Commission spéciale continuité du service public

Réunion du 4 juillet 2007 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • RATP
  • SNCF
  • grève
  • relevé
  • usagers

La réunion

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Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, sous la présidence de M. Charles Revet, président, le groupe de travail intercommissions a procédé à une série d'auditions sur le dialogue social et la continuité du service public de transport.

La commission a tout d'abord entendu M. Pierre Mongin, président-directeur général de la RATP.

Debut de section - Permalien
Pierre Mongin, président-directeur général de la RATP

Après avoir indiqué qu'il avait transmis à l'ensemble des organisations syndicales l'avant-projet de loi sur le dialogue social et la continuité du service public de transport afin de pouvoir réaliser un tour de table dans son entreprise, M. Pierre Mongin, président-directeur général de la RATP, a souligné que le sujet était bien connu à la RATP. La conflictualité y a baissé ces dernières années, la moyenne annuelle de jours de grève par agent, soit 0,4 jour, étant largement inférieure à la moyenne nationale de la profession, qui se situe à 0,8 jour de grève par an et par agent. Puis, reconnaissant que les entraves au droit d'aller et venir ou à la liberté du travail constituaient des atteintes graves pour nos concitoyens, il a souligné que la RATP s'était engagée dans la limitation de la conflictualité, avec la signature en 1996 et 2001 d'accords-cadre avec les organisations syndicales. Indiquant par ailleurs que la direction de la RATP avait fixé comme cap managérial la satisfaction de l'usager, il a estimé que la grève dans le service public des transports constituait une nuisance non comparable avec la grève dans d'autres secteurs car elle interrompait un service essentiel pour les citoyens.

Après avoir rappelé que l'enjeu, tant pour le législateur que pour les acteurs du transport public terrestre de voyageurs, était de concilier des principes constitutionnels entre eux, à savoir la liberté du commerce et de l'industrie, la liberté d'aller et venir, la liberté du travail, l'accès aux services publics, ainsi que le droit de grève, M. Pierre Mongin a fait valoir que la grève est un échec du dialogue social. Ajoutant que pendant longtemps, il revenait à l'entreprise d'organiser, seule, ce dialogue social, il s'est félicité de l'intervention du législateur aujourd'hui. Il a rappelé que le dialogue social était très satisfaisant à la RATP, relevant que le dispositif d'alarme sociale avait été utilisé à 380 reprises l'année dernière.

Puis, M. Pierre Mongin a présenté les différents types de grèves auxquelles l'entreprise pouvait être confrontée. Tout d'abord, les grèves interprofessionnelles de solidarité. Ensuite, les grèves récurrentes sur l'organisation du travail, dont les revendications concernent le plus souvent les rémunérations ou les horaires. Il a à cet égard mentionné l'accord intervenu entre le syndicat des transports d'Ile-de-France (STIF) et la RATP pour prolonger la durée de service du métro le samedi jusqu'à deux heures du matin, qui a eu pour conséquence la modification du tableau de service et le renforcement des capacités en personnels après 19 heures. Enfin, les grèves ponctuelles ou spontanées directement liées à des agressions de personnels ou à des actes de vandalisme sur les matériels. Plaidant pour le renforcement de la continuité du service public de transport, M. Pierre Mongin a précisé que la RATP avait connu une nouvelle étape de l'amélioration du service aux usagers avec l'engagement, négocié avec le STIF, d'assurer 50 % de l'offre de transport sur une durée de vingt-quatre heures.

Il a ensuite indiqué que le volume des préavis de grève déposés en 2006, soit 173, était le plus bas depuis 1990, soulignant que cette baisse de la conflictualité était le résultat d'une politique contractuelle de prévention des conflits sociaux en amont, du développement des accords d'intéressement et de la négociation d'accords de méthode sur le plan d'entreprise. Il a néanmoins observé que seuls 30 % des préavis étaient déposés dans le cadre du dispositif d'alarme sociale.

Puis M. Pierre Mongin a mis en évidence les principales différences entre l'avant-projet de loi et les accords-cadre actuellement en vigueur à la RATP. Il a d'abord remarqué que dans l'avant-projet de loi l'intention de déposer un préavis déclenchait le dispositif d'alarme sociale alors qu'à la RATP les deux ne sont pas nécessairement liés. Il a ensuite observé que la négociation était ouverte à l'ensemble des syndicats, alors qu'à la RATP la négociation ne concernait que les signataires de l'alarme sociale. Puis il a relevé que la durée prévue pour la procédure de prévention était plus longue, avant de s'interroger finalement sur la validité des accords-cadre de la RATP après le vote éventuel de la loi.

a ensuite exposé certaines difficultés pratiques auxquelles son entreprise était confrontée. Saluant l'établissement de priorités de desserte par l'autorité organisatrice de transport, il a néanmoins fait remarquer que les salariés étaient difficilement interchangeables en cas de réaffectation. Il a ensuite abordé la question des pénalités contractuelles infligées par le STIF en cas de non réalisation de l'obligation d'assurer 50 % de l'offre de transport, à savoir 60 000 euros par jour, estimant que les dispositions de l'article 8 de l'avant-projet de loi qui prévoient le remboursement à l'usager de ses titres de transport, avaient pour effet d'infliger une double peine à l'entreprise, à laquelle il convient d'ajouter le coût financier d'une grève, estimé à quatre millions d'euros par jour à la RATP. En ce sens, il a plaidé pour un partage plus équitable des charges de la grève avec les autorités organisatrices de transport, surtout dans le cas des grèves de solidarité dont la dimension politique exonère la responsabilité de l'entreprise qui ne devrait pas être pénalisée. A cet égard il a estimé que seuls les cas dans lesquels l'entreprise disposait d'une capacité d'action directe sur les revendications des salariés devraient donner lieu à mise en cause de sa responsabilité financière en cas de grève du personnel.

Puis, après avoir indiqué que les entreprises de transport étaient entrées dans une nouvelle ère en ce qui concerne leurs relations avec les usagers, il s'est félicité des dispositions de la loi tendant à renforcer l'information des usagers, mais a rappelé que la condition même du droit d'information anticipé de ceux-ci était bien la prévisibilité en matière de présence du personnel et donc la déclaration préalable d'intention des salariés de participer ou non à la grève.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

a souhaité savoir si le texte du projet de loi était de nature à inciter la RATP à améliorer son service de transport, notamment en diminuant les perturbations récurrentes dont sont victimes les usagers hors des périodes de grève.

Debut de section - Permalien
Pierre Mongin, président-directeur général de la RATP

a assuré qu'il s'agissait là d'une question examinée quotidiennement par la direction et qu'il fallait tenir compte, dans la mise en évidence des incidents techniques réguliers, de la complexité et de la densité du réseau RATP et des nombreux aléas qui en résultent, tels que les cas de suicides, soit 150 par an, les intrusions sur les voies, le vandalisme, ou encore la maintenance du matériel obsolète. Il a rappelé qu'un million de personnes par jour circulaient sur la seule ligne A du RER, ce qui en faisait la ligne la plus dense au monde. Puis après avoir observé que l'intérêt d'avoir un réseau intégré était de pouvoir opérer un basculement des usagers d'un mode de transport à l'autre en cas de difficultés, M. Pierre Mongin a réaffirmé l'importance de la formation du personnel afin de renforcer sa polyvalence et faciliter ainsi les réaffectations dans l'intérêt de la continuité du service.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

A Mme Catherine Procaccia, rapporteur, qui lui demandait quels étaient les dispositifs qui paraissaient les plus pertinents techniquement pour indemniser les usagers, M. Pierre Mongin a précisé que, juridiquement, c'était le STIF qui possédait tous les pouvoirs tarifaires et que la RATP n'avait aucune latitude en la matière. Il a néanmoins estimé que le transporteur ne devait pas être le seul à supporter les coûts de la grève, réitérant son appel à un partage des charges.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

s'est ensuite interrogée, d'une part, sur la conformité de l'accord cadre signé à la RATP avec le projet de loi, d'autre part, sur la conciliation entre une politique contractuelle censée diminuer la conflictualité dans l'entreprise et les dispositifs de caractère impératif contenus dans la loi. Puis, elle a demandé des précisions sur l'obligation pour la RATP d'assurer 50 % de son offre de transport, s'inquiétant en particulier du respect de cette obligation dans la petite et la grande couronne en Ile-de-France.

Debut de section - Permalien
Pierre Mongin, président-directeur général de la RATP

a indiqué que la politique contractuelle permettait de mettre en place une logique « gagnant-gagnant » pour les usagers, qui bénéficient des adaptations constantes du service à leurs besoins, mais aussi pour les salariés, en évitant l'unilatéralisme grâce à des accords négociés. Il a souligné que la RATP privilégiait toujours la négociation. Il a jugé que le projet de loi n'était pas incompatible avec ces dispositifs contractuels, se félicitant notamment de la probable inscription dans la loi d'exigences fortes pour les usagers.

S'agissant de l'égalité de traitement entre les Franciliens, il a réaffirmé que l'ensemble des territoires devait pouvoir bénéficier d'une offre de transport et qu'en ce sens, des rééquilibrages géographiques de moyens ou de personnels pouvaient être envisagés. Il a insisté sur la nécessaire polyvalence des salariés, particulièrement en temps de grève.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

a demandé quelles seraient les conséquences du projet de loi sur les accords conclus à la RATP, en particulier les conséquences de l'obligation de déclaration préalable de l'intention de faire grève, de l'interdiction des préavis glissants et de la possibilité de consulter les salariés à bulletin secret au bout de huit jours de grève.

Debut de section - Permalien
Pierre Mongin, président-directeur général de la RATP

a estimé que l'obligation de déclarer son intention de faire grève était absolument nécessaire à la prévisibilité du service, puis jugé que l'interdiction des préavis glissants était de bon sens. Il a considéré que la consultation, à titre informatif, des salariés, ne portait pas atteinte au caractère individuel du droit de grève.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Observant qu'à la RATP la plupart des avancées sociales ont été conclues sous la forme conventionnelle, M. Michel Teston s'est interrogé sur la pertinence du recours à la loi dans ce domaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

a souhaité savoir comment les entreprises de transport effectuent actuellement la quantification du trafic prévisible en cas de grève, notamment à la RATP.

Debut de section - Permalien
Pierre Mongin, président-directeur général de la RATP

a expliqué que la méthode d'évaluation était plutôt artisanale, basée sur des consultations individuelles avec une extrapolation sur les intentions de participation globales à la grève, soulignant qu'en définitive, l'entreprise était seulement capable d'apprécier le niveau général d'un mouvement social.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

a estimé nécessaire de démontrer juridiquement pour quelles raisons, dans le cadre d'une société fondée sur des principes démocratiques, la grève ne saurait être décidée selon le fait majoritaire. M. Pierre Mongin a fait valoir que la grève restait, en France, un droit individuel, et non collectif.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Krattinger

Puis le groupe de travail a procédé à l'audition de MM. Yves Krattinger, sénateur, président de la commission aménagement du territoire, transport et infrastructures, et Gérard Bailly, sénateur, membre du bureau de l'assemblée des départements de France (ADF).

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Krattinger

sénateur, président de la commission aménagement du territoire, transport et infrastructures, a indiqué que l'ADF s'est notamment penchée sur la question du dialogue social et du service minimum dans les transports à l'occasion de l'élaboration du rapport Mandelkern en 2004. Après avoir relevé la très faible conflictualité dans les entreprises de transport départemental, il a mis l'accent sur l'importance du dialogue social, comme instrument de prévention des conflits.

Il a rappelé que les départements géraient les services de transport public départementaux essentiellement par convention de délégation de service public et qu'il ne leur appartenait pas de s'immiscer dans les conditions d'organisation du dialogue social au sein de l'entreprise. Il s'est déclaré très satisfait des dispositions de l'avant-projet de loi tendant à étendre la procédure d'alarme sociale à toutes les entreprises de transport. Toutefois, citant l'exemple de son département, la Haute-Saône, qui compte quatre-vingts contrats de transports signés avec trente-cinq entreprises différentes, il s'est montré sceptique quant à la possibilité de conclure des accords d'entreprise, marquant sa préférence pour un accord de branche. En effet, le délai butoir envisagé pour signer ces accords, à savoir le 1er janvier 2008, lui a paru difficile à respecter. Il en sera de même pour les départements qui devront définir en quelques mois les dessertes prioritaires, après consultation des usagers, et approuver un plan de transport adapté ainsi qu'un plan d'information des usagers.

a exprimé la crainte que le texte ne vienne paradoxalement dégrader le climat social au sein des entreprises de transport, aujourd'hui satisfaisant, citant l'exemple de l'interdiction des préavis glissants ou celui de la déclaration préalable d'intention des salariés quarante-huit heures avant la grève. Cette dernière mesure pourrait générer des effets pervers en conduisant de nombreux salariés à se déclarer grévistes pour faire pression sur l'employeur, ce qui rendrait encore plus malaisé l'établissement de prévisions de perturbations de trafic.

Rappelant que 80 % du transport dans les départements concernait le transport scolaire, par définition essentiel en toutes circonstances, il s'est interrogé sur les critères susceptibles de conduire un conseil général à identifier, en ce domaine, des dessertes prioritaires à assurer en cas de grève. Il a dès lors regretté que l'avant-projet de loi ne délimite pas mieux le périmètre du service minimum.

Observant que la plupart des départements prévoyaient dans leur cahier des charges des pénalités applicables à l'entreprise de transport en cas de grève, il s'est interrogé sur l'articulation entre les dispositions législatives et les contrats en cours avec les entreprises.

s'est également montré perplexe sur le remboursement des titres de transport à l'usager en cas de grève alors que vingt-cinq départements pratiquent aujourd'hui la gratuité totale des transports scolaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bailly

Rejoignant l'analyse de M. Yves Krattinger, M. Gérard Bailly, sénateur, membre du bureau de l'ADF, a mis en exergue l'importance du dialogue social et souligné les difficultés probables d'application du projet de loi concernant l'indemnisation des usagers et la définition des priorités de desserte. Il a par ailleurs appelé de ses voeux une information précoce des usagers en cas de grève, estimant que le délai prévu de quarante-huit heures pouvait être trop court pour leur permettre de s'organiser efficacement. Il a souhaité que le dispositif législatif puisse faire l'objet d'une évaluation un an après son entrée en vigueur. Enfin, il s'est interrogé sur l'application du texte aux services publics de transport organisés en régies départementales.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

A une question de Mme Catherine Procaccia, rapporteur, sur l'applicabilité du projet de loi aux entreprises de moins de cinquante salariés, M. Yves Krattinger a répondu en distinguant entre le volet social, susceptible de s'appliquer opportunément à toutes les entreprises, et le volet service minimum, plus difficile à mettre en oeuvre. En tout état de cause, il paraît difficile de retenir le critère de la taille de l'entreprise - qui créerait une rupture d'égalité entre entreprises - ou celui de la taille du département, en raison de la diversité des situations locales.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Gruillot

a suggéré d'exclure du champ d'application de la loi les transports spéciaux organisés pour le ramassage scolaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

a estimé qu'il était inopportun de légiférer en matière de service minimum, marquant sa préférence pour le dialogue social et la conclusion d'accords de branche.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Krattinger

a insisté sur le fait que la loi permettrait d'institutionnaliser le dialogue social et, partant, de mieux identifier les interlocuteurs à même de représenter les salariés dans les négociations.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

s'est déclaré hostile à l'exclusion des services de ramassage scolaire du champ d'application de la loi, redoutant que cette mesure n'aboutisse en fait à supprimer tout service minimum dans ce secteur. Il a souhaité savoir si les départements étaient indemnisés en cas de grève.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Krattinger

a expliqué que, conformément aux conventions de délégation de service public, les départements ne rémunéraient les entreprises de transport qu'après service fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Hugues Portelli

a souhaité recentrer les débats sur le milieu urbain où vivent 80 % des Français et relevé que les entreprises de transport scolaire assuraient également des liaisons vers les gares. A l'inverse du mécanisme proposé, il a suggéré d'adopter immédiatement les mesures réglementaires provisoires auxquelles les accords collectifs signés dans les prochains mois auraient vocation à se substituer.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

a rappelé les préoccupations exprimées par la RATP au sujet de la délicate articulation entre les accords existants et les dispositions législatives envisagées.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Idrac, présidente de la SNCF

Le groupe de travail a ensuite entendu Mme Anne-Marie Idrac, présidente de la SNCF, accompagnée de M. Guillaume Pepy, directeur général exécutif, M. François Nogué, directeur des ressources humaines, et Mmes Laurence Eymieu, directrice des relations institutionnelles, et Marielle Abric, chargée des relations avec le Parlement.

Se déclarant très favorable au projet de loi, Mme Anne-Marie Idrac, présidente de la SNCF, a estimé qu'il comportait des avancées d'un point de vue éthique, commercial - la continuité du service public étant une exigence des clients - « managérial » - les managers pouvant, sur cette base, améliorer le service client - et, enfin, du point de vue de la méthode, le texte organisant un système de négociations avec les partenaires sociaux et les autorités organisatrices de transport de nature à moderniser le dialogue social. Elle a ensuite indiqué que la SNCF, qui regroupe 160 000 salariés dans 250 établissements, connaît une baisse du nombre de préavis de grève, qui sont passés en dix ans d'environ 1 200 à 700. Elle a ajouté qu'en 2006, le nombre de journées perdues par agent avait été inférieur à 0,8, ce nombre étant très dépendant des grèves nationales motivées par des sujets « extérieurs » à l'entreprise, tels que la réforme des retraites en 2003 ou l'instauration du contrat première embauche en 2005.

Abordant le volet « prévention des conflits » du projet de loi, Mme Anne-Marie Idrac a jugé très utile la disposition rendant la négociation obligatoire avant le dépôt d'un préavis de grève. A ce sujet, elle a rappelé la signature par toutes les organisations syndicales, en 2004, d'un accord sur la prévention des conflits et le dialogue social instituant une procédure de demande de concertation immédiate (DCI) par laquelle les syndicats peuvent aviser la direction, par écrit, de tout différend. Une période de concertation de dix jours s'ouvre alors afin de permettre aux parties de trouver un accord et s'achève par la remise au personnel d'un relevé de conclusions concerté et écrit. Cette procédure a débouché sur une solution dans 90 % des cas puisqu'en 2006, sur 927 DCI, 114 seulement ont abouti au dépôt d'un préavis. Elle reste en revanche peu utilisée puisque 84 % des préavis déposés en 2006 n'ont pas été précédés d'une demande de concertation. Mme Anne-Marie Idrac a ensuite estimé que les modalités du système de prévention prévu par le projet de loi pourraient être améliorées sur deux points : mettre en oeuvre la procédure de prévention avec la ou les organisations ayant initialement soulevé le problème et substituer à la notion de « négociation » celle de « concertation ».

Abordant ensuite la question des autorités organisatrices de transport, elle a rappelé qu'elles avaient la responsabilité, depuis la loi du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, de définir le service public du transport, les autorités compétentes pour la SNCF étant les régions. Après s'être félicitée du respect par le projet de loi de l'autonomie de ces autorités, elle a indiqué qu'un certain nombre de conventions passées avec celles-ci prévoyaient déjà des dispositions relatives à la continuité du service. Ainsi, le contrat conclu avec le STIF pour 2004-2007 engage la SNCF à donner une information de qualité aux voyageurs et à maintenir aux heures de pointe un service supérieur ou égal à un tiers ou à la moitié du service normal, en fonction du degré de conflictualité. Il prévoit également des pénalités pouvant aller jusqu'à 290 000 euros par jour. Le contrat avec la région Alsace fixe quant à lui quatre niveaux de desserte, en fonction de l'impact estimé du mouvement social, ainsi qu'un système de bonus/malus. Enfin, la convention passée avec la région Rhône-Alpes établit trois niveaux de desserte (30, 50 et 70 %), l'organisation tenant compte, en concertation avec la région, de l'ampleur de la contestation.

a ensuite souligné que la prévisibilité du service et le droit à l'information correspondaient à une attente majeure des clients. Après avoir indiqué que la SNCF mettait l'accent sur l'amélioration de l'utilisation des nombreux moyens techniques à sa disposition (affichages, cartographies, SMS, fiches-horaires, presse, etc.), elle s'est félicitée des avancées que le projet de loi permettrait de réaliser grâce à une meilleure connaissance des capacités de service, avec l'identification des personnels non grévistes et la possibilité de les réaffecter. Elle a précisé que dans la perspective de la mise en oeuvre du projet de loi, la SNCF travaillait à l'élaboration de grilles de desserte ligne par ligne tenant compte des besoins prioritaires définis par l'autorité organisatrice, à des protocoles d'identification des personnels présents, à l'affectation des agents et à l'amélioration des relations avec les médias afin de communiquer en temps réel. Elle a estimé que le texte trouvait un point d'équilibre entre le droit de grève constitutionnellement garanti et la continuité du service public, entre les dispositions relevant de la loi-cadre et celles relevant de la négociation, entre le rôle des autorités organisatrices et celui de l'entreprise et, enfin, entre la prévention des conflits et la gestion du service en temps de grève. Elle a insisté, en conclusion, sur les priorités que viserait la SNCF après l'adoption du texte : l'amélioration, en interne, de la prévention des conflits, la poursuite de la modernisation du dialogue social, la mise en place de plans de transport adaptés et le lancement d'un programme d'amélioration de la qualité du service offert aux voyageurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

a souhaité savoir quelles seraient les modalités d'organisation des négociations entre les autorités organisatrices de transport et la SNCF, celles-ci devant intervenir avant le 31 décembre 2007. Elle a également demandé s'il était possible d'assurer une desserte à la moitié plutôt qu'à un tiers. Enfin, elle s'est interrogée sur la manière dont la SNCF concevait l'indemnisation des usagers prévue par le texte et sur l'impact prévisible sur le nombre de grévistes de l'instauration d'un délai de 48 heures avant le début d'une grève.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Idrac, présidente de la SNCF

En réponse, Mme Anne-Marie Idrac a précisé les points suivants :

- une clause sur le service de transport adapté, conforme au projet de loi, pourra être ajoutée par avenant aux conventions déjà existantes et sera intégrée directement dans celles qui sont en cours de négociation ;

- si le STIF le souhaite, le niveau actuel de desserte prévu par la convention pourra être modifié, ce niveau variant déjà selon les régions ;

- un décret fixera les modalités de l'indemnisation prévue par le texte, qui pourraient s'avérer complexes s'agissant des usagers abonnés ; celle-ci sera à la charge de l'entreprise ;

- l'esprit de responsabilité des salariés et des syndicats devrait permettre que le délai de 48 heures n'entraîne pas mécaniquement une hausse du nombre de grévistes.

Puis Mme Anne-Marie Idrac a indiqué que le maintien d'un service normal n'était pas compatible avec l'exercice individuel du droit de grève. Elle a toutefois précisé que récemment, lors des périodes d'examen, là où des préavis avaient été déposés, la mobilisation des non grévistes avait permis d'assurer la continuité du service.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Krattinger

a demandé si la renégociation des contrats entre la SNCF et les autorités organisatrices pouvait avoir des conséquences financières pour ces dernières. Relevant que de nombreux retards étaient dus à d'autres facteurs que les conflits sociaux, par exemple à des pannes de matériel, il a estimé que le texte n'agissait pas sur les causes du mécontentement quotidien des usagers.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

a tout d'abord relevé que l'ensemble des organisations syndicales étaient opposées au projet de loi et s'est interrogé sur l'impact de cette situation sur le dialogue social au sein de la SNCF. Il a ensuite demandé à Mme Anne Marie Idrac s'il était possible d'évaluer l'incidence du texte sur l'ensemble des difficultés que rencontre le fonctionnement du réseau ferroviaire et s'est interrogé notamment sur l'utilité de la procédure de prévention en cas de grève « émotionnelle ». Il a enfin demandé selon quelles modalités était actuellement établie la « prévisibilité » du trafic et si les conventions passées avec les autorités organisatrices conduisaient à instituer un service minimum ou simplement à prévoir des niveaux variables de service et à améliorer l'information.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

a fortement déploré l'insuffisance du nombre de TGV-Est et a demandé si celui-ci était victime de son succès.

Debut de section - PermalienPhoto de Hugues Portelli

Après s'être félicité de la diminution du nombre de conflits sociaux depuis plusieurs années, M. Hugues Portelli a relevé que les problèmes provenaient aujourd'hui davantage d'incidents techniques ou d'agression d'agents. Il a déploré l'insuffisance du nombre de wagons, particulièrement sensible en cas de réduction du nombre de trains circulant, et a estimé que le respect des usagers impliquait, dans ces cas-là, un nombre minimum de wagons. S'agissant du STIF, il a indiqué que l'institution de pénalités en cas de retard des trains pouvait conduire les conducteurs à ne plus s'arrêter dans certaines gares. Enfin, revenant sur l'incident survenu récemment à la Plaine Saint Denis, il a rappelé que le bidonville concerné existait depuis des années et s'est interrogé sur l'inertie de la SNCF et des pouvoirs publics face à cette situation.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Idrac, présidente de la SNCF

En réponse, Mme Anne-Marie Idrac a précisé les éléments suivants :

- le TGV-Est connaît des taux de remplissage de 100 %, ce qui devrait impliquer à terme un doublement des rames ;

- le texte ne devrait pas conduire les autorités organisatrices à payer davantage, un système de bonus/malus étant déjà en place ;

- la ligne 4 Paris-Bâle rencontre des difficultés particulières du fait de l'installation de moteurs neufs qui connaissent de nombreux problèmes de rodage ;

- la suppression des 3,2 % de trains express régionaux (TER) relève, dans deux tiers des cas, de conflits sociaux, le tiers restant s'expliquant par des pannes de matériel ou des facteurs « externes » ;

- parallèlement à la mise en oeuvre du projet de loi, la SNCF va lancer un plan relatif à la qualité du service pour les transports de la vie quotidienne, qui sera inscrit dans le prochain plan stratégique et prévoira des objectifs et des moyens précis ;

- s'agissant de la prévisibilité, les méthodes sont actuellement relativement « artisanales » et s'appuient essentiellement sur une estimation du nombre de grévistes à partir de laquelle est élaborée une hypothèse de niveau de service, volontairement fixée assez bas ;

- les interruptions de service sans préavis concernent principalement les contrôleurs et touchent spécifiquement l'Ile-de-France ; la SNCF s'est engagée sur un renforcement de la sûreté, motif le plus fréquent de ces interruptions de service, afin de les limiter ;

- les trafics ont été assurés, lors des conflits 2005, à hauteur d'environ 50 % en Ile-de-France et entre 33 et 50 % pour les TER, le facteur le plus déterminant étant le niveau de grève des personnels roulants et des contrôleurs ; en novembre 2006, la SNCF a réussi, avec 55 % de conducteurs grévistes, à assurer 45 % du service ;

- un rapport sur l'incident survenu sur le RER B vient d'être rendu public et mis en ligne sur Internet.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Ries

a souligné qu'il convenait de distinguer deux problèmes différents. D'une part, se pose la question de l'amélioration de la prévisibilité du service en cas de conflit social et de l'information du public. Il s'est interrogé à cet égard sur un possible impact négatif du délai de quarante-huit heures sur la prévisibilité. D'autre part, est soulevé le problème du service minimum et des modalités de son organisation en cas de mouvement massif de grève et de sa conciliation avec le respect du droit individuel à la grève.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Evoquant l'accord passé entre la SNCF et le STIF, Mme Nicole Bricq a relevé que les pénalités pour non-réalisation du service avaient considérablement diminué et s'est interrogée sur le rôle de cet indicateur. Elle a notamment jugé que si l'on considérait que l'accord était très satisfaisant, la loi apparaissait relativement inutile ; dans le cas contraire, c'est l'indicateur qu'il conviendrait de remettre en cause. Rappelant que l'instauration d'un service minimum était un engagement électoral du président de la République, elle s'est demandé si, avec ce projet de loi, n'était pas également en jeu le règlement d'un certain nombre de problèmes spécifiques à l'Ile-de-France. Elle a enfin exprimé des doutes sur l'utilité réelle du texte pour améliorer la prévisibilité et a estimé que le vrai problème n'est pas tant celui des grèves que celui des difficultés quotidiennes rencontrées sur le réseau.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Après avoir déclaré partager un certain nombre de propos précédemment formulés, M. Christian Cambon a relevé que l'exigence d'un service minimum de trois heures le matin et trois heures le soir nécessitait en réalité la présence de 100 % des personnels et a estimé qu'une telle disposition pourrait porter une atteinte essentielle au droit de grève.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Idrac, présidente de la SNCF

En réponse, Mme Anne-Marie Idrac a précisé les éléments suivants :

- le projet de loi constitue une avancée dans la mesure où il incite au dialogue social et améliore la prévisibilité ;

- le sens du service public des agents rend impensable une utilisation dévoyée du délai de quarante-huit heures qui conduirait à instrumentaliser le droit de grève ;

- le projet de loi ne permet pas d'assurer un service minimum en cas de grève très lourde : ce qui soulève la question de la mise en oeuvre d'une astreinte difficilement compatible avec le droit de grève dans la mesure où la garantie d'un trafic pendant trois heures le matin et trois heures l'après-midi nécessiterait la présence de 80 % à 90 % du personnel ;

- s'agissant du STIF, l'évolution des pénalités traduit l'amélioration de la situation en termes de conflictualité, la SNCF se tenant à la disposition de l'autorité organisatrice si celle-ci souhaite accroître encore le niveau de service.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

En réponse à une question de Mme Catherine Procaccia, rapporteur, sur la possibilité pour la SNCF de s'inspirer de l'accord passé à la RATP, Mme Anne Marie Idrac a souligné que chaque entreprise avait son histoire et ses traditions propres et qu'il serait délicat de vouloir imposer un modèle extérieur. Elle a jugé préférable de s'appuyer sur l'accord passé à la SNCF en 2004 et de le toiletter afin de le rendre conforme à la loi. Dans ce cadre, il sera notamment souhaitable d'améliorer encore la prévention des conflits et de multiplier les lieux de dialogue.