La commission a procédé à l'audition de M. Philippe Séguin, Premier président, Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6e chambre, MM. André Gauron et Jean-Philippe Vachia, conseillers maîtres de la Cour des comptes sur la certification des comptes de la sécurité sociale et la situation des finances sociales.
a présenté le rapport de la Cour des comptes, adopté la veille, sur la certification des comptes du régime général de la sécurité sociale, dont la Cour s'est acquittée pour la troisième fois en vertu de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale. La certification consistant à donner une assurance raisonnable que les états financiers ne comportent pas d'anomalies significatives, cet exercice permet d'apporter une indication fiable sur la situation financière et patrimoniale du régime général et une information sincère sur le montant du déficit.
La certification donne par ailleurs à la Cour l'occasion d'analyser systématiquement les procédures de contrôle du régime général et d'en évaluer l'efficacité, conduisant ainsi les caisses de sécurité sociale à prendre conscience des risques de leur activité : risques d'erreurs de liquidation ou risques de fraudes aux prestations et aux cotisations par exemple. La dynamique créée par la certification a contribué à accélérer l'effort de mise en place de dispositifs de contrôle interne effectifs. Ainsi, c'est dans le cadre des contrôles liés à la certification que la caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) a repéré, à la fin de l'année 2007, une erreur systématique concernant des millions de retraités liée aux informations envoyées par l'Unedic sur les périodes de chômage assimilées à des trimestres de cotisations retraite. La certification est donc un moteur puissant de développement du contrôle interne et, par là-même, d'une meilleure maîtrise des finances sociales, voire de la qualité du service rendu aux assurés.
Pour la première fois en 2008, les comptes des autres régimes de sécurité sociale ont été soumis à une certification par des commissaires aux comptes. Compte tenu des relations financières complexes existant entre ces régimes et le régime général, la Cour a défini avec leurs commissaires aux comptes un cadre contractuel d'échanges d'informations. Elle a également pris en compte les opinions de ces derniers, notamment le refus de certification des comptes de la mutualité sociale agricole (MSA), dans l'élaboration de ses positions.
Abordant les neufs opinions de la Cour relatives aux cinq branches (maladie, accidents du travail-maladies professionnelles, famille, retraite, recouvrement) et aux quatre caisses nationales (caisse nationale d'assurance maladie [Cnam], caisse nationale d'allocations familiales [Cnaf], Cnav et l'agence centrale des organismes de sécurité sociale [Acoss]), M. Philippe Séguin a signalé le refus de la Cour de certifier les comptes de la branche famille et de la Cnaf, ainsi que ceux de la branche vieillesse et de la Cnav, les autres comptes étant certifiés avec réserves.
A propos de la branche famille et de la Cnaf, il a rappelé que la Cour n'avait pas été en mesure d'émettre une opinion sur les comptes 2006 et 2007 en raison de trop grandes incertitudes sur le contrôle interne. En 2008, elle a pu évaluer beaucoup plus précisément les défaillances du contrôle interne en collaboration avec l'agence comptable de la Cnaf. Cette analyse l'a conduite à refuser de certifier les comptes. Le dispositif de contrôle interne souffre en lui-même de graves insuffisances et ne permet pas de maîtriser suffisamment les risques de fraudes ou d'erreurs de calcul. Plus de 4 % des dossiers d'allocations familiales présentent une anomalie financière, pour un montant significatif. Par ailleurs, les provisions et charges à payer enregistrées au moment de l'inventaire font l'objet d'importantes sous-estimations. Enfin, comme en 2007, le suivi comptable des flux liés à l'assurance vieillesse des parents au foyer n'est toujours pas fiable.
Il reste que des améliorations ont été constatées puisqu'un fichier national des allocataires - le « répertoire national des bénéficiaires » - dont la Cour souhaitait la mise en place depuis plusieurs années, est en cours de déploiement. Les caisses d'allocations familiales (Caf) disposent par ailleurs d'une connaissance plus sûre des ressources des allocataires, données qu'elles obtiennent désormais directement auprès de l'administration fiscale. Enfin, la Cnaf a prévu de revoir complètement en 2009 son dispositif d'analyse des risques de contrôle interne. Ces progrès sont rendus d'autant plus indispensables que la branche va être confrontée à un défi de grande ampleur avec la mise en place du revenu de solidarité active (RSA).
Evoquant ensuite les comptes de la branche vieillesse et de la Cnav, M. Philippe Séguin a rappelé que la Cour avait certifié les comptes pour 2007 en émettant des réserves, la principale portant sur le caractère potentiellement significatif des erreurs affectant le calcul des pensions de retraite.
Les travaux d'audit menés depuis lors par la Cour avec le concours de la Cnav ont permis de constater que ces erreurs sont effectivement significatives. Plus de 5,4 % des pensions de retraite calculées en 2008 présentaient une anomalie financière, ce qui correspond en valeur absolue à des montants significatifs. A ces erreurs internes s'ajoutent des défaillances dans le contrôle des données entrantes, c'est-à-dire des flux d'information en provenance des employeurs et des organismes sociaux. Ce problème est à l'origine de la fameuse « erreur » de calcul qui a récemment défrayé la chronique. En 2007, la Cour avait recommandé à la Cnav de formaliser dans une convention avec l'Unedic la nature des données adressées par cet organisme, qui n'était fixée par aucun document. La Cnav a ainsi découvert que le nombre de périodes assimilées, notifié au titre du versement d'indemnités de chômage, était majoré à tort depuis 1992, voire antérieurement. Cette erreur systématique résulte non d'un « bug » informatique, comme on l'a lu dans la presse, mais d'un manque d'attention portée à la nature et à la qualité des données adressées par les organismes sociaux.
Par ailleurs, la Cour a constaté l'absence de rapprochement entre le montant des salaires déclarés par les employeurs pour servir de base au calcul des retraites et le montant des salaires sur la base desquels ils versent leurs cotisations. Dès lors, des cotisations payées peuvent ne pas ouvrir de droits à la retraite tout comme des droits peuvent être ouverts sans paiement des cotisations correspondantes.
Pour autant, des avancées sont à attendre en 2009 dans la mesure où la Cnav connaît mieux les risques encourus grâce aux efforts conduits en matière de contrôle interne.
A propos de la branche recouvrement et de l'Acoss, M. Philippe Séguin a observé que la Cour avait refusé de certifier leurs comptes pour 2007 en raison d'un désaccord sur un montant de 980 millions d'euros qui minorait d'autant le déficit affiché par le régime général. Le désaccord a été surmonté en 2008 et tous les problèmes relevés par la Cour en 2007 ont fait l'objet d'un plan d'action de la part de l'Acoss. Des progrès sont néanmoins encore possibles et la Cour formule plusieurs réserves qui concernent, comme pour la branche famille, les écritures d'inventaire et l'insuffisance des provisions pour contentieux notamment. Par ailleurs, l'activité de recouvrement a été confrontée en 2008 à un défi majeur avec la mise en place de l'interlocuteur social unique. La montée en charge de ce dispositif a entraîné des difficultés de gestion importantes. Les conséquences financières de certains dysfonctionnements ont pu être chiffrées et intégrées dans les comptes. Pour les autres, en particulier les pertes de recettes liées à l'absence de recouvrement forcé des cotisations ou les difficultés de rapprochement des fichiers de cotisants, la Cour a été amenée à formuler une réserve générale.
En ce qui concerne, enfin, les comptes pour 2008 de la branche maladie, de la branche accidents du travail-maladies professionnelles et de la Cnam, la Cour les a, comme en 2007, certifiés avec réserves. Des progrès notables ont été réalisés depuis 2006 dans la performance du dispositif de contrôle interne des branches et de la Cnam, mais des lacunes subsistent concernant, par exemple, les provisions relatives aux paiements aux hôpitaux, les flux d'informations échangés avec les mutuelles ou les règlements aux établissements sociaux et médico-sociaux.
En définitive, les opinions émises par la Cour sur la certification des comptes peuvent paraître traduire une exigence de plus en plus forte de sa part, justifiée par une connaissance plus complète des branches et fondée sur la capacité à chiffrer les conséquences des insuffisances des contrôles. Pour autant, elle a constaté de nombreux progrès qui la confortent dans la conviction que la certification a permis d'engager une démarche salutaire d'amélioration du contrôle interne comptable et financier et de rationalisation des processus.
Puis M. Philippe Séguin a présenté le rapport, récemment adopté par la Cour des comptes, sur la situation et les perspectives des finances publiques, en insistant plus particulièrement sur la situation financière de la sécurité sociale. En 2008, le déficit du régime général s'est établi à 10,2 milliards d'euros, soit un niveau comparable à celui de 2007. Certes, la croissance des charges a été inférieure d'un demi-point par rapport à 2007, mais l'évolution des recettes a également été inférieure en raison des premiers effets de la contraction de la masse salariale. Comme l'Etat, la sécurité sociale a donc abordé la crise financière en situation de déséquilibre structurel et va subir en 2009 les conséquences du décrochage de la masse salariale.
Les branches présentent toutefois des évolutions contrastées :
- le déficit de l'assurance maladie a été stabilisé en 2008 légèrement en dessous de 5 milliards d'euros du fait du ralentissement tant de l'ensemble des dépenses figurant dans l'Ondam (3,4 % en 2008 contre 4 % en 2007) que des seuls soins de ville (2,5 % en 2008 après 4,4 % en 2007) et de l'instauration des franchises sur les remboursements mises en place au 1er janvier 2008. Néanmoins, l'objectif fixé en loi de financement a été dépassé de 860 millions d'euros (il l'avait été de 3 milliards en 2007). Le progrès est donc relatif et encore insuffisant ;
- le déficit de la branche vieillesse continue, en revanche, à s'aggraver puisqu'il a atteint 5,6 milliards d'euros contre 4,6 milliards en 2007, sous l'effet de l'arrivée massive de nouveaux retraités et de la poursuite des départs anticipés consécutifs à la réforme de 2003, qui pèsent pour 2,4 milliards sur les comptes de 2008 ;
- enfin, la branche famille connaît une rechute inquiétante du fait d'une augmentation des prestations de 3,5 %. Excédentaire de 0,2 milliard d'euros en 2007, la branche est redevenue déficitaire de 0,3 milliard en 2008.
L'ampleur du déficit constaté en 2008, ajouté à celui accumulé depuis le dernier transfert de dettes à la Cades ainsi qu'à l'endettement du fonds de solidarité vieillesse (FSV), avait conduit le Gouvernement à prévoir, dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, une nouvelle reprise de dettes par la Cades pour un montant de 26,9 milliards d'euros. Conformément à la loi organique sur les lois de financement de la sécurité sociale, selon laquelle tout nouveau transfert doit s'accompagner de la ressource nécessaire à son amortissement, 0,2 % de CSG ont été transférés du FSV à la Cades. Or, malgré l'excédent dégagé par le FSV en 2008, il était évident, dès les premiers signes de la crise financière de l'automne dernier, que la dégradation de l'emploi allait à nouveau peser sur les résultats de ce fonds et qu'il n'était pas raisonnable de le priver d'une partie, même faible, de ses ressources. La commission des comptes de la sécurité sociale prévoit ainsi un déficit du FSV de 2,1 milliards d'euros en 2009.
Les modalités retenues pour la reprise de ces nouveaux déficits par la Cades confirment le bien-fondé de la position de la Cour, qui juge prioritaire de rééquilibrer les comptes sociaux pour ne plus continuer d'accumuler des dettes.
En définitive, les comptes sociaux sont dans une situation critique depuis plusieurs années : le choix affiché d'un retour très progressif à l'équilibre des comptes du régime général conduit à l'accumulation d'une dette de plus en plus lourde qu'il faut bien financer par un supplément de recettes affectées à la Cades. Certes, ce choix limite à court terme l'augmentation des prélèvements obligatoires mais ne fait que rendre celle-ci à la fois inévitable et plus importante à plus ou moins long terme.
En ce qui concerne la situation des comptes sociaux pour 2009, il faut constater que le régime général a abordé la crise avec un handicap important. Son déficit devrait s'élever en 2009 à 20,1 milliards d'euros, soit un doublement par rapport au déficit structurel de l'année précédente. Le financement de ce déficit posera un problème dès cette année puisque le plafond des ressources non permanentes auxquelles peut recourir l'Acoss, fixé à 18,9 milliards d'euros en 2009, sera dépassé dès l'automne.
Le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique a assuré que le Gouvernement va procéder par décret à un relèvement de ce plafond, qui risque d'être très élevé en 2010 si aucune autre mesure n'est prise. Or, le recours aux ressources non permanentes pour financer les déficits cumulés du régime général comporte un double risque. D'une part, l'Acoss bénéficie actuellement d'une situation financière caractérisée par des taux d'intérêt à court terme très bas, qui pourrait durer moins longtemps que le portage de déficits croissants. D'autre part, la Caisse des dépôts et consignations a annoncé qu'elle limiterait ses encours au-delà d'un certain montant, ce qui contraindra l'Acoss à émettre des billets de trésorerie, alors même que le marché de ces billets est relativement restreint.
a alors souligné que la Cour, avec une grande constance, estime que la priorité est le retour à l'équilibre structurel. Or, un déficit structurel appelle des réformes également structurelles qui ont rarement un impact immédiat, ce qui justifie de ne pas en différer la conduite, mais pourrait rendre également inévitable, à plus court terme, une hausse des prélèvements sociaux. Des aménagements de prestations sont cependant possibles à brève échéance, qu'il s'agisse du durcissement des conditions d'accès au départ anticipé pour carrière longue, qui a déjà des effets positifs sur les comptes, ou de la mise en cause des majorations de durée d'assurance pour enfants.
Dans la branche famille, la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje) devrait être mieux encadrée. Par ailleurs, les enveloppes qui financent l'action sociale doivent rester limitatives et leur montant respecté. Pour l'assurance maladie, la Cour a montré que les réformes entreprises ces dernières années ont certes permis une meilleurs maîtrise des dépenses, mais qu'elles ont entraîné également des coûts pourtant parfaitement évitables. En matière de soins de ville, les franchises participent, au-delà de leur rendement direct, à l'inflexion souhaitée des comportements. Mais elles ne sont pas extensibles, dans la mesure où l'effort de maîtrise est imposé aux seuls patients et, parmi ceux-ci, à ceux qui ne souffrent pas d'une affection de longue durée. A l'opposé, la compensation pour les professionnels de santé de la moindre mesure d'organisation ou de maîtrise des dépenses par des rémunérations complémentaires va à l'encontre de l'objectif recherché, sans gain réel en matière de pratique médicale.
En ce qui concerne l'hôpital, le prochain rapport de la Cour sur la sécurité sociale mettra en évidence l'existence de multiples gisements d'économies dans tous les établissements par des progrès d'organisation et de fonctionnement. La loi de réforme de l'hôpital (HPST), définitivement adoptée par le Parlement, donne de nouveaux outils aux futures agences régionales de santé (ARS) pour accentuer l'effort de réorganisation du tissu hospitalier.
Enfin, la croissance du nombre de patients en affection de longue durée et l'importance de la dépense correspondante (64 % des remboursements en 2007 contre 51 % en 2004), qui ne concerne que 13 % des assurés, n'est pas durablement soutenable. L'explication de cette hausse par le vieillissement de la population, un meilleur dépistage des affections et des traitements à vie de plus en plus coûteux, paraît insuffisante dès lors qu'il est évident, dans le même temps, que les Français vivent plus longtemps en bonne santé.
a alors évoqué les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale pour souligner que, si l'Etat continue d'apurer ses dettes à l'égard des régimes de sécurité sociale, les insuffisances de crédits ouverts en lois de finances initiales en reconstituent de nouvelles. Ainsi, à la fin de l'année 2008, l'Etat a apuré ses dettes à l'égard de différents régimes autres que le régime général, mais sa dette à l'égard du seul régime général a augmenté de 1,3 milliard d'euros en dépit d'un réel effort pour mieux prévoir en loi de finances initiale les crédits budgétaires nécessaires au financement de l'aide médicale gratuite, de l'allocation aux adultes handicapés ou au remboursement d'exonérations ciblées de cotisations. A la fin de l'année 2008, les dettes de l'Etat à l'égard de l'ensemble des régimes de base s'élevaient à 3,6 milliards d'euros.
Concluant son propos, il a estimé que la situation financière des régimes de sécurité sociale est sombre. L'impact de la crise sur les recettes s'ajoute à une situation initiale dégradée. Autant la crise justifie la recherche de solutions exceptionnelles, autant le déficit qui existe depuis plusieurs années exige des réformes de fond préparant la sécurité sociale au vieillissement croissant de la population. Compte tenu de la nécessaire progressivité des effets des réformes, il convient, d'une part, de ne pas les différer, d'autre part, de ne pas exclure une augmentation des recettes à défaut de laquelle seront reportés sur les générations futures des déficits de plus en plus considérables.
revenant sur le refus de la Cour de certifier les comptes de la Cnaf, a rappelé que cette caisse n'a plus de conseil de surveillance depuis un an, le Gouvernement n'ayant pas pris l'arrêté désignant les membres de ce conseil.
a rappelé que la Cour, dans son rapport sur la certification des comptes de l'Etat pour 2008, a formulé une réserve substantielle à propos de la Cades et appelé de ses voeux une clarification des intentions du législateur, considérant que la Cades devrait être reclassée en participation contrôlée alors qu'elle figure actuellement dans les immobilisations financières de l'Etat en tant qu'entité non contrôlée. Il a souhaité avoir des précisions sur les hypothèses envisageables pour clarifier le statut de la Cades.
a fait valoir que la Cades remplit toutes les conditions pour être classée en participation contrôlée de l'Etat. Dans ces conditions, deux options sont ouvertes : l'application stricte des normes comptables et l'intégration de la Cades dans les comptes de l'Etat en tant qu'entité contrôlée, ce qui aura des conséquences sur le bilan et la situation nette de l'Etat, ou le rattachement de la Cades aux comptes de la sécurité sociale, ce qui réduirait l'intérêt du mécanisme de défaisance mis en place en 1996.
a interrogé le Premier président sur les premières conclusions de l'étude entreprise par la Cour sur la gestion de la trésorerie du régime général et la couverture des découverts des régimes de sécurité sociale.
Précisant que cette étude figurera dans le rapport de la Cour sur la sécurité sociale qui sera publié en septembre, M. Philippe Séguin a indiqué que quelques conclusions apparaissent d'ores et déjà. Le financement de l'Acoss par la Caisse des dépôts et consignations est moins coûteux que le financement bancaire. Cependant, le recours à la Caisse des dépôts et consignations et l'émission de billets de trésorerie, qui constituent les deux sources de financement de l'Acoss, ne sont pas adaptés à un portage de dettes sur des durées longues. Tandis que la Caisse des dépôts a fixé une limite à ses concours, le marché des billets de trésorerie, sur lequel l'Acoss constitue déjà le plus gros opérateur, est étroit. La Cades est un instrument plus adapté que l'Acoss au portage de dettes sur longue période, mais tout transfert de dettes à cet organisme doit s'accompagner d'un transfert de ressources permettant le remboursement. Tant que les taux d'intérêt à court terme demeureront aussi faibles qu'aujourd'hui, le financement de la dette par des ressources à court terme ne posera que des problèmes limités, mais rien ne permet d'affirmer que cette situation va perdurer.
a souhaité avoir des précisions sur les préconisations formulées par la Cour dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, notamment en ce qui concerne la remise en cause des niches sociales, les effets éventuels de la loi HPST sur la limitation de la croissance des dépenses de santé, les moyens privilégiés de renforcer la maîtrise médicalisée des dépenses à l'hôpital et la prise en charge des affections de longue durée.
a rappelé que la Cour s'intéresse depuis fort longtemps aux niches sociales autant qu'aux niches fiscales. Ainsi, dans le rapport qu'elle vient de présenter sur les concours publics aux établissements de crédit, elle invite les pouvoirs publics à préciser le statut de l'ensemble des éléments de rémunération au regard des règles fiscales et sociales plutôt que d'interdire certaines formes de rémunération. Les lois de financement de la sécurité sociale pour 2008 et 2009 ont permis des progrès dans la limitation des niches sociales, qu'il s'agisse de l'adoption de mesures relatives aux stock-options et aux indemnités pour certains départs en retraite, de la création d'un forfait social de 2 % ou de la taxation des parachutes dorés. En revanche, les indemnités de rupture de contrat inférieures à trente fois le plafond de la sécurité sociale demeurent soumises au régime social des indemnités de licenciement alors qu'une plus large part de ces indemnités pourrait être soumise au régime de droit commun. La taxation des stock-options et actions gratuites pourrait être accentuée. Les retraites chapeaux, qui concernent plus d'un million de salariés, bénéficient encore d'un cadre fiscal et social très avantageux. Il conviendrait en outre de se rapprocher des taux de droit commun pour les assiettes soumises au forfait social en augmentant le taux de ce forfait. Enfin, les cotisations sociales de l'Etat devraient s'appliquer à une assiette plus proche de la réalité en intégrant les primes.
Pour les retraites, certains avantages familiaux de retraite pourraient être plafonnés, fiscalisés ou réduits. La Cour, après avoir travaillé sur le minimum contributif, s'intéressera prochainement aux durées d'assurance. Sur les affections de longue durée, la Cour n'a pas travaillé récemment sur le sujet, mais la Haute Autorité de santé (HAS) a élaboré différents scénarii en 2007, notamment la modification des conditions d'entrée dans le dispositif d'affection de longue durée ou le remplacement de ce dispositif par le bouclier sanitaire. En ce qui concerne l'hôpital, d'importantes marges de productivité existent, mais les économies envisageables se traduiront très certainement par une diminution des effectifs de la fonction publique hospitalière.
a souhaité connaître la position de la Cour sur la situation du FSV et les conséquences de la suppression du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (Ffipsa).
a rappelé que le FSV a dégagé des excédents en 2007 et 2008, mais que la montée du chômage provoquera mécaniquement une dégradation de sa situation en 2009, aggravée par le transfert d'une partie des ressources de CSG de ce fonds vers la Cades. La suppression du Ffipsa, fonds qui avait été fortement critiqué par la Cour, s'est accompagnée d'un adossement de la branche maladie du régime des exploitants agricoles au régime général et l'attribution de recettes nouvelles à cette branche. Il convient encore de trouver une solution durable au déficit structurel de la branche vieillesse du régime, qui devrait s'élever à 1,2 milliard d'euros en 2009.
a demandé des précisions sur les positions de la Cour à l'égard des comptes de la branche famille et de la Cnaf. Le meilleur encadrement de la Paje passe-t-il par un resserrement des conditions d'accès à cette prestation ou par un renforcement des contrôles de sa distribution ? L'action sociale de la branche famille étant soumise à un budget limitatif, quelle est l'explication des dépassements constatés ? Les erreurs constatées dans les dossiers d'allocations familiales sont-elles majoritairement favorables aux Caf ou aux allocataires ? Enfin, concernant les comptes de la branche vieillesse, à combien le coût de l'adossement à la Cnav du régime de retraite des industries électriques et gazières est-il évalué ?
Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6e chambre, a indiqué que les conditions d'octroi de la Paje devraient faire l'objet d'une vigilance particulière, la montée en charge de cette prestation ne semblant pas s'arrêter pour l'instant. Le budget du fonds national d'action sociale (Fnas) est en principe limitatif, mais les caisses d'allocations familiales ont pris des engagements en termes de financement des dépenses de crèches et se sont trouvées liées pour plusieurs années, ce qui a provoqué des dépassements d'enveloppe avant qu'une correction soit opérée. Enfin, à propos des erreurs constatées dans les dossiers d'allocations familiales, l'essentiel n'est pas, pour la Cour, le montant des pertes provoquées par ces erreurs pour une caisse ou pour les allocataires, mais l'efficacité des systèmes de contrôle interne mis en place par les différentes caisses.
a précisé que les erreurs dans les dossiers d'allocations familiales provoquent une perte, sans doute sous-estimée, de 300 millions d'euros pour la Cnaf. L'adossement du régime des industries électriques et gazières augmente le déficit de la Cnav à hauteur de 262 millions, compte étant tenu des particularités du traitement comptable de la soulte due par les entreprises de ces industries, dont une partie est gérée par le fonds de réserve des retraites pour le compte de la Cnav.
est revenu sur l'erreur, récemment constatée par la Cnav, sur les périodes de chômage assimilées à des trimestres de cotisations retraite pour s'étonner que les systèmes informatiques de la Cnav et de l'Unedic ne soient pas compatibles et que, au sein même de certaines caisses, certains services ne soient pas dotés des mêmes systèmes informatiques. Il a souligné, en outre, le poids très lourd du dispositif de départ anticipé pour carrière longue dans les comptes de la Cnav.
a fait observer que, si les problèmes informatiques peuvent provoquer de graves erreurs, l'affaire mentionnée par Dominique Leclerc s'explique par une insuffisance de contrôle interne de la Cnav à l'égard des données qui lui sont transmises par d'autres organismes.
Evoquant la mise en place des franchises médicales, M. François Autain a rappelé que les sommes dégagées grâce à celles-ci étaient censées servir, non à réaliser des économies mais à faire face à des enjeux de santé publique importants tels que le cancer ou la maladie d'Alzheimer. Ne peut-on craindre que les économies immédiates qui en résultent ne se traduisent, à terme, par des dépenses plus importantes, certains patients renonçant aux soins primaires mais recourant ultérieurement à une hospitalisation et à des soins lourds qui auraient pu être évités ?
a tout d'abord observé que la Cour ne peut émettre d'avis sur la légitimité des décisions prises par les pouvoirs publics en matière de santé publique. La recherche d'un éventuel impact négatif sur les finances sociales de la mise en place des franchises relève de l'évaluation des politiques publiques, récemment consacrée lors de la révision constitutionnelle de 2008, et non de l'audit de performance tel que le pratique régulièrement la Cour. Peut-être celle-ci sera-t-elle conduite à l'avenir à assister le Parlement dans cette mission d'évaluation, mais elle devra alors s'entourer d'autres compétences, en particulier médicales.
a constaté que plusieurs des réserves émises par la Cour à propos de la certification des différentes branches du régime général sont liées à d'importantes erreurs dans le versement des prestations. Ces erreurs étant aggravées par des fraudes, comment peut-on progresser dans ce domaine ?
Sans nier l'importance de la lutte contre les abus et les fraudes, M. Philippe Séguin a considéré que la disparition de toutes les erreurs et fraudes constatées dans le fonctionnement de la sécurité sociale ne corrigerait pas pour autant le grave problème de déficit structurel que connaissent les comptes sociaux.
a questionné le Premier président sur l'efficacité des outils de contrôle mis en oeuvre par les différentes branches du régime général. Eu égard à la situation de plus en plus dégradée de la branche vieillesse, ne serait-il pas pertinent de créer, dès à présent, le cinquième risque pour mieux distinguer ce qui relève de la retraite de ce qui relève de la prise en charge sanitaire au titre de la dépendance ?
a souligné que les instruments de contrôle mis en oeuvre par les différentes caisses marquent d'incontestables progrès, mais qu'il est nécessaire que la Cour demeure vigilante pour que l'effort ne se relâche pas.
s'est interrogé sur la compatibilité du système de protection sociale mis en place au lendemain de la Seconde Guerre mondiale avec une politique libérale et ouverte au marché, telle que celle qui est aujourd'hui conduite.
a constaté que, pour l'assurance maladie, l'objectif doit être de rechercher en permanence les moyens d'assurer la compatibilité entre un système de protection généralisée et un système de distribution des soins fondé sur les principes de liberté, cette compatibilité n'étant pas spontanée.
a souhaité savoir si les différentes caisses ont mis en place des instruments de lutte contre les fraudes et les abus suffisamment efficaces.
s'est demandé si les responsables de ces caisses ne se doutaient pas, depuis fort longtemps, de l'existence et de l'importance des abus et des fraudes.
a confirmé que d'importants progrès, probablement trop tardifs, ont été faits dans la lutte contre les abus et les fraudes, celle-ci devant encore être accentuée, notamment dans un souci d'équité entre les usagers.
évoquant les travaux de la Cour sur les fraudes dans les différentes branches, a indiqué à son tour que beaucoup de progrès ont été accomplis sous l'impulsion du Gouvernement. Pendant longtemps, les différentes branches, à l'exception de la branche recouvrement, étaient peu sensibilisées à cette question. La branche maladie s'est cependant bien organisée pour lutter contre les fraudes. En revanche, pendant longtemps, la branche famille n'avait pas de fichier national des allocataires.
s'est demandé pourquoi, lorsque la HAS formule des recommandations pour le traitement de certaines pathologies, elle ne fournit pas d'étude économique sur les coûts comparatifs des différents traitements de la pathologie. Ce type d'action ne permettrait-il pas d'importantes économies dans le secteur ambulatoire ?
a jugé nécessaire que la Cour se penche sur les conditions de mise en circulation et de remboursement des médicaments. 80 % des médicaments mis sur le marché chaque année ne permettent aucun progrès dans le traitement des pathologies alors qu'ils sont vendus plus chers que les médicaments existants.
a relevé que la Cour mentionne des niveaux d'erreurs significatifs dans le cadre de la certification des comptes, sans toujours préciser le montant de ces erreurs. Il a demandé si cette démarche est volontaire et si des montants chiffrés figurent dans le rapport. Evoquant l'adoption, contestable à son sens, d'un amendement du Gouvernement autorisant, dans la loi HPST, l'AP-HP à présenter des budgets en déséquilibre, il s'est demandé s'il ne conviendrait pas de rechercher les moyens de permettre à la Cour de refuser de certifier des comptes en déséquilibre.
a constaté que la législation actuelle n'autorise pas la Cour à refuser de certifier les comptes au motif qu'ils sont déséquilibrés. La réalisation des études d'impact, telles qu'elles sont désormais prévues par la Constitution, peut permettre des progrès dans ce domaine en garantissant une information fiable au Parlement sur les conséquences financières des mesures qui lui sont proposées. A propos de la certification des comptes, il a souligné que celle-ci repose sur un faisceau d'indices et non sur le seul niveau des erreurs constatées. Ainsi, la Cour refuse toute discussion sur un éventuel seuil de signification, en deçà duquel les comptes seraient systématiquement certifiés.
répondant à Jacky Le Menn, a précisé que la HAS est désormais habilitée à réaliser des études médico-économiques et que la Cour procédera prochainement à un contrôle de cette autorité. D'ores et déjà, la HAS a réalisé d'importants travaux en matière de référentiels pour le bon usage, qui sont appelés à se développer encore. Enfin, les précédents travaux de la Cour sur le médicament montrent que, effectivement, un grand nombre de médicaments mis sur le marché à des prix supérieurs aux traitements existants n'apportent aucun progrès thérapeutique.