Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Réunion du 9 novembre 2010 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La commission entend M. Jean-Paul Palomeros, général d'armée aérienne, chef d'état-major de l'armée de l'air, sur le projet de loi de finances pour 2011.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Monsieur le chef d'état-major, vous allez dans quelques instants nous présenter les lignes de force du budget 2011 pour l'armée de l'air. Au nom de la commission, je vous en remercie. Pour ce qui me concerne, je voudrais recueillir votre analyse sur les conséquences du report ou à terme de l'abandon de l'opération de rénovation du Mirage 2000D en raison des commandes de Rafale supplémentaires. Le fait que nos prospects à l'exportation tardent à se concrétiser en dépit d'un très fort soutien politique nous oblige à des choix particulièrement difficiles. Pouvez-vous nous expliquer de façon concrète quelles seront les conséquences de cette décision, et quelles actions palliatives il vous semble possible d'envisager. Il en va de même de la nécessaire participation de la défense au redressement de nos finances publiques. Le budget pour 2011 s'inscrit dans une perspective triennale et nous savons tous que des décisions fortes devront être prises en 2012 après les élections présidentielles et législatives si la reprise économique n'est pas au rendez-vous. Quelles projections faites-vous par rapport à la trajectoire de la LPM ? Pensez-vous que cela risque de se traduire directement par une réduction du format de l'armée de l'air dans le prochain Livre blanc ?

Dans un tout autre domaine, je profite de votre présence pour vous demander votre sentiment sur la défense anti-missile balistique et la façon dont la France devrait s'y prendre. Enfin, quels vont être les projets de coopération entre la France et le Royaume Uni auxquels les armées de l'air de nos deux pays vont participer.

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Palomeros, chef d'état-major de l'armée de l'air

Je tiens tout d'abord à vous remercier M. le Président pour votre participation à l'université d'été de la défense qui vient de se tenir et où j'ai été particulièrement heureux de pouvoir vous accueillir au sein de l'armée de l'air et vous montrer le savoir faire de nos forces. C'est toujours la vérité du terrain qui doit guider nos actions. Ce fut une occasion privilégiée d'échanges riches entre les différents acteurs de la défense et les aviateurs que vous avez pu voir à l'oeuvre, au sol et en vol. Vous l'avez constaté, la variété des missions que nous devons assurer et de nos engagements soulignent la cohérence capacitaire et le niveau d'adaptation de l'armée de l'air, que ce soit ici, dans notre espace aérien, en Haïti, en Afghanistan, en Afrique ou dans nos DOM et COM.

Ces missions, ces engagements, reposent d'abord sur des compétences, des expertises rares, de femmes et d'hommes dont plus d'un millier sont en alerte permanente en métropole, à quelques minutes, de jour ou de nuit, tous les jours de l'année, et plus de 3 500 sont déployés dans le monde entier, avec 80 avions et hélicoptères, dont 30 chasseurs. Je me suis d'ailleurs rendu récemment aux Emirats Arabes Unis, où nous venons de déployer trois Rafale. Je vous remercie de l'honneur que vous leur avez fait, ils le méritent. Sachez qu'ils y ont été très sensibles.

J'ai aujourd'hui le plaisir de pouvoir vous faire un point sur l'état de l'armée de l'air et vous donner mon sentiment sur les orientations que suggère le projet de loi de finances 2011. L'an passé, à l'occasion de ma première audition devant cette commission, je vous avais présenté dans le détail nos différentes contributions au service de la France qui confirment le rôle essentiel de l'arme aérienne pour chacune des fonctions stratégiques du Livre blanc. Cette année en revanche, j'aimerais vous brosser un état synthétique de la réforme au sein de l'armée de l'air, au plan des effectifs, du soutien et du maintien en condition opérationnelle, avant d'aborder, en contrepoint, l'avancement de sa modernisation.

Depuis notre dernière rencontre formelle, l'armée de l'air a poursuivi, sans faiblir, sur la voie d'une réforme difficile. Ainsi, tout comme en 2009, du point de vue des effectifs, des soutiens communs et de nos bases aériennes, les objectifs qui nous avaient été assignés pour 2010 seront atteints. Ils le sont déjà quasiment.

Je commencerai en vous disant que les femmes et les hommes de l'armée de l'air constituent ma priorité. Ce sont eux qui vivent, animent, subissent parfois, la réforme. Dans leur grande majorité, ils la comprennent mais en attendent des résultats concrets, en matière de modernisation, d'amélioration de leur outil et de leurs conditions de travail.

En termes quantitatifs, la conjugaison des efforts de la revue générale des politiques publiques et des choix du Livre Blanc fixaient sur la période de la loi de programmation militaire (LPM) une réduction de 15 900 emplois pour l'armée de l'air, dont 75% dans le domaine du soutien.

Cette réduction de 25 % en six ans du format de l'armée de l'air est lourde et complexe, notamment pour la gestion des compétences. En 2009, 2 210 postes ont été supprimés, 2 235 en 2010. Nous terminerons d'ailleurs cette année avec une masse salariale à l'équilibre et conforme aux prévisions, ce qui est, sans fausse pudeur, une belle performance.

Le projet de loi de finances pour 2011 prévoit 2139 réductions de poste, et le budget prévu sur le titre II pour l'armée de l'air semble cohérent avec la politique que nous souhaitons mener : savant équilibre entre cette réduction rapide de nos effectifs, les mesures d'incitation et d'accompagnement à la reconversion associées, mais aussi et surtout un flux de recrutement strictement nécessaire que nous souhaitons maintenir pour ne pas obérer l'avenir : 1 900 personnes par an.

Dans une logique de maintien des compétences, c'est ainsi près de 4 000 départs, et quelques 5 000 mutations géographiques qu'il nous faut gérer annuellement.

On le voit, l'effort fourni par l'armée de l'air est considérable. En termes comptables, le cumul des économies réalisées sur la masse salariale depuis deux ans et demi grâce à cette déflation est de plus de 210 millions d'euros. Il s'agit d'un résultat très concret.

Je soulignais à l'instant que, pour l'armée de l'air, 75 % des réductions d'emploi portaient sur le soutien ; elles vont s'articuler autour de la fermeture de bases aériennes, de la mutualisation interarmées mais aussi de l'externalisation.

Pour ce qui est de la fermeture des bases aériennes, huit bases majeures seront fermées d'ici à 2012, ce qui constitue une des parties les plus emblématiques du plan de restructuration de l'armée de l'air. Ce plan de fermetures est pour l'instant respecté : Toulouse en 2009, Colmar cette année, Reims et Taverny l'an prochain, puis Metz, Nice, Brétigny et Cambrai en 2012. Il s'agit de lourdes implantations que nous nous employons à fermer dans les meilleures conditions et sans laisser personne au bord du chemin.

Au-delà de la difficulté à rompre les liens économiques et historiques évidents qui unissaient ces emprises aux collectivités territoriales qui les entouraient, ces fermetures de sites sont des opérations délicates, techniquement, réglementairement et humainement. Avant de générer des économies, la mise en place de la réforme se caractérise d'abord par des surcoûts.

Ainsi, les dépenses supplémentaires occasionnées par la fermeture d'une base aérienne sont évalués à trois millions d'euros, liés au transfert d'unités pérennes vers d'autres sites, ou aux aides à la mobilité et à la reconversion, dont le projet de loi de finances pour 2011 devrait nous permettre de poursuivre le financement.

Par ailleurs, les opérations d'infrastructure indispensables aux restructurations ainsi que les travaux liés à la modernisation des forces obèrent fortement les ressources globales disponibles, notamment celles consacrés au maintien en condition des infrastructures.

Bien que cela ne soit pas du ressort du BOP confié à l'armée de l'air, je ne peux que souligner cette année encore le déficit de financement, préjudiciable à la maintenance des installations opérationnelles, les plateformes aéronautiques, et de vie courante, le chauffage et l'étanchéité, qui ne peut qu'accélérer le sentiment de paupérisation des bases aériennes.

Alors que ces besoins annuels sont estimés à 175 millions d'euros, la ressource financière attendue est de 141 millions en 2011 et, selon les prévisions, elle pourrait être réduite à moins de 100 millions en 2012. Toutes ces mesures conditionnent la perception de la réforme par les personnels. Cette dégradation n'est pas conforme aux attendus de la réforme et participe à la fragilisation du moral.

Enfin, au chapitre des soutiens communs, les externalisations en cours de validation sur les bases aériennes de Saintes, de Grenoble pour l'alimentation et de Creil, au titre d'un contrat multiservices, serviront d'expérimentation dont il nous faut tirer les retours d'expérience avec le plus grand soin avant d'aller plus loin.

S'il est trop tôt pour tirer des bilans, l'analyse des premiers résultats dans le détail nous montrent que nous devrons être vigilants, notamment aux gains réels et à l'impact sur les capacités opérationnelles. Ce n'est pas une raison pour que nous n'avancions pas, mais avançons prudemment. Je souhaite également appeler votre attention sur la pression constante exercée sur les moyens de fonctionnement courant. Elle se traduira concrètement par une diminution supplémentaire de 2 %, se cumulant aux 18 % de réduction supportés depuis 2007.

Cette contrainte sur notre fonctionnement fait naître des risques sur la préparation opérationnelle, les conditions de vie et, finalement, le moral des aviateurs. Nos marges de manoeuvre sont d'autant plus ténues que notre plan de restructuration n'a pas encore produit ses effets, et que sa réussite est conditionnée par les financements ad hoc. J'en tire une conclusion partielle : toute pression supplémentaire sur le programme 178 viendrait aggraver cette situation. Il faut donc être très vigilant à tout amendement qui viendrait amputer ce programme.

Après avoir détaillé la mise en oeuvre de la réforme au travers de nos effectifs, de nos soutiens communs et de nos implantations, j'en arrive au maintien en condition opérationnelle de nos équipements, qui constitue une priorité au coeur de la transformation. Il s'agit d'une priorité, d'abord et avant tout, pour assurer toutes les missions qui nous sont confiées. Il s'agit d'une priorité, ensuite, pour assurer le niveau de préparation opérationnelle des forces aériennes, des équipages, à la hauteur de nos exigences opérationnelles, en pérennisant au mieux nos expertises et savoir-faire.

Une priorité, enfin, pour assurer la bonne gestion de nos flottes tout au long de leur vie. Et ce n'est pas tâche aisée à planifier. Ainsi, vous le savez, nos avions ravitailleurs approchent la cinquantaine, nos Transall suivent de près.

Notre aviation de chasse traverse une période de contraction importante (deux fermetures d'escadrons cette année, cinq depuis 2008), et la gestion de nos équipages n'en est que plus importante.

Pour 2010, l'activité des pilotes de chasse de l'armée de l'air sera contrastée. Elle est assez bonne en moyenne pour les pilotes expérimentés, qui prennent par aux opérations extérieures et aux exercices. Elle est moins satisfaisante pour les plus jeunes qui subissent les à-coups d'une disponibilité opérationnelle toujours fragile, et d'une conjoncture particulièrement défavorable, liée principalement à la mise au standard F3 de notre flotte Rafale, aux opérations de maintenance supplémentaire, et aux problèmes techniques rencontrés sur les moteurs de nos Mirage 2000, en bonne voie de résolution aujourd'hui avec l'industriel.

Nos pilotes d'hélicoptères sont confrontés peu ou prou à la même situation, liée pour partie à la faible disponibilité de nos Puma et Super Puma vieillissants, que ne compense pas une flotte trop peu nombreuse de Caracal EC725 spécialisés dans la mission RESCO, et qui n'est pas à la hauteur des ambitions que nous nous sommes fixés.

Quant à nos équipages de transport, la situation nous a obligés à réduire, pour la première fois et d'une manière réaliste, nos objectifs de 400 à 270 heures annuelles, avec pour conséquence des pertes de compétence qu'il nous faudra des années pour retrouver. Nous espérons les revoir progressivement à la hausse, en nous appuyant sur l'arrivée des CASA, à compter de septembre prochain, et des A400M à partir de 2013. En cause principalement, le maintien en ligne de flottes anciennes (C160, C135...), sur-employées pour pallier le retard de leurs successeurs (A400M, MRTT).

Ce combat pour le maintien en condition opérationnelle est donc difficile. D'autant que l'agrégat « entretien programmé » subit une pression constante, et reste malgré tout insuffisant, situation aggravée par les dérives de coût des rechanges, qui touchent aussi la maintenance des matériels nouveaux, avec une hausse constatée de 5% de 2006 à 2009, liée au coût de la main d'oeuvre et des matières premières, communément appelé le « coût des facteurs ».

Pour enrayer ce phénomène, nous avons pris plusieurs dispositions. La première, engagée depuis 2000, en réorganisant nos structures de manière approfondie. Le SIAé intègre dorénavant l'ensemble des composantes Air, Terre et Marine, et la SIMMAD voit son rôle d'acteur central de la maintenance aéronautique renforcé. J'en suis très satisfait. Cette réforme est bien en marche.

Le recentrage « Aquitaine » de ce pôle en 2012 nous permettra de calquer le regroupement mené par nos partenaires des industries aéronautiques et spatiales de défense, au sein du groupe Bordeaux Aquitaine Aéronautique et Spatial. Le rapprochement des acteurs militaires et civils, sous forme de plateaux techniques, a permis des gains réels et significatifs, par exemple sur l'entretien du M88 du Rafale. Ce n'est plus un élément dirimant sur le maintien en conditions opérationnelles du Rafale.

La seconde mesure tient à la généralisation de commandes pluriannuelles, grâce à des autorisations d'engagement adaptées, depuis 2009, qui permettent une meilleure visibilité à l'industrie. Citons celles passées avec Dassault puis SAFRAN en 2010, et celle que nous devrions finaliser avec Thales pour le Rafale en 2011, qui permettrait de se projeter sur l'avenir afin de réduire les coûts.

La direction de la SIMMAD, resserrée, trouvera naturellement sa place au sein du nouveau ministère à Balard, auprès des états-majors et de la DGA.

Pour clore ce chapitre sur une note positive, je dirais que nous commençons à toucher les dividendes de nos efforts, mais que nous sommes cependant au milieu du gué : nous ne pouvons, nous ne devons pas relâcher nos efforts en ce domaine crucial.

J'ajouterais qu'au titre de la gestion 2010, et de la mise en place délicate du système CHORUS, la SIMMAD ainsi que l'armée de l'air dans son ensemble ont su rattraper leur retard, et terminera l'année dans de bonnes conditions, en ayant liquidé la quasi-totalité des crédits provisionnés, grâce à un travail estival que je salue.

En contrepoint, la modernisation de notre armée de l'air est contrastée. Elle est inscrite dans le Livre Blanc et constitue un objectif de la profonde réforme engagée.

Cette modernisation suit en effet une direction maitresse : la polyvalence de nos équipements. Avec l'objectif d'optimiser les investissements, les compétences et tirer en permanence le meilleur parti de moyens moins nombreux, mais plus efficaces.

Les technologies disponibles aujourd'hui rendent cette polyvalence enfin tangible. Un besoin opérationnel précis ne nécessite plus, comme par le passé, une réponse spécifiquement dédiée.

A l'image du Rafale dans son standard F3, qui participe depuis le 1er juillet à la permanence de notre dissuasion nucléaire à partir de Saint-Dizier, grâce à l'ASMP-A (Air-Sol Moyenne Portée-Amélioré). Notre composante aéroportée est à présent rénovée pour la/les décennies à venir. Nous venons également de le déployer aux Emirats Arabes Unis dans le cadre d'un détachement permanent, et il devrait être envoyé pour la seconde fois au coeur des opérations, en Afghanistan, dans les mois qui viennent.

La polyvalence des systèmes d'armes modernes leur confère à la fois une souplesse qui garantit de pouvoir répondre à un scénario d'engagement pour lequel ils n'avaient pas été conçus initialement, et une longévité accrue, en retardant d'autant leur obsolescence.

Au côté de la montée en puissance des Rafale Air et Marine, le LBDSN prévoit la rénovation de nos Mirage 2000 D, afin de permettre aux flottes d'avion de chasse français de respecter, à l'horizon 2020, un format cohérent avec nos objectifs stratégiques.

Pour un coût unitaire limité, et alors que nous aurons achevé le retrait de nos autres flottes de Mirage F1 et 2000C, cette remise à niveau permettra au mirage 2000 D d'assurer aussi bien les missions de guerre électronique, avec le pod ASTAC équipant le F1CR en profitant d'un équipage double qu'offre le Mirage 2000D, de police du ciel, de frappes à longue distance ou d'appui feu au profit des troupes au sol, comme aujourd'hui.

Ainsi rénové, cet appareil aurait des performances en accord avec ses 15 années de potentiel, afin qu'il constitue le complément indispensable du Rafale au sein de notre aviation de combat.

La très récente revue stratégique de sécurité et de défense conduite par le Royaume-Uni, équivalent britannique du processus conduisant à notre LBDSN, consacre d'ailleurs pour la RAF une aviation de chasse qui s'appuiera, à l'horizon 2015-2020, à la fois sur des Tornado GR4 modernisés, des Eurofighter et des JSF. Ce choix leur permettrait ainsi conserver la quasi-totalité de leurs capacités opérationnelles, et de s'affranchir de faits techniques qui clouerait, même momentanément, une flotte au sol, comme ce fut récemment le cas pour les Typhoon européens et saoudiens.

Voilà ce qui sous-tend la rénovation du Mirage 2000D. Nous y tenons beaucoup pour garantir un format qualitatif et quantitatif suffisant de l'aviation de combat

Modernisation et polyvalence concernent bien entendu également nos flottes de transport. Notamment, une crise comme celle pour laquelle nous sommes intervenus à Haïti, et aujourd'hui au Sahel, si elles montrent tout l'intérêt du prépositionnement de nos forces, soulignent aussi ce que nous savions déjà : l'extrême fragilité de notre composante de transport tactique. La capacité de l'armée de l'air à projeter hommes et équipement dans des délais brefs à très longue distance ou au coeur même des opérations, où nos troupes sont engagées, souffre de faiblesses qu'accentue le retard du programme A 400M, pour lequel je renouvelle la confiance que j'avais exprimée devant vous il y a un an. Il s'agit cependant de ne plus perdre de temps.

Seule mesure palliative concrète, je l'ai évoquée, l'acquisition de huit Casa CN 235, permettra de limiter le suremploi, coûteux techniquement et humainement, de nos flottes actuelles, que nos techniciens « portent » littéralement à bout de bras, sans parvenir malheureusement à répondre complètement à la demande. Peut être l'acquisition de C130 d'occasion permettrait-elle de faire la « soudure » entre 2011 et 2016.

Des mesures supplémentaires qui seraient certainement indispensables pour permettre de pourvoir à l'ensemble des besoins de nos armées, en attendant cet avion prometteur et sans concurrent, qui sera demain l'outil de choix sur lequel s'appuiera le commandement européen de l'aviation de transport (EATC) créé le 1er septembre dernier à Eindhoven, et sur lequel nous fondons beaucoup d'espoir. C'est l'idée qu'ensemble on fera mieux que tout seul.

Ce déficit capacitaire en termes de projection sera également aggravé par le report de la commande d'A330 MRTT, avion ravitailleur en vol stratégique multi-rôle, déjà choisi par de nombreux pays. Particulièrement économique et polyvalent, il nous permettrait de remplacer trois flottes existantes : C135, A 340 et A 310. J'observe du reste que de nombreux pays, l'Australie, l'Arabie Saoudite, les Emirats, le Royaume-Uni, et peut être les Etats-Unis lorsqu'ils se seront décidés, ont acquis, ou sont en voie d'acquérir des A330 MRTT.

Car l'emploi de nos vénérables C135, qui approchent les 50 ans, ne se limite pas au ravitaillement en vol stratégique : trois d'entre eux viennent ainsi d'acheminer 25 tonnes de fret de première nécessité au Pakistan. Un seul MRTT aurait pu transporter sur la même distance 50 tonnes, d'une seule traite.

Renouveler notre composante de ravitaillement en vol est un impératif pour optimiser l'emploi de nos moyens aériens et pour projeter des forces. Au-delà des coûts élevés qu'une attente supplémentaire engendrerait, le risque de faits techniques majeurs ne peut être écarté, il nécessite bien sûr une vigilance accrue.

Je poursuivrai sur la voie de notre indispensable modernisation par un sujet qui me tient à coeur, celui des avions pilotés à distance, les drones. Depuis un peu plus de 18 mois, nos trois appareils ont déjà effectué près de 3 000 heures de vol, au profit des troupes au sol, françaises et alliées.

Avec le système Harfang, conçu en 1999, nos équipages sont désormais capables de veiller pendant 24 heures d'affilée au dessus du théâtre. Cette durée symbolique montre, s'il en était besoin, combien ces appareils sont parfaitement adaptés à des missions de surveillance de vastes étendues, sur les théâtres d'opérations mais aussi, au niveau interministériel, de recherche de personnes disparues, de protection de l'environnement, de prévention, pour peu que nous en possédions suffisamment.

Malgré l'arrivée d'un quatrième appareil à Cognac, il faut être conscient des limites du système intérimaire, dont les obsolescences, d'ores et déjà visibles, doivent nous conduire à prendre des décisions cette année, si nous voulons pérenniser cette capacité précieuse, incontournable aujourd'hui en termes de renseignement et d'anticipation.

J'achèverai ce chapitre par un point rapide sur le programme SAMP-T. A ce jour, trois sections ont été livrées à l'armée de l'air, et les premiers missiles ASTER 30 devraient l'être à la fin de l'année. Nous visons un premier niveau de capacité opérationnelle en septembre 2011, date à laquelle nous devrions être capables de défendre un site fixe contre une menace conventionnelle non balistique.

Nous n'aurons cependant franchi que la toute première étape conduisant à un système de protection anti-missile complet, et autonome, qui nécessiterait des moyens de veille et de détection adéquats qui restent à développer.

Au terme de cette intervention, je vous ai présenté mes motifs de satisfaction, mes priorités, mes préoccupations aussi, en termes d'effectifs, de soutien, de maintien en condition opérationnelle, de cohérence capacitaire et de modernisation.

S'agissant de la réforme, je dirais que nous sommes au milieu du gué. Les hommes et les femmes attendent de cette réforme qu'elle se traduise par une amélioration de leurs conditions de travail, mais aussi des capacités dont elles ont besoin pour remplir leurs missions.

L'efficacité démontrée de l'armée de l'air au quotidien, ses résultats reconnus à plus de 5000 km de la France, comme sur tous les théâtres d'opérations, sont le résultat d'une expertise, d'une cohérence de moyens qui exigent des années d'anticipation, de préparation, d'entraînement et d'investissements importants.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Pintat

du programme 146 « équipement des forces » - Je vous remercie pour vos propos extrêmement clairs. La déclaration de Londres du 2 novembre donne le signal de lancement d'une coopération franco-britannique dans le domaine des drones : drones MALE à l'horizon 2020 ; drones de combat à plus long terme, avec peut être un démonstrateur au cours de la prochaine LPM. Qu'attendez-vous de cette coopération, que ce soit pour satisfaire notre besoin en drones d'observation ou, plus largement, pour l'avenir de l'aviation de combat ? Par ailleurs, l'ASMP/A est en service sur le Rafale à Saint-Dizier depuis le 1er juillet. Lorsque l'ASMP/A est entré en service dans l'armée de l'air, vous avez dit à Istres, qu'il s'agissait, je vous cite : « d'une arme redoutable, qui ne connaît pas d'équivalent » et que sur le plan technologique, ce missile représentait un niveau où « seule, peut être, une nation nous égale dans le monde ». Est-ce que vous pourriez expliciter en quoi l'ASMP/A se distingue et ce qu'il va apporter à nos forces ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

du programme 146 « équipement des forces » - Tout ne va pas pour le mieux, mais vous faites avec ce que vous avez et vous le faites bien. Le drone Harfang : que fait-on pour la suite ? S'oriente-t-on vers un renouvellement de ce système ou bien vers un achat sur étagère ? Et derrière quoi : Talarion, Mantis, Neuron ? Ma deuxième question concerne le MRTT : nous avons bien compris que vous n'étiez pas satisfait des amendements adoptés à l'Assemblée nationale car ils ponctionnaient le programme 178. Mais quoiqu'il en soit, il y aura un retard : comment y pallier ? Enfin, la rénovation du Mirage 2000D, c'est une opération qui me tient particulièrement à coeur, puisque j'ai dans ma région la base de Nancy Ochey qui en est équipée, et dont les personnels effectuent un excellent travail en Afghanistan. Par ailleurs, la société Realmeca, particulièrement concernée par cette opération risque de se trouver en grande difficulté. Personnellement je n'aurai pas pris cette décision, mais je ne suis pas en charge du ministère de la défense. Un report définitif de ce programme serait quand même je crois très préjudiciable.

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Palomeros, chef d'état major de l'armée de l'air

Sur la coopération franco-britannique, cela fait plusieurs années que nous travaillons ensemble. Cette coopération s'est traduite très concrètement, notamment dans les systèmes de commandement et de conduite des opérations aériennes. Nous avons exercé conjointement le commandement de la force de réaction rapide de l'OTAN (NRF) grâce à une mutualisation des systèmes de commandement. Second élément que je livre à votre réflexion : l'armée de l'air a beaucoup contribué au rapprochement de nos forces. Nos forces aériennes seront capables de coopérer efficacement si le besoin s'en faisait sentir. Il y a bien une difficulté cependant. Elle concerne le futur avion F 35. C'est un sujet d'inquiétude, car nous n'avons pas encore d'éléments suffisants pour dire si l'interopérabilité sera forte ou pas. En outre, cet avion va repousser à un horizon très lointain toute perspective d'équipement en commun des forces aériennes françaises et britanniques.

Pour le reste, nos armées se connaissent. Elles ont des armes en commun. Je pense au missile Stormshadow que nous appelons Scalp, ou au futur missile Météor. Nos systèmes de préparation de mission sont communs. Nous pouvons harmoniser nos pratiques et se retrouver sur l'objectif, dans le cas de missions de vive force. Dans le domaine du transport aérien, l'A400M, équipement commun, sera un atout considérable. Nous avons des concepts similaires de soutien et nous allons nous efforcer d'en retirer le maximum, aussi bien du reste avec nos amis anglais qu'avec nos amis allemands, si cela est possible.

Concernant le ravitaillement en vol, le programme FSTA est un programme très coûteux, parce qu'il repose sur des financements innovants et une couverture de risques importants par le partenaire privé. En outre, la capacité finale sera réduite à neuf avions, plus cinq avions de complément, avec une disponibilité réduite. Nous allons essayer de travailler avec les Britanniques sur cette question, mais cela va être difficile. Notre objectif serait d'avoir un premier lot d'avions MRTT, qui est un avion qui existe déjà, afin d'améliorer nos propres capacités, de pouvoir travailler avec les Britanniques et de retirer du service les avions les plus anciens. Nous sommes bien conscients que nous n'allons pas commander quatorze avions d'un coup, raison de plus pour s'y prendre à l'avance et anticiper le problème. Cela fait plusieurs années que nous avons inscrits le besoin capacitaire dans les différentes lois de programmation. Il est temps d'en arriver au fait.

Sur les avions de combat, le futur du Rafale, c'est le Rafale ! Cet avion a un potentiel très important. L'arrivée du F 35 posera des problèmes d'interopérabilité. L'avenir plus lointain passe par les drones. Les drones de combat tout d'abord. Neuron est un démonstrateur technologique. Il faudra en faire un démonstrateur opérationnel. Quelle sera l'efficacité opérationnelle d'un tel type de système ? Personne n'en sait rien. Nous sommes favorables à l'étude ce type de solution sans réticence. Nous faisons Neuron avec six pays, nous devons pouvoir élargir le cercle de la coopération, ou bien réaliser un deuxième démonstrateur. Ce qui est certain, c'est qu'il n'y a pas, pour l'instant, de convergence entre les britanniques et nous, à court et à moyen terme, sur un avion de combat piloté.

Concernant l'ASMP/A, j'y vois en effet l'expression de l'excellence du savoir-faire de notre industrie, de nos forces et de nos ingénieurs aéronautiques. Nous avons mis les meilleurs ingrédients possibles, des industriels, de la DGA, de l'EMA pour obtenir ce système de combat. La fiche de spécification plaçait la barre très haute en termes de précision, de portée et de protection. C'est un système très robuste. Je ne peux pas en dire plus.

Je reviens aux drones d'observation, les drones MALE. Par quel bout prendre le problème ? Il faut revenir à l'expression du besoin opérationnel. Les forces terrestres sont très satisfaites des drones et des drones MALE en particulier. Néanmoins, elles peuvent faire la comparaison avec les autres systèmes déployés en Afghanistan, c'est-à-dire les systèmes américains et en particulier les drones Reaper qui sont plus gros et dont les capteurs donnent des images plus précises. La question est : peut-on raisonnablement espérer prolonger la vie des drones Harfang ou est-ce illusoire ? Nos capteurs électroniques seront bientôt frappés d'obsolescence. Est-ce que les industriels - EADS et IAI - avec qui nous travaillons dans les meilleures conditions, peuvent moderniser ce système dans des coûts, des délais et des conditions techniques acceptables ? J'en serai très heureux. Mais pour l'instant nous n'avons pas eu de réponse précise. Mais ce n'est pas à moi d'apprécier la réponse dans sa dimension financière et industrielle. Si malheureusement la réponse était négative, le fait est que nous risquons une rupture capacitaire et qu'il faudra acheter sur étagères. Il nous faudrait en tout état de cause prendre une décision avant la fin de l'année. Je n'ai pas de « préférence ». Les drones sont utiles et il faut à tout prix éviter une rupture capacitaire.

La rénovation du Mirage 2000D concernait sa capacité de recueil d'informations électroniques. C'est important pour préparer l'ordre de bataille des systèmes radar adverses. Le député Viollet a souhaité que l'on fasse, au minimum, cette rénovation, grâce aux pods ASTAC. Cela évitera un vide capacitaire lié à l'arrêt d'utilisation de ce capteur avec le retrait du service de la flotte Mirage F1. Plus généralement, concernant les travaux de rénovation du Mirage 2000D, les crédits de levée des risques sont toujours là. La décision a été budgétairement repoussée. Ce que je demande, c'est que cette décision, qui n'est plus seulement une décision budgétaire, soit prise au même niveau que celle qui avait décidé, lors du Livre blanc, la rénovation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Après la conclusion de l'accord de défense franco-britannique il apparait clairement que le futur drone MALE, à l'horizon 2020 sera une évolution du MANTIS et conçu avec nos partenaires britanniques. Pour la période transitoire, 2013-2020, deux solutions s'offrent à vous : la modernisation des quatre drones Harfang dont vous disposez et l'achat de deux ou plusieurs systèmes supplémentaires conçus par les Israéliens et améliorés par EADS, ou bien l'achat sur étagères du drone Reaper à General Atomics avec la francisation et donc l'autonomie des systèmes embarqués. Au-delà des choix politiques ou financiers, pouvez-vous nous donner l'avis de l'utilisateur sur le terrain ?

Jean-Paul Palomeros, chef d'état-major de l'armée de l'air - Nous connaissons bien les systèmes qui existent aujourd'hui, le Harfang et le Reaper. Soit dit en passant, les Israéliens continuent à avancer et ne s'endorment pas sur leurs lauriers. S'agissant des systèmes américains, l'US Air Force est prêt à nous aider, j'en ai reçu les assurances de mon homologue. Est-ce cela se traduirait par une perte d'autonomie ? Je n'en ai pas le sentiment. Les Britanniques ont confirmé, après leur Defense Review, l'achat de cinq Reaper en sus des cinq qu'ils ont déjà. Ils les commandent depuis le Nevada, au sein de l'US Air Force. Les Italiens, depuis longtemps, ont acheté des drones Predator. Ils les utilisent de façon autonome et cela semble leur donner satisfaction. Nous avons, du reste, dû acheter du matériel militaire américain chaque fois que nos industriels n'étaient pas en mesure de nous fournir l'équivalent. Je pense aux AWACS ou aux avions Hawkeye. Personnellement, je n'ai pas d'opposition de principe à l'achat de drones Reaper. Cela permettra une véritable interopérabilité européenne. D'autant que les coûts sont inférieurs, en partie à cause de la parité euro-dollar. L'utilisateur serait très satisfait. Dans le même temps, le drone Harfang permettrait de faire travailler les industriels européens et j'en serais également très satisfait. La décision ne m'appartient pas.

Le président de Rohan et mon collègue Daniel Reiner viennent d'évoquer un problème qui nous tient à coeur : la rénovation des Mirage 2000D qui ne figure pas dans le PLF 2011. On parle moins d'une autre décision de report qui concerne le système de commandement et de conduite des opérations aériennes - SCCOA4 - indispensable pour les forces aériennes. Pourriez-vous nous dire quel est l'impact de ce retard. Par ailleurs, depuis 2006, l'hélicoptère EC725 Caracal d'Eurocopter est opérationnel dans nos forces. Cet hélicoptère dont tout le monde reconnaît les qualités dans le domaine de la RESCO et du transport des forces de combat, a été livré en petit nombre : une quinzaine dont six pour l'armée de l'air. Cet appareil qui rend des services exceptionnels tant en Afghanistan qu'en métropole nécessite d'être conforté. Pourriez-vous nous parler de l'évolution de ce programme.

Jean-Paul Palomeros, chef d'état-major de l'armée de l'air - S'agissant du SCCOA4, il faut saluer nos prédécesseurs qui ont eu la sagesse de prévoir un programme d'ensemble évolutif, cohérent et pleinement compatible avec le système OTAN. L'étape 4 est très importante. Il s'agit de la rénovation des systèmes de radar de détection aérienne, ce que l'on appelle la détection primaire. Contrairement aux radars civils qui fonctionnent en mode coopératif, ces radars militaires détectent tout ce qui vole au-dessus du territoire national, qu'il se soit déclaré ou pas. Ils assurent donc la souveraineté de notre espace aérien. Mais ils datent des années 1960 et nécessitent un personnel nombreux et aux compétences de plus en plus rares. Il faut donc les renouveler. Là encore, on ne pourra pas tout faire d'un coup. Il faut commencer par la façade méditerranéenne. Ce sont les radars les plus anciens, sur la façade la plus critique. Il faudrait que l'on effectue cette rénovation par lots assez rapidement, car le risque d'une rupture capacitaire existe.

Pour ce qui est des hélicoptères, le Caracal EC725 est une évolution du Super Puma développée pour les missions dites de « combat search and rescue » pour l'exfiltration des pilotes tombés derrière les lignes ennemies, mais pas seulement. Nous en sommes très satisfaits et nous sommes très sollicités par des pays alliés désireux d'acquérir aussi bien nos savoir-faire, que d'acheter les appareils d'Eurocopter. Nous en avions acquis six pour l'armée de l'air, et le commandement des opérations spéciales en avait également acquis. Ce qui est une excellente chose et permet de développer les synergies. Le problème est que nous n'en avons pas suffisamment pour accomplir les missions qui nous sont confiées. C'est pour cela que le plan de relance en avait prévu cinq supplémentaires, dont trois pour la DGSE et deux pour l'armée de l'air. Ces deux appareils pourraient toutefois être préemptés pour l'export. Je serais tenté de dire que cet hélicoptère est victime de son succès.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

L'armée de l'air a eu raison de faire vite sur la deuxième composante de la force de dissuasion. Je ne suis pas certain que cette deuxième composante aurait survécu aux mesures d'économies actuelles. Sur les exportations, le chef d'état-major des armées, l'Amiral Guillaud, vient d'effectuer un déplacement en Inde pour y préparer la visite du Chef de l'Etat. Savez-vous si l'accord sur la rénovation des Mirage a des chances d'être conclu et quid de la vente de nos précieux Rafale ?

Jean-Paul Palomeros, chef d'état-major de l'armée de l'air - S'agissant de la rénovation de la composante aéroportée, il ne s'agit pas d'une opportunité. C'est un travail de longue haleine qui s'est étalé sur deux décennies et qui a survécu à plusieurs alternances politiques. Du reste, la seconde composante était historiquement la première. Elle a été voulue par le général de Gaulle. Sa rénovation a été conduite dans le respect des coûts, des délais, et des exigences techniques, ce qui mérite d'être souligné. Pour ce qui est du Rafale, nous avons fait la démonstration de l'efficacité du Rafale partout où cela était nécessaire. Nous venons d'effectuer des manoeuvres aux Emirats Arabes Unis dans le cadre de l'exercice ATLC. L'avion a démontré sa parfaite efficacité et rien ne vaut la démonstration faite sur place auprès des clients. Ceci étant, l'exportation d'un avion de combat est extraordinairement compliquée, et comporte des paramètres qui ne sont pas que technologiques. Il y a la confiance réciproque entre l'acheteur et le vendeur, la stratégie d'ensemble et les retours industriels. Le Rafale est en opérations. Il montre nos capacités et nos savoir-faire. Il y va de notre intérêt collectif qu'il s'exporte et cela n'est pas seulement un problème de vase communiquant entre cette flotte et la rénovation du 2000D. Le Rafale est un avion incroyablement efficace et polyvalent. Nous l'avons déployé cet été au Moyen Orient dans le cadre d'une campagne « temps chaud » destinée à tester sa capacité de résistance aux températures élevées, par plus de 50° à l'ombre. Tout cela a donné d'excellents résultats : sa disponibilité opérationnelle était de 98 %. Ce ne sont donc pas les performances du Rafale qui sont en cause. Mais plutôt le poids des Etats-Unis présents sur tous les marchés et les questions industrielles et financières.

La commission entend ensuite le général Jacques Mignaux, directeur général de la gendarmerie nationale sur le projet de loi de finances pour 2011 (mission Sécurité).

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Nous sommes très heureux de vous accueillir pour la première fois, Mon Général, devant la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, pour cette audition consacrée aux crédits de la gendarmerie nationale dans le projet de loi de finances pour 2011.

Diplômé de Saint-Cyr, vous avez effectué toute votre carrière militaire au sein de la gendarmerie, alternant des postes de commandement et des postes à la direction générale. Vous avez également occupé des fonctions de conseiller auprès de différents ministres de l'intérieur, dont l'actuel Président de la République. Major général depuis l'été 2008, vous avez été nommé directeur général de la gendarmerie nationale, le 9 avril dernier, en remplacement du général Roland Gilles.

Avant de nous présenter les grandes lignes du budget de la gendarmerie nationale pour 2011, peut être pourriez vous, Mon Général, nous dire quel bilan vous tirez du rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l'intérieur et de la loi du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale ?

Comme nous le savons tous ici, le contexte budgétaire du projet de loi de finances pour 2011 est particulièrement difficile et la gendarmerie nationale n'échappe pas à l'effort général de maîtrise des dépenses publiques.

Pour autant, la sécurité reste une préoccupation majeure des Français et cette préoccupation se traduit dans les moyens consacrés par le gouvernement à la police et à la gendarmerie, qui sont en progression sur la période 2011-2013, en particulier au regard de la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2), qui a fait l'objet d'une première lecture à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Nous aimerions donc connaître les grandes lignes du budget de la gendarmerie pour 2011 et les perspectives pour la période 2011-2013.

Nous souhaiterions également vous entendre sur la préservation du caractère militaire de la gendarmerie, auquel nous sommes tous ici particulièrement attachés.

Comme vous le savez sans doute, la revalorisation salariale dont bénéficient les gendarmes a suscité certains remous au sein des autres armées, notamment de l'armée de terre, au moment où les armées sont engagées dans une réforme très exigeante.

D'un autre côté, certains syndicats policiers ont dénoncé les avantages dont bénéficieraient, selon eux, les gendarmes, en invitant même les policiers à intégrer la gendarmerie.

Nous souhaiterions donc connaître votre sentiment sur ce sujet.

Enfin, peut être pourriez-vous nous dire un mot de l'action des gendarmes engagés sur les théâtres d'opérations extérieures, notamment en Afghanistan.

Lors d'un récent déplacement aux Nations unies, on nous a fait savoir que la France se montrait réticente à la participation de gendarmes à des opérations extérieures.

Qu'en est-il exactement ?

Voilà, Mon Général, quelques questions d'ordre général, mais le rapporteur du budget de la gendarmerie, notre collègue Jean Faure, ainsi que d'autres collègues, auront certainement d'autres questions à vous poser, à l'issue de votre exposé liminaire.

Général Jacques Mignaux - Comme l'ensemble des composantes du ministère qui est désormais le sien, et comme d'ailleurs l'ensemble des ministères, la gendarmerie nationale contribue à l'effort demandé pour diminuer la dépense publique. Il est de ma responsabilité de préserver la capacité opérationnelle de la gendarmerie dans une tendance au resserrement budgétaire.

Je n'oublie pas, naturellement, que ma responsabilité est aussi de conforter notre intégration au sein de la communauté de la sécurité intérieure, sans préjudice de notre appartenance à la communauté militaire.

La gendarmerie n'a pas changé de nature. Elle doit toujours faire face aux problèmes de sécurité en donnant une réponse pragmatique et modulée, adaptée aux spécificités de chaque bassin de vie.

Avant d'évoquer le projet de loi de finances pour 2011, je souhaite revenir sur nos principaux chantiers.

L'intégration de la gendarmerie au ministère de l'intérieur s'est passée dans de bonnes conditions, et dans le respect du cadre que vous avez tracé en votant la loi du 3 août 2009. Je l'estime désormais réalisée.

En prenant appui sur la future loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite LOPPSI 2, qui doit donner aux deux forces de sécurité intérieure les moyens d'accroître leur performance dans la lutte contre l'insécurité, une nouvelle étape sera franchie dans notre coopération par l'approfondissement de la mutualisation des moyens logistiques et des capacités de soutien.

En matière de synergies opérationnelles et au terme d'arbitrages justes et équilibrés, des structures communes, composées de gendarmes et de policiers, ont été mises en place à chaque fois que le besoin s'en faisait sentir. La gouvernance relève des deux directeurs généraux.

Certaines sont rattachées organiquement au directeur général de la police nationale, comme la direction de la coopération internationale, qui doit renforcer la cohérence et la visibilité de l'action internationale du ministère, ou encore l'unité de coordination de la sécurité dans les transports en commun.

D'autres me sont organiquement rattachées, comme le Service des technologies et des systèmes d'information de la sécurité intérieure, l'Unité de coordination pour la lutte contre l'insécurité routière (UCLIR) ou encore l'Unité de coordination des forces d'intervention (UCoFI), qui coordonne le GIGN de la gendarmerie et la Force d'intervention de la police nationale (FIPN), qui regroupe notamment le RAID.

Enfin, lorsque la création de structures communes n'apparaissait pas comme la meilleure option, nous avons travaillé différemment : dans le domaine du renseignement d'ordre public ou information générale, par exemple, dans la mesure où il s'agissait d'une mission partagée par les deux forces, nous avons opté pour un lieu de synthèse unique (le service départemental d'information générale - SDIG) qui reçoit l'ensemble des renseignements obtenus par l'une ou l'autre force et rédige une synthèse départementale, sous double timbre, qu'il transmet au préfet et aux deux responsables des policiers et des gendarmes du département.

Au plan départemental comme au plan central, l'affectation de gendarmes dans ces structures a permis d'améliorer la circulation de l'information.

En ce qui concerne la condition des gendarmes et le dialogue interne, cette intégration s'est déroulée dans le respect des équilibres - le symbole de cet équilibre étant le fait que le ministre de l'intérieur co-préside désormais le Conseil de la fonction militaire gendarmerie (CFMG) et reçoit, lors de chaque session, l'ensemble du conseil.

J'ai veillé à faire vivre la notion de parité globale de traitement et de carrières entre les gendarmes et les policiers : le Plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE), qui constitue le pendant du programme « corps et carrières » de la police nationale, qui a été lancé début 2005, sera achevé fin 2012. Vous avez parlé de revalorisation salariale, nous travaillons effectivement à la revalorisation de la grille indiciaire des sous-officiers de gendarmerie, suite à l'adaptation de la nouvelle grille indiciaire de la catégorie B au corps d'encadrement et d'application de la police nationale. Comment pourrait-il d'ailleurs en être autrement ? Je rappelle qu'au début de cette réflexion la question a été posée au ministère de la défense pour connaître sa position par rapport au nouvel espace statutaire. La réponse n'est pas de mon ressort.

Au sujet de l'éventuelle transposition aux sous-officiers des autres armées de la grille indiciaire du corps d'encadrement et d'application de la police nationale, il convient de rappeler que le Premier ministre a validé l'existence d'une grille indiciaire spécifique à la gendarmerie, conformément aux dispositions de la loi du 3 août 2009.

Pour ma part, j'insiste sur le fait que la parité entre la police et la gendarmerie est bien une parité globale, et en aucun cas une parité stricte. En effet, l'objectif n'est pas de rechercher l'identité qui résulterait d'une comparaison étroite point par point, mais un équilibre dynamique, prenant en compte la totalité des paramètres sur l'ensemble de la carrière, entre les fonctionnaires de la police nationale et les militaires de la gendarmerie. Cette parité globale ne peut donc s'envisager que dans le respect des règles de gestion propres à la gendarmerie et de son statut militaire dans tout ce qu'il implique (mobilité, disponibilité, déroulement de carrière, logement en caserne, etc.)

Parallèlement, nous travaillons à la modernisation du dialogue interne avec la concentration du nombre des acteurs et la mise en place de conseillers du commandement au niveau groupement et région.

S'agissant de la participation de la gendarmerie aux opérations extérieures (OPEX), l'intégration de la gendarmerie au ministère de l'intérieur ne remet nullement en cause sa participation aux missions de défense.

J'en veux pour preuve l'engagement des gendarmes français en Afghanistan. Après 6 mois de préparation intense, plus de 170 gendarmes français sont engagés dans la zone de responsabilité de la brigade La Fayette.

Ils remplissent une mission de tutorat et d'accompagnement auprès de la police afghane, l' « Afghan Uniform Police » (AUP). Nous avons actuellement 5 unités (« Police operational mentoring and liaison team - POMLT) en Kapisa et Surobi. Simultanément, nous sommes investis dans la formation initiale de l'« Afghan National Civil Order Police » -ANCOP, qui s'apparente à la gendarmerie mobile, dans un centre au nord de l'Afghanistan, à Mazar-e-Shariff, et prochainement nous renforcerons notre dispositif de formation, avec l'envoi de quarante gendarmes supplémentaires, dans un centre qui s'ouvrira dans le Wardak au sud-ouest de Kaboul. Loin de faire preuve de réticence, la gendarmerie française renforce son engagement sur ce théâtre.

Mes échanges réguliers et étroits avec le chef d'état-major des armées confirment la qualité de l'action de nos gendarmes aux côtés des autres militaires français.

Si l'on en juge par ailleurs, selon les autorités afghanes et les responsables militaires américains, le travail des gendarmes français est unanimement apprécié.

Au total, la gendarmerie déploie plus de 700 militaires en opérations extérieures, notamment en Afghanistan, en République de Côte d'Ivoire, à Haïti, en Géorgie et au Kosovo.

On ne peut donc pas parler de réticence au déploiement de gendarmes en opérations extérieures.

En revanche, je veille à ce que les gendarmes français déployés en opérations extérieures soient engagés sur des missions qui correspondent à notre coeur de métier et sur des opérations qui ne se prolongent pas dans la durée.

J'en viens maintenant à ce qui m'amène devant vous aujourd'hui, le projet de budget de la gendarmerie nationale pour 2011.

Le budget pour 2011 du programme 152 s'inscrit clairement dans la politique générale de maîtrise des dépenses publiques, en augmentant, en crédits de paiement, hors dépenses de personnels et pensions, de 0,4 % par rapport à l'année 2010.

En 2011, le plafond d'emplois pour la gendarmerie sera de 97 198 équivalents temps plein travaillés (ETPT). Par rapport à l'année précédente, la baisse est de 957 ETPT.

Dans la gestion des ressources humaines, le volume des effectifs présents au 31 décembre 2010 sera reconduit de manière quasiment identique au 31 décembre 2011 en ne baissant que de 96 effectifs physiques (ETPE).

Pour y parvenir, la gendarmerie recrutera 9 108 personnels.

Ces recrutements viendront compenser la quasi-totalité des départs, estimés à 9 204 personnels.

En 2011, nous poursuivrons un mouvement amorcé en 2008, qui vise à recentrer les gendarmes sur leur coeur de métier. C'est pourquoi 482 postes d'officiers et de sous-officiers de gendarmerie affectés en état-major seront transformés en 105 postes d'officiers et de sous-officiers des corps de soutien et 377 postes de personnels civils. Ce plan de transformation de postes s'échelonne sur dix ans et, à échéance 2017, la gendarmerie aura doublé la part de ses personnels civils et militaires de soutien en portant leur nombre total aux alentours de 10 000.

Les crédits de masse salariale hors pensions n'intègrent pas d'hypothèse de revalorisation du point d'indice de la fonction publique pour 2011.

Ils augmentent du fait de la mise en oeuvre des mesures catégorielles suivantes :

- la nouvelle grille indiciaire des militaires à hauteur de 7,36 millions d'euros ;

- une annuité du PAGRE rénové pour 23,31 millions d'euros ;

- enfin, la grille indiciaire catégorie B, appliquée au même rythme que dans la police nationale, avec 15,15 millions d'euros.

Toujours dans le cadre de la masse salariale, les dotations de la réserve opérationnelle sont confirmées en 2011 à hauteur de ce qu'elles étaient en 2010, avec 44 millions d'euros.

Enfin, j'appellerai votre attention sur le surcoût généré par les OPEX.

Comme en 2010, le programme 152 est doté à hauteur de 11 millions d'euros pour les dépenses de personnel relatives aux OPEX. Cette année, la gestion fait apparaître une dépense de près 26 millions d'euros sur ce poste et ce surcoût devrait être résorbé par un redéploiement des dépenses de personnel.

Dans un contexte de diminution des crédits hors dépenses de personnel, j'ai fait le choix de sanctuariser les crédits de fonctionnement courant des unités. Mon objectif est en effet de leur permettre de mener leurs missions opérationnelles et ainsi de conserver le niveau de performance du programme.

D'un montant de 968,7 millions d'euros, le fonctionnement courant s'accroît de 3,6 millions d'euros par rapport à la loi de finances de 2010. Cette hausse est uniquement liée aux loyers, en raison de l'évolution des indices immobiliers et des livraisons de casernes, et ceci malgré les suppressions d'effectifs et les transformations d'emplois.

Pour ce qui concerne les autres dépenses, les montants inscrits en loi de finances de 2010 ont été reconduits : le fonctionnement des unités opérationnelles est déjà sous tension et ne peut pas être réduit davantage.

Là aussi, j'accorderai une importance particulière à la couverture des besoins OPEX. En 2010, les dépenses liées aux OPEX s'élèveront à 17 millions d'euros hors dépenses de personnel, pour une dotation de 4 millions d'euros.

Pour préserver le fonctionnement opérationnel, j'ai donc dû contraindre l'investissement, c'est pourquoi la dotation en crédits de paiement pour 2011 (262 millions d'euros) se situe nettement en retrait par rapport à la loi de finances de 2010, avec une baisse de -13%. Elle se traduit par une contraction de la capacité d'investissement de la gendarmerie en 2011.

Seront toutefois préservés :

- le maintien en condition opérationnelle des moyens aériens, ainsi que celui des systèmes d'information et de communication ;

- le renouvellement des équipements indispensables à la sécurité, l'intervention et l'instruction des personnels (munitions, protections individuelles, paquetages « écoles », matériels « GIGN », etc.).

D'ici à fin 2011, sont prévues d'être livrées les nouvelles tenues motocyclistes et de maintien de l'ordre, plus de 700 voitures opérationnelles et 600 motocyclettes routières.

La LOPPSI 2 nous permettra d'investir 8 millions d'euros en autorisations d'engagement dans les moyens à haute valeur technologique (visioconférence, dématérialisation des procédures judiciaires, radios embarquées avec géolocalisation des patrouilles et vidéoprotection). D'ici à fin 2011, ce seront plus de 160 véhicules qui seront équipés du système LAPI-vidéo embarqué.

Afin de généraliser la pratique d'une expertise de masse, de nombreux appareils perfectionnés de police technique et scientifique seront déployés pour un montant de 2 millions d'euros également inscrits en LOPPSI 2.

Outre l'équipement de 30 véhicules d'identification criminelle, ces crédits permettront d'acquérir 100 nouveaux équipements de révélation d'empreintes, 100 kits de protection des scènes de crime, 76 « crimescopes » portatifs ainsi que des kits de prélèvement de traces ADN sur les scènes de crime

La LOPPSI 2 nous permettra de lancer des opérations de construction domaniale à hauteur de 55 millions d'euros en autorisations d'engagement, principalement pour l'installation du pôle judiciaire de la gendarmerie nationale à Pontoise.

En matière immobilière, notre effort portera principalement sur la maintenance. Avec 54 millions d'euros de crédits de paiement, nous pourrons ainsi poursuivre la mise aux normes de nos emprises domaniales et améliorer les conditions de travail et de vie des personnels.

Enfin, les dotations au titre des interventions s'inscrivent dans la continuité de 2010 afin de maintenir à un rythme dynamique les opérations locatives (64 projets pour 628 unités logement).

Malgré la contrainte financière, ce budget préserve l'avenir et me donne des outils, tant en termes de fonctionnement que de management, pour atteindre la performance qui nous est assignée.

Toute la gendarmerie sera donc à l'oeuvre afin de faire reculer la délinquance et traduire concrètement sur le terrain l'effort financier que l'Etat entend consacrer à la sécurité de tous les Français.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

Je souhaiterais, Mon Général, vous poser quatre questions.

Ma première question porte sur la réforme de la concertation au sein de la gendarmerie, que vous avez déjà évoquée dans votre intervention.

Dans le cadre des conclusions du groupe de travail sur l'avenir de la gendarmerie nationale, que je présidais, nous avions estimé qu'une réforme du système de concertation de la gendarmerie nationale était indispensable dans le contexte du rattachement au ministère de l'intérieur mais que cette réforme devait absolument préserver le caractère militaire de la gendarmerie et écarter toute tendance à la « syndicalisation » de cette force armée.

Pourriez-vous, Mon Général, nous présenter de manière plus détaillée la réforme de la concertation que vous avez engagée récemment, avec l'arrêté du 23 juillet 2010, et en particulier nous préciser la manière dont cette réforme préserve le caractère militaire de la gendarmerie ?

Ma deuxième question porte sur les crédits de la gendarmerie pour 2011 et sur la période 2011-2013.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, les crédits consacrés à la gendarmerie progressent de 1,28 % alors que ceux destinés à la police nationale augmentent de 3,86 %. Comment justifiez-vous cet écart ?

Par ailleurs, l'analyse des crédits, hors dépenses de personnel, de la loi de programmation triennale fait apparaître une diminution de 482 millions d'euros en crédits de paiements, soit une baisse de 12 %, pour la gendarmerie nationale, sur la période 2011-2013 par rapport aux montants indiqués dans la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2). Comment expliquez-vous cette différence ?

Ma troisième question porte sur les réductions des effectifs de la gendarmerie

L'application de la règle de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite devrait se traduire par la suppression de 957 emplois en 2011 et de près de 3000 emplois sur la période 2011-2013.

Alors que la gendarmerie a déjà rationalisé ses écoles et supprimé de nombreux postes au sein des états-majors ou des escadrons de gendarmerie mobile, quels sont les postes qui devraient être supprimés à l'avenir ?

Le maillage territorial assuré par les brigades territoriales sera-t-il préservé ?

Le ministre de l'intérieur a annoncé récemment la suppression des tâches indues, comme les transfèrements judiciaires par exemple, qui mobilisent un nombre important de gendarmes et de policiers, ce que notre commission avait appelé de ses voeux à de nombreuses reprises par le passé. Pourriez-vous nous apporter des précisions sur ce sujet ?

Enfin, ma dernière question porte sur l'immobilier et les grands programmes d'équipement, comme le renouvellement des véhicules blindés et des hélicoptères

En raison de la forte diminution des crédits d'investissement, plusieurs programmes, comme l'immobilier ou le renouvellement des véhicules blindé et des hélicoptères de la gendarmerie, ont été différés ces dernières années.

Or, 70 % du parc domanial de la gendarmerie a plus de 25 ans et certains logements ont un état de vétusté préoccupant.

De même, l'état des véhicules blindés est préoccupant, puisque leur taux de disponibilité n'était que de 71 % en 2007.

Enfin, le remplacement de la flotte des hélicoptères de type Écureuil, dont certains datent des années 1970, s'impose au regard de la réglementation européenne, qui interdit le survol des zones urbaines aux appareils monoturbines.

J'aimerais donc connaître votre sentiment sur l'immobilier et les grands programmes d'équipement au regard de la diminution des crédits d'investissement.

Général Jacques Mignaux - Concernant tout d'abord votre première question relative à la réforme de la concertation, je rappellerai que la gendarmerie est d'abord une « force humaine », la force de la gendarmerie reposant avant tout sur les militaires et les personnels qui la composent. C'est la raison pour laquelle je suis particulièrement attentif à tout ce qui concerne la condition des personnels dans son ensemble.

En matière de dialogue interne, l'arrêté du 23 juillet 2010 relatif à la participation et la circulaire n°86 000 en date du 23 juillet 2010 définissent le cadre d'un dialogue rénové à travers la mise en place de nouvelles instances locales de participation.

Ces deux textes et leur mise en oeuvre sont le résultat de nos expériences, de la maturité acquise et d'une réflexion qui a associé l'ensemble des acteurs de la concertation.

Dans le respect de l'identité et des valeurs de la gendarmerie, elle offre une chance d'enrichir et d'approfondir le dialogue interne.

Concrètement, le nombre des acteurs de la concertation devrait passer de 2 000 présidents de catégorie à 800 présidents et vice-présidents des personnels militaires. Ce changement améliorera leur visibilité et leur donnera les moyens de remplir cette fonction. Nous mettrons en place, aux côtés des commandants de région et de groupement, un personnel conseiller ou un référent, qui contribuera à faire vivre la concertation. Je crois que beaucoup des problèmes peuvent être réglés à cette échelle sans avoir à remonter au niveau central.

Cette réforme du système de la concertation préserve le caractère militaire de la gendarmerie. La gendarmerie continuera de siéger au sein des instances de concertation, avec les autres armées, au sein du Conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM), ce qui est fondamental pour la préservation de la militarité de l'arme, et du Conseil de la fonction militaire gendarmerie (CFMG), que copréside désormais le ministre de l'intérieur. Celui-ci tient d'ailleurs, lors de chaque session, à recevoir l'ensemble du conseil et à s'exprimer devant lui, ce qui n'était pas toujours le cas précédemment. Je me félicite de cet engagement car il crédibilise le CFMG. Il ne s'agit en aucune manière de transposer le système syndical au sein de la gendarmerie.

Concernant ensuite l'enveloppe globale des crédits, il est vrai que les crédits de la gendarmerie, dans le cadre de la loi de programmation triennale sur la période 2011-2013, sont en diminution de 482 millions d'euros en crédits de paiement, soit une baisse de 12 %, par rapport aux arbitrages hors titre 2 rendus en mars 2009 dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2). La gendarmerie participe ainsi à l'effort de réduction de la dépense publique, même s'il est important de préserver le fonctionnement courant des unités.

A cet égard, la police nationale connaît la même situation que la gendarmerie et la différence que vous avez mentionnée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011 s'explique par des modifications de périmètres.

S'agissant de l'évolution des effectifs, la gendarmerie participe également à l'effort de réduction des personnels, au titre du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.

Ces dernières années, nous avons ainsi supprimé quatre écoles de gendarmerie sur huit, ce qui a permis d'économiser 450 ETPT, pour le même service, de rationaliser les fonctions de soutien et les états-majors ou encore de supprimer huit escadrons de gendarmerie mobile, auxquels s'ajouteront huit escadrons supprimés d'ici l'été prochain, soit quinze escadrons sur cent vingt-trois au total.

Compte tenu du nombre d'interventions outre-mer et sur les théâtres d'opérations extérieures, il me paraît difficile d'aller au-delà concernant la gendarmerie mobile.

Nous avons également diminué la présence de gendarmes dans les zones de compétence de la police nationale, même si cette présence reste parfois nécessaire, comme à Paris par exemple, compte tenu de la présence d'une forte communauté militaire.

Enfin, la suppression des escadrons de gendarmerie mobile a permis de transformer 750 postes de gendarmes mobiles en gendarmes départementaux, ce qui a permis de renforcer les brigades territoriales dans les départements confrontés à une forte hausse de la population et de la délinquance.

En définitive, en matière de personnels, on ne trouve plus aujourd'hui de niches et la gendarmerie se retrouve « à l'os ». Ainsi, on ne trouve qu'un seul personnel de soutien pour douze personnels opérationnels, contre une moyenne de un pour huit au sein de l'Etat.

Compte tenu de la présence de la gendarmerie sur le territoire et de la proximité avec la population, il n'est pas envisagé de toucher au « maillage territorial », assuré par les brigades territoriales.

Dans ce contexte, je ne vous cache pas qu'il sera difficile pour la gendarmerie de poursuivre sur une longue période la politique de non-remplacement d'un personnel sur deux partant à la retraite.

La gendarmerie peut toutefois compter sur le renfort des réservistes opérationnels et a mis en place des dispositifs permettant de renforcer ses unités, notamment en période estivale, sur le littoral ou en zone de montagne, grâce au renfort des réservistes, de gendarmes mobiles ou départementaux ou encore d'élèves des écoles.

Par ailleurs, la suppression des tâches indues, comme les transfèrements judiciaires, les gardes-statiques ou les procurations de vote, devraient permettre de renforcer la capacité opérationnelle de la gendarmerie et la présence de gendarmes sur le terrain.

Conformément à l'accord conclu entre le ministère de l'intérieur et le ministère de la justice, à partir du 1er janvier 2011 et sur une période de trois ans, la police et la gendarmerie devraient transférer à l'administration pénitentiaire la responsabilité des transfèrements judiciaires et 800 ETPT correspondants pour une tâche évaluée à 1 200 ETPT. Ces transfèrements judiciaires présentaient non seulement l'inconvénient de mobiliser un nombre important de gendarmes et de policiers, mais surtout de désorganiser profondément le fonctionnement des unités. Les policiers et les gendarmes continueront cependant d'assurer les transfèrements des détenus les plus dangereux.

Les gardes dans les unités hospitalières devraient également relever à l'avenir de l'administration pénitentiaire.

Enfin, nous continuons de réduire les gardes-statiques, comme au ministère de la justice par exemple, où dix-huit gardes républicains étaient employés, ce qui représente l'équivalent des effectifs de trois brigades territoriales de six gendarmes.

Concernant les véhicules blindés et les hélicoptères, la situation budgétaire ne nous permet pas de renouveler notre matériel comme nous le souhaiterions.

Les véhicules blindés (VBRG) que nous utilisons sont à bout de souffle et nécessiteraient une rénovation complète. Nous sommes contraints à les « cannibaliser », Renault n'ayant plus de stock de pièces de rechange. Malgré ces difficultés, nous parvenons à maintenir un parc d'environ 70 à 80 véhicules. Face à cette situation tendue, j'ai choisi de privilégier l'entretien du matériel disposé outre-mer pour qu'il soit opérationnel en cas de désordres sociaux. Il en va de même pour les opérations sur les théâtres d'opérations extérieures, tels que le Kosovo ou la Côte d'Ivoire, les autres véhicules étant regroupés à proximité de la capitale, à Versailles Satory.

En Afghanistan, les gendarmes utilisent également les véhicules de l'avant blindés (VAB) que l'armée de terre a très obligeamment mis à notre disposition.

Le parc actuel est donc encore utilisable mais il génère des dépenses de maintenance de plus en plus importantes et nous ne pourrons pas repousser éternellement leur remplacement.

La flotte aérienne de la gendarmerie se compose de 53 hélicoptères, qui sont utilisés au profit à la fois de la gendarmerie nationale et de la police nationale, notamment lors des grandes manifestations pour prévenir les troubles à l'ordre public. Il existe un contraste important entre les derniers appareils EC 135 entrés en service et les Écureuil, âgés de 28 ans en moyenne. Le maintien en condition opérationnelle du parc est très coûteux et nous y consacrons chaque année plus de 20 millions d'euros.

Face au risque d'une annulation et du lancement d'un nouvel appel d'offres sur le marché pour le remplacement des hélicoptères Ecureuil par des EC135, j'ai choisi de poursuivre la modernisation de la flotte. Les négociations portent actuellement sur la réalisation de la tranche conditionnelle avec l'acquisition de trois EC 135 pour les trois ans à venir. Il nous faut aboutir sur ce dossier pour éviter de dénoncer le contrat en cours.

Debut de section - PermalienPhoto de André Vantomme

Notre commission a beaucoup d'estime et de considération pour l'action de la gendarmerie au service de la sécurité de la population.

En écoutant attentivement votre intervention, je trouve que vous êtes, Mon Général, avec tout le respect que je vous dois, un homme de bonne composition.

En effet, vous parvenez à conclure sur une note positive et optimiste, malgré l'ensemble des éléments négatifs des crédits de la gendarmerie dans le projet de loi de finances pour 2011 que vous avez rappelé dans votre intervention et qui portent notamment sur la réduction de 12 % des crédits de la gendarmerie par rapport aux objectifs de la LOPPSI 2 sur la période 2011-2013, la réduction des effectifs de 3 000 ETPT sur les trois prochaines années, l'insuffisance des crédits d'investissement, le non-renouvellement des véhicules blindés ou des hélicoptères, les difficultés du parc domanial de la gendarmerie ou encore la sous-dotation des crédits concernant les opérations extérieures, en contradiction avec le principe de sincérité budgétaire.

Ainsi, s'agissant des effectifs, après avoir créé 6 050 postes dans la gendarmerie au titre de la loi d'orientation et de programmation sur la sécurité intérieure (LOPSI), la gendarmerie devrait connaître une réduction de 3 000 ETPT sur les trois prochaines années, après une diminution de 3 500 postes ces trois dernières années, ce qui a une incidence directe sur la sécurité des territoires, notamment en zone rurale, sur la présence des gendarmes et le sentiment d'insécurité de la population.

Général Jacques Mignaux - Ma responsabilité est d'utiliser au mieux les crédits qui me sont confiés par les responsables politiques.

Entre la LOPSI 1 et la LOPPSI 2, il y a eu un retournement de conjoncture avec la crise économique. Certes, nous pourrions faire mieux si les moyens budgétaires étaient restés constants, mais cette situation de tension budgétaire n'est pas propre à la gendarmerie.

En ce qui concerne les réductions d'effectifs, il est vrai que l'on ne pourra pas poursuivre sur le même rythme les suppressions d'emplois sans affecter la capacité opérationnelle de la gendarmerie.

Pour autant, je tiens à souligner les bons résultats obtenus par la gendarmerie, en matière de lutte contre la délinquance et l'insécurité routière, qui témoignent de l'engagement des unités et des gendarmes sur le terrain.

Depuis le début de l'année, la lutte contre la délinquance enregistre une évolution favorable. Les atteintes aux biens, qui représentent plus de 64 % de notre délinquance enregistrée, ont baissé de 3,5 % sur les 9 premiers mois de 2010, ce qui représente 17 500 faits en moins. Les atteintes volontaires à l'intégrité physique restent stables avec une diminution de 160 faits constatés (- 0,2 % sur 9 mois), ce qui peut être considéré comme encourageant, au regard des hausses ininterrompues dans ce domaine au cours des cinq dernières années.

L'effort engagé en matière de priorités gouvernementales se poursuit en 2010, avec en particulier la lutte contre les trafics et la revente de stupéfiants, qui se traduit par une augmentation de 24,8 % de personnes mises en causes, soit près de 2 000 personnes de plus sur les 9 premiers mois de 2010 sur un total de près de 10 000 personnes mises en cause dans ce domaine précis.

Par ailleurs, pour les six premiers mois de l'année 2010, les saisies d'avoirs criminels réalisées par la gendarmerie se montent à 34,9 millions d'euros, soit une hausse de 37 % par rapport à la même période de 2009, ce qui représente un gain supplémentaire pour l'Etat de 9,4 millions d'euros.

Au total, depuis le début de l'année, la gendarmerie a mis en cause plus de 240 000 personnes pour des crimes ou des délits et affiche un taux de résolution qui reste supérieur à 39 % sur les 12 derniers mois.

En dix ans, le métier a considérablement évolué, grâce aux progrès de la police scientifique et technique, aux fichiers, et ce mouvement devrait se poursuivre sur les prochaines années, par exemple grâce au système de lecture automatisée des plaques d'immatriculation (LAPI).

En matière de lutte contre l'insécurité routière, les résultats sont bons depuis plusieurs années ; je rappelle que la route a tué 5 785 personnes en 2000 en zone gendarmerie. Neuf ans plus tard, ce chiffre a été ramené à 3 395, ce qui est malheureusement encore trop.

La tendance actuelle est encourageante avec une baisse de 10,5 % des accidents, de 7,5 % des tués et de 9,9 % des blessés sur les neuf premiers mois de l'année 2010.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Chevènement

J'admire votre irénisme.

Vous avez établi un parallèle entre les réductions d'effectifs et le recours accru aux nouvelles technologies. Toutefois, un dispositif comme la lecture automatisée des plaques d'immatriculation (LAPI) ne remplace pas une brigade de gendarmerie. La technologie ne peut remplacer le facteur humain.

Pour des élus locaux, ce qui importe c'est la présence des policiers et des gendarmes sur le terrain et, en tant que parlementaires, nous ne pouvons que relayer l'inquiétude des élus, notamment en zone rurale, face à la diminution des effectifs de policiers et de gendarmes, qui a pour effet de rallonger les délais d'intervention.

Compte tenu du rythme actuel des réductions d'effectifs, nous arriverons bientôt en dessous du plafond d'emplois de 2002, en supprimant tous les postes de gendarmes et de policiers créés par la LOPSI 1. On peut donc s'interroger : était-il réellement nécessaire de faire tant de bruit pour arriver à un tel résultat ?

Je voudrais donc avoir davantage de précisions sur la répartition actuelle des effectifs de gendarmes en métropole, outre-mer et sur les théâtres d'opérations extérieures, et sur la manière dont vont s'appliquer les réductions d'effectifs.

Général Jacques Mignaux - S'agissant de la répartition actuelle des effectifs, 4 800 gendarmes sont présents outre-mer y compris la gendarmerie mobile, ce qui est à la fois beaucoup et pas assez, compte tenu de l'étendue des territoires concernés et des défis, à l'image de la lutte contre l'orpaillage clandestin en Guyane, à laquelle la gendarmerie apporte une importante contribution, dans le cadre du dispositif Harpie.

Environ 700 gendarmes sont actuellement déployés en opérations extérieures, notamment en Afghanistan, à Haïti, au Kosovo, en Côte d'Ivoire et en Géorgie.

En métropole, il y a donc environ 93 000 ETPT et il faut également ajouter les réservistes opérationnels, qui sont environ 25 000 pour une activité moyenne de 20 jours par an, et qui apportent un renfort utile aux unités.

S'agissant des délais d'intervention, la gendarmerie reçoit environ 11 millions d'appels téléphonique par an, et 15 % donnent lieu à des interventions.

La gendarmerie est de plus en plus sollicitée pour des interventions à caractère social, souvent la nuit ou les jours fériés, lorsque toutes les autres administrations publiques ont fermé leurs portes. Nous avons donc mis en place une centralisation des appels, qui permet de mieux répondre aux sollicitations.

Le délai moyen d'intervention est de 15 mn, même s'il est vrai que, dans certaines zones difficiles d'accès, comme en zone de montagne, ce délai peut atteindre 45 mn.

Cela illustre toute l'utilité du maillage territorial assuré par les brigades territoriales.

La technologie ne constitue certes pas une panacée mais elle permet de renforcer l'efficacité de la police et de la gendarmerie.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernadette Dupont

J'ai trois interrogations.

Concernant la formation, la suppression de la moitié des écoles de gendarmerie a-t-elle eu un impact sur la qualité de la formation des gendarmes ?

Qu'en est-il également de la sécurité des personnels ?

Enfin, s'agissant de l'immobilier, en tant que sénateur des Yvelines, je suis préoccupée par l'état très vétuste de la caserne de Versailles Satory, qui appartient à l'Etat, et qui ne permet pas d'offrir des conditions de logement satisfaisantes aux gendarmes et à leurs familles. Des travaux de rénovation sont-ils prévus prochainement ?

Général Jacques Mignaux - Vous avez raison de souligner l'état préoccupant des logements de Versailles Satory. Je m'interroge d'ailleurs sur le fait de savoir si une rénovation serait suffisante et s'il ne conviendrait pas plutôt d'envisager une reconstruction.

Concernant la sécurité des personnels, sujet qui me tient beaucoup à coeur, je tiens à vous rappeler si besoin en était, que 12 gendarmes sont décédés l'an dernier dans l'exercice de leurs fonctions et que 5 de nos gendarmes sont décédés depuis le début de l'année, principalement dans les missions de lutte contre l'insécurité routière.

La gendarmerie est confrontée à des comportements de plus en plus violents et nous avons développé différentes méthodes telles que « l'école d'intervention professionnelle », qui repose sur un renforcement des équipements de protection, des armes à létalité réduite, comme le pistolet électrique, et de nouvelles méthodes de gestion des comportements violents, comme des équipes de négociateurs.

La question se pose aussi de l'usage des armes par les gendarmes, au regard notamment de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme.

La suppression de la moitié des écoles de gendarmerie n'a pas affecté la qualité de la formation de la gendarmerie, tant en ce qui concerne la formation initiale, que la formation continue.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Berthou

J'ai trois questions à vous poser.

La première concerne la notion de parité globale entre gendarmes et policiers, notamment en ce qui concerne les rémunérations et le temps de travail.

Je souhaiterais également savoir quel système de communication est utilisé par la gendarmerie.

Enfin, pourriez-vous nous confirmer l'absence de fichier sur les roms ?

Général Jacques Mignaux - Comme j'ai eu l'occasion de l'expliquer, lors de mon audition devant la commission des lois de l'Assemblée nationale, la gendarmerie ne dispose d'aucun fichier sur les roms ou tout autre fichier ethnique et la CNIL a eu l'occasion de le vérifier sur place.

S'agissant du système de communication, la gendarmerie utilise le système Rubis, qui permet par un système de valises une interconnexion avec le système de communication de la police.

Un système unique et moderne de communication serait sans doute utile, mais sa mise en place aurait un coût très élevé.

La parité globale de traitement et de carrière entre gendarmes et policiers, qui ne signifie pas une égalité stricte, conformément à l'objectif fixé par le Président de la République, a fait l'objet d'un rapport qui fixait l'objectif d'atteindre une telle parité en 2012 et qui contenait une série de recommandations. En 2010, le ministère de l'intérieur, à la demande des syndicats de police, a accepté de poursuivre cette réflexion, notamment concernant le logement en caserne, qui constitue une condition de la disponibilité.

Nous travaillons actuellement avec le directeur général de la police nationale à la mise en place d'une passerelle entre la police et la gendarmerie, sur le modèle de la mobilité au sein de la fonction publique, qui permettrait à un policier ou à un gendarme, dans les quatre ou cinq premières années de ses fonctions, de faire une demande afin de changer de statut, avec une période de formation, une période de probation et la possibilité de revenir ensuite et à une seule reprise sur ce choix.