En application de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838, du 23 juillet 2010, relatives à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, la commission auditionne M. Jean-Yves Le Gall, candidat désigné à la présidence du conseil d'administration du Centre national d'études spatiales (CNES).
Conformément à l'article 13 de la Constitution, nous auditionnons aujourd'hui M. Jean-Yves Le Gall, candidat désigné à la présidence du conseil d'administration du Centre national d'études spatiales (CNES). Ouverte au public et à la presse, cette audition sera suivie par un vote à bulletin secret. Le dépouillement interviendra demain après-midi, pour attendre l'audition de M Jean-Yves Le Gall devant la commission des Affaires économiques à l'Assemblée Nationale.
Monsieur Le Gall, vous souhaitez succéder à Yannick d'Escatha, dont le mandat court jusqu'en février 2015, mais qui est atteint par la limite d'âge. Vous connaissez très bien ce secteur et les arcanes de la politique spatiale ainsi que ses acteurs : directeur général adjoint du CNES de 1996 à 1998, vous êtes président-directeur général d'Arianespace depuis 2007 - poste que vous quitterez si vous accédez à la présidence du CNES. J'imagine que votre projet stratégique pour le CNES va au-delà de 2015, et qu'à cette date vous serez candidat à votre propre succession : dans l'espace, le temps est nécessairement long. Au-delà de la présentation de votre projet stratégique, j'aimerais avoir votre point de vue sur l'évolution des relations entre le CNES, Arianespace, Astrium et les clients ? Vous évoquerez également les orientations communautaires arrêtées par la conférence ministérielle de novembre dernier qui constituent, je pense, votre cadre de référence.
L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) a produit, à notre demande, un rapport signé de son président Bruno Sido, également membre de notre commission, et de Mme Catherine Procaccia, dont je salue la présence. Ils souhaiteront certainement vous interroger.
C'est un grand honneur d'être devant vous pour cette audition. Le Premier ministre envisage en effet de proposer au Président de la République ma nomination comme président du conseil d'administration du CNES. Cette nomination a été formellement proposée hier par le conseil d'administration lui-même.
Je veux d'abord rendre hommage à tous ceux à qui nous devons cinquante ans de succès de notre politique spatiale. Ma première pensée va aux responsables politiques qui ont voté la loi de 1961 : elle a été le point de départ de l'ambition spatiale de la France. Le Sénat, dont j'ai rencontré de nombreux membres dans mes fonctions précédentes, a joué un rôle majeur dans ce processus. J'ai eu de longs échanges avec Mme Procaccia et M. Sido l'année dernière, lorsque, préparant leur rapport pour l'OPECST, ils étaient venus assister à un lancement de Soyouz en Guyane. J'ai trouvé leur rapport remarquable tant dans l'analyse que par ses propositions. J'assisterai à la séance publique de ce soir sur la politique spatiale européenne, car il est important que la représentation nationale prenne part au débat qu'elle suscite.
Je pense aussi aux membres du conseil d'administration du CNES, et aux quelque dix présidents qui se sont succédé à sa tête. Je pense en particulier aux professeurs Curien, Lions, Pellat, Lebeau, ainsi qu'au président Bensoussan, dont j'ai été l'adjoint, et au président d'Escatha, avec lequel j'ai également travaillé. Je pense enfin aux hommes et aux femmes du CNES : une politique spatiale ne se décrète pas, elle se fait, et depuis cinquante ans elle se fait grâce à eux. Je les connais, et je respecte leur engagement et leur professionnalisme.
Je ressens une grande émotion en me portant ainsi candidat après un parcours qui a commencé sous les auspices du CNES : à la sortie de mon école d'ingénieur, en 1981, c'est grâce à une bourse du CNES que j'ai fait ma thèse. Ce système de bourses est remarquable, car il offre de bonnes conditions de travail et d'encadrement à de jeunes chercheurs : j'entends bien le consolider. J'ai travaillé ensuite au CNRS, puis dans les ministères, dans les services comme au cabinet du ministre chargé de l'espace. C'était une période de très grande effervescence, puisque nous mettions en oeuvre, entre autres, le programme Ariane 5. J'ai été ensuite directeur général, responsable des transferts de technologie, chez Novespace, directeur général adjoint du CNES de 1996 à 1998, président de Starsem avant de passer à Arianespace.
Le CNES est le bras séculier de l'État français dans le domaine spatial. Grâce aux décisions politiques qui ont été prises, le budget spatial de la France est le deuxième au monde. Certes, les États-Unis dépensent l'équivalent de 49 euros par an et par habitant pour leur politique spatiale, mais en France, nous en dépensons 31, quand les Allemands en dépensent 17 et les Britanniques, 6. La politique spatiale européenne résulte d'ailleurs largement des initiatives françaises, ce qui est la traduction directe de cet effort budgétaire.
Le rôle du CNES, défini par la loi de 1961 et par la loi sur les opérations spatiales, est de proposer et de mettre en oeuvre notre politique spatiale. Il revient à son président de représenter la France au conseil de l'Agence spatiale européenne (ESA), à laquelle la moitié de son budget est consacré, ainsi que la politique spatiale française à l'étranger, et en particulier sur le plan de la diplomatie économique. Pour vendre depuis douze ans partout dans le monde des lancements par Ariane, je puis vous dire combien l'appui du CNES compte, surtout dans les pays où nous avons une relation de gouvernement à gouvernement. Le CNES est actionnaire de plusieurs sociétés commerciales, dont Arianespace.
Le CNES intervient dans cinq secteurs : l'accès à l'espace, avec les lanceurs Ariane, les applications pour le grand public, avec les télécommunications ou le système Galileo, les études sur la Terre, l'environnement et le climat, avec le programme Pléiade par exemple, les sciences de l'univers, avec le satellite Kourou, qui a initié des avancées spectaculaires dans la connaissance des exoplanètes et, bien sûr, la sécurité et la défense, avec les séries de satellites Syracuse, Hélios, ou Athéna-Fidus. Son champ d'activité couvre toutes les formes d'application du spatial.
Le CNES dispose de quatre centres d'excellence : son siège parisien, la direction des lanceurs, le centre spatial de Toulouse et le centre spatial de Guyane. Son budget dépasse les deux milliards d'euros, dont cinq cents millions d'euros de ressources propres. Il verse environ 800 millions d'euros à l'ESA. La partie nationale a été abondée ces dernières années par les investissements d'avenir, ce qui a en particulier des retombées sur le programme Ariane 6, comme l'a bien souligné le rapport de Mme Procaccia et de M. Sido.
Quel avenir pour le CNES ? Il faut, je crois, continuer à avoir une très grande ambition pour cette structure et pour la France. A cet égard, l'innovation est essentielle : le CNES s'est construit par l'innovation. Il nous faut continuer la course en tête, d'autant plus que cela crée des emplois - seize mille emplois directs en France actuellement. Cela nécessite de comprendre le contexte, c'est-à-dire d'être à l'écoute. A l'écoute du Parlement, d'abord, ce qui est toujours enrichissant et aide à comprendre les attentes de nos concitoyens - si j'accède à la présidence du CNES, vous continuerez à me voir souvent... A l'écoute de nos partenaires européens, aussi : avec l'ESA, Eumetsat, le traité de Lisbonne, les projets emblématiques que sont Galileo, le programme européen de surveillance de la Terre (GMES) et Copernicus, l'Europe joue un rôle très différent de celui qu'elle jouait lors de la création du CNES. A l'écoute des industriels, dont le poids est de plus en plus important, et à l'écoute de l'environnement international, enfin : des approches nouvelles se font jour aux États-Unis ou au Japon, et les pays émergents voient le spatial comme le porte-drapeau d'une politique technologique.
La contrainte budgétaire pèse sur tous, le CNES a su la transformer en opportunité dans la définition du programme Ariane 6 ; il faudra continuer à la prendre en compte. J'ai coutume de dire que, si la genèse d'Ariane 5 avait été « technology-driven » - on parlait d'un « formidable outil de développement technologique » -, Ariane 6 doit être plutôt « cost-driven » : son développement doit être guidé par la maîtrise des coûts, si l'on veut qu'elle domine le marché des lancements commerciaux, comme Ariane 5 aujourd'hui.
Le siège du CNES pilote la politique spatiale, et doit la faire connaître, notamment en formant des milliers de jeunes et des centaines de professeurs, qui deviennent autant de relais dans la société. Je ne suis pas inquiet pour la direction des lanceurs car l'ambition d'Ariane 6 est très grande. Le centre de Toulouse doit continuer à innover - de Egnos à Taranis, en passant par Jason ou Megha-Tropiques, il participe déjà à de nombreux programmes de très haut niveau. Le centre guyanais est probablement l'actif le plus important du programme spatial européen, à la fois par sa situation géographique et par sa localisation, qui le met à l'abri de phénomènes sismiques ou cycloniques : après quarante ans d'investissement de la France et de l'Europe, nous avons le plus beau centre spatial du monde.
Ma méthode ? Dialoguer, pour comprendre : avec les parlementaires, avec le personnel, avec nos partenaires européens et internationaux. Proposer et mettre en oeuvre : le président d'Escatha a mis en oeuvre un contrat entre l'État et le CNES. Des échéances majeures se profilent : une conférence ministérielle fera suite en 2014 à celle de 2012, il convient de la préparer, en étroite coopération avec nos partenaires européens, et en premier lieu avec l'Allemagne. L'horizon structurant me semble être 2020, avec un point d'étape en 2015. J'ai l'intention de mettre en place un chantier « ambition 2020 ». Enfin, communiquer, continuer à parler de l'utilité de l'espace.
L'enjeu est immense : si beaucoup a été fait, beaucoup reste à faire. Après cinquante années extraordinaires, la période qui s'ouvre ne le sera pas moins : nous sommes dans la phase de maturité. Ce serait un honneur pour moi de conduire le CNES toujours plus haut.
Merci pour votre présentation, qui ne me surprend guère. Avez-vous l'intention d'infléchir les relations avec Arianespace ? Vous êtes pour beaucoup dans le succès d'Ariane, et dans celui du CNES. A la tête de ce dernier, modifierez-vous votre approche de la transition entre Ariane 5 ME et Ariane 6 ? Vous avez évoqué la dépense de 31 euros par Français et par an que représente notre politique spatiale. Il faudrait mieux communiquer sur l'utilité de cette politique. Nous le disions déjà dans notre rapport : l'espace est mal connu, il semble ressortir plus de la science-fiction que de notre vie quotidienne. Même le ministère concerné ne comporte pas le terme « espace » dans son appellation ! Pensez-vous pouvoir lancer de nouvelles opérations de communication, notamment autour du nouveau lanceur ?
Nous nous sommes vus à Kourou, et cela nous avait beaucoup aidés à rédiger notre rapport. Président-directeur général d'Arianespace, vous êtes bien placé pour savoir ce qu'a été l'histoire d'Ariane 5, initialement prévue pour les satellites Hermes, ce qui explique sa taille et sa capacité. Remarquablement sûre et robuste, cette fusée a effectué plus de cinquante lancements sans échec : ni les Russes, ni les Américains ne peuvent en dire autant. Cela dit, d'un point de vue commercial, nous arrivons au bout d'un cycle. Pouvez-vous nous en dire plus sur Ariane 6 ? C'était le grand sujet de notre rapport. Je comprends qu'elle est conçue non comme un lanceur « low cost », mais comme un lanceur dont les coûts seront maîtrisés.
Je souhaite enfin saluer M. Yannick d'Escatha, qui nous avait aussi grandement aidés lorsque nous rédigions ce rapport. C'est un homme passionnant et passionné.
Deux milliards d'euros, c'est à la fois beaucoup dans le contexte actuel, et peu, par comparaison à ce que font les Américains, les Russes, mais aussi les Chinois, pour autant qu'on puisse en juger. De plus, un de ces deux milliards d'euros va à l'ESA. Nous n'avons pu vraiment éclaircir dans notre rapport si les sommes restantes étaient employées à la conduite d'une politique spatiale autonome française. Pouvez-vous nous en dire plus ? Un milliard d'euros, est-ce suffisant ou sommes-nous entièrement tenus par la politique de l'ESA ?
Mme Procaccia soulève la question des relations entre le CNES et Arianespace. Celle-ci est une société très particulière : si elle a bien l'objectif commercial de vendre des lancements par Ariane à des clients internationaux, sa mission fondamentale est de garantir notre autonomie dans l'accès à l'espace. En effet, pour qu'un lanceur soit opérationnel il faut l'utiliser régulièrement, et le nombre de satellites gouvernementaux envoyés chaque année par les pays européens n'est pas suffisant pour cela. Grâce à ce succès commercial, l'État français peut à tout moment lancer un satellite de souveraineté. Le CNES est, depuis sa création, le premier actionnaire d'Arianespace, et il doit garder des relations fortes avec elle. Si je deviens président du CNES, je quitterai mes fonctions exécutives à Arianespace tout en siégeant à son conseil d'administration, comme le faisait le président d'Escatha.
Je suis un partisan convaincu de la nécessité de communiquer encore et toujours sur ce que nous faisons, et de le faire mieux connaître. Je l'ai fait pour Arianespace depuis douze ans, multipliant les entretiens dans les medias et sur internet, non par goût personnel, mais pour parler de nos succès. Si la conférence de Naples a été une réussite incontestable, c'est que chaque lancement d'Ariane constitue une sorte de piqûre de rappel pour les décideurs européens du domaine spatial : voilà un investissement qui donne des résultats... Votre rapport indique qu'il est nécessaire de communiquer davantage : je pense aussi que c'est une des missions du CNES, qui a déjà accompli des efforts exemplaires en organisant des manifestations dans les territoires pour le grand public, pour la jeunesse. Mon expérience en ce domaine chez Arianespace pourra peut-être profiter au CNES.
Comme l'a encore prouvé le 7 février dernier le 54e succès d'affilée, Ariane 5 fonctionne parfaitement, et elle est adaptée aux enjeux actuels. Bien qu'elle soit le meilleur lanceur du monde, la concurrence se développe, qu'elle vienne de pays où les coûts salariaux sont bas, comme l'Inde ou la Chine, voire la Russie, ou bien des États-Unis, où des sociétés privées, comme SpaceX entrent en scène.
Nous devons préparer les enjeux de la prochaine décennie. Deux raisons principales me semblent militer en faveur d'un nouveau lanceur. D'abord, Ariane 5 se spécialise de plus en plus dans le lancement de satellites de télécommunication, tout en coûtant fort cher au contribuable ; il y a de plus en plus inadéquation entre sa taille et celle des satellites gouvernementaux, d'où le recours à Soyouz - la coopération avec les Russes est exemplaire. Réconcilier la performance des lanceurs avec la masse des satellites gouvernementaux serait plus conforme à la doctrine européenne d'autonomie dans l'accès à l'espace.
Ariane 5 a été conçue dans les années 1980, Ariane 6 va l'être dans les années qui viennent : elle bénéficiera du progrès technologique intervenu depuis, et des réductions de coûts conséquentes. Nos gigantesques installations de lancement en Guyane font notre fierté, mais elles nous coûtent très cher, et ne pourront pas éternellement soutenir la concurrence de sociétés qui prétendent faire des lancements sur un pas de tir de la taille d'un terrain de football, ou de pays dont les lanceurs à bas coût risquent de nous faire sortir du marché.
Je veux saluer le travail remarquable qu'ont effectué les équipes de la direction des lanceurs du CNES au cours de ces deux ou trois dernières années : alors qu'une bonne centaine de propositions étaient examinées, elles ont conçu une solution très judicieuse pour Ariane 6, avec une partie basse et des propulseurs à poudre identiques. Une production en série nous donnera les moyens de lutter à armes égales avec les concurrents à bas coûts salariaux ou bénéficiant de subventions, comme la NASA. J'ai constaté la semaine dernière à la conférence « Satellite 2013 », aux États-Unis, que nos concurrents étaient loin de garder les deux pieds dans le même soulier. Bien au contraire, ils multiplient les initiatives dans le domaine des satellites comme dans celui des lanceurs. Nous devons réagir.
Le projet Ariane 6 a été porté sur les fonts baptismaux à la conférence de Naples en novembre 2012 : mon projet est qu'il avance suffisamment pour aboutir en 2020. D'ici-là, tant Arianespace que le CNES feront tout ce qu'il faut pour qu'Ariane 5 continue à faire la course en tête. Le cahier des charges d'Ariane 6 comprend trois contraintes principales : le coût et la durée de son développement doivent être minimaux, de même que son coût d'exploitation.
Le CNES verse 799 millions d'euros à l'ESA et consacre à peu près autant à la politique nationale - car nous avons bien une politique spatiale autonome. Le CNES nous donne la capacité de concevoir et de proposer une telle politique, contrairement à nos partenaires européens, qui se bornent à soutenir leur industrie spatiale. Nous avons fait des choix - Spot, Ariane - et développé des programmes scientifiques et technologiques remarquables. C'est ainsi qu'Ariane 6 est née en France, parce que le Premier ministre a demandé un rapport thématique il y a quatre ans. Dans quel autre pays européen le chef du Gouvernement formulerait-il une demande aussi précise ? Nous devons continuer : le centre de Toulouse est l'un des deux centres technologiques très performants en Europe, l'autre étant celui de l'ESA aux Pays-Bas.
L'argent que nous versons à l'ESA ne se perd pas dans une boîte noire : premier contributeur de l'ESA, et forte de sa propre politique spatiale, la France a vocation à guider la politique spatiale de l'ESA.
Je voulais savoir si l'impétrant avait le feu sacré, la flamme qui anime la politique spatiale européenne : j'en ai la confirmation.
J'apprécie votre clairvoyance et votre volontarisme. Vous avez évoqué les cinq domaines de compétence du CNES : l'espace, les applications grand public, la Terre et la climatologie, les sciences de l'univers, la sécurité et la défense. Mis à part ces dernières, quel serait l'ordre de priorité s'il fallait diminuer la voilure ? Il faudrait alors, j'y insiste, s'appuyer sur l'opinion publique, ce qui nécessite de vulgariser la politique spatiale, encore trop réservée aux initiés, afin que les citoyens s'en approprient les enjeux et les finalités. Ne faut-il pas également attirer les entreprises privées ?
N'oublions pas l'objet de cette réunion : il s'agit de valider, ou non, le choix de Jean-Yves Le Gall comme président du conseil d'administration du CNES. Est-il, ou non, la personne adéquate pour diriger cet établissement public ? Jean-Yves Le Gall a bien souligné le rôle qu'a joué le CNES depuis longtemps pour réunir l'ensemble des composantes de la vie publique française autour d'une politique spatiale ambitieuse. Je rends hommage aux présidents Bensoussan et d'Escatha, que j'ai connus et appréciés lorsque je présidais le groupe parlementaire de l'espace à l'Assemblée nationale.
Il y a une politique européenne de l'espace, certes. Mais heureusement qu'il y a un moteur français, car certains partenaires traînent parfois des pieds. Une politique aussi ambitieuse ne peut être menée qu'avec le soutien de l'opinion publique. C'est pourquoi vos actions de communication doivent être amplifiées : il ne suffit pas de monter des expositions ou d'organiser des débats. L'espace est un monde qui fait rêver, mais qui est méconnu. Nous-mêmes, responsables politiques, observons avec admiration et respect le travail des ingénieurs, mais ne pouvons guère pénétrer le fond des débats, sauf dans leur composante budgétaire. A cet égard, les chiffres que vous avez donnés sur les efforts consentis par d'autres pays concernent-ils le spatial civil uniquement ? Ils soulignent en tous cas l'importance de l'effort français. Autant le dire tout de suite, je voterai en faveur de votre nomination...
car je vous connais, et je sais que vous êtes l'homme de la situation : pour tout dire, avant même de savoir que Yannick d'Escatha devrait partir, j'étais de ceux qui espéraient que vous seriez son successeur. Où en sommes-nous du programme Galileo ? Quelles sont les perspectives ?
Votre présentation claire nous a donné à entendre un homme responsable, qui se penche sur l'avenir. Que représente, à moyen et long termes, le marché des satellites ? Quels sont les problèmes que suscitent nos concurrents ? N'y a-t-il pas à craindre des transferts de technologies, à l'avantage des Russes, du fait de notre partenariat avec eux à Kourou ?
Je me réjouis des propos que vous avez tenus sur les bourses. Je souhaite que ce système se développe. Vous le connaissez bien, puisque vous en avez-vous-même bénéficié. Peut-on connaître le montant de cette bourse ?
Je me souviens de mon premier salaire : 6 250 francs mensuels, en septembre 1981.
Vous avez parlé politique internationale. Pourriez-vous nous donner plus d'éléments sur la Chine, l'Inde, les pays émergents ? Je reste sur ma faim concernant la politique de communication. Quels sont précisément vos projets concrets ?
Dans l'économie mondialisée, la compétition se joue sur la recherche et l'innovation, particulièrement actives en matière de défense et dans le domaine spatial. Si les pays occidentaux sont les plus forts, nous sommes financièrement contraints ; que pèserons-nous demain face aux masses financières énormes de la Chine, de l'Inde ou du Brésil ? N'aurions-nous pas intérêt à prendre plus de risques, notamment en faisant plus appel aux fonds privés ? Des partenariats sont-ils possibles ? Il y a un monde entre ce que peut rapporter la recherche spatiale, et les 4,2 milliards qu'y consacre l'Europe...
Le satellite présenté dans le hall de l'aéroport de Nice Côte-d'Azur participe à la diffusion de la culture scientifique et technique, dont vous marquiez le souci.
Je ne m'étonne pas que votre candidature ait séduit, en dépit de son caractère atypique : vous ne venez pas d'une grande école de commerce ou d'administration, mais technologique, ce qui est assez réjouissant. Diplômé de l'Ecole supérieure d'optique en 1981, vous aurez certainement une vue acérée sur un certain nombre de problématiques. Vous avez également à votre actif 54 lancements successifs réussis : votre politique est fondée sur la qualité et sur l'exigence.
Les innovations portées par votre secteur sont-elles susceptible de retombées, propices à la réindustrialisation ? Jouerez-vous un rôle d'essaimage, comme cela se pratique facilement aux États-Unis ? En tant qu'élu de la technopole de Sophia-Antipolis, je suis particulièrement sensible à cette question.
Jean-Jacques Mirassou, avec Ariane 6, nous réduisons le coût d'accès à l'espace, et nous le faisons de façon totalement vertueuse : nous ne diminuons pas les budgets, nous fabriquons des lanceurs moins chers.
Le partenariat avec le secteur privé est possible dans certains secteurs seulement. Peu d'entreprises investiront dans les sciences de l'univers pour savoir s'il existe des exoplanètes ou pour connaître la fréquence de battement d'un pulsar. En revanche, le recours aux fonds privés est fréquent pour les applications grand public et améliore l'utilisation des ressources budgétaires de l'État, ainsi pour l'observation de la terre ou encore dans le domaine des lanceurs. Par conséquent, si je devais faire un tiercé, il faudrait privilégier les sciences de l'univers ; viendraient ensuite la terre, l'environnement, le climat, les télécommunications appartenant déjà au monde industriel.
La France joue un rôle moteur au sein de l'ESA. Concernant le programme Galileo, nous avions commencé à lancer, en coopération avec la Russie, deux satellites précurseurs, Giove-A et Giove-B, respectivement le 28 décembre 2005 et le 14 avril 2008. Depuis, nous avons lancé deux satellites IOV (in orbite validation) depuis la Guyane, les 16 octobre 2011 et en décembre 2012. Nous avons quatre satellites IOV et nous lancerons cette année les satellites FOC (full operational capability), avec Soyouz, deux satellites par deux, puis nous continuerons avec Ariane. Il nous reste 22 satellites à lancer : nous devrions atteindre 26 satellites en orbite fin 2014-début 2015. Galileo est un projet emblématique de l'Europe : comme souvent, le démarrage a été difficile, mais il ira à son terme.
Il est vrai, Gérard César, que sur le marché des satellites, la concurrence des pays émergents est souvent agressive. Des attaques commerciales d'État à État sont fréquentes. Quand la Chine propose des satellites clés en mains au Nigéria ou au Venezuela en échange de pétrole, ce sont autant de satellites en moins pour notre industrie.
Nous avons à accomplir un effort extrêmement important pour le développement des petits satellites à propulsion électrique, comme l'ont déjà fait les États-Unis. A l'entrée du colloque américain Satellite 2013, une gigantesque bannière publicitaire de Boeing proclamait « America is back ». Il est vrai que l'offre de plateforme à propulsion électrique, lancée par SpaceX fait du mal à nos industriels. Si je ne peux prendre ici d'engagement, il faudrait mettre en place l'Ariane 6 des satellites, c'est-à-dire un projet qui ne soit pas un projet de plus, mais quelque chose de différent. C'est ce que fait Boeing avec les plateformes à propulsion électrique. L'entreprise annonce aujourd'hui être en phase finale de négociation avec douze clients pour autant de plateformes : à l'évidence, elle offre quelque chose de plus, et nous devons faire de même. Nous avons relevé le défi avec Ariane 6 : faisons de même avec les satellites.
Je ne crains pas les transferts de technologie avec la Russie : le système de sécurité mis en place fonctionne. En revanche, la coopération ira-t-elle à son terme ? Quand elle a démarré, la Russie avait besoin de nous ; elle effectue désormais chaque année 22 lancements Soyouz.
Merci pour vos propos sur les bourses. Susciter des vocations est la meilleure façon de préparer l'avenir.
Roland Courteau, nous avons mis en place des coopérations avec la Chine, l'Inde et la Russie. Nous ne devons pas moins nous garder de tout angélisme : restons vigilants. Pour savoir ce que font les autres, rien ne vaut que le dialogue. Nous avons beaucoup appris en Guyane pour Ariane 6. Et à chaque fois que je vais en Inde, je reviens avec des idées nouvelles.
Je regrette que vous soyez resté sur votre faim à propos de communication. C'est un aspect que je veux renforcer, et j'aurai à coeur de vous rencontrer pour que vous nous disiez comment améliorer les choses. Dès ma nomination, je prendrai rendez-vous avec vous car votre expérience du terrain est précieuse.
SpaceX a été largement financée par le gouvernement américain, mais M. Musk a aussi accepté de miser 400 millions de dollars. Il va très probablement faire une culbute très intéressante, car on parle d'une introduction en bourse entre 2 et 4 milliards de dollars... Je doute que cela soit transposable en Europe, notamment du fait d'un fonctionnement différent des marchés boursiers, mais la délégation française a fortement incité l'ESA à développer des partenariats entre le public et le privé. Ce sera notamment le cas du programme Hylas, un satellite lancé en coopération avec l'opérateur britannique Avanti, d'Alphasat, préparé en coopération avec Inmarsat, et d'AG 1, développé avec Hispasat. Tous ces partenariats ont un effet multiplicateur bénéfique.
L'innovation est notre fil conducteur. Dans un contexte financier contraint, pour exister, il faut faire la course en tête. Dans de nombreux secteurs, c'est l'innovation qui fait la différence. Nous devons poursuivre nos efforts, et vous pouvez compter sur moi pour faire du CNES un exemple en matière d'innovation.
Il y a quelques années, le patron de l'ESA invitait à faire des choses folles, comme aller sur Mars... Faut-il être prudent dans le contexte actuel ?
Il faut se méfier, car nous sommes dans un secteur où la frontière est ténue entre l'échec et le succès : il n'y a pas de succès à 99,99 %... Avant tout, il faut faire des choses maîtrisées. Lorsque nous avons lancé Mars Express depuis Baïkonour, un groupe d'astronomes britanniques avait décidé de faire une folie. Ces passionnés avaient mis au point sur un coin de table un atterrisseur, Beagle, susceptible de descendre sur Mars. La navigation céleste ne s'improvisant pas, Beagle a été un échec retentissant, et a jeté une ombre passagère sur Mars Express. Même si la sonde européenne a connu un succès considérable en mettant en évidence la présence d'eau aux pôles de cette planète, j'en ai gardé un goût amer, car le grand enthousiasme des médias a fait pschitt quand l'atterrisseur a été perdu. Comptez-sur moi, en revanche, pour réaliser des choses qui sortent de l'ordinaire.
Quand Galileo sera opérationnel, vous aurez la meilleure et la plus large opération de communication !
Peut-on repérer, dans votre secteur d'activité, des innovations susceptibles d'alimenter la politique industrielle française ? Par exemple, toute avancée dans la filière photovoltaïque améliore la compétitivité pour les entreprises françaises.
Une filiale du CNES fait des transferts de technologie : je la connais bien pour l'avoir dirigée pendant trois ans. Lorsqu'on parle de Galileo aux chauffeurs de taxi, on leur explique que c'est le GPS européen. Mon ambition est que dans cinq ans, pour désigner leur GPS, les chauffeurs de taxi parlent du Galileo américain...
Je vous remercie pour la qualité et l'intérêt de vos propos.
Puis la commission procède au vote à bulletin secret sur la candidature de M. Jean-Yves Le Gall, candidat à la présidence du conseil d'administration du Centre national d'études spatiales (CNES).
Le résultat du vote figure dans le compte-rendu de la réunion de commission du mercredi 27 mars.
La commission procède ensuite à l'audition de Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement, sur le plan d'investissement pour le logement.
Le Président de la République a prononcé jeudi dernier à Alfortville, en présence de notre collègue Claude Bérit-Débat, un discours important sur le logement. Il a présenté un plan en vingt mesures, qui répond aux inquiétudes exprimées ici le 27 février dernier par les présidents de la Fédération française du bâtiment (FFB) et de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb).
Je me réjouis que Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement, nous présente les principales mesures de ce plan ainsi que le calendrier de sa mise en oeuvre. Je la remercie d'avoir choisi d'intervenir en premier lieu au Sénat. Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, concernée par la partie rénovation énergétique des logements était également conviée, mais elle n'a pas pu participer à cette audition, étant retenue par l'installation du Conseil national de la transition écologique.
Le Président de la République a annoncé que certaines des mesures seront mises en oeuvre par voie d'ordonnance. Malgré l'urgence, le Parlement n'est jamais très enthousiaste à ce sujet. Quel champ recouvreront-elles précisément ? Quand le Gouvernement déposera-t-il le projet de loi d'habilitation, et quand le Parlement l'examinera-t-il ?
Vous avez lancé en janvier une concertation en vue d'un vaste projet de loi sur l'urbanisme et le logement. Où en êtes-vous, quand le texte sera-t-il déposé et discuté au Parlement ? Pouvons-nous espérer qu'à l'instar des derniers textes sur le logement, il sera discuté en premier lieu au Sénat ? Ce serait une marque de reconnaissance.
Je vous remercie de l'attention que vous portez à ces dossiers. Vous évoquez la FFB et la Capeb : ce secteur porteur d'emplois durables et non délocalisables nécessite en effet un intérêt marqué parce qu'il connaît une situation délicate. En outre, il est lié à une question décisive pour nos concitoyens, celle du logement. Nous avons déjà évoqué ses difficultés : il y a ceux qui vivent en zone tendue et ne peuvent prétendre à un logement de qualité, ceux qui sont en situation de mal-logement et ceux qui ont besoin d'un hébergement.
Les chiffres de la construction sont mauvais, comme l'année dernière : dans ce domaine, nul ne peut en faire porter la responsabilité à tel ou tel. Les cycles de la construction sont durables et c'est sur le long terme que se vérifie l'efficacité des mesures que nous prenons. Les effets pervers de certains dispositifs fiscaux n'apparaissent qu'après coup, d'où ces immeubles vides dans certaines communes...
Le Gouvernement entend répondre à l'urgence et travailler aux réformes structurelles : vous avez opportunément rappelé deux dossiers, le plan d'investissement pour le logement présenté par le Président de la République à Alfortville la semaine dernière, et après la loi que vous avez votée à la fin de l'année 2012, le prochain projet de loi.
Ce plan d'urgence vise à déverrouiller simultanément un certain nombre de dispositifs pour donner un coup de fouet nécessaire en matière de normes, de financement et d'équilibre du parc. Le premier volet facilite les projets urbains et l'aménagement, notamment en raccourcissant les délais de procédure, en particulier en luttant contre les recours malveillants de type quasi mafieux. Certains n'hésitent pas à pratiquer une forme de racket : ils subordonnent à l'obtention d'une somme d'argent l'abandon des recours qu'ils déposent contre les permis de construire.
Le plan comporte la mise en place d'un géoportail de l'urbanisme : afin de faciliter le travail des professionnels du secteur, d'éviter par exemple à l'architecte de courir en mairie pour récupérer des plans locaux d'urbanisme (PLU), tous les documents d'urbanisme seront désormais en ligne, accompagnés d'une cartographie. Pour que ce portail fonctionne, il faut un dispositif législatif, d'où l'intérêt de recourir aux ordonnances : nous gagnerons entre six mois et un an.
Autre dispositif, le taux maximal de garantie d'emprunt pour les opérations d'aménagement va être assoupli, pour pallier le renchérissement des critères bancaires d'accès à l'emprunt.
Comme je l'ai dit à l'occasion de l'abrogation de la loi relative à la majoration des droits à construire, le travail sur la densification se poursuit, non seulement dans le cadre du projet de loi, mais également avec la transformation de bureaux vides en logement. Rien qu'en Île de France, 3 millions de mètres carrés sont concernés. Ces bâtiments sont construits sur des zones d'activité, et leur transformation ne pourra intervenir qu'après modification du PLU, un processus long qu'il convient d'accélérer notamment en zone tendue et à proximité des transports en commun, tout comme il faut revoir les obligations de parking qui créent une contrainte budgétaire insurmontable : pour transformer un immeuble de bureaux, on doit en effet aménager deux niveaux de sous-sol.
Nous voulons sécuriser les opérations en vente en état futur d'achèvement (VEFA) et faciliter la gestion de la trésorerie des entreprises du bâtiment, conformément à la demande répétée des professionnels.
Dans une logique de mixité, développer le statut du logement intermédiaire répondra en partie au débat sur l'augmentation à 25 % du plancher de logements sociaux dans les communes concernées par la « loi SRU ». Dans un premier temps, les communes pourront inclure dans leur programme local de l'habitat (PLH) la nécessité de construire ce type de logement. Ensuite, nous pourrons éventuellement travailler sur l'environnement législatif et fiscal.
Le rôle contracyclique des bailleurs sociaux mérite d'être affirmé. C'est pourquoi nous avons augmenté les aides à la pierre, nous souhaitons que les fonds propres des différents organismes soient mutualisés, et nous avons mobilisé un milliard d'euros supplémentaire d'Action logement, somme qui sera délivrée en même temps que les subventions d'État sur la surcharge foncière, c'est-à-dire de façon automatique et avec une instruction très rapide.
En outre, le Président de la République a annoncé que toutes les opérations de construction et de rénovation de logements sociaux livrables à compter du 1er janvier 2014 seraient soumises à une TVA de 5 %. Du fait du plafonnement des loyers, la capacité de l'Union sociale pour l'habitat (USH) à construire des logements dépend en effet du taux de consommation de fonds propres, opération par opération. La baisse du taux de TVA a un effet mécanique immédiat sur la consommation des fonds propres, et donc, sur la possibilité pour les organismes de construire davantage. La construction atteint aujourd'hui environ 100 000 logements alors que le Gouvernement s'est fixé un objectif de 150 000. Avec tous ces dispositifs, nous aurons les moyens de construire les 50 000 logements supplémentaires, qui représentent 85 000 emplois directs et semi-directs.
Au-delà de l'engagement du Gouvernement en faveur de l'emploi, le plan d'investissement par le logement est une traduction concrète des moyens que nous nous donnons pour atteindre nos objectifs.
Les décrets d'application de la loi relative à la mobilisation du foncier public seront publiés dans les semaines à venir. Nous avons souhaité une gouvernance efficace du plan de mobilisation et je suis personnellement certains dossiers. La fin des abattements pour durée de détention intervenant dans le calcul des plus values des terrains à bâtir, des friches commerciales et des logements inhabitables contribuera à la lutte contre la rétention foncière.
Pour simplifier l'activité des professionnels, il a été décidé un moratoire de dix-huit mois sur les normes nouvelles de construction. Cette pause aidera les professionnels à travailler sans risque en matière de qualité de construction. Nous avons également décidé de mettre en place l'autoliquidation de la TVA.
En ce qui concerne le grand chantier de rénovation énergétique sur lequel nous avons travaillé avec Delphine Batho, le Gouvernement entend tenir les engagements du Président de la République : 500 000 rénovations par an, dont 380 000 dans le parc privé, et 120 000 dans le parc social. A cette fin, nous élargissons les critères d'accès à la subvention pour la réalisation de travaux de rénovation thermique, qui concernera désormais les deux tiers des ménages français. Cette aide directe de 1 350 euros sera cumulable avec le crédit d'impôt développement durable (CIDD), mis en place en 2005 par le précédent Gouvernement et qui a montré son efficacité. Le CIDD sera redimensionné et cumulable avec l'éco-prêt à taux zéro (PTZ), que certifieront les entreprises certifiées Grenelle, ce qui débloquera certains dossiers. Pour simplifier l'accès au dispositif, nous mettons en place un guichet unique et un numéro vert.
J'ai également signé avec l'Agence nationale de l'habitat (Anah) une convention pour le recrutement de 1 000 ambassadeurs de la rénovation énergétique, au titre des emplois d'avenir et du service civique. Chargés d'aider les ménages victimes de précarité énergétique, en particulier les personnes âgées ou isolées, ils pourront s'appuyer sur un dispositif renforcé pour les personnes les plus modestes, pour lesquels la subvention pour les travaux de rénovation énergétique atteindra 3 000 euros.
La volonté du Gouvernement est de répondre à l'urgence, de façon cohérente avec les réformes de structure, tout en travaillant sur les règles d'urbanisme, l'articulation entre les différents niveaux de schéma, du PLU aux schémas régionaux, ainsi que sur la copropriété...
Les ordonnances s'imposent pour des questions de délais. L'objectif est, en effet, le dépôt du projet de loi sur le logement et l'urbanisme avant la fin du mois de juin. Le dépôt du texte devant l'Assemblée nationale ou le Sénat n'est pas encore arrêté. En revanche, le projet de loi d'habilitation sera examiné le 17 avril en Conseil des ministres. L'emploi des ordonnances est très contrôlé dans la Constitution de la Ve République. Le projet de loi d'habilitation sera détaillé. L'objectif n'est pas de contourner qui que ce soit, mais de répondre à l'urgence de la situation.
Pour ce qui couvre le projet de loi sur l'urbanisme et le logement, je rappelle que ce domaine intéresse particulièrement les collectivités territoriales et les territoires, dont le Sénat est le représentant.
J'en ferai part au ministre des relations avec le parlement ainsi que dans le dialogue avec le Premier ministre et le Président de la République.
Je tiens à saluer les mesures annoncées jeudi par le Président de la République. Ce véritable plan d'urgence était très attendu par les professionnels du bâtiment. Les présidents de la Capeb et de la FFB avaient insisté devant nous sur l'urgence des mesures à prendre. Je me réjouis de la forte implication du Président de la République, du Gouvernement et de vous-même, madame la Ministre. Après la première loi Duflot, dont j'ai été le rapporteur au Sénat, après la mise à disposition du foncier public, l'encadrement de l'évolution des loyers, des mesures d'incitation à la construction et le relèvement du plafond du livret A, ces mesures sont importantes à deux titres : d'une part, elles vont relancer l'activité du bâtiment, et, d'autre part, elles répondront à la très forte demande de logement social de nos concitoyens.
Le taux de la TVA n'avait jamais été abaissé à 5 %. Le précédent Gouvernement l'avait relevé de 5,5 à 7 %. Comme vous l'avez souligné, la baisse à 5 % correspond mécaniquement à un autofinancement par logement de 6 000 euros et représente 22 500 logements supplémentaires. Cette mesure était attendue par l'ensemble des personnes que nous avons auditionnées et la commission s'était engagée à plaider en sa faveur. Notre action a-t-elle été déterminante ? En tous les cas, le résultat est là, et je m'en félicite.
Les 1 350 euros de subvention attribués aux ménages moyens dans le cadre du plan de rénovation énergétique constituent également un bon outil pour relancer le secteur du bâtiment.
S'agissant de la mise en oeuvre de la loi sur la mobilisation du foncier, quand les décrets sur la décote seront-ils publiés? Nous aimerions également connaître la liste des terrains. Enfin, quel est le contour exact du pacte avec l'Union sociale pour l'habitat (USH) dont nous recevons demain le président ?
Parmi les dispositifs d'aide au logement locatif efficaces, le dispositif Scellier a pris fin en décembre 2012. Pour éviter le trou d'air dont se plaignent les professionnels de la construction, n'aurait-il pas pu cohabiter avec le vôtre pendant une période comme l'avaient fait les dispositifs Quilès et Méhaignerie ?
Une décote importante sur la vente de logements HLM aux propriétaires occupants dégagerait des fonds pour de nouvelles constructions : est-ce envisagé ?
J'ai bien noté la baisse de la TVA à 5 %. Or, les professionnels du bâtiment et plus particulièrement les professions artisanales sont inquiets du passage à 10 % de la TVA sur les travaux de rénovation dans le secteur privé à partir de janvier prochain. Qu'envisagez-vous en ce domaine ?
Après cet exposé très clair, nous saluons un grand nombre de mesures. Je me demande qui va payer pour la création du géoportail de l'urbanisme, une bonne idée, au demeurant. Où en est la réflexion sur la vacance ? Vous aviez dit que la création d'une taxe sur les bureaux vacants en dépendait. Nous regrettons que la baisse la TVA à 5 % de ne concerne que la rénovation thermique des logements sociaux et leur construction. Il eût été plus efficace d'inclure la réhabilitation dans son champ d'application.
Non : la TVA à 5 % concerne l'ensemble du logement social !
Vous nous le préciserez. Les professionnels attendaient sans doute une TVA à 7 % pour tout le reste.
Pourquoi n'avoir pas instauré, comme nous l'avions proposé, un prêt à taux zéro pour les offices HLM ? Ce serait une bonne mesure.
En matière foncière, nous avions notamment pensé à encadrer la valeur du foncier par un mécanisme spécifique et proposé de geler les coûts du foncier lorsqu'un projet d'aménagement est lancé, pour éviter les effets d'aubaine. Qu'en pensez-vous ?
Tout le monde s'accorde sur l'opportunité de créer un guichet unique. Il peut être financier, mais aussi technique, car ceux qui entreprennent des travaux de rénovation thermique ont besoin d'aide pour faire le tri dans les bons diagnostics. Quel statut auront les ambassadeurs de la rénovation énergétique et, dans quel cadre interviendront-ils ?
Vous avez décidé un moratoire sur les expulsions locatives jusqu'au 1er avril. Nous pensons qu'il faut le prolonger, sous réserve d'une indemnisation des propriétaires.
La fiscalité sur le foncier taxe moins ceux qui retiennent le plus longtemps leur bien. Il faut faire le contraire ou asseoir la taxe sur la valeur vénale du bien, comme dans les pays nordiques.
Je voudrais d'abord m'associer à vos deux premières questions M. le Président : le Sénat mérite que ce débat vienne d'abord dans notre hémicycle. Ce plan d'urgence est annoncé quelques semaines après la loi sur le logement, censée assurer la construction de 500 000 logements par an dont 150 000 logements sociaux. J'avais prédit que vous n'y parviendriez pas, car les collectivités locales ne peuvent emprunter à des taux acceptables, et parce que les opérateurs privés connaissent aussi des difficultés, malgré des taux très bas. Le plan a néanmoins le mérite d'exister et d'apporter des réponses aux préoccupations que nous avions exprimées : endiguer la multiplication des recours, supprimer les incitations fiscales à la rétention des terrains, appliquer un moratoire normatif. Toutefois, le temps de la construction n'est pas celui de la communication : la machine à construire des logements ne repartira pas de sitôt, sans parler de la crise dans laquelle nous sommes.
D'après Les Echos du 22 mars dernier, l'État britannique a accordé sa garantie à 133 milliards de livres d'emprunts immobiliers pour relancer la machine. Cette mesure, qui devrait fonctionner, est sans impact sur le déficit et l'endettement publics... Par comparaison, votre plan mobilise 400 millions d'euros à destination des seuls organismes HLM. Baisser la TVA, d'accord, mais que fait-on pour résoudre les difficultés de financement ?
J'ai déjà attiré votre attention à deux reprises, lors des débats du 9 novembre et du 17 décembre 2012, sur les garanties d'emprunt nécessaires aux opérateurs HLM pour accéder aux crédits accordés par la Caisse des dépôts et consignations et les autres banques. Elles sont difficiles à obtenir, car les organismes de notation les traitent comme des dettes. Beaucoup de collectivités territoriales ont ainsi réduit leur taux de garantie d'emprunt. Or l'argent vient du livret A, qui est garanti par l'État : pourquoi imposer une double garantie ? Dans la communauté d'agglomération de Perpignan, nous avons dû baisser le taux de garantie, et les autres collectivités ont accru leur participation. Pour atteindre les 20 % de logement sociaux, ma commune, dont l'encours de dette représente 8 millions d'euros, conduit un unique programme de 13 millions d'euros : j'en garantis 60 %, la communauté d'agglomération 40 % - vous mesurez les difficultés posées par les ratios définis par la loi Galland. Cette dernière mériterait d'être revue.
La loi du 18 janvier 2013 impose aux communes un objectif triennal de production de logements locatifs sociaux sur la période 2011-2013. Il semble que les services de l'État y ajoutent un objectif portant sur les trois derniers trimestres de 2013. Ces objectifs sont-ils confondus ou complémentaires ? L'enjeu est de taille puisqu'à défaut de les respecter les communes verraient leur pénalité multipliée par cinq. Est-ce exact ?
Le retour de la TVA à 5 %, enfin !, s'appliquerait à tous les programmes livrables au 1er janvier 2014. Or dans votre conférence de presse, vous aviez laissé entendre que la mesure ne s'appliquerait qu'à compter de cette date. Dans ce dernier cas, les organismes HLM ne seraient pas pressés de construire... Qu'en est-il réellement ?
Le premier décret relatif à la mobilisation du foncier public de l'État sera publié avant la fin du mois de mars. Deux autres seront publiés avant la fin mai sur les établissements publics, puis sur les établissements publics de santé. Les premières cessions seront possibles dans les tous prochains jours. La circulaire a déjà été envoyée aux préfets qui gèreront la liste au niveau départemental, la centralisation qui avait prévalu auparavant ayant montré ses imperfections... Le cas échéant, nous examinerons au niveau central le souhait d'une collectivité d'ajouter un terrain à la liste pour mener à bien un projet.
Le pacte avec l'USH sera finalisé avant la mi-mai. Le dialogue progresse. Il comprendra un premier volet patrimonial, précisant les engagements de l'État et des organismes HLM destinés à produire des logements neufs conformes aux engagements du Président de la République et répondant aux défis du développement durable notamment en matière de rénovation thermique - la TVA à 5 % concerne l'ensemble des travaux dans le logement social, madame Schurch.
Le volet social favorisera l'accueil des plus démunis, ainsi que des personnes prioritaires au titre du droit au logement opposable (Dalo), pour lesquelles une meilleure implication des bailleurs sociaux sera requise territoire par territoire. Nous travaillons en outre avec Najat Vallaud-Belkacem à une offre spécifique de logement à l'attention des femmes victimes de violences. Nous veillerons enfin à adapter les loyers aux services rendus, aux besoins des plus défavorisés ainsi qu'à améliorer le service rendu aux locataires.
Le troisième et dernier volet du pacte concerne le pilotage : la coopération entre les organismes sera améliorée, certains objectifs des conventions d'utilité sociale renégociés, et le suivi de la mise en oeuvre des engagements du pacte formalisé. La mutualisation des fonds propres a déjà fait l'objet d'un engagement du comité exécutif de l'USH.
Le dispositif Scellier a démontré ses lacunes, ses insuffisances et son coût. Nous avons assuré trois mois de tuilage avec le nouveau dispositif, dont les professionnels commencent à voir l'intérêt. Il a été ouvert au patrimoine ancien afin que celui-ci puisse être remis sur le marché en centre-ville.
La question de la vente du parc HLM ne se pose pas qu'en termes de rentrées financières. Dans certaines zones comme le sud de la France, des copropriétés datant des années 1980 se dégradent rapidement, faute de rénovation. Ne fabriquons pas des futures copropriétés dégradées. Quand les locataires qui achètent n'ont pas les moyens de rénover des passoires thermiques, la tentation est grande de se tourner vers le bailleur, qui reste propriétaire d'une partie des logements.
Un groupe de travail dédié réfléchit aux nouveaux taux de TVA. En matière de rénovation thermique, nous avons fait le choix de nous tourner vers les ménages. Grâce à la TVA à 5 %, 10 000 logements sociaux supplémentaires seront rénovés. La prime de rénovation, elle, déclenchera la rénovation de plus de 100 000 logements du parc privé dès 2014. Mise en oeuvre dans les semaines à venir, elle contribue au caractère très incitatif du plan.
Le géoportail sera mis en oeuvre sous l'égide de l'État. Les documents sont déjà numérisés, il n'y a donc pas de coût supplémentaire à anticiper. Ne manquent à ce stade que l'interface avec le dispositif national, et le choix du référentiel : le cadastre ou celui de l'Institut géographique national ? C'est affaire de volonté, non d'argent.
Nous ne sommes pas au bout de nos réflexions sur la transformation des bureaux en logements et l'identification des vacances. Nous avons choisi d'inciter les bailleurs sociaux à acquérir ces immeubles. Les bureaux des années 1970 et 1980, plus faciles à transformer en logements, n'ont pas de parkings en sous-sol et leur mise aux normes est onéreuse. Simultanément, dans le cadre de la future loi, nous réfléchissons à une taxation des bureaux. Les propositions en ce sens sont les bienvenues.
Le Président de la République l'a annoncé, l'éco-prêt logement social aura un taux de 1 % : on peut difficilement faire mieux. Les travaux de rénovation auront un impact significatif sur l'activité et pour les locataires.
Je signerai prochainement la lettre de mission du Conseil général de l'environnement et du développement durable, qui me semble l'instance la plus à même de réfléchir sur l'encadrement du coût du foncier.
L'instauration du guichet unique est décisive. En la matière, la mobilisation de tous est indispensable. Deux maisons identiques construites dans les années 1960 peuvent coûter l'une 4 500 euros de chauffage au fioul par mois, l'autre 2 000 euros, car mieux isolée et dotée d'une pompe à chaleur et d'un chauffe-eau thermodynamique, soit 200 euros d'économie par mois. Autre exemple : dans une maison de 100 mètres carrés avec une extension de 50 mètres carrés, un changement de chaudière peut faire baisser le coût de chauffage de 30 %. L'efficacité se traduit en espèces sonnantes et trébuchantes.
Entre 15 000 et 17 000 euros dans le premier cas, ou 1 200 euros au mètre carré pour l'extension.
Nous avons prolongé de quinze jours la trêve hivernale des expulsions locatives. Le 26 octobre, j'ai signé avec Manuel Valls, ministre de l'Intérieur, la circulaire rendant le recours de la force publique impossible pour les expulsions des personnes reconnues prioritaires au titre du Dalo. Nous travaillons simultanément sur la garantie universelle des loyers, qui facilitera l'accès au logement, sécurisera les propriétaires en leur versant le montant du loyer dès le premier mois d'impayé, et identifiera précocement les difficultés sociales. Les mécanismes existants ne sont pas utilisés faute d'une bonne connaissance des situations.
François Calvet, je ne crois pas avoir dit que la loi que vous avez votée remplirait immédiatement l'objectif de 500 000 logements par an... Je crois néanmoins que notre action y contribue.
Je suis sensible à la situation britannique. Toutefois, notre problème réside moins dans la difficulté de garantir les emprunts que dans le niveau des prix immobiliers nourri par les crédits d'impôt, ou l'accès au logement des populations en difficulté, femmes seules ou familles monoparentales. Votre question sur les garanties d'emprunt me surprend, car la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) ...
n'est pas difficile à mobiliser.
Le mécanisme de sanction voté pour 2013 ne prendra pas en compte les objectifs triennaux 2011-2013. Les deux précédentes années seront évaluées au titre de la loi précédente.
Les chiffres que vous donnez sur la performance énergétique invitent à faire un rapide calcul. Prenons un investissement de 17 000 euros sur 15 ans, emprunté en totalité. A un taux de 1 %, le remboursement s'élève à 20 000 euros. Vous parlez d'une économie mensuelle de 200 euros sur la facture énergétique, quand le remboursement mensuel n'est que de 133 euros : le différentiel est positif.
Le scenario sur lequel nous travaillons implique l'intervention d'un tiers financeur, qui se rembourserait sur les économies d'énergie réalisées.
Toutes ces dispositions témoignent d'un indéniable souci d'efficacité, surtout en direction des publics les plus fragiles et des ménages. Il faudra toutefois étudier leurs conditions d'emprunt auprès du secteur bancaire. L'industrie du bâtiment n'est pas oubliée : la pause normative était attendue, et la TVA à 5 % est bienvenue. Si la chambre haute avait été écoutée, nous aurions gagné trois mois. Mieux vaut tard que jamais.
En matière de zonage du dispositif Duflot, les préfets devraient pouvoir tenir compte des spécificités locales : 26 % du parc locatif de Saint-Nazaire est social ; la ville se dirige vers les 30 % dans les différents programmes, qui tous comprennent du locatif social et de l'accession à la propriété. Il était souhaitable que le dispositif Duflot soit applicable. Curieusement, Saint Nazaire est passé en zone B2, alors que les industries navales et aéronautiques ainsi que l'attraction du littoral vont augmenter la demande de logements. Peut-on donner plus de souplesse au dispositif, et proroger le mécanisme jusqu'en juin 2016 ?
Les économies d'énergie constituent le principal gisement d'énergie et d'emploi en France, je le confirme en ajoutant que leur donner la priorité est une excellente initiative.
Quelles précisions pouvez-vous nous donner sur le redimensionnement du CIDD ? On avait trop réduit le champ d'application de cet instrument intelligent. Qu'il soit cumulable avec l'éco-prêt à taux zéro est une très bonne chose.
La précarité énergétique est un vrai problème. L'extension des tarifs sociaux et de la période de trêve hivernale sont prévues par la loi de transition énergétique, examinée en ce moment par le Conseil constitutionnel. L'accompagnement des ménages est indispensable. Vous avez annoncé 1 000 ambassadeurs de la rénovation énergétique pour faciliter la rénovation énergétique des logements passoires : rapporté au nombre de départements, cela vous paraît-il suffisant ?
Dans mon département, le marché n'est pas tendu, il est hyper tendu. Voilà un frein économique et une source de drames humains. Merci et bravo pour les mesures que vous nous annoncez.
Que peut-on imaginer pour simplifier les procédures administratives ? Dans mon département, l'application simultanée des lois « Montagne » et « Littoral » aboutit à des situations intenables. Dans certains secteurs, la révision des plans de prévention des risques d'incendie de forêt est bloquée, révision générale des politiques publiques (RGPP) oblige. Donnez des consignes au préfet pour qu'on puisse très rapidement libérer des terrains par des procédures administratives. Aujourd'hui, l'avis de l'architecte des bâtiments de France est réputé favorable au bout de deux mois ; comme il est débordé, nous attendons... et nous perdons un mois de plus que par le passé. Autre exemple : celui d'une zone d'aménagement concertée de 100 000 mètres carrés de surface hors oeuvre nette (SHON) finalisée au bout de quatre ans de bagarre, et dotée de toutes les études environnementales et d'impact nécessaires ; le jour du dépôt du permis de construire, le changement du régime des zones commerciales supérieures à 40 000 mètres carrés SHON oblige le pétitionnaire à refaire l'étude environnementale... Si nous pouvions éliminer de telles absurdités du droit positif par ordonnances, nous gagnerions du temps.
La vente du parc HLM est un bon outil de promotion de la mixité. En effet, le parc des années 1970 vieillit et se paupérise à mesure que les habitants les plus aisés s'en vont. La seule réponse que nous avons pu apporter à ce jour est la vente du patrimoine. En contrepartie, il serait bon d'effectuer des travaux et une rénovation énergétique de ces bâtiments, faute de quoi les copropriétés se dégraderont. Autre point que je souhaite voir figurer dans les procédures sur lesquelles vous travaillez : une charte fixant les montants de la décote en contrepartie des rénovations réalisées et instaurant des clauses anti-spéculatives avec un droit de préemption pour le bailleur ou la collectivité. Je tiens une note plus détaillée à votre disposition.
Votre programme de rénovation énergétique des bâtiments suppose que les entreprises soient au rendez-vous, dans le BTP comme dans les industries d'appareillage (pompes à chaleur, hélices, etc.). Un travail de fond doit être mené avec le ministère de l'éducation nationale et celui de la formation professionnelle pour que les entreprises forment des gens à ces nouveaux métiers. Il serait opportun de créer un label spécifique pour éclairer les consommateurs, car les personnes âgées ou modestes sont trop souvent victimes d'arnaques.
J'ai participé à l'inauguration d'un lotissement mis à disposition par un organisme HLM, bien conçu et bien réalisé. Celui-ci s'est vu refuser le label « bâtiment basse consommation » parce que le chauffage n'était pas au gaz mais électrique. En milieu rural, le raccordement au gaz n'est pas toujours aisé. Quant j'ai interrogé le président d'Habiter mieux, il avait convenu que le balancier était allé trop loin.
Ces mesures sont toutes importantes et efficaces, notamment l'abaissement de la TVA à 5 % pour le logement social. Nous étions nombreux à plaider pour - cela nous avait été reproché. Ces mesures auront une double efficacité : sur la construction de logements et sur la relance d'une activité non délocalisable. Elles pourraient s'accompagner d'incitations pour que les maîtres d'ouvrage fassent bénéficier la population locale et les petites entreprises, par exemple en y insérant des clauses sociales dans les appels d'offres, et en invitant à allotir les marchés.
Votre détermination devant l'urgence est une excellente chose. D'habitude, face aux promesses, on attend de voir. J'ai souvenir d'une soirée difficile en séance l'année dernière, lors du débat relatif à la TVA sur le logement social : vous aviez alors promis que les choses seraient rétablies dès 2013 : c'est le cas, et j'en suis satisfait.
En zone B2, il y a des territoires dotés d'un PLH dans lesquels l'application stricte des dispositions du dispositif Duflot sur les secteurs les plus tendus aura des effets injustes, notamment dans les communes de première couronne où le marché est moins tendu. Cap Lorient demande que l'ensemble du territoire couvert par le PLH soit pris en compte et propose que 50 % des logements, et non pas 80 %, profitent du dispositif. Est-ce possible ?
Enfin, un maire élu en 2008 doit gérer un grand retard en matière de logement social. En 2013, en dépit de tous les efforts réalisés, les pénalités infligées à la ville s'élèvent à 50 000 euros. Y a-t-il une possibilité de s'y soustraire ?
Ce n'est pas possible. Pour autant, les subventions apportées sont déductibles des pénalités.
Le secteur du bâtiment connaît d'importantes difficultés, alors même que nous avons un grand besoin de logement social. Il est difficile d'accéder à des logements de qualité dans les zones tendues, mais également dans les zones moins tendues, notamment les zones rurales. La TVA à 5 % s'appliquera-t-elle à la rénovation de l'habitat dans les zones peu denses ? Le logement social, c'est aussi celui de petits propriétaires qui n'ont pas les moyens de faire des travaux. Il serait bon de prendre en compte le niveau de revenu des propriétaires dans la définition du logement social.
Dans quelles structures les ambassadeurs de la rénovation énergétique exerceront-ils ? Je rejoins enfin Jean-Claude Lenoir sur la nécessité de former des personnes à ces nouveaux métiers.
Nous poserons demain la question de l'hébergement des ambassadeurs à Dominique Braye. L'Anah me semble la structure la plus indiquée.
Le logement d'urgence est une préoccupation forte pour tous les élus. En la matière, tous les acteurs se renvoient les responsabilités, et cela se termine souvent par une occupation illicite de locaux qui gêne tout le monde. Où en est la réflexion sur ce point ?
Tout ce que fait la ministre est excellent. Les entreprises du BTP dépendent de la commande publique, qui elle-même dépend des collectivités territoriales. Elles sont donc désemparées. Or dans certaines zones rurales où l'économie est peu différenciée, elles composent l'essentiel du tissu industriel, car il n'y a pas d'entreprises de services. Que pouvez-vous imaginer pour les aider ?
Je vais d'abord répondre à Yannick Vaugrenard et Joël Labbé pour ce qui concerne Saint-Nazaire, Vannes, Lorient et le club des B2. Des élus nous disent que des opérations Scellier font concurrence aux logements sociaux : certains propriétaires n'arrivant pas à trouver des locataires et craignant de perdre leurs avantages fiscaux louent à n'importe quel prix. Pour l'avenir, nous allons veiller à construire des logements plutôt que de réaliser des opérations de défiscalisation. Toutes les communes B2 sont éligibles au dispositif jusqu'au 30 juin. D'ici là, les préfets pourront, pour qu'il n'y ait pas d'effet couperet, accorder des dérogations jusqu'au 31 décembre. Pour Lorient, Joël Labbé, vos propositions sont fort intéressantes mais difficiles à mettre en oeuvre. Nous préférons nous reposer sur l'observatoire des loyers qui proposera des critères précis pour mener à partir du 1er janvier 2014 une politique du logement fine et réactive, sans référence à des zonages.
Nous réfléchissons à la possibilité d'agréer chaque opération : parfois sur certains territoires, une ou deux opérations sont nécessaires, pas davantage. Une telle politique est cependant délicate à réaliser, car il ne s'agit pas de conventionner des logements sociaux, mais de réguler les choix d'opérateurs privés. Le zonage a montré ses limites et il a un indéniable effet de frontière. C'est pourquoi nous travaillerons sur la territorialisation de la politique du logement.
Roland Courteau m'a interrogé sur le redimensionnement du CIDD : les bouquets de travaux seront privilégiés, pour une plus grande efficacité. Deux tiers des Français peuvent cumuler Eco-PTZ, prime et CIDD : les classes moyennes en bénéficieront.
Le Gouvernement est déterminé à lutter contre la précarité énergétique grâce à l'augmentation de la prime et à la création d'ambassadeurs de la rénovation énergétique. L'Anah financera la formation des mille ambassadeurs, qu'ils soient rattachés aux collectivités ou à ses propres opérateurs, pour travailler avec les communes et les centres communaux d'action sociale qui sont les plus à même d'identifier les ménages en difficulté. Embauchés au titre des emplois d'avenir ou du service civique, ces ambassadeurs acquerront une véritable formation professionnalisante.
Marc Daunis s'est étonné des multiples études d'impact demandées pour les zones d'aménagement concerté (ZAC), qui sans rien apporter, sauf à certains bureaux d'études, ralentissent le traitement des dossiers. Comme rien ne sert d'empiler les dispositifs, les ordonnances proposeront des déclarations de projets, pour mettre en ligne un certain nombre de règles et éviter la révision des PLU. Certaines collectivités ont en effet tendance à rendre urbanisable une grande partie de leur territoire, y compris agricole, pour éviter de réviser leur PLU au cas où certains projets verraient le jour. Je préfère que l'on protège les zones agricoles mais que les PLU soient plus facilement révisables pour des constructions de logements.
Il est extrêmement difficile pour un ministre d'aller à rebours des dispositions en vigueur pour les risques sismiques, d'incendie, d'inondation ou de submersion marine. Que se passerait-il si un incendie survenait dans une commune dont le plan de prévention des risques naturels prévisibles d'incendies de forêts (PPRIF) aurait été revu à la baisse ? Je suis prête à étudier des situations particulières, mais je n'écrirai pas aux préfets d'alléger les plans de prévention.
Je ne demande pas la révision des plans, mais un peu de bon sens : les investissements pour qu'une zone en B0 devienne constructible, et qu'on crée une piste périmétrale au préalable interdisent de fait tout projet de logements sociaux. Dans les Alpes-Maritimes, des dossiers sont en souffrance et on trouve des zones classées en PPRIF qui ne sont même pas boisées.
Le concept de forêt non boisée est original. N'hésitez pas à me solliciter sur les forêts virtuelles : je regarderai le dossier avec beaucoup d'intérêt... Vous avez dit des choses très justes sur les ventes d'HLM qui devaient, selon mon prédécesseur, accroître la trésorerie des organismes HLM. Pour moi, la vente des logements HLM ne répond pas à la problématique. Inutile de multiplier les copropriétés en difficulté.
Comme l'a dit Jean-Claude Lenoir, la formation est importante, aussi y travaillons-nous dans le cadre du Feebat. Je souhaite que les entreprises labellisées Grenelle ou ECO Artisan, bénéficient d'un statut différent. La certification Eco-PTZ implique une responsabilité professionnelle, car ces entreprises deviennent garantes de la qualité et de l'efficacité énergétiques des travaux qu'elles réalisent.
Le label BBC (bâtiment basse consommation) implique une consommation d'énergie primaire de 50 kw/h par mètre carré et par an. Quoique plus sévère pour l'énergie électrique qui a un moins bon bilan thermique, ce label ne favorise aucune énergie. Une révolution copernicienne de la construction est nécessaire, tant pour les matériaux que pour la pose qui doit être irréprochable afin de réduire la perméabilité à l'air, même si les ventilations mécaniques contrôlées (VMC) double flux sont indispensables. Il faut bien poser les fenêtres, les portes et supprimer les ruptures de pont thermique.
Comme l'a dit Alain Bertrand, une prime à l'expérience serait bienvenue. Elle favoriserait les PME plutôt que les entreprises à taille variable qui recrutent des personnels non formés. La certification doit-elle être attribuée aux entreprises ou aux salariés ? Nous allons poursuivre la réflexion avec les professionnels sur cette délicate question, mais nous voulons favoriser les entreprises qui forment et qui gardent leurs salariés. Vous avez eu raison de m'alerter sur les démarchages pour de nouvelles fenêtres qui n'ont pour seul résultat que d'endetter des familles. Je suis également sensible, Claude Dilain, à la question de l'allotissement des marchés et de la clause sociale. Nous allons l'intégrer, même s'il faut tenir compte du code des marchés publics.
Le logement d'urgence est une compétence d'État, Jean-Jacques Mirassou, qui doit être partagée par les collectivités locales et par les bailleurs. Il est urgent de décloisonner les mondes de l'hébergement d'urgence, du logement social, voire du logement classique. Il y a des partenariats entre des agences immobilières privées et des lieux d'hébergement. Certaines personnes, comme des réfugiés, restent en logement d'urgence alors qu'elles pourraient être logées dans de meilleures conditions si la transition était bien gérée par les professionnels qui ont tendance à ne bien faire leur travail que dans leur lieu d'accueil.
La politique du logement impose à la fois modestie et pragmatisme : il n'y a pas de solution magique. Pour certains, une augmentation de la marge des promoteurs serait une bonne nouvelle ; telle n'est pas ma conviction. Je crois en revanche qu'il faut de la mixité, du logement intermédiaire, mais aussi de l'investissement privé pour sortir de cette crise difficile. Je continuerai à travailler d'arrache-pied sur ces dossiers, et il est extrêmement réconfortant de pouvoir compter sur votre mobilisation.
Merci de ce langage direct. Notre commission est à votre disposition et nous espérons que vous nous réserverez la primeur de votre projet de loi.