d'un chiffon rouge que l'on agite ? - est un volet très restrictif d'une politique de civilisation. Je laisse le soin à mes collègues de ne pas laisser passer les articles qui instaureraient insidieusement cette conception suspicieuse de la politique sociale. La mission de l'entité qui pourrait naître devrait être exclusivement de former, de qualifier, d'accompagner et d'insérer ceux que l'économie n'a pas favorisés ou laisse de côté. Cependant, le projet de loi reste évasif à ce sujet, de même que sur les articulations avec les autres partenaires de l'emploi et de la formation.

La planification de la mise en oeuvre des différentes actions n'est pas indiquée, excepté pour le recouvrement des contributions d'assurance chômage qu'il est prévu de confier aux URSSAF en 2012. C'est le second volet de la réforme. L'URSSAF, l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales, sera également conduite à recouvrer les cotisations chômage ...

Le présent projet de loi participe donc d'un mécanisme double.

D'une part, il vise à trier les demandeurs d'emploi en fonction de leur employabilité et donc du « risque » financier qu'ils représentent dans le sens d'une gestion rationalisée de l'assurance chômage. Celle-ci redevient, au sens strict, une assurance avec une mutualisation des risques calculés au plus juste. À moyen terme, n'est pas exclue la présence de sociétés d'assurances privées contre cet accident de la vie qu'est le chômage.

D'autre part, il tend à constituer un système global de protection sociale minimale - panier de soins réduit de l'assurance maladie, retraites de base et complémentaires non revalorisées - dans lequel entrera la protection contre le chômage pour les moins bien insérés professionnellement, le financement de cette protection de base, par définition non rentable, étant abandonné à la solidarité nationale.

La faiblesse et la division des représentants du monde salarié, la détermination du MEDEF et le besoin d'argent de l'État se conjuguent, dans la période actuelle, pour composer un angle de tir dont le Gouvernement entend profiter afin de mener à bien ce dossier, en prenant de vitesse de possibles mouvements sociaux.

Ce projet de loi ne semble pas destiné à aider les demandeurs d'emploi à trouver un emploi stable et de qualité. Il s'agit à nouveau d'un traitement statistique du chômage, à moindre coût, qui risque fort d'aboutir dans le contexte actuel à remplacer, pour les personnes concernées, le chômage par la précarité, à accepter n'importe quel emploi, dans n'importe quelles conditions et à n'importe quel salaire.

En conclusion, nous avancerons donc qu'une politique de l'emploi ne peut pas être circonstancielle. Elle doit s'inscrire dans le temps et dans une raison d'être qui conjugue efficacité économique, justice sociale et dignité humaine.

Nous terminerons par une citation de Lamartine extraite de l'article « la société industrielle », inséré au Bien Public de 1844 : « ...société en commandite, où les travailleurs ne sont que des rouages à user et à dépenser au plus bas prix possible, où tout se résout par perte ou gain au bas d'une colonne de chiffres, sans considérer que ces quantités sont des hommes, que ces rouages sont des intelligences, que ces chiffres sont la vie, la moralité, la sueur, le corps (...) de millions d'êtres (...) ».

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, lors de la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy s'était engagé à créer un service public de l'emploi universel. Nous le faisons !

Certains critiquent le fait que l'urgence ait été une fois de plus déclarée. Mais le traitement de cette question est urgent, car ce projet de réforme est évoqué depuis plus de vingt ans !

Aujourd'hui, il s'agit de mettre fin à un vrai parcours du combattant pour le demandeur d'emploi. Gérard Larcher l'a dit tout à l'heure, nous devons le placer enfin au centre du système. Arrêtons de parler de tout ce qu'il y a autour : c'est lui qui est important, c'est lui qu'il s'agit d'aider, c'est lui qui doit trouver facilement un emploi !

Comme l'a souligné le Président de la République, « le devoir d'un chômeur, c'est de rechercher un emploi, pas de supporter le fardeau de la complexité administrative. Et le devoir de la collectivité nationale, c'est de mobiliser ses moyens au service du retour du chômeur à l'emploi ».

Certains disent que tout cela n'est qu'une question financière. Non ! Quand on est à la recherche d'un emploi, un problème humain terrible se pose. On vous dit d'aller à telle ou telle porte, d'appuyer sur la touche A, puis sur la touche B.

Murmures sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Il existe aujourd'hui 900 points d'accueil pour l'ANPE et 700 points d'accueil pour l'UNEDIC. Grâce à la fusion de ces deux organismes, il sera possible de trouver à un même endroit l'ensemble des services.

La dynamique ainsi engagée est positive, mais les progrès réalisés restent encore insuffisants. Les guichets uniques ne sont pas assez nombreux : on comptait, à la fin du mois d'août dernier, 299 agences locales pour l'emploi et 248 antennes ASSEDIC sous la configuration du guichet unique, mais seuls une dizaine d'entre eux - j'insiste sur ce point, car j'ai entendu citer d'autres chiffres - fonctionnent en respectant réellement le principe d'unicité de site et de services. En effet, le plus souvent, les locaux, tout en étant voisins, ne sont pas réellement partagés et conservent des responsables différents.

En fait, la définition de guichet unique est très large. Il peut s'agir soit d'un site commun, soit de sites mitoyens ou distants de moins de 200 mètres, soit encore de sites ANPE qui accueillent des agents ASSEDIC, ou l'inverse. Nous devons donc aller vers davantage de simplification.

La réforme vise également à améliorer la qualité du service rendu. L'objectif annoncé est de diviser par deux le nombre de demandeurs d'emploi suivis par un conseiller référent, soit un ratio d'un agent pour trente demandeurs d'emploi au lieu de soixante. Par ailleurs, plus d'agents se consacreront à la recherche des offres d'emplois et à la meilleure adéquation de l'offre et de la demande.

Aujourd'hui, l'UNEDIC compte 14 00 personnes, dont 12 000 ne sont pas au contact du demandeur d'emploi, tandis que l'ANPE emploie 28 000 agents, dont 22 000 sont en contact direct avec le demandeur d'emploi : grâce aux synergies que permettra la fusion des deux organismes, le nombre de conseillers en contact direct avec les demandeurs d'emploi augmentera.

L'amélioration de la qualité du service rendu doit permettre aux chômeurs de retrouver plus rapidement un emploi. En France, et ce n'est pas normal, la durée moyenne du chômage des personnes de vingt-cinq ans à cinquante-quatre ans est de plus de seize mois, contre douze mois en moyenne pour les pays de l'OCDE et moins de neuf mois pour les pays du G7.

En outre, aujourd'hui, alors que plus de 400 000 offres d'emploi ne sont pas satisfaites, on compte près de 2 millions de demandeurs. Un sérieux problème de rapprochement se pose donc et nous devons nous efforcer de mettre un terme à cet état de fait.

La rénovation du service public de l'emploi sera utile à la fois aux chômeurs et aux entreprises, en permettant de mieux mettre en relation l'offre et la demande de travail. Je pense aux Job Center Plus, en Grande-Bretagne ou à l'Institut national pour l'emploi, en Espagne.

En France, il existe déjà des guichets uniques dont le bon fonctionnement doit être souligné. En effet, l'actuelle réforme parachève le mouvement de constitution d'un service public de l'emploi, engagé en mai 2006 par une convention tripartite entre l'État, l'ANPE et l'UNEDIC.

Je voudrais donc savoir, madame le ministre, comment vous envisagez la façon dont les maisons de l'emploi pourraient s'intégrer localement dans l'opération de fusion entre l'ANPE et l'UNEDIC.

En ce qui concerne le statut des agents, notre groupe se réjouit qu'il soit respecté par le projet de loi. Une période transitoire est prévue. Les agents de l'ANPE auront un droit d'option entre leur statut actuel et la nouvelle convention collective. Quant aux agents de l'UNEDIC et des ASSEDIC, ils conserveront leur convention actuelle jusqu'à ce que la nouvelle convention ait pu être négociée.

Par ailleurs, le Gouvernement s'est engagé à ce que la réforme n'entraîne pas de réduction d'effectifs - certains l'ont craint - et à ce qu'aucune mobilité géographique ne soit imposée.

J'aimerais également que vous me disiez, madame le ministre, ce qui est prévu pour former les agents qui devront, notamment, être de plus en plus compétents et proches de la personne qui cherche un emploi.

La réforme du service public de l'emploi est une étape. Le Président de la République ouvre, en effet, un vaste chantier de lutte contre le chômage et de promotion de la réinsertion. À cet égard, notre groupe se réjouit tout particulièrement que se tienne prochainement, dans le cadre des travaux de la Haute Assemblée, un débat portant sur le Grenelle de l'insertion.

Je rappelle que les derniers chiffres du chômage - on nous a toujours beaucoup critiqués sur ce sujet - montrent que la politique du Gouvernement commence à porter ses fruits. En effet, pour la première fois depuis 1982, le nombre des chômeurs est passé sous la barre des 2 millions de personnes. Sur les quatre derniers trimestres, 312 000 emplois ont été créés dans l'ensemble de l'économie. La baisse du chômage touche toutes les catégories, notamment les jeunes, les seniors et les chômeurs de longue durée.

Le Président de la République a fixé un objectif ambitieux : atteindre le plein emploi en cinq ans, ce qui signifie un taux de chômage inférieur à 5 % et un taux d'emploi proche de 70 %.

Le projet de loi que nous étudions aujourd'hui est un texte fondateur qui, accompagné d'autres réformes telles que celles des contrats aidés ou de la formation, redonnera l'espoir à nombre de nos concitoyens.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Je rappelle au Sénat que le groupe Union pour un mouvement populaire a présenté une candidature pour la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.

La présidence n'a reçu aucune opposition.

En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame :

- M. Simon Loueckhote membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, à la place laissée vacante par Serge Vinçon, décédé.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-sept heures quinze, est reprise à vingt-et-une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Roland du Luart.