La commission a procédé à l'audition de M. Michel Wachenheim, directeur général de l'aviation civile, responsable de programmes au sein de la mission « Transports » et de la mission « Contrôle et exploitation aériens ».
a rappelé qu'il s'agissait de la première audition d'un responsable de programmes, dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF), et qu'elle devait permettre aux sénateurs de s'approprier, au mieux, les nouveaux outils offerts par ce texte.
a présenté les conditions concrètes de mise en place de la LOLF au sein de la direction générale de l'aviation civile. Il a indiqué que cette réforme avait été dictée par trois événements, et ce, dès le début de l'année 2003 :
- la réforme de l'Etat et la nécessité de recentrer son action sur les missions les plus utiles ;
- l'évolution du cadre réglementaire européen, notamment dans le domaine de la navigation aérienne, avec l'adoption de plusieurs dispositions relatives au « ciel unique européen » ;
- l'évolution du secteur, que devait prendre en compte une administration qui n'avait pas connu de réforme depuis 30 ans.
Il a indiqué que la réflexion menée avait conduit à une analyse fonctionnelle des métiers, qui avait amené à séparer les prestations de services de l'autorité de surveillance. Il a exposé que l'activité de la DGAC était désormais séparée en deux entités budgétairement distinctes :
- un pôle « régalien », qui était le programme « Transports aériens » de la mission « Transports » ;
- un budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », qui constitue une mission au sens de la LOLF, pour les activités de prestations de services, de surveillance et de certification.
Il a relevé que certains agents, qui exerçaient plusieurs métiers, avaient dû choisir, ce qui avait nécessité une concertation très approfondie. Au niveau des recettes du budget annexe, il a rappelé que les activités de prestations de services devraient, en théorie, être financées par des redevances, dont certaines avaient précisément été créées par l'article 120 de la loi de finances rectificative pour 2004, mais que ces redevances n'étaient pas suffisantes pour couvrir l'ensemble des dépenses en raison de certaines missions d'intérêt général. Ceci expliquait l'affectation d'une fraction de la taxe d'aviation civile au budget annexe, l'autre partie étant dorénavant versée au budget général de l'Etat.
En ce qui concerne la préparation budgétaire, M. Michel Wachenheim a indiqué qu'elle avait été facilitée par l'expérimentation menée l'année précédente et qu'elle ne posait pas de difficultés majeures, principalement grâce à la fongibilité des crédits qui avait permis de répartir au mieux les enveloppes budgétaires. Il a souligné que le pilotage se faisait désormais par objectifs, dans le respect de la LOLF. Cela supposait une stratégie d'ensemble pour la DGAC, cette stratégie étant orientée par la volonté de demeurer une référence européenne, notamment dans le domaine de la sécurité et de la sûreté et, par ailleurs, de fournir au meilleur coût le meilleur service aux usagers. Il a noté, au titre des évolutions les plus significatives, la prise en compte des passagers, qui avaient la possibilité de saisir la DGAC en cas de litige avec les compagnies aériennes. Il a évoqué la mise en place d'un réseau interne de dialogue de gestion avec des indicateurs précis et un suivi régulier de l'efficacité de chaque direction.
a souligné tout l'intérêt de l'expérimentation qui avait permis un apprentissage en amont des nouvelles pratiques de gestion et une meilleure appréhension des nouveaux concepts budgétaires, prenant à titre d'exemple la fongibilité asymétrique des crédits. Elle a précisé que la DGAC mettait en oeuvre 17 budgets opérationnels de programme (BOP) qui avaient tous reçu un avis favorable du contrôleur budgétaire. Elle a insisté, de plus, sur la prise en charge, par les directions, de nouvelles responsabilités de gestion, ce qui avait nécessité une concertation très approfondie à tous les niveaux.
s'est réjoui du lancement de ce cycle d'auditions qui permettait d'appréhender concrètement la gestion modernisée de l'administration. Il a souligné que la nouvelle architecture de la DGAC avait fait l'objet d'appréciations positives, à la fois de la Cour des comptes, dans son rapport public annuel pour 2006, et du rapporteur spécial des crédits de l'aviation civile, M. Yvon Collin. Puis il s'est interrogé sur plusieurs points :
- les conditions concrètes de répartition du personnel entre le pôle « régalien » au sein de la mission « Transports » et le pôle de prestations de services au sein du budget annexe ;
- la mise en place des nouvelles redevances aéronautiques destinées à faire financer par les usagers les services de la DGAC ;
- les suites données au rapport de contrôle budgétaire de M. Paul Girod, qui préconisait une gestion centralisée de la dette, et notamment celle du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » ;
- les suites à donner aux remarques de la Cour des comptes sur la gestion du corps des contrôleurs aériens, jugée peu satisfaisante ;
- l'évolution du statut d'Aéroports de Paris (ADP), avec notamment le respect des obligations de service public ;
- l'état du contentieux en cours devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC) entre les sociétés Airbus et Boeing ;
- le niveau de taxation dans le transport aérien, suite notamment à l'adoption en loi de finances rectificative pour 2005 d'une taxe de solidarité assise sur les billets d'avion ;
- la dotation de continuité territoriale en outre-mer, dont le financement avait été assuré à l'origine par un relèvement de la taxe d'aviation civile ;
- l'évolution de la réflexion sur la sécurité et la sûreté aérienne dans le cadre européen.
En réponse aux questions de M. Alain Lambert, M. Michel Wachenheim a apporté les précisions suivantes :
- la répartition des personnels avait été une opération complexe, qui avait nécessité une concertation très en amont avec les représentants du personnel, ces derniers privilégiant le budget annexe en raison de l'existence d'un protocole social triennal qui possédait un caractère attractif. Dans la pratique, il a montré que l'analyse avait été faite poste par poste et nominativement à l'aide de la comptabilité analytique avec, dans certains cas, extrêmement limités, et dans un soucis d'optimisation globale, des prestations « croisées » et la mutualisation de certains services ;
- la mise en place des nouvelles redevances avait été faite en s'inspirant des modèles étrangers, et notamment européens. Une première analyse avait montré que les coûts pouvaient s'avérer particulièrement élevés pour les usagers, ce qui avait conduit à conserver un financement partiel par le biais de la taxe d'aviation civile. Il a rappelé les difficultés spécifiques dans le cadre de l'aviation légère, difficultés qui avaient conduit à ne pas appliquer les nouvelles redevances en 2006. Il a insisté sur le fait que ce travail avait permis de mieux prendre en compte la nature des services rendus par l'administration, ce qui pourrait entraîner dans l'avenir, un changement de son périmètre d'action.
En ce qui concerne les préconisations du rapport de contrôle budgétaire de M. Paul Girod portant sur la gestion de la dette, Mme Michelle Desjardins a rappelé que, dans le passé, le budget annexe se finançait directement auprès des banques, mais que, dans un souci de gestion cohérente de la dette de l'Etat, et une fois les difficultés juridiques posées par l'ordonnance organique de 1959 relative aux lois de finances levées, l'Agence France du Trésor gérerait désormais l'émission de nouvelles dettes.
a évoqué le rapport public annuel pour 2006 de la Cour des comptes, et notamment ses remarques sur les contrôleurs aériens. Il a précisé que le coût de l'unité de contrôle, qui était la norme de mesure de l'activité des contrôleurs au niveau européen, était inférieur en France à la moyenne européenne, et que la tarification des redevances permettait d'équilibrer les dépenses et les recettes du budget annexe. Il a indiqué que la productivité par heure de contrôle était de 15 % supérieure en France par rapport au reste de l'Union européenne. Il a ajouté que les salaires des contrôleurs aériens français restaient inférieurs à ceux pratiqués dans d'autres pays européens et aux Etats-Unis, tout en reconnaissant un moindre volume annuel d'heures travaillées. Il a assuré vouloir tenir compte des conclusions de la Cour des comptes sur l'organisation du temps de travail, caractérisée par des vacations longues et peu de jours de présence, insistant sur l'utilité du protocole triennal, qui permettait d'améliorer la gestion, dans le respect, à la fois des contraintes particulières de ce métier, et de l'impératif de bonne gestion. Il a fait état des perspectives offertes par les accords « ciel unique européen » qui visaient à définir de grands espaces transfrontaliers avec des règles communes, ce qui devrait permettre une harmonisation des conditions de travail.
En ce qui concerne Aéroports de Paris (ADP), il a rappelé les grandes lignes du changement de statut, précisant que le débat sur le niveau des redevances s'articulait d'une part autour de la nécessité d'assurer aux investissements réalisés par ADP une rentabilité suffisante, précisant que la société devait investir 2,5 milliards d'euros les cinq prochaines années, et la volonté de ne pas pénaliser les compagnies aériennes. Il a indiqué que les obligations de service public étaient fixées par contrat et que la régulation relevait de la compétence de la DGAC. En réponse à M. Jean Arthuis, président, il a précisé que l'objectif de rentabilité était de 6,2 % environ, et qu'il comprenait non seulement les redevances, mais également les activités annexes, comme les parkings et les boutiques présentes dans l'enceinte de l'aéroport, en application du principe dit de la « caisse unique ».
En ce qui concerne le contentieux en cours devant l'OMC entre Airbus et Boeing, il a observé qu'il n'y avait pas de négociations actuellement et que la procédure suivait à ce stade son cours normal, ce qui impliquait que les conclusions devraient être rendues en 2007. Evoquant la taxation dans le transport aérien, il a constaté que, si la taxe de solidarité ne mettait pas en péril les dessertes aériennes, elle s'ajoutait aux augmentations des taxes de ces dernières années, dues notamment aux impératifs de sûreté et de sécurité, et à la hausse des prix du pétrole. Ces éléments ayant un impact indiscutable, mais extrêmement difficile à mesurer.
En ce qui concerne la dotation de continuité territoriale en outre-mer, il a indiqué qu'elle n'était plus financée formellement par la taxe d'aviation civile, mais qu'une fraction de cette dernière étant dorénavant attribuée au budget général, un lien pouvait donc être fait entre les deux.
Enfin, s'agissant de la sécurité et de la sûreté, il a relevé que la « liste noire » était actuellement en cours de constitution, insistant sur l'information à apporter aux passagers par la « labellisation » des lignes aériennes les plus sûres. Il a toutefois indiqué que cet exercice s'avérait complexe, à la fois pour les compagnies aériennes, et pour l'administration, et que le fait de constituer une telle liste se heurtait au principe de la reconnaissance mutuelle entre Etats, principe qui impliquait que les compagnies certifiées dans un pays l'étaient également par leurs partenaires.
s'est interrogé sur les conditions concrètes de transfert aux collectivités territoriales de certains aérodromes, et notamment de l'espace aérien y afférant.
a identifié certaines difficultés relatives aux indicateurs de la mission « Transports », principalement celui destiné à mesurer l'efficacité des subventions aux lignes aériennes, rappelant que l'intérêt de ces indicateurs était de prévoir des cibles et d'indiquer les moyens d'y parvenir.
En réponse à M. Eric Doligé, M. Michel Wachenheim a souligné que l'espace aérien ne pouvait être transféré et que l'existence d'un service de contrôle ne se justifiait qu'au-delà d'un certain niveau de trafic, en raison de son coût. Il a approuvé l'analyse de M. Yves Fréville sur cet indicateur particulier, faisant part de son souhait de le rendre plus clair d'ici à la prochaine discussion budgétaire.