Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission procède tout d'abord à l'examen du rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur le projet de loi n° 585 (2009-2010), adopté par l'Assemblée nationale, de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2009.
En 2009, la croissance a été de - 2,6 points ; cette récession, certes moins forte que dans d'autres États européens, est toutefois la pire qu'ait connue la France depuis la Seconde Guerre mondiale. Elle se traduit par un taux de chômage de 10 %, contre 11,7 % en 1994. Sur le long terme, notre taux de chômage fluctue entre 7 % et 12 %.
Comparons l'exécution aux prévisions. Le premier programme de stabilité 2009-2010, transmis en novembre 2007, anticipait un déficit de 1,7 point de PIB. Le projet de loi de finances pour 2009, déposé dix jours après la faillite de la banque Lehman Brothers, prévoyait un déficit de 2,7 points ; le deuxième programme de stabilité pour 2009-2012, transmis à la commission européenne le 22/12/08, tablait sur 3,9 points ; la loi de programmation des finances publiques du 9 février 2009, sur 4,4 points ; in fine, l'Insee a établi le déficit pour 2009 à 7,5 points de PIB.
En 2009, le besoin de financements de l'État est passé, au sens du traité de Maastricht, de 55,5 à 117,6 milliards d'euros. Celui de la sécurité sociale, de 0,9 à 24 milliards ! Seules les administrations locales voient leur besoin de financement consolidé baisser, de 8,5 à 5,5 milliards. Cette situation est plutôt à mettre sur le compte du plan de relance, et notamment de la mesure d'accélération des versements du FCTVA. La Cour des est excessive en voyant dans ce dispositif un simple effet d'aubaine : cela relativise d'autres appréciations exagérément sévères de son dernier rapport ! L'impact de la gestion des collectivités territoriales sur le déficit global est donc inférieur à celui de 2007. Mais, il est vrai qu'elles ne vivraient pas sans les transferts de l'État...
Le plan de relance était initialement de 26 milliards d'euros. Le Parlement l'a porté à 26,6 milliards. Le plan définitif est de 37 milliards, voire de 38 milliards en exécution. Le président Arthuis y reviendra en tant que rapporteur spécial... En décembre 2008, le Gouvernement disait attendre du plan de relance 0,6 points de PIB supplémentaires ; selon des économistes indépendants, son impact réel serait de la moitié... Les mesures keynésiennes de soutien à l'activité ne représentent que 15 milliards sur 38 ; le reste est consacré au soutien à la trésorerie des entreprises. De fait, les défaillances d'entreprises ont été moins fréquentes qu'en 1993-1994, et moins nombreuses qu'on pouvait le craindre. La comparaison intra-européenne est à notre avantage, grâce aux mesures du plan de relance et à la réforme de la taxe professionnelle, qui a abondé la trésorerie des entreprises de 12 milliards d'euros - mesure autrement plus puissante que le médiateur du crédit ou autres procédures d'urgence !
L'impact de la crise sur l'exécution de la loi de finances pour 2009 a conduit à une dégradation sans précédent du solde budgétaire de l'Etat. Les recettes nettes de son budget n'ont couvert que 56 % de ses dépenses nettes, contre 80 % en 2008. L'effondrement des recettes fiscales - de 46 milliards d'euros - est imputable pour moitié à la dégradation de la conjoncture, pour un tiers au volet fiscal du plan de relance et pour 15 % à des mesures discrétionnaires. Sauvegarder les recettes et contrôler la dépense fiscale sera l'un des grands enjeux des mois à venir !
Le plan de relance s'est révélé sensiblement plus coûteux que prévu. Le coût des mesures fiscales est évalué à 16,7 milliards d'euros, bien plus que les 10,3 milliards prévus. L'allègement d'impôt sur le revenu en faveur des contribuables relevant de la première tranche du barème représente 0,9 milliard supplémentaire ; le relèvement du crédit d'impôt recherche coûte 4,2 milliards, et non 3,8 milliards comme prévu. Le crédit d'impôt pour le report en arrière des déficits, 5 milliards - on est loin de la prévision de 1,8 milliard ! Le remboursement des crédits de TVA, 6,5 milliards, alors que la prévision était de 3,6... Ces écarts entre les estimations et la réalité posent une fois de plus la question des moyens dont dispose le Parlement, appelé à voter sur la base d'éléments fournis par le Gouvernement : il faudrait que le Parlement se dote d'une base de données indépendante, de moyens d'expertise pour relativiser ces incertitudes !
C'est une réflexion récurrente. Si cela ne dépend que du Parlement, que ne le faisons-nous ?
Nous avions voulu doter la commission d'outils informatiques pour simuler l'impact de différentes mesures sur les collectivités locales, avant de conclure, après avoir pris attache avec les ministères concernés, que c'était impossible...
Cela supposerait des moyens très importants en personnel et en matériel...
Nous avons beaucoup de mal à obtenir des réponses, par exemple sur l'impact de la réforme de la taxe professionnelle.
Par rapport à 2008, le coût des dépenses fiscales associées à l'impôt sur le revenu a augmenté de 3,6 milliards : 600 millions pour le crédit d'impôt développement durable, 800 millions pour le crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt, 1 milliard pour l'exonération d'impôt sur le revenu sur les heures supplémentaires. Cette « mauvaise herbe fiscale » ne cesse de s'étendre : hors plan de relance, les dépenses fiscales ont augmenté de 6 % par rapport à 2008.
En matière de dépense, la règle du zéro volume est à peu près tenue : d'exécution à exécution, la dépense de l'État progresserait de 0,4 % en valeur et de 0,3 % en volume, hors plan de relance. Paradoxalement, la très faible inflation n'a pas aidé... La comparaison entre prévision et exécution montre toutefois que la gouvernance de la dépense de l'État n'a pas été aussi efficace qu'anticipé.
Divine surprise, la charge de la dette a été inférieure de 5,3 milliards d'euros aux prévisions. Preuve une nouvelle fois de « l'insoutenable légèreté » de la dette de l'Etat, alors que celle-ci explose ! Cette aubaine a permis de compenser la hausse des prélèvements sur recettes à hauteur de 1,2 milliard, de rembourser 2 milliards à la sécurité sociale, de compenser des sous-budgétisations dans le domaine social : aide médicale d'Etat (AME), allocation parent isolé (API), allocation adulte handicapé (AAH), etc. Il faut ajouter quelques 400 millions pour la grippe A - dont les finances publiques auront été la principale victime ! -, 110 millions pour le plan exceptionnel de soutien à l'agriculture, 19 millions pour l'Office national des forêts, des dépenses en vue de la construction du nouveau Palais de justice de Paris...
Les mêmes économies permettent de respecter les plafonds de la loi de programmation du 9 février 2009.
La diminution des effectifs de l'État est moindre que ce qui était prévu en loi de finances initiale. Si, en année pleine, les suppressions de poste doivent produire une économie budgétaire de 800 millions d'euros, la masse salariale progresse dans le même temps de 1,7 milliard d'euros, entre mesures catégorielles, mesures générales, glissement vieillesse-technicité et autres. Les dépenses sont donc en progression nette de 860 millions d'euros.
Le pourcentage d'objectifs atteints sur l'ensemble des missions du budget général diminue, de 47 % en 2008 à 44 %. En outre, 12 % des indicateurs de performance ne sont pas renseignés, et donc inexploitables. Quatorze missions, représentant 69 % des crédits, remplissent entre un quart et la moitié de leurs objectifs ; quinze, représentant 31 % des crédits, entre la moitié et les trois quarts de leurs objectifs. Au tableau d'honneur, les missions « Relations avec les collectivités territoriales », « Médias », « Action extérieure de l'État » et « Sport, jeunesse et vie associative ». Au contraire, les missions « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » et « Sécurité » voient leur performance se dégrader le plus. La mise en oeuvre des indicateurs de performance est-elle bien conforme à l'esprit de la LOLF ? Ne revient-on pas à une mécanique purement formelle ?
Le besoin de financement de l'État, estimé à 179,6 milliards d'euros en loi de finances initiale pour 2009, s'est finalement établi à 246,2 milliards en exécution, soit une augmentation de 37 %. Cette augmentation sans précédent trouve son pendant dans les révisions opérées en cours d'année sur le programme de financement à moyen et long terme de l'Agence France Trésor - une première depuis 1993.
L'encours de dette négociable a augmenté dans un contexte de taux d'intérêt historiquement bas, avec un taux moyen à l'émission des bons du Trésor à taux fixe (BTF) de 0,70 % en 2009, contre 3,61 % en 2008, et des taux moyens et longs stabilisés à un très bas niveau. L'inflation a également été extrêmement faible : M. Trichet peut être satisfait.
Ces éléments ont contribué à un phénomène d'« apesanteur financière ». La charge nette de la dette négociable s'établit à 37,6 milliards d'euros en exécution, contre 44,5 milliards en 2008, soit une baisse de 15,5 %.
La valeur nominale de l'encours de la dette négociable atteint 1 133,48 milliards d'euros fin 2009. La structure de cette dette a également évolué : fin 2009, la dette à court terme représentait 18,9 % du total, contre 7,6 % de 870 milliards fin 2006 ! Nous ne cessons de nous sensibiliser à un éventuel retournement des taux.
À supposer qu'il soit concrétisé ! Il y a eu émission pour une dizaine de milliards.
Les taux des bons du Trésor à un an ont encore baissé, à 0,57 % contre 0,70 % l'année dernière.
Sur le total des obligations assimilables du Trésor (OAT) et des bons du Trésor à intérêts annuels (BTAN), on a fait environ 126 milliards d'euros au cours du premier semestre, dont un emprunt à cinquante ans.
Le résultat patrimonial de l'État s'établit à - 98 milliards d'euros, contre - 69 milliards en 2008. Il est imputable à la chute des recettes fiscales et à l'augmentation des transferts, notamment au profit des opérateurs de l'État dont les subventions augmentent de 7 milliards, traduction de la réforme des universités ou du Grenelle de l'environnement. La situation nette de l'État s'est dégradée de 17 % en un an.
Les engagements hors bilan de l'État progressent de 13 %, ce qui traduit notamment la progression spectaculaire de la dette garantie, ainsi que le renforcement de la garantie de protection des épargnants. Les engagements de l'État en matière de retraite atteignent 60 % du PIB, à 1 143 milliards d'euros : le besoin de financement actualisé du régime de retraite des fonctionnaires de l'État et des militaires à l'horizon 2109 est estimé à 556 milliards d'euros, celui des régimes spéciaux à 198 milliards, celui du Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'État, à 33 milliards à l'horizon 2050.
Quels enseignements tirer de cette situation pour 2011 ? Un déficit public structurel de 3 points de PIB est dangereux pour la soutenabilité des finances publiques : certes, il stabilise la dette entre 50 et 100 points de PIB, mais peut en cas de crise majeure atteindre 8 points, ce qui stabilise la dette à 200 points de PIB. C'est parce que nous n'avions pas suffisamment réduit le déficit structurel que nous avons été exposés à un tel dérapage !
Il est impossible de suivre précisément l'exécution des programmes de stabilité : la croissance des dépenses est définie selon la comptabilité nationale et à périmètre constant, alors que l'Insee ne publie les chiffres qu'à périmètre courant. Il faudra y remédier.
Enfin, en ce qui concerne le budget de l'État, il faut mieux exploiter les gisements d'économies « de constatation » liées à la baisse de la charge de la dette, tenir plus fermement les dépenses de rémunération et mieux sauvegarder les recettes, en soumettant, autant que possible, la dépense fiscale à une norme contraignante d'évolution. Nous reviendrons sur tous ces sujets lors du débat d'orientation des finances publiques !
Je remercie le rapporteur général pour sa communication qui était fort éclairante, à défaut d'être rassurante. Je partage votre observation sur le formalisme de certains indicateurs de performance.
J'ai appris hier sur les ondes que les primes des préfets leur étaient attribuées en fonction de divers indicateurs de performance, dont le nombre de contrats d'accompagnement dans l'emploi placés auprès des maires - que l'on accuse de trop créer d'emplois dans leur mairie...
Ces questions seront abordées systématiquement par chaque rapporteur spécial.
Un rendez-vous important nous attend la semaine prochaine : nous ne pourrons nous contenter d'indications générales. Il est de notre responsabilité de flécher les économies, de préciser quelles dépenses d'intervention, quelles niches fiscales offrent matière à économies.
Je proposerai une « boîte à outils » composée de rabots de toute forme, d'instruments contondants de toute taille, de tondeuses et de cisailles de tout type...
Mes collègues maires peuvent témoigner de l'empressement des sous-préfets chargés de placer auprès d'eux toute une panoplie de contrats - quitte ensuite à contester notre gestion !
Le rapporteur général a montré là où le bât blesse. Selon Eric Woerth, dont je salue par ailleurs le sérieux, le déficit structurel ne représenterait que la moitié du déficit actuel, et la situation devrait se rétablir. Mais la crise n'aurait-elle pas aggravé l'aspect structurel du déficit ? On voit que les emplois détruits pendant la crise ont du mal à renaître, notamment dans la production.
Le rapporteur général s'est en effet demandé si la crise n'avait pas altéré le potentiel de croissance.
La prévision de 2,5 % de croissance pour 2011 est trop optimiste. Le déficit structurel a été durablement aggravé. Il est urgent de raboter des dépenses fiscales et sociales dont l'efficacité est quasi-nulle !
Ce matin, François Drouin, président du conseil d'administration d'OSEO, nous a donné un exemple d'optimisation du crédit d'impôt recherche.
Un de ses confrères a en effet été approché par une officine spécialisée dans l'optimisation qui lui proposait d'imputer sur le crédit d'impôt recherche des dépenses de logiciels et d'organisation des salles de marché ! Il n'y a pas que des niches occupées par des chiens, mais aussi des anfractuosités dans la roche où se cachent des crabes !
Cette officine proposait ses services moyennant une rémunération représentant 35 % du crédit d'impôt recherche ! C'est ce type de pratique qui permet de dire que l'assiette du crédit d'impôt recherche augmente : effrayant !
Nous y reviendrons lors du débat d'orientation des finances publiques. Une hypothèse extrême serait de situer la croissance potentielle à son niveau d'avant-crise, en estimant que la part structurelle du déficit est limitée ; l'autre, de considérer que la perte de PIB due à la crise est définitive, et que la totalité de l'aggravation du déficit est structurelle. La réalité se situe probablement entre les deux.
Au sein du groupe Camdessus, d'illustres économistes plaidaient pour que la notion de déficit structurel soit utilisée comme fondement de la nouvelle norme d'équilibre des finances publiques.
Les parlementaires s'y sont tous opposés, quelle que soit leur formation politique. Comme le président Cahuzac, nous avons considéré qu'on ne pouvait pas fonder une norme de droit sur une notion économétrique aussi complexe.
La Commission européenne estime que les déficits structurels doivent être combattus. Elle demande aux États de faire des efforts structurels chaque année. Si l'on considère que les pertes dues à la crise sont importantes, les économies structurelles à réaliser le seront d'autant plus.
C'est effectivement un des aspects centraux du débat d'orientation que nous aurons dans quelques jours.
Je voudrais revenir sur les remarques assez déplacées de la Cour des comptes sur le comportement des collectivités locales qui ont bénéficié des remboursements anticipés du FCTVA l'année dernière. Dispose-t-on des chiffres définitifs sur le nombre de collectivités qui ont, et qui n'ont pas, respecté les engagements pris ? Ces remarques sont d'autant plus malvenues qu'il s'agit de recettes d'investissement.
Entre le moment où une commune décide de construire une ligne à haute tension et le moment où le projet sort de terre, les contraintes se sont multipliées et la réalisation des travaux devient quasiment impossible.
La Cour n'a pas bien mesuré que le plan de relance avait pour but d'accélérer la réalisation des projets. Il ne s'agissait pas de créer des programmes nouveaux, puisque pour en bénéficier, il fallait que les dossiers soient prêts. Au lieu de faire une seule rue en 2009, on en a fait deux ! C'est aussi simple que cela.
Pas nécessairement.
En ce qui concerne le pourcentage de communes ayant atteint les objectifs fixés, je demanderai à la DGCL de me communiquer les données. A mon avis, seule une faible proportion n'a pas respecté les engagements pris.
Je félicite notre rapporteur général pour son exposé.
On se gargarise un peu trop du retour à un déficit à 3 %, car un tel seuil n'a pas de signification financière précise. Nous devrions donc dire que dans le retour à une meilleure maîtrise des finances publiques, il y a une première étape qui consiste à équilibrer en dépenses et en recettes les opérations de fonctionnement. Une deuxième étape permettrait de retrouver l'équilibre du solde primaire intégrant les dépenses d'investissement. Ce n'est qu'à ce moment-là qu'on pourra envisager la réduction de la dette. Nous avons connu en 2006 et en 2007 le retour à l'équilibre du solde primaire et le déficit budgétaire n'était dû qu'à la charge de la dette.
Il faut donc d'abord se fixer comme objectif l'équilibre des opérations de fonctionnement, puis le retour au solde primaire. Ce n'est qu'à partir de ce moment qu'il sera possible d'envisager la réduction de la dette.
Les 3 % ne sont qu'une gare intermédiaire.
Avec la réforme de la taxe professionnelle, nous allons avoir en 2011 6 à 7 milliards de charges en moins par rapport à 2010. Nous allons donc connaître un petit soulagement budgétaire.
Il s'agit en quelque sorte de la sortie de la deuxième phase du plan de relance.
Les méthodes et les instruments d'analyse issus des vieilles théories des finances publiques pourraient être considérées comme plus pédagogiques que les actuelles méthodes que l'on dit plus fines et plus intelligentes.
Le ministre de l'économie nous avait annoncé 1,4 milliard de cessions immobilières. Or, elles ne s'élèveront qu'à 475 millions !
A partir du moment où vous avez accepté que le contrôle sur le crédit impôt-recherche soit du ressort du ministère de la recherche et non plus de celui du budget, il ne faut pas vous étonner qu'on y trouve n'importe quoi. Le cas que vous avez cité tout à l'heure est tout à fait éclairant.
J'en viens à mes questions : j'ai relu l'audition du Premier président de la Cour des comptes, notamment ses remarques sur l'évolution de notre dette à court terme qui expose notre pays à une éventuelle remontée des taux. Il nous avait dit que la LOLF nous accordait des droits d'information sur la dette à moyen et long terme. Comment peut-on faire pour obtenir plus d'informations sur la dette à court terme ?
Quand Didier Migaud est venu nous présenter son rapport sur l'exécution budgétaire, il nous a dit qu'il faudrait anticiper le débat et le vote sur le projet de loi de finances rectificative de la fin de l'année afin qu'au 31 décembre nous disposions d'une vision de l'exécution budgétaire de l'année en cours. Est-ce possible, est-ce souhaitable ? Franchement, l'exécution budgétaire n'intéresse personne, mis à part nous. Si l'on arrivait à tout faire en une année, cela donnerait un peu plus de visibilité à nos travaux.
Il faudrait que chaque trimestre le Gouvernement nous rende compte de l'exécution budgétaire.
S'agissant de la dette, j'ai beaucoup de considération pour l'agence France Trésor mais je me demande parfois si elle est vraiment sous contrôle. Je ne remets pas en cause son professionnalisme, qui doit être considéré comme un atout, pour arriver à tirer profit des marchés tels qu'ils sont, et s'il est excellent d'utiliser l'opportunité des prêts à très court terme, c'est aussi prendre un risque structurel sur la dette à partir du moment où un retournement des taux n'est pas à exclure. Or, je me demande si ce risque a été arbitré politiquement. Y a-t-il eu une décision stratégique pour fixer un seuil de dette à très court terme par rapport aux autres composantes de la dette ? Je ne sais pas.
Second aspect de la question : le taux de détention de la dette française par des agents nationaux. Y a-t-il eu une décision stratégique sur la baisse tendancielle de ce taux ? Depuis que les marchés se sont diversifiés, le taux de détention par des agents économiques nationaux n'a cessé de baisser inexorablement.
Lors de la préparation du budget pour 2010, le ministre du budget a demandé de réduire sensiblement le recours aux bons du Trésor. Nous en étions à 214 milliards à la fin 2009 et l'objectif était de passer en-dessous de 200 cette année. Comme les taux ont baissé en 2010, les opérateurs ont préféré ne pas trop réduire les engagements sur le court terme. Nous sommes aujourd'hui à 205 milliards et nous ne passerons sans doute pas en-dessous de 200 milliards, comme le voulait le Gouvernement.
Notre dette à moyen et long terme est répartie en trois tiers à peu près égaux : le premier est détenu par des résidents français, le second par des résidents de pays européens dont la grande majorité appartient au groupe euro. Le troisième tiers est constitué d'opérateurs internationaux, tels que des fonds de pension ou des banques centrales. Cela fait deux ans que je demande à ce que cette répartition soit modifiée : nous devrions arriver à au moins 50 % de placement chez les résidents nationaux. Les Japonais ont une dette énorme, mais qui est détenue dans sa très grande majorité par ses résidents.
En ce qui concerne la structure de notre dette, aucune décision stratégique n'a été prise. Il faudrait voir comment l'épargne longue de nos concitoyens pourrait s'investir dans des opérations de cette nature. Les banques estiment que c'est impossible sans avantage fiscal, mais le droit communautaire nous l'interdit.
Il est stupéfiant qu'il faille des avantages fiscaux pour placer des produits, dans ce pays !
Le contenu de la réponse du Gouvernement à cette observation de la Cour des comptes est éclairant.
J'en viens aux questions de madame Bricq : je ne sais pas s'il y a une bonne date pour avoir un débat sur la gestion de l'année passée. On ne peut pas techniquement procéder comme une collectivité locale qui, dans la même séance, vote les comptes administratifs et le budget de l'exercice. Pour l'État, on ne peut procéder aussi vite et je ne suis pas persuadé que la suggestion de M. Migaud soit réaliste car cela tendrait à accroître l'écart entre l'exercice clos et la discussion du rapport de gestion. Or, plus le temps passe, moins c'est intéressant. En outre, il ne serait pas possible de dégager du temps durant l'automne, à moins de nous contenter d'un débat symbolique.
Nous ferons parler les ministres avant le début du débat budgétaire, car nous allons essayer d'organiser les débats thématiques qui avaient place dans la première partie de la loi de finances au cours des semaines précédentes réservées au contrôle sénatorial : ainsi en serait-il des débats sur la contribution aux Communautés européennes, sur l'emploi dans la sphère étatique, sur le niveau d'endettement. Nous soulagerions d'autant l'emploi du temps des trois semaines consacrées à la loi de finances. Pour les collectivités territoriales, ce serait le moment de la clause de revoyure et nous pourrions y passer une journée entière si nécessaire. J'espère que les groupes politiques accepteront d'anticiper sur la discussion de la loi de finances. Enfin, la loi de finances de fin d'année s'appuie sur des évaluations réalisées en septembre.
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption sans modification du projet de loi n° 585 (2009-2010), adopté par l'Assemblée nationale, de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2009.
Puis la commission entend une communication de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur les travaux de la commission des finances relatifs à la mise en oeuvre de la contribution économique territoriale et à la situation des finances locales.
Pour ceux qui ont assisté à l'excellent débat d'hier soir, bien des aspects de cette présentation leur sont déjà connus.
Chacun sait que les obligations prévues par la loi de finances pour 2010 n'ont pas toutes été satisfaites. L'absence de données chiffrées fiables en début d'année explique le report d'une échéance législative qui ne pouvait prendre place en cours d'année.
La commission des finances a réuni divers ateliers de travail, a commandé une étude et a procédé à des auditions pour préparer les débats à venir.
Le coût de la réforme se précise : l'impact sur le solde structurel est évalué à 5,3 milliards en régime de croisière, soit un milliard de plus que les estimations accompagnant le projet de loi de finances. Pour l'essentiel - 800 millions - cette augmentation est due à la décision du Conseil constitutionnel censurant le dispositif d'assujettissement à la cotisation foncière des entreprises (CFE) des titulaires de bénéfices non commerciaux (BNC) de moins de cinq salariés. Ces évaluations restent provisoires car nous ne disposons pas des recouvrements effectifs. L'ensemble des curseurs peut donc encore bouger, notamment le coût pour les finances publiques.
Par rapport à la présentation qui a été faite de la réforme en loi de finances pour 2010, il est manifeste que les dotations de compensation de la taxe professionnelle ont beaucoup augmenté. L'évaluation initiale était de 800 millions mais reposait sur des données de 2008. L'actualisation de ces chiffres conduirait à doubler l'évaluation, sans que je comprenne vraiment pourquoi. En outre, un transfert à été opéré de l'État au bloc communal de la taxe sur les surfaces commerciales (TaSCom). Les dotations aux fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle justifient une augmentation des dotations de 500 millions.
S'agissant des 800 millions résultant de la censure du Conseil constitutionnel, il faut distinguer 400 millions au titre du dégrèvement de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et 400 millions qui seront pris en charge par la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP).
Le passage de 800 millions à 2,5 milliards est important car il modifie sensiblement l'équilibre global de la réforme en la rigidifiant davantage, puisqu'il s'agit d'une assiette plus large qui n'évoluera pas. Nous attendons des éléments plus précis pour comprendre ces chiffres.
Pour les collectivités, cette réforme aura plusieurs conséquences. Le rapport Durieux, qui tient lieu de réponse du Gouvernement à nos questions, indique que l'efficacité des dispositifs de péréquation créés par la réforme pour les départements et les régions serait limitée. Il faudra en débattre. Le vote du Sénat sur la répartition de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises proposait une solution beaucoup plus simple pour les départements. Je doute cependant que nos collègues députés se déjugent en revenant à nos préconisations.
Le rapport Durieux pose également la question des retouches à apporter au fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux. Nous avons aussi traité avec Christine Lagarde du statut de la compensation : nous devons être certains que cette dotation ne deviendra pas une variable d'ajustement au sein de l'enveloppe fermée. C'est notre principale crainte. A ce stade, le Gouvernement a répondu que c'était hors enveloppe fermée, mais comment est-ce compatible avec le plafonnement du montant total des transferts de l'État aux collectivités territoriales ? Quoi que nous dise Christine Lagarde, il y a là une forte contradiction.
La question de la péréquation au sein du bloc communal sera bien entendu un enjeu important. Faut-il arbitrer entre péréquation par les flux, par les stocks ou faut-il prévoir un système mixte ? Je n'ai pas à ce stade de réponse définitive.
La notion de potentiel financier devra être définie. Je souhaite qu'elle soit la plus large possible, de telle sorte que l'on cesse de faire des distinctions artificielles et que ce soit bien l'ensemble des ressources des collectivités qui soient intégrées à ce calcul, ce qui permettrait de tenir compte des injustices de la dotation globale de fonctionnement (DGF).
Il y a quelques années, j'ai essayé de traiter le cas d'un chef lieu de département de la région du grand sud-ouest, ville centre, ville touristique, ayant des services publics assez lourds et ayant des activités culturelles développées, mais ville ayant une faible population et ayant une DGF objectivement décrochée par rapport aux villes de sa catégorie et de sa strate démographique. Cette ville était gérée par une municipalité de droite et de centre droit et elle s'est efforcée d'obtenir que soient reconsidérées les modalités de calcul de sa DGF, mais cela a été strictement impossible.
Naturellement, en 2008, la majorité de cette ville a basculé, ce qui n'a d'ailleurs fait changer en rien le montant de la DGF et les contradictions auxquelles elle doit faire face.
Le débat sur la péréquation doit tenir compte de l'ensemble des ressources. Mais c'est au niveau des charges que le sujet devient beaucoup plus complexe. Si on peut introduire une typologie quand il s'agit de dépenses de guichet, il n'en va pas de même pour tout ce qui fait partie de l'autonomie de gestion de la collectivité. Que doit-on prendre en compte ? Au nom de quoi peut-on contester à une collectivité le droit d'être relativement dépensière et de faire appel à l'impôt ? On ne peut sortir de cette contradiction. Comment prendre en compte la dépense dans les indicateurs qui vont servir à calculer des dispositifs de péréquation, si l'on ne veut pas qu'elle soit un « pousse au crime », qu'elle récompense celles et ceux qui auront été les moins attentifs à la maîtrise de leurs dépenses ? Je ne sais pas s'il existe une méthode incontestable pour aborder ce type de problème.
J'en viens aux conséquences de cette réforme pour les redevables. L'industrie y a gagné, même si la répartition par secteurs et par entreprises est encore inconnue. Nous rencontrons surtout des entreprises qui considèrent qu'elles sont maltraitées, malgré l'importance du transfert en leur faveur. Les effets sont encore plus mal appréhendés sur l'investissement et sur la localisation des activités et de l'emploi.
Nous allons certainement devoir lutter contre l'optimisation des bases de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Il faut que nous arrivions à convaincre l'administration qu'il y a encore beaucoup d'incertitudes. Je ne suis pas sûr qu'elles soient correctement prises au sérieux à l'heure actuelle.
Tout à fait ! La déclaration des effectifs salariés est sans incidence sur le montant des impôts acquitté globalement par l'entreprise, mais elle a beaucoup d'incidence sur la répartition de cet impôt entre les collectivités. Le dispositif de contrôle des déclarations doit être considéré comme un élément déterminant de la mise en place de la nouvelle imposition. Or, rien n'est fait pour faire face à cette nécessité.
C'est vrai. Il y a encore beaucoup de travail à faire en ce sens. S'agissant de l'intérim et des travaux publics, il faudra sans doute trouver des solutions ad hoc pour définir de manière un peu forfaitaire la répartition des bases, parce qu'on ne pourra manifestement pas suivre chaque salarié sur chaque chantier.
Si on ne fait pas cela, la masse imposable sera prise au seul niveau du siège de l'entreprise, ce qui est contraire au principe de territorialisation.
D'autres questions restent en suspens : la répartition de la valeur ajoutée produite par un établissement pluri-communal, l'imposition des bénéfices non-commerciaux
Est-ce vraiment un problème ? Je vois mal sur quel principe cette disposition peut être remise en cause.
Il s'agit quand même de 400 millions de manque à gagner pour le bloc communal !
Certes, mais il suffisait au titulaire de BNC de se mettre en société soumise à l'impôt sur les sociétés pour échapper à cet impôt. C'est une situation absurde qui poussait à l'optimisation. Le Conseil constitutionnel a fait son travail. On part du principe que parce qu'il s'agit de BNC, l'entreprise gagne de l'argent. Ce n'est pas toujours vrai !
Je souscris à ce raisonnement, mais cela reviendrait à démontrer que l'estimation de 400 millions est fausse.
Or, nous la prenons pour vérité d'évangile. Si les données qui sont entrées dans le modèle sont mauvaises, les chiffres ne peuvent qu'être faux. Mais ils ne sont pas remis en cause. S'agit-il ou non d'un manque à gagner de 400 millions pour le bloc communal ? Nous ne pourrons ajuster cette réforme que lorsque nous disposerons de résultats réels.
Cette imposition n'avait pas de fondement, et le Conseil constitutionnel a eu raison de la censurer.
Cela coûte quand même 400 millions au bloc communal ! Mais ce chiffre correspond-il à la réalité ?
Quoi qu'il en soit, cette décision est compensée par l'État, et il s'agit d'un déficit structurel.
Tout à fait.
Quant à la mise en oeuvre du dispositif de révision des bases des valeurs foncières locatives, le texte voté au titre de la clause de revoyure prévoyait la possibilité d'analyser « la faisabilité d'une évolution distincte de l'évaluation des bases de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les entreprises, d'une part, et pour les ménages, d'autre part ». Mais le rapport Durieux est muet sur ce point.
J'en viens aux différentes difficultés à propos de l'IFER. Le rapport Durieux se permet d'émettre une opinion d'opportunité sur les éoliennes, ce qui n'est pas du ressort d'un rapport administratif. Il estime en effet que l'intéressement des communes rurales à l'implantation de nouveaux parcs éoliens n'est pas suffisant eu égard aux objectifs du Gouvernement. Nous avons voté la répartition entre communes, intercommunalités et départements en toute connaissance de cause. Sans doute est-il nécessaire de revaloriser un peu les tarifs des IFER éoliennes et des installations photovoltaïques, mais sans créer des situations trop favorables. Par ailleurs, il existe des installations importantes qui échappent à l'IFER. Il faudra probablement prévoir des transitions pour des installations décidées sous le régime de la taxe professionnelle et qui engendreraient un déséquilibre des budgets des collectivités concernées. Tous ces détails figurent dans le rapport.
J'en ai terminé de ma communication.
Vous avez fidèlement rendu compte des propos tenus lors des diverses tables rondes que nous avons organisées. Toutes ces questions en suspens sont autant de rendez-vous pour la prochaine loi de finances. Il faudra attendre l'exécution budgétaire 2010 pour disposer de tous les indicateurs sur la base desquels nous pourrons réagir et corriger en tant que de besoin. Charles Guené a demandé la parole : il a été chargé d'une mission temporaire par la ministre de l'économie et il a accepté de nous exposer, le 7 juillet prochain, la contribution qu'il apportera au ministre et qu'il présentera devant le Comité des finances locales le 6 juillet.
Je souscris à l'exposé que vient de nous faire le rapporteur général.
En ce qui concerne le différentiel d'un milliard qui existe au niveau de la DCRTP, il s'explique par le montant de la taxe professionnelle perçue en 2008, qui n'avait pas subi les effets de la crise, et était relativement élevé, et par la valeur ajoutée déclarée en 2009 qui, elle, a subi de plein fouet la crise et est donc beaucoup plus faible qu'espéré. Le différentiel est donc maximal. Ainsi, les collectivités locales sont donc surcompensées cette année, ce qui pénalise le budget de l'Etat. Nous n'aurons la réponse qu'à la fin de ce mois puisque nous disposerons des véritables données, et non pas d'estimations.
Quant à l'évolution de la DCRTP, elle fait partie intégrante du Fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR) et elle doit évoluer de la même manière. Elle est cependant figée pour l'instant. Mme la ministre a confirmé qu'elle ne serait pas incluse dans l'enveloppe normée et qu'elle serait indexée comme les autres dotations.
En ce qui concerne la péréquation, je rappelle qu'il s'agit d'une péréquation horizontale. Il nous reviendra donc d'en fixer les règles, l'État ne pouvant être que le garant de l'intérêt général dans cette opération.
Je souscris aussi à l'idée de vérifier les imperfections de la CVAE, notamment les risques d'optimisation.
Ne devrions-nous pas imaginer un barème médian qui pourrait inclure ceux qui sont en BNC et ceux qui sont en société pour tenter de récupérer une partie du manque à gagner ? Pour l'instant, l'aubaine est trop belle ! Si je suis tout à fait d'accord avec le Conseil constitutionnel, il faut quand même bien voir que pour ceux qui ne sont pas en BNC, la réforme est intéressante mais qu'elle l'est encore plus pour ceux qui sont en BNC ! Il faut imaginer un système qui évite ces distorsions.
Cela n'a plus de sens de distinguer les BNC, les bénéfices industriels et commerciaux (BIC) et même les bénéfices agricoles (BA). S'il n'y avait pas des régimes spécifiques à l'agriculture, les agriculteurs investiraient moins quand ils gagnent un peu d'argent et ils ne seraient pas le lendemain surendettés parce qu'ils sont suréquipés. Il arrive que les spécificités fiscales se retournent contre ceux que l'on voudrait protéger. Il faudrait que la FNSEA se mette cela dans la tête !
Je ne comprends pas bien le sens de cette communication. Hier, en séance publique, nous avons examiné une proposition des groupes UMP et centriste. Nous nous sommes exprimés sur la forme et sur le fond. Il ne faudrait pas que cette communication passe ce débat par pertes et profits.
Sur la forme, il s'agit de l'enterrement de première classe des engagements pris lors de la loi de finances pour 2010. Le rapporteur général vient de nous dire que ce report était « totalement prévisible ». C'est ce que nous avons dit hier et j'aurais aimé l'entendre de la part de ceux qui ont défendu la proposition de résolution !
Sur le fond, les explications de la ministre le 22 juin devant la commission élargie et celles qu'elle a données hier en séance ont été laborieuses, même si ce mot ne vous a pas plu, monsieur le rapporteur général. Dans laborieux, il y a le mot travail, ce qui prouve que ce n'est pas totalement négatif. Il n'empêche, ses réponses n'étaient pas convaincantes si bien que la prévisibilité offerte aux collectivités locales est réduite à zéro. Pour 2011, le système de la compensation va donc se poursuivre. Je ne vois pas comment on va résoudre la quadrature du cercle durant cette année là. Il n'y aura donc pas plus de péréquation qu'aujourd'hui même au moment où l'on disposera du produit réel des rentrées fiscales émanant des entreprises. Ce n'est donc pas la peine de faire des plans sur la comète. Il faut nous dire sur quelles bases se feront ces compensations pour les collectivités : c'est la seule question qui reste à trancher. Les bases seront-elles identiques, oui ou non ?
Je veux bien que nos collègues UMP proposent des solutions alors qu'elles n'ont jamais été abordées de front par le Gouvernement, mais ils le font alors que les dépenses locales vont être comprimées au maximum.
Il y a eu coïncidence entre deux exercices distincts qui portent sur le même sujet.
La commission a estimé utile de récapituler l'ensemble de ses travaux sur ce thème avant la fin de la session et elle vous propose le rapport que je viens de vous présenter. Simultanément, il s'est trouvé que l'on a voulu faire coïncider l'examen du projet de loi sur la réforme des collectivités territoriales avec un débat sur la proposition de résolution discutée hier. Je n'ai d'ailleurs pas tenu hier soir un discours fondamentalement différent de cet après-midi, puisqu'il était fondé sur le même travail. Mais ce sont des exercices bien différents.
La communication que vous venez de nous présenter est le recueil de tous les travaux de la commission : auditions, tables rondes, simulations, études confiées à l'institut Thomas More et à Public Evaluation System. Ce rapport permettra à chacun d'entre vous d'alimenter sa réflexion et de se préparer aux futures discussions.
Cette réforme sera difficile à appliquer. Pensez-vous, monsieur le rapporteur général, qu'il sera possible d'appliquer la loi l'année prochaine ou serait-il plus judicieux de nous mettre tous d'accord pour trouver une compensation pas trop dure à mettre en oeuvre, compte tenu du gel des dotations ?
Mon sentiment est que 2011 sera une deuxième année de transition. Il y aura néanmoins des dispositions législatives que nous devrons prendre : ainsi en sera-t-il de la répartition et du contrôle de l'assiette des cotisations sur la valeur ajoutée. Même chose pour la répartition et le mode de calcul des IFER et du FSRIF. La loi de finances pour 2011 présentera sans doute un second train de dispositions complexes. Une seconde année de transition ne sera pas de trop. Dans une période de crise, une année de stabilisation des ressources n'est probablement pas une mauvaise chose.
Lorsqu'on fera des simulations sur la péréquation, il faudra y mettre l'ensemble de la dotation globale de fonctionnement car il y a des injustices insupportables.
A chaque jour suffit sa peine, mais deux autres dossiers inquiètent les communes. La taxe locale sur l'électricité sera remplacée par une formule magique dont la portée, pour ma collectivité, m'a échappé. Or, il ne s'agit pas d'une recette mineure. Et voilà que le secrétaire d'État au logement nous annonce qu'il se lance dans une réforme des taxes d'urbanisme, ce qui pourra avoir un impact sur les ressources des collectivités. Pourrait-on mesurer les conséquences de ces mesures ?
La commission a récemment organisé une table ronde sur la question de la taxe locale sur l'électricité. Elle m'a désigné comme rapporteur pour avis sur le projet de loi relatif à la nouvelle organisation du marché de l'énergie (NOME). J'ai la conviction qu'il faut maintenir les ressources des collectivités, en intégrant le coût attendu au titre de l'éclairage public. Il convient en effet de prendre en compte le produit antérieur et le produit net, déduction faite de ce qu'il faudra payer au titre de l'éclairage public.
Vous serez encouragés à réduire la consommation électrique en diminuant l'éclairage public.
C'est ce que nous faisons en changeant les ampoules, mais cela nécessite des investissements sur plusieurs années.
Nous sommes dans une période contrainte : réforme ou pas, les collectivités locales auraient eu des problèmes de ressources, sauf à augmenter la fiscalité.
Deux années d'utilisation de la clause de revoyure ne seront pas de trop. Cette année, nous arriverons à régler certains problèmes. En revanche, pour d'autres, nous serons déjà bien contents si nous parvenons à nous accorder sur quelques grands principes, notamment en ce qui concerne les clauses de péréquation dans le bloc communal. On ne verra les effets réels de la réforme qu'en 2011. Il est donc normal que tout cela se fasse progressivement.
Nous sommes condamnés quelques mois encore à vivre des situations éprouvantes, mais il n'est pas douteux que la crise financière nous permettra de trouver des solutions innovantes. Même quand on parle de dépenses de guichet, comme l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), il serait sans doute possible de dépenser un peu moins en donnant des instructions plus claires à nos propres services.
L'opposition fera-t-elle des propositions dans le cadre de cette clause de revoyure ?
Lorsque nous disposerons de données fiables. Pour l'instant, nous tirons à blanc. Attendons de pouvoir tirer à balles réelles ! On ne peut parler de fiscalité économique sans parler de la fiscalité des ménages.
Je suis de plus en plus mélancolique lorsque je constate les disparités entre les communes.
Depuis vingt-huit ans que je suis maire, j'entends dire qu'il y a des communes qui dépensent trop. Quand on n'a pas beaucoup d'argent, on essaye de faire des économies. Quand on vous demande un coup de rabot supplémentaire, on atteint l'os et on ne peut plus s'en sortir. L'État a taxé ma ville parce que je n'augmentais pas assez mes impôts. L'inégalité est encore pire que ce que l'on peut imaginer. Ceux qui ont beaucoup d'argent pourront facilement faire des économies. Ceux qui vivent avec rien depuis vingt-cinq ans ne peuvent faire plus. Dans mon département, il y a des communes équivalentes dont la dotation forfaitaire va de un à trois pour des raisons historiques.
Depuis que je suis parlementaire, j'ai vu passer une quinzaine de ministres de l'intérieur qui m'ont tous dit qu'il n'était pas possible de prendre aux plus riches pour donner aux plus pauvres. En Île-de-France, les différences vont de un à soixante-dix ! Dans l'ouest parisien, il y a des communes qui ne savent pas quoi faire de leur argent pendant que nous ne nous en sortons pas.
Ce débat a été extrêmement riche. Nous serions très égoïstes de ne pas publier cette communication et les pièces jointes.
A l'issue de ce débat, la commission donne acte à M. Philippe Marini, rapporteur général, de sa communication et en autorise la publication sous la forme d'un rapport d'information.