La commission examine les amendements sur le texte de la commission sur le projet de loi n° 141 (2011-2012), adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la rémunération pour copie privée, dont le rapporteur est M. André Gattolin.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
Article premier
Nous examinons les amendements sur ce projet de loi sur lequel nous nous sommes longuement penchés la semaine dernière et dont la présentation par M. Gattolin a été saluée. L'amendement n° 3, déposé par M. Gattolin, a déjà été évoqué lors de la précédente réunion et la commission n'a pas souhaité l'intégrer à son texte.
Il s'agit par cet amendement de rétablir le texte initial du projet du Gouvernement, qui a été amendé à l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Tardy, en faisant référence à de nouveaux articles du code de la propriété intellectuelle, en vue d'étendre le champ de la loi au périmètre de la copie privée et de poser la question de la licéité de ses sources. Or la jurisprudence sur ce thème est très complexe. Les sénateurs écologistes ont repris à leur compte cet amendement, rejeté par la commission. C'est l'occasion de débattre à nouveau en séance de cette question, sachant toutefois que nous sommes sous le coup de l'urgence et donc que l'adoption de tout amendement entraînerait la réunion de la CMP et des retards. Un aller-retour en cette période de Noël décalerait l'adoption définitive du texte au-delà du 22 décembre, ce qui entraînerait des conséquences sur les prélèvements effectués au titre de la copie privée, conséquences dont il est difficile d'évaluer précisément l'impact financier. Celui-ci est estimé à 1,5 million d'euros pour trois jours, sur quelque 190 millions d'euros annuels.
Le sujet est délicat. Je pense que le député Tardy a fait adopter cet amendement, qui introduit un déséquilibre, en séance de nuit, sans réelle discussion ni évaluation. M. Gattolin a raison : son interprétation peut être problématique. Or nous sommes dans une procédure d'urgence, donc toutes les parties ont la volonté d'aboutir à un consensus, pour qu'il y ait un vote conforme à la veille des fêtes, tout jour de retard entraînant une pénalité évaluée à un demi-million d'euros. Ce petit amendement coûte 1,5 million d'euros !
En maintenant votre amendement en séance, vous interpellez pour la forme le ministre, afin qu'il donne une réponse qui interdise toute interprétation équivoque. Dès lors qu'elle figure au compte rendu officiel, cette réponse a une valeur assez importante en cas de contentieux. Vous pourrez peut-être alors retirer votre amendement. Ainsi vous aurez progressé, en obligeant le ministre à se prononcer clairement. Telle est ma position. Cela dit, je ne suis pas contre votre amendement. Comme le groupe socialiste s'est abstenu, c'est parce que la droite a voté contre que l'amendement n'est pas passé en commission. Si nous votions aujourd'hui, la droite n'étant pas là, il passerait !
Le texte de la commission ayant déjà été adopté, nous ne sommes aujourd'hui appelés qu'à donner l'avis de la commission sur les amendements extérieurs.
Compte tenu de la situation que je viens d'évoquer, la commission peut-elle soumettre directement l'amendement en séance sans se prononcer auparavant ?
Ce n'est pas possible. Par honnêteté intellectuelle, nous pouvons être amenés à ne pas prendre part au vote. La commission, quant à elle, peut aussi demander l'avis du Gouvernement.
Je perçois une difficulté. Vous-même et le rapporteur allez voter pour. Si nous nous abstenons ou si nous ne prenons pas part au vote, l'amendement va recueillir un avis favorable en l'absence de vote contre.
C'est la procédure qui nous gêne. Nous pourrions donner un avis favorable de la commission et entendre en séance les explications du Gouvernement.
La position au fond des auteurs de l'amendement a été très bien expliquée par M. Gattolin. Quant aux délais et à l'urgence... Depuis le mois d'octobre et l'arrêt du Conseil d'État, le Gouvernement avait tout le temps de s'y mettre ! Il faut en outre relativiser le manque à gagner qui est invoqué par les nombreux lobbies qui ont frappé à notre porte. Il ne concerne pas des sommes qui ne seraient pas versées, mais celles qui seraient éventuellement réclamées par les acheteurs de produits, celles et ceux qui réclameraient un euro sur les neuf euros qu'ils ont payés ! Si j'achète un DVD le 23 décembre, je ne réclamerai pas les quelques centimes qui me sont dus parce que la loi n'a pas été adoptée ! Je propose un avis de sagesse, en demandant l'avis du Gouvernement.
Le compte rendu de notre précédente séance, qui ne précise pas le détail des suffrages, selon l'usage, n'a pas relevé que nous avions voté, M. Gattolin et moi, cet amendement. Mais aujourd'hui nous nous trouvons dans une situation inédite : aucun collègue de l'opposition sénatoriale n'est présent.
La commission s'en remet à la sagesse sur l'amendement n° 3 et demandera l'avis du Gouvernement.
Article 5
L'amendement n° 1, présenté par M. Dominati, pose une difficulté. Il concerne toutes les procédures intentées de 2008 à 2011, jusqu'à la décision du Conseil d'État du 17 juin, notamment par des industriels. Dès le 16 mai, des informations ont couru sur une possible remise en cause de l'armature de la loi, suscitant un grand nombre de recours contentieux pour tenter de profiter de cet effet d'aubaine. Tous les recours ne sont pas légitimes. L'ensemble des demandes de remboursement s'élève à quelque 60 millions d'euros ! Supprimer l'alinéa 2 de l'article, comme le propose cet amendement, c'est obliger à rembourser une grande part de ces sommes, soit plusieurs dizaines de millions d'euros, déjà perçus par la commission de la copie privée ! Il est difficile de faire le tri entre les demandes qui sont légitimes et celles qui cherchent un effet d'aubaine. Défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 1.
L'amendement n° 2, déposé par M. Dominati est un amendement de repli, tendant à ne prendre en compte que les contentieux ayant surgi entre le 16 mai et le 17 juin 2011. Son impact est moindre, mais je vous laisse juge de cet amendement, qui a sans doute été inspiré par les industriels du secteur. Même avis.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 2.