Séance en hémicycle du 23 janvier 2013 à 21h30

Résumé de la séance

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  • BPI
  • PME

La séance

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La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt, est reprise à vingt et une heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’ordre du jour appelle le débat sur la place des petites et moyennes entreprises dans notre économie, organisé à la demande du groupe UMP.

La parole est à M. André Reichardt, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre débat de ce soir, organisé sur l’initiative du groupe UMP, est relatif à la place des petites et moyennes entreprises dans notre économie. Permettez-moi d’exprimer ma satisfaction qu’il puisse avoir lieu, tant est important le rôle que ces entreprises jouent et pourraient jouer à l’avenir dans notre pays.

Au moment où, nous le savons tous, la préoccupation essentielle des Français porte sur l’emploi, alors que pour le dix-neuvième mois consécutif, en novembre 2012, d’après les derniers chiffres connus, le chômage a augmenté avec 1 250 demandeurs d’emploi de plus par jour, les regards se tournent souvent vers les grands groupes, dont les plans sociaux sont très médiatisés tant le nombre d’emplois qu’ils concernent interpellent les journaux et, bien entendu, leurs lecteurs. Or sait-on assez que, sur 60 450 défaillances d’entreprises recensées par la Banque de France entre octobre 2011 et octobre 2012, pas moins de 56 000 d’entre elles, soit 93 %, ont concerné les PME, autrement dit, selon le critère de l’Union européenne, des entreprises de moins de 250 salariés ?

À côté des PSA, ArcelorMittal, Virgin et autres Sanofi, qui ne sont en fait que les arbres qui cachent la forêt, figurent toutes les difficultés de petites et moyennes entreprises dont les plans sociaux, trop silencieux à l’échelon national, participent douloureusement à la casse de nos emplois. Aussi est-il utile, pour ne pas dire indispensable, de regarder de très près ce qui occasionne ces difficultés et de tenter d’y mettre fin. Accordons-nous en premier lieu, si vous le voulez bien, sur le constat de la situation économique actuelle.

Les défaillances d’entreprises repartent en nette hausse. Elles ont augmenté de 12, 5 % au quatrième trimestre de 2012. Un tel rythme n’avait pas été observé depuis les pires moments de la crise et, malheureusement, la quasi-totalité des secteurs est touchée.

La production industrielle corrigée des variations saisonnières a nettement reculé en décembre, selon la dernière enquête de conjoncture de la Banque de France. Selon celle-ci, le recul de la production, accentué tout particulièrement le dernier mois de l’année 2012, confirme la tendance baissière amorcée il y a plusieurs mois. La demande, elle aussi, ne montre malheureusement aucun signe de redressement, tant sur le marché domestique qu’à l’export.

Dans le secteur des services marchands, la Banque de France note que « l’activité apparaît un peu moins déprimée en décembre, même si les perspectives ne laissent entrevoir aucun rebond significatif à court terme ».

Quant au bâtiment, secteur important s’il en est, l’activité y a été à peu près correcte, nous dit-on, mais la visibilité est réduite et les prix restent à un niveau très bas.

Dès lors, le climat des affaires, mal orienté depuis le début de l’année 2012, conjugué à la stagnation du taux de marge à son niveau le plus bas depuis trente ans, pèse sur les décisions d’investissement de nos entreprises. Sur l’ensemble de l’année 2012, il y a un ralentissement de l’investissement des entreprises – moins 0, 2 % en 2012, contre plus 5, 1 % en 2011 – et, d’ores et déjà, les industriels prévoient un recul de 2 % de leurs investissements pour 2013.

Face à une telle conjoncture, quelles difficultés nos PME rencontrent-elles et quelles actions y a-t-il lieu de mettre en œuvre pour les aider à les surmonter ?

La première difficulté recensée, et ce n’est naturellement pas un scoop tant on en a parlé, notamment ces deux derniers mois, concerne la compétitivité insuffisante de nos entreprises. Pour fonctionner, se développer, créer de l’emploi, une entreprise doit de l’activité, « du boulot », comme on dit. Pour avoir ce travail, elle doit bien entendu avoir des clients et donc remporter des marchés. Et pour remporter des marchés, elle doit être compétitive !

Dans son rapport sur la compétitivité rendu au début du mois de novembre dernier, M. Louis Gallois a ainsi préconisé un véritable « choc de compétitivité » passant par diverses mesures, dont un transfert de charges de 30 milliards d’euros sur un ou deux ans, une stabilité fiscale, un effort drastique sur la formation en alternance, un accès facilité au financement, la sanctuarisation des budgets de la recherche publique et du soutien à l’innovation, ainsi que les aides aux pôles de compétitivité, et enfin – j’y reviendrai – un véritable pacte pour les PME.

Si l’on peut tous globalement s’accorder sur ces propositions, qu’en est-il vraiment de ces diverses préconisations et que peut-on faire de plus, le cas échéant ?

Sur le plan de ce qu’on appelle la « compétitivité-coût », le Gouvernement n’a pas souhaité s’engager dans l’allégement des cotisations sociales payées par les entreprises – prévu à hauteur de 20 milliards d'euros – et par les salariés, à hauteur de 10 milliards d'euros ; il a préféré mettre en place un crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, adopté dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2012, le 19 décembre dernier, par un ultime vote à l’Assemblée nationale.

Ce crédit d’impôt sera égal à 4 %, au titre de 2013, puis à 6 %, à partir de 2014, de la masse salariale brute supportée au cours de l’année pour les rémunérations inférieures ou égales à 2, 5 SMIC. Son application se fera donc, au titre de l’année 2013, en 2014.

Certes, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi pouvait être une opportunité de créer un choc de confiance, d’abaisser le coût du travail pour améliorer la compétitivité des entreprises en les incitant à investir et à embaucher. Son application dès 2013, pensions-nous, pouvait soulager la trésorerie des PME au bord de l’asphyxie. Il pouvait apporter aux entreprises un ballon d’oxygène pour investir et innover au service de leur compétitivité hors coût. Mais, pour cela, le crédit d’impôt devait être simple, lisible, ouvert à toutes les entreprises et s’appliquer immédiatement « en mesures sonnantes et trébuchantes », si vous me passez l’expression, pour nos entreprises.

Or tel n’est pas le cas. Le dispositif retenu est en définitive complexe, à telle enseigne que 74 % des dirigeants de PME jugent que le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi ne permettra pas d’alléger le coût du travail. Ce sentiment atteint même 81 % dans le BTP. Sans compter que les travailleurs indépendants sont interdits de crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Le Gouvernement a en effet écarté les travailleurs indépendants du bénéfice du crédit d’impôt. À entendre le ministre du travail, c’est l’absence de salaire qui empêcherait les travailleurs indépendants de bénéficier de la mesure à titre personnel. Pourtant, me disent-ils, quand il s’agit de prélever les cotisations sociales, les travailleurs indépendants ne sont pas exonérés au motif qu’ils ne perçoivent pas de salaire.

Les artisans et les commerçants ne comprennent pas cette mise à l’écart au seul motif qu’ils n’ont pas choisi la forme sociétale et le statut de chef d’entreprise salarié. Ils ont préféré l’indépendance, l’engagement, le risque et contribuent au moins autant que les autres acteurs économiques à la production de richesses. La mise à l’écart des travailleurs non salariés est, à notre sens, une erreur qu’il faudrait corriger très vite.

Par contre, l’autre proposition du rapport Gallois suggérant de relever les taux normal et réduit de TVA a bien été retenue. Dans le bâtiment particulièrement, où au 1er janvier 2014 le taux de TVA applicable aux travaux de rénovation des logements va passer de 7 % à 10 %, soit un quasi-doublement en deux ans par rapport au taux initial de 5, 5 %, cette augmentation va engendrer une baisse d’activité pour les nombreux travailleurs indépendants qui exercent dans ces secteurs du bâtiment et un surcroît de concurrence déloyale, parce qu’il faut bien l’appeler ainsi, à l’égard des auto-entrepreneurs, qui ne sont pas assujettis à la TVA.

Il est dès lors fort à craindre que nos PME aient encore à connaître de fortes déconvenues dans la compétition qu’elles seront amenées à livrer avec leurs concurrentes, tant sur le plan domestique qu’à l’exportation, en 2013 particulièrement, mais aussi en 2014.

S’agissant des éléments de compétitivité hors coût, les PME plus encore que les grandes entreprises réclament une plus grande flexibilité dans les relations du travail. Le rapport de M. Louis Gallois avait à cet égard relevé que « le dialogue social est insuffisamment productif » dans notre pays ; « un climat de méfiance s’installe trop souvent et interdit la recherche en commun de solutions aux problèmes de l’entreprise ».

À cet égard, il faut certainement saluer l’accord interprofessionnel du 11 janvier dernier, même s’il ne constitue, à notre avis, qu’une première étape vers la plus grande souplesse souhaitée par les entreprises. Quant à savoir s’il va servir et sécuriser l’emploi, notamment avec sa mesure phare, dont on nous a beaucoup parlé, de taxation des CDD, vous me permettrez de dire que je n’en suis pas sûr, quand je lis qu’au ministère du travail on affirme que « ce n’est pas une révolution et que les recrutements en CDD ne seront certainement pas divisés par deux ».

En tout état de cause, l’accord conclu entre les partenaires sociaux doit maintenant être transposé dans une loi. Le groupe UMP ne manquera pas d’être particulièrement attentif à ce que celle-ci ne soit pas vidée de ses articles donnant notamment plus de flexibilité aux entreprises.

Deux autres éléments de compétitivité hors coût méritent incontestablement d’être particulièrement soutenus dans nos PME : l’innovation et la formation vers une bonne qualification professionnelle.

Il est absolument nécessaire de faire progresser le nombre de démarches d’innovation au sein de nos entreprises. Dans notre pays, on confond encore trop souvent la recherche fondamentale et académique avec l’innovation. Par innovation, il ne faut d’ailleurs pas seulement entendre l’innovation technologique, mais bien toutes les démarches innovantes susceptibles de produire de la plus-value par rapport aux concurrents. Dès lors, le développement de l’innovation au sein des PME passe incontestablement, d’une part, par un écosystème de l’innovation lisible au service des entreprises et capable de diffuser l’innovation au plus grand nombre et, d’autre part, par une culture de l’innovation largement diffusée sur le terrain.

Cet écosystème trouve, à notre avis, légitimement à s’organiser dans les régions. En Alsace, dont je suis sénateur, nous avons initié la création d’Alsace Innovation, qui est une structure régionale d’accueil et d’ingénierie dédiée exclusivement à l’accompagnement et au financement des projets d’innovation déployés au sein des entreprises de la région. Elle est la porte d’entrée privilégiée des entreprises qui souhaitent innover et s’appuie sur un réseau d’acteurs régionaux aux compétences pluridisciplinaires. Ses missions sont d’accompagner et de financer les projets d’innovation des entreprises alsaciennes de tous secteurs économiques et de toutes tailles, ainsi que d’aider au développement d’une innovation compétitive au profit des entreprises d’Alsace et au bénéfice de l’attractivité économique du territoire. Son budget est financé pour un tiers par la région, pour un tiers par la chambre de commerce et d’industrie de la région, et le reste par des fonds du FEDER, le Fonds européen de développement régional, et des fonds d’État.

Madame la ministre, il est bien entendu souhaitable que l’État reste un partenaire fort des régions, même si, en la matière, son action en faveur des entreprises innovantes par le moyen du crédit d’impôt recherche doit rester essentielle. De même, il est indispensable que l’État continue d’aider les pôles de compétitivité, après avoir, le cas échéant, tiré les conclusions des récentes évaluations. La région Alsace a elle-même refondé récemment sa politique d’accompagnement à leur égard, ainsi qu’à celui des clusters et des grappes d’activité, afin de placer au cœur des objectifs de ceux-ci la croissance de nos PME. Elle a donc invité ces structures – les pôles, les clusters et les grappes d’activité – à être incitateurs et diffuseurs d’innovations au plus près de leurs entreprises membres, et le plus concrètement possible. Cette démarche gagnerait à être accompagnée et dupliquée afin de permettre à chaque région d’identifier les secteurs qui seront demain les moteurs de la croissance, grâce notamment aux PME.

Le deuxième élément de compétitivité hors coût mentionné, à savoir la formation professionnelle, me conduit à vous dire que l’ajustement de l’offre et de la demande de compétences est une condition essentielle du développement de nos PME, lesquelles sont le premier creuset d’employabilité et d’évolution de carrière.

La France compte désormais plus de 3 millions de demandeurs d’emplois sans activité, 4, 733 millions au total en incluant ceux qui ont une activité réduite. Ces chiffres vous sont bien sûr connus. Les jeunes sont malheureusement parmi les premières victimes de cette situation.

Or les PME représentaient, en 2010, 8, 7 millions d’emplois. En outre, sur les 2, 8 millions d’emplois créés en France ces vingt dernières années, 2, 3 millions l’ont été par des PME.

Dans le contexte économique actuel, le rôle des PME en matière de lutte contre le chômage est donc capital, dans la mesure où la formation professionnelle continue joue correctement son rôle de régulation entre les besoins du marché et les expertises disponibles.

Il convient assurément de soutenir au maximum la formation en alternance dans ces entreprises, et en premier lieu l’apprentissage, notamment grâce à des incitations financières d’autant plus nécessaires que la conjoncture est difficile. Il faut également permettre à ces entreprises de trouver les bons candidats à l’apprentissage – j’y insiste –, qu’elles recherchent souvent en vain. À cet égard, l’acte III de la décentralisation doit donner lieu à une réforme profonde des systèmes d’orientation dans ce pays afin de permettre aux régions qui le souhaitent de mettre en place un véritable service public régional de l’orientation, avec tous les acteurs impliqués dans cette difficile question.

En fait, comme l’a préconisé Louis Gallois dans son rapport, c’est d’un véritable pacte pour les PME dont ont besoin ces entreprises. Par comparaison avec l’Allemagne, notre pays compte trop peu de PME et a fortiori trop peu d’entreprises de taille intermédiaire, précisément parce que les PME ne parviennent pas à grandir.

Ces entreprises ont également d’autres difficultés : elles manquent de fonds propres ; elles ne reçoivent pas assez de soutien de la part des grands donneurs d’ordres ; elles redoutent la commande publique, que souvent d’ailleurs elles évitent ; enfin, elles sont trop peu présentes à l’exportation.

En matière de financement et d’accès au crédit, il est clair que les difficultés se sont accrues pour les PME en 2012, comme en atteste le baromètre KPMG-CGPME. Le financement par le secteur bancaire, avec des frais élevés ou à des montants plus faibles que souhaités, est la principale difficulté ressentie par 43 % des PME.

Dans ce contexte, la loi du 31 décembre 2012 a créé la Banque publique d’investissement, la BPI, qui constitue pour le Gouvernement « une plateforme de l’expansion des entreprises, en particulier des très petites entreprises, des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire ». Cependant, la BPI ne fonctionnera qu’en mode virtuel jusqu’en mai-juin, selon son nouveau directeur général, Nicolas Dufourq.

Pour l’opérationnel, il faudra donc attendre l’été prochain. Cependant, dans les six prochains mois, un tiers des PME – excusez du peu ! – prévoient une dégradation, si l’on en croit la dernière enquête de conjoncture publiée par OSEO le 22 janvier dernier. En outre, la BPI, chargée d’apporter un soutien financier aux petites et moyennes entreprises françaises, réunira dans chaque région, sous un guichet unique, les services du Fonds stratégique d’investissement, le FSI, de la banque publique des PME et de l’innovation, OSEO, et de CDC Entreprises, filiale de la Caisse des dépôts et consignations.

Comme nous l’avons déjà dit, nous pensons déjà être capables de réaliser le diagnostic des besoins des entreprises sans la BPI. Nous sommes capables d’identifier les produits d’OSEO – les entreprises nous le disent –, les produits du capital d’investissement régional ou national et d’accompagner les entreprises à l’export. C’est là, et cela reste, la plus-value des agents des régions, des agences de développement économiques – elles sont nombreuses – et des chambres de commerce et d’industrie par exemple.

Si la BPI se résume à ce guichet unique, elle ne changera à notre avis pas grand-chose à la situation actuelle. Pis, on peut penser que si les équipes d’OSEO deviennent les interlocuteurs des entreprises, elles perdront en efficacité, car une part importante de leur temps sera passé à analyser des dossiers, en lieu et place d’autres acteurs qui le font déjà, au détriment du financement.

De même, le peu d’appétence dont font preuve nos entreprises pour la commande publique mériterait d’être mieux pris en compte. Une action forte et concertée s’impose, alors que, mes chers collègues – le saviez-vous ? –, un tiers du PIB mondial est le fait de marchés publics.

En Alsace – pardon de vous parler encore de ma région –, nous avons mis en place un service spécifique à cet égard, qui n’a pas son pareil, appelé AMPIE – accès aux marchés publics internationaux et européens –, et qui fonctionne à la satisfaction de toutes les entreprises adhérentes.

Pour faire véritablement œuvre utile dans tous ces domaines, il n’est certainement pas sot de réfléchir globalement aux besoins spécifiques de nos PME et de constituer enfin ce Small Business Act à la française dont on nous rebat les oreilles depuis si longtemps. Le moment est venu de donner plus de cohérence aux différents dispositifs existants et de mettre en place un environnement permettant à nos PME de jouer pleinement leur rôle de levier de la croissance et de l’emploi.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si l’on accepte de sécuriser l’environnement des PME en traçant, y compris sur le coût du travail, de véritables perspectives à moyen et long terme, de rééquilibrer les relations entre grandes et petites entreprises, d’encourager l’innovation, la formation et l’export, alors notre pays pourra vraiment s’appuyer sur la richesse de son tissu économique et compter sur le dynamisme de ses entrepreneurs, comme l’indiquait voilà environ huit mois le rapport intitulé Réindustrialisons nos territoires d’Alain Chatillon.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

M. André Reichardt. C’est d’autant plus d’actualité aujourd'hui.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Mme Nathalie Goulet . Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en tant que membre de la commission des affaires étrangères, ayant également été vice-présidente de la mission commune d’information sur la désindustrialisation des territoires, dont je salue le président, Martial Bourquin

Ah ! sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Chaque année, avec régularité et obstination, j’évoque des pistes pour améliorer notre dispositif lors de l’examen des budgets des ministères en charge des PME-PMI et du commerce extérieur. La configuration politique de cette année m’ayant privée de cet exercice, je profite de ce débat particulièrement opportun, dont je remercie l’UMP

Ah ! sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Vous aurez donc droit à la version actualisée de mon texte, qui, vous l’aurez compris, est centré sur la place de nos PME-PMI à l’international, car le sujet proposé par nos collègues de l’UMP sur la place des petites et moyennes entreprises dans notre économie ne me limite pas aux frontières de la France.

Alors que nos ambassadeurs devraient être les chefs de file incontestés des dispositifs économiques, il n’est pas rare que l’équipe France marche en ordre dispersé, parfois même avec des joueurs qui marquent contre leur camp, et je vais vous en fournir quelques exemples.

L’attractivité de nos territoires, dont vous avez la charge, madame la ministre, commence à la porte de nos consulats. Que dire de cette politique absurde des visas, dénoncée dix fois par notre ancien collègue Adrien Gouteyron ? Alors que la demande de visas est en forte croissance – 2, 5 millions de visas ont été accordés cette année –, nous sommes un modèle de décalage entre l’étendue de notre réseau diplomatique et consulaire et nos moindres performances en termes de diplomatie économique.

Notre réseau, qui compte 92 consulats et consulats généraux, et 135 sections consulaires d’ambassades, est sous tension : cet été, le consulat de Shanghai a tiré la sonnette d’alarme. Face à une demande de visas qui explose, dans une circonscription qui représente le quart du PIB chinois, nos capacités trop étroites créent un goulot d’étranglement. Notre consulat ne compte en effet que seize agents ; il faut huit semaines pour avoir un rendez-vous et 10 000 demandes sont rejetées avant examen, faute de capacité à les traiter. Tous les autres pays se renforcent dans la compétition afin d’attirer des touristes, lesquels dépensent en moyenne 1 200 euros par voyage. Les Américains, et désormais les Britanniques, sont à soixante-dix personnes. Même les Italiens font mieux que nous !

C’est là un manque à gagner considérable. En effet, les touristes chinois contribuent pour un tiers au chiffre d’affaires des grands magasins parisiens. On estime le coût d’opportunité d’un emploi non créé au consulat à 340 000 euros de recettes perdues chaque année pour le budget de l’État et à 8 millions d’euros pour l’économie française. Il en est de même à Moscou, en Australie, aux Émirats arabes Unis ou au Qatar. À cet égard, je vous renvoie au rapport budgétaire que nous n’avons pas pu examiner en séance.

Une fois franchi le seuil de nos ambassades, il y a les missions économiques. Vaste sujet ! On y trouve peu d’agents parlant la langue du pays. Ces missions, qui facturent des prestations et bénéficient de financements publics, n’ont aucune obligation de résultat.

Les missions Ubifrance, que nous avons dénoncées à plusieurs reprises, ne sont souvent absolument pas compétentes. En tout cas, leurs résultats ne sont jamais mesurés. Un outil d’évaluation et un contrôle externe puissant font ici incontestablement défaut.

Comment doit-on comprendre le budget d’Ubifrance ? Ce budget s’élève à 104, 2 millions d’euros au titre de l’action n° 7 du programme 134, auxquels s’ajoutent 216 millions d’euros de ressources propres, soit plus de 320 millions d’euros. Si l’on y ajoute les fortes augmentations de frais de personnel, lesquels sont passés de 70 millions d’euros à plus de 83 millions d’euros, on arrive à un ratio de cinq entreprises aidées par agent. Encore faut-il se donner la peine de faire la division…

Les bureaux d’Ubifrance sont installés non pas là où il faudrait aider les entreprises à être présentes à long terme, mais là où des prestations peuvent être vendues rapidement. En voulant vendre au maximum son expertise, Ubifrance communique plus sur ses services que sur l’intérêt des marchés. Cette attitude n’aide pas les entreprises à avoir une démarche réfléchie sur leurs priorités à l’international, comme le soulignait notre collègue Jean-Yves Leconte l’année dernière.

Mais nous avons noté les annonces du Gouvernement, notamment les propositions 14 et 15 du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi du 6 novembre 2012.

Les acteurs, notamment les plus parisiens d’entre eux, doivent se rendre accessibles sur le terrain et ne pas attendre d’être sollicités. C’est à Ubifrance d’aller à la rencontre des acteurs de terrain, si préoccupés par leur quotidien que l’exportation leur fait peur.

Je vous le dis depuis des années : il faut des outils de proximité qui viennent à eux afin de les encourager à faire ce chemin, d’autant que la culture entrepreneuriale en France ne conduit pas spontanément les PME à se projeter à l’international. À cet égard, je vous renvoie au très bon rapport du Conseil économique, social et environnemental.

À ce stade, plusieurs impératifs s’imposent.

Tout membre d’une mission économique ou d’Ubifrance et de ses déclinaisons devrait obligatoirement avoir une très bonne connaissance de l’anglais et de la langue du pays dans lequel il est implanté. Vous allez sourire, madame la ministre, mais c’est un minimum ! Savez-vous que moins de la moitié de nos ambassadeurs dans les vingt-deux pays de la Ligue arabe parlent l’arabe ? C’est juste un constat.

Je vous suggère également d’instaurer une obligation de résultat. Il est absolument inconcevable que des agents chargés de notre développement économique ne soient pas soumis à ces obligations, telles qu’elles existent dans les ambassades allemandes ou italiennes.

Il faut en outre aider les investissements et les prises de participation dans nos entreprises, car il n’est pas douteux qu’une partie de leur croissance ne peut se faire qu’à l’international.

Optimiser le suivi des réseaux des étudiants, mais aussi des personnes ayant réalisé des stages ou ayant fait un apprentissage en France, est un objectif qu’il conviendrait de se fixer. Cela ne peut vous laisser insensible, madame la ministre, vous qui êtes aussi chargée de l’économie numérique, d’autant que les mesures que je suggère ne coûtent rien, ce qui, en cette période de disette budgétaire, est plutôt intéressant.

Une fois qu’ils ont étudié en France, les jeunes ne font pas l’objet de suivi. Comment, dès lors, constituer ou animer un réseau ? Aujourd’hui, personne en France n’a d’idée précise du nombre ni de la qualité des stagiaires qui sont venus étudier dans notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Quand un industriel français veut se rendre à l’étranger, il ne dispose même pas de la liste des personnes qui, dans son secteur d’activité, ont travaillé ou ont été formées en France, bien souvent d’ailleurs grâce à des bourses ou des programmes d’échanges. Les ambassades ne disposent pas non plus de ces listes. La valeur ajoutée créée par la France n’a ainsi aucun effet sur son économie.

Nos partenaires anglais et allemands parviennent, quant à eux, à rester en contact, via une adresse électronique, avec 70 % de leurs anciens stagiaires. Le taux de suivi, chez nous, est d’un peu moins de 10 %. Il est effectué sur la base du volontariat et par courrier postal. Je pense que, en la matière, la marge de progrès est relativement importante.

J’en viens à la coopération décentralisée. Sur ce sujet, de nombreuses régions devraient s’inspirer de l’Alsace !

M. André Reichardt sourit.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Au total, 4 754 collectivités territoriales françaises mènent près de 12 000 projets dans 139 pays. Je dirais qu’il s’agit, pour le moins, d’une légère dispersion de notre action ! La région Basse-Normandie a une coopération avec le Fujian, qui compte 38 millions d’habitants. Les responsables de cette région chinoise semblent avoir du mal à comprendre pourquoi la Haute-Normandie, elle, mène une coopération avec le Zhejiang, qui en compte 51 millions. Nous retrouvons à l’international les aberrations de notre système local. Il est vrai, cependant, que les régions sont pressenties pour être associées à part entière et de plein exercice au nouveau dispositif pour favoriser l’exportation. Un partenariat État-région allant en ce sens a d’ailleurs été signé le 18 septembre dernier. C’est une bonne nouvelle.

Je veux maintenant dire un mot de la diplomatie parlementaire, sujet qui m’est cher.

Contrairement à ce qui se passe au Royaume-Uni, en Allemagne, en Turquie et dans les pays de culture anglo-saxonne, les parlementaires ne sont pas assez utilisés pour appuyer et soutenir le développement à l’international de nos entreprises.

Les parlementaires en mission sont regardés par les administrations comme des touristes qui voyagent sur argent public. Une suspicion de principe prévaut. Bien entendu, les règles déontologiques doivent s’appliquer à eux. J’ai également conscience des risques de conflits d’intérêts que leur implication pourrait entraîner. Cependant, en tant que parlementaires, nous connaissons mieux que personne notre terrain industriel ou artisanal. Nous pouvons le défendre et assurer sa promotion dans des conditions claires et transparentes.

De ce point de vue, les annonces faites par Laurent Fabius, portant sur la diplomatie économique, font naître l’espoir de voir notre ambassadeur être le vrai chef d’orchestre du réseau France, assisté des parlementaires, des élus des collectivités locales, au premier rang desquelles les régions, des réseaux consulaires et des chambres de métiers.

(Marques d’amusement sur diverses travées.) Nous sommes quasiment entre nous ce soir, nous pouvons donc nous parler.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Madame la ministre, je conclurai mon intervention par une dernière proposition, partant du principe que, finalement, on n’est jamais mieux servi que par soi-même ! Ainsi, je vous annonce que je suis candidate à toute mission que vous pourriez me confier, afin d’étudier dans quelles conditions les parlementaires peuvent venir à l’appui de nos entreprises dans les opérations internationales. §

Vous n’aurez pas trop de cinq ans, avec vos collègues du Gouvernement, dont notre ancienne collègue Nicole Bricq, dont chacun ici connaît les compétences, la volonté et l’expérience, pour mettre bon ordre dans ce secteur d’activité. Les premières mesures annoncées vont dans le bon sens. Néanmoins, le travail est important. Les mauvaises habitudes sont tenaces et le manque d’outils d’évaluation fiable, à ce jour, constitue un handicap qu’il faudra surmonter.

Nous sommes très nombreux sur ces travées – je pense que c’est le cas de la totalité des parlementaires présents ce soir – à souhaiter que l’équipe France gagne, dans l’intérêt de nos territoires, que nous sommes, au Sénat, bien décidés à défendre. Dans cette entreprise, vous pourrez compter sur mon entier soutien.

Applaudissements sur de nombreuses travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

M. Jean-Pierre Plancade . Monsieur Reichardt, si le rapport que vous mentionnez a été de grande qualité, il me semble que c’est aussi parce que Martial Bourquin y a largement participé, et je tenais à lui rendre hommage.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

M. Chatillon, certes, y a travaillé, mais, parmi tous ses auteurs, vous ne citez que lui ! Cette façon d’agir ne correspond pas à ma conception de la démocratie et du débat parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous discutons aujourd’hui de la place des petites et moyennes entreprises dans notre économie. C’est un sujet important. Je suis, avec mes collègues du RDSE comme avec beaucoup d’autres, de ceux qui pensent que les PME doivent occuper une place centrale dans le développement économique de notre pays.

Le Gouvernement a d’ores et déjà engagé ou annoncé un certain nombre d’actions en faveur des PME. Je pense essentiellement à la Banque publique d’investissement, qui est en train de se mettre en place.

Outre le projet de loi portant création de la BPI, le Gouvernement a également présenté un pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, dont la quasi-totalité des mesures concerne les PME. Certaines sont même spécialement ciblées sur ces entreprises. C’est une bonne chose. Nous sommes de ceux, au sein de la majorité, qui les approuvent. Nous vous invitons même, madame la ministre, à mettre rapidement en œuvre toutes ces mesures et à les compléter par d’autres. L’activité, vous le savez, est malheureusement au plus bas. Le moral des dirigeants d’entreprises, en particulier des plus petites, n’est pas florissant.

Il est urgent de relancer la croissance pour redonner confiance aux entrepreneurs et leur permettre d’investir, d’innover et d’exporter. Cela passera non seulement par une relance de la consommation intérieure, à travers une hausse du pouvoir d’achat des Français, mais aussi, nous le savons tous, par la capacité de nos entreprises à conquérir de nouveaux marchés à l’international. Il est donc urgent d’agir, et je sais, madame la ministre, que vous vous y évertuez.

Le Mittelstand allemand est souvent cité en exemple. Il est vrai que l’Allemagne a réussi, en dix ans, une incroyable relance de son économie, qui repose essentiellement sur son solide tissu de petites et moyennes entreprises. Certes, le succès des PME allemandes est en grande partie lié à des facteurs historiques et institutionnels et n’est donc pas entièrement transposable, mais les réformes courageuses conduites au cours de la dernière décennie, notamment celle du marché du travail, ont également joué un rôle important dans son rebond économique.

Le succès actuel de l’industrie allemande repose sur l’orientation fortement internationale de ses petites et moyennes entreprises, sur une structure industrielle adaptée aux besoins des marchés, notamment émergents, et sur le positionnement haut de gamme des produits. Le secteur automobile en est une bonne illustration.

L’excellent rapport remis au Premier ministre en novembre dernier par le commissaire général à l’investissement Louis Gallois soulignait le caractère indispensable de la « montée en gamme » de l’industrie française. C’est la clef du renforcement de notre compétitivité.

Contrairement à certaines idées reçues, l’envie d’entreprendre et la création d’entreprise se portent plutôt bien dans notre pays, et même mieux que chez certains de nos voisins. Depuis dix ans, la création d’entreprise a même fortement progressé : de 210 000 entreprises créées par an en 2000, nous sommes passés à 550 000 en 2011.

Même s’il existe un écart préoccupant entre les intentions de création d’entreprise et les entreprises effectivement créées, qui révèle la persistance de freins à la création, c’est surtout le développement des TPE et PME qui pose problème dans notre pays.

En Allemagne, 340 000 PME ayant un chiffre d’affaires inférieur à 50 millions d’euros réalisent 20 % du total des exportations allemandes. Les 4 400 « grandes PME », avec un chiffre d’affaires compris entre 50 millions d’euros et 3 milliards d’euros, exportent 40 % de leur fabrication. Elles sont souvent des leaders mondiaux sur ce qu’on appelle des marchés de niches. Mais elles exportent et gagnent de l’argent.

L’analyse des résultats des PME françaises en 2012 montre également que seules les entreprises fortement exportatrices tirent leur épingle du jeu ; ces dernières estiment en moyenne la hausse de leur chiffre d’affaires à 3, 9 %, tandis que celles qui n’exportent pas constatent une baisse de 1 % de leur activité. Les résultats sont également plus florissants pour les PME les plus innovantes. Ce sont aussi ces entreprises qui créent des emplois.

Il est donc indispensable de favoriser l’innovation et de faciliter l’exportation. Pour cela, le rapport Gallois préconisait notamment de « créer un mécanisme d’orientation de la commande publique vers des innovations et des prototypes élaborés par des PME », avec pour objectif d’atteindre 2 % des achats courants de l’État. Il s’agit, à mon sens, d’une mesure nécessaire et simple à mettre en œuvre.

Une autre des difficultés françaises concerne les relations interentreprises, notamment entre grands groupes et PME. Une des propositions du rapport Gallois consistait à « conditionner les soutiens de l’État aux actions des grandes entreprises à leur capacité à y associer leurs fournisseurs et sous-traitants ». Il s’agit là d’une piste intéressante, qui mérite, me semble-t-il, d’être creusée.

Quoi qu’il en soit, nous devons agir d’urgence et faire de nos PME une priorité dans toutes nos politiques publiques. L’une des actions proposées par le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi est de mettre en place un test mesurant l’impact des réformes, y compris fiscales, sur les PME. C’est un outil qu’il est en effet urgent de mettre en place, tant l’inquiétude des chefs d’entreprise est grande à l’égard de nombre de mesures prises par le Gouvernement, en particulier dans les différentes lois de finances. Il faudra sûrement, madame la ministre, faire un effort de grande pédagogie et de proximité.

Ce climat d’anxiété, lié à l’instabilité réglementaire et législative, que nous percevons sur le terrain, est néfaste pour le développement des PME et donc pour la croissance française. Simplifier et stabiliser la réglementation et la fiscalité est donc un levier majeur pour que nos PME puissent se développer en toute tranquillité. Elles ont besoin de savoir où elles vont et ce qui les attend sur le plan fiscal. Dans ce domaine, un effort considérable reste à fournir.

La formation est également un enjeu essentiel. Là encore, l’exemple allemand le prouve : la formation professionnelle en alternance, centrée sur l’apprentissage, devrait être l’épine dorsale des PME et des TPE. C’est pourquoi nous soutenons avec force le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi. Le Gouvernement s’est engagé à favoriser l’embauche des jeunes en apprentissage dans les PME, avec un objectif de 500 000 apprentis en 2017. Nous ferons tout pour qu’il y arrive. Sans une adaptation de la formation aux besoins de nos PME, le rôle moteur de celles-ci dans la croissance est impossible.

Enfin, l’accès au financement reste l’un des principaux problèmes rencontrés par nos PME. La BPI devrait, je l’espère, améliorer la situation. Les entreprises, en particulier les plus petites, rencontrent de grandes difficultés de trésorerie, liées au ralentissement de l’économie et à l’allongement des délais de paiement : 40 % des PME disent avoir rencontré des difficultés de trésorerie ces six derniers mois ; l’accès aux crédits de trésorerie a posé problème pour 23 % d’entre elles en 2012.

Dans le cadre de la discussion du projet de loi sur la création de la BPI, j’avais appelé l’attention de M. le ministre de l’économie sur la nécessité de trouver des solutions adaptées aux difficultés spécifiques des TPE et TPI. J’ai pris note de son engagement à agir sur ce point.

Grâce au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, mis en place dans le dernier collectif budgétaire pour 2012, les PME qui le demandent pourront bénéficier de la mesure sous forme d’avance de trésorerie, et ce dès 2013.

OSEO, filiale de la BPI, vient de lancer un dispositif de garantie de 500 millions d’euros pour soutenir la trésorerie des TPE et PME. Le ministre de l’économie a également confié à Jean-Michel Charpin, inspecteur général des finances, une mission sur cette question. J’espère que les conclusions de cette mission seront rapidement connues et mises en œuvre. En outre, des mesures pour réduire les délais de paiement sont également attendues.

Madame la ministre, mes chers collègues, vous l’avez compris, l’ensemble du groupe du RDSE, très sensible à l’inquiétude réelle des chefs d’entreprises, invite le Gouvernement à poursuivre et à accentuer ses efforts à destination des PME, pour qu’elles deviennent les véritables fers de lance de notre économie. Il vous assure aussi, madame la ministre, de son entier soutien.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il faut prendre conscience du fait que le mythe du retour durable de la croissance, qui mettrait fin à la crise, est illusoire, voire dangereux. Ce mythe nous empêche en effet d’élaborer des solutions de sortie de crise permettant l’émergence d’une économie moins carbonée.

On évoque souvent l’« exemple allemand ». Certes, il y a des expériences intéressantes chez nos voisins, mais, globalement, l’Allemagne n’est pas forcément un modèle à imiter pour la France ; il suffit de comparer les taux de pauvreté dans les deux pays. Essayons plutôt de travailler à un nouveau modèle français, en prenant en compte notre potentiel et nos capacités.

Cela suppose, dans un premier temps, de s’accorder sur le constat que la crise est multiple pour, dans un second temps, y apporter des réponses, qui doivent de notre point de vue passer par une véritable transition durable de notre économie.

À ce titre, les petites et moyennes entreprises et industries, les PME et PMI, qui sont à la fois créatrices d’emplois, innovantes et ancrées dans leur territoire, sont les forces vives qui permettront la nécessaire transition de notre économie, tant pour multiplier les emplois d’avenir que pour proposer des transitions aux emplois aujourd’hui menacés. Nous devons saisir toutes les possibilités qu’offre cette mutation.

En effet, la crise que nous traversons actuellement est multiple : crise de la dérégulation financière, explosion des inégalités, qui en est le corollaire, et grave crise écologique.

Cette année encore, et cet état de fait va perdurer, la consommation est restée globalement faible, les ménages ayant plutôt adopté des stratégies d’accumulation d’une épargne de précaution. Par ailleurs, les exportations, notamment vers les pays émergents, étaient encore trop faibles pour tirer l’activité globale. Si nous devons avoir des objectifs en termes d’exportation, il faut aussi aborder la question de la consommation locale et y apporter des réponses. J’y reviendrai dans quelques instants.

Quant aux solutions keynésiennes classiques de relance, à supposer qu’elles puissent être mises en œuvre, elles se heurteraient aux défis environnementaux, en particulier la hausse du prix des matières et de l’énergie, à laquelle nous ne couperons pas.

Réindustrialiser nos territoires dans le respect de l’homme et de l’environnement, produire local et rapprocher le producteur du consommateur, soutenir les PME innovantes, investir dans la recherche pour développer les technologies vertes, voilà où réside une part de notre avenir.

Il faut aller vers une économie plus sobre et, en matière agricole et agroalimentaire, vers une agroécologie qui réoriente les modes de production.

Prenons l’exemple du désastre, car c’en est un, de la société Doux – j’évoque la Bretagne, puisque je suis moi-même élu de cette région –, qui a profité des aides européennes pour exporter du poulet bas de gamme alors que la France importe le tiers des poulets qu’elle consomme. Nous avons les outils de transformation et le savoir-faire ; essayons donc d’apporter des réponses en termes de consommation locale et nationale.

Il faut développer un aménagement du territoire qui se donne comme priorité une relocalisation de l’économie et une proximité des emplois, des services et des logements.

De même, nous devons développer des emplois verts non délocalisables dans des secteurs d’avenir. Je pense évidemment au bâtiment, aux énergies renouvelables, comme l’éolien ou le solaire, qu’il soit thermique ou photovoltaïque, aux transports et aux diverses nouvelles technologies.

Les PME et PMI peuvent être, je l’ai indiqué précédemment, les forces vives qui nous permettront d’organiser la nécessaire transition de notre économie vers une économie moins carbonée. Il est primordial de faciliter réellement l’émergence et le développement de celles qui, tout en innovant, respectent des impératifs sociaux et environnementaux.

Concrètement, les mesures à prendre sont, selon nous, multiples.

Premièrement : orienter les crédits de recherche vers les PME innovantes plutôt que vers les grands groupes, qui peuvent en profiter puis délocaliser.

Deuxièmement : favoriser l’accès à la commande publique pour les PME et PMI, qui souffrent, plutôt que pour ces mêmes grands groupes.

Troisièmement : alléger l’imposition des structures de l’économie sociale et solidaire.

Quatrièmement : investir sur la formation. C’est évidemment primordial. Outre la formation initiale, chacune et chacun devraient à terme pouvoir bénéficier d’un crédit d’un certain nombre d’années de formation tout au long de la vie.

M. le ministre du redressement productif a souligné à plusieurs reprises que nombre de nos PME et PMI étaient des pépites technologiques. Nous souscrivons à cette idée, et nous réaffirmons la nécessité de soutenir davantage celles qui innovent dans des secteurs d’avenir, créent des emplois non délocalisables et participent à l’aménagement et au développement de nos territoires.

J’ai eu quelques contacts avec des chefs d’entreprise dans le train. L’un d’eux, qui travaille dans le domaine de l’acier, m’a indiqué que tout son matériel provenait du Japon ; apparemment, ce pays est à la pointe en la matière, ce que j’ignorais. L’acier, nous en avons. Ne pourrions-nous pas nous aussi investir dans ce domaine ? Selon un autre, qui travaille dans la conception de bateaux, les pays nordiques sont beaucoup plus en avance que nous sur l’utilisation éolienne en complément de l’énergie des moteurs sur des bateaux de taille moyenne.

Cet après-midi, nous avons évoqué les travaux de la mission commune d’information sur les pesticides. Il est question de faire en sorte que ces produits ne soient plus utilisés sur les espaces publics communaux. Pour cela, nous avons besoin de matériel de désherbage mécanique. Or, aujourd'hui, en agriculture comme dans les espaces communaux, nous importons ce matériel d’Autriche. Pourtant, nous avons le savoir-faire. Nous devons pouvoir le mettre en œuvre et répondre aux demandes en termes de proximité.

Voilà quelques exemples sur lesquels je souhaitais appeler votre attention.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Darniche

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la vitalité de nos PME dans notre économie n’est plus à démontrer. La France compte 2 550 000 PME, qui représentent aujourd'hui 97, 4 % des entreprises. Les PME emploient près de 7 millions de personnes, soit presque la moitié des salariés de notre pays. Elles réalisent 34 % du chiffre d’affaires et 42 % de la valeur ajoutée.

Permettez-moi d’évoquer les PME de Vendée, qui tiennent une place tout à fait unique. Sur les 53 000 entreprises vendéennes, dont 11 000 sont artisanales, 91 % d’entre elles comptent moins de neuf salariés, contre 84 % sur le plan national. Ancrées dans notre territoire, ce sont des entreprises qui réalisent leur chiffre d’affaires non pas sur du capitalisme financier, mais sur la vente de services et de leurs produits. Il y a un vrai maillage d’entreprises locales.

Les Vendéens travaillent souvent en famille. Cela donne une force toute spéciale à un travail, qui, parce que familial, sert aussi de lien entre les générations. Ainsi, les PME savent regarder à long terme en investissant dans ce qui ne produira peut-être pas de bénéfices à court terme, mais qui portera certainement ses fruits plus tard. Les PME vendéennes ont compris qu’elles devaient être dynamiques à l’exportation, mais pas seulement. Elles font montre d’une véritable stratégie locale. En Vendée, la proportion de sièges sociaux restés dans le département est, je le rappelle, deux fois supérieure à la moyenne nationale.

Je veux m’appuyer sur ces exemples pour tenter de vous démontrer que l’une des réponses à nos maux sociaux réside sûrement dans ce secteur, mes chers collègues.

Oui, le modèle de nos PME est une réponse à la crise ! Les structures familiales résistent mieux, car le facteur humain est essentiel. Les structures locales résistent mieux, car elles ne sont pas sujettes à la compétition mondiale effrénée. Les conditions de leur vitalité sont simples, mais il faut une fiscalité allégée qui ne plombe pas les trésoreries et un accès au financement de la part des établissements bancaires.

À l’heure où beaucoup de grands groupes industriels licencient, c’est sûrement vers les PME qu’il faut se tourner pour avoir les meilleures réponses au chômage. Mais encore faut-il que les objectifs du Gouvernement aillent en ce sens. Or, avec la hausse de la TVA, ce sont, je le crains, les PME que l’on pénalise : la baisse du taux réduit de 5, 5 % à 5 % sur les produits de première nécessité ne compense pas les flambées de l’autre taux réduit, qui passera de 7 % à 10 %, et du taux normal, qui passera de 19, 6 % à 20 %. Je pourrais évoquer le tourisme, la restauration, le bâtiment, tant de secteurs pour lesquels la hausse de la TVA est synonyme d’effets économiques contre-productifs. Cela portera un coup sévère à la capacité d’investissement et d’embauche de nos PME, sans compter les risques de destructions d’emplois.

Nous avons donc des réels motifs d’inquiétude si nous ne renforçons pas la compétitivité des PME, notamment en allégeant leurs charges sociales.

Mes chers collègues, pour reprendre la formule de Sully, je dirais que nos PME sont l’une des « mamelles de la France ». Nous devons axer nos efforts sur leur préservation et leur développement. Cœur de notre économie, elles sont un modèle fiable de créativité et d’ancrage territorial, qui doit être mieux soutenu.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Natacha Bouchart

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la séance de ce soir a pour objet un débat sur l’avenir des PME en France. Permettez-moi d’introduire mon intervention par quelques observations sur l’intitulé de notre discussion. Elles seront de nature à éclairer la suite de mon propos.

L’avenir des PME en France, c’est tout simplement une part essentielle de l’avenir de la France. Dans un pays si prompt à se diviser au moindre sujet de controverse, il n’est pas inutile de pouvoir constater avec satisfaction que la place des petites et moyennes entreprises est considérée par tous comme capitale pour la prospérité et l’équilibre de notre société.

Cela a déjà été dit, non seulement aujourd’hui, mais à de nombreuses reprises par le passé, les PME sont le premier vivier d’emplois de notre économie. Cette dernière serait évidemment comme une ossature dépourvue de vitalité sans le tissu des PME à côté des grandes entreprises et des administrations. Du point de vue social, la PME, en plus d’être un lieu de travail, est un lieu de sociabilité professionnelle qui diffère avantageusement des standards parfois déshumanisés de certains grands groupes.

Je pourrais poursuivre longtemps ces éloges sur les PME. Surtout, nous pourrions les entendre sur toutes les travées de la Haute Assemblée. Il y a effectivement un vrai consensus national pour juger qu’il est primordial pour l’avenir de la France de se préoccuper de l’avenir des PME.

Devant une telle unanimité, comment expliquer que les PME se sentent les « mal-aimées » de la société française ? Cette question doit nous interpeller, nous, les politiques. Il faut croire que, si l’importance de l’avenir des PME ne fait pas débat, il y a des divergences sur les réponses à mettre en œuvre. Mais est-ce si certain ? Les bonnes réponses sont, pour la plupart, connues. Elles ne demandent souvent qu’à être appliquées.

Debut de section - PermalienPhoto de Natacha Bouchart

La vérité, c’est que les choix qu’impose aux responsables politiques la mise en place des bonnes solutions doivent tout simplement être assumés. À défaut, le consensus sur les PME ne serait qu’une illusion, et notre débat de ce soir pourrait de nouveau se tenir dans des termes quasiment identiques dans cinq ou dix ans. Refuser ces choix serait une erreur économique et une faute à l’égard des créateurs des PME et de tous les salariés qui y travaillent.

Puisqu’il m’est impossible d’être exhaustive dans le temps qui m’est imparti, je voudrais avant tout faire part des points sur lesquels les PME ont besoin de gestes de confiance. Je me fonde sur les retours du terrain que j’ai pu avoir auprès des chefs d’entreprise en tant que vice-présidente à l’économie d’une communauté d’agglomération et présidente d’une agence de développement économique, où j’ai la chance de pouvoir côtoyer au plus près les petites et moyennes entreprises.

Parmi les réponses connues, mais qui restent encore à mettre en œuvre complètement, il y a la réduction des délais de paiement.

Le précédent gouvernement, sous l’impulsion de Nicolas Sarkozy et avec Mme la ministre Christine Lagarde, a permis, grâce à la loi de modernisation de l’économie, ou LME, de ramener les délais de paiement à quarante-cinq jours fin de mois.

Les PME, face aux banques et aux grandes entreprises, sont nettement plus sensibles aux problèmes de trésorerie, qui peuvent causer de graves difficultés. Il n’est malheureusement pas rare de voir des PME qui ont tout pour réussir mais qui ne peuvent répondre à un surcroît d’activité faute de trésorerie. Pour bien prendre conscience de ce phénomène, rappelons un seul chiffre : le crédit interentreprises représente globalement 500 milliards d’euros par an.

Pour les PME, être en attente de paiement, c’est devoir trouver des financements complémentaires pour répondre aux exigences du marché et maintenir leur rang, alors qu’elles ont besoin de se développer pour faire face à la concurrence internationale. La suite est logique : le chef d’entreprise prend rendez-vous auprès de son banquier pour obtenir un crédit de trésorerie, qui nuira à l’augmentation des fonds propres et au financement des investissements.

La mesure structurelle, qui doit permettre de changer la donne, a été prise sur l’initiative du gouvernement Fillon, mais il nous reste à garantir sa bonne application.

Le calcul des quarante-cinq jours fin de mois reste complexe : fin de mois à échéance de la facture ou à sa date d’émission ? Il nous faut, dans un premier temps, c’est d’ailleurs une revendication officielle des représentants des PME, clarifier cet aspect de la loi pour assurer un meilleur respect des délais de paiement.

Dans un second temps, notre objectif doit être tout simplement l’alignement sur les délais allemands, c'est-à-dire sur les paiements à trente jours. Pourquoi cette réforme, qui paraît de pur bon sens, nécessite-t-elle encore d’être finalisée ? Parce qu’elle nous demande, à nous responsables politiques, de passer outre les récriminations d’un certain nombre d’acteurs : certaines grandes entreprises qui sous-traitent, certaines sociétés de la grande distribution et certaines banques.

Je veux croire qu’il est possible de trouver les moyens d’avancer sur ce sujet, car les délais de paiement sont un enjeu important pour nos PME. Ne serait-il pas normal que ces dernières, comme n’importe quel salarié d’une entreprise, soient payées à trente jours ?

La question des délais de paiement est révélatrice, mais elle n’est qu’un pan de l’enjeu du financement des PME en France. Le dernier dispositif en date qui pourrait améliorer ce point est le nouveau crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.

Il faut malheureusement constater que de nombreux patrons de PME se plaignent de la complexité du dispositif. Celui-ci étant calculé sur la base d’un pourcentage de la masse salariale jusqu’à 2, 5 SMIC, son principe peut paraître transparent. Toutefois, en réalité, le croisement avec d’autres mesures antérieures, la prise en compte des heures supplémentaires, des temps partiels ou des arrêts momentanés d’activité font de ce crédit d’impôt une machinerie complexe.

Les grandes sociétés s’y retrouveront, puisqu’elles disposent des ressources juridiques et administratives pour ce faire, mais pas les PME. D’où les sondages révélant la perplexité de leurs dirigeants : 56 % des chefs d’entreprise indiquent ne pas avoir l’intention d’utiliser le nouveau crédit d’impôt.

En réalité, l’échec annoncé du système est la preuve que l’on ne pourra pas différer longtemps la question de l’allégement des charges. Une véritable initiative en faveur de la compétitivité des PME s’impose. Face à la concurrence internationale, et pour redresser notre commerce extérieur, la première réflexion devrait porter sur les moyens permettant d’aider prioritairement les PME exportatrices.

Dans un climat fiscal qui n’est pas fait pour encourager les créateurs de PME et qui n’est pas non plus de nature à doper leur moral – 88 % d’entre eux sont inquiets pour l’économie française –, il est temps d’aborder de front la question de la compétitivité des PME françaises à l’export.

En dehors des questions de compétitivité et de financement des PME, une autre réflexion mérite d’être menée, celle de la revalorisation des actifs. Face aux banques, pour asseoir la crédibilité des PME, une réévaluation des actifs de ces dernières pourrait être facilitée. Cette mesure se heurte malheureusement, on y revient, à l’obstacle de la fiscalité, qui nuit à la bonne prise en compte des actifs des PME françaises.

Avant d’en arriver à ma conclusion, je souhaite aborder un autre point, celui de la place des PME dans la commande publique. La nécessité d’un Small Business Act européen approfondi, sur le modèle de celui qu’avait proposé Nicolas Sarkozy pendant la campagne présidentielle de 2012, …

Debut de section - PermalienPhoto de Natacha Bouchart

… se fait véritablement sentir sur le terrain.

J’en veux pour preuve les difficultés qu’a rencontrées dernièrement l’entreprise La Calaisienne, une PME de cent personnes confectionnant à Calais les uniformes de sortie et de cérémonie des armées françaises de terre et de l’air, au moment où le ministère de la défense avait lancé un appel d’offres dont l’allotissement favorisait les délocalisations.

Au-delà de toutes ces observations, il me semble important de rappeler de nouveau que les PME françaises ont besoin de gestes de confiance. La fiscalité, les avantages dont bénéficient les plus grandes structures, ainsi que certaines mentalités font que nos PME ne se sentent pas soutenues.

Puisque nous sommes tous convaincus qu’il est urgent de les appuyer, écoutons-les et donnons-leur la seule chose qui compte, en politique comme en tout autre domaine : les preuves de la confiance de la société.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sortons d’une très longue période pendant laquelle les PME et les TPE ont été trop souvent les parents pauvres des politiques économiques et fiscales qui se sont succédé.

Je citerai quelques exemples. Je pense à la fiscalité. Rappelez-vous, lorsque la focale a été mise sur la fiscalité des grands groupes et sur celle des PME et des TPE : 33 % d’un côté contre 8 % en moyenne de l’autre ! Je pense aussi à la réforme de la taxe professionnelle. Tout le monde s’accorde à dire que les PME-TPE n’ont pas été les grandes gagnantes de cette réforme, …

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

… qui a été bâclée. Je pense également au crédit d’impôt recherche, qui privilégie les grands groupes et parfois les banques. Je pense enfin aux restrictions prises à l’encontre des jeunes entreprises innovantes, qui ont été souvent considérées comme des variables d’ajustement budgétaires.

Nous sortons d’une longue période – croyez-moi, en matière économique, dix ans, c’est long ! – au cours de laquelle ont été avancées des propositions parfois incohérentes, qui n’ont jamais réussi à mettre fin à une exception française : notre pays compte un nombre très insuffisant d’ETI. Elles n’ont surtout pas réussi à freiner la désindustrialisation massive qui touche la France. L’industrie manufacturière représente 14 % de notre PIB. C’est un décrochage impressionnant par rapport à la moyenne européenne, qui est de 22 % ou de 24 %.

Nous sortons, enfin, d’une période où les relations entre donneurs d’ordre et sous-traitants, entre les grandes entreprises et leurs fournisseurs, malgré la loi de modernisation de l’économie, continuent d’être régies par la loi du plus fort.

Depuis maintenant un peu plus de six mois, le Gouvernement et la majorité à laquelle j’appartiens ont fait de la lutte en faveur de la réindustrialisation et contre le chômage une priorité. La tâche est immense. Il faudra sans doute du temps pour retrouver le chemin de la croissance et de la compétitivité. Néanmoins, il nous faudra obtenir des résultats rapidement, dans une économie européenne qui peine à retrouver la croissance.

Dans cette reconquête de l’emploi et de la réindustrialisation, les PME, les TPE, ainsi que l’artisanat doivent être enfin considérés comme des partenaires naturels de premier plan.

De ce point de vue, nous avons bien sûr tout lieu d’être fiers de la vitalité de nos quarante grands groupes, car ils ont toute leur place dans l’économie nationale. Cependant, nous ne pouvons plus, comme nous l’avons dénoncé à maintes reprises, notamment dans le cadre de la mission sur la réindustrialisation, faire comme si ces quarante grands groupes étaient les seuls acteurs de notre économie. Nous bénéficions également de l’apport de milliers de PME et de TPE, qui représentent des millions de salariés. Il s’agit là d’une richesse incomparable. Voilà pourquoi nous devons les aider à se développer, à exporter, à embaucher, à investir et à créer de la valeur.

La volonté de soutenir l’emploi se joue ici, comme la bataille en faveur de l’investissement et de l’exportation. À ce titre, on sait très bien que la question de l’innovation est fondamentale.

Sans les PME, je le dis tout net, il n’y aura pas de résultat sur le front du chômage, pas plus que sur le terrain du commerce extérieur, dont il convient de combler le déficit. Ce sont certainement les PME qui permettront de gagner la bataille de la production française, bassin de production après bassin de production, bassin d’emploi après bassin d’emploi.

Le contrat de génération, qui sera prochainement mis en place, permettra de régénérer la pyramide des âges dans de nombreuses entreprises, afin de favoriser le transfert de compétences. De la sorte, le savoir-faire des aînés sera transmis aux nouvelles générations.

Nous mettrons également en œuvre une politique d’alternance concernant l’apprentissage, très près des entreprises, afin que les apprentis soient placés en situation de travail. Voilà les réponses concrètes qu’apportent aujourd’hui le Gouvernement et la majorité aux problèmes des PME-TPE.

En quelques mois, des mesures structurelles cohérentes ont été prises. Elles devraient permettre de répondre aux préoccupations premières des chefs d’entreprise et de déclencher une dynamique d’investissement et de réindustrialisation. C’est maintenant qu’il fallait prendre ces mesures, au plus fort de la crise, pour que nous puissions aborder la reprise économique dans les meilleures conditions. Ainsi, l’emploi, l’innovation et l’industrie ne manqueront pas le rendez-vous de la croissance lorsque celle-ci reprendra en Europe.

Premièrement, le nerf de la guerre, bien entendu, c’est le financement. J’ai reçu ce matin, dans le cadre du groupe d’études sur l’industrie, les membres de la direction de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises, la CGPME. Ils m’ont confirmé leurs difficultés d’accès aux financements privés, la frilosité des banques, l’indigence, parfois, du capital-risque en France.

À ce titre, chers collègues, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, la création de la Banque publique d’investissement et son accessibilité privilégiée pour les PME doit nous paraître une excellente chose !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Vous avez perdu dix ans, vous pouvez bien attendre encore un peu ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Nous avons évoqué cette question il y a quelques semaines. Vous avez dirigé le pays pendant dix ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Nous ne sommes pas au pouvoir depuis longtemps. Le projet de loi a été voté au Sénat il y a quelques semaines. La BPI arrive !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Vous avez perdu un an. Pouvions-nous nous le permettre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Quoi qu’il en soit, la future Banque publique d’investissement sera aux côtés des PME et des TPE.

Le deuxième point, c’est la compétitivité. Les PME pourront dès cette année bénéficier du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. J’ai entendu tout à l’heure parler de certains sondages... Bien sûr que les chefs d’entreprise auront accès à ce dispositif ! Ce crédit est fait pour eux ! Il représente un allégement de 4 % des cotisations sociales, ce qui n’est pas négligeable dans un contexte de trésoreries fragilisées par des commandes raréfiées.

Troisième point, je sais que le Gouvernement travaille en concertation avec les partenaires sociaux pour simplifier les démarches administratives. C’est une priorité. Nombreuses sont les PME qui se noient dans des procédures parfois ubuesques : c’est un temps précieux qu’elles ne consacrent pas à monter des dossiers de développement, d’exportation et d’innovation. Je me permets, madame la ministre, d’insister sur une nécessaire réforme du régime social des indépendants, le RSI.

Mon quatrième point, et non des moindres, portera sur le brevet unique européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Ce dispositif est tout récent, chers collègues de l’opposition, puisqu’il a vu le jour lors du conseil des ministres européens de l’industrie en décembre dernier. Dès le 1er mai prochain, des milliers de PME n’auront plus besoin de traductions financières onéreuses pour déposer leurs brevets.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Les grandes déclarations de cœur, c’est bien beau, mais, comme chacun sait, en amour, seules les preuves comptent. Voilà bien la preuve que le Gouvernement et la majorité sont aux côtés des PME.

Reconnaissez, mes chers collègues, que cela fait beaucoup en peu de temps. Nous sommes dans le concret. D’autres pistes mériteraient d’être explorées.

Je souhaite dire quelques mots sur les relations entre donneurs d’ordre et sous-traitants, un sujet crucial pour l’avenir de notre industrie et de notre tissu économique. La mission d’information commune que nous avons menée en 2010 et en 2011 au Sénat, certains s’en souviennent, avait montré que ces relations étaient déséquilibrées. L’Allemagne et l’Italie ont pris des dispositions pour protéger les petites entreprises qui innovent ; pas nous !

Combien avons-nous d’exemples d’entreprises innovantes que leurs donneurs d’ordre ont laissé couler pour se constituer de la trésorerie, ou, pire, pour récupérer des brevets et embaucher les meilleurs éléments que ces PME auront formés ? Trop, beaucoup trop ! Et cette situation, dont nous semblons nous accommoder, n’est plus acceptable.

La masse du crédit interentreprises atteint 600 milliards d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Une telle masse monétaire, ne nous cachons pas derrière notre petit doigt, est un frein majeur à la compétitivité, à l’investissement et à l’emploi. Elle est bien évidemment révélatrice de la difficulté des entreprises, notamment petites et moyennes, d’obtenir des délais de paiement acceptables. Ce laisser-faire, qui pourrait être criminel – « ces PME qu’on assassine », avait dit M. Volot – révèle également un manque d’attention majeur envers ces petites et moyennes entreprises.

J’ai été chargé de mener à bien un inventaire des problèmes rencontrés par ces PME, notamment dans le secteur industriel, et de rendre, dans quelques semaines, au ministère des finances et du redressement productif un rapport préconisant des mesures simples et, je l’espère, efficaces pour réguler et pacifier les relations entre donneurs d’ordre et sous-traitants ; la santé et la vitalité de beaucoup de PME en dépendent.

Dernier point, mais je laisserai mon ami Marc Daunis en parler plus longuement, j’attends des mesures structurelles pour promouvoir la mise en réseau systématique de nos PME.

Nous avons besoin d’écosystèmes industriels intelligents, cohérents, qui fonctionnent entre eux, afin de favoriser le partage de l’information et de l’innovation et de permettre l’instauration d’une véritable solidarité entre les territoires et entre les entreprises.

M. Daniel Raoul acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

C’est là, à mon sens, une orientation très importante pour notre industrie. Ces écosystèmes lui permettent de fonctionner de façon intelligente. Ils favorisent entre nos grands groupes, nos champions de l’industrie et nos PME des rapports de solidarité, de complémentarité, et non de soumission. Tel est le gage du succès. Si nous savons les développer, nous saurons gagner la bataille de l’industrie et permettre à notre économie de retrouver tout son dynamisme.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les petites et moyennes entreprises englobent un monde très varié selon les domaines d’activité et, bien sûr, la taille de l’entreprise, qui va de vingt salariés à plusieurs centaines. C’est dire combien la thématique du débat que nous avons aujourd’hui est large et combien les questions peuvent être diverses.

Les PME sont un moteur incontestable de la création d’emplois en France. Plus de 600 000 emplois nets ont été créés ces dix dernières années par les entreprises de moins de 500 salariés, répartis à peu près à égalité entre les sociétés de moins de 20 salariés et celles qui en comptent de 20 à 499.

Il apparaît donc essentiel de « sécuriser l’environnement des PME », en leur garantissant de la stabilité et de l’activité. C’est dans ce sens qu’il faut mener la réflexion pour rééquilibrer les relations entre grandes et petites entreprises, encourager l’innovation, l’export et la formation.

Interroger la place des PME dans l’économie, c’est donc poser la question de la politique économique que nous trouvons la plus pertinente pour pérenniser et encourager le développement de ce tissu économique et être aux côtés des entrepreneurs et des salariés.

Face à l’hétérogénéité des PME, une certaine homogénéité des difficultés s’affirme, notamment en termes de capacité à investir. Les PME n’investissent plus. En 2010, le taux d’investissement des PME était de 13 %, contre 18, 7 % pour l’ensemble des entreprises. Comme le rappellent les dirigeants des PME, il s’agit du taux le plus bas depuis 1996. L’un des obstacles majeurs réside dans les difficultés de trésorerie et d’accès au crédit. Ce sera le premier point de mon intervention.

L’accès au financement des PME est difficile. En 2012, selon la CGPME, 69, 5 % des dirigeants de PME ont subi au moins une mesure de restriction sur leurs conditions de financement ; ils étaient 71 % en 2011. De même, si, d’après les enquêtes de la Banque de France, les critères d’octroi des crédits aux entreprises n’ont pas changé durant l’année, ils n’ont pas non plus été assouplis. Dans ce contexte, la création de la Banque publique d’investissement suscite beaucoup d’espoirs.

Cependant, comme nous avons pu l’expliquer lors des débats sur le projet de loi relatif à sa création, la BPI ne nous semble pas complètement en mesure de répondre aux besoins de liquidités et de trésorerie immédiate des entreprises. Cet instrument est très loin du pôle financier public que nous proposons pour faire décoller le financement de l’activité économique.

Tout d’abord, la BPI n’est pas suffisamment dotée et, surtout, elle n’est pas un véritable établissement de crédit. Comme vous le savez, mes chers collègues, elle n’a pas la possibilité de se refinancer auprès de la Banque centrale européenne. Nous avions demandé que ce soit le cas. Cela n’a pas été accepté et, aujourd’hui, nous inscrivons les PME dans un contexte financier similaire à celui d’hier, ce qui implique la répétition des mêmes obstacles pour ces entreprises. Aux niveaux européen et national, des réformes ambitieuses doivent être engagées.

Je rappelle que, entre décembre 2011 et février 2012, la Banque centrale européenne, la BCE, a prêté aux banques, au taux de 1 %, quelque 1 000 milliards d’euros, et cela sans aucune condition d’utilisation. Les banques privées n’ont pas réinjecté tout l’argent dont elles ont bénéficié dans l’économie réelle. Des entreprises rentables ont été et sont asphyxiées pour de simples problèmes de trésorerie.

Pour donner une réponse aux problèmes récurrents d’accès au crédit des PME, il est nécessaire, à l’échelon européen, de porter une réforme de la BCE. Ainsi, nous estimons que le refinancement des crédits bancaires devrait être différent selon qu’il s’agit de financer de l’économie réelle ou des opérations financières. La BCE devrait également être autorisée à prêter aux États membres.

En interdisant à la BPI de se refinancer auprès de la BCE, on lui impose d’emprunter aux banques privées aux taux auxquels ces dernières voudront bien lui prêter. Cela ne nous rassure pas sur la capacité de la BPI à répondre aux enjeux en présence. Toutefois, comme l’a dit mon collègue Éric Bocquet il y a quelques semaines ici même, nous attendons de voir comment sera utilisée la BPI.

Un autre instrument mis en place par le Gouvernement, qui ne rompt absolument pas avec les politiques menées encore voilà peu, est censé relancer l’activité économique : il s’agit du crédit d’impôt pour la croissance et l’emploi, le CICE. Nous avons vivement dénoncé ce crédit d’impôt de 20 milliards d’euros pour les entreprises et la modification des taux de TVA qui doit permettre de le financer.

D’une part, ce crédit accordé sans conditionnalité constitue un véritable chèque en blanc et ne garantit pas la création d’emplois ou la relance de la politique d’investissements des PME. De plus, à ceux qui lui reconnaîtraient des vertus, il faut rappeler que le CICE ne bénéficie qu’aux PME constituées en sociétés anonymes ou en sociétés à responsabilité limitée. Il est donc vecteur de distorsion entre les PME et, de manière contradictoire, il alimentera plus la trésorerie des donneurs d’ordre.

D’autre part, la hausse de la TVA aura des conséquences lourdes sur le pouvoir d’achat des ménages, et elle entraînera bien plus d’effets récessifs que le crédit d’impôt n’emportera d’effets positifs.

Ensuite, je voudrais insister sur la nécessité de changer radicalement de cap dans la politique économique et industrielle de notre pays.

En effet, les PME sont étroitement liées à la bonne santé du secteur industriel. Je pense ici à l’industrie automobile, qui constitue l’une des grandes filières industrielles de notre pays. Au total, 800 000 salariés au moins travaillent en lien avec le secteur automobile, compte tenu de ses effets induits. Aider les PME, c’est aussi leur garantir des débouchés en lien avec l’industrie nationale, et c’est donc se donner les moyens de pérenniser cette activité. Au contraire, les délocalisations, les fermetures de sites continuent, sous la pression de la financiarisation de l’économie.

Après PSA, les chiffres calamiteux de l’industrie automobile française vont faire d’autres victimes collatérales. Renault, qui se trouve pourtant en meilleure santé que son principal concurrent dans l’Hexagone, a annoncé la suppression de 7 500 postes en France, l’un des pires « plans sociaux » de son histoire. Aujourd’hui, l’entreprise menace de fermer deux sites si aucun accord de compétitivité n’est trouvé. Ce chantage est inadmissible et l’État doit être aux côtés des salariés du groupe pour défendre l’ensemble du bassin d’activité qui en dépend.

Lors du débat que nous avions engagé il y a un an sur l’industrie automobile, Renault inaugurait à Tanger une usine dont une partie des véhicules a vocation à être réimportée en France. Il nous semble que des mesures pourraient être rapidement prises pour éviter de tels comportements, à commencer par l’interdiction des licenciements boursiers ou l’instauration d’une taxe sur la réimportation des productions délocalisées. Il y va de la survie de nombreuses entreprises.

Il est important d’évoquer ici les liens entre les donneurs d’ordre – pour la plupart de grandes entreprises – et les sous-traitants. Dans le secteur automobile, mais cela est vrai dans bien d’autres, je pense en particulier à l’agroalimentaire, les sous-traitants sont considérés non pas comme des partenaires, mais comme un réservoir de productivité à exploiter pour conforter unilatéralement les marges des donneurs d’ordre.

Nombreuses sont les pratiques illégales dénoncées par le médiateur de la sous-traitance : désengagement brutal du donneur d’ordre, exploitation de brevet ou de savoir-faire sans l’accord du sous-traitant, baisse de prix imposée unilatéralement sur des programmes pluriannuels, travail non rémunéré, incitation à la délocalisation. Il est urgent de prendre des mesures pour rétablir un équilibre dans ces relations commerciales, surtout quand la PME n’a qu’un seul client.

Je voudrais maintenant évoquer l’un des secteurs que j’affectionne.

Lors des débats sur la loi de modernisation de l’agriculture, nous avions évoqué l’intérêt de développer les circuits courts pour donner un nouveau souffle entrepreneurial dans l’agriculture. Certains partenariats sont mis en place entre la grande distribution et des producteurs et entreprises locales. Nous pensons qu’il serait utile de revenir sur la question des relations commerciales entre PME, centrales d’achat et grande distribution. Si certains efforts ont été consentis en termes de délais de paiement, le déséquilibre dans les relations entre certains fournisseurs et distributeurs est toujours d’actualité. Résoudre ce problème est aussi une condition au développement des PME dans ce secteur d’activité.

Enfin, est-il possible de parler des PME sans évoquer celles et ceux qui y travaillent, le rapport de l’homme au travail, les discriminations salariales hommes-femmes, les méthodes de management qui mériteraient une sérieuse évolution pour que chacun se sente bien dans l’entreprise ?

Le projet d’entreprise ne doit plus être seulement l’affaire du patron ou des actionnaires : tout le monde doit y trouver sa place. Les sociétés coopératives et participatives, les SCOP, sont une illustration de ce vers quoi peut évoluer une entreprise mais, quel que soit le statut des entreprises, il me semble impératif qu’elles évoluent dans le domaine de l’humain. Tout le monde y gagnera !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, s’intéresser aujourd’hui aux difficultés, aux attentes, aux inquiétudes des PME relève, eu égard à la situation du chômage, de l’esprit civique.

Les PME emploient près de 7 millions de personnes en France, soit pratiquement 50 % des salariés du secteur privé. Cela fait longtemps que l’on entend dire qu’il faut favoriser, renforcer, accompagner les PME, qu’elles sont l’arme la plus fiable pour lutter contre le chômage.

En réalité, nous sommes toujours très doués, toutes tendances confondues, pour établir des diagnostics ; nous sommes un peu plus en difficulté lorsqu’il s’agit de trouver des solutions concrètes !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Aussi, on crée des commissions. Nous nous souvenons de la commission présidée par M. de Virville, directeur chez Renault, qui visait à simplifier le code du travail. Nous avons eu ensuite la commission présidée par M. Attali, qui avait formulé 300 propositions. On n’en a retenu qu’une seule, celle qui concerne la rupture conventionnelle du contrat de travail. En réalité, on réforme souvent a minima.

Le soutien aux PME était l'un des engagements de campagne du Président de la République, mais, depuis lors, le vent s'est levé, l'ambiance s'est tendue, la grogne des « Pigeons » est passée par là. Le Gouvernement marche sur un fil et sans filet, …

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

M. Yannick Vaugrenard. C’est courageux, tout de même !

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

… sous la pression de sa majorité plurielle, en réalité souvent versatile, qui lui rappelle sans cesse ses engagements électoraux. Aujourd'hui, après six mois de présidence – je n’évoquerai pas les dix ou quinze années passées –, quelle est la situation ?

Nous constatons que l'économie française a perdu 63 800 emplois, dont environ 80 % concernent effectivement les PME. Ces destructions d'emplois affectent toutes les régions et toutes les catégories socioprofessionnelles. Chacun peut constater une perte globale d’effectifs dans l’industrie, où nous avions cinq millions de salariés dans les années quatre-vingt, alors qu’il n’en reste plus qu’environ trois millions.

Nous avons un autre critère : les pertes de parts de marché, qui sont considérables à l’exportation. Elles sont passées de 12, 7 % en 2000 à 9, 3 % aujourd'hui. La perte de compétitivité est donc le problème central de ce pays. Le rapport Gallois l’a fait apparaître au grand jour, et ce constat est aujourd’hui largement partagé.

Ce rapport préconisait des réformes structurelles et un choc de compétitivité consistant à réduire les cotisations sociales de 30 milliards d'euros sur un an ou deux ans au maximum. C’eût été une bonne mesure, qui aurait permis de rendre assez rapidement de l’oxygène et de la confiance aux entreprises.

La difficulté est qu’aujourd’hui, mes chers collègues, nous ne disposons pas d’un dispositif tout à fait opérationnel. Pour 2013, je suis impatient qu’on m’explique comment le pacte de compétitivité va fonctionner… En réalité, ce plan ne commencera à fonctionner qu’en 2014, 2015 et 2016. La vraie difficulté, le véritable problème est de savoir si nous pouvons encore attendre, alors que le chômage s’emballe.

À vrai dire, madame la ministre, nous aurions préféré que vous conserviez le dispositif dit « de TVA sociale », qui était en place – même s’il était tardif – et qui, dès 2013, aurait produit les effets visés par l’analyse du rapport Gallois.

M. Marc Daunis s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Par ailleurs, quelle vision de nos entrepreneurs véhiculons-nous ? C’est aussi un problème important, car on confond régulièrement spéculation et initiative entrepreneuriale. Je parle des entrepreneurs tels que nous les connaissons et les côtoyons dans nos départements, dans nos villes. Un dirigeant de PME apporte son expertise, un métier, son sens créatif, son temps – il est très loin, en général, des 35 heures –, souvent son argent et même, parfois, sa santé. Il mériterait, de notre point de vue, une considération plus affirmée dans la communication gouvernementale, notamment.

En général, la richesse de l’entrepreneur prend la forme de brevets, de bâtiments ou de machines. Elle est fragile, au regard du nombre croissant des concurrents à travers le monde. Enfin, cette richesse fournit du travail à nos compatriotes, qui n'attendent d'ailleurs pas grand-chose d'un État surendetté, incapable de s'adapter aux défis d’une mondialisation qui constitue leur quotidien. De cela, vous ne portez pas, seuls, la responsabilité ; je veux bien croire que nous puissions la partager s'agissant de ces dernières années.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Seules, les entreprises créent des biens et des emplois durables. Elles suscitent des flux fiscaux et sociaux significatifs pour l'État, qui devrait les respecter en ne changeant pas la réglementation, notamment fiscale, tous les quatre matins, car les PME ont surtout besoin de visibilité et de stabilité.

Maxime Aïach, président d'Acadomia, disait dans la presse il y a un mois : « Quand j'entends Michel Sapin, le ministre du travail, expliquer qu'il va veiller à ce que le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi ne soit pas utilisé par les patrons pour s'acheter une Jaguar, je le prends comme une insulte. Quel mépris ! ». Maxime Aïach a raison, ce type de petite phrase, prononcée par un ministre de la République, n'est pas responsable.

Les résultats de cette politique, accompagnée par de telles diatribes, sont inquiétants. Il y a peu, M. Frassa, sénateur des Français de l'étranger, expliquait dans la presse que le nombre d'exilés fiscaux avait été multiplié par cinq ; ce sont des chefs d'entreprises, des cadres supérieurs et des jeunes diplômés.

Jadis, les Huguenots avaient quitté la France après la révocation de l'Édit de Nantes. Ils ont apporté leur savoir-faire dans tous les pays du nord de l’Europe, aujourd'hui prospères. Trois cents ans plus tard, on vit des phénomènes migratoires assez semblables, dont les conséquences sont tout à fait prévisibles.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Les chefs d'entreprises, mes chers collègues, sont tout aussi conscients que n'importe quel ministre des efforts financiers nécessaires pour soutenir l'économie de notre pays face à une crise qui se révèle exceptionnellement grave. Ils sont prêts à y apporter toute leur contribution et le meilleur d’eux-mêmes. C'est d'abord en pensant à eux que M. Schäuble, ministre de l'économie allemand, disait il y a quarante-huit heures : « La France est un grand pays qui assurera son redressement. ». Et c’est par ses entreprises qu’elle le fera.

Pour cela, il est urgent d'oublier la bible des promesses inconsidérées du candidat Hollande pour y substituer les mesures aujourd'hui reconnues comme indispensables afin de recouvrer la compétitivité de notre économie.

Par rapport au diagnostic du rapport Gallois, que, pour l’essentiel, nous partageons dans cet hémicycle, le dispositif dit « de TVA sociale » amorçait sérieusement et immédiatement le choc de compétitivité préconisé, pour que nos entreprises renflouent leur trésorerie et puissent reprendre des investissements en chute libre.

Néanmoins, l’obsession du détricotage du travail des prédécesseurs, par essence injuste, vous conduit aujourd'hui à enregistrer tous les mois, mes chers collègues, des milliers de chômeurs supplémentaires, et cela va durer. Est-il bien sérieux d’attendre 2014 pour engager des mesures fortes pour améliorer la situation de nos PME, alors que l’Allemagne elle-même vient de réviser fortement à la baisse ses prévisions de croissance et que le FMI a annoncé, aujourd’hui même, qu’il prévoyait une récession dans la zone euro pour la deuxième année consécutive ?

Pourtant, parmi les pays de la zone euro, certains ont engagé des réformes structurelles d’importance. Ainsi en va-t-il de l’Espagne et de l’Italie ; or, ce sont en réalité, aujourd'hui, ces deux pays qui nous prennent des parts de marché en Europe.

Sur les vingt mesures du rapport Gallois, une seule a fait l'objet d'un vote des assemblées avec, au surplus, des effets différés dans le temps. Quid des autres propositions de réformes structurelles susceptibles d'améliorer l'environnement économique des PME et des PMI ?

En revanche, les mesures fiscales touchant les entreprises se trouvent, elles, fort nombreuses dans les dernières lois de finances. Mes chers collègues, si je ne devais citer qu’une seule de ces dispositions, sur laquelle il faudrait revenir le plus vite possible, j’évoquerai la non-déductibilité des charges financières sur les intérêts d’emprunts destinés aux investissements. Nous sommes la seule économie du monde à oser une telle mesure. Que les entreprises qui investissent ne puissent pas déduire les intérêts des emprunts pour ces investissements constitue un véritable non-sens économique !

Quant à l'imposition des revenus du capital au même niveau que ceux du travail – magnifique slogan, vanté comme étant l'avant-garde de la réforme fiscale ! –, en réalité, elle aura surtout un impact sur les détenteurs d'entreprises, avec des effets de double peine. Au final, le capital entrepreneurial sera plus taxé que le travail.

En 2008, nous comptions, mes chers collègues, à peu près 7 millions de personnes qui avaient une épargne placée dans l’économie réelle, c'est-à-dire celle qui est exposée. Nous n’en sommes plus aujourd’hui qu’à 4 millions, alors que, nous le savons tous, le principal problème des entreprises françaises est d’accéder aux fonds propres. Cette stratégie du « tout fiscal », sans mesure de soutien à l’économie, est incohérente et ne peut que fragiliser les entreprises, dont une grande majorité de PME.

Dans ce climat défavorable pour les entreprises, les experts s'attendent à une destruction de 200 000 à 300 000 emplois, et je reprendrai les propos de M. Yvon Gattaz, dont personne ne conteste l’expertise en la matière : « Pour créer des emplois, la meilleure solution était encore de créer des employeurs ». Au lieu de décourager, il faudrait faciliter la création d'entreprise et l'accès au financement bancaire, tous les intervenants ayant, ici, signalé des difficultés.

Pour terminer, je voudrais rappeler que nombre de Français entrepreneurs, cadres dirigeants, artisans, qui travaillent dur, au-delà des 35 heures, sans statut, en ont assez de voir s’empiler les taxes et prélèvements. Ils en ont assez de jongler avec les normes et des règlements toujours plus confus. Ils en ont assez de l’instabilité fiscale. Ils sont au bord de l’asphyxie et de la révolte. Tous, ici, nous les connaissons. Et c’est aussi cela, le monde des PME !

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

procédures de redressement judiciaire et de liquidation directe, soit une hausse de 2, 7 % par rapport à 2011.

Ces défaillances sont d’abord dues, pour de nombreuses petites et moyennes entreprises, à des difficultés de financement, qui entravent leur capacité à innover, à exporter, à se développer, voire menacent leur survie. Les crédits de trésorerie reculent en effet de 3, 5 % depuis un an.

Le Gouvernement a donc décidé, rapidement, de prendre ce problème à bras-le-corps – il y va, en effet, de la survie de notre économie. Vous le savez, le Premier ministre a demandé à Louis Gallois, en juillet dernier, de lui faire des propositions sur la compétitivité, la croissance et l'emploi. Ces propositions ont été reprises et adoptées par le Gouvernement dès le mois de novembre dernier.

Nous n’avons donc pas perdu de temps. Monsieur Delattre, vous disiez toute à l’heure que vous étiez d’accord avec le diagnostic du rapport Gallois. Toutefois, ce diagnostic n’est ni plus ni moins que le constat de l’échec cuisant d’une politique qui était menée depuis dix ans par la majorité précédente.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

Un arsenal complet de mesures, combinant des actions d'urgence et d'autres à plus long terme, a déjà commencé d’être mis en place et va continuer à l’être jusqu'en 2017. Je voudrais insister, d'une part, sur le rôle de la Banque publique d'investissement, outil de financement indispensable, et, d'autre part, sur les délais de paiement – ils ont déjà été évoqués et j’y reviendrai –, qui restent un problème majeur pour les PME.

La décision n° 4 du pacte pour la compétitivité porte, en effet, sur la création de la BPI, afin d'offrir aux entreprises un service de financement de proximité, à l'aide d'une palette élargie d'instruments financiers et de conseils, pour intervenir à toutes les phases du développement de l'entreprise.

En effet, l'accès au crédit est en général, nous le savons tous, particulièrement difficile pour les PME, et la crise financière de 2008 a encore accentué les difficultés de financement que rencontraient déjà, traditionnellement, les petites entreprises.

Depuis le début de l'année 2011, on observe un durcissement supplémentaire de l'octroi des crédits aux PME, dans la mesure où certains dossiers acceptés dans les années antérieures sont désormais considérés par les mêmes banques comme trop risqués. Or le principal mode de financement des PME, nous le savons, est le crédit bancaire.

La création de la BPI va donc permettre d'apporter un soutien aux PME, en particulier durant cette période de crise financière où la raréfaction du crédit pourrait devenir la règle.

La capacité d'intervention de la BPI dépassera 40 milliards d'euros, avec un effet de levier extrêmement important.

Les PME auront également un meilleur accès aux ressources du programme des investissements d'avenir. Enfin, pour répondre aux besoins en fonds propres des entreprises tout en respectant leur choix de gouvernance, la BPI développera une activité de capital-risque et pourra intervenir à travers des titres de capital, sans droit de vote, bénéficiant en contrepartie d'une rémunération privilégiée.

L'action de la BPI devra être particulièrement décentralisée, pour une meilleure efficacité, au plus près des entreprises, grâce à l'appui constant des conseils régionaux.

Néanmoins, la BPI a également pour mission d'apporter son soutien aux entreprises, afin que celles-ci puissent croître davantage. La France se caractérise, en effet, par un nombre insuffisant d'entreprises de taille intermédiaire – je pense que nous sommes tous d’accord sur ce constat. Or ces dernières ont généralement moins de difficultés en matière d'accès aux financements.

Pourtant, on le sait, notre pays peine à développer ce type d'entreprises : on en compte 4 600 sur notre territoire, contre plus de 12 000 chez nos voisins allemands.

Du reste, un rapport sénatorial de 2010, Les Entreprises de taille intermédiaire au cœur d'une nouvelle dynamique de croissance, est éclairant sur ce point, car il montre comment les grandes entreprises veillent elles-mêmes à ne pas laisser prospérer d’entreprises suffisamment fortes pour leur faire concurrence… Ainsi, le processus d'absorption par des groupes est particulièrement fréquent, puisque moins de 5 % des entreprises de plus de 500 salariés seraient totalement indépendantes.

La Banque publique d’investissement devra donc intervenir afin d’enrayer ce phénomène et de soutenir nos PME dans leur développement. Elle leur apportera également une aide pour qu’elles deviennent des entreprises de taille intermédiaire, généralement plus dynamiques en termes d’emplois et susceptibles de constituer un levier pour nos exportations. C’est d’ailleurs l’un des objectifs fixés à l’article 1er de la loi relative à la création de cette institution.

J’évoquerai à présent une difficulté à laquelle se heurtent de très nombreuses entreprises, à savoir l’épineux problème des délais de paiement. Les défaillances des entreprises y sont en effet étroitement corrélées : celles qui retardent leurs règlements fournisseurs de plus de 30 jours présentent une probabilité de défaillance multipliée par six. Ces retards sont préjudiciables à la compétitivité et à la rentabilité des entreprises créancières.

Certes, la LME a globalement réduit le niveau de risque dans la sphère des PME, en limitant la transmission des difficultés de trésorerie d’une entreprise à l’autre. Entrée en application au 1er janvier 2009, cette loi a en effet imposé un délai maximal de paiement entre entreprises de 45 jours fin de mois, ou de 60 jours nets, à compter de la date d’émission de la facture. En l’absence de convention entre les parties, le délai de règlement des sommes dues est fixé à 30 jours, date de réception des marchandises ou d’exécution de la prestation.

Si, dans un premier temps, la LME a permis une réduction des délais de paiement, il apparaît aujourd’hui que seul un tiers des entreprises règle dans les délais et qu’un quart des créances des PME demeure en attente d’encaissement au-delà de 60 jours.

La LME n’a donc pas permis de mettre un terme aux difficultés liées aux délais de paiement. C’est pourquoi le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a repris en main ce dossier ; c’était indispensable. Tel est l’objet de la décision n° 3 du levier 2 du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, « Établir un plan d’actions pour lutter contre l’allongement des délais de paiement ». Les PME pourront désormais s’appuyer sur l’administration, qui sera dotée d’un pouvoir de sanction efficace, afin d’obtenir le respect des délais de paiement légaux. Cette mesure devrait être adoptée cette année. Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer à quel moment le dispositif sera mis en œuvre ?

Pour montrer l’exemple, l’État s’engage, quant à lui, à réduire ses propres délais de paiement sur le quinquennat, afin de parvenir à un maximum de 20 jours en 2017.

À l’échelon européen, la Commission a adopté deux directives visant à réduire les délais de paiement dans les transactions commerciales au sein de l’Union européenne ; cela concerne aussi nos entreprises.

La première directive, datée de 2000, a instauré un droit à intérêts 30 jours après la date de la facture, à moins qu’un autre délai n’ait été négocié dans le contrat.

La seconde directive, adoptée en 2011, est plus contraignante, puisque, tout en instaurant le même délai de règlement, elle impose au-delà de 60 jours des intérêts de retard. Cette directive a été transposée en droit français, notamment par un décret publié au début du mois d’octobre 2012, qui est entré en vigueur le 1er janvier dernier. Souhaitons qu’il ouvre la voie à des procédures de recouvrement beaucoup plus nombreuses.

Nos PME ont soif de croissance. Renforcées grâce à une croissance externe, encouragées par la puissance publique, conduites vers un développement plus rapide et soutenues par des mesures législatives adaptées, elles pourraient être plus nombreuses, plus créatrices d’emplois, plus exportatrices encore, et contribueraient ainsi durablement et efficacement à la régénération du tissu économique français.

Pour conclure, je suis convaincu que le soutien de notre économie, par conséquent le soutien à l’emploi, passe par une attention accrue aux PME et aux ETI. Leur réactivité et leur inventivité doivent être accompagnées, car elles sont un maillon essentiel de notre chaîne économique. Les grandes entreprises doivent mieux comprendre qu’il est de leur intérêt d’aider, sans domination, à la croissance mais aussi à la diversification des entreprises sous-traitantes. C’est en effet cela qui peut permettre une saine émulation et un meilleur effort dans la recherche et l’innovation.

Dans cette période économique délicate que traverse, avec d’autres, notre pays, c’est d’esprit d’équipe et de solidarité que la France a besoin. Les petites et moyennes entreprises doivent bénéficier de cet indispensable sens du collectif et de cette nécessaire attention nationale.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le débat de ce soir s’ouvre alors même que les plans sociaux dans les PME se multiplient. En effet, sur les 60 450 défaillances d’entreprises recensées par la Banque de France entre octobre 2011 et octobre 2012, 56 600 ont concerné des PME de moins de 250 salariés, soit 93 %.

Je ciblerai mon propos sur deux secteurs qui me tiennent particulièrement à cœur, le secteur du bâtiment et celui de l’hôtellerie-restauration. Le premier a d’ailleurs organisé une journée d’action nationale, vendredi 18 janvier dernier.

Voila bien deux domaines qui contribuent à l’aménagement du territoire, à l’activité économique des régions et à l’emploi non délocalisable. Or les dispositions fiscales votées à la fin du mois de décembre dernier par le biais de la dernière loi de finances rectificative pour 2012 sont extrêmement préoccupantes pour leur pérennité.

Les enjeux économiques dans ces secteurs d’activité sont très importants, en termes d’emplois et de santé des entreprises, dans le contexte de crise économique que nous connaissons depuis près de quatre ans maintenant.

Vous le savez, madame la ministre, l’hôtellerie-restauration est un secteur de PME à forte intensité de main-d’œuvre : on y compte plus de 200 000 entreprises partout en France, dont 96 % emploient moins de 10 salariés. Cela représente donc plus 700 000 salariés, qui, je le répète, sont autant d’emplois non délocalisables.

Un quart de ces salariés ont moins de 26 ans, un tiers moins de 30 ans ; 80 % des contrats de travail sont à durée indéterminée, auxquels il faut ajouter 91 000 jeunes en formation professionnelle initiale en 2011.

Or, en dépit de la crise économique, ce secteur a créé plus de 50 000 emplois sur la période comprise entre juillet 2009 et juillet 2011. Il est l’un des premiers secteurs créateurs d’emploi, avec un chiffre d’affaires de 58, 5 millions d’euros.

Les métiers de l’hôtellerie-restauration sont par ailleurs un moteur essentiel pour notre activité touristique, très importante dans la balance commerciale, même si l’on constate la disparition de 25 % du parc hôtelier indépendant depuis une quinzaine d’années.

Les chiffres sont parlants : 1 700 hôtels indépendants ont définitivement disparu en huit ans, soit une moyenne de 212 établissements par an. En outre, ces disparitions, en fonction de leur implantation, montrent la fragilité de l’hôtellerie hors secteur urbain. Or le potentiel touristique se trouve aussi dans nos provinces françaises ! Des mesures de protection du parc hôtelier de la France touristique s’imposent avant que nous ne soyons confrontés à une totale désertification.

Enfin, toute une batterie de charges supplémentaires, validées à la fin de l’année 2012 par le Gouvernement, devront être supportées par ces professionnels. Je pense notamment à l’augmentation de la TVA, à celle de la taxe sur les bières, à la taxe sur les sodas, à la hausse de la taxe « éco emballage », à l’impact des nouvelles bases d’imposition de la contribution économique territoriale.

À cela s’ajoute un alourdissement des coûts de fonctionnement : renchérissement particulièrement important des prix de gros alimentaires, hausse sans précédent des coûts des matières premières – le prix de la viande bovine a par exemple augmenté de 24 % sur dix ans, celui du sucre de 47 %, celui des céréales de 42 % ; le coût de l’électricité a crû de près de 30 %, en trois ans –, majoration successive des loyers commerciaux, de l’énergie ou encore – et ce n’est pas rien ! – mises aux normes coûteuses des bâtiments.

J’en viens au secteur du bâtiment, dont les responsables ont manifesté à la fin de la semaine dernière.

Alors que ce secteur a créé 32 300 emplois entre 2009 et 2011, ce sont bien plus des liquidations directes que des redressements qui sont actuellement prononcés par les tribunaux de commerce. Les carnets de commande, qui permettaient une projection de six à douze mois, sont rétrécis à deux ou trois mois.

Dans mon seul département de l’Aisne, ce sont près de 1 800 emplois qui ont été perdus ces deux dernières années. Sur tout notre territoire, près de 35 000 emplois ont été supprimés en fin d’année.

Rappelez-vous que ce secteur a subi un relèvement de 5, 5 % à 7 %, puis à 10 % de la TVA, que le crédit d’impôt compétitivité emploi ne s’applique pas aux travailleurs indépendants – plus de 200 000 artisans se voient donc exclus du dispositif –, que les délais de paiement sont intenables et les trésoreries exsangues, que l’accompagnement bancaire demeure plutôt frileux. En outre, l’instabilité réglementaire récurrente concerne également les aides entrant dans le cadre du Grenelle de l’environnement.

L’ensemble de ces mesures plonge les artisans dans une situation très précaire, d’autant qu’ils sont confrontés à une concurrence déloyale résultant de la création du régime de l’auto-entrepreneur. Beaucoup a déjà été dit sur le sujet.

À ces constats s’ajoutent d’autres difficultés pour les PME, plus généralement celles qu’elles rencontrent pour accéder à la commande publique – Natacha Bouchart l’a souligné –, le faible soutien à l’exportation et à l’expansion à l’étranger, la fiscalité lors de la transmission de l’outil de travail, l’accès difficile au crédit pour les collectivités territoriales et les particuliers.

Madame la ministre, les responsables du secteur de l’artisanat et du bâtiment ont des propositions sur lesquelles nous souhaiterions recueillir vos commentaires. Il s’agit, par exemple, de la prolongation de l’éco-prêt, de la bonification du crédit d’impôt développement durable, le CIDD, de la création d’un prêt énergie rénovation des logements, de la sécurisation des délais de paiement fournisseurs, d’une limitation du régime d’auto-entrepreneur dans le temps avec une évolution programmée vers une micro-entreprise.

La situation de nos PME dans ces deux secteurs n’appelle que des constats alarmants. Il en est de même pour d’autres domaines. Je pense, par exemple, aux opticiens indépendants. Voila une profession particulièrement dynamique, qui touche à l’innovation, mais qui est aussi actrice à part entière de la santé. Le métier a profondément évolué pour pallier le manque patent d’ophtalmologistes. Les opticiens peuvent désormais assurer des examens de vue et délivrer les équipements – lunettes ou lentilles – avec une correction adaptée. Or l’avenir de ces PME innovantes est étroitement lié à la préservation du dynamisme des opticiens.

En réformant le code de la mutualité pour autoriser les mutuelles à pratiquer des remboursements différenciés, la proposition de loi relative au fonctionnement des réseaux de soins autorisera les plateformes de santé à imposer aux opticiens des critères tarifaires stricts et à promettre aux assurés des baisses de tarifs en optique de l’ordre de 30 % à 40 %.

Or, pour respecter ces nouveaux tarifs forcés, les opticiens, qui réalisent en moyenne un excédent brut d’exploitation de 23, 4 %, seront contraints de descendre en gamme, ce qui les conduira inévitablement à importer leurs produits depuis des filières low cost étrangères, au détriment de la filière française.

Par conséquent, au-delà des suppressions de postes chez les opticiens, les entreprises innovantes françaises de fabrication de produits d’optique seront aussi mises à mal.

Ainsi, ce texte, s’il était adopté, coûterait cher à une filière ainsi qu’à des PME françaises jusqu’à présent relativement préservées par la crise.

En conclusion, je rappelle que les PME ont avant tout besoin de modération et de stabilité fiscale pour continuer à créer des emplois et être des moteurs de croissance. Sachons garder vivace le dynamisme de nos entrepreneurs !

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

M. Marc Daunis . Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, on pourrait certes s’interroger sur l’opportunité, aujourd’hui, à cette heure, d’un débat sur la place des PME dans notre économie. Retrouvons-nous dans un grand élan consensuel pour admettre qu’il n’est jamais inutile de débattre des PME et des TPE !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Cela a déjà été souligné, les PME représentent le premier employeur national, constituent un pilier de notre économie, s’articulent avec l’intelligence de nos territoires.

Permettez-moi de livrer un sentiment plus personnel. Je suis particulièrement sensible à ce sujet, ayant l’honneur de représenter dans cette enceinte un territoire fort d’un écosystème singulier. Je pense évidemment à la technopole de Sophia-Antipolis qui, avec ses 1 500 entreprises et ses 31 500 emplois, est une terre d’innovation technologique, lieu de fertilisation croisée entre l’industrie, la recherche et le monde académique, et matrice des autres technopoles que compte notre pays.

Je dis d’ailleurs très courtoisement à notre collègue Francis Delattre, maire de Franconville-la-Garenne, qu’il n’y a pas dans cet hémicycle, d’un côté ceux qui aiment les créateurs et les entrepreneurs et, de l’autre, des obscurantistes nostalgiques de l’émigration des Huguenots !

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Soyons sérieux ! Dans un débat de ce type, nous sommes tous mobilisés pour notre pays et nous essayons de trouver des solutions dans un contexte particulièrement difficile.

Dois-je rappeler que, depuis dix ans, nous nous heurtons à une dette publique colossale – performance qui mérite d’être saluée, sans humilité aucune, bravo ! –, ...

Sourires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

... à un déficit commercial qui s’est creusé de 42 milliards d'euros, à une industrie qui a perdu 750 000 emplois ?

Cher collègue de l’opposition, comment pouvez-vous parler d’immobilisme et d’attentisme s’agissant de ces six derniers mois et, pour illustrer votre propos, évoquer la TVA sociale, qui allait entrer en application en 2013 et aurait, selon vous, porté ses fruits, alors qu’elle a été votée en 2011, c'est-à-dire en fin de mandat ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

C’est sûr, la supprimer a été une grosse erreur !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Vous êtes plus adroit que cela, d’habitude !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Chers collègues, je vous en prie, ayons un débat digne et évitons ce genre d’attitude, qui n’est guère utile pour l’avenir de notre pays.

Je me permettrai d’aborder cinq points : premièrement, le contexte économique, qui n’épargne pas nos PME ; deuxièmement, le constat partagé de leurs difficultés, une base commune sur laquelle nous pourrions peut-être nous appuyer ; troisièmement, la nécessité de les consolider, qui semble, là encore, faire consensus ; quatrièmement, les mesures importantes prises par le Gouvernement depuis quelques mois, que vous devriez apprécier à leur juste mesure, chers collègues ; enfin, cinquièmement, quelques pistes pour mettre en perspective la nécessaire adaptation des PME au monde de demain.

Le contexte économique, précédemment décrit, s’impose à nous. La majorité présidentielle et le Gouvernement ne sont pas dans une situation où ils pourraient refuser l’héritage, jugeant le passif trop lourd : ils se doivent de faire face à la situation de notre pays.

En l’occurrence, au cœur de la crise, alors que les grands groupes licenciaient massivement sous la pression de la bourse ou pour satisfaire la voracité de quelques actionnaires, les TPE et les PME, elles, ont conservé l’essentiel de leur personnel et de leur savoir-faire, souvent au détriment de l’investissement ! En conséquence, les marges bénéficiaires des entreprises sont aujourd’hui au plus bas. D’où la nécessité absolue du pacte national pour la compétitivité, la croissance et l’emploi.

Incidemment, on ne peut pas dire que le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi est inefficace et, dans le même mouvement, en demander l’extension aux artisans. S’il est inefficace, à quoi bon l’étendre aux artisans et aux professions libérales ? Voilà une contradiction supplémentaire de nos collègues de l’opposition sur laquelle je ne m’appesantirai pas davantage.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Vous relirez vos propos dans le compte rendu de la séance, cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

J’ai déploré qu’aucune mesure n’ait été prévue pour 2013 !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Le constat que nous faisons sur les difficultés de nos PME est partagé. Accès de plus en plus difficile au financement, contraction de l’accès au crédit, hausse fulgurante des taux d’intérêts : plusieurs orateurs, de toutes sensibilités politiques, ont rappelé ces problèmes.

En conséquence, les entreprises ont des difficultés pour grandir et accéder à de nouveaux marchés. Elles ont par ailleurs un besoin d’accompagnement tout au long de leur vie, et pas simplement lors de leur création.

La faiblesse de notre tissu de TPE et PME constitue un lourd handicap, de même que la difficulté pour nos TPE de croître et de devenir des PME ayant une taille suffisante. Or l’enjeu est très important. Notre collègue Martial Bourquin dirait que c’est grave, très grave même.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Ces difficultés doivent être résolues, car le développement de ces entreprises conditionne le redémarrage de la croissance économique et le retour des créations d’emplois.

Il est de notre devoir de consolider nos PME. Je me réjouis que ce point fasse consensus, de même que j’ai entendu avec plaisir les orateurs défendre la nécessité d’un Small Business Act à la française, qui devrait être, bien entendu, en cohérence avec l’échelon européen et qui permettrait de développer un environnement favorable aux PME innovantes.

Nous devinons quels pourraient être les piliers fondamentaux d’un tel Small Business Act : une fiscalité et une législation adaptées pour les PME et TPE, un accès facilité aux marchés publics, un accompagnement important à l’accès au marché européen et international ; enfin, un accès facilité et simplifié aux financements. On pourra, s’il le faut, corriger telle ou telle mesure, mais les éléments essentiels sont là.

D’ores et déjà, le Gouvernement a pris, dans le cadre du pacte de croissance, de compétitivité et d’emploi, des mesures qui vont dans le sens du redressement de notre économie et qui sont favorables à nos PME.

Pour ne citer que quelques mesures, je rappellerai à mon tour la création de la Banque publique d’investissement. J’ai certes entendu les critiques sur l’insuffisance des sommes engagées. Naturellement, ce n’est jamais assez, mais nous surmontons déjà ce premier défi !

La mise en place du crédit d’impôt compétitivité emploi aura pour conséquence l’injection de 20 milliards d’euros. Excusez-moi du peu, mais, dans la situation que connaît notre pays, cela représente un effort colossal.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Et vous venez de leur reprendre 30 milliards d’euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Je reviendrai ultérieurement sur les implications de cette mesure et le risque que ces efforts réalisés en direction des entreprises suscitent des réticences dans le corps social, qui n’en comprendrait pas ou n’en mesurerait pas l’efficacité, la pertinence et la justice.

Enfin, 2, 2 milliards d’euros d’investissements d’avenir seront réorientés vers les PME innovantes et le numérique, là encore élément stratégique pour l’avenir, et nous avancerons vers la création d’un brevet unique européen.

Comme l’a rappelé notre collègue Martial Bourquin, ce problème est majeur, quand on sait que les entreprises françaises déposent trois fois moins de brevets que leurs consœurs allemandes, que, en 2011, moins de 20 % des dépôts de brevets ont été réalisés par des PME, et qu’un dépôt, en Europe, coûte aujourd’hui près de dix-huit fois plus cher qu’aux États-Unis.

Bientôt, nous discuterons également du contrat de génération, qui vient d’être adopté par l’Assemblée nationale. Ce dispositif favorisera la solidarité au sein de nos entreprises et de notre société, mais surtout garantira la transmission des savoirs essentiels pour la compétitivité des entreprises. Notre collègue Martial Bourquin l’a rappelé fort justement tout à l’heure.

Nous devons aussi adapter nos PME au monde de demain ! Nous le savons : dans une économie financiarisée, dans un monde en mutation, où l’on sent qu’un système est en train d’agoniser sans qu’un autre ait encore pu prendre sa place, nos PME sont soumises à une concurrence internationale très agressive.

Plusieurs chantiers sont devant nous : la nécessité d’un cadre d’action clair, stable et pérenne ; une meilleure information et accompagnement – en cela, la banque publique constitue une première étape et dépasse très largement les dispositifs précédents auxquels vous faisiez allusion, comme OSEO ; une stabilité et une clarté juridique – actuellement, quelque 7 000 dispositifs de financement public et 20 % des articles du code général des impôts sont modifiés chaque année.

N’oublions jamais cela ! Certains d’entre vous ont soulevé ce problème tout à l’heure, mes chers collègues, mais nous ne devons jamais l’oublier dans nos travaux parlementaires. Il est facile de déplorer l’inflation normative alors que nous sommes très souvent à l’origine de ces dispositifs – et vous l’étiez prioritairement ces dernières années, chers collègues de l’opposition, puisque vous étiez aux affaires.

Mes chers collègues, j’espère que l’actuelle majorité sera beaucoup plus responsable en la matière que ne l’a été la précédente.

Le pacte de compétitivité prévoit de simplifier les démarches administratives. Il a été estimé par le Gouvernement qu’une réduction des charges administratives de 25 % permettrait une augmentation de près de 1, 5 point du produit intérieur brut européen ! Là encore, les guichets uniques de la BPI sont un excellent premier pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Je conclurai mon propos en soulignant quatre points.

Premièrement – cela a été rappelé –, il convient d’améliorer les rapports entre les PME et les grands groupes, notamment dans le cadre des rapports de sous-traitance. Saluons à cet égard le travail de Martial Bourquin. Nous attendons beaucoup de la mission d’information qui lui a été confiée par le Gouvernement.

Deuxièmement, il faut améliorer la cohésion de nos entreprises au sein des territoires et développer les initiatives innovantes, plus précisément un écosystème d’innovations au plus près des territoires. Cela a été rappelé par notre collègue André Reichardt tout à l’heure, et je partage son point de vue sur la nécessité de soutenir ces écosystèmes autour des chaînes de l’innovation. L’exemple italien, de même que différents autres au niveau européen, sont éclairants à cet égard.

Troisièmement, au-delà du développement des initiatives solidaires, il faut restaurer un cadre de confiance. Pour cela, nous devons tous prendre nos responsabilités.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Les pouvoirs publics doivent faire confiance au dialogue social, ce que fait le Président de la République, et travailler ardemment, collectivement, pour faciliter le développement des PME.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

M. Marc Daunis. Quatrièmement, et enfin, j’aborderai le problème de la relation entre les PME et les grands groupes. Dès lors que des entreprises bénéficient d’argent public pour leur développement, qu’il s’agisse du crédit d’impôt recherche ou du CICE, il est nécessaire que, à un moment donné, elles puissent rendre des comptes, y compris en assurant une traçabilité de l’argent public investi. Se posera alors le problème de la récupération des sommes investies par la puissance publique pour soutenir des entreprises qui ne respecteraient pas les engagements pris avec la Nation.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Mme Joëlle Garriaud-Maylam . Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, vous permettrez tout d’abord à la sénatrice des Français de l’étranger que je suis de faire part à ceux qui n’en auraient pas encore été informés d’une excellente nouvelle, à savoir la libération, après sept ans de détention au Mexique, de notre compatriote Florence Cassez.

Applaudissements sur les travées de l’UMP .

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Je remercie mes collègues à la droite de cet hémicycle de ces applaudissements, qui montrent le soutien que le Sénat a apporté et apporte encore à cette jeune femme. Mes remerciements s’adressent aussi à la Cour suprême du Mexique.

Pour en revenir à notre débat sur la place des PME dans notre économie, nous avons déjà largement évoqué les facteurs qui handicapent leur développement en France. Je souhaiterais quant à moi insister sur l’enjeu de leur internationalisation, véritable levier de croissance, encore trop négligé par nos entreprises et notre administration, mais indispensable pourtant à l’essor et à la compétitivité de notre pays.

En 2012, la France comptait 95 000 PME exportatrices, et l’Allemagne 350 000 ! Un quart des PME allemandes réalise 20 à 30 % de leur chiffre d’affaires auprès de clients étrangers, quand seulement 8 % des PME françaises ont une activité, même minime, à l’export. Plus inquiétant encore, le nombre de PME exportatrices françaises a chuté de 20 % en dix ans, et la crise internationale ne suffit certainement pas à expliquer ce recul.

Face à ce défi, quelle a pour l’instant été la réponse du Gouvernement ? Le regroupement d’OSEO, du Fonds stratégique d’investissement, le FSI, et d’une filiale de la Caisse des dépôts et consignation en une pharaonique Banque publique d’investissement, officiellement en vigueur depuis le 1er janvier dernier. Celle-ci est censée offrir aux PME un guichet unique dans chaque région française, y compris en matière d’aide à l’export.

Toutefois, de quel guichet unique parle-t-on ? Apparemment, d’une simple centralisation des instruments de financement, alors même que l’accès au crédit n’est pas, loin de là, le principal obstacle au développement des PME à l’international.

Les principaux freins à l’export sont liés à nos traditions bureaucratiques pénalisantes, à une fiscalité dissuasive, à la complexité des procédures administratives et douanières, mais aussi, et surtout, à la difficulté de développer rapidement une connaissance du marché convoité. Risque d’impayés ou de contrefaçons, instabilité politique ou, tout simplement, compréhension des comportements de consommation, de l’état de la concurrence et du cadre juridique local sont autant de paramètres difficiles à évaluer depuis la France.

Ce manque d’accès à de telles informations stratégiques explique d’ailleurs largement la propension de nos PME exportatrices à ne se risquer que dans un seul pays étranger et à se concentrer sur les États européens au détriment des pays émergents, pourtant principaux réservoirs de croissance en cette période de crise. C’est donc moins de financements que d’accompagnement et de retour d’expérience et d’expertise qu’ont besoin nos PME.

La ministre du commerce extérieur a annoncé que la BPI « assurerait un rôle de conseil auprès des entreprises qui souhaitent exporter ». Outre que ce n’est pas le métier d’une banque, le projet de doter la BPI d’équipes de « développeurs à l’international » issus des effectifs d’Ubifrance ne me semble pas – pardonnez-moi – constituer un progrès significatif par rapport au dispositif de « l’équipe de France de l’export » lancé par Anne-Marie Idrac voilà cinq ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Les modalités concrètes du rapprochement entre les différents opérateurs de l’appui à l’export me semblent encore bien floues, et je vous serais reconnaissante, madame la ministre, si vous pouviez nous apporter quelques clarifications à cet égard.

Oui, nous avons besoin de mettre en place des synergies. Toutefois, cela passe peut-être moins par la constitution d’une entité administrative tentaculaire que par la mise en cohérence et en réseau des multiples intervenants, comme le préconise d’ailleurs un récent rapport du Conseil économique, social et environnemental, le CESE.

Surtout, ne faudrait-il pas mieux mobiliser l’expertise des entrepreneurs français déjà présents sur le marché local ? Le concept de diplomatie économique est un serpent de mer, vieux de plus de vingt ans. Pour donner du corps à ce slogan, la seule option consiste à véritablement mobiliser les réseaux et les acteurs économiques français sur le terrain. Laurent Fabius avait annoncé, en août dernier, la création de conseils économiques dans les ambassades. Où en sommes-nous ? Qui en fera partie ? Les conseillers du commerce extérieur, les élus de l’Assemblée des Français de l’étranger, tous les entrepreneurs français souhaitant y être associés ? Et comment évaluer les résultats, en particulier ceux de cette BPI ?

On oublie trop souvent que les PME créées par des Français à l’étranger contribuent aussi à la mise en valeur des produits et du savoir-faire de la France et constituent une ressource pour les entreprises françaises, en matière tant de compréhension du marché que d’entretien d’un réseau local.

Sur ces questions – les Allemands l’ont bien compris –, nous avons besoin de suivi, de continuité. La relation de confiance ne se décrète pas, elle se construit sur le long terme. Il s'agit de l’un des facteurs essentiels de la réussite de nos amis allemands.

Nos PME, souvent de statut juridique et fiscal local, sont trop largement ignorées par les autorités françaises, mais aussi pénalisées. Mes chers collègues, je vous en donnerai un seul exemple. Nous ne cessons d’appeler à l’implantation d’entreprises dans des pays comme l’Algérie – très bien ! –, mais alors, comment accepter que le fils d’une famille ayant créé une entreprise, l’ayant développée, l’ayant fait prospérer au service du pays d’accueil, se voie maintenant, alors qu’il était appelé à reprendre cette entreprise, refuser un contrat de travail et contraint à l’expatriation ?

En contrepartie de leur contribution à l’enrichissement du tissu industriel français à l’étranger, il pourrait être pertinent de collaborer avec les pays d’accueil afin de mettre en place une véritable sécurité juridique et de garantir à ces entrepreneurs le bénéfice d’une protection en cas de crise, par exemple via la création d’un fonds d’indemnisation français ou européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Après les printemps arabes, l’actuelle guerre au Mali donne une nouvelle actualité à cet enjeu.

Pour conclure, je voudrais souligner que le défi de l’internationalisation des PME est aussi celui de la réduction de notre chômage et celui du recrutement. À cet égard, je ne peux que me réjouir de la volonté du Gouvernement de renforcer et d’élargir le dispositif du volontariat en entreprise.

Toutefois, au-delà de ce système, il est essentiel de favoriser la coopération universitaire et les passerelles entreprises-écoles à l’international. Les potentialités sont immenses. Nous devons aussi penser à la question de la reprise des sociétés, qui constitue un gros problème pour nos PME en France. Là encore, nous pourrions solliciter des investisseurs étrangers.

Tout récemment, lors d’un déplacement au Mexique, j’ai pu constater le dynamisme d’un programme de coopération entre écoles d’ingénieurs françaises et mexicaines, et celui de partenariats entre entreprises françaises et programmes locaux de formation professionnelle.

Les facteurs concourant à la réussite de nos PME à l’international sont nombreux ; il est essentiel de n’en négliger aucun ! §

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord remercier Mme Garriaud-Maylam d’avoir pris le temps de se féliciter de la décision de la Cour suprême du Mexique et du retour prochain de notre compatriote Florence Cassez. Nous ne pouvons tous que nous en réjouir.

Je me réjouis que vous ayez pu inscrire à l’ordre du jour de votre assemblée ce débat sur un sujet aussi important que la place des PME dans l’économie française, même s’il s’est tenu à une heure tardive.

Ce n’est pas un sujet, nous en sommes tous convaincus, que l’on peut prendre à la légère. L’immense majorité du tissu productif de la France, vous l’avez d’ailleurs rappelé, est composé de PME : on en dénombre 2, 7 millions, qui emploient 7, 4 millions de personnes, soit plus de 60 % des effectifs salariés de notre pays.

C’est dire à quel point notre sort de grande nation de l’économie mondiale est tributaire de ces entreprises, dont la vitalité est si sensible aux aléas conjoncturels.

Je le sais, nos PME sont riches de la formidable énergie qui anime tant de dirigeants et de salariés, capables de donner à leur entreprise un souffle, une espérance, un horizon qui les conduit bien souvent à prospérer, innover et, pour un peu plus de 100 000 d’entre elles, à exporter.

Les 2, 5 millions de micro-entreprises et les 130 000 entreprises de plus de dix salariés que compte notre pays font partie de notre patrimoine national. Elles représentent pour la France autant de chances, autant de sources d’espoir et d’émancipation pour ces hommes et ces femmes qui, au travers de l’entreprise, contribuent à développer les richesses de leur pays et se réalisent en tant qu’individus.

Chacun doit bien en mesurer toute la portée : la croissance des PME est aussi vitale pour notre économie que pour notre cohésion sociale.

Je le dirai sans détour, pour moi, la grande mobilisation nationale engagée par le Gouvernement en faveur des PME depuis mai dernier illustre la priorité absolue de 2013 en faveur de l’emploi.

En effet, depuis plusieurs années, chacun a pu constater que les PME françaises étaient handicapées dans leur développement, pour des raisons tenant à leur modèle de création et de croissance. Ces fragilités structurelles se sont encore aggravées depuis la crise de 2008-2009.

Parmi les principaux motifs d’inquiétude que vous avez d’ailleurs rappelés, je retiens une addition de faits qui sont autant d’éléments d’explication des difficultés de croissance de nos PME. Un très petit nombre d’entre elles seulement parvient à se transformer en entreprises de taille moyenne ou intermédiaire : on ne recense aujourd’hui que 4 600 entreprises de taille intermédiaire en France, ainsi que l’a rappelé M. Vaugrenard.

Premièrement, les conditions de naissance des PME sont souvent difficiles. C’est ainsi que 94 % des créations sont réalisées sans aucun salarié et que près de la moitié se constitue avec un capital inférieur à 8 000 euros.

Deuxièmement, les conditions de financement des PME sont presque toujours délicates. Leurs ressources proviennent encore à 92 % du financement bancaire, et le sous-accompagnement de leurs dirigeants est parfois à l’origine d’une mortalité prématurée : la moitié des entreprises disparaissent dans les cinq ans qui suivent leur création.

Troisièmement, nous constatons un sous-investissement relatif des PME françaises. Ce phénomène est à rapprocher également de leur trajectoire d’innovation : elles ne représentent que 21 % des dépenses intérieures de recherche et développement en entreprise, les DIRDE, contre 62 % pour les groupes de plus de 1 000 salariés.

Quatrièmement, l’accès des PME à la commande privée et publique reste limité. Elles n’obtiennent, par exemple, que 28 % du montant des marchés publics alors qu’elles représentent 44 % de la valeur ajoutée.

Cinquièmement, enfin, le nombre de PME parvenant à se projeter à l’international stagne depuis dix ans. La France peut s’appuyer sur environ 117 000 entreprises exportatrices, alors que l’Allemagne en compte près de trois fois plus.

J’ajoute que, lorsqu’une PME parvient à déjouer ces statistiques de croissance et à prendre son envol malgré cet ensemble de contraintes, il n’est pas rare qu’elle perde son indépendance. Chaque année, en moyenne, ce sont 14 % des entreprises de 100 à 249 salariés qui sont absorbées par un grand groupe. Pour les entreprises comprises entre 250 et 499 salariés, ce taux monte à 16, 5 %.

L’ensemble de ces fragilités, que ce soit au moment de leur naissance ou dans leurs années de développement, sont d’autant plus pénalisantes pour les PME que, plus que toutes autres, ces entreprises subissent de plein fouet les effets de la crise : 93 % des PME restent aujourd’hui confrontées à des retards de paiement. Le baromètre KPMG-CGPME, publié le 14 janvier dernier, fait également état des craintes légitimes des dirigeants de PME. Un tiers d’entre eux redoute que la situation économique ait des impacts négatifs sur les conditions d’accès au crédit.

Face à ces constats, je puis vous dire que le Gouvernement n’a pas ménagé sa peine, tout au long de l’année dernière, afin de renverser la tendance et d’inscrire durablement les PME dans une trajectoire de croissance. Je vais y revenir en détail.

Auparavant, je veux simplement rappeler que, pour cette nouvelle année, le Président de la République a fixé un cap on ne peut plus clair : stimuler la compétitivité de nos entreprises et tout mettre en œuvre afin de gagner la bataille pour l’emploi.

Or, chacun l’aura compris, nous ne pourrons remporter cette bataille sans le redressement productif et commercial de celles qui représentent 99 % du tissu productif national, c’est-à-dire les PME. C’est ma conviction et c’est aussi celle qui préside au pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi annoncé par le Gouvernement le 6 novembre dernier.

Pourquoi revenir ce soir sur le pacte ? Pour rappeler une simple réalité : plus de la moitié des trente-cinq décisions qui y figurent concernent directement les PME. Je ne peux que m’en réjouir.

Qu’il s’agisse du pacte de compétitivité, de la loi de finances ou de l’ensemble des initiatives que nous avons prises en faveur des PME entre mai 2012 et janvier 2013, quelles directions principales avons-nous choisies ?

Je vois se dégager trois lignes de force permanentes dans notre action d’appui aux petites et moyennes entreprises : répondre à l’urgence et permettre aux PME de poursuivre leur développement malgré la crise ; simplifier et faciliter la vie des entreprises à chaque étape de leur développement ; stimuler l’esprit d’entreprise et de conquête économique chez les Français.

Notre première ambition a été et demeure, dans un environnement macro-économique comportant encore de fortes incertitudes, de répondre à l’urgence et de permettre aux PME de poursuivre leur développement malgré la crise.

Je l’ai rappelé tout à l’heure : de façon générale, la trésorerie des PME est sous tension. Cette situation résulte d’un redoutable effet de ciseau : première lame, les délais de paiement se tendent ; deuxième lame, les crédits de trésorerie sont en baisse de 3, 5 % depuis un an.

Si cette situation devait perdurer, il y a tout lieu de croire qu’elle déboucherait sur un credit crunch. Il s'agit d’un scénario d’autant moins improbable que, chacun l’aura observé, les nouvelles règles prudentielles risquent de peser sur le crédit dans notre pays.

Sans attendre, le Gouvernement a instauré un dispositif d’aide aux PME et aux ETI pour leur permettre de renforcer leur trésorerie. Ce dispositif de garantie des crédits de trésorerie, via la banque publique d’investissement, la BPI, est d’ores et déjà en place. Il doit permettre de dégager 500 millions d’euros pour les PME.

Afin de soulager les entreprises en matière de trésorerie, nous avons également décidé d’un plan d’action sur les délais de paiement. Il a été présenté en conseil des ministres par mon collègue Pierre Moscovici en novembre dernier. L’orientation est très claire : nous proposerons que le non-respect des délais de paiement légaux puisse être sanctionné directement par l’administration, c’est-à-dire par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, sans que le fournisseur soit obligé poursuivre son donneur d’ordre en justice.

L’État se doit évidemment d’être exemplaire. C’est pourquoi un plan d’amélioration de ses propres délais de paiement sera mis en place au cours du quinquennat. Il s'agit d’une question importante, qui vise à éviter de pénaliser le développement des PME.

L’action sur les conditions de financement des entreprises ne saurait se limiter à une intervention sur le crédit interentreprises, aussi bénéfique soit-elle. Nous devons aussi orienter, de manière structurelle, l’offre de financement en endettement et en fonds propres vers les PME.

Il ne faut pas se voiler la face : le postulat selon lequel le financement des entreprises se maintient en France est vrai globalement, mais faux dans le détail.

Prenons l’exemple du financement bancaire : l’observatoire du financement des entreprises nous dit clairement que la hausse des encours de crédits aux TPE-PME indépendantes ralentit « nettement » depuis la mi-2011. Si l’on creuse un peu, la situation reste contrastée : les PME de l’industrie manufacturière souffrent d’un ralentissement depuis le début de l’année 2012.

J’entends aussi parfois que les PME françaises ont renforcé leurs fonds propres sur les dix dernières années. Ne sur-interprétons pas ce constat, car il résulte non pas d’un fort taux d’investissement, mais d’une progression du poids de la trésorerie des entreprises, qui ont adopté un comportement de précaution. Le fait que les PME aient renforcé leurs fonds propres n’induit pas qu’elles n’ont pas des difficultés à financer leurs investissements...

Si l’on observe les levées de capitaux pour les PME et les ETI en France sur le segment du capital-risque, le léger rebond observé au quatrième trimestre de 2012 ne doit pas faire oublier la contraction de 27 % entre 2010 et 2011. Les capitaux levés par le biais des fonds d’investissement de proximité, les FIP, et des fonds communs de placement dans l’innovation, les FCPI, ont diminué de 400 millions d’euros en 2011 par rapport à 2008. À cette date, les levées atteignaient un montant de 1, 1 milliard d’euros. Or je rappelle que les FIP et les FCPI représentent près du tiers du capital-risque en France.

Au-delà de nos difficultés actuelles à financer notre économie, il nous faut réfléchir à de nouveaux instruments pour faire face aux besoins de demain.

La BPI constitue une première réponse, très importante, à ces défis. Il s’agissait du premier engagement du Président de la République. Vous venez d’en voter la création, mesdames, messieurs les sénateurs. Il revient maintenant à cette institution de faire ses preuves.

J’ai déjà évoqué le dispositif de 500 millions d’euros de crédits de trésorerie pour les TPE et PME. La BPI assurera également le préfinancement du crédit d’impôt recherche, le CIR, et surtout le préfinancement du crédit d’impôt compétitivité emploi, le CICE, qui sera, lui aussi, directement opérationnel pour les entreprises en 2013, contrairement à ce qu’a affirmé M. Delattre.

Cette année doit donc être celle du démarrage à plein régime de la BPI, porte-avions de la compétitivité. Toutefois, afin de financer nos entreprises, nous devons également mieux mobiliser l’épargne. Vous le savez, nous souffrons spécifiquement d’un problème non pas de volume de collecte – relativement, la France épargne plus que ses voisins –, mais d’orientation de l’épargne. Il s’agit de veiller à mieux diriger l’épargne des Français vers les entreprises et, singulièrement, vers les PME, dont certaines souffrent d’un manque évident de fonds propres.

Le rapport Duquesne a formulé des propositions sur l’épargne réglementée, dont la principale était que les fonds d’épargne prêtent à la BPI. D’ores et déjà, le Gouvernement a annoncé que 10 milliards d’euros de lignes de prêts seraient ouvertes à la BPI sur les fonds d’épargne.

Par ailleurs, se profile devant nous la réforme de la fiscalité de l’épargne financière. Karine Berger et Dominique Lefebvre doivent remettre prochainement leurs conclusions au ministre de l’économie et des finances. L’enjeu est double : mieux orienter l’épargne des Français vers le financement de long terme en actions et rééquilibrer les bilans bancaires afin d’éviter un resserrement du crédit dans les années à venir. Ce second objectif, pourtant majeur pour les PME de notre pays, est trop souvent oublié.

Enfin, s’agissant du financement des entreprises, je veux formuler quelques remarques sur l’accès des PME aux marchés financiers.

Vous le savez, du fait du resserrement du crédit bancaire et de l’impact des nouvelles normes prudentielles, nous devons aider nos PME à diversifier leurs sources de financement. C’est pour cette raison que le pacte de compétitivité a mis sur les rails le projet d’un nouveau segment de marché relatif aux PME et aux ETI et destiné à faciliter l’accès de ces entreprises aux marchés de capitaux, tant en actions qu’en obligations.

Vous l’aurez constaté, au mois de décembre dernier, NYSE Euronext, l’opérateur historique de la Bourse de Paris, a formulé de premières propositions pour une nouvelle filière dédiée aux PME. Les discussions se poursuivent, car le Gouvernement estime que ce projet ne va pas assez loin et ne répond pas suffisamment aux attentes des entreprises.

Deuxième ligne de force de notre action au service des PME depuis neuf mois : simplifier la vie de leurs dirigeants aux différentes étapes du développement de leur société.

Depuis mon arrivée au Gouvernement, j’ai pris pleinement conscience que, derrière les difficultés d’accès au financement, qui doivent être traitées, se cache un problème tout aussi pénalisant pour les entrepreneurs : l’environnement dans lequel ils évoluent n’a généralement pas été pensé pour les PME. Le plus souvent, les règles s’imposent à elles plus qu’elles n’ont été pensées pour elles, ou même avec leur concours.

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre déléguée

Le plus souvent également, les relations que les administrations et les grands groupes entretiennent avec les PME ont été envisagées non pas sur un mode coopératif, mais selon une logique de domination.

Par conséquent, c’est dans les deux directions suivantes que j’ai orienté mon intervention pour faire bouger les lignes : accélérer le mouvement de réduction des charges administratives auxquelles les TPE-PME font face et inciter les grands groupes à adopter des comportements plus vertueux et plus coopératifs dans leurs relations avec les PME.

J’ai mis toute mon énergie pour qu’émerge du pacte de compétitivité un plan de simplification administrative qui réponde vraiment aux besoins prioritaires des entreprises. Cinq chantiers de simplification ont été retenus au mois de novembre dernier. Trois d’entre eux me paraissent très représentatifs de notre volonté de réduire les contraintes des entrepreneurs, d’alléger leur fardeau administratif.

Tout d’abord, le « test PME ». Il permettra de mieux évaluer en amont et en concertation avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs, les effets des mesures envisagées par les administrations sur l’activité et le fonctionnement des petites et moyennes entreprises. Il sera opérationnel dès ce trimestre et se traduira par une expérimentation dans plusieurs textes.

Ensuite, la dématérialisation accrue des procédures déclaratives, fiscales et sociales. Elle concourra aussi nettement à simplifier la vie des PME.

Enfin, je n’oublie pas un autre sujet sur lequel Arnaud Montebourg et moi-même sommes très mobilisés : la lutte contre la sur-réglementation à l’occasion de la transposition des directives européennes, à laquelle nous nous attellerons sans relâche dès cette année. Il n’est pas normal que nos PME continuent d’affronter la concurrence internationale avec des boulets aux pieds alors qu’on attend d’elles toujours plus de compétitivité !

D’autres chantiers complémentaires seront ouverts avec l’appui des représentants des entreprises que Marylise Lebranchu et moi-même avons réunis le 7 janvier dernier.

Disposer d’un environnement réglementaire simplifié, c’est important. Disposer d’un environnement fiscal stabilisé pour faciliter la prise de décision de l’entrepreneur dans un contexte macro-économique déjà incertain, c’est tout aussi précieux.

Vous le savez, je n’ai pas ménagé mes efforts – ils n’ont d’ailleurs pas été vains – à l’occasion du débat budgétaire de l’année dernière pour progresser résolument dans cette direction.

Tout d’abord, le pacte de compétitivité affiche une résolution claire dans sa décision n° 26 : « Stabiliser sur la durée du quinquennat cinq dispositifs fiscaux clés pour l’investissement et la vie des entreprises » : le crédit d’impôt recherche, les dispositifs favorisant la détention et la transmission d’entreprises, les jeunes entreprises innovantes, les incitations aux investissements dans les PME, enfin, la contribution économique territoriale.

À très court terme, déjà, plusieurs engagements de stabilité ont été traduits dans la loi de finances initiale pour 2013. Je songe aux outils d’incitation à l’investissement dans les PME – les dispositifs ISF-PME, Madelin, FIP et FCPI –, qui sont intégralement préservés.

À l’occasion de l’effort budgétaire courageux et sans précédent qu’a accompli le Gouvernement, nous avons mis en œuvre tout ce qui pouvait l’être pour préserver, mais aussi accompagner le développement des PME. Alors que 30 % seulement des PME françaises innovent aujourd’hui, nous avons créé le crédit d’impôt innovation, qui étend le crédit d’impôt recherche aux dépenses d’innovation. L’idée était dans l’air du temps depuis plusieurs années. Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault l’a concrétisée.

Par ailleurs, il faut également changer l’environnement réglementaire et fiscal des entreprises, pour gagner encore en stabilité. Nous nous y employons. Rien ne remplacera cependant un travail de fond pour faire évoluer les comportements à l’égard des PME. Chacun doit prendre sa part à ce défi, qui s’adresse tout autant à l’État et aux collectivités locales qu’aux grands groupes.

Dès mon arrivée au Gouvernement, j’ai constaté, que, au cours des dernières années, la part du montant des marchés publics en valeur obtenu par les PME françaises avait été bien inférieure – 27 % – à leur poids réel dans l’économie – 46 % de la valeur ajoutée marchande.

Plusieurs mesures importantes ont été prises par le Gouvernement pour rectifier le tir. Le pacte de compétitivité prévoit, par exemple, que la part de l’innovation dans les achats publics réalisés par l’État, les opérateurs et les hôpitaux devra atteindre un objectif de 2 % en volume à l’horizon 2020. Pour progresser vers cet objectif, une conférence de « l’achat public innovant » se réunira au mois de mars prochain.

D’ores et déjà, une charte a été signée par plusieurs entreprises dont l’État est actionnaire pour promouvoir l’achat innovant et exemplaire en faveur des PME.

S’agissant de la commande publique, un sujet qui nous tient à cœur, nous avons traduit en acte la promesse de campagne du Président de la République de nommer un médiateur des marchés publics, chargé de faciliter la relation entre les entreprises et les donneurs d’ordre publics.

L’État doit se montrer exemplaire à l’égard des PME. De même, les entreprises doivent être vertueuses. Elles doivent pouvoir définir des stratégies de partenariats durables au sein des filières. Pour prévenir ou corriger certains conflits qui peuvent naître, les PME peuvent déjà compter sur la médiation des relations interentreprises, qui est venue en aide à plus de 220 000 entreprises à ce jour. C’est sous son égide qu’est placée la charte des relations interentreprises à laquelle ont déjà adhéré 341 opérateurs publics et privés.

Toutefois, il fallait aller encore plus loin et s’assurer que les engagements de bonnes pratiques attenants à la charte soient respectés dans les faits. Ainsi, au mois de décembre dernier, j’ai remis à quatre entreprises le label « Relations fournisseurs responsables », qui les engage à mesurer effectivement leur conformité aux bonnes pratiques.

La troisième et dernière ligne de force de mon action de promotion et de développement des PME françaises consiste à stimuler l’esprit d’entreprendre et de conquête économique de nos entreprises.

Tout le travail effectué pour briser les plafonds de verre auxquels se heurtent les PME, pour leur offrir un environnement plus coopératif et plus favorable à la croissance et à l’emploi, n’a de sens que si notre pays est capable de faire naître une véritable mobilisation entrepreneuriale.

Constatant que le nombre annuel de créations d’entreprises n’a cessé de croître en France entre 2000 et 2010, nous pourrions avoir la tentation de nous reposer sur nos lauriers. Néanmoins, force est de le constater, nos entreprises ont du mal à grandir et la moitié d’entre elles disparaît dans les cinq ans suivant leur constitution ! Par ailleurs, en France, l’âge moyen auquel les dirigeants créent leur entreprise – entre trente-huit et trente-neuf ans – est très tardif par rapport aux autres pays occidentaux.

Ces signaux caractérisent-ils un pays mobilisé pour la création et le développement des entreprises ? Permettez-moi d’en douter. Mes doutes portent non pas sur le désir d’entreprendre du plus grand nombre, bien sûr, mais sur la capacité collective de notre pays à faciliter la tâche de celles et ceux qui passent à l’acte de création.

Lorsque l’on donne un coup de pouce à l’entrepreneur, le plus souvent, il saisit cette chance et réussit. La preuve est simple : les études montrent que, sur cinq ans, le taux de pérennité d’une entreprise est supérieur de 14 % quand celle-ci bénéficie d’un accompagnement.

L’ambition entrepreneuriale d’un pays, ce n’est pas une somme de mots mis bout à bout pour dire qu’on y croit. Ce sont des actes, dans la durée.

C’est toute la conviction qui m’anime pour conduire les Assises de l’entrepreneuriat, que j’ai ouvertes le 14 janvier dernier, à la demande du Premier ministre.

Dégager des propositions concrètes qui doivent notamment permettre de bâtir un programme d’action pour soutenir l’objectif de doubler le nombre de créations d’entreprises de croissance en cinq ans fixé par le pacte de compétitivité : tel est notre cap.

Depuis une semaine, j’ai réuni plus de 300 entrepreneurs au sein de neuf groupes de travail pour dessiner les contours de cette ambition entrepreneuriale, que je nourris pour la France, avec le Gouvernement.

Dix-huit parlementaires appartenant tant à la majorité qu’à l’opposition seront d’ailleurs conviés dans quelques jours à participer à ces réflexions, qui feront ensuite l’objet d’annonces par le Gouvernement dans le courant du mois d’avril prochain.

L’esprit d’entreprendre et l’esprit de conquête économique sont intimement liés. Nous voulons stimuler l’un et l’autre pour gagner la double bataille de la croissance et de l’emploi.

Le pacte de compétitivité, j’y reviens, qui connaîtra une montée en charge progressive sur trois ans, permettra, via le CICE, d’alléger de 20 milliards d’euros par an les coûts supportés par les entreprises. Il s'agit d’un signal très fort adressé aux entrepreneurs, d’autant qu’il aura dès 2013 des conséquences sur la trésorerie des entreprises, par le biais de l’instauration d’un dispositif de préfinancement spécifiquement destiné aux PME.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux maintenant vous faire part d’une profonde conviction : selon moi, le redressement de la compétitivité de notre économie passe par une action plus large sur tous les leviers rangés souvent, faute de mieux, sous le vocable « hors prix ».

Vous le savez, dès 2012, malgré les très fortes contraintes budgétaires, le Gouvernement a donné la priorité à l’innovation. Le pacte de compétitivité en a fait le principal levier de la stratégie de montée en gamme de notre économie. Ainsi avons-nous garanti la stabilité non seulement du crédit d’impôt recherche sur cinq ans – je l’ai dit –, mais aussi des budgets des pôles de compétitivité.

Parallèlement, nous avons créé le crédit d’impôt innovation destiné aux PME. Grâce à ce dispositif, les dépenses de prototypage sont désormais soutenues à hauteur de 20 %. Ce sont donc jusqu’à 400 000 euros qui peuvent être économisés dans le développement d’un nouveau produit.

Nombre de progrès ont déjà été faits, vous le constatez, mais, je dois vous l’avouer, nous n’en sommes qu’au commencement. La mission que j’ai confiée, en accord avec Arnaud Montebourg et Geneviève Fioraso, à Jean-Luc Beylat et Pierre Tambourin remettra ses conclusions au mois de mars prochain. Nous serons alors en mesure d’entamer une vaste et ambitieuse réforme de notre système d’innovation, dans le sens d’un rapprochement entre les différentes institutions, les grandes entreprises et les PME. J’en reparlerai le moment venu.

Vous l’aurez compris au terme de cette présentation : nous avons, une à une, posé les pierres qui doivent permettre aux PME françaises de reposer sur des fondations plus solides, grâce auxquelles elles pourront mieux supporter les aléas conjoncturels et poursuivre leur développement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de l’échange très approfondi que j’ai eu avec vous ce soir. Il en appelle, je l’espère, beaucoup d’autres.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Nous en avons terminé avec le débat sur la place des petites et moyennes entreprises dans notre économie.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 24 janvier 2013 :

À dix heures :

1. Débat sur la police municipale.

À quinze heures :

2. Questions d’actualité au Gouvernement.

À seize heures quinze :

3. Débat sur l’avenir du service public ferroviaire.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le jeudi 24 janvier 2013, à zéro heure dix.